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Internet et la synthèse collective des goûts

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1. ces cat gories nouvelles de l infra esth tique constitutives d une esth tique du pauvre Ibid p 68 5 Cf l article de Marie Th r se Chedeville auteur du livre J ebay j ebay pas 2006 dans Le Journal du Net http www journaldunet com magazine chat retrans 061005 _chedeville shtml Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 16 ench sser les avis et commentaires dans des dispositifs de confiance les rendant fiables ou au moins plus cr dibles Un syst me courant est celui pratiqu par exemple sur des sites de critiques de films consistant noter les avis en subordonnant la note une inscription pr alable et leur donner la possibilit de se raconter bri vement sur des pages personnelles Les jugements sont authentifi s par des valuations apport es par les autres consommateurs ce qui constitue un autocontr le et une gouvernance communautaire des sites web Une sorte d authenticit paradoxale s est d velopp e en particulier avec le d veloppement d Internet et de ses capacit s de diffusion l uvre qui se pr te la variation rend authentique son sch ma son style son univers Le go t de la variante peut venir de l uvre elle m me comme l atteste une bonne partie de la production culturelle d aujourd hui chaque uvre initie une suite de suites de variantes et de sequels Le go t du consommateur de s ries de t l vision par exe
2. 10 2 3 Le go t et l action la pratique artistique eeeeeeeeeeeereeieesrnesinesinstrtnstnsstnnnnnnsrnnstnnnnnnnnnn nt 12 3 Le bon go t et la recherche de l authentique ss 13 8 1 Le go t de l authentique le charme et le presque rien 14 3 2 Le go t de la circulation marchandage et occasions 15 3 3 Le go t de la copie variantes et participation sseseeeseeeseeereeeesnesiesrnssiestnnsnnnsnnnrnesnnne 15 4 La culture ou le go t du SYMbOIe iii 16 4 1 Le jugement esth tique le go t de l ambigu t essesssesiesssessiesnesresrnesrissrinsnnssnnsrnsernnt 17 4 2 L conomie symbolique de l utile au culturel 18 4 3 Internet et les collectifs pist miques et esth tiques 20 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen Internet et la synth se collective des go ts II y a diff rence entre le go t qui nous porte vers les choses et le go t qui nous en fait conna tre et discerner les qualit s en s attachant aux r gles on peut aimer la com die sans avoir le go t assez fin et assez d licat pour en bien juger et on peut avoir le go t assez bon pour bien juger de la com die sans l aimer La Rochefoucauld R flexions diverses X Des go ts Le go t est un concept ambigu Comme la citation en pigraphe le rappelle le go t peut d signer la reconnaissance
3. Gabriel Tarde and the end of the social in Patrick Joyce ed The social in question New Bearings in the history and the social sciences Londres Routledge 2002 Lazzarato Maurizio 2002 Puissances de l intervention la psychologie conomique de Gabriel Tarde contre l conomie politique Paris Seuil 2002 7 Dans Les Lois de l imitation p 64 Tarde crit ainsi Toutes les similitudes qui s observent dans le monde chimique physique astronomique atomes d un m me corps ondes d un m me rayon lumineux couches concentriques d attraction dont chaque globe c leste est le foyer etc ont pour unique explication et cause possible des mouvements p riodiques et principalement vibratoires Toutes les similitudes d origine vivante du monde vivant r sultent de la transmission h r ditaire de Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 10 explique l expansion des langues religions proc d s techniques us et coutumes L influence de limitation sur les go ts est cependant particuli rement forte et Tarde fait deux constatations D une part il remarque que plus une pratique correspond un haut degr de civilisation et donc ici de culture plus elle chappe aux bords troits o la servitude des besoins corporels enserrait son d veloppement et d s lors plus le poids de l imitation est pr dominant par rapport celui de l utilit D autre part parce qu ils
4. clairer les choix d autres consommateurs ou les conseils visant aider la mise en uvre d un produit complexe Il s agit plut t de cette immense conversation dont parlait John Perry Barlow dans sa d claration d ind pendance du Cyberespace une conversation qui permet les changes marchands l entraide entre consommateurs mais surtout la formation d une mosa que de cultures Une conversation toujours menac e par le banal l inutile et le violent Conclusion Pourquoi est ce que j appr cie ce que j appr cie Pourquoi ai je achet tel ou tel produit Pourquoi tel genre de film me pla t il tout particuli rement On a vu dans la partie 1 que l conomie du bien tre s interdit absolument de poser cette question et donc de comparer politiques de formation et politiques de satisfaction des go ts des consommateurs N au 18 si cle dans une Europe lasse des guerres de religion l utilitarisme est un individualisme tol rant un h donisme inconsistant Que la soci t me permette de satisfaire mes caprices et que je reste aveugle leur cause Tout jugement de valeur sur les go ts est proscrit or il est certain que les go ts s acqui rent L ducation la formation l influence sociale forment le scotome scintillant de la 72 Voir Barlow John Perry 1996 A Declaration of the Independence of Cyberspace http homes eff org barlow Declaration Final html Internet et la synth se collective des go ts
5. puis plus vague partir d assonances plus l ches faisant jouer un plus grand r le l intuition dans l ensemble des souvenirs l vocation Bien que la qualit esth tique ainsi d finie soit verticale un moment donn dans une culture donn e une uvre finit par perdre son caract re tonnant une fois qu elle a r ussi modifier les routines du public Les uvres des civilisations loign es dans la mesure m me o elles sont surprenantes 53 Emmanuel Kant Critique de la facult de juger 1790 Garnier Flammarionn 2000 Au paragraphe 1 7 Kant crit En ce qui concerne l agr able chacun consent ce que son jugement qu il fonde sur un sentiment personnel et priv et en vertu duquel il dit d un objet qu il lui pla t soit du m me coup restreint sa seule personne C est pourquoi s il dit Le vin des Canaries est agr able il admettra volontiers qu un autre le reprenne et lui rappelle qu il doit plut t dire cela est agr able pour moi et ce non seulement pour ce qui est du go t de la langue du palais et du gosier mais aussi pour ce qui peut tre agr able aux yeux ou l oreille de chacun 54 Le titre du paragraphe 1 6 de la Critique de la facult de juger est Le beau est ce qui est repr sent sans concept comme l objet d une satisfaction universelle Au paragraphe 1 40 Kant crit C est seulement lorsque l imagination dans sa libert veille l entendement et que celui ci sans
6. En effet lorsque le travail d centralis chez le consommateur se complique les changes qui ont lieu sur le march portent sur des produits et des services complexes et les flux d informations entre utilisateurs d taillants producteurs et innovateurs deviennent essentiels au bon fonctionnement de l conomie Ceci est d autant plus vrai que le sous algorithme de production que le consommateur doit mettre en uvre est suffisamment nouveau pour lui et imbriqu de fa on intime au sous algorithme mis en uvre par les producteurs Trois types principaux de couplages peuvent ainsi tre distingu s le couplage serr ou codifi le couplage adaptatif et le couplage culturel Dans le cas du couplage codifi les deux sous algorithmes sont rigidement coupl s ce qui n est pratiquement possible que dans le cas o il n y a ni volution de l algorithme d ensemble ni adaptation n cessaire entre les parties Les changes entre les entreprises productrices et les utilisateurs peuvent alors tre cod s les messages ne sont pas ambigus et n ont pas faire l objet d lucidations I n y a pas dans ce cas de probl me de m tarepr sentation les modes d emploi des produits par exemple ne posent pas de questions aux utilisateurs les usages r els se confondent avec ceux qui taient imagin s lors de la conception des produits Le choix des consommateurs se r sume une sorte de proximit go ts horizontaux ceux ci par essais et erreu
7. dans de tels collectifs r side principalement dans les processus cognitifs mis en jeu il s agit pour chacun de s interroger sur la signification des productions des autres participants l ensemble de ces commentaires probl matiques construisant une culture dans la mesure m me o ils ne sont pas compl tement claircis et interpr t s Selon le collectif en ligne consid r les participants traitent des corpus diff rents dans les communaut s de pratique il s agit des m andres de l lucidation plus ou moins convergente des questions pratiques pos es la cantonade par les n ophytes dans les communaut s d exp rience il s agit du commentaire infini des avis des conseils des critiques et des critiques sur les critiques etc De tels corpus peuvent aussi tre trait s symboliquement dans ces conditions les participants consid rent que les messages qui constituent le corpus sont peut tre impertinents mais qu ils valent cependant la peine d tre trait s comme des points de d part la r flexion ou la r verie Si l on veut rendre compte du succ s des collectifs du web 2 0 par exemple les r seaux de blogs ou les sites comme Twitter Flickr ou YouTube qui ouvrent de multiples forums de commentaires les cadres conceptuels des communaut s de pratique ou des communaut s d exp rience s av rent souvent insuffisants En effet les commentaires des internautes d passent largement les avis et critiques ayant pour but d
8. diagnostic traitements Economica Paris 1999 Wenger op cit Cohendet Patrick et Patrick Llerena 1999 La conception de la firme comme processeur de connaissances Revue d Economie Industrielle Num ro Sp cial Economie de la connaissance Vol 88 2 trimestre 1999 pp 211 236 Voir aussi Curien et alii op cit 70 Conein op cit aussi Auray 2004 op cit 71 Kollock amp Smith op cit voir aussi Chevalier Judith and Dina Mayzlin 2003 The Effect of Word of Mouth on Sales Online Book Reviews working paper ES 28 1 MK 15 http ssrn com abstract 432481 voir aussi Bourreau Marc et Michel Gensollen 2004 Communaut s d exp riences et concurrence entre sites de biens culturels Revue d Economie Politique Num ro March s en ligne et communaut s d agents mars 2004 pp 61 89 aussi David Bounie et alii op cit Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 21 Dans une optique de go ts verticaux c est dire lorsqu on estime que la critique porte sur des variables techniques pour lesquelles le classement est uniforme tout le monde pr f re une meilleure qualit technique m me si la disposition payer est diff rente selon les consommateurs il n est pas vident que les communaut s de critique fassent mieux que les critiques professionnels qui ont les connaissances parfois m me les quipements n cessaires pour un jugement pr cis du niveau
9. go ts plus dissonants 2 3 Le go t et l action la pratique artistique En concevant le go t comme activit r flexive des amateurs la sociologie pragmatique du go t fournit un clairage compl mentaire aux approches pr c dentes parce qu au lieu de s int resser aux signes de statut v hicul s par la consommation elle redonne son importance aux objets aux usages et la nature de l activit ainsi d ploy e Elle restitue ainsi le go t comme performance au lieu d en faire un simple constat go ter ce n est pas seulement signer son identit sociale c est une accumulation de fa ons de faire d entra nements et de nombreux objets et supports sur lesquels l appuyer Souhaitant r cuser l opposition binaire entre un objet culturel d j dot de propri t s stabilis es et un sujet dot de comp tences universelles la sociologie pragmatique du go t s int resse la fa on dont se forment les relations et ce qu elles modifient Sous des vocabulaires vari s dispositifs m diations ou attachement cette approche tente de saisir la mat rialit des dispositifs d accompagnement par lesquels s initie une relation esth tique Ainsi la partition l instrument de musique la hifi le choix du tempo la configuration des basses mais aussi l architecture de la salle d coute l insertion de l uvre dans un festival sont les modalit s par lesquelles le sociologue d crit le go t musical comme av nement
10. juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 22 mod lisation conomique Dans cette optique le go t c est l inexplicable du comportement individuel qui n est inexplicable que parce qu on se refuse l expliquer Dans la partie 2 on a rapidement voqu les sch mas de formation des go ts que les sociologues imaginent simple imitation ph nom nes de mode signalisation d appartenance de classe Les go ts qu ils portent sur des uvres ou sur des pratiques ne sont alors que des faux semblants Je crois aimer alors que plus ou moins consciemment je n gocie et j exhibe mon statut social N importe quel produit fait aussi bien l affaire puisque c est une convention sociale qui lui donne sa signification Dans cette optique le go t r sume ce qui chez chaque individu est socialement d termin mais ce qui est aussi revendiqu par chacun comme le caract risant essentiellement Dans la partie 3 on a abord des r flexions qui prennent les go ts au s rieux et les rapportent aux objets sur lesquels ils portent J aime une uvre pour ce qu elle est pour son authenticit son charme qui ne peut tre copi son aura son histoire les souvenirs qui y sont attach s J aime cet objet l et non un autre tout semblable L industrialisation et les techniques de reproduction ont repouss ce type de go ts aux marges de la soci t et progressivement red fini l authenticit partir du spectacle Dans cette optique le go
