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DÉPARTEMENT DES LETTRES ET COMMUNICATIONS Faculté

1. Manifestif mise en abyme omnipr sence du je appartenance l histoire usages multiculturels La chanson Manifestif se pose d embl e dans un certain abyme en ce qu elle est ponyme du recueil l instar d une poup e gigogne Manifestif s ouvre pour d couvrir Manifestif Cet effet artistique s apparente la notion de mise en abyme exploit e par Andr Gide sous la forme du blason mis en abyme dans le blason On entre d s lors dans l autor f rence de l uvre qui nous pr pare au d voilement de toutes ses composantes incluant le d voilement de l nonciateur La page de pr sentation de la chanson offre un visuel lui aussi mis en abyme voir l annexe II On y remarque un m got de cigarette et des taches de caf qui donnent voir la page 3 Voir la th orie de G rard Genette au sujet du paratexte dans G rard Genette Seuils Paris Seuil 1987 388 p 39 Dans ce premier chapitre toutes les r f rences faites au recueil seront pr sent es sous cette forme renvoyant au num ro de la page puis de la ligne dans le corps du texte Andr Gide Journal 1889 1939 coli Pl iade Paris Gallimard 1948 p 4i 22 comme un plan de travail un coin de table sur lequel on aurait travaill un texte par exemple Sur cette table il y a une photo de type polaroid sous laquelle a t crit le titre Manifestif avec la m me police particuli re q
2. dans le vers on peut penser que l nonciateur se saisit du slam genre qui rel ve de la po sie comme d une arme 7 Dans le refrain de Boom une allusion vidente est faite la pi ce de Gauvreau dans Je suis en guerre ouverte Les oranges sont vertes p 66 1 19 40 Si pour Ricard le Qu bec est comme le ghetto de l Am rique la solution pour en sortir serait de conna tre puis de reconna tre la culture qu b coise Dans cette optique le fils de l crivain Andr Ricard soutient qu il importe de nommer nos artistes citer nos crivains Cette prise de conscience se traduit dans Boom baby boom par la r f rence Gauvreau dont nous venons de parler cit e trois reprises dans le texte de cette derni re chanson l chelle du recueil entier plusieurs de ces r f rences intertextuelles qu b coises permettent au lecteur de situer le groupe Loco Locass au sein d une communaut d artistes d ici Effectuons un bref retour sur la chanson Sheila ch us l pour faire ressortir un passage qui illustre bien ce proc d Car il fait Beausoleil sur Desjardins qui ont Ducharme Et du haut Dumont nous nous Miron p 25 1 19 Claude Beausoleil Richard Desjardins R jean Ducharme Fernand Dumont et Gaston Miron ont grandement influenc Loco Locass Il n y a donc aucune surprise retrouver leur empreinte au sens propre et figur
3. 18 Chapitre premier Mise en sc ne de l instance nonciatrice quand les nonciateurs se pointent du doigt Depuis Aristote on estime n cessaire de distinguer dans la saisie de l nonc l instance discursive responsable de l acte de parole de l instance linguistique qu elle met en jeu Pour expliciter la distinction entre ces deux instances Oswald Ducrot pose une analogie avec le th tre L nonciateur est au locuteur ce que le personnage est l auteur L objectif de ce chapitre est d identifier les nonciateurs des textes de chansons de l album Manifestif et de d montrer qu ils s exhibent la fois dans le discours et dans les marques formelles D apr s Janet Paterson L autorepr sentation se manifeste de la fa on la plus visible sur le plan de l nonciation La mise en sc ne d un personnage crivain ou d une figure auctoriale il s agit pour nous de l nonciateur rel ve d une si longue tradition litt raire qu il est ais d y voir un reflet de l activit de la cr ation artistique Ce reflet qui joue d une mim sis dans la mesure o il voque la pr sence d un auteur r el pour nous le locutaire tient de l autorepr sentation J Dans le rap des Loco Locass les locuteurs sont Biz Batlam et Chafiik c est dire les trois rappeurs qu on voit sur la sc ne en spectacle qu on entend sur le disque et qui signent les chansons
4. s adresse un nonciataire rh torique les cocus sans colonne verbale Je couche Mes mots pour 7 millions de cocus sans colonne verbale Malamalangue p 51 1 7 met en sc ne la troisi me personne du pluriel Plus loin dans le recueil on remarque encore des traces de cette strat gie Par exemple dans Isabeille et Biz Biz d clare son amour Isabeille et dit C est en vers que je lui rappe la pomme Isabeille p 78 1 5 Un peu plus loin la formulation Je le jure sans parjure au jury Isabeille p 78 1 10 fait penser que c est par l interm diaire de l nonciataire que le Je s adresse au jury puisque la promesse pourrait tre beaucoup plus directe sous la forme Jury Je le jure Un autre fait observable dans Malamalangue est la dichotomie entre nonciateur nonciataire qui s efface de fa on ce qu un lien de solidarit merge L nonciateur accuse tout en reconnaissant sa part de responsabilit Un nous prend alors place au banc des accus s Tous et toutes professeurs citoyens Animateurs 107 de Musique Plus et politiciens Je nous accuse au tribunal de la conscience Malamalangue p 54 1 1 L expression performative Je nous accuse hisse un instant l nonciateur au rang d nonciataire lorsque je est inclus dans nous L nonciateur regagne ensuite sa plac
5. L nonciataire image du public est situ l int rieur du cadre dans Manifestif Il est ainsi engag dans le processus de d termination du sens Biz Chafiik et Batlam rappent et par exemple ils incitent tous et chacun prendre la parole Pour cela il importe d agir dans la langue de chez nous de prendre le maquis linguistique p 54 1 9 Consid rant cela nous pensons que l instance nonciataire tait la plus facile saisir On ressent ais ment l importance qu il y ait un cho cette rapo sie une r sonnance dans le public Nous avons relev dans le recueil des strat gies qui favorisent l implication du lecteur une profusion de deuxi me personne tu ou vous ainsi que ses formes pronominales associ es te votre etc le mode imp ratif et finalement une repr sentation imag e de l nonciataire soit par les photos qui pars ment le recueil soit par des m taphores etc notre sens la d marche interactionnelle avec le r cepteur pourrait tre r sum e en un parcours trois voies qui conduit le lecteur prendre position se situer par rapport aux 127 diff rents nonciataires mis en sc ne D une certaine fa on gr ce l nonciataire 158 de mani re ce positif Loco Locass identifie explicitement son lecteur mod le que ce dernier se reconnaisse En contrepartie par la mise en place d un nonciataire n gatif Loco Locass
6. dans Manifestif Dans Boom baby boom notons que des r f rences litt raires fran aises marquent galement l image de l nonciateur Dans l extrait coute Mon ramage n aie pas peur je tiens bien mon fromage p 69 1 9 l nonciateur est par m taphore l oiseau de la c l bre fable de La Fontaine Le corbeau et le renard 74 Presse Canadienne S bastien Ricard chanteur com dien Amant des mots et de la langue Le Soleil 14 octobre 2003 p B4 5 Loc cit 76 Dans Art po tik une autre r f rence l uvre de Gauvreau est faite l asile de la puret p 104 1 19 est int gr au vers comme un hommage suppl mentaire au grand auteur qui a crit une pi ce portant ce nom 41 l instar du corbeau l nonciateur est fier de son chant mais contrairement lui il prend garde ne pas chapper son fromage Il y a donc moyen de se faire entendre sans rien devoir sacrifier pas m me sous l effet de flagorneries selon la m taphore Pour revenir bri vement sur le chevauchement des sujets parlants dans Manifestif pr levons de Boom baby boom l extrait L anarchie de ma prosodie Ose te dire p 67 1 10 Un autre nonciateur appara t l organisation des mots ou le style si on veut ici personnifi s parleraient d eux m mes Plusieurs sujets parlants se superposent dans Boom baby boom pour constituer la structure polyphonique
7. eau prend sa source dans ma bouche Sheila p 25 1 5 qui am ne l id e de la salive un autre fluide port e symbolique dans Manifestif On conna t l importance de la salive quand il s agit de manger Avaler c est aussi absorber assimiler Dans Avale mon venin mollusque suce jusqu ce que t en tire sic un antidote Qui dotera ta glotte Pour le french universel Malamalangue p 51 1 7 le narrateur souhaite que son discours soit assimil comme un rem de contre la menace de l assimilation linguistique de la disparition du fran ais par la domination de l anglais l oppos avalefr de travers c est ne pas admettre voire refuser de se r soudre une ventualit T avales de travers quand sur un reel de Mary Travers Tu m dis que l d magogue gigue de guingois Vulgus p 120 1 1 La salive joue galement un r le dans l acte de communication verbale Mon babil habile hydrodynamique Sheila p 25 1 12 voque bien cette relation conceptuelle Lorsque la salive devient crachat Malamalangue p 53 1 16 elle devient signe de provocation ou de m pris profond Lorsque le stylo bave sa lave sur toi larve La casse p 83 1 4 c est qu il est calomnieux et incendiaire Il va de soi que le je veult avoir l eau la bouche Art p 103 L 13 pou
8. la r flexivit quand la t l vision se prend pour objet Semen En ligne http semen revues org 8458 Page consult e le 09 f vrier 2012 TREMBLAY Alexandra La chanson en tant que discours sur elle m me l autorepr sentation dans la chanson qu b coise de 1957 aujourd hui M moire M A Montr al UQAM 2007 187 p TREMBLAY Marie Claude Loco Locass une esth tique engag e et engageante M moire M A Sherbrooke Universit de Sherbrooke 2009 107 p WHORF Benjamin Lee Claude Carme trad Linguistique et Anthropologie Les origines de la s miologie Deno l Gonthier 1969 228 p YAGUELLO Marina Alice au pays du langage pour comprendre la linguistique Paris ditions du Seuil 1981 207 p ZOLA mile J Accuse Lettre M F lix Faure Pr sident de la R publique L Aurore Paris no 87 jeudi 13 janvier 1898 p 1 ou En ligne http www cahiers naturalistes com jaccuse htm Page consult e le 2 mars 2012
9. p 39 122 quelle est l histoire de son peuple quelles sont les pr occupations de sa g n ration qui sont les piliers artistiques de sa culture ou multiculture quelles sont les particularit s de sa langue par rapport au reste de la francophonie etc Par l il 157 et son devenir En effet la relation acquiert un certain pouvoir sur sa nation mutuelle selon laquelle l auteur et son art se construisent en se d finissant continuellement l un dans l image de l autre et inversement s tend et prend alors une dimension plus large chelle qui vise stimuler la nation enti re Ce chapitre nous a ainsi permis de constater chanson par chanson une accumulation d expressions axiologiques et d autor f rences visant attirer l attention du lecteur comme un projecteur sur deux catalyseurs de l uvre enti re l expressivit et l identit de l nonciateur La parodie le travestissement ainsi que le pastiche sont d ailleurs habilement mis contribution dans certaines chansons pour encore pointer du doigt les nombreuses formes que peut prendre l expression de soi M me la remise en question et le doute servent paradoxalement l affirmation de l nonciateur dans Manifestif Ainsi un premier constat pouvait tre fait tant t minemment distinctes tant t volontairement ind termin es les instances nonciatives se c toient s entrem lent se jouent l une de l autre et
