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1. l islam dit Si je suis journaliste New York ou chercheuse Paris je ne comprends pas la m me chose que la paysanne analphab te de telle ou telle campagne Le texte reste le m me mais ma compr hension du texte volue Le texte est divin Dounia Bouzar anthropologue sp cialis e dans le fait religieux a si g de 2003 2005 au Conseil fran ais du culte musulman Elle a men diverses recherches actions aupr s des jeunes musulmans n s en France et a crit des spectacles sur la question de l galit des chances Depuis septembre 2009 elle a cr son cabinet d tudes Cultes et Cultures Consulting pour aider l application de la la cit au sein des entreprises et des services publics Elle a t r cemment nomm e Chevalier de l Ordre des Palmes Acad miques pour son apport au patrimoine culturel fran ais mais son interpr tation d pend toujours d une exp rience au monde je comprends mon texte partir de ce que je suis et de ce que je vis Or ce qui nous int resse aujourd hui c est d appr hender les diff rentes fa ons de comprendre l islam de la part des musulmans qui sont n s et socialis s en France aujourd hui ce que j appelle la premi re g n ration de Fran ais de confession musulmane Quel type d islam construisent ils dans cette soci t la que plurielle o Dieu ne fait plus la loi Je vais tablir trois cat gories un peu caricaturales pour que l on puisse en d battre ensuite et avoir2. tations et pr tendre que c est la bonne je vais simplement vous rappeler le rapport la la cit des chr tiens pour tenter de vous convaincre qu il y a toujours un rapport entre le contexte anthropologique et l interpr tation d une religion Le grand public pense que la religion chr tienne tait plus compatible avec la la cit que l islam qui serait par nature incompatible parce qu il existait pour les chr tiens le fameux rendre C sar ce qui est C sar et rendre Dieu ce qui est Dieu Pourtant cela n a pas t aussi automatique puisqu il a fallu attendre corrigez moi si je me trompe 1873 pour que le pape appelle les chr tiens de fa on officielle renoncer la cit th ologique et se rallier la R publique Et le moins que l on puisse dire c est que le passage la la cit s est fait dans une grande douleur Donc ce qui appara t aujourd hui comme une vidence les valeurs communes entre la la cit au sens du respect des visions du monde et la chr tient est en fait un produit de l histoire Si l on examine la question de la condition des femmes c est la m me chose Les th ologies f ministes chr tiennes estiment que la compr hension biblique de l identit et du r le des femmes a longtemps repos sur un choix de textes tr s restreint Elles reprochent l glise d avoir interpr t les textes en fonction des st r otypes de l poque et notamment la conviction du mo
3. d un radicalisme d une instrumentalisation de la religion Si on ne fait pas ce travail l je pense qu on risque effectivement d tre d bord s Bibliographie e L islam des banlieues Syros La D couverte 2001 e la fois fran aise et musulmane La Martini re Jeunesse 2002 e L une voil e l autre pas Albin Michel 2003 e Monsieur Islam n existe pas Hachette Litt ratures 2004 e Quelle ducation face au radicalisme religieux Dunod 2006 Prix de l Acad mie des Sciences Morales et Politiques de Paris e La R publique ou la burqa les service publics face l islam manipul Albin Michel 2010 Laicit mode d emploi Editions d Organisation 2010 D bat Table des questions Quelle est la proportion num rique des trois cat gories de jeunes musulmans que vous avez d finies Dounia Bouzar C est en effet la question la plus importante Cette proportion a chang Honn tement je pense que nous avons connu une r gression Il y a dix ans quinze ans quand j ai commenc mes recherches la premi re cat gorie tait tr s forte On trouvait toutes ces filles la fois musulmanes et f ministes gt notamment dans les banlieues qui d siraient vraiment remettre en question des traditions de papa et maman s apercevaient que celles ci n taient pas sacr es et se r appropriaient le Coran de mani re tr s moderne L islam tait alors investi comme un espace de libert pour elles pour contrer les t
4. des l ments pour parler de la m me chose Il faut pr ciser que lorsque je parle de musulmans je nomme bien les individus croyants de confession musulmane et non pas ceux qui seraient originaires d un pays musulman ou simplement caract ris s par un pr nom de r f rence musulmane Mon objet de travail concerne les croyants 1 La relation l islam des jeunes musulmans qui vont bien Je vais d signer dans la premi re cat gorie les jeunes qui vont bien dont on n entend pas parler Ces derniers ont appris dire je l cole de la R publique et se r approprient leurs textes musulmans au travers de cette nouvelle trame culturelle bas e sur l individu Ce n est plus le clan qui dit ce que l islam dit mais l individu qui v rifie ce que le clan dit que l islam dit Ce passage de la culture de type clanique l approche moderne bas e sur l individu provoque la remise en question des interpr tations traditionnelles Ces jeunes reprochent leurs parents d avoir confondu traditions et religion surtout pour ce qui concerne la condition des femmes Ainsi de fa on paradoxale la religion permet ces filles de formuler au sein de leur famille des revendications nouvelles acc s de longues tudes choix du mari ind pendance spatiale etc En se r appropriant le texte en fran ais elles d couvrent qu il n y a pas d obligation ethnique dans le mariage musulman que la recherche du sa