11. pas de le rar fier en symbole ou en pr texte C est la m me chose pour les objets d art ou la musique Hennion Antoine 2003 3 Hennion Antoine 1993 La passion musicale Une sociologie de la m diation Paris M taili 1993 Teil Genevi ve 2001 La production du jugement esth tique sur les vins par la critique vinicole Sociologie du travail 43 pp 67 89 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 13 nouveaux d cors dans le cas de jeux vid o rep res ajout s sur l uvre pour en orienter la compr hension dans le cas de la peinture Cette prolif ration de m diations du c t des consommateurs transforme durablement le statut des interm diaires Jusqu alors l influence de l offre assist e par une fraction tr s r duite des amateurs tait pr pond rante dans la constitution des m diations Lorsque les amateurs contribuaient le cadre collectif tait limit des communaut s locales ainsi le bouche oreille se limitait aux changes apr s le spectacle Avec la diffusion d Internet la d mocratisation et l amplification de l implication des amateurs d stabilise les m diations qui construisent le jugement de go t en les rendant plus nombreuses et parfois discordantes Dans chacune de ces deux versions structurale et pragmatique la sociologie rapproche le go t de facteurs exog nes c est dire de d terminants sociaux ext rieurs
12. t est collectif Hennion 2003 3 Benjamin Walter 1936 The Work of Art in the Age of Mechanical Reproduction http www marxist org reference ssubject philosophy works ge benjamin htm Jank l vitch Vladimir 1980 Le Je ne sais quoi et le Presque rien 2 La m connaissance Paris Seuil 1980 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 14 3 1 Le go t de l authentique le charme et le presque rien A la reproduction m me la plus perfectionn e d une uvre d art un facteur fait toujours d faut son hic et nunc son existence unique au lieu o elle se trouve Le hic et nunc original forme le contenu de la notion d authenticit Il est la source de ce que beaucoup d esth tes ont d fini comme constitutif de aura de l objet culturel Pour Walter Benjamin l aura c est dire l autorit de l objet ne se distingue jamais absolument d une fonction rituelle qui exige que l uvre d art demeure cach e ou du moins que sa valeur soit li e non seulement sa raret mais aussi l exclusivit d une pr sence privil gi e Certaines statues de dieux ne sont accessibles qu au pr tre les originaux des tableaux sont r serv s aux visiteurs des mus es Dans cette optique la s paration entre les auteurs et leur public est infranchissable ainsi Walter Benjamin regrette t il que justement en raison des possibilit s nouvelles de reproduction et de diffu
13. Internet et les collectifs pist miques et esth tiques A l origine Internet a t plut t consid r soit comme un lieu de vente dans le cadre du couplage codifi voqu pr c demment soit comme un moyen d acc s des bases de donn es d j constitu es Avec le d veloppement de plateformes ouvertes gratuites et offrant des logiciels sophistiqu s de gestion des interactions Internet devient surtout un moyen d change entre les internautes Au reste il s agit moins d changer que de mettre en commun des donn es librement duplicables Les communaut s ouvertes ainsi constitu es sont tr s diverses dans leur objet et leur fonctionnement Elles ont t largement tudi es communaut s de pratique communaut s pist miques du c t des entreprises ou des utilisateurs communaut s d exp rience et de critique De tels collectifs en ligne h berg s sur un seul site par exemple amazon com ou MySpace ou r partis sur le web mais reli s par des liens hypertexte et des annuaires dynamiques comme dans le cas des blogs forment des instances d lucidation qui produisent un corpus accessible tous un ensemble de critiques un ensemble de solutions techniques etc Un tel corpus prend le plus souvent la forme d un change entre deux ou plusieurs intervenants fils de conversation sur un site de distribution de logiciels comme Debian par exemple si bien qu une recherche partir d un mot cl par ex
14. Le go t comme enjeu du capitalisme ouvrage dit par Olivier Assouly Internet et la synth se collective des go ts Nicolas Auray Michel Gensollen mars 2007 GET Telecom Paris SES D partement Sciences Economiques et Sociales 46 rue Barrault 75634 Paris Cedex 13 France 33 1 45 81 76 08 nicolas auray enst fr 2 GET Telecom Paris SES D partement Sciences Economiques et Sociales 46 rue Barrault 75634 Paris Cedex 13 France 33 1 45 81 71 93 michel gensollen enst fr www gensollen net Internet et la synth se collective des go ts R sum L conomie lib rale suppose que les fonctions d utilit des consommateurs sont donn es et que leur origine n a pas tre prise en compte Aujourd hui les m canismes de formation des go ts deviennent essentiels sur des march s quip s de moyens sophistiqu s d change d informations Le capitalisme moderne ne se pose plus seulement la question de produire et de vendre pour la plus grande satisfaction des consommateurs Il doit aussi articuler les productions qui ont lieu dans les hi rarchies avec les productions priv es r alis es par des consommateurs plus ou moins organis s Dans une conomie qui ne distingue plus aussi clairement que par le pass entre production et consommation entre temps de travail et temps libre entre payant et gratuit les march s doivent organiser le dialogue entre innovation technique et dynamique des go ts On p
15. article de Grignon sur les go ts alimentaires on trouve cette dans l introduction cette formule L enqu te de l INSEE sur l alimentation des Fran ais d finit implicitement le go t comme une habitude de consommation l offre fait l usage l usage fait l habitude l habitude fait le go t Grignon Claude 1988 Les enqu tes sur la consommation et la sociologie des go ts Revue Economique 1988 n 1 pp 15 32 2e Hoggart Richard 1957 The Uses of Literacy Aspects of Working Class Life Londres Chatto and Winddus 1957 Gans Herbert 1974 Popular Culture and High Culture an Analysis and Evolution of Taste New York New York Books 1974 8 Peterson Richard A et Roger M Kern 1996 Changing Highbrow taste from snob to omnivore American Sociological Review volume 61 pp 900 907 2 Erith Simon 1996 Performing rites On the value of popular music Cambridge Harvard University Press 3 Lipsitz George 1996 Dangerous Crossroads Popular Music Postmodernism and the Poetic of Place London Verso 1997 3 Bounie David Marc Bourreau Patrick Waelbroeck 2006 Piracy and Demand for Films Analysis of Piracy Behavior in French Universities Review of Economic Research on Copyright Issues 2006 3 2 pp 15 27 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 12 nouveaux produits Internet est ainsi constitutif d un paradigme exploratoire et par cons quent de
16. aspect dans la derni re partie de ce texte l adaptation esth tique des productions en particulier dans le domaine des industries culturelles L identification pr cise des produits est videmment n cessaire si l on veut que l algorithme global de production soit efficace Or une telle identification est difficile pour une double raison d une part les firmes ne ma trisent compl tement ni la qualit ni les caract ristiques des produits elles sont donc incapables de les tiqueter convenablement d autre part les consommateurs ne savent pas rep rer sur le march les produits qui leur conviennent en effet il ne s agit pas pour eux de choisir selon leurs pr f rences ou leurs go ts mais de rep rer les entrants adapt s leur propre processus de production Une double ind termination handicape le march l innovateur ne sait pas exactement ce qu il produit et le consommateur ne sait pas ce qu il pourrait tirer des produits nouveaux qui sont pour lui des biens d exp rience Classiquement la solution ce probl me qui s est toujours pos pour les biens culturels consiste de la part du producteur en un co teux t tonnement et de la part des consommateurs en une p rilleuse d volution ils doivent se fier des testeurs critiques professionnels et amis bouche oreille Sur les plateformes d interaction le bouche oreille en ligne joue apparemment le r le d une critique collective En r alit les change
17. demanded rather than asked of me as Secretary General that discuss their declaration that their work could not be assessed by conventional aesthetic standards but that audience response should now be the main criterion We did discuss it but with little profit Shaw Roy Democracy and Excellence Journal of Aesthetic Education Vol 22 No 3 Autumn 1988 pp 5 12 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 17 Une telle question d passe d ailleurs le domaine des industries culturelles au sens troit du terme Aujourd hui la plupart des biens et services ne sont pas choisis seulement par caprice ou pour des raisons de qualit technique ou par imitation et mode La qualit verticale culturelle que l on cherche d finir dans ce paragraphe s exprime peut tre aussi bien dans la pr sentation des gondoles des grandes surfaces ou le packaging des tranches de jambon que dans tel tableau ou telle uvre musicale 4 1 Le jugement esth tique le go t de l ambigu t Au 19 si cle la r action la conception utilitariste des go ts s exprime fr quemment et sous bien des aspects La pr sente section ne vise qu en indiquer l id e g n rale utile pour comprendre les d bats d aujourd hui S il existe une qualit verticale c est dire reconnue par tous qui permet de classer les uvres d art et les produits innovants et si cette qualit ne r side pas d
18. essentiel de cette mod lisation dans la d finition d une politique lib rale On voquera la contradiction croissante entre la vision de l conomie politique des utilit s fixes partir desquelles on peut d finir un optimum social et le d veloppement des diverses techniques de marketing qui visent influencer les actes d achat et orienter les go ts en particulier au travers des m dias de masse Enfin on abordera l volution r cente des m canismes de formation des go ts avec le d veloppement sur Internet de plateformes d interaction entre consommateurs Le web interactif qui remet en cause la mod lisation statique lib rale pourrait permettre d adapter les deux phases de la production l innovation des produits et la synth se des go ts Dans une deuxi me partie La socialisation des go ts modes signaux et dispositifs on voquera un premier type de critiques port es la conceptualisation conomique des pr f rences exog nes Il s agit d une critique radicale le go t ne serait qu une illusion la consommation n est pas un rapport aux biens mais un syst me de signalisation entre les hommes Ces signaux sont chang s consciemment ou non et les individus sont plus ou moins d termin s dans les codes qu ils emploient par leur appartenance des communaut s culturelles ou des classes sociales Dans cette optique le go t trouve son origine dans la mode l imitation le d sir de s int grer symboliquement
19. homo conomicus c est un entrepreneur et un entrepreneur de lui m me Et cette chose est si vraie que pratiquement a va tre l enjeu de toutes les analyses que font les n olib raux de substituer chaque instant l homo conomicus partenaire de l change un homo conomicus entrepreneur de lui m me tant lui m me son propre capital tant pour lui m me son propre producteur tant pour lui m me la source de ses revenus Et l je ne vous en parle pas parce que ce serait trop long mais vous avez dans Gary Becker justement toute une th orie tr s int ressante de la consommation dans laquelle Becker dit la consommation il ne faut pas croire du tout que a consiste simplement tre dans un processus de l change celui qui ach te et qui fait un Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen Dans une telle optique il faut consid rer l algorithme social de production comme clat entre une partie r alis e par des entreprises et une autre partie par l utilisateur les biens les services et les informations vendus sur le march servent de liens entre ces deux phases de la production Le crit re qui oriente la d finition des produits n est pas la satisfaction directe de l usager mais la coh rence de l algorithme d ensemble Les industries culturelles justement parce que les uvres d art ont toujours demand un travail important de coproduction de la
20. il offre de l atteindre pouvant aller jusqu constituer pour le collectionneur un d sir de totalit Dans le domaine des biens num riques une voie pour reconstruire le go t comme go t de collection a consist restituer des gisements d authenticit Les nouvelles technologies de l information et de la communication ont ainsi t sollicit es pour rendre plus facile la rencontre avec de nouveaux types de biens susceptibles de r habiliter une exp rience d authenticit et de d couverte Des sites de consommateurs se mettent en place pour trouver le petit bistro connu des seuls habitu s Des plate formes d coute musicale comme My Space permettent de trouver le petit groupe encore inconnu qui est susceptible de produire un choc musical Des indexations par mots clefs ou la constitution de communaut s de go ts rendent ais cette reconstruction de plaisirs de collectionneurs Ainsi le site de vente aux ench res eBay a t con u au d part par son fondateur Pierre Omydiar pour servir de plate forme d change une communaut de collectionneurs La caract ristique de ces motions c est l existence de cycles rapides d engouement et de d ception La souplesse de publication et d dition des sites Internet les rend ainsi plus aptes que la presse traditionnelle pour appareiller de tels gisements d authenticit 3 3 Le go t de la copie variantes et participation Les tentatives pour reconstruire le go t au