10. pour voir comment l autor f rence peut d une autre mani re renforcer la dynamique pressentie jusqu ici l interrelation qui caract rise l auteur l uvre le r cepteur l identit collective et culturelle Catherine Kerbrat Orecchioni op cit p 30 59 Chapitre II Mise en sc ne de l nonc le langage devient objet du discours la rapo sie est un m talangage Apr s avoir analys l nonciateur Janet Paterson nous invite consid rer l nonc Pour d montrer le caract re autor f rentiel de Manifestif il importe de scruter plus d un niveau textuel afin d appr cier l omnipr sence du ph nom ne Poursuivons sans plus tarder notre examen de Manifestif en focalisant notre attention sur l nonc Le terme nonc est ici prendre au sens que lui donne Benveniste c est dire au sens de ph nom ne variable li l activit de langage en situation dans un je ici maintenant L nonc est reli un contexte et il fournit le sens en fonction de la compr hension et de l interpr tation Autrement dit il s agit d un construit de l nonciateur en fonction de sa situation spatio temporelle des nonciataires auxquels il s adresse et du message qu il veut faire passer Il y a aussi une distinction histoire discours qu il faut garder en t te Dans Manifestif le texte est plus pr s du discours donc le je est on ne peut plus ancr
11. un mot cach des lettres en caract re gras forment si on prend la peine de les rallier olla podrida dont le sens figur est celui de m lange h t roclite Ainsi le lecteur peut l espace de quelque temps oublier la pr sence de l nonciateur en acceptant l apparent arbitraire qui r git la succession des mots dans cette page Pourtant de cet amalgame merge un mot fort signifiant dans le contexte Comme s il Notons au passage que Loco Locass associe parfois son uvre une sorte de missive comme dans Boom baby boom Check mon encyclique p 67 L 2 4 Mot espagnol qui signifie pot pourri et qui tait souvent employ pour rendre compte de la diversit nationale de la Mac doine galement un mot d argot musical signifiant Repr sentation b n fice o l on fait entrer de tout du chant et de la danse du drame et du vaudeville de l op ra comique et de la trag die Alfred Delvau et Gustave Fustier Dictionnaire de la langue verte Paris Flammarion 1889 p 317 55 voulait v rifier que son lecteur demeure bien attentif l nonciateur se pr sente ostensiblement comme ma tre et organisateur de son uvre L assaut l nonciateur combattant La chanson finale du recueil repr sente une occasion suppl mentaire pour l nonciateur de se r v ler De ce fait l nonciateur de L assaut choisit le combattant comme ultime image de lui m me Dan
12. 1 19 Nous avons aussi relev maintes allusions aux figures de style telles Ce monde m taphorique Manifestif p 15 1 19 une orgie d analogies Manifestif p 17 1 4 86 grand renfort d aphorismes Manifestif p 15 1 20 Qu tes sic pas pour les paraboles Manifestif p 17 1 11 J milite pour une po sie elliptique Manifestif p 15 L 13 Station Citation p 24 1 10 L autor f rence redoubl e du fait que le nom technique de la figure de style au sein du vers participe une v ritable figure de style L environnement contextuel du mot on le devine a son importance puisqu il a le pouvoir de donner un maximum ce mot Par exemple le verbe insinuer est utilis quelques reprises dans Manifestif Or mis la forme pronominale ce verbe devient fortement autor f rentiel Voyons comment Deux d finitions peuvent tre attribu es au verbe s insinuer parler de soi sans se dire express ment ou encore se glisser s infiltrer s introduire habilement se faire admettre quelque part aupr s de qqn Le grand Robert de la langue fran aise Les deux sens sont convoqu s dans les occurrences du recueil ce qui actualise une performativit certaine Le propos subliminal s insinue Manifestif p 17 1 2 J m insinue vers l avant Potsot job p 60 I 14 etc Dan
13. 1 9 l nonciateur s identifie ainsi tout en exprimant habilement l importance de la dimension crite de son art en substituant l habituelle r f rence au nombre de pi ce du logement par la mesure d une feuille de papier standard Aussi bien dire qu il habite l criture comme une demeure qu il aurait lui m me construite puisqu il se dit tre architecte p 16 1 11 Le ph nom ne d passe la mise en sc ne de l instance nonciatrice pour autrement participer l autor f rence du texte Le th me de la mise en abyme ressort des sonorit s r p t es lorsqu elles sont accol es au mot kyrielle comme dans kyrielle d yeux Dieu qui s dit heureux d zieuter p 16 1 1 o on entend dzj quatre reprises Mais nous reviendrons plus loin sur cet effet puisqu il est produit sur le plan de l nonc Notons simplement que l utilisation de la formule math matique 2 2x2x2x2 p 16 1 3 connote pour nous linfini tout comme le mot ench ss es p 16 1 20 connote l ench ssement Certains chercheurs parleraient sans doute de m talitt rature pour parler de ce genre de textes 25 qui ne veulent pas cr er l illusion du r el et laborer un monde fictif vraisemblable avec lequel on peut s identifier mais qui attirent au contraire l attention du lecteur sur les conditions de production litt raire les conventions narratives le statut fict
14. La dynamique autor f rentielle pourrait tre tudi e dans l ensemble du corpus de Loco Locass Nous ne nous int resserons pourtant qu un seul album Manifestif Plus sp cifiquement encore nous ne nous pencherons que sur la forme textuelle de cet album qui nous le savons pourrait galement tre abord sous sa dimension musicale Nous choisissons Manifestif parce qu il est le premier album de Loco Locass Il constitue en somme la base de l orientation esth tique du groupe Le texte ainsi que les l ments p rigraphique seront pass s au peigne fin 25 Voir la linguistique pragmatique de John L Austin 15 Plan du m moire Dans le premier chapitre nous nous attarderons l nonciateur Nous verrons que le proc d de mise en sc ne d un je qu il s agisse d un personnage rappeur d une figure auctoriale ou de tout autre entit qui prend en charge l nonciation rev t des formes sp cifiques dans Manifestif Commun ment le rap rel ve du discours subjectif puisque la pr sence d au moins un nonciateur y est explicitement rep rable A fortiori la rapo sie inclut syst matiquement la pr sence textuelle d une figure de l artiste C est d ailleurs ce qu avance Dany Saint Laurent qui y voit un des principaux marqueurs du genre rapo tique Nous remarquerons que la figure de l artiste n est qu un des nonciateurs qu on retrouve dans Manifestif En effet une multiplicit
15. Paris Seuil no 29 1977 p 90 106 JOLY Richard Quand on prend sa langue pour sa culture r flexion sur les cultures de langue fran aise au Canada Qu bec ditions de livre du pays 1991 179 p KERBRAT ORECCHIONI Catherine L nonciation de la subjectivit dans le langage Paris Armand Colin 1980 290 p 146 LOCO LOCASS Loco Locass site officiel En ligne http www locolocass net Page consult e le 30 juin 2012 LOCO LOCASS Manifestif Montr al ditions Coronet Liv 2000 138 p MAINGUENEAU Dominique Initiation aux m thodes de l analyse du discours probl mes et exercices Paris Hachette 1976 192 p MILLOT H l ne Vertus du nombre les proc d s cumulatifs dans la pratique manifestaire dans Pamphlet utopie manifeste XIX XX si cles textes r unis par Lise Dumasy et Chantal Massol Montr al L Harmattan coll Utopies 2001 480 p MILON Alain L tranger dans la ville du rap au graff mural Paris PUF 1999 145 p MURAT Michel Le vers libre coll Litt rature de notre si cle Paris Honor Champion 2008 336 p MUS E DES BEAUX ARTS DU CANADA Flagrant d lit La performance du spectateur catalogue d exposition avec des textes de Jos e Drouin Brisebois Greg Hill Anne Marie Ninacs et Stephen Horne 2008 216 p OLIVESI St phane La communication selon Bourdieu Paris L Harmattan 2005 88 p PATERSON Janet Moments postmodernes dans
16. Peuple la mer sache Que Malamalangue p 49 I 1 Tu Pauras compris Malamalangue p 51 1 18 Sache que Malamalangue p 53 1 20 L nonciataire mis dans la peau de l l ve subit l autorit du ma tre Son autonomie est discr dit e lorsqu il est trait de p tit mox Manifestif p 17 1 15 C est ce principe qui prime dans Malamalangue Les vers donnent la voix un nonciateur qui fait penser un professeur affair maintenir la discipline dans sa classe Y a pas de quoi rire Malamalangue p 49 1 1 Sur le ton de la r primande la r action de 101 l nonciataire est dirig e Avale suce Malamalangue p 51 1 9 sont deux ordres qui usant d une injonction d ordre sexuel encouragent l nonciataire se nourrir de l uvre qui n est autre que l antidote qui dotera s a glotte Pour le french universel Malamalangue p 51 1 10 Dans Potsot job c est sous un mode imp ratif Fais ce que dois fais ce que veux Potsot job p 61 1 8 que l nonciataire est incit faire ce qu il faut pour atteindre ses aspirations l instar de l nonciateur qui change avec l nonciataire l auteur entend susciter la participation du lecteur dans son projet culturel En cela la forme dialogique qu on retrouve maints endr
17. REMERCIEMENTS Un merci tout particulier et des plus reconnaissants ma directrice Mme Isabelle Boisclair qui a cru en moi malgr l tendue dans le temps de mon cheminement pratiquement huit ans Merci pour tes pr cieux conseils qui ont su orienter ma d marche et m encourager dans la bonne voie Un merci sinc re Mesdames Christiane Lahaie et Patricia Godbout mes valuatrices pour vos observations et remarques constructives Gr ce vous j ai eu le sentiment de m approcher de la perfection Merci ma grande famille mon p re musicien docteur en philosophie ma m re musicienne rudite passionn e de culture ainsi qu mes onze fr res et s urs Je vous dois ma d termination Merci mon mari Olivier Coulombe Je voulais que tu sois fier de moi Tu m as support e dans mes tudes en faisant tous les sacrifices possibles Tu es un p re merveilleux et je t aimerai toujours Merci mes enfants qui ont assist des s minaires d s leur plus jeune ge que ce soit dans mon ventre o dans leur petit banc Vous m avez accompagn e partout Tous je vous dois la r ussite de ce projet qui me tenait tellement c ur R SUM Le pr sent m moire traite d une probl matique reposant sur les modalit s de la pr sence de l autorepr sentation dans Manifestif le premier album des Loco Locass Postulant qu elle y est particuli rement dense on poursuit ici l objectif de soumettre
18. b coise Rappelons que lors de la r volte des patriotes aussi appel s les tuques en 1837 la tuque tait un symbole du nationalisme canadien fran ais R seau du patrimoine franco ontarien RPFO La tuque www rpfo ca fr Capsules_134 La Tuque_394 Page consult e le 23 ao t 2013 Pierre Elliott Trudeau premier ministre du Canada de 1968 1979 et de 1980 1984 est d c d le 28 septembre 2000 Montr al 23 personnel j contraction mise pour oraliser je est imm diatement suivi de m pour devenir r fl chi et entra ner la formation d un verbe la voix pronominale Le verbe expliquer qui appartient au champ lexical de l expressivit pr c de tout juste la ponctuation qui accentue la port e expressive de la phrase en cr ant une impression de simultan it Enfin se d gage de j milite Pour une po sie elliptique une m ta assertion confirmant que le recueil Manifestif ainsi que l ensemble de ses composantes se prennent et probablement se prendront encore eux m mes pour th me un endroit dans Manifestif le je se met parler de lui m me la troisi me personne Le vers H Marianne C est ton gars qui t dit qu y diphtongue p 14 1 12 rel ve de l autocitation ce qui constitue l ench ssement d un tour de parole dans un autre La Marianne interpell e est la figure all gorique de la R publique fran aise r