5. la seule possibilit est d imiter celui qui en parle Ce qui compte c est de se ressembler L individu perd ses propres contours identitaires parce qu il a le sentiment d tre le m me que les autres et de percevoir exactement les m mes motions L identit du groupe remplace l identit de l individu Pour arriver subordonner le jeune au groupe le pr dicateur gourou arrache les jeunes tous ceux qui assurent traditionnellement leur socialisation enseignants ducateurs animateurs parents et m me imams Il s agit d exacerber les diff rences avec les autres c est dire tous ceux qui n adh rent pas la secte Et il s agit aussi d exag rer les ressemblances entre adeptes jusqu provoquer l amalgame Parce qu l int rieur du groupe les uns ne doivent pas se distinguer des autres Parce qu l int rieur du groupe le je doit devenir un nous sans diff renciation Parce qu l int rieur du groupe toute diff rence doit tre an antie Toutes les id ologies de rupture reposent sur des exaltations de groupe La fusion na t de l illusion des adeptes d avoir les m mes motions Il faut une seule repr sentation une seule grille de lecture du monde On prouve aux jeunes que leur col re est justifi e On leur explique que tout le syst me pr voit de les exclu re parce qu ils sont d origine musulmane Rachid n a pas r ussi son bac C est parce qu il est musulman Samir a pe
6. rang des islamophobes parce que cela a confort les repr sentations n gatives que ces derniers avaient d j sur l islam en regardant les pays musulmans Et plus il y aura d islamophobes plus il y aura d islamistes car islamophobes et islamistes partagent la m me d finition de l islam Pour affaiblir les int gristes la seule solution consiste leur ter leur justification l islam Autrement dit il y a urgence d finir les crit res qui distinguent l int grisme de l islam afin de le prendre pour ce qu il est un vulgaire terrorisme radiquer sans tat d me En se trompant de diagnostic les autorit s politiques ne pourront pas tre efficaces L amalgame avantage toujours les int gristes Qu est ce qui rel ve de la libert de conscience Que doit on prot ger au titre de la loi de 1905 qui quand m me nonce que la R publique garantit la libert de conscience tous les Fran ais La loi de 1905 a t une grande bataille de croyants et non croyants qui se sont assis autour d une table pour d cr ter que plus jamais il ne faudra tre de la religion du roi pour tre sujet du roi Depuis en France on ne peut plus dire qu une seule vision du monde est sup rieure Chaque Fran ais peut avoir la sienne tant qu il n empi te pas sur celle de l autre Posons nous alors cette question qu est ce qui rel ve de cette application concernant les musulmans et qu est ce qui rel ve d un dysfonctionnement individuel
7. Conf rence donn e lors de la session 2010 acn Migrants un avenir construire ensemble de France L islam et les musulmans en France DOUNIA BOUZAR L int gration des personnes de culture musulmane une question part Si je devais r pondre comme cela je dirais oui L islam est il concern En tout cas il est pris en otage Effectivement nous avons une vision du monde bi polaire qui est en train de se refermer sur nous D un c t certains discours m diatiques et politiques nous pr sentent un monde avec un islam qui serait par essence archa que incapable d aucune volution face un Occident qui serait par essence moderne et qui aurait tout invent De l autre c t des discours islamistes opposent aussi l islam et l Occident en miroir du premier discours il s agit de dire que l islam a tout invent ce qui le place en sup riorit face un Occident qui n aurait rien produit mais juste copi l islam Vision du monde bi polaire partag e donc par islamistes et islamophobes Sur cette base les islamophobes renforcent les islamistes puisque en quelque sorte ils valident leurs interpr tations Ils reprennent la fa on dont les islamistes comprennent l islam pour l attaquer En effet islamistes et islamophobes sont d accord pour estimer que l islam est d finitivement incompatible avec la la cit avec la modernit avec l galit hommes femmes etc Islamistes et islamophobes sont aussi d accord po