21. logique m me du politique Deux croyances assurent ce nouvel ordre politique d une part l tat ne doit se fixer d autre but que de maximiser la satisfaction des citoyens d autre part ceux ci veulent tre heureux et savent comment s y prendre pour y arriver parfaitement inform s ils maximisent une fonction d utilit C est ce deuxi me aspect qu on s int resse ici la repr sentation des go ts qui pr vaut encore dans le monde contemporain Dans une premi re partie on pr sentera ce qui est au c ur de la r volution utilitariste le fait que les go ts soient arbitraires et exog nes Dans une deuxi me partie on voquera la contradiction entre l conomie lib rale et les disciplines comme le marketing qui centrent au contraire leurs pratiques sur la production de la demande et l encadrement des go ts Dans une troisi me partie on abordera l volution actuelle de la repr sentation de la dynamique des go ts partir des pratiques d changes de conseils d avis et de critiques sur Internet en quelque sorte la synth se des go ts devient collective 1 1 La r volution utilitariste la libert du mauvais go t Au d but du 16 si cle le Jardin des d lices de J r me Bosch donne l image de l homme livr la fantaisie de ses go ts le panneau central montre l absurdit circulaire du d sir o le r pugnant c toie le contre nature le panneau de droite la punition du d sir par l ternelle r p titio
22. question The other party to the comparison knows both sides Mill John Stuart Utilitarianism on Liberty Considerations on Representative Government Remarks on Bentham s philosophy 1863 Londres J M Dent amp Sons 1993 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 1 2 L conomie marchande et la production des go ts L conomie ne peut prendre en compte la gen se des pr f rences des consommateurs des go ts exog nes sont n cessaires pour pouvoir qualifier les quilibres concurrentiels de situations optimales Mais les producteurs et les distributeurs se sont vite rendu compte que les go ts sont variables et que les d sirs naissent vagues et sans objet En cons quence il est avantageux pour eux de ma triser les techniques qui permettent d influencer des go ts et d agir sur les pr f rences Aujourd hui les biens et services se sont diff renci s Sur des march s plus larges les interm diaires se sont multipli s leurs techniques ont gagn en sophistication Tout un ensemble de catalyseurs facilitent les r actions entre l offre et la demande le petit d taillant a t remplac par une longue cha ne d interm diaires Si le march chemine vers un certain quilibre celui ci d pend plus de ce tissu complexe que des caract ristiques des produits et des besoins des consommateurs L quilibre ne saurait tre qualifi de situation optimale que dans l hypot
23. qui transforme la fois l auditeur et l uvre C est par la description fine de ces m diations pleines qui font exister la pratique que le sociologue cherche faire comprendre le surgissement du go t Ces m diations sont identifi es des prises et le sociologue focalise son attention sur ces saillances stabilis es qui font un peu de lui par rapport aux amateurs ce que serait un observateur qui recueillerait d une escalade en alpinisme les endroits o sont fix s les mousquetons et la disposition des cordes Cependant malgr un tel programme qui se focalise sur les m diations ext rieures et r duit l analyse du go t la description des dispositifs disciplines appareils et r f rentiels plac s entre les amateurs et les uvres la sociologie pragmatique se trouve assez attentive dans nombre de ses passages la r flexivit des amateurs leurs t tonnements et leur syntonisation mutuelle justement pour constituer des prises pour s accorder sur un jugement de go t L analyse empirique relate les pratiques collectives et les propos que tiennent les amateurs sur ces pratiques et ironiquement leur r utilisation du discours sociologiste critique Le d calage entre le niveau de la description des prises et celui de la description des t tonnements qui les fondent pose parfois probl me car c est le m me vocabulaire sociologique qui est employ pour en rendre compte ainsi les propos tenus par les a
24. r ponse g n rale donn e classiquement cette question la qualit esth tique d un bien n est pas en lui mais dans le type de fonctionnement cognitif qu il induit chez le consommateur On illustrera cette r ponse partir des travaux r cents sur la pragmatique dans le domaine de la communication La richesse du mod le inf rentiel compar au mod le du code permet dans une certaine mesure de proposer quelques hypoth ses sur le mode de fonctionnement cognitif qui est associ la qualit esth tique d une uvre On avancera en particulier que la qualit essentielle d un produit culturel o innovant est de permettre d articuler les r veries individuelles de chacun avec un r ve collectif On tentera de d crire le fonctionnement des plateformes d interaction sur Internet qui r alisent un tel travail d appropriation de la nouveaut de la m me fa on que les communaut s pist miques permettent l appropriation du savoir 1 La production des go ts besoins d sirs et marketing Les ph nom nes conomiques en particulier l organisation de march s d change ne datent videmment pas du 18 si cle de m me il est peut tre exag r de dire comme Saint Just en 1794 Le bonheur est une id e neuve en Europe Mais il est vrai qu avec la r volution industrielle quelque chose d important change dans les repr sentations L conomie qui se fixe comme but la satisfaction des go ts de chaque consommateur devient la
25. t c est ce qui r siste aux techniques industrielles celles ci exigeraient une volution des routines cognitives laquelle les consommateurs ne sont pas pr ts Le go t c est la nostalgie du bon go t Enfin dans une 4 partie on a pr sent une formalisation des go ts partir des r flexions sur la communication pragmatique Les go ts ne portent pas sur les objets en tant que tel mais sur les processus cognitifs qu ils engendrent pour tre consomm s Une telle mod lisation semble plus en phase que les pr c dentes avec le d veloppement conomique actuel les algorithmes sociaux de production sont en effet de plus en plus clat s entre une phase dans les entreprises et une phase chez les consommateurs Les march s o se n gocient les biens et les services deviennent essentiellement des lieux d change d informations Les produits actuels ressemblent ainsi aux uvres d art ils demandent un travail d lucidation complexe pour tre discern s et utilis s et bien souvent c est l chec m me d un tel processus qui forme une culture et porte l essentiel de l utilit Dans cette optique le go t c est ce qui s apprend de fa on paradoxale par un chec programm des routines cognitives chec collectif qui laisse comme d p t un cadre culturel permettant l articulation des routines individuelles et des routines sociales L conomie lib rale b tie sur l hypoth se des go ts exog nes doit aujourd hui affront
26. that standards were based in the first place on consumers needs and for that reason were accepted with so little resistance The result is the circle of manipulation and retroactive need in which the unity of the system grows ever stronger No mention is made of the fact that the basis on which technology acquires power over society is the power of those whose economic hold over society is greatest A technological rationale is the rationale of domination itself Adorno Theodor et Max Horkheimer 1947 Dialectic of Enlightment Standford Calif Standford University Press 1992 13 Adorno et Horkheimer 1944 crivent The attitude of the public which ostensibly and actually favours the system of the culture industry is a part of the system and not an excuse for it 14 Dans La Distinction critique sociale du jugement Pierre Bourdieu crit Cette r int gration barbare des consommations esth tiques dans l univers des consommations ordinaires contre lesquelles elles ne cessent de se d finir a entre autres vertus celle de rappeler que la consommation des biens suppose sans doute toujours des degr s diff rents selon les biens et selon les consommateurs un travail d appropriation ou plus exactement que le consommateur contribue produire le produit qu il consomme au prix d un travail de rep rage et de d chiffrement qui dans le cas de l uvre d art peut constituer le tout de la consommation et des satisfactions quelle procure
27. un canon acad mique Les artistes refusent de voir leurs uvres appr ci es soit par le pur caprice d une client le qui n a pas rendre compte de ses choix soit par l avis d une sorte de corporation garante que les bons produits ont t utilis s d une fa on convenable La critique clair e cherche ainsi d passer le mod le conomique et le mod le artisanal et d finir une qualit esth tique universelle ind pendante d un jugement technique sur le processus de production On pr sentera dans une premi re partie 4 1 la question du go t telle qu elle se pose au moment o l utilitarisme se d veloppe et en r action contre lui Dans une seconde partie 4 2 on tentera de pr ciser la notion de jugement esth tique partir des mod lisations pragmatiques de la communication de fa on tendre cette conceptualisation aux cas des produits culturels et des biens innovants Dans une troisi me partie 4 3 on voquera le r le que jouent les plateformes d interaction sur Internet dans le cas des march s culturels et on cherchera d finir ce qui distingue les communaut s pist miques de ce qu on pourrait appeler des communaut s esth tiques 5i Jenkins Henri 2006 Textual Poachers Television Fans and Participatory culture Boston MIT Press 2006 Comme le note Jenkins fans created their own new texts but elements within the originating text defined to some degree what they could do sp
28. La sociologie structurale explique le go t par des syst mes de statut et des hi rarchies symboliques La sociologie pragmatique explique le go t par des dispositifs mat riels instruments cadres de d gustation appareils d coute qui construisent la d gustation et fabriquent depuis l ext rieur le jugement d appr ciation de l amateur En d finitive l approche sociologique a effectu une mise l cart des processus de formation individuelle des go ts Sous sa version critique elle a identifi le go t une illusion en refusant de voir dans le rapport concret avec les choses autre chose qu un signal chang entre les hommes par imitation d sir de s int grer symboliquement une classe sociale ou de s en diff rencier Sous sa version pragmatique elle a fait du go t quelque chose d inaccessible en se focalisant sur les dispositifs mat riels ext rieurs qui permettent de le faire merger 3 Le bon go t et la recherche de l authentique Les sciences sociales ne se sont pas toujours satisfaites d explication du social par le social Elles ont parfois abord la gen se du go t partir non seulement d un signal entre les hommes mais aussi parfois d un rapport avec l objet lui m me On voque ici les analyses en particulier celles de l Ecole de Francfort qui partent du principe qu avant l re de la reproductibilit technique des uvres d art le go t visait essentiellement travers les biens les services e
29. Les arrangeurs donnent leur avis les gens qui passent donnent leur avis comme la secr taire en haut le parolier les musiciens et gentiment la chanson prend son sens devient charg e On va la mettre dans les radios ce qui agrandit encore un peu la boucle et petit petit on a une esp ce de co production du produit et de son coute Les m diations sont tr s importantes ce n est pas la musique et des moyens mais c est le fait m me de la jouer l coute les instruments le studio le disque la radio qui porte directement l v nement musical Hennion 2003 Cf notamment Hennion Antoine 1981 Les professionnels du disque Une sociologie des vari t s M taili Paris Hennion d crit la fonction r v latrice des coups d il jet s sur la foule apr s un spectacle Prenons le cas de la musique pourquoi guette t on les autres la fin d un spectacle Ce n est pas un code social ni un snobisme s aligner sur les autres Non c est parce qu on ne sait pas Est ce bon ou non ai je bien entendu vu L appui sur le jugement des autres c est une technique parmi d autres pour avoir un garant de plus c est du m me ordre que l exp rience de l objet ou la formation de son attention et de sa perception Simplement pour parvenir qualifier ce qui s est pass il faut effectivement s appuyer sur une s rie de jugements commencer par ceux des autres Les amateurs savent tr s bien que leur go
30. Schuster 2006 http web media mit edu minsky 57 Dans le cadre un peu diff rent des rituels d j abord dans Ludwig Wittgenstein Remarques sur le Rameau d Or de Frazer 1931 Paris L Age d Homme 1982 Dan Sperber avait dans Le symbolisme en g n ral oppos deux modes de lecture du savoir une convocation logique et rapidement convergente et en cas d chec un mode de recherche plus vague laissant plus de place aux souvenirs et aux sentiments l vocation Les rituels spectacles symboliques sont justement ceux qui m ritent qu on tente de les comprendre et qui se d robent toute interpr tation d finitive La vertu des symboles c est en fin de compte de ne signifier rien de bien clair mais de faire r ver tout le monde dans la m me direction Sperber Dan 1974 Le symbolisme en g n ral Paris Hermann 1974 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 18 b n ficient d un avantage d cet loignement et l incompr hension du public D o le japonisme pour les peintres impressionnistes et l utilisation de l art n gre par les fauves et les cubistes Dans un texte de critique artistique crit en 1855 Exposition universelle Beaux arts Baudelaire donne un r sum de la position d crite pr c demment refus de l acad misme et assimilation d une uvre belle une uvre bizarre l essentiel est de surprendre Il donne enfin un exemple ironi