19. badlucks Historiques p 23 1 11 Enfin il rassoit son identit culturelle dans ce cas ci en parlant de ses racines latines p 23 1 16 pour plus loin r affirmer son appartenance un peuple dans l expression possessive ma nation p 25 1 2 De cette mani re toutes les paroles choisies et travaill es du locuteur exposent l identit de l nonciateur en plus de relever directement de l appropriation de la langue tant valoris e L autor f rence est l uvre Par la langue on valorise la langue assise du peuple cet effet tout ce qui a trait de pr s ou de loin au champ s mantique de la langue autant l organe buccal que l outil de communication lorsque juxtapos un d terminant possessif a une port e autor f rentielle en plus d tre expressive ma salive mon discours ma bouche mes mots mon babil p 25 1 5 6 9 12 Sheila ch us l pr sente une accumulation d expressions axiologiques et d autor f rences qui attire l attention du lecteur comme un projecteur sur deux catalyseurs de l uvre enti re l expressivit et l identit de l nonciateur 5 Tl s agit probablement des lections f d rales de 1997 28 Langage toi le rythme empreinte de l nonciateur Dans Langage toi l nonciateur affirme son d sir de promouvoir une culture fond e sur la prise de parole J essaie d tr
20. c toie un brouillage des instances nonciatrices tant t c est un Biz fragment puis d doubl qui parle tant t c est le Po te etc L nonciateur se d crit m me par dissociation certains endroits dans le recueil puis par association Il se dit toujours que ce soit par la positive ou la n gative Une constante se d gage donc l nonciateur se dit de mani re mettre en valeur la contribution de l expression sur l identit La forme de la missive qui ressort quelques endroits dans les diff rentes chansons met en sc ne un nonciateur qui signe sa lettre pour mieux l endosser Pour que le message fasse son chemin au del du recueil le texte de cl ture doit percuter L utilisation de l image de l nonciateur combattant est appropri e la t che puisqu elle r it re la corr lation parole acte qui 58 garantit l impact au c ur de la r ussite de Manifestif du discours sur l identit En somme avec la mise en avant plan de l nonciateur c est toute la dimension pragmatique qui est au c ur du discours critique de Manifestif Comme l explique Catherine Kerbrat Orecchioni le concept d autor f rentialit englobe plus que les traces de l nonciateur dans le texte Elle s tend toutes les relations qui se tissent entre l nonc et les diff rents l ments constitutifs du cadre nonciatif De ce fait il convient de s int resser au plan de l nonc
21. dans la situation d nonciation Comme on l a d j soulign si le plan de l nonciation est celui du dire le plan de l nonc est pour sa part celui du dit Sur ce plan la r flexivit se rep re en fonction des r f rences faites tout ce qui s apparente au textuel au langage au discours c est ni plus ni moins lorsque l criture se signifie elle m me Dans le mile Benveniste L appareil formel de l nonciation Probl mes de linguistique g n rale 1 Paris Gallimard 1974 pp 79 88 8 Janet Paterson op cit p 19 60 chapitre pr c dent l nonciateur se d voilait en affichant ostensiblement son r le dans l uvre Voyons comment les mots en viennent eux aussi attirer l attention sur eux m mes L autor f rence du texte na t avec la mise nu des m canismes du discours Par exemple dans la phrase Mon manifeste fesse festivement Manifestif p 13 l 13 la r flexivit agit en quatre temps Premi rement un nonciateur je endosse une prise de parole gr ce au d terminant possessif mon Deuxi mement il qualifie la forme m me de cette prise de parole en l associant au manifeste qui peut soit tre une d claration publique et solennelle par laquelle une personnalit ou un groupement politique expose son programme justifie sa position soit un expos th orique lan ant un mouvement litt ra
22. du caract re sp cifique et exigeant de ce qu il lit ou de ce qu il entend Ce qu il a sous les yeux n est pas n importe quoi c est du Loc Locass Trompe toi pas sur ma forme Manifestif p 17 1 26 Il devra se montrer apte r soudre certaines nigmes langagi res tel ce Loc qui fait penser lock sous cl en anglais Non seulement devra t il se montrer comp tent mais encore devra t il progresser parce que cet nonciataire est originellement toujours dans la premi re chanson biais Manifestif p 13 1 5 nous dit le texte son secours le je dit Ma bouche s abouche ta bouche Pis t french en fran ais Manifestif p 13 1 17 comme si c tait l son moyen de lui venir en aide de lui faire le bouche bouche d entamer la r animation Qui plus est l usage du pr sent cr e une impression de simultan it Tout a l air de se d rouler en direct l nonciateur a l nonciataire en face de lui Les apostrophes simulant le dialogue produisent un effet de dramatisation l nonciataire devient un personnage De surcro t l nonciateur projette des r flexions sur son interlocuteur nonciataire t as Pair de penser que Manifestif p 13 1 20 Tu penses que j fais l split Manifestif p 15 1 13 Y para t qu t en as ras l bol Manifestif p 17
23. histoire usages multiculturels id es Sheila ch us l vocabulaire axiologique et champs s mantiques autor t rennels luiiinrntnnnnnenssntantontenlointiteianniinnines tin Langage toi le rythme empreinte de l nonciateur neoseseossosoecsssecsserereososessosores L empire du pire en pire travestissement et pastiche comme jeux identitaires nt nn Se ind Ne neue dses Malamalangue le sacre typique de l identit qu b coise et manifestation expressive de l NONCIAleUr ssl cnrs drienadnesesnemninneste nier aa s eue Potsot job l metteur un tre de relation d fini dans son rapport l autre Boom baby boom faire conna tre les autres en parlant de soi Isabeille et Biz la pr sence de l nonciateur dans la mise en valeur des PS UUONYINES use nn anni eine ane rites nee teste ei nait does La casse du 24 quand la passion parle sseesssosoorossesossosessseesosessssooscsrsosessescseeeoressese Priap e la p tite vite l nonciateur en tenue de camouflage M diatribes quand la parodie autod rision introduit une prise de position s rieusement assum e par l nonciateur sense Art po tik l art po tique po me didactique qui donne un acc s privil gi la th se artistique de l AUtEUr sssesnesssnsisnennnnssneesvesensdrnasens I represent rien pantoute se d crire par dissociation puis par ass
24. le verbe servent la culture 108 pp 77 78 reprend cette id e du pouvoir de la projection qui gr ce aux mots favorise l accomplissement d id aux Le premier des deux vers que nous venons de citer contient l expression d un d sir nous serions jamais zen Dans le deuxi me vers l nonciateur s efface Biz devient troisi me personne du singulier mis distance de lui m me la projection op re en m me temps que le souhait est simultan ment actualis Cette fa on de jouer avec l nonciataire nous montre que Loco Locass met profit les divers plans de l nonciation Un nonciataire qui prend trop de place Dans Boom baby boom l nonciataire est un sujet collectif soit la g n ration des baby boomers tout enti re C est probablement avec Sheila l nonciataire le plus explicite de tout le recueil Le titre donne entendre que l nonciateur veut en finir avec cette g n ration qu il fait litt ralement exploser Ce texte est le plus long du recueil c est celui qui prend le plus de place comme si la lutte contre la pr sence envahissante des boomers commandait un important arsenal discursif La majorit des caract ristiques de l nonciataire conduisent la proclamation de son gocentrisme Au centre de l ar ne Tu te mets toi m me en sc ne Dans une pi ce obsc ne et malsaine O tu tiens le premier r le Boom p 72 1 7 la d pr
25. les textes du recueil une analyse syst matique de l autor f rence Pour ce faire nous nous appuyons sur les principaux th oriciens th oriciennes de l autor f rence et notions voisines telle l autorepr sentation de Dallenbach Paterson en passant par Ricardou Hutcheon etc et adaptons la grille de Janet M Paterson labor e pour l tude du narratif l tude du texte lyrique Ainsi arm e nous passons au crible tous les textes de l album Manifestif ainsi que leur accompagnement paratextuel La structure du m moire s articule m me l outil m thodologique scrutant d abord l appareil autor f rentiel sur le plan de l nonciation plus pr cis ment l instance nonciative puis de l nonc enfin de l instance nonciataire En ressort un relev complet de la pr sence d autor f rence et de ses effets Ce qui nous permet de conclure que le ph nom ne po tique particulier de l autor f rence claire les textes du recueil parce qu il constitue un jeu on pourrait m me parler d appareil de surd termination qui surpasse l uvre MOTS CL S Autor f rence nonciation culture qu b coise rapo sie Loco Locass INTRODUCTION TABLE DES MATI RES Chapitre premier Mise en sc ne de l instance nonciatrice quand les nonciateurs se pointent du doigt datent RES ee dass Manifestif mise en abyme omnipr sence du je appartenance l
26. nous pr f rerons le terme plus englobant d autor f rences pour qualifier les occurrences dans Manifestif puisque cette uvre rel ve d une nature artistique et qu elle est bien sp cifique la rapo sie Linda Hutcheon privil gie pour sa part les expressions autorepr sentation litt raire et m tadiscours pour d signer la mise nu de la structure et du sens du texte qui correspondent de plus en plus en mati re de forme et de sens au fur et mesure de la lecture plus on avance dans la lecture du texte autor f rentiel plus les Josette Rey Debove Le m talangage Paris Armand Colin 1997 p 20 Linda Hutcheon Modes et formes du narcissisme litt raire Po tique Paris Seuil no 29 1977 p 90 renvois de l une l autre consolident la coh sion du propos La langue travaill e avec habilet attire alors l attention sur elle m me la r flexivit op re sensibilisant ainsi le lecteur au m tadiscours Jean Ricardou pense l autorepr sentation dans le roman comme un fragment de la fiction qui repr sente l un des m canismes par lesquels s organise cette fiction Il partage les perspectives de Rose D llenbach ainsi que Bal qui pr f rent quant eux utiliser des expressions telles mise en abyme criture en miroir ou encore sp cularit Lucien D llenbach d finit la mise en abyme dans le r cit comme un organe de retour de l
27. tik est la chanson qui rec le le plus grand nombre de r p titions du pronom personnel je Les vers Je veux tre fleur de peau p 103 L 1 4 10 p 104 1 1 et Je veux M diatribes p 95 1 1 Loco Locass souligne 49 tre fleur de mot p 103 1 12 16 19 se r p tent la deuxi me variante succ dant la premi re comme si peau et mot taient interchangeables dans cette qu te de sensibilit po tique La mise en abyme est reprise cette fois sous la forme du morcellement de l nonciateur qui dit Je veux Comme un chat guetter l oiseau mot qui bat la chamade en moi p 103 1 16 Ce que nous cherchons souligner dans cet extrait c est que l introspection de l nonciateur chat d couvre un autre tre paradoxalement constitutif de son identit l oiseau mot Et nous pourrions sans doute voir dans la r p tition du vers Je veux tre fleur de peau une r f rence intertextuelle faite l album de Pauline Julien figure associ e au f minisme Fleur de peau 1980 si on consid re que d autres r f rences sont faites au f minisme comme dans les vers J extrapole sur du Louki sic Bersianik pique et chaotique La qu te s ach vera t elle le 8 mars dans un lavomat typique Il faut d ailleurs relire l uvre f ministe de Julien toute bas e sur l criture du corps pour avoir un autre exemple du