8. aire les radicaux qui sont des musulmans mod r s pour ne pas dire pas musulmans du tout Nous appeler musulmans mod r s valide le postulat selon lequel l islam serait par essence une religion archa que et violente C est encore une fa on de valider la d finition de l islam des radicaux donc de leur donner encore plus de pouvoir Ils ont impos leurs interpr tations comme postulat du d bat public J ai l habitude de dire qu on ne rencontre jamais des cultures on ne rencontre jamais des religions on rencontre toujours des individus qui s approprient des cultures et des religions elles m mes en constante volution Pour soutenir ceux qui pensent leur islam je vais me r p ter la meilleure fa on de les aider est de ne pas les d finir partir du pass ou partir des pays musulmans ou pire partir de Ben Laden Il faut leur laisser le droit de se d finir librement avec leurs nouveaux morceaux de culture fran aise et leur exp rience humaine partag e avec d autres types de jeunes ici en France Ne nous enfermez pas dans une tranget qui n est pas la n tre Nous ne sommes pas aussi diff rents qu on voudrait bien le faire croire L islam n est pas une religion trang re Aujourd hui l islam est une religion fran aise Cette nouvelle g n ration de Fran ais de confession musulmane est de culture fran aise Ils regardent les m mes films et coutent la m me musique Cela aura un impact sur leur co
9. ation entre les individus Ces d monstrations religieuses ressemblent des clatements du moi c est moi qui existe c est moi qui d cide c est moi qui donne la norme Rajoutons cela que le discours fait d autant plus autorit sur des jeunes qui ne connaissent pas leur religion et n ont pas eu la plupart du temps d ducation religieuse Comme tous les discours totalitaires et sectaires le discours salafiste construit des nouvelles fronti res symboliques qui s parent les uns des autres Il rige des s parations infranchissables entre croyants de m me religion entre croyants de religions diff rentes entre croyants et non croyants entre hommes et femmes Il red finit les fronti res entre la sph re priv e et la sph re publique jusqu ce qu il ne reste plus rien de la premi re L adepte ne doit plus avoir de droits en dehors des int r ts du groupe L adepte ne doit plus avoir de temps personnel L adepte ne doit plus avoir d espace priv Conclusion comment d samorcer l autorit de ce discours radical Il faut arr ter de faire le proc s de l islam d s qu il y a du radicalisme dans l air Cela emp che en effet les musulmans ceux que l on appelle mod r s de combattre les radicaux puisqu ils doivent d abord d fendre l islam en rectifiant tous les propos m diatiques La critique de l islam ne combat pas l int grisme elle le nourrit Les int gristes n ont que faire des discussion
10. atmosph re sacr e des v nements miraculeux de la cr ation du monde C est comme si on sortait du temps r el pour entrer dans un temps virtuel un temps sacr partag avec Dieu Ce discours n est pas forc ment dangereux pour la soci t mais l est sans aucun doute pour le jeune puisqu il lui enl ve toute possibilit de rester un sujet pensant en lui inculquant que la solution se trouve dans le comportement de ses anc tres et non pas dans sa propre compr hension de sa religion Un discours qui rend tout puissant Les imams voquent leur difficult parler th ologie avec ces jeunes car ces derniers inversent la question de l autorit ils ne se soumettent pas une norme religieuse comme c est traditionnellement le cas pour les pratiquants musulmans ou d autres religions mais s approprient l autorit de la religion en leur nom propre pour s riger eux m mes en autorit s au dessus de tous les autres hommes Sous pr texte que seul le Coran fait autorit certains jeunes d clarent que l imam n y conna t rien Ils revendiquent donc le droit de parler au Nom de Dieu puisqu il n y a personne au dessus d eux part Dieu Alors que la peur du jugement dernier pousse habituellement les croyants avoir une bonne conduite sur terre ces jeunes passent par Dieu pour contourner cette r alit terrestre et s enfermer dans une bulle Ils utilisent la force du rapport Dieu pour tablir un rapport de domin
11. connaissance de ces discriminations avec des revendications enti rement sociales et conomiques Mais progressivement de mani re insidieuse les m dias ont culturalis cette r volte sociale au lieu de travailler sur les pr jug s racistes des discriminants ils ont fait croire au grand public que ces jeunes br laient des voitures parce qu il n taient pas int gr s que leurs parents ne savaient pas les tenir dans cette nouvelle soci t etc Alors que les revendications concernaient la question de l galit de l emploi de l habitat la Marche pour l Egalit est devenue Marche des Beurs Cette culturalisation du dysfonctionnement social a permis aux politiques de faire l conomie des remises en question sociales et politiques de la gestion des banlieues Et on en est toujours au m me point vingt ans apr s Sauf qu aujourd hui on ne culturalise gt plus les dysfonctionnements sociaux on les islamise Mais c est toujours le m me processus qui consiste relier le comportement d un jeune sa pr sum e culture ou sa pr sum e religion pour faire l conomie des conditions sociales qui r gnent dans ces espaces l Les interlocuteurs politiques et institutionnels ont donc perdu toute l gitimit aux yeux des jeunes fr re s t moins de cette poque La distance entre la devise r publicaine et la r alit entre th orie et application est trop importante Ces jeunes ne croient plus e