31. aillance et la musique enregistr e disjointe du se faisant entendue apr s coup et immuable en sa d finitive perfection il n y a aucune diff rence grammatique ou morphologique si l on n est pas trop exigeant sous le rapport du je ne sais quoi Et pourtant c est ce presque rien controversable qui est tout Jank l vitch 1980 premi re dition 1957 P Alpers Svetlana 1991 L atelier de Rembrandt La libert la peinture et l argent Paris Gallimard 1991 Le titre original de l ouvrage de Svetlana Alpers est Rembrandt s Enterprise the studio and the market contrairement la traduction fran aise il montre ainsi Rembrandt en entrepreneur et businessman avis Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 15 MySpace ou des vid os index es sur Daily Motion constitue une foule abstraite la fois diss min e spatialement et d synchronis e Les technologies de l information et de la communication transforment le go t en alt rant la relation intime qui s tablissait jusqu alors entre la qualit esth tique et l unicit de l uvre A l re num rique le go t subit une mutation il doit chercher d autres voies que l unicit de l uvre pour arriver produire l authenticit 3 2 Le go t de la circulation marchandage et occasions Une autre fa on de concevoir l authenticit s est substitu e l unicit l authenticit li e l usag
32. ales au contraire se sont souvent interrog es sur la dynamique des go ts mais en se limitant le plus souvent aux r les qu ils jouent dans le cadre des relations entre les individus Les ph nom nes mis en vidences pour int ressants qu ils soient n gligent alors le fait que les go ts sont aussi d termin s par un rapport direct aux uvres Le go t en tant que ph nom ne purement social se r duit alors soit la simple imitation 2 1 soit des syst mes de signalisation plus ou moins sophistiqu s qui ont pour but d affirmer l appartenance une communaut ou une classe sociale 2 2 Le fait que le go t puisse porter non seulement sur des uvres mais aussi sur des pratiques d usage ou de production enrichit l analyse sans vraiment en modifier les limites 2 3 M me si les descriptions offertes sont parfois pertinentes et en effet il n est pas question de nier que l imitation la mode le snobisme la signalisation sociale peuvent jouer un r le important il reste qu elles n gligent l essentiel la formation individuelle du jugement Dans une telle optique les march s des biens et des services en particulier les march s des uvres culturelles sont une sorte de th tre d ombres les consommateurs croient choisir des produits alors qu ils ne font qu envoyer plus ou moins consciemment des messages 2 1 Le go t et l imitation la mode Les sciences sociales tentent de mieux comprendre la socialisation
33. ans l application plus ou moins efficace de proc d s techniques comment la d finir Comment d finir un bon go t qui ne serait ni caprice ni jugement acad mique Une solution tr s g n rale est fournie par Kant dans la Critique de la facult de juger Celui ci commence par faire la part du feu il reconna t que l utilitarisme a sans doute raison pour certains biens qui ne sont qu agr ables par exemple le vin Mais la beaut au contraire est ressentie comme universelle et non conceptualisable on est certain qu il s agit d une qualit appr ci e de la m me fa on par tout le monde pour peu que les gens y soient sensibles et on ne peut ni rendre compte de cette qualit ni ma triser le processus de production Le sentiment esth tique vient d un fonctionnement cognitif sp cifique et les uvres sont plus ou moins aptes provoquer ce type de fonctionnement particulier dans lequel imagination et raisonnement se conjuguent En ce sens le go t est la facult de reconna tre les uvres belles De telles uvres artefacts ou spectacles naturels ont comme qualit d tre anormalement faciles ou difficiles percevoir int grer et comprendre dans la mesure o elles sont ou trop bien ou tr s mal adapt es aux routines cognitives Dans les deux cas elles provoquent une interrogation sur le sens et induisent une recherche d abord rationnelle dans le savoir encyclop dique et pragmatique la convocation
34. ards Bowring edition 1843 En 1790 dans la Nouvelle Justine chapitre 10 Sade crit La chose du monde la plus ridicule ma ch re Justine dit Cl ment est de vouloir disputer sur les go ts de l homme les contrarier les bl mer ou les punir s ils ne sont pas conformes soit aux lois du pays qu on habite soit aux conventions sociales Eh quoi les hommes ne comprendront jamais qu il n est aucuns go ts quelque bizarres quelque criminels m me qu on puisse les supposer qui ne soient le r sultat de la sorte d organisation que nous avons re ue de la nature Cela pos je demande de quel droit un homme osera exiger d un autre ou de r former ses go ts ou de les mod rer sur l ordre social de quel droit m me les lois qui ne sont faites que pour le bonheur de l homme oseront elles s vir contre celui qui ne peut se corriger ou qui n y parviendrait qu aux d pens de ce bonheur que doivent lui conserver les lois Mais d sir t on m me de changer de go ts le peut on Est il en nous de nous refaire Pouvons nous devenir autre que nous ne sommes L exigeriez vous d un individu contrefait Sade La nouvelle Justine 1790 Paris 10 18 1988 Dans Utilitarianism John Stuart Mill crit chapitre 2 It is better to be a human being dissatisfied than a pig satisfied better to be Socrates dissatisfied than a fool satisfied And if the fool or the pig are a different opinion it is because they only know their own side of the
35. bstantive duration to its testimony to the history which it has experienced Since the historical testimony rests on the authenticity the former too is jeopardized by reproduction when substantive duration ceases to matter And what is really jeopardized when the historical testimony is affected is the authority of the object Dans The Work of Art in the Age of Mechanical Reproduction Walter Benjamin d plore en 1936 la d sacralisation du r le d auteur For centuries a small number of writers were confronted by many thousands of readers This changed toward the end of the last century Today there is hardly a gainfully employed European who could not in principle find an opportunity to publish somewhere or other comments on his work grievances documentary reports or that sort of thing Thus the distinction between author and public is about to lose its basic character The difference becomes merely functional it may vary from case to case At any moment the reader is ready to turn into a writer Alain Pr liminaires l esth tique 1931 Paris Gallimard 1951 Jank l vitch crit ainsi dans le Je ne sais quoi Toute copie est laide m me si elle est indiscernable de l original Les perles fausses imitent les vraies et le stuc remplace le marbre condition de n y pas regarder de trop pr s Bien mieux entre la musique du musicien vivant en train de jouer pour nous f t ce au prix de quelque humaine d f
36. cialement fait irruption une demande nouvelle de proximit closeness de la part des fans Le point important not est l largissement de la structure d audience propre la culture de niche aux productions t l visuelles populaires The example would point to is DC comics where they consciously rewrite the mythology of Batman or Superman in what we would call alternative universe stories or genre shifting stories 5 Les artistes pr f rent encore le jugement du public l appr ciation de sp cialistes qui appliquent des standards conventionnels Sir Roy Shaw alors qu il tait Secretary General of the Arts Council for Great Britain s tonnait que des artistes refusent d tre appr ci s autrement que par le succ s aupr s du public Il crit dans l article Democracy and Excellence 1988 peut tre avec humour Perhaps even more influential however has been the legacy of logical positivism especially A J Ayer s book Language Truth and Logic published in 1935 Over forty years later Ayer recalled that one of its main theses was that judgments of value were emotive and not cognitive This is a harmless sounding philosophical proposition but it implies that This is good or bad means nothing more than I like it or I don t like it Taken seriously this renders meaningless the business of artistic and indeed moral discrimination No wonder moreover that in 1977 the Association of Community Theatres
37. constituent des m langes de foi et de d sir de cr dulit et de spontan it les go ts constituent des r alit s du dedans des inclinaisons int rioris es leur mergence renvoie donc des facteurs d expansion essentiellement extra logiques Pour Tarde les go ts r pondent des mouvements de propagation qui d ferlent inopin ment de certaines cimes sociologiques de certains ch teaux d eau sociaux vers la soci t dans son ensemble Tarde tablit ainsi comme une loi le fait que l imitation soit essentiellement celle du sup rieur par l inf rieur La manipulation et la suggestibilit sont leur moteur par opposition l appropriation r fl chie de nouvelles id es ou proc d s techniques qui font intervenir une m ditation dans le cadre d une confrontation explicite Cette matrice d explication des go ts par l imitation d valorise fortement le rapport perceptif l objet r duit une consommation de signes L loignement progressif de l homme l objet dans les soci t s industrielles a t mis en vidence dans les Mythologies de Barthes ou dans Le syst me des objets de Baudrillard Baudrillard par exemple partir des int rieurs modulables et des s ries industrielles analyse l ameublement de son cadre domestique comme une activit s miologique forc e o l agencement propos par le ma tre de maison produit un message irr pressible destination des h tes La diffusion industri
38. de qualit obtenue Les sites de distribution de mat riels lectroniques ont familiaris leurs clients de telles chelles verticales sur plusieurs dimensions encombrement fiabilit r sistance aux chocs dur e de charge de la batterie etc L agr gation des notes obtenues s obtient par des pond rations qui peuvent tre propres chaque utilisateur Les communaut s que nous venons d voquer communaut s de pratique d exp rience qualit horizontale ou verticale servent au couplage adaptatif entre les deux sous algorithmes de production en permettant des changes d informations entre consommateurs et innovateurs elles facilitent le fonctionnement des march s Mais les collectifs en ligne peuvent galement se pr ter des interactions qui rel vent de ce qu on a appel pr c demment le couplage culturel Dans ce cas le travail collectif d lucidation vise moins r ussir la m tarepr sentation qui permet la solution des probl mes qu exercer les routines cognitives de sorte constituer une culture commune On notera tout d abord que de m me qu une uvre qui veut d clencher un m canisme cognitif esth tique est toujours un peu malhonn te puisqu elle doit par d finition se pr senter comme plus accessible qu elle n est en r alit de m me les communaut s qui rel veraient du couplage culturel ne devraient pas pour tre efficaces s identifier clairement ainsi L utilit des changes qui ont lieu
39. de l exp rience subjective du go t contrairement aux esth tiques n o kantiennes qui le consid rent d tach es des conditions ext rieures La matrice de ce genre d analyse en sociologie de la culture provient sans doute de Gabriel Tarde qui a fait l objet de relectures r centes Tarde a r alis une uvre accr dit e comme pionni re en sociologie de la diffusion et des usages Pour lui les relations sociales sont complexes mais les r gularit s sociales dont font partie les go ts stables peuvent tre rattach s deux m canismes fondamentaux limitation et son contraire la contre imitation ph nom ne oppos par lequel les individus les fils contre les p res les nobles contre les paysans cherchent se dissocier des habitudes de leurs mod les Le ph nom ne d imitation est l application dans le domaine du social d un ph nom ne universel celui de la r p tition qui dans l ordre physique se traduit par la propagation ondulatoire et dans l ordre biologique par l h r dit ou par la reproduction cellulaire L imitation a un r le spectaculaire elle 1 Conein op cit voir aussi Auray Nicolas 2004 La r gulation par la connaissance arbitrage sur la taille et gestion aux fronti res dans la communaut Debian Revue d Economie Politique Num ro March s en ligne et communaut s d agents mars 2004 1 Deleuze Gilles et F lix Guattari Mille plateaux Paris Minuit 1981 Latour Bruno 2002
40. e et qui provient du fait que l objet incorpore comme une ponge historique les contextes multiples auxquels il a appartenu Autour de la pratique des collectionneurs ou des amateurs d antiquit s s est construite une conception de l uvre d art comme reflet d une poque Pomian utilise le terme s miophore pour d signer les objets de collection qui sont sans utilit maintenus hors du circuit d activit s conomiques mais qui d voilent pleinement la signification des r alit s de p riodes rel gu es dans l invisible Les vestiges de l Antiquit consid r s jusque l comme d chets se transforment autour du groupe social des humanistes en s miophores parce qu ils sont mis en rapport avec des textes contemporains Les objets exotiques repr sentent le pass et le lointain Les tableaux peuvent tre tenus pour des s miophores s ils repr sentent des v nements un fait d armes Le go t devient alors une capacit exhumer travers l objet une poque ensevelie ou une culture trang re Avec les cabinets de curiosit dont l apog e se situe au 16 si cle le go t structure une fa on de voir d apprendre ou de poss der des choses r v latrices de totalit s r volues ou enfouies Les collectionneurs de biens d occasion entretiennent ce type de rapports l objet go t pour sa patine et sa capacit rappeler voire restituer le pass L objet entretient un rapport privil gi avec le tout