28. un projet po tique fond sur le concept d identit Prenons en guise de premier exemple un extrait de Malamalangue je couche Mes mots pour 7 millions de cocus sans colonne verbale p 51 1 7 La r flexivit permet Loco Locass de retourner au peuple son image clair e par le processus artistique Un deuxi me exemple se trouve dans Manifestif avec le vers a fait 27 000 ans que j te parle avec mon sang p 17 1 25 En reculant de 27 000 ans on retrouve les plus anciennes peintures rupestres premi res traces d activit artistique si l on veut Pour lier leur peinture les hommes pr historiques utilisaient notamment du sang ce qui n est pas sans rappeler la police d criture utilis e sur la couverture du recueil comme une peinture rouge vif tendue avec le doigt comme du sang Juste au dessus du titre le logo de Loco Locass sommaire et d pouill fait penser des 88 7 millions renvoie la population approximative du qu bec en 2000 Jeanne Gerval Arouff Art primitif La grotte orn e de Sormiou 27 000 ans de peintures rupestres En ligne 13 d cembre 2003 http presse ffspeleo fr article php3 id_article 418 Page consult e le 11 avril 2013 si dessins pr historiques On y voit trois silhouettes qu on associe aux membres du groupe voir l annexe I Le miroir de l autor f rence est partout dans Art po tik Que tant de je c toient
29. unique manifestation de l autorepr sentation sur le plan de l nonc Y faire allusion dans une uvre c est d nuder un proc d de fabrication de cette uvre Nous avons d j voqu la mise en abyme dans le premier chapitre Sur le plan de l nonc on la retrouve notamment associ e au champ lexical portant sur l autor f rence Nous y reviendrons plus loin dans le chapitre sous le 101 Lucien D llenbach Le r cit sp culaire essai sur la mise en abyme Paris Seuil 1977 p 52 102 Thid p 63 103 Janet Paterson op cit p 28 63 th me du champ lexical Notons toutefois au passage que des mises en abyme sont flagrantes dans Manifestif Dans certains vers le proc d figure textuellement et r ussi rehausser la port e autor flexive de la mise en abyme Par exemple Mes aspirations l gitimes s ab ment dans l ab ime Boom p 65 I 6 est un nonc qui verse dans le pl onasme pour encore mieux attirer l attention sur sa teneur sp culaire Le m me effet est produit dans je me perp tue dans l pertuis d la perp tuit Priap e p 90 1 16 qui accentue au maximum on dirait que l nonc n en finit plus de finir l id e de perp tuit b La m taphore Manifestif regorge de m taphores nature autor f rentielle Une en particulier m rite qu on s y arr te la m taphore de l eau C est le journaliste Paul Choin
30. velopp e sur les plans psychologique id ologique social intellectuel et m me linguistique Nous verrons combien nombre de phrases de Manifestif mettent sous les projecteurs ces diff rents plans Nous servirons ainsi notre intention de confirmer l hypoth se selon laquelle le th me fort de Manifestif est le rapport r flexif expressivit identit Ainsi nous analyserons dans ce chapitre les formes positives l nonciateur se nomme en s associant certaines id es certaines figures etc autant que les formes n gatives l nonciateur s identifie par opposition certaines id es etc que prennent les nonciateurs autor f rents dans Manifestif 36 Termes indiquant l implication et les jugements de valeurs adjectifs adverbes valuatifs 37 Nicole Fortin op cit p 26 21 Attardons nous d abord la couverture du recueil Manifestif voir l annexe I car elle constitue le seuil du texte Le titre est crit en rouge vif avec une police aux lettres in gales qui g n re une impression comme si un nonciateur avait lui m me crit ce titre du bout du doigt et avec son sang On anticipe d s lors que le contenu du livre sera on ne peut plus engag Mais cette interpr tation de la couverture serait peu valable sans un cho ailleurs dans le recueil Cet cho nous ne tardons pas le retrouver dans la premi re chanson Manifestif j te parle avec mon sang p 17 L 25
31. 12 Paterson nous renvoie Jean Ricardou op cit p 159 161 de Lucien D llenbach nonciation nonc code et de Linda Hutcheon niveaux di g tiques et linguistiques En plus de regrouper toutes ces th ories le mod le de Paterson les prouve puisque la chercheuse y soumet plusieurs uvres romanesques De notre c t nous emprunterons Oswald Ducrot sa terminologie locuteur nonciateur En somme nous nous inspirerons du tableau de Paterson pour laborer l outil qui nous permettra d analyser les textes non narratifs de Loco Locass Nous le pr senterons dans la partie m thodologie Notre recherche sur l autorepr sentation ira dans le sens des id es de Ferdinand De Saussure et de Jurgen Habermas dans le domaine de la linguistique moderne Par l nous inscrivons notre tude dans le courant de l interactionnisme social voulant que la langue constitue la fois le r ceptacle privil gi des repr sentations collectives et qu elle soit constitutive de la pens e consciente individuelle Manifestif parce qu il est uvre d art porterait en lui une repr sentation dite collective de la soci t destin e tre int rioris e individuellement par les r cepteurs qui d tiennent le pouvoir par la prise de conscience ou l effet de conscientisation de construire leur tour les prochaines repr sentations collectives Ducrot dans son ouvrage Logique structure nonciation rappell
32. La m taphore c La litote d La personnification e L antilogie f L ironie Plan formel g L harmonie imitative h Le t lescopage i La r p tition j Le champ lexical k L inversion 3 Enonciation nonciataires lecteurs spectateurs auditeurs Principalement l inscription de l activit de la r ception dans la pratique du texte et du paratexte Essentiellement on le voit l adaptation rel ve d un simple changement de lexique o les actants narratologiques narrateur narrataire sont remplac s par des actants 13 linguistiques nonciateur nonciataire L autre changement concerne encore une fois le lexique o di g se est transform en plan th matique et code devient plan formel Nous rep rerons les traces d nonciateurs d nonc s r flexifs et d nonciataires afin de couvrir le maximum de la structure nonciative de Manifestif L analyse se fera en trois temps afin de respecter cette logique ternaire Chaque tape visera d montrer que tous les plans de l nonciation participent au renforcement du proc d autor f rence D abord l examen des figures nonciatrices aidera identifier les diff rentes instances qui prennent en charge le discours dans Manifestif Nous serons m me de comprendre ce qui caract rise l image qu elles projettent d elles m mes et ainsi orienter notre interpr tation de l autor f rence dans ce cas pr
33. Loco Locass site officiel op cit 38 clique autour de lui p 60 1 16 Le rappeur est anim par son souci de l autre qui le pousse explorer toute une gamme de strat gies de s duction Dans Potsot job quand l nonciateur parle de sJon ami Ivy p 59 1 24 il expose un lien d terminant Ivy Ivan Bielinski est un po te auteur compositeur interpr te performeur et slameur avec qui Chafiik a beaucoup d affinit s Dans les ann es 90 Chafiik s enthousiasme pour ses textes et joue un temps avec lui Ivy est un ardent promoteur du slam qu il enseigne dans les coles Toujours dans la chanson Potsot job le refrain dont le contenu est intentionnellement soulign puisqu il est r p t plusieurs fois dit J pense Qu on est faits sic pour gagner Pas pour perdre Notre temps pr cieux Dans les jeux du hasard vicieux Qui fout l bazar Dans l utopie De ta vie p 61 I 13 Un jeu de mise en relation des identit s na t de la cohabitation de la premi re personne du singulier j avec le on avec le d terminant possessif notre puis finalement avec l gt on assiste un d doublement ta Avec cet nallage de personne diachronique du locuteur pour reprendre l expression de Drescher L extrait introduit par J pense voit son nonciateur se confondre dans un ind fini collectif du type on mis pour nous comme le
34. Manifestif selon leur ordre d apparition dans le recueil stie p 13 1 8 C rissement p 15 1 3 crisserait p 24 1 16 Tabarnak p 49 L 21 calvaire p 50 1 14 Dieu p 67 1 1 criss p 67 1 1 p tit criss p 83 1 23 maudits p 90 1 14 estie p 96 1 22 ostie p 98 1 44 ostie p 113 1 1 crisse p 113 I 16 astie p 114 L 10 crisser p 114 1 12 On remarque d embl e que les sacres donnent lieu des d riv s lexicaux qui peuvent occuper plusieurs fonctions grammaticales dans la phrase La nature polymorphique des sacres concourt galement une multiplication d effets possibles Prenons par exemple ostie qui appara t cinq fois dans le recueil sous quatre orthographes diff rentes D abord dans l occurrence stie tir du vers Parle moi pas de West coast d East coast stie pis d Copacabana p 13 1 8 le o initial est lid Cela a pour effet d acc l rer le rythme du texte en plus de cr er une reprise en verlan du mot East 33 Ensuite dans estie issu des vers coups d normit s normalis es Lisez Chomsky estie C est formel On baigne dans le bordel p 96 1 22 le o initial est remplac par un e Le fait que cohabitent normit s normalis es et estie sorte d normit langa
35. Un texte est toujours la construction d un esprit humain qui par des mots cherche rendre cr dible ce qu il crit crit Nicole Fortin Les jurons ou sacres dont nous venons de parler sont pour Chastaing chercheur en psychosociologie des marqueurs de v rit qui conf rent l nonciation un degr sup rieur de v racit qui permettraient de mieux persuader l autre Nous croyons que les sacres que nous avons tudi s plus haut ont ce pouvoir dans Manifestif D une mani re comparable foi de Chafiik p 60 1 18 conf re la chanson Potsot job un endossement personnel des propos qui y sont tenus Cette expression sollicite l adh sion du r cepteur sans laquelle la mission p 59 1 2 ne trouve pas de relayeur Mathieu Dionne l auteur de la chanson choisit d ailleurs son pseudonyme Chafiik comme un rappel du caract re relationnel de l acte de cr ation En effet Chafiik veut dire celui qui compatit en arabe ce qui fait de ce pseudonyme un v hicule de l id e d un contact avec l autre d un change C est d ailleurs dans cette optique que Chaf iik dit s amuse r avec la zique En esp rant qu a amp Nicole Fortin op cit p 21 7 Maxim Chastaing Psychologie des jurons Journal de psychologie normale et pathologique 3 4 1976 pp 443 469 amp Dany Saint Laurent op cit p 32 Loco Locass
36. calembours et contrep teries mots valises charades slogans comptines manifestent tout 16 St phane Olivesi La communication selon Bourdieu L Harmattan Paris 2005 p 23 162 Richard Joly Quand on prend sa langue pour sa culture r flexion sur les cultures de langue fran aise au Canada Qu bec ditions de livre du pays 1991 p 19 163 Nous avons parl du t lescopage un proc d comparable 129 autant et m me plus que le discours conforme la norme la comp tence linguistique des sujets parlants Ne peut jouer de et avec la langue que celui qui la poss de fond Loco Locass poss de la langue s amuse et manifeste jusqu en tre contagieux Le public doit r pondre l invitation en prenant part la f te qui gr ce l autor f rence s offre comme un vertige polys mique qui s duit engage Ce que nous voulions faire c est tudier l album Manifestif pour en faire ressortir la dimension autorepr sentative et ensuite d terminer au service de quelle signification elle participe L autor f rence parce qu elle se retrouve sur chacun des trois plans du discours nonciateur nonc et nonciataire donne l uvre Manifestif la capacit de se prendre elle m me comme r f rent en tant que travail qui promeut la langue En d autres mots le ph nom ne po tique particulier de l autor f rence claire les textes du recueil parce qu il constitu