12. de conscience s arr te o commence la libert de conscience de l autre que l autre a le droit d tre ath e ou chr tien que l on n a pas imposer sa vision du monde et vice versa Dans l tat actuel des choses on ne peut donc pas comparer un pays th ologique dictateur une r publique la que Si l on veut vraiment faire des comparaisons comparons leur fonctionnement avec la France du temps des rois o il fallait tre de la religion du roi pour tre sujet du roi Avant la R volution et la la cit Quant votre question sur le mod le du Proph te chef guerrier le milieu musulman transmet que l islam cela veut dire se soumettre Dieu pour justement tre en paix sociale ne plus se battre pour les 360 dieux et d esses qui pr existaient avant l islam et menaient chaque tribu vouloir imposer son petit dieu aux autre s Si l on s attarde sur l exemple du Proph te la plupart des musulmans s y r f rent pour se rappeler qu il avait de proches conseillers chr tiens et juifs On a donc quand m me toute cette alliance cette histoire Alors d finir le Proph te chef guerrier c est exactement comme si vous preniez des pans de l histoire chr tienne des croisades ou de l Inquisition et que vous sacralisiez les exemples de l poque On est toujours dans le m me d bat pour la plupart des musulmans le fait que le Proph te ait men des batailles tait circonstanciel pour sauver les premiers musu
13. e les particules volantes qui ne savent ni d o elles viennent et ni o elles veulent aller en leur offrant un univers o ils reconstruisent de nouvelles d marcations Il semble que le jeune vivant en France qui se sent Arabe Marseillais Fran ais Kabyle Roubaisien Alg rien Bambara etc ne tombe pas dans ce type de groupuscule Le lien territorial quel qu il soit les prot ge L illusion de s inscrire dans une filiation sacr e Le discours salafiste fait croire aux jeunes que la seule fa on de poss der la v rit consiste raisonner comme les pieux anc tres Les questions d aujourd hui ne sont pas abord es directement on cherche un cas similaire dans le pass Au lieu de se r f rer au Proph te on s identifie lui On ne raisonne que par analogie Qu est ce que le Proph te aurait pens de cette question Aurait il bu dans ce verre Aurait il mis cet habit La vie du Proph te ne leur fournit pas une explication du monde c est la perspective de la reproduire qui alimente leur existence Pas besoin de comprendre pas besoin de r fl chir pas besoin des autres la r p tition donne l impression de rester pur On enjambe la chronologie pour entrer dans un temps sacr On rejoue l poque de ce que l on consid re comme la cr ation du monde C est pour cette raison que la fusion des individus se construit autour de la notion de foi ext rieure en r p tant de mani re obsessionnelle les rituels on recr e l
14. lmans et l islam Face aux pers cutions il s est exil et a cr le premier tat musulman pour permettre l islam d exister La tenue des batailles et la cr ation de l tat musulman sont de simples produits historiques En revanche pour les islamistes ce passage historique devient un exemple sacr qu il faut reproduire ind finiment Mais ce serait bien que vous vous rappeliez que c est la m me Bible qui a aussi servi la paix et aux massacres des Croisades Essentialiser une religion l emp che d voluer Comment s en sortir alors Plusieurs questions sont relatives notre religion chr tienne et la religion musulmane de nombreux groupes chr tiens cherchent mieux conna tre l islam en vue de meilleures relations D apr s vous o en sont les efforts des musulmans en France dans la compr hension du christianisme Enfin avec le Concile Vatican IT l glise catholique a mis en valeur les principes th ologiques que vous voquez Qu en est il pour l islam Des fondements th ologiques existent il s pour appuyer la vision de l islam du premier groupe celui des musulmans qui vont bien en France et dans la modernit Dounia Bouzar Une anthropologue regarde comment les hommes comprennent leur religion et selon quels param tres ils comprennent ceci plut t que cela Plut t que de se lancer dans un d bat th ologique qui sera en fait id ologique car l on va devoir choisir entre les diverses interpr