41. elle des objets par la prolif ration qu elle induit par leur mise en s rie et les effets d abondance provoque une suj tion aux consignes versatiles de la mode et constitue les objets en syst me coh rent de signes Un lien exclusif est fait entre l av nement de soci t s industrielles marqu es par le consum risme et le d veloppement de la publicit et la pr minence donn e pour expliquer les go ts au souci d imitation et de consommation de purs signes 2 2 Le go t et l int gration la l gitimit culturelle Au del de ces approches qui fournissent un substrat sociologique au go t travers limitation culturelle un courant plus ambitieux s initie d s la fin du 19 si cle avec les travaux de Veblen La Th orie de la classe de loisir publi e en 1889 mais traduite en fran ais en 1970 seulement identifie le go t une consommation ostentatoire Le sentiment de la beaut serait li la capacit de l objet mettre en vidence un gaspillage de temps ou d argent Ainsi le go t pour une cuiller d argent travaill e la main plus on reuse mais pas plus utile qu une cuiller ordinaire s expliquerait par le fait qu elle manifeste le rang social de la famille qui peut l exhiber La norme du gaspillage ostensible est plac e par Veblen la source de la quasi totalit des jugements de go t et notamment l id al de la beaut f minine des mains d licates des pieds minuscules et des hanches fines su
42. emple avec un moteur comme Google donne acc s des changes et des d bats tout le processus d laboration qu il s agisse de la critique d un produit ou de la solution d un probl me technique de mise en uvre Plus pr cis ment dans les communaut s de pratique ou les communaut s pist miques la construction d un r f rent commun conduit des changes visant construire le bon niveau de repr sentation celui qui permet l expert de se repr senter la repr sentation de celui qui se heurte un probl me concret C est typiquement le cas des forums consacr s aux probl mes d utilisation d quipements complexes Les communaut s de critiques o s changent des avis sur des biens d exp rience par exemple des biens culturels comme des livres des CD ou des DVD ont t principalement tudi es dans le cadre d une mod lisation horizontale des go ts Ceux qui crivent des avis doivent la fois juger une uvre par rapport leur go t et permettre aux lecteurs de les localiser dans l espace des go ts Un tel dispositif enrichit la critique professionnelle traditionnelle en multipliant le nombre des experts pourvu que ceux qui mettent en ligne des avis aient un pseudonyme stable qui permette de les situer dans l espace des go ts Sauvy Alfred 1968 Les quatre roues de la fortune Essai sur l automobile Paris Flammarion 1968 Dupuy Gabriel 1999 La d pendance automobile sympt mes analyses
43. entiellement recueillir le syst me coh rent de pr f rences culturelles propre chaque fraction de la soci t Il en ressort une division ternaire de la soci t classes sup rieures marqu es par un bon go t identifi par l auteur un sens de la distinction classes moyennes marqu es par une bonne volont culturelle classes populaires marqu es par un go t de la n cessit Des oppositions syst matiques de go ts s tablissent entre ces trois niveaux pour l ensemble des biens symboliques Sur chaque niveau les go ts sont rep r s comme essentiellement consonants Cette th orie a t amend e par la mise en vidence r cente d une horizontalisation des go ts La fronti re entre culture populaire et culture savante aurait tendance se brouiller De nombreuses enqu tes montrent l apparition dans les normes de bon go t d un clectisme culturel le dominant serait devenu culturellement omnivore et l omnivoracit serait m me devenue une norme de bon go t par opposition l ancien exclusivisme snob L dification des fronti res symboliques se d place des objets culturels vers les attitudes la mani re de consommer le m me produit culturel fait plus facilement l objet de plusieurs lectures simultan es Aujourd hui ceux qui ont adh r sous l tiquette rock and roll aux styles populaires de musique dans leur jeunesse y compris aux styles de danse afro am ricaines ont co
44. er le caract re exog ne des go ts dans les cas o cette hypoth se ne tient visiblement pas par exemple dans les cas d apprentissage rapide ou de d pendance biens culturels ou drogues en faisant porter les pr f rences sur des services que le consommateur se rend lui m me partir des biens achet s sur le march Il existe une v ritable fonction de production du consommateur dont les entrants sont les biens et services du march et dont le capital peut tre d fini de fa on diff rente selon les types de consommation capital culturel par exemple dans le cas des consommations artistiques accumulation des consommations pass es dans le cas d une d pendance une drogue Dans cette optique le consommateur est le producteur de sa satisfaction Les deux th or mes du bien tre tout quilibre concurrentiel est un optimum de Pareto et tout optimum de Pareto peut tre atteint comme quilibre de march avec des dotations initiales convenables n ont de sens que si les fonctions d utilit s des consommateurs sont donn es 7 Pour l explicitation des m canismes complexes d influence par les m dias de masse et la d finition des relais d opinion n cessaires la m diation voir Katz Elihu amp Paul Lazarsfeld 1955 Personal Influence New York The Free Press 8 Dans Le choix du jambon emball en grande surface ou l conomie du package 1998 Franck Cochoy crit En revanche NF me garantit non seule
45. er les m canismes de leur formation qui deviennent centraux sur des march s quip s de moyens sophistiqu s d change d informations Le capitalisme moderne ne se pose plus seulement la question de produire et de vendre pour la plus grande satisfaction des consommateurs il doit articuler les productions qui ont lieu dans les hi rarchies avec les productions priv es r alis es par des consommateurs plus ou moins organis s Dans une conomie qui ne distingue plus aussi clairement que par le pass entre production et consommation entre temps de travail et temps libre entre payant et gratuit il convient d articuler en particulier par des interactions esth tiques l innovation technique et la dynamique sociale des go ts Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen
46. es go ts des consommateurs se pose de fa on vidente La formalisation n olib rale de l clatement de la fonction de production faisait un peu sourire la fin des ann es 1970 elle devient une cl pour comprendre le fonctionnement des march s lectroniques Les plateformes d interaction qu on a appel volontiers communaut s en ligne et qui sont aujourd hui englob es dans l expression g n rale web 2 0 peuvent s analyser comme les lieux o s laborent les interfaces entre la production innovante des entreprises et la phase de production qui est d port e chez les utilisateurs Sur les sites web qui permettent les changes entre utilisateurs les producteurs comme les distributeurs sont pr sents ils recueillent des informations pr cieuses sur les change mon taire pour obtenir un certain nombre de produits L homme de la consommation dans la mesure o il consomme est un producteur Il produit quoi Eh bien il produit tout simplement sa propre satisfaction Et il faut consid rer la consommation comme une activit d entreprise par laquelle l individu partir pr cis ment d un certain capital dont il dispose va produire quelque chose qui va tre sa propre satisfaction Foucault Michel 1979 Naissance de la biopolitique Cours au Coll ge de France 1978 1979 Paris Seuil Gallimard 2004 12 Au sujet des industries culturelles Adorno et Horkheimer dans Dialectic of Enlightenment 1947 crivent It is claimed
47. es moyens de l entretenir dans l oisivet Le souci de se distinguer et l motion sont les moteurs de l interaction sociale Sous le nom de beaut nous camouflons un sens de distinction sociale et de consommation but honorifique qui vise manifester notre hauteur sociale Prolongeant la direction ouverte par Veblen le travail de Bourdieu met en vidence le go t comme une hi rarchie sophistiqu e de pr f rences culturelles Le go t comme syst me de pr f rences est analys comme une marque de distinction double fonction d marcative et honorifique Il classifie celui qui classe L o Bourdieu s inscrit nettement dans le sillage de Veblen c est parce qu il insiste sur le r le jou par l apparente souverainet subjective de nos go ts pour expliquer l efficacit de leur fonction d int gration sociale Le go t est lu comme un syst me de pr f rences culturelles qui affecte l individu une position dans l ordre social Cette fonction de hi rarchisation est fortement l gitime parce que les gens sont fond s penser qu on ne discute pas des go ts Pour reprendre la formule de La Rochefoucauld notre amour propre souffre plus impatiemment la condamnation de nos go ts que de nos opinions Bourdieu place donc le go t au c ur de la production de la l gitimit parce qu il naturalise un ordre social Le regard port sur le go t par les sciences sociales pr sente de nombreuses limites empiriques Il s attache ess
48. et qui demande du temps et des dispositions acquises avec le temps N tant pas une abstraction pr s les conomistes peuvent ignorer ce qui advient aux produits dans la relation avec les consommateurs c est dire avec les dispositions qui en d finissent les propri t s utiles et les usages r els poser par hypoth se comme tel d entre eux que les consommateurs per oivent les m mes attributs d cisifs ce qui revient supposer que les produits poss dent des caract ristiques objectives ou comme on dit techniques capables de s imposer comme telles tous les sujets percevant c est faire comme si la perception s attachait aux seules caract ristiques que d signent les descriptifs propos s par les producteurs et la publicit dite informative et comme si les usages sociaux pouvaient se d duire des modes d emploi Bourdieu Pierre 1979 La distinction critique sociale du jugement Paris Minuit 1979 5 Kollock Peter et Marc Smith 1999 Communities in Cyberspace Londres Routledge Press 1999 Wenger Etienne 1999 Communities of Practice Learning Meaning and Identity Cambridge Cambridge University Press Conein Bernard 2004 Communaut s pist miques r seaux cognitifs et interd pendance entre les partenaires Revue d Economie Politique Num ro March s en ligne et communaut s d agents mars 2004 Curien Nicolas Gilbert Laffond Jean Lain Fran ois Moreau 2004 Communaut s pist m
49. faire intervenir de concepts engage l imagination dans un jeu r gulier que la repr sentation se communique non comme pens e mais comme sentiment interne d un tat de l me conforme une fin Le go t est donc la facult de juger a priori de la communicabilit des sentiments li s une repr sentation donn e sans m diation d un concept 5 On emploie ici le terme vague routines cognitives pour d signer les algorithmes de niveaux vari s qui traitent les donn es sensorielles il s agit des ressources dans la formalisation de Minsky lorsqu il crit We ll start with the simple idea that every brain contains many parts each of which does certain specialized jobs Some can recognize various patterns others can supervise various actions yet others can formulate goals or plans and some can contain large bodies of knowledge This suggests that we could envision a mind or a brain as composed of a great many different resources At first this image may seem hopelessly vague yet it can help us start to understand how a mind could make a large change in its state For example the state we call angry could be what happens when you activate some resources that help you react with more speed and strength while also suppressing some other resources that usually make you act prudently Minsky Marvin 2006 The Emotion Machine Commonsense Thinking Artificial Intelligence and the Future of Human Mind New York Simon amp
50. fonder la paix civile en soutenant qu il n y a v ritablement qu une seule question assurer la satisfaction des individus sans s interroger ni sur l origine de leurs pr f rences ni sur les cons quences long terme de leur satisfaction Pour que l utilitarisme soit r ellement efficace il faut que les go ts soient inn s ou au moins invariables moyen terme et que soit forclos tout jugement sur leur valeur intrins que On assiste alors un d placement hors de l conomie de tout ce qui touche la formation des go ts des repr sentations des savoirs et des croyances ducation et formation sciences et innovations techniques arts et politiques culturelles religion etc Ces questions sont suppos es appartenir une sorte de domaine priv o chacun serait libre de faire ce qu il veut sans qu il soit besoin de r gulation globale En tendant le vocabulaire conomique standard sur la diff renciation horizontale ou verticale des biens on d signera dans la suite par go ts verticaux une mod lisation qui consid re que tous les consommateurs sont d accord sur le classement des options entre lesquels leur choix s exerce Sur le march ils ach teront tel ou tel bien selon leur disposition payer pour la qualit sous jacente qui permet ce classement La qualit technique d un bien produit industriel ou uvre d art fournit l exemple classique d une telle diff renciation verticale On parlera au contraire de go t
51. h se o l on n glige la formation des go ts et les multiples apprentissages parfois co teux qui se font tout au long de la vie des consommateurs et des produits La m diation entre l offre et la demande peut se faire au niveau individuel bouche oreille ou au travers des m dias de masse les deux moyens se conjuguant souvent th orie du two step flow la m diation a lieu galement chez les d taillants dans le cas de la grande distribution la pr sentation des produits et les emballages packaging jouent un r le essentiel Il serait na f de se demander si le marketing aide dessiner des produits qui satisfont des go ts pr existants ou s il manipule les pr f rences pour les adapter aux produits Comme tous les m diateurs il adapte les uns aux autres et r alise les conditions d une co volution r ussie Un texte amusant sur le choix de tranches de jambon emball es Cochoy 1998 donne un exemple particuli rement clair de la d couverte progressive des crit res de choix par l acheteur potentiel absence de polyphosphates richesse en prot ines provenance de cuisse enti re etc Telle particularit ignor e l instant d avant devient bient t un crit re essentiel de l achat Encore s agit il l d un produit banal de consommation courante on imagine que l achat d un ordinateur doit faire l objet d un apprentissage plus difficile encore et donc plus sujet la manipulation Le n olib ralisme tente de sauv