37. cis Nous savons d embl e que Loco Locass milite pour la culture qu b coise parce que c est par elle que passe la fiert d un peuple pour ce qu il est L analyse des nonciateurs dans chacune des chansons r v lera la contribution des figures nonciatrices cette cause Nous ferons donc ressortir toutes les formes prises par l nonciateur dans chaque chanson du corpus afin de voir si celles ci r pondent une qu te identitaire qui passe par la langue dans un rapport r ciproque expressivit identit Ensuite nous nous int resserons l nonc qui devrait selon notre hypoth se parler de lui m me pour conforter l id e qu une dynamique autor f rentielle r git bien le Terminologie emprunt e Oswald Ducrot 14 recueil Par l entremise d une analyse des proc d s textuels et leur mise en relation avec le dit nous chercherons comprendre comment la mise nu des proc d s du discours concoure valoriser l utilisation de la langue Nous verrons que la signification d un nonc peut tre ce qu il fait en m me temps que dans ce qu il dit 5 Enfin l tude des voies par lesquelles les nonciataires sont int gr s l uvre nous permettra d une part de cibler l effet que Loco Locass entend avoir sur son public et d autre part de confirmer la pr sence de l autor f rence sur ce plan gage de sa coh rence syst mique et partant de son action signifiante dans l uvre Corpus
38. dans son article Le divertissement une question pour l esth tique reprend en ses mots l id e que Nietzsche et Montaigne ont d j d velopp savoir qu un souci de soi s rieux conduit se distraire de soi par l amusement Ce cheminement est particuli rement illustr dans la chanson M diatribes qui lie le concept rh torique d ironie celui d une certaine th tralit En effet la premi re page de la chanson l nonciateur s y costume pour jouer deux r les caricatur s Un journaliste s entretient avec ce qu on suppose tre son directeur de r daction Ils changent des propos graves qui choquent par la mani re froidement int ress e avec laquelle ils sont amen s L ironie de la sc ne r v le la pr sence critique du locuteur scripteur qui am nage un dispositif nonciatif de fa on mieux faire ressortir son m pris pour ses personnages Une certaine polyphonie travaille le texte les locuteurs ou les rappeurs se jouent des journalistes sans c ur voire d shumanis s par leurs int r ts professionnels lesquels 5 Richard Shusterman Le divertissement une question pour l esth tique dans Groove enqu te sur les ph nom nes musicaux contemporains sous la direction de Patrick Roy et Serge Lacasse Qu bec Les Presses de l Universit Laval 2006 p 30 48 priment la gravit des v nements couverts C est alors flagrant il y a parodie et
39. de l album ont fait l objet d une publication en recueil de sorte que l crit et l oral se relancent travers deux formes artistiques le travail d criture s entend sur le disque aussi bien que l oralit se per oit dans le recueil Le ph nom ne a retenu notre attention parce qu il Dans ce m moire ces rapo mes seront tant t d sign s po mes textes ou encore chansons Le 14 f vrier 2000 Lise Gauvin publie un livre qui s intitule Langagement Le fait que ce n ologisme multiplie ses apparitions donne penser que l id e de l engagement par et pour la langue gagne en popularit en ce d but de troisi me mill naire est en lien avec un cho particulier qui r sonne dans l uvre locassienne l autorepr sentation En effet l coute de lalbum Manifestif permet de faire une observation l autorepr sentation s y retrouve sous diverses formes Mais cette autorepr sentation est elle suffisamment pr sente dans l uvre voire suffisamment dense pour que nous puissions en tirer une contribution in dite l uvre D entr e de jeu les r f rences la parole elle m me abondent Cette parole que prennent les Loco Locass pour exprimer un engagement identitaire certain semble se lier dans Manifestif l id e de renforcement identitaire et ce dans une relation r ciproque Aussi voulons nous nous pencher sur les textes locassiens afin de relever les m ca
40. de recherche Notre objectif principal est de soumettre les textes de Manifestif une analyse syst matique de l autor f rence en passant chacun des textes et paratextes au crible selon les trois plans identifi s par Janet Paterson Nous postulons qu il y a une forte pr sence de m tadiscours dans Manifestif et que ce proc d sert promouvoir l usage de la langue dans la perp tuation d une culture L activit m talangagi re est organis e selon nous en un syst me multiforme qui demande tre lu en entier pour r v ler toute sa richesse s mantique Manifestif signifie une interaction entre deux dimensions le manifeste et le festif Nous croyons que dans Manifestif il y a c l bration festif de la langue en tant qu outil pour s affirmer manifeste Cette id e rejoindrait celle d Alain Milon selon laquelle le rap t moigne d une intentionnalit attribuer l expression orale une v ritable r alit culturelle 7 D claration crite publique et solennelle par laquelle une personnalit expose son programme Le grand Robert de la langue fran aise Alain Milon L tranger dans la ville du rap au graff mural Paris PUF 1999 p 73 11 Nous chercherons percevoir comment dans Manifestif le texte parle la langue puisque c est de cela qu il s agit selon Dany Saint Laurent qui crit qu la mani re d une forteresse la langue est
41. dernier exemple tir de la m me chanson Nous y voyons la convergence mise en image D une purge purpurine pur e de prunes a fleure les agrumes Mon verbe Canneberge Converge Vers Les mots valises servent des sens multiples En utiliser plusieurs revient encore une fois exhiber les m canismes de signification de la langue 123 Priap e p 89 L 19 82 b Le t lescopage Dans ma voix yage Art p 105 1 6 le sujet du verbe voyager ma voix est contenu dans le mot on obtient voyage par la r union des segments voix et yage De la mutation r sulte un d doublement de voix c est donc que la voix voyage On sait que c est lorsqu elle est mise que la parole voyage en disant qu elle voyage elle voyage De plus l arrangement musical de la chanson sur le disque est fait avec beaucoup de reverb ou r sonance ce qui donne l impression que la voix se d place encore d une autre mani re d une mani re tr s physique cette fois 24 Attirons notre attention sur un second t lescopage issu de la chanson Manifestif La vigie lance Allez Gorique mets ta force euphorique dire ce monde m taphorique grand renfort d aphorismes de s maphores Manifestif p 15 1 17 Premi rement relevons l ench ssement des niveaux di g tiques Deux nouveaux nonciateurs entrent en jeu la vigie ou la vigilance selon
42. dias canadiens M diatribes p 98 dernier paragraphe On comprend que l nonciataire est rh torique une fois de plus Le lecteur s identifiera davantage l nonciataire de la chanson Art po tik qui succ de M diatribes dans le livre De l empathie pour ses semblables Dans Art po tik le texte se recentre sur l nonciataire Dans Sens tu ma sollicitude pour ta n gritude Tu te dis aigrie par la vie Tout t afflige et te nuit et conspire te nuire Art p 104 1 4 l nonciateur reprend le concept de n gritude d Aim C saire qu il accole un vers attribu au personnage de Ph dre dans la trag die du m me nom Rappelons que Ph dre repr sente l impuissance devant la fatalit En fait ces vers de Art po tik rel vent de l empathie L nonciataire est amen d passer la complainte l nonciateur refuse que la population qu b coise joue la victime Il comprend sans doute que Quand on se tourne sans cesse vers la r clamation et vers la condamnation des autres on ne fait 115 plus aucun effort sur soi m me et une soci t de simples revendicateurs finit par se d vorer elle m me Nous comprenons peu peu que la figure de l nonciataire est changeante au fil des textes selon le rythme des appels qui lui sont lanc s Si dans les textes pr c dents l nonciataire a t amen prendre conscience du probl
43. du recueil 3 Aristote Rh torique Paris Les Belles Lettres Coll Collection des universit s de France 1960 32 Oswald Ducrot Le dire et le dit Paris Minuit Coll Propositions 1984 p 204 3 Janet Paterson op cit p 27 Le locuteur responsable de l nonc donne existence au moyen de celui ci des nonciateurs dont il organise les points de vue et les attitudes Et sa position propre peut se manifester soit parce qu il s assimile tel ou tel des nonciateurs en le prenant pour repr sentant l nonciateur est alors actualis soit simplement parce qu il a choisi de les faire appara tre et que leur apparition reste significative m me s il ne s assimile pas eux Pour certains types d crits locuteur et nonciateur ne sont qu une seule et m me entit Mais pour d autres comme dans la po sie l quivalence n est pas donn e le fameux je est un autre de Rimbaud change la donne Cela est d autant plus vrai dans Manifestif que les nonciateurs sont nombreux Aussi la distinction entre les divers nonciateurs n est pas simple puisque les fronti res les s parant sont instables En effet les nonciateurs de Manifestif se situent souvent dans un espace ouvert o le principe d identit est soumis d incessants dommages Nous verrons plus loin des exemples de passages dans Manifestif o les distinctions sont particuli rement difficiles fair
44. e L antilogie Par l entremise de figures de style apparent es l antilogie des univers s mantiques oppos s se rejoignent dans Manifestif pour inaugurer des sens in dits Le rh toricien Fontanier d crit l association des contraires comme une figure d expression par r flexion ou opposition Foisonnante dans Manifestif elle m rite qu on s y arr te pour cerner l autor f rence comme ph nom ne omnipr sent dans l uvre Les auteurs de l essai Groove sur les ph nom nes musicaux contemporains posent que le rap qu b cois rel ve d une culture du paradoxe Voyons comment le rap de Loco Locass conforte cette id e Le rapprochement de deux termes oppos s comme dans une po sie elliptique O bruit le silence sic Manifestif p 15 1 14 sic figurant dans le texte heurte certes le sens commun L incompatibilit des termes bruit et silence est m me formellement soulign e par le sic qui insiste sur la formule Mais l antilogie de cet exemple est pourtant r solue par un sens plus profond qui merge de l ensemble des paradoxes contenus dans Manifestif En fait on assiste une fois de plus la mise en sc ne du r seau d oppositions inh rentes l id e que la langue est un miroir culturel la fois produit d une culture et la fois fondement de celle ci Le th me du paradoxe fait videmment beaucoup de sens dans ce contexte autor f
45. est particuli re L nonciataire participe une esp ce d orgie sexuelle connotation d j annonc e dans le titre de la chanson avec l nonciateur L organe sexuel qui permet la relation fusionnelle c est la verve et non la verge de l nonciateur Encore une fois l nonciataire est explicitement interpell gr ce aux imp ratifs tels Mets tes culottes Priap e p 89 1 8 Capote pas 113 Priap e p 89 L 13 chut Priap e p 89 1 28 L accouplement entre nonciateur et nonciataire est renforc avec le vers j vais vers toi Priap e p 89 1 30 qui souligne l orientation de l uvre vers l nonciataire L nonciateur utilise m me ses sens physiques pour entrer dans une relation quasi sexuelle avec l nonciataire en guise de pr misse la d floraison de ton Jardin des D lices flairant ta fragrance Priap e p 90 1 3 Comme nous l avons vu au chapitre pr c dent l nonciateur est particuli rement vuln rable dans cette chanson Il s affiche dans sa vuln rabilit car c est ce qu on fait quand on se met nu devant l autre Priap e la p tite vite se termine dans une jaculation m taphorique pr coce pourrait on ajouter vue la dur e de la chanson visuellement perceptible dans l organisation du texte en une sorte de calligramme J immigr