15. membre du Conseil des Semaines Sociales et Beno t Bonnichon secr taire g n ral ont relay les questions des participants Dounia Bouzar Dans les trois religions il existe la fois des parties de texte qui condamnent l utilisation de la violence et une phrase ou deux qui au contraire l attisent Dans l islam vous avez le fameux verset qui dit Pas de contrainte en religion et un autre Si Dieu avait voulu il nous aurait tous fait musulmans mais il a fait des tribus diff rentes au contraire pour qu on rivalise sur le bien et qu on rivalise sur le meilleur chemin pour atteindre Dieu Tr s beau verset Un autre encore dit S ils ne se soumettent pas tuez les tous Les savants vous expliquent qu il concernait les polyth istes les ath es mais pas les gens du Livre qui sont toujours prot g s Oui mais quand bien m me On peut remarquer la m me chose dans la religion juive et la religion chr tienne vous le savez bien Chaque fois que des savants ont fait de l herm neutique et ont r cup r tout a en disant attendez on va poser des conditions strictes l utilisation de la violence ils ont pr cis l id e de la self d fense c est dire que le recours la violence ne peut exister que si on est attaqu sur sa terre si on est mis en danger Effectivement ce moment l apparaissent les notions de guerre juste guerre sainte jihad etc Les savants ont donc limit le recour
16. mpr hension de l islam Y compris leur v cu dans la la cit Mais ils ne peuvent pas faire en dix ans ce que les chr tiens ont fait en plusieurs si cles Laissons leur un peu de temps Aidons les acc der l autonomie et la pens e en arr tant de parler de l islam comme d une essence une fois pour toute d finie Quand on voit un musulman il faut bien se rappeler qu il a grandi dans la m me histoire fran aise Le fait d avoir un autre Proph te ne fait pas la diff rence n entra ne pas que l on soit forc ment d une autre culture C est l exp rience humaine partag e qui nous permettra d avoir un avenir partag 10
17. n l espoir politique et n utilisent plus de grille politique pour analyser leur situation laborer des revendications et rep rer les bons interlocuteurs L islam va alors tre progressivement investi comme le seul moyen de s en sortir individuellement mais aussi collectivement Autrement dit un certain nombre de ces jeunes vont surinvestir l islam non pas comme une religion mais bien comme le seul moyen de combattre les injustices on est sur le mode des fr res musulmans qui appr hendent l islam comme un projet social qui a r ponse tout C est l utopie de la justice sociale divine on n a plus confiance en l humain roi ou pr sident pour incarner l int r t g n ral mais si l on applique parfaitement le Cora n cela r soudra tous les probl mes il n y aura plus d enfants malheureux de pauvres de violences etc Il y a un surinvestissement de l islam qui devient le seul support existentiel et le seul espoir social cette fin on rend l islam visible pour que chaque interlocuteur se dise cette personne est juste et serviable parce qu elle est musulmane l objectif final consistant persuader le monde entier que l islam est la solution Les institutions et les instances politiques au lieu d tudier les param tres conomiques sociaux culturels historiques qui am nent une frange de la jeunesse surinvestir l islam pour se d finir et exister se positionnent en d fenseurs de la R publique et s organi
18. nde antique que le masculin tait le prototype de l humain sans couter v ritablement l esprit novateur de l vangile Qu ont elles fait Elles ont remis en cause les interpr tations des P res latins qui sont la base de la soumission des femmes pendant des g n rations fond e sur le fait que Eve tait n e en second de la c te d Adam et responsable du p ch originel Et elles ont mis en exergue qu il existait un autre r cit de la Gen se qui racontait la cr ation d Adam et ve de mani re beaucoup plus gale telle que Vatican II l a d finitivement institu d ailleurs C est la m me chose pour les musulmans ils doivent entreprendre eux aussi ce travail pour peu qu on ne les emp che pas en pr tendant que cette religion est par essence d finitivement violente et archa que Les musulmans disent pour nous seuls le Coran et la sunnai sont sacr s Ce n est pas vrai On a sacralis les interpr tations humaines de l histoire musulmane pour des tas de raisons Nous n avons pas encore cette libert de dire Je ne comprends pas la m me chose en coutant ce verset que ce savant qui vivait dans ce contexte l au huiti me si cle Pour d velopper cette prise de conscience de la subjectivit de la compr hension du texte divin le premier groupe de jeunes se d tache des traditions arabes pour justement apprendre dire je et relire ces textes partir de ce qu ils sont aujourd hui Ils mettent en avant