52. ient dans une vaste unit monotone et impersonnelle immense comme l ennui et le n ant La vari t condition sine qua non de la vie serait effac e de la vie Baudelaire Charles 1855 Exposition universelle Beaux Arts Paris Gallimard La Pl iade pp 575 582 Dans le m me texte Baudelaire crit Le beau est toujours bizarre Je ne veux pas dire qu il soit volontairement froidement bizarre car dans ce cas il serait un monstre sorti des rails de la vie Je dis qu il contient toujours un peu de bizarrerie de bizarrerie na ve non voulue inconsciente et que c est cette bizarrerie qui le fait tre particuli rement le Beau C est son immatriculation sa caract ristique Renversez la proposition et t chez de concevoir un beau banal Voir Grice Paul 1989 Studies in the Way of Words Cambridge MA Harvard University Press Le mod le inf rentiel est pr cis ment d fini dans La communication et le sens de Dan Sperber En fait nous sommes un certain nombre de chercheurs penser qu il faut inverser le rapport entre d codage et inf rence Nous pr conisons un autre mod le qu on pourrait appeler le mod le inf rentiel de la communication par opposition au mod le du code Selon le mod le inf rentiel le communicateur produit un indice du sens voulu Cet indice peut tre linguistique ou non cod ou non Apr s tout on ne communique pas seulement avec des paroles on communique avec des mimiques on commun
53. ion non le timbre de la voix Ibid Chap VI p 216 Il est g n avec le probl me de l accent mais note que si certes l accent se transmet bien qu il ne P P pas une int riorit mentale c est essentiellement pendant la jeunesse 1 2 Barthes Roland 1970 Mythologies Paris Seuil 1970 3 Baudrillard Jean 1978 Le syst me des objets Paris Gallimard 1978 4 Veblen invente l expression en 1899 en anglais conspicuous consumption elle sera consid rablement reprise par la suite entre autres par des conomistes du d veloppement notamment J S Duesenberry 1949 Income Saving and the Theory of Consumer Behavior Cambridge Harvard Univ Press 1949 Une des pages inoubliables de la Th orie de la classe de loisir 1899 concerne le lustre de l toffe pris e dans les chapeaux car servant montrer qu on les change souvent et consid r d favorablement pour les pantalons parce qu il montre qu au contraire on ne l a pas chang depuis longtemps Alors qu il s agit du m me lustre II n y a donc pas selon lui d esth tique dans l affaire mais simplement une mission de signifiants de puissance qui est la raison d tre de la consommation ostentatoire Veblen Thorstein 1889 Th orie de la classe de loisir 1889 Paris Seuil 1970 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 11 montrent que la femme ainsi faite est incapable d effort utile et que son mari a l
54. ique en pointant du doigt on communique avec gestes conventionnels ou improvis s On peut communiquer par des comportements st r otyp s mais aussi par des comportements nouveaux qui ne rel vent d aucun code pr existant et qui n anmoins donnent un indice de ce que l on veut transmettre autrui Sperber Dan 2000 La communication et le sens in Yves Michaud ed Qu est ce que l humain Universit de tous les savoirs Paris Odile Jacob pp 119 128 http www dann sperber com sens htm Dans Relevance Communication and Cognition Sperber amp Wilson pr cisent les r gles d inf rence que permet la pr somption de pertinence le message est conomiquement format et suffisamment utile au moment o il est mis The relevance of a stimulus is determined by two factors the effort needed to process it optimally and the cognitive effects this optimal processing achieves We want to argue that the presumption of relevance is different on the effect and effort sides On the effect side the presumption is that the level of effects achievable is never less than is needed to make the stimulus worth processing on the effort side it is that the level of effort required is never more than is needed to achieve these effects Sperber Dan and Deirdre Wilson Relevance Communication and Cognition Oxford Blackwell 1995 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 19 L origi
55. iques organisation du travail et efficacit Revue d Economie Politique Num ro March s en ligne et communaut s d agents mars 2004 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen usages ils interviennent galement pour guider le choix ou l utilisation d un produit parfois ce sont eux qui organisent les sites d interaction et en d finissent le fonctionnement La phase de production qui prend place dans les entreprises peut s tendre sur plusieurs niveaux certaines firmes sont en contact avec les clients finals d autres travaillent pour un march interm diaire tout en s informant sur la demande finale on parle alors de B2B2C Sym triquement la production qui est r alis e collectivement par les utilisateurs fait intervenir des agents des niveaux diff rents d information et de savoir faire Au reste dans certains domaines comme celui des logiciels libres les innovateurs occupent parfois une position ambigu travaillant dans une hi rarchie pour une partie de leur temps et animant une communaut de consommation production pour une autre partie Les informations qui s changent sur les plateformes d interaction servent clairer les d cisions concernant la d finition l utilisation le choix des produits Le dessin d un bon produit demande que les concepteurs se repr sentent pr cis ment son usage ult rieur de m me l utilisateur doit se repr senter a
56. it puisque la plupart des biens des services et des uvres d art sont au moins en partie num risables et que souvent l essentiel de la consommation en volume et parfois m me en valeur porte sur des fichiers informatiques reproduction de tableaux ou enregistrements musicaux par exemple On tentera de d finir l authenticit dans un monde num rique une authenticit qui n est plus unicit physique au niveau de l uvre mais plut t au niveau d un sch ma g n ral la capacit d tre copi sans perdre son caract re de pouvoir faire l objet de nombreuses variations transformations et r emplois comme jadis les uvres vivantes de la tradition orale Enfin dans une quatri me partie La culture ou le go t du symbole on tentera de pr senter la critique que les artistes et les innovateurs adressent au mod le conomique des go ts arbitraires et exog nes Il n est pas question pour eux de revenir au mod le acad mique qui fait d pendre l appr ciation d une sorte de qualit formelle signe que le processus de production s est d roul selon les r gles Mais il n est pas non plus question d admettre que chaque consommateur a une fonction d utilit qui lui est propre et dont il n a pas rendre compte Si une uvre est belle si une innovation est utile absolument c est dire si tous les consommateurs sont peu pr s d accord sur cette caract ristique comment une telle qualit peut elle se d finir On pr sentera la
57. it ce qui tait encore le cas avec les quipements lectrom nagers Si le dessin du produit doit reposer sur une m tarepr sentation de l usage c est dire sur une repr sentation des repr sentations de l usager il est sym triquement vrai que l utilisateur doit se m tarepr senter les produits c est dire se repr senter les repr sentations qui ont pr sid leur innovation Sur les plateformes d interaction s laborent des repr sentations collectives par les changes qui ont lieu autour de probl mes concrets qui se posent dans l utilisation de biens complexes par exemple des logiciels ou des ordinateurs De telles communaut s de pratique dont les r gulations sont d ailleurs tr s complexes fournissent au del de la solution de probl mes particuliers une base de donn es des lucidations progressives qui ont permis ces r solutions Le corpus ainsi constitu peut tre interrog par un moteur comme Google si bien que l historique des changes entre utilisateurs et experts sur des questions concr tes constitue une repr sentation globale accessible l ensemble des utilisateurs accessible aussi aux innovateurs qui disposent ainsi de la m tarepr sentation qui leur est n cessaire pour dessiner les produits 2 La socialisation des go ts modes signaux et dispositifs L conomie prend les fonctions d utilit comme une donn e et s interroge sur les moyens de satisfaire les consommateurs Les sciences soci
58. loi des produits sont inutilisables et l usage m me des produits devient paradoxalement un sujet d tude Le choix des consommateurs est compliqu ex ante par le fait qu ils ne sont pas guid s dans leurs choix par des go ts qui porteraient directement sur les produits et ex post par le fait que ces produits ne se pr tent pas aux routines d usage qu ils ont d j acquises lls doivent donc apprendre et changer des informations entre eux et avec les innovateurs Dans le cas du couplage culturel qu on pourrait aussi appeler couplage adaptatif divergent le travail cognitif qui dans le cas pr c dent tait un moyen pour r aliser l adaptation entre une offre innovante et des utilisateurs en interaction devient ici une fin en soi L utilit sociale r side moins dans l usage du produit que dans les efforts cognitifs des consommateurs se forger individuellement et collectivement des repr sentations partiellement communes Il n y a pas que les uvres d art ou les biens culturels qui sont justiciables d une telles analyse tous les biens et services des degr s divers produisent pour une part une culture qui leur est propre pour une part un attachement irraisonn selon les r ves collectifs et personnels que leurs difficult s d utilisation ont d clench s L automobile et tous les biens qui en d pendent fournissent un exemple particuli rement clair d une consommation symbolique qui a souvent t analys e comme telle 4 3
59. mateurs de mani re r flexive sont identifi s des prises alors qu en bonne logique on pourrait s attendre les voir d crits comme des t tonnements des postures ou des repr sentations mentales destin es faire merger ou diverger ces rep res communs Le statut donn la r flexivit dans la formation du go t est un enjeu fort parce que la diffusion des technologies de l information et notamment d Internet donnent un poids plus grand dans l ensemble des m diations ou des rep res communs ceux qui sont pris en charge par des amateurs avis mutuels adaptations sous titres par exemple apport es l objet dans le cas de films invention de 32 Sur la constitution autour d Internet d un paradigme exploratoire cf Nicolas Auray Internet et le r agencement de l activit autour de l exploration Working Papers in Economic and Social Sciences ESS 06 18 Telecom Paris 2006 http www enst fr data files docs id_637_1165507143_271 paf 33 Antoine Hennion voir 1993 La passion musicale Une sociologie de la mediation M taili Paris 34 Hennion rejette ainsi le terme de go t pour privil gier celui d attachement Dans un entretien avec Pierre Floux et Olivier Schinz il remarque quand quelqu un fait du v lo le dimanche ce n est pas un go t Nous pouvons y reconna tre tous les traits de l attachement une pratique la construction avec d autres l effort sur le corps Il fallait trouver un mot plu
60. me o apr s Rapha l il inventait la reproduction en s rie La num risation prolonge le mouvement de reproductibilit technique des uvres qui s tait initi avec la reproductibilit analogique photographie films L uvre culturelle commence substituer sa valeur rituelle une valeur d exposition alors que dans la situation technique ant rieure le go t tait li un recueillement il est d sormais l objet d une exp rience fondue dans la masse cin ma ou transform e par la participation La reproduction technique des uvres permet de vivre l exp rience culturelle en tant immerg dans une foule ou dans une masse Internet prolonge ce mouvement en cr ant une autre forme de collectif Le d veloppement des quipements num riques permet ainsi l individualisation de la r ception culturelle l coute d un enregistrement quand on veut o l on veut gr ce la portabilit des appareils de lecture et la g n ralisation du visionnement la demande Contrairement aux foules rassembl es dans la salle de cin ma ou au public co ncidant dans la lecture simultan e du m me p riodique le public des TIC des morceaux de musique h berg s sur Dans The Work of Art in the Age of Mechanical Reproduction Walter Benjamin voque l aura de l objet ou son autorit de la fa on suivante The authenticity of a thing is the essence of all that is transmissible from its beginning ranging from its su
61. ment l absence de polyphosphates c est aussi crit mais en outre un jambon riche en prot ines provenant qui plus est de cuisse de porc enti re Si l on pr cise cela c est donc qu il doit y avoir des jambons pauvres en l ments nutritifs voire des jambons reconstitu s Je pr f re donc me m fier des paquets qui ne m apportent pas de telles pr cisions D ailleurs contrairement aux deux autres qui comportent un tableau indiquant nettement la teneur en prot ines dont je me moquais radicalement jusqu pr sent le Fleury Michon se contente d une vague composition non chiffr e Ne voulant pas faire un choix incertain je l limine Cochoy Franck 1998 Le choix du jambon emball en grande surface ou l conomie du package L Ecole de Paris du management s ance du 3 juillet 1998 Lancaster Kelvin 1966 Change and Innovation in the Technolgy of Consumption American Economic Review 1966 56 1 2 pp 14 23 1 Stigler George J et Gary S Becker 1977 De Gustibus Non Est Disputandum American Economic Review 1977 67 2 pp 76 90 1 Dans sa le on du 14 mars 1979 au Coll ge de France Michel Foucault donne une formulation particuli rement claire de l originalit n olib rale Dans le n olib ralisme et il ne s en cache pas il le proclame on va bien retrouver aussi une th orie de l homo conomicus mais l homo conomicus l ce n est pas du tout le partenaire de l change L