46. fl au qu est la perte de mots Langage p 31 L 12 c est non seulement d en utiliser une tr s grande vari t c est aussi profiter des diff rents sens qu ils ont offrir C est sans doute d ailleurs cette strat gie qui est d voil e lorsque l nonciateur dit j appelle j p le j p le tous les maudits mots dits mon secours Priap e p 90 1 13 En ne se restreignant pas un seul niveau de langue Loco Locass s arme d un vocabulaire vari pour lutter contre le mutisme Malamalangue p 51 1 19 Il en ressort que les champs lexicaux qu on retrouve dans Manifestif sont des plus riches recelant aussi bien du langage populaire que du langage courant et soutenu Et dans la mesure o nous voulons faire ressortir la tendance autorepr sentative des textes voyons maintenant de quoi sont constitu s les champs lexicaux se rapportant l uvre j Le champ lexical Le champ lexical se rapportant la langue est riche dans Manifestif Des allusions sont faites la grammaire dans Dans ton temps le futur tait simple Et le pr sent tellement plus que parfait le pass tu Pas d compos Boom p 70 1 1 d autres endroits les vers sont ponctu s de termes reli s aux proc d s litt raires La structure du texte lui m me est voqu e dans Sans autre forme de mise en forme J informe M diatribes p 96
47. l tas p 113 1 16 avec son rap comme cela se fait physiquement dans le sport de contact Finalement le vers J reste loquace fid le c que jsuis p 113 1 22 exprime que la prise de parole est Pacte qui permet au locuteur d affirmer son identit Vulgus v s Sanctus le je partisan la missive une forme sign e nonciateur Sur la page titre de la chanson il y a un macaron avec la photo de Ren L vesque ic ne du souverainisme au Qu bec Au verso de la page l envers us de l pinglette elle a donc d j t port e plusieurs fois est repr sent Cet objet qu est le badge 54 connote l adh sion du sujet qui le porte un mouvement une id ologie un v nement un groupe etc L nonciateur affiche son appartenance un parti et se d termine clairement la suite de la chanson Vulgus v s Sanctus une lettre est crite l intention de Lulu surnom donn Lucien Bouchard premier ministre du Qu bec de 1996 2001 La dominante expressive de ce texte est donc renforc e par la forme choisie La signature Loco Locass qui cl t la lettre est un acte d endossement explicite de la part du groupe qui r it re la pr sence d un nonciateur qui s affirme la page suivante les paroles de Vulgus v s Sanctus r apparaissent dans le d sordre sous la forme d un bloc de mots p le m le voir l annexe VI la mani re d
48. l autor f rence l nonciateur soul ve la question de l apport r ciproque qui unit les concepts d identit et de langue Au second chapitre nous avons t m me de constater que les nonc s de Manifestif renferment eux aussi un nombre impressionnant d autor f rences Nous avons pr sent l argumentation en fonction des figures de style retrouv es dans le recueil S par es en deux grandes cat gories selon qu elles se situent sur le plan th matique ou formel de l uvre les figures de style ont chacune leur fa on de supporter l autor f rence dans le recueil De l nous anticipons que l autorepr sentation puisque sa pertinence tient son omnipr sence se retrouvera dans le troisi me niveau de l nonciation qui est celui de l nonciataire Cette fois un peu comme au premier chapitre nous questionnons Manifestif en suivant grosso modo l orientation de lecture propos e par l arrangement des textes dans le livre Nous proc dons ainsi pour mieux appr cier le parcours franchi par l nonciataire qui volue au fil des pages 93 Naturellement l autor f rence n agit r ellement que lorsque le r cepteur sait la reconna tre Les capacit s de ce dernier d celer les m canismes de l nonciation sont primordiales Virginie Spies met ce sujet que la notion th orique de r flexivit ne peut faire l conomie d une prise en compte de la situation du r cepteur
49. le le mot represent La d finition va comme suit Represent terme par lequel le rapper signifie son appartenance un courant musical ou un quartier I represent Brooklyn je suis l pour Brooklyn dit souvent le rapper Guru I represent hip hop j incarne le hip hop d clare KRS One Le I represent rien pantoute des Loco Locass rev t d s lors plusieurs degr s de signification Par l utilisation de l expression typique c est la fois l inscription dans la tradition du courant la fois le d sir de s en d marquer qui est signifi Le rappeur se joue du rap et le joue tout la fois Une accusation est port e contre les grosses t tes de l industrie qui sont jug es pitoyablement superficielles ce sont eux le I Le je anglicis d guise alors l nonciateur le temps de la parodie Mais cette identit d emprunt se dissout rapidement pour tre d nigr e dans les lignes qui suivent Ce va et vient entre le rap qu on montre et le rap montr confirme la n cessit d une th orie en actes Le recours l identit est selon Nicole Fortin une fa on pour l nonciateur de se d signer comme porte parole comp tent Ce dernier se construit une identit une personnalit qu il soumet son auditoire afin d tre jug apte tenir le point de vue qu il adopte Dans I represent rien pantoute ce proc d est justement mis sous les projecteurs
50. le roman qu b cois Ottawa Presses de l Universit d Ottawa 1993 142 p PRESSE CANADIENNE S bastien Ricard chanteur com dien Amant des mots et de la langue Le Soleil Qu bec 14 octobre 2003 p B4 R SEAU DU PATRIMOINE FRANCO ONTARIEN RPFO La tuque En ligne www rpfo ca fr Capsules_134 La Tuque 394 Page consult e le 23 ao t 2013 REY Alain Le grand Robert de la langue fran aise En ligne http gr bvdep com gr asp Page consult e le 15 septembre 2011 RICARDOU Jean Nouveaux Probl mes du roman Paris Seuil 1978 350 p 147 ROBERT Guy Aspects de la litt rature qu b coise Montr al Beauchemin 1970 191 p ROY Patrick et Serge LACASSE textes rassembl s et dit s par Groove enqu te sur les ph nom nes musicaux contemporains Qu bec Les Presses de l Universit Laval 2006 190 p SAINT LAURENT Dany Nos sillons d engagement La question de l engagement dans les chansons de Loco Locass M moire M A Montr al UQAM 2007 126 p SHUSTERMAN Richard Le divertissement une question pour l esth tique dans Groove enqu te sur les ph nom nes musicaux contemporains sous la direction de Patrick Roy et Serge Lacasse Qu bec Les Presses de l Universit Laval 2006 190 p SPIES Virginie La t l vision dans le miroir th orie histoire et analyse des missions r flexives Paris L Harmattan 2004 393 p SPIES Virginie De l nonciation
51. le t lescopage toutes deux surveillances attentives d apr s leur d finition Dans Allez Gorique l nonciateur s adresse un autre Gorique il l incite quelque chose il l encourage En m me temps on entend all gorique qui voque la figure de style de l all gorie Une quation nous appara t sous jacente cette formulation 124 Bien entendu nous ne faisons qu entrevoir la possibilit que l autor f rence se retrouve jusque dans l arrangement sonore du disque Manifestif Une tude enrichie d analyses musicales des chansons de Loco Locass pourrait sans aucun doute permettre de d couvrir un autre lieu de r sonance de l autor f rence dans leur uvre Mais une telle entreprise d passerait le cadre de notre tude 83 all gorie moyen incitatif Toujours cette id e de promouvoir par l entremise de la po sie Et qu est ce que signifie mets ta force euphorique dire ce monde m taphorique La meilleure r ponse se trouve dans le titre d une prochaine chanson peine quelques pages plus loin sous la forme d un autre t lescopage Langage toi Pour y arriver l nonciateur lui m me y va grand renfort d aphorismes nous dit il pour mettre son entreprise sous les projecteurs dans un lan d autor flexivit C est un proc d semblable le mot valise cette fois qui permet au groupe de qualifier son art de rapo sie Encore la
52. lorsque Loco Locass chante J me sens habilit d biter mon identit dans la cit p 113 1 13 Mais quelle est elle Olivier Cachin L offensive rap coll D couvertes Gallimard no 274 Paris Gallimard 1996 102 5 Nicole Fortin op cit p 25 53 cette identit Nous savons d j que ce n est pas celle des rappeurs p roreurs p 112 1 4 qui ne represent rien pantoute comme le dit le titre de la chanson Certainement pas non plus celle des starlettes qu on ach te ou encore des pseudo stars locales p 111 I 22 desquelles le je d nonce l attitude p 111 1 22 C est donc par opposition d autres artistes d nigr s par l nonciateur qui les appelle notamment s es supers pairs superficiels p 111 1 16 que le je d finit son identit d artiste dans la premi re moiti de la chanson Puis l assertion on est diff rents p 113 1 4 marque le pivot de la strat gie qui se recentre sur l nonciateur pour montrer ce que lui fait de diff rent Tu vois ch us Qu b cois p 113 1 7 Un peu plus loin le je se compare Tshimanga Biakabutuka p 113 1 18 un joueur de football des Panthers d origine qu b coise dont la position l escouade offensive fait de lui un attaquant L association du je ce personnage lui permet de dire avec encore plus d impact son intention de foncefr dans
53. m ne on peut on brandit not trace On arrive L assaut pp 128 129 En plus de former la r p tition de la racine commune des deux termes du nom Loco Locass Loc Loc dans Loc Loc pour l ternit L assaut p 129 1 11 donne l impression d une connectivit inalt rable Le pacte d une relation bilat rale contre un ennemi commun vient d tre sign Une lutte plus grande s engage Conclusion L nonciataire est omnipr sent dans Manifestif Tous ces appels l autre nous parlent du texte comme d un acte Une impression progressive s en d gage le rapport 119 dynamique entre le spectateur et l objet est tout aussi primordial que l objet d art en soil Nous avons analys le discours intratextuel qui r git les relations entre nonciateurs et nonciataires dans Manifestif Il en ressort que Manifestif est autor f rentiel dans les appels directs qu il fait ses nonciataires qu il organise selon une progression sensible L nonciataire est d abord celui qu on veut accrocher Pour y arriver l nonciateur tant t le provoque tant t l encourage pour s assurer qu il y ait adh rence au texte Une interd pendance uvre public ressort mettant en vidence l apport mutuel de l uvre et du r cepteur qui renvoie la notion largie du rapport entre culture et identit Au bout du compte l panouissement culturel serait le
54. marre de mac rer dans la mare De tra ner comme un t tard Dans l tang en attendant En retrait dans le marais de l arr t Boom p 65 1 2 Effectivement dans cette chanson la m taphore en question est utilis e pour voquer les baby boomers et l effet d mobilisateur qu ils cr ent en regard des g n rations suivantes du fait de l importance de leur masse De la m me mani re l extrait accroch ton poste comme une algue la roche Boom p 66 1 11 traduit le point de vue d une nouvelle g n ration de jeunes adultes amers l endroit des boomers qui d tiennent le monopole du march du travail Dans Vulgus v s Sanctus le narrateur rappelle qu il demeure une possibilit de se d placer sur l eau stagnante par bateau encore faut il le prendre ce bateau L expression manquer le bateau qui signifie manquer une bonne occasion est paraphras e dans On t offre de faire sortir le bateau de la bouteille Mais quand on largue les amarres tu restes au port Vulgus p 119 1 14 L inaptitude quitter le port c est l incapacit d aller de l avant c est le cantonnement dans une position conservatrice qui sert mal la culture Qu b coise qui doit s actualiser pour survivre L eau quand elle stagnante est corrompue Elle connote clairement le d p rissement d abattement la l thargie Nous avons parl plus t t des dimensions no