19. par exemple l histoire de Khadija premi re pouse du Proph te mais aussi sa patronne avec quinze ans de plus que lui Ou A cha qui enseigne aux hommes et aux femmes celle qui a rapport le plus de t moignages du Proph te Ce qui prouvait bien n en d plaise aux islamophobes et aux radicaux que les femmes n taient pas confin es dans leur domicile Autant de personnages fondamentaux qui ne sont pas mis en valeur par les pr dicateurs musulmans Les chr tiennes ont fait ce travail sur les femmes vinc es dans l histoire de la chr tient Les juives aussi Notre probl me nous femmes musulmanes vivant en Sunna signifie cheminement pratique s c est dire ce qui est consid r comme relevant de la Tradition des paroles et des actes du Proph te d mocratie c est qu on nous d finit notre place partir de ce qui est observ dans les pays musulmans On nous enferme dans des d finitions qui sont justement celles que nous combat tons On nous emp che de nous r approprier la compr hension des textes musulmans M me ceux qui voudraient nous aider nous emp chent de penser en nous assignant un choix binaire abandonner l islam pour devenir moderne ou rester musulmane et archa que L a preuve en est de cette appellation musulmans mod r s pour parler des musulmans normaux Faudrait il tre un tout petit peu musulman pour tre moderne ouvert d mocrate etc Ce sont pourtant au contr
20. raditions Malheureusement c est le contraire qui a t per u Les m dias ont pr sent ces filles comme si elles taient soumises leurs fr res comme si elles refusaient de s int grer n avaient pas acquis les valeurs de la R publique et elles ont t stigmatis es tout cela parce qu elles voulaient mettre leur foulard qui avait pour la plupart une fonction de transition L dessus est intervenu le d bat sur les signes religieux l cole On a parl de ces filles comme si elles taient enferm es encha n es ou manipul es alors que la plupart se situaient dans un mouvement tr s moderniste Elles se sont retrouv es tellement seules dans leur combat qu elles ont eu tendance se retirer abandonnant parfois leur carri re professionnelle trop fatigu es de se battre d ues Leur groupe est moins fort qu avant S agissant du groupe du milieu qui interroge la France sur le d calage entre sa th orie et ses pratiques il est proportionnellement tr s fort Il pose une question fondamentale applique t on les lois de la m me fa on tous Si on ne r gle pas cette question on ne pourra faire aucune pr vention vis vis de l autorit des pr dicateurs radicaux du groupe n 3 ceux qui vont tr s mal Il faut donc travailler sur les questions pos es par le groupe n 2 les d us de la R publique l galit est elle un objectif Combat on vraiment les discriminations dans les entreprises les cole
21. rdu son p re cause d un accident de travail C est parce qu il est musulman Il faut uniformiser la vision du monde Ainsi la fusion des membres met en veilleuse leurs facult s intellectuelles Tout individu incorpor un tel groupe subit des modifications psychiques il est en tat de quasi hypnose On attend de lui qu il ne r fl chisse pas Il doit reproduire automatiquement ce que le groupe lui demande de faire Il doit comprendre ce que le groupe lui dit que lt l islam dit Un territoire virtuel sup rieur au monde entier Au lieu de leur dire qu ils doivent s enraciner le discours salafiste fait comprendre aux jeunes qu ils sont au dessus des autres Vous n tes pas Anglais ni Am ricains Fran ais Marocains Alg riens vous tes au dessus de tous ces gens l Sachez que si vous vous sentez trangers c est que Dieu vous a lus parce qu il sait que vous tes sup rieurs aux Arabes aux Asiatiques aux Europ ens et surtout aux Am ricains gt On peut faire l hypoth se que ce discours fait autorit parce qu il fait sens sur des jeunes qui ne se sentent de nulle part Il leur offre un espace de substitution virtuel sup rieur au reste du monde qui leur garantit la toute puissance Ce n est pas pour rien que 99 de l endoctrinement se fait par un moyen de communication virtuel Internet Les internautes ne se rencontrent qu une fois endoctrin s Le salafisme fascine ceux qui sont sans attaches Il fascin
22. s la violence dans les trois religions cette situation de survie vis vis d une attaque ext rieure Et puis il y a eu des moments d histoire o des groupes n ont pas respect ce qu avaient dit les savants Comme par hasard chaque recours injuste la violence quelle que soit la religion se passe un moment historique o se m langeaient religion et politique C est r gulier dans l histoire des trois religions Il se trouve que dans le monde musulman comme vous le savez il n y a pas de la cit telle qu on la con oit en Europe Donc ce n est pas dans les pays musulmans qu on pourra voir voluer ni les interpr tations de l islam ni la question de la tol rance ni m me l application des th ories qui cadrent la violence puisque de toute fa on le m lange entre religion et politique ainsi que le manque de d mocratie emp che cette forme de pens e J ai donc envie de vous r pondre quand des chr tiens se font massacrer dans un pays musulman par un groupuscule ce n est pas le produit de l islam mais bien celui de groupuscules qui profitent des dysfonctionnements tatiques pour asseoir leur pouvoir Et de mani re g n rale de mon point de vue le seul syst me qui permette aux gens de vivre ensemble sans imposer une vision du monde c est malgr tout le principe de la la cit C est le c ur m me de la la cit que de prot ger toutes les religions et d apprendre d s la petite enfance que la libert