62. mple s exprime comme un plaisir de la variation Dans le cas des jeux vid o les producteurs modifient r guli rement les d cors pour r pondre aux d sirs des consommateurs Les variantes peuvent d ailleurs tre fabriqu es par les utilisateurs eux m mes variantes de fonds ou d habillage skins etc Les TIC permettent ainsi une appropriation plus active par les consommateurs des variantes qui sont devenues dans de nombreuses formes de culture populaire la modalit majeure de consommation des uvres La communaut des utilisateurs actifs dans la production des variantes s largit bien au del du public restreint des fans Elle peut s tendre un grand nombre d utilisateurs qui sont par rapport aux produits culturels issus des TIC dans le m me rapport qu un auditeur de conte par rapport au r cit oral Son plaisir provient de ce qu il go te chaque fois une nouvelle variante du m me sch ma originel 4 La culture ou le go t du symbole Au cours du 19 si cle l utilitarisme et le lib ralisme s affirment comme r f rences politiques Les artistes sont dans une situation inconfortable ils se r voltent g n ralement contre le mod le des go ts horizontaux qui met sur le m me plan le plaisir faire des mots crois s et celui prouv l coute du Requiem de Mozart Mais ils se r voltent aussi contre le mod le des go ts verticaux qu on leur propose celui de la plus ou moins grande conformit des uvres
63. n Encore l poque classique couter son d sir ou suivre ses go ts ne peut videmment fonder ni la morale individuelle ni l action politique Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen L utilitarisme au contraire d fend un h donisme extr me il ne s agit pas d un picurisme mesur qui s interroge sur l origine des go ts et les cons quences long terme de la satisfaction des d sirs Bentham insiste sur le fait qu il n y a pas d autre but que le plaisir dans l instant Dans une phrase souvent reprise il affirme que si un jeu d risoire comme le jeu de marelle fournit plus de plaisir que tous les arts et toutes les sciences alors il poss de plus de valeur sociale On n est pas tr s loin de l humour de Sade lorsqu il affirme qu il serait ridicule de ne pas suivre ses go ts quelque bizarres quelque criminels m me qu on puisse les supposer Au moins ces textes ont ils la vertu de la clart Les conomistes ont souvent recul devant les bases utilitaristes du mod le standard Par exemple dans son texte sur l utilitarisme John Stuart Mill critique la vision extr me de Bentham et admet qu il vaut mieux tre un Socrate malheureux qu un imb cile heureux Mais la formalisation conomique standard ne tire aucune cons quence de cette concession la formation des go ts est hors conomie Il faut qu il en soit ainsi si l on veut que la doctrine lib rale puisse
64. nalit du mod le inf rentiel r side dans le fait que la communication ne repose pas essentiellement sur l existence pr alable d un code partag mais sur la simple reconnaissance par le r cepteur de l intention que l metteur a de communiquer Une fois cette reconnaissance acquise la complexit de ce qui est transmis est limit e par le cadre de la communication par exemple les moyens techniques utilis s qui peut rendre plus ou moins faciles et rapides les ajustements entre les repr sentations des interactants Dans le cadre d un tel mod le les calculs d inf rence repr sentent un co t cognitif et une communication r ussie conduit la reconstruction par le r cepteur du sens que l metteur avait l intention de communiquer Un message qui ne se plie pas aux r gles implicite de la pertinence et qui pourtant se donne comme digne d tre consid r va induire des m canismes de recherche la fois dans le savoir encyclop dique qu a t il voulu dire par X qu est ce que je sais sur X et dans la m tarepr sentation qu imagine t il que je sais sur X s est il tromp sur ma connaissance de X La recherche peut finalement fournir une interpr tation satisfaisante c est en particulier le cas des mots d esprit ou des formules piquantes qui d placent soudain l int r t du r cepteur depuis le contenu manifeste jusqu un lointain sous entendu permettant la compr hension Quand la recherche par vocations de pl
65. nserv cet engouement l ge adulte ils composent ainsi la g n ration Woodstock et cessent de se normaliser sur une chelle unidimensionnelle Ils ont des go ts dissonants Mais c est surtout l volution technologique dans le domaine de l information et de la communication avec l av nement d Internet et des outils d change de P2P qui a remis en cause le plus fortement le mod le l gitimiste des go ts consonants Internet a abondamment contribu rendre les pr f rences plus h t rog nes La mise disponibilit croissante gr ce Internet de contenus diversifi s a largi le ph nom ne d horizontalisation des go ts comme illustrent les pratiques exploratoires d chantillonnage culturel des adeptes des r seaux P2P En donnant acc s gratuitement par le piratage des fichiers musicaux que les consommateurs n auraient pas consomm sinon Internet suscite m me des ventes induites et cet effet de sampling peut m me contrebalancer l effet de substitution du bien pirat au bien achet En permettant d explorer de nouveaux go ts de tester de 5 C est essentiellement dans La Distinction crit en 1979 et qui reprend des enqu tes INSEE sur les pratiques culturelles des fran ais que Bourdieu construit sa th orie critique du go t sous titr e critique sociale du jugement Bourdieu n est pas le seul sociologue de cette g n ration revendiquer une d mystification de la notion de go t Dans un
66. par le consommateur qu un objet artisanal ou qu un uvre d art a t fait selon les r gles de la profession une telle appr ciation peut tre plus ou moins pertinente et l on con oit que les go ts lorsqu ils sont ainsi d finis puissent faire l objet d un apprentissage Mais le go t peut tre aussi une pr f rence arbitraire pour tel ou tel bien ou service Le consommateur n a pas rendre compte de ses penchants Il ne saurait expliquer ses inclinations on n attend pas de lui qu il les justifie Le go t n a pas tre form En discuter m me serait oiseux de gustibus non disputandum est La fantaisie et le caprice qui parfois portent inexplicablement certaines personnes vers tel ou tel type de consommation ont longtemps t consid r s comme un trait de caract re sans beaucoup d int r t ou m me comme un d faut combattre Au 18 si cle l utilitarisme et les premi res mod lisations conomiques mettent au contraire la fantaisie et le caprice au centre de la r flexion politique Il devient essentiel aux yeux de tous d assurer une enti re libert des go ts et surtout de ne pas s interroger sur leur gen se c est dire sur les moyens et les co ts de leur formation Dans la premi re partie du pr sent texte La production des go ts besoins d sirs et marketing on pr sentera rapidement l origine de l id e au demeurant trange que les go ts sont arbitraires et exog nes et on pr cisera le r le
67. part de l utilisateur ont les premi res fait l objet de critiques portant sur leur conformit au mod le standard des go ts exog nes et horizontaux Il leur a t en particulier reproch de mettre en avant les go ts du public dans le temps m me o elles les fa onnent et les formatent pour optimiser leurs profits Un tel type de discussion s l ve chaque fois qu une cha ne de t l vision introduit un programme qui a du succ s mais dont la qualit culturelle fait l objet de critiques Faut il donner au public ce qu il veut les go ts ne sont ils pas manipul s et les programmes ne sont ils pas choisis de fa on maximiser par exemple les revenus publicitaires quelle serait donc cette qualit verticale qui permettrait certains de critiquer ce que d autres appr cient Et l on retrouve l argument du jeu de marelle de Bentham Les sociologues qui ont tudi les industries culturelles et nous en verrons des exemples dans le deuxi me partie de ce texte ont bien soulign la complexit du processus de consommation d une uvre et l tendue de la coproduction Ainsi critiquant les conomistes classiques mais au fond d accord avec les th ses n olib rales voqu es plus haut Bourdieu d crit le travail d appropriation du consommateur culturel qui contribue produire ce qu il consomme 1 3 La critique et la promotion communautaires sur Internet Avec le d veloppement d Internet la question de la formation d
68. que du fonctionnement que doit induire une uvre r ussie On raconte que Balzac qui n couterait avec respect toutes les anecdotes si petites qu elles soient qui se rapportent ce grand g nie se trouvant un jour en face d un beau tableau un tableau d hiver tout m lancolique et charg de frimas clairsem de cabanes et de paysans ch tifs apr s avoir contempl une maisonnette d o montait une maigre fum e s cria Que c est beau Mais que font ils dans cette cabane quoi pensent ils quels sont leurs chagrins les r coltes ont elles t bonnes ils ont sans doute des ch ances payer Rira qui voudra de M de Balzac J ignore quel est le peintre qui a eu l honneur de faire vibrer conjecturer et s inqui ter l me du grand romancier mais je pense qu il nous a donn ainsi avec son adorable na vet une excellente le on de critique Il m arrivera souvent d appr cier un tableau uniquement par la somme d id es ou de r veries qu il apportera dans mon esprit 4 2 L conomie symbolique de l utile au culturel Pour pr ciser le fonctionnement cognitif sp cifique qu induit une uvre d art cette tranget ou cette bizarrerie dont parle Baudelaire il peut tre clairant de partir des analyses des chercheurs en sciences cognitives qui s int ressent la suite de Grice la communication pragmatique Ils opposent le mod le classique du codage au mod le inf rentiel de la communication selon le
69. quel ce qui est transmis n est qu un indice souvent vague et lointain du sens transmettre mais un indice suffisant pour que le r cepteur soit capable de retrouver le sens du message en se servant non seulement de tout ce qui entoure le message mimiques gestes comportements etc mais aussi des l ments du savoir partag progressivement construit entre les interlocuteurs La plupart des communications sont donc toujours dans un souci d conomie de moyens la limite de la compr hension l metteur anticipe les inf rences du r cepteur et ne fournit que des sortes de devinettes Pour qu une telle communication fonctionne correctement il est n cessaire que les interactants disposent l un comme l autre d une m tarepr sentation suffisante c est dire qu ils se repr sentent correctement les repr sentations de l autre Il leur faut galement utiliser des r gles communes d inf rence qui reposent sur l hypoth se partag e par les interlocuteurs que celui qui parle cherche tre le plus efficace et le plus pertinent possible 58 Dans le texte sur l Exposition Universelle de 1855 texte consacr aux Beaux Arts Baudelaire crit dans la partie M thode de critique Tout le monde con oit sans peine que si les hommes charg s d exprimer le beau se conformaient aux r gles des professeurs jur s le beau lui m me dispara trait de la terre puisque tous les types toutes les id es toutes les sensations se confondra
70. r sente ici divers sch mas explicatifs de la diversit des go ts et de leur gen se i les go ts exog nes de la th orie conomique standard ii la vision propos e g n ralement par la sociologie d une consommation servant de syst me de signalisation sociale iii les go ts comme r sistances la perte d authenticit qu induirait l industrialisation et les moyens modernes de reproduction enfin iv les go ts explicables partir des processus cognitifs dont les uvres d art les biens complexes ou les produits innovants ont besoin pour tre choisis et utilis s Les succ s des collectifs en ligne de traitement d informations et de savoirs permettent la consommation des biens et services innovants Leurs checs apparents servent la constitution de cultures qui facilitent leur fonctionnement et pr parent l volution des go ts Sommaire 1 La production des go ts besoins d sirs et marketing 4 1 1 La r volution utilitariste la libert du mauvais go t 4 1 2 L conomie marchande et la production des go ts eesseesseeeseeeneeene tenete en tenn nenn rennen nsen nnnn 6 1 3 La critique et la promotion communautaires sur Internet 7 2 La socialisation des go ts modes signaux et dispositifs s s ssssssnsuuennnnunnunnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnn 9 2 17 Le go tet l imitation la moden 5583252288 Lana a dat tnt ee tie Mile aiae 9 2 2 Le go t et l int gration la l gitimit culturelle
71. rs apprennent rep rer les biens qui leur conviennent ils n ont pas transformer leur pratique ils n changent pas d informations entre eux enfin ils n influencent pas l innovation des produits Dans le cas du couplage adaptatif les deux sous algorithmes sont en co volution bien que coupl s ils sont soumis des logiques d volution diff rentes Tout se passe comme si chacun des deux d veloppait une repr sentation du fonctionnement de l autre Les changes entre les entreprises productrices et les utilisateurs ne peuvent tre compl tement cod s Les messages entre les SSperber amp Wilson ibid If Grice is right the inferential abilities that humans ordinarily use in attributing intentions to each other should make communication possible even in the absence of a code And of course it is possible Cohen Jean 1966 Structure du langage po tique Paris Flammarion 1966 5 sur la p riode tudi e par Jean Cohen du 17 au 20 si cle Bien qu en un certain sens le seul fait de d signer un objet comme digne d attention le constitue comme uvre d art Voir ce sujet les analyses de Thierry de Duve Nominalisme pictural Marcel Duchamp la peinture et la modernit Ed de Minuit Paris 1984 Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen 20 utilisateurs ne peuvent tre qu ambigus ils doivent faire l objet d lucidations Les modes d emp