55. me se discr dite en m me temps qu elle se constitue Fond et forme se relancent un point tel dans l extrait qui suit qu on a rapidement l impression que les v nements racont s sont tributaires des besoins de la rime J ai une bonne nouvelle la maternelle pendant qu y jouait la marelle un ti cul s est fait ouvrir la cervelle coups de pelle Int ressant t as des photos videmment Y a tu du sang Non mais on distingue clairement les filaments blancs de l enc phale de l enfant sur ses v tements Excellent Je veux la r action des parents Le fond serait ici soumis la forme comme c est trop souvent le cas avec les m dias qui arrangent et trafiquent les nouvelles et t moignages au profit du sensationnalisme de la demande des influences politique et conomique etc Une critique est lanc e par en dessous si on peut dire Avec l ironie plus l cart est grand entre ce qui est dit et ce qu on veut dire plus le message est clair un autre des myst res qui rel vent du paradoxe La figure de style de l ironie est amplifi e par les rimes les hom ot leutes et les allit rations Les figures ainsi superpos es renforcent la teneur autor f rentielle du passage 121 M diatribes p 95 1 1 Loco Locass souligne 79 Plan formel de l uvre On l a vu un art po tique sert de d finition sous une forme artistique des principes po tiques d
56. me relatif l identit qu b coise il est clairement encourag dans Art po tik prendre le flambeau ce titre nous pourrions peut tre qualifier le recueil Manifestif d uvre relationnelle puisqu une id e r currente fait sa place la pleine r alisation de Manifestif repose sur l utilisation qu en fera le lectorat qui doit d passer le stade de la contemplation pour passer l action Il revient donc l nonciataire de prendre son tour le flambeau Foi de moi j ai foi en toi Art p 104 L 16 L assonance marqu e de ce vers renforce la construction sym trique du projet artistique qui vise mettre en parall le moi et toi deux mots associables aux concepts d nonciateur et d nonciataire L uvre devient une base dialogique qui rend hommage au pouvoir illocutoire cet gard les jeux avec la langue sont galement observables dans la fa on dont l nonciataire est abord L organisation du recueil fait en sorte que le proc d se poursuit dans la chanson suivante I represent rien pantoute 150 Henri Baruk La psychiatrie sociale Paris PUF coll Que sais je p 89 116 Se jouer de l nonciataire Dans I represent rien pantoute impertinence et jeu se c toient pour s adresser l nonciataire Le vers Pis si t es froiss tu r passeras I represent p 113 l 14 offre un double sens qui all
57. mode d appropriation qui id alement pourrait pallier la tendance l inf riorisation des Qu b cois c est du moins ce que sugg re Manifestif dans son ensemble L autor f rence sert ainsi cette id e au troisi me niveau de l nonciation en ce qu elle nous interpelle directement nous les lecteurs par le biais des nonciataires qui ne sont ni plus ni moins que nos reflets Comme nous l avons vu dans le cadre th orique de ce m moire du point de vue de la linguistique pragmatique l usage c est le sens De m me dans Manifestif parler c est agir Par les repr sentations de l nonciateur de l nonc puis comme nous venons de le voir de l nonciataire qu il offre le recueil de Loco Locass porterait en lui le pouvoir d agir en v ritable moteur g n rateur de r actions 192 Le logiciel fondamentalement interactif In Vivo cr ult rieurement par Loco Locass pourrait tre vu comme un prolongement de cette philosophie 15 Benoit Cazabon op cit p 33 120 Conclusion Pas tonnant qu cette langue qui symbolise notre aspiration dire nous m mes qui nous sommes et qui nous r vons d tre nous rendions les gards dus au plus sacr des symboles Richard Joly Quand on prend sa langue pour sa culture En conclusion nous pouvons affirmer que le recueil Manifestif de Loco Locass pr sente de nombreuses caract ristiques autor f rentielles et ce sur
58. ons d orthographier le mot point poing aient largement circul ce qui peut engendrer une certaine confusion Selon le site web des Productions J ainsi que les traces vid os que l on peut visionner sur Youtube l mission s intitulait Poing J 34 ostie est utilis e pour signifier l emphase mais surtout pour alimenter la rythmique de la phrase Enfin dans le vers Avis aux astie d aspic assiettes p 114 1 10 le sacre se mod le sur l allit ration et troque son o pour un a afin accentuer le son vocalique a Simultan ment un mot anglais est retenue et trois fois plut t qu une ass qui signifie cul ce qui cr e un surplus de sens dans la phrase Et ce sans compter qu une harmonie imitative bas e sur le son consonantique s nous fait entendre l aspic ce reptile venimeux qui siffle comme la majorit des serpents Ajoutons cela les sens d aspic le plat qui rejoint le champ lexical de l assiette dans pique assiette Bref le sacre peut signifier beaucoup de choses De notre point de vue il peut m me rehausser la valeur autor f rentielle d une uvre en mettant en avant plan la qu b citude de l nonciateur Le vocabulaire des Qu b cois rend en effet parfaitement manifestes les influences qui ont pes sur notre histoire et d termin notre devenir national De plus au m me titre que l apocope et la syncope respectivement l
59. plusieurs plans Les diff rentes instances qui entrent en jeu dans l nonciation ainsi que leur contribution sit t exprim es se manifestent formellement Plus encore nous avons vu qu un effet de miroir r git les plans de l nonciation pour mieux appuyer le th me fort de Manifestif qui est le rapport expressivit identit Nous pourrions ainsi dire de l uvre locassienne qu elle actualise et renforce le lien qui unit langue et identit L nonciataire en rev tant au passage quelques figures rh toriques pensons aux baby boomers qui ne font certainement pas partie du public vis par Loco Locass volue au fil des textes jusqu prendre la forme d un combattant tout d sign pour changer les choses Son parcours dans l uvre l a dot d un pouvoir Il n en tient qu lui de l exercer pour que l cho se perp tue Chaque interpr tation s miotise l uvre sa fa on propre et lui attribue ainsi une structure signifiante et une signification sp cifique Dans cette tude nous voulions creuser une id e d j avanc e dans les m moires de Dany Saint Laurent 1 Jean Pierre Esquenazi op cit 1996 p 84 121 Nos sillons d engagement 2007 et de Marie Claude Tremblay Loco Locass une esth tique engag e et engageante 2009 savoir que l uvre locassienne incite l engagement social Nous pensons que dans Manifestif cette incitation passe par un appareil m talin
60. pouvoir des mots incarner 5 Son nom est pour plusieurs personnes synonyme d engagement politique pour l autod termination du Qu bec et pour la cause f ministe Elle a d ailleurs crit tout un r pertoire de chansons d crivant l univers f minin Danielle Tremblay et Yves Laneville La chanson du Qu bec et ses cousines Les b tisseurs de la chanson qu b coise Pauline Julien En ligne http www chansonduquebec com bio julien htm Page consult e le 17 mai 2013 Son roman Eugu lionne publi en 1976 est consid r comme le premier grand roman qu b cois d inspiration f ministe 7 Journ e internationale des femmes Le 8 mars 1977 les Nations Unies officialisent la journ e internationale des femmes 50 l id ologie Qu on soit homme ou femme blanc ou noir les mots ont le pouvoir de rassembler les hommes du moins est ce cela que sugg re l image djes coutures textuelles de l humanit p 105 1 8 cr e par Loco Locass dans cette chanson Le Po te est ainsi d crit dans son pouvoir de porter la parole dans son r le d interpr te ou d interm diaire entre le monde et l tre humain J ai 300 000 ans d hommes et de femmes qui crient bout portant Dans mon sang p 105 1 9 donne la parole un nonciateur h ritier de toute l histoire de l humanit Profitons en pour souligner qu au moins deux autres chansons du recueil contiennent cette m me id e d
61. r cepteur alerte L extrait Whatever man we speak like we Malamalangue p 52 1 19 pousse encore plus loin la contribution du mot man en conduisant une induction sonore sans laquelle le lecteur aurait du mal compl ter mentalement la phrase avec can Notons au passage que ces figures mises l cause de leur caract re g n ral non personnalis sont toutes pens es au masculin Un nonciataire qui doit se sentir attach au texte Nous venons de mettre le doigt sur un nonciataire pr cis celui que Loco Locass prend sous son aile celui qui doit se faire attentif celui qui doit s approprier le message pour voluer Les imp ratifs contribuent renforcer cet effet On en d duit qu une chanson qui contient le mode imp ratif dans son titre placera probablement l nonciataire au premier plan C est effectivement le cas dans Langage toi o le lien de fraternit entre l nonciateur et l nonciataire se concr tise Le ton se maintient tr s affectif Mets tes verres de contact Mon fr re Langage toi p 31 1 19 En vers libres mon fr re Langage toi p 35 1 1 L nonciateur s exprime de mani re rassurer l nonciataire sois en sic s r Langage toi p 32 1 9 Crois en ma parole Langage toi p 32 1 23 3 Encore une figure masculine 103 maie crainte Langage toi p 32 1 2
62. rentiel L ambigu t des tenants et aboutissants du langage est tout enti re dans ce rap Qui est un TGV qui tergiverse Paradoxal L art 117 Pierre Fontanier op cit p 15 118 Patrick Roy et Serge Lacasse textes dit s et rassembl s par op cit p 13 76 d aller droit au but En passant par 4 chemins Boom p 69 1 13 D autres antilogies du recueil telles Jour et nuit aucune dichotomie Malamalangue p 50 1 3 un s isme tranquille Malamalangue p 51 1 20 cendres de glace Vulgus p 119 1 10 ont attir notre attention sur ce th me du paradoxe qui se trouve par ailleurs soutenu par un champ lexical bien toft Ponctuellement le concept ressurgit comme dans l apologie contraires Manifestif p 15 1 12 ou encore comme dans cette confidence de l nonciateur J fais ma trace le p tit mox M accroche ce qui m harasse le paradoxe Manifestif p 17 1 15 La fascination pour le paradoxal est explicite Le d lire se nourrit alors de tout notons au passage que paradoxe fait exode rap l envers exutoire du rap Les assertions antinomiques telles J vite ceux qui m disent d viter quoi que ce soit Manifestif p 13 1 27 ne surprennent plus dans ce contexte Avec l anarchie de s a prosodie Boom p 67 1 10 Loco Locass arrive traiter une th matiqu
63. ristique des actes de langage Priap e la p tite vite l nonciateur en tenue de camouflage Dans Priap e la p tite vite l nonciateur r affirme sa pr sence sur un autre ton Cette fois il s avoue en toute confidence inf rieur l image qu il a pu donner de lui m me jusque l En effet le vers J ai d l air fort mais dans mon for J sais pus o ch us j ai jamais su mais chut p 89 1 27 r v le une identit plac e sous le signe de l incertitude On retrouve ce m me proc d dans Malamalangue lorsque le questionnement O est ma langue O est mon esprit O suis je Qui suis je O vais je O vis je p 50 1 10 marque l garement en m me temps qu il donne 46 lire une inversion du O vis je O vais je du po me Soir d hiver d mile Nelligan Nous remarquons galement que le texte de Priap e la p tite vite est relev d une disposition visuelle r solument diff rente d une page l autre Notre attention s en trouve stimul e pour d couvrir que la premi re page est en quelque sorte un calligramme en forme de bonhomme voir l annexe IV S agirait il d une repr sentation de l nonciateur Les vers de la deuxi me page au contraire se juxtaposent sans a ration pour former un bloc charg sans majuscule ni point voir l annexe V Cette disposition cr e une surcharge qui s accorde a