23. s les quartiers les habitats Est ce qu on arr te de dire ceux qui sont discrimin s que c est leur faute ou est ce qu on s interroge sur les pr jug s qui sous tendent les discriminations Essaie t on dans le cadre de notre la cit la fran aise de trouver des compromis des petits d nominateurs communs pour pouvoir continuer manger et nager ensemble Ou bien dit on aux musulmans qu ils ne peuvent pas pratiquer leur islam librement et l on continue pratiquer une la cit double vitesse Que signifie le mot la cit gt Est ce l ensemble des lois qui garantissent la libert de conscience chaque citoyen du moment qu il respecte celle de l autre Ou s agit il de cacher sa foi dans son domicile priv ce qui n est crit nulle part Il faut choisir Une s rie de questions relativement moins optimistes que le tableau donn dans l expos se r f re notamment au texte m me du Coran en disant que c est un texte violent Une personne dont la fille s est convertie l islam y a d couvert que Mahomet tait un chef de guerre Par ailleurs une question porte sur la libert de conscience des chr tiens en pays musulmans et une autre inverse demande dans quelle mesure l islam permet un musulman de se convertir une autre religion A r ri g r Annabel Desgr es du Lo membre du Conseil des Semaines Sociales pr sidait la s ance Gilles de Courtivron galement
24. s th ologiques Dieu ne les int resse pas Ce qu ils veulent c est prendre la place de Dieu Aucune r forme th ologique ne les ralentira Ce qui les caract rise ce n est pas la connaissance religieuse mais le degr d ali nation mentale qui r gne au sein de leur groupe Et pour cela quoi de mieux que de reprendre les divers amalgames en disant aux jeunes Vous voyez bien qu il y a un complot contre l islam ils n acceptent pas que vous restiez musulmans leur la cit est de l hypocrisie Les radicaux assurent que l islam est en danger parce que les autres ont compris qu ils d tiennent la v rit Ils ont besoin de la haine l gard de l Occident pour exister car ils y trouvent leur justification Lorsqu on fait le proc s de l islam d s qu il y a du radicalisme dans l air au lieu d affaiblir les radicaux on renforce leur pouvoir Car d s lors que les m dias et les politiques parlent de l islam ils reprennent finalement leurs interpr tations ce qui revient les valider soumission des femmes des non musulmans etc Revenons juste sur la burqa ces groupuscules voulaient la faire passer pour une simple pratique musulmane Eh bien ils ont r ussi Certes elle a t interdite mais comme telle 99 de la population fran aise est persuad e que celles qui sont voil es int gralement appliquent le Coran la lettre et non pas qu elles ont t endoctrin es par des mouvements sectaires Cela a grossi le
25. sent pour lutter contre ce retour du religieux Les termes du d bat pos s par les jeunes se d finissant dor navant exclusivement en tant que musulmans sont repris en l tat Autrement dit le comportement des jeunes appara t au regard des institutions et plus largement de l opinion publique comme le produit de la pratique de l islam et non pas comme le r sultat de la corr lation momentan e d un certain nombre de facteurs interactifs qu il faudrait analyser D s lors le d bat sur l int gration et la participation des jeunes issus de l immigration s islamise 3 La relation l islam de ceux qui vont tr s mal Des groupuscules se pr tendant salafistes gt font miroiter aux jeunes l illusion de devenir tout puissants en devenant une sorte d lus de Dieu Cela touche autant des jeunes de familles de r f rence musulmane que des jeunes de familles de r f rence chr tienne ou ath e Un discours sectaire Religion gt vient du mot latin relegere accueillir et religare relier Le croyant se ressource dans sa relation Dieu pour aller vers les autres et trouver du sens sa vie En revanche le mot secte signifie suivre et s parer Historiquement ce mot d signait la dissidence d un groupe religieux mais aujourd hui on l emploie pour d signer toute association totalitaire qui porte atteinte aux libert s individuelles Secte a d finitivement pris une signification p jora
26. tive en raison de l intol rance manifest e par ces groupes grands ou petits vis vis du monde ext rieur et des effets destructeurs constat s sur la personnalit des adeptes C est donc bien l effet du discours qui permet de le qualifier de sectaire lorsque la religion provoque de l auto exclusion et l exclusion des autres Lorsqu on utilise la religion pour construire une fronti re infranchissable entre l adepte et les autres fronti re mat rialis e dans notre cas par le niqab Un processus de purification interne Les salafistes se pr sentent comme un groupe purifi qui poss de la v rit un groupe sup rieur au reste du monde les juifs les chr tiens mais aussi les autres musulmans qui ne sont pas comme eux Pour fortifier ce groupe purifi le pr dicateur gourou explique qu il existe un complot pour maintenir les musulmans en position de domin s Il assure que leur groupe est en danger parce que les autres ont compris qu il d tient la v rit Le discours salafiste a besoin de la haine l gard de l Occident pour exister car il y trouve sa justification Les adeptes doivent consid rer les autres gt comme un tout n gatif afin de se percevoir comme un tout positif L unit totale entre membres Les pr dicateurs gourous transmettent une id e de la religion sublim e qui fait r ver les jeunes de toute puissance L image qu ils en donnent est tellement inaccessible que pour esp rer l atteindre