72. s entre consommateurs potentiels ne servent pas seulement rep rer dans l espace des go ts les positions des biens et des critiques ils permettent la d finition progressive des produits et des segments de client le qui leur correspondent Les producteurs sont m me de d finir et de tester des types nouveaux de produits et les utilisateurs investissent dans des consommations qui modifieront leurs go ts Dans le domaine culturel la co volution des innovations et des go ts passe par la fourniture gratuite de produits parfois avec une qualit inf rieure celle du produit final comme dans le cas des diffusions d pisodes de s ries de t l vision sur YouTube et par l change de fichiers sur les r seaux P2P peer to peer ou pair pair que les producteurs tol rent ou encouragent Lorsque les produits qu on trouve sur le march sont complexes leur utilisation convenable par les consommateurs est une condition essentielle de l efficacit de l algorithme global de production Au fur et mesure que les processus de production d centralis e se sont sophistiqu s la solution classique du mode d emploi a trouv rapidement ses limites Aujourd hui les hot lines co tent cher et sont Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen inefficaces En effet il ne s agit plus d obtenir que les acheteurs fassent preuve de comportements simples et pr d termin s par la forme du produ
73. s horizontaux lorsque les consommateurs ne sont pas d accord sur le classement des options et qu ils se r partissent arbitrairement dans l espace o ces options sont rep r es Un vendeur sur Internet qui offre des conseils du type les consommateurs qui ach tent ce que vous venez de choisir ach tent g n ralement aussi l article X a construit statistiquement partir de l historique des ventes d j r alis es un tel espace de go ts o il a plac les biens et les consommateurs Dans l utilitarisme et la mod lisation conomique standard qui l inclut il y a deux hypoth ses importantes d une part les go ts sont horizontaux et d autre part ils sont fixes c est dire qu on ne peut d placer les consommateurs dans l espace des go ts On consacre la suite de ce texte la pr sentation des diverses critiques soulev es l encontre de ces deux propositions 3 Dans The Rationale of Reward 1775 Bentham crit The utility of all these arts and sciences speak both of those of amusement and curiosity the value which they possess is exactly in proportion to the pleasure they yield Every other species of preeminence which may be attempted to be established among them is altogether fanciful Prejudice apart the game of push pin is of equal value with the arts and sciences of music and poetry If the game of push pin furnish more pleasure it is more valuable than either Bentham Jeremy 1775 The Rationale of Rew
74. s neutre qui d cale un peu Passion n allait pas non plus ce n est qu un des formats de l attachement On peut faire du v lo le dimanche tous les jours en sachant tout sur le v lo sans tre un passionn Le mot passion est trop marqu comme format Hennion Antoine 2003 Engager son propre go t Entretien autour de la sociologie ethnographique d Antoine Hennion Revue Ethnographiques n3 avril http www csi ensmp fr Cf aussi Antoine Hennion 2004 Pragmatics of taste in Jacobs Mark and Nancy Hanrahan eds The Blackwell Companion to the Sociology of Culture Oxford UK Malden MA Blackwell 2004 pp 131 144 3 Dans l entretien pour la revue ethnographiques org o il analyse sa sociologie du go t Antoine Hennion crit Empruntons des exemples aux sportifs pour escalader une montagne il faut n cessairement que des humains constitu s en collectifs se soient rassembl s et entra n s Il faut galement des objets des supports et des crits Il faut encore en discuter le soir la veill e tu as vu ce passage pour le passer il faut mettre une main ici et l autre l etc C est bien gr ce au caract re collectif de leur activit que la montagne devient pour les grimpeurs un ensemble de prises saillantes Il n y a pas moins de nature parce que les humains s en emparent mais plus en produisant l objet le corps le collectif et les dispositifs l attachement est une fa on de multiplier le r el
75. sciteraient un sentiment de beaut parce que ces caract ristiques la g n ration soit intra soit extra organique C est par la parent des cellules et par la parent des esp ces qu on explique aujourd hui les analogies ou homologies de toutes sortes relev es par l anatomie compar e entre les esp ces et par l histologie entre les l ments corporels Toutes les similitudes d origine sociale qui se remarquent dans le monde social sont le fruit direct ou indirect de l imitation sous toutes ses formes imitation coutume ou imitation mode imitation sympathie ou imitation ob issance imitation instruction ou imitation ducation imitation na ve ou imitation r fl chie etc Tarde Gabriel 1890 Les lois de l imitation 1890 Paris Seuil 2001 p 64 E Pour Tarde en effet la nef de l art vogue au gr des vents que son propre pass lui souffle op cit p 81 c est pourquoi le voyageur observe plus de dissemblance entre les membres de la noblesse et du clerg de deux nations rest es herm tiquement ferm es l une l autre qu entre leurs cultivateurs ou leurs man uvres 2 Ainsi Tarde constate que le b illement le b illement d ennui qui a une origine mentale se transmet de fa on bien plus contagieuse que l ternuement ou la toux De la m me fa on la fonction vocale est minemment imitative comme d ailleurs toutes les fonctions de relation mais surtout en ce qu elle a de spirituel la diction et la prononciat
76. sion des uvres il y ait un acc s croissant du public la position d auteur Alain dans Pr liminaires l Esth tique ou Jankelevitch dans Le Je ne sais quoi et le presque rien offrent galement des mod les clairs de cette conception litiste de l authenticit Une telle subordination du go t l authenticit de l uvre con ue comme originale et unique est une repr sentation bien ancr e dans l esth tique depuis le 18 me si cle On peut en trouver un exemple assez net avec Rembrandt D une part Rembrandt a t l un des promoteurs de l id e du tableau original et il a fond la valeur sur la singularit du nom et l authenticit de la signature il reste ainsi un des cr ateurs de l id e de l individualit impliquant le d sir de se distinguer d exister comme moi peintre avec un style unique et personnel Alpers 1990 Rembrandt tait entour de collaborateurs qu il dirigeait avec pr cision pour ne jamais perdre sa patte identifiable entre mille il a con u la peinture comme un acte collectif et l atelier comme une entreprise II n est pas tonnant que culmine avec Rembrandt l activit de lutte contre les faussaires et les imitateurs activit li e l abondance de suiveurs du ma tre qu on a appel les rembranesques Rembrandt promoteur de l esth tique de l authenticit a con u le go t comme d busquement de l unicit de l uvre comme la guerre au faux dans le temps m
77. t les uvres non leur utilit imm diate mais un certain charme un presque rien qui se pr sentait souvent comme un ineffable ou un inexprimable inassignable et vasif Le charme est la fascination de la pr sence myst re non d essence abstraite mais de parousie concr te Longtemps le charme est rest li la pr dilection pour des objets ou des services uniques et authentiques par opposition des objets fongibles qui taient des simulacres o des copies 3 1 Une critique de la reproduction m canique des uvres s est vigoureusement fait jour aupr s de certains esth tes d fendant le spectacle vivant Cependant avec la num risation largie des uvres une nouvelle conception de l authenticit se d gage L authenticit dans un monde num rique n est plus unicit physique au niveau de l uvre mais plut t comme l illustre l essor li aux TIC d une part la capacit de faire vivre le souvenir des pr c dents propri taires par exemple dans les objets d occasion 3 2 et d autre part la possibilit de donner lieu de nombreuses variations transformations et r emplois 3 3 37 Hennion l a remarqu dans le domaine de la musique de vari t s o il insiste sur la construction de l coute musicale dans le microcosme productif du studio Regardons le travail des interm diaires et par ce que j appelais un effet d agrandissement on a d j une pr production consommation du produit en studio
78. tour d un plaisir de collectionneur fait craindre toutefois que l artifice l emporte sur le spontan et la manipulation sur des propositions sinc res et loyales Ainsi les plates formes d interaction trouvent elles une limite dans l inqui tude qu elles suscitent chez les consommateurs les informations sont elles contr l es par un petit nombre d interm diaires Dans quelle mesure les bonnes critiques port es sur tel jeu vid o ne sont elles pas induites par la firme productrice ou les mauvaises par un de ses concurrents Comment attester de la sinc rit de l exp rience singuli re qui est d crite Une troisi me voie trouv e pour reconstruire l authenticit dans un monde num rique a ainsi consist proposer des mises en communication directes entre les consommateurs pour qu ils puissent 4 Pour une analyse des conditions de r ception du contenu g n r par les utilisateurs dans le tournant du Web 2 0 cf Gensollen Michel 2006 Les communaut s en ligne changes de fichiers partage d exp riences et participation virtuelle Esprit n 324 mai 2006 Que nous r serve le num rique V oir aussi Auray Nicolas 2007 Folksonomy the New Way to Serendipity Communications amp Strat gies n 65 2007 pp 67 91 7 Pomian Krzysztof 1987 Collectionneurs amateurs curieux Paris Venise XVIe XIIIe si cles Paris Gallimard 1987 8 Ibid Les collectionneurs illustrent un groupe social adh rent
79. u moins de fa on approch e la logique de conception du produit Ainsi tous les intervenants dans une communaut de pratique collaborent pour b tir une repr sentation commune du processus de production et l am liorer conjointement Les firmes ne se contentent pas d analyser les usages encore moins s interrogent elles sur les go ts des consommateurs elles tentent plut t de pr ciser l interface produits services informations entre leurs algorithmes de production et ceux des consommateurs On notera qu internet et les relations entre consommateurs C2C que ce r seau permet facilite la mise au point du processus global de production Dans le pass la production des firmes devait s abouter des processus divers prenant place chez des m nages aux comp tences vari es Aujourd hui les firmes sont en face d ensembles de consommateurs en interaction ceux ci constituent un processus collectif de production L organisation des utilisateurs permet de simplifier l interface entre les firmes et leurs clients dans le temps m me o cette interface tend se compliquer en raison de la rapidit croissante du progr s technique et des innovations L adaptation des deux phases de la production production de la firme production par l utilisateur peut porter sur de nombreuses dimensions nous en mentionnerons deux qui jouent un r le important ex ante l identification des produits et ex post leur utilisation On abordera un troisi me
80. une classe ou au contraire de s en diff rencier De tels signaux portent d ailleurs soit sur la consommation elle m me soit sur les pratiques qui l entourent S il est vrai que la consommation est une pratique sociale il reste galement peu douteux qu une partie au moins des d cisions d achat s explique directement partir de la nature des biens choisis On ne voit d ailleurs pas quelle politique culturelle ou conomique pourrait se fonder sur de telles analyses sinon la promulgation de lois somptuaires pour pr venir des bulles sp culatives Dans une troisi me partie Le bon go t et la recherche de l authentique on abordera une critique originale de la mod lisation conomique des go ts il s agit cette fois d admettre que le go t porte Internet et la synth se collective des go ts juin 2007 Nicolas Auray et Michel Gensollen bien sur les choses mais en distinguant entre des objets ou des services uniques et authentiques et d autres qui fongibles existent plusieurs exemplaires indiscernables et qui n offrent la consommation qu un leurre une sorte d imitation sans consistance En quelque sorte le go t vise essentiellement travers les biens les services et les uvres non leur utilit imm diate mais un certain charme un presque rien par exemple le souvenir des propri taires pr c dents dans le cas d une antiquit Une telle critique de la reproduction m canique des uvres est aujourd hui d actual
81. us en plus lointaines s av re finalement infructueuse il peut se faire que le travail cognitif en lui m me ait t utile au r cepteur L chec de la communication est alors une sorte de succ s Le message a eu son utilit Il constitue une uvre bizarre probl matique obscure qui fait r ver Les analyses statistiques des carts entre prose et langage po tique montrent ainsi que tout se passe comme si la po sie cherchait faire obstacle la compr hension imm diate les carts vont en croissant au cours du temps au fur et mesure qu ils sont devenus des banalit s et ne forment plus des obstacles suffisants l interpr tation Cependant tout message ou spectacle incompr hensible ne constitue pas une uvre de qualit La dimension verticale esth tique d pend d au moins deux l ments d une pari l habilet de l uvre se pr senter comme valant la peine d tre comprise alors m me qu elle est manifestement ambigu d autre part le bon quilibre obtenu dans les r veries individuelles qui auront t finalement induites entre la partie commune tous les utilisateurs lecteurs spectateurs etc qui constitue une culture et la part propre chacun qui induira l attachement sentimental cette culture La distinction entre communication cod e et communication inf rentielle fournit une grille de lecture de la fa on dont actuellement les deux sous algorithmes de production s adaptent l un l autre

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