64. savoir les contraintes d une vie trop utilitaire l emprise toute puissante d une religion dominante une soci t ferm e sur elle m me une instruction d ficiente et une certaine r volte Le sacre constitue ni plus ni moins qu un patrimoine linguistique pour le peuple qu b cois Aujourd hui les sacres font partie de la po sie de la langue fran aise qu b coise de son aspect exotique et vernaculaire Les sacres font partie int grante de notre h ritage En 1970 le sp cialiste Guy Robert dans Aspects de la litt rature qu b coise s int resse aux sacres au Qu bec dont il dit qu ils sont souvent pittoresques et se rattachent un aspect dynamique du parler fran ais canadien dans notre pays Ils sont de tous les combats de g n ration en g n ration Bon nombre d artistes qu b cois tels Robert Charlebois Plume Latraverse La Chicane et Les Colocs pratiquent l art d inclure des sacres dans leurs chansons Bien qu il soit omnipr sent dans l album c est sous la banni re de cette chanson qui a mal sa langue que nous croyons bon d aborder le sujet des sacres Nous nous permettrons cependant de puiser dans d autres chansons pour saisir toute la port e des sacres dans Manifestif Guy Robert Aspects de la litt rature qu b coise Montr al Beauchemin 1970 p 60 32 Ouvrons une parenth se afin justement de dresser l inventaire des sacres et jurons contenus dans
65. trop saoul La casse p 84 1 22 Parle m en 14 L v nement appel Lundi de la matraque a eu lieu le 24 juin 1968 la veille des lections f d rales 112 du scandale La casse p 85 1 3 est une invitation lanc e l nonciataire voire une provocation L nonciataire s il endosse son comportement n aura pas de honte raconter ce qu il a fait Il devrait prendre la parole pour s assumer pour s expliquer pour se justifier et ainsi donner du sens son geste L nonciateur pr te parfois sa voix l nonciataire par le moyen du discours rapport en style direct Ainsi l absence de chevrons dans l extrait Tu fracasses des carreaux En criant fuck la police La casse p 83 1 19 met en relief l impertinence des insultes jadis proclam es Le bl me prend une forme ironique dans Pour moi c est ton ego qui tait trop saoul Pour moi c est ton ego qui tait trop saoul verain La casse p 85 1 22 Le fait que l nonciateur reprenne sa phrase deux fois parodie le radotage des saoulons qui ne se rappellent pas ce qu ils viennent de dire et qui sont donc bien mal plac s pour d fendre le Qu bec dont le mot d ordre est Je me souviens L nonciataire et sa contribution dans l uvre Dans Priap e la p tite vite la mise en lumi re de la relation qui unit nonciataire et uvre
66. truire l eau berceau de la vie la salive qui permet de parler la f condit du sperme etc Les figures d opposition s mantique que nous avons relev es dans les textes les assertions antinomiques l ironie l antilogie etc servent aussi et probablement de fa on encore plus vidente jouer sur le paradoxe Nous y avons vu 124 la mise en sc ne d un r seau d oppositions inh rentes l id e que la langue est un fascinant miroir culturel la fois produit d une culture et fondement de celle ci Nous avons t m me de constater comment les figures de mots d harmonies imitatives et de t lescopage arrivent mettre en sc ne la mat rialit de la langue qui m me si elle d pend d un nombre fini de mots disons permet une infinit d agencements une infinit d effets et de sens Rappelons que les r p titions sont peu fr quentes On peut en comprendre que les ressources dont Loco Locass dispose ne manquent pas Les inversions comme s par es en plein milieu par un miroir ont une forte teneur autor f rentielle et on les retrouve en grand nombre Sur le plan de l nonc nous avons vu que les figures de style dans Manifestif agissent comme autant de petits r flecteurs qui se r fl chissent les uns dans les autres L autor f rence prend alors une autre dimension Les mots sont mis sous les projecteurs Ils passent de r f rents r f r s dans une dynamique vertigineuse
67. un vaste champ lexical organis autour du th me fleur nous fait d ailleurs penser au mythe de Narcisse aussi le nom d une fleur obnubil par son reflet dans l eau L angle du miroir est changeant dans Art po tik nous permettant de focaliser tour tour sur diff rents nonciateurs Dans le vers Je suis fou ouf content de m entendre le dire p 104 1 20 l nonciateur s coute lui m me dans un d doublement sensible Il se juge lui m me comme devant un miroir formellement repr sent par la sym trie des mots fou ouf Ailleurs encore l nonciateur sJe mire dans le credo de Miron p 105 1 3 On remarque que la r flexivit est un proc d essentiel dans cet art po tique Ce qui fait que la condition de r ussite de l art po tique est alors remplie Comme l met No l Audet il faut pr chant quelque chose pr cher aussi d exemple il faut que l aspect didactique du discours soit parfaitement int gr ce que l on peut nommer en d finitive la vis e po tique La vis e po tique de Loco Locass on commence s en douter va de pair avec l expression de soi No l Audet Ces tranges po mes qui se disent art po tique tudes litt raires vol 22 no 3 1990 pp 101 111 52 I represent rien pantoute se d crire par dissociation puis par association Le lexique du rap que dresse Olivier Cachin dans L offensive rap rec
68. veut l usage oral pour devenir un tu 70 P Loc cit 7l Pierre Fontanier op cit p 293 Pour Fontanier l nallage de personne est une figure du discours qui consiste en l change d un personne contre une autre personne Martina Drescher op cit 39 galement impersonnel ailleurs dans le recueil on retrouve ce m me tu impersonnel dans Tout est truqu trop tronqu T es comme traqu p 16 1 13 dont on comprend qu il s agit d une assertion g n ralis e Un dialogue s installe Il y a inclusion des instances nonciatrices qui paraissent changer entre elles Boom baby boom faire conna tre les autres en parlant de soi Un nonciateur sp cifique transpara t quelques endroits dans Boom baby boom Il s agit de Batlam Mentionnons tout d abord l occurrence Batiam Slam p 67 1 4 qui d pouille le pseudonyme de son r f rent pour en faire ressortir la force phon tique voire pour en faire une onomatop e On comprend d s lors que le choix de Batlam n est certainement pas tranger la puissance sonore du mot Batlam en plus d tre un des personnages de Claude Gauvreau dans sa pi ce de th tre Les oranges sont vertes est un mot qui frappe Le Batlam de Gauvreau tait un h ros vengeur et un d fenseur de la modernit S bastien Ricard s associe ouvertement au personnage Et puisque Slam suit de pr s le mot Batiam
69. 1 10 Tu m trouves saff Manifestif p 17 1 18 Dans la chanson Malamalangue OK Je te l conc de Malamalangue p 52 1 12 est une fa on indirecte de faire parler l nonciataire Cela donne l impression que l nonciateur contrairement nous a acc s aux r actions de l nonciataire Ces 100 extraits constituent une sc ne Une cha ne d actions r actions entre l nonciateur et l nonciataire m taphorise le fait que tour tour l uvre et le r cepteur d tiennent le pouvoir de se transformer mutuellement dans une relation de stimulation r ciproque Le rapport d addition mon ton nous contenu dans l extrait suivant illustre encore cette dynamique Mon discours ma bouche tes deux h misph res mes mots ton tympan notre langage Sheila p 25 1 6 certains endroits dans le texte la m me relation prend une autre forme celle de l enseignant qui forme son l ve Le ma tre et son l ve L nonciateur para t peu peu endosser une posture d ducateur Il semble tenir enseigner quelque chose l nonciataire duquel un effort de compr hension est attendu Du haut de sa chaire m taphorique l nonciateur intime celui qui l coute l ordre de savoir Sache que Manifestif p 15 1 4 Trompe toi pas Manifestif p 17 1 26
70. 5 C est l occasion pour l nonciateur de renforcer sa connivence avec l nonciataire Les deux complices font partie de la m me quipe L nonciateur esp re que l nonciataire sera un relais Langage toi p 31 1 19 son projet Dans Langage toi nonciateur et nonciataire sont sur la m me longueur d ondes Ts qu ess j veux dire Langage toi p 34 1 17 comme si l nonciataire s identifiait l nonciateur L nonciataire qui a des comptes rendre D autres textes mettent en place un nonciataire bien diff rent Par exemple dans Sheila ch us l l nonciataire est la politicienne Sheila Copps ministre f d rale du patrimoine canadien en 2000 D entr e de jeu notons l animosit certaine qui se d gage du titre comme s il r pondait la question tu me cherches Ben ch us l L nonciateur semble pr t la confrontation La page titre de cette chanson voir l annexe X d ailleurs pr sente la photo d un match de boxe sur laquelle un des adversaires se trouve au sol tandis que l autre est en position de base visiblement pr t toutes les ripostes Sheila demeure la principale nonciataire jusqu la toute fin de la chanson o elle est interpell e avec insistance litt ralement bombard e de questions Sheila pouquoi sic non C est quoi cette situation Pourquoi la v rit prend elle p
71. C est un peu comme si le texte gagnait une autonomie lui permettant de parler de lui m me L attention du lecteur est ainsi dirig e sur la pratique des signes L expressivit semble alors inh rente la langue comme quoi il suffit de constamment l activer pour qu elle agisse se d veloppe produise des effets En somme le deuxi me chapitre nous a fait entrevoir un tourdissant microcosme image du macrocosme qui pose le peuple et la culture dans la position respective de deux sujets se faisant face L un et l autre s offrent un miroir dans une mise en abyme 125 non pas du un mais de la dyade elle m me chacun des membres entra nant l autre sans que l on puisse percevoir lequel des deux est la source puisque l cho se r percute l infini L cho des mots lointains ne s teint pas si au relais tu es l p 33 1 1 Dans le troisi me chapitre nous voulions faire ressortir qu il y a galement mise en lumi re des rouages de l nonciataire troisi me volet de l nonciation dans Manifestif Cela allait nous menait la cl ture si on veut du triptyque qui devait pr senter sur tous les plans une quantit suffisante d l ments autor f rentiels pour qu une interpr tation bas e sur l autor f rence soit clairante sur un des sens possible de l uvre En effet la r duplication structurale qui r git le recueil nous laissait imaginer que l nonciat
72. Cela concorde avec la pens e d Esquenazi qui affirme que tout discours interpr te par avance son interlocuteur dans le sens o tout monologue dessine en face de lui un sujet qu il caract rise comme interlocuteur de son discours C est dire que l inscription manifeste d un nonciateur entra ne celle de l nonciataire et donc qu un puissant lien relie ces deux figures Le texte soumis la pulsion narcissique de l nonc progresse dans un mouvement de r flexivit qui le fait se situer face lui m me comme dans un miroir Le th me du jeu avec les mots devient un incitatif L nonc festif plonge le r cepteur dans une mise en abyme enthousiasmante voyons comment L objectif de ce chapitre est