27. une culture donn e Elle fait la distinction entre le credo et l histoire L histoire musulmane est alors d sacralis e la fa on qu ont d autres musulmans de comprendre le Coran n est pas sacr e il peut exister d autres mani res d tre fid le au message divin Ajoutons enfin que le changement de relation au texte sacr provoque un changement dans la relation aux autres Reconna tre la subjectivit dans la construction religieuse influe sur les relations des croyants avec le reste du monde Ces derniers r alisent progressivement que leur niveau d tudes leur d veloppement intellectuel leur exp rience humaine les am nent appr hender leur texte religieux sous de nouveaux angles Les diff rentes visions du monde ne constituent pas un danger mais une richesse ces jeunes cherchent s enrichir de tout ce qui les entoure tres humains diff rents et autres visions du monde 2 La relation l islam des d us de la R publique Il y a des jeunes qui vont un peu moins bien Ce sont souvent les petits fr res de ceux qui avaient cru en la devise de la R publique garantissant l galit et investi dans l cole comme tremplin de promotion sociale Mais malgr leur bac 5 ils sont rest s au ch mage alors que leurs coll gues de promotion sont tous devenus directeurs de telle ou telle filiale Leurs grands fr res ont fait la Marche pour l galit dans les ann es 80 pour porter au gouvernement de l poque la
28. ur penser qu il existerait une personnalit musulmane gt immuable intangible quel que soit le temps quel que soit le lieu quel que soit le si cle Ils adh rent au postulat commun d un islam qui d termine tout une fois pour toutes chez un individu Je vous propose justement de r fl chir la mani re dont on peut d samorcer cette vision du monde bi polaire qui est en train de se refermer sur nous et d infiltrer les d bats publics actuels Pr ambule Les textes restent les interpr tations voluent Il faut d abord se rappeler tous ensemble que les musulmans sont des gens comme les autres Ce n est pas l islam qui d termine l individu c est exactement le contraire c est l individu qui comprend sa religion partir de ce qu il est et partir de ce qu il vit Si je grandis Paris si je suis socialis e l cole de la R publique si je grandis depuis ma toute petite enfance avec des enfants qui n ont pas la m me vision du monde que moi Elisabeth qui ne croit pas en Dieu David qui est juif Marie qui est catholique H l ne qui est protestante lorsque j ouvre mon Coran je ne comprends pas la m me chose que ma grand m re qui n est jamais sortie de sa cuisine et n a fr quent que des femmes comme elles Si j ai appris dire je je ne comprends pas la m me chose que ceux qui voluent dans une culture clanique o le clan d cide de la place et de la fonction des uns et des autres et de ce que lt
29. voir est une obligation pour tout musulman et toute musulmane et qu il n y a aucune raison pour ne pas continuer des tudes aussi loin que leurs fr res etc Elles vont m me aller jusqu dire leurs m res Mais maman tu t es fait avoir Ce n est marqu nulle part qu il fallait rester la cuisine Au contraire Une bonne musulmane doit avoir BAC 5 Cette r appropriation du texte ne les m ne pas uniquement s parer la religion des traditions Elle les conduit galement prendre conscience de la subjectivit de la compr hension d une religion puisqu elles ne comprennent pas la m me chose du Coran que leurs grands m res Admettre l interaction entre le r cepteur et le locuteur conduit reconna tre l existence de variables extra religieuses dans la construction de l individu ainsi que leur influence dans la lecture du texte sacr Reconna tre que toute interpr tation toute recherche de sens rel ve toujours d une exp rience au monde revient aussi admettre que les normes pr sent es par certains discours religieux comme sacr es proviennent de compr hensions humaines C est accepter que les normes dites sacr es manent aussi de processus sociaux et historiques dus l interactivit des hommes avec leur texte Le texte divin reste le m me mais sa compr hension d pend de l exp rimentation des hommes Cette posture accepte de ne pas confondre le message divin et son expression sa compr hension dans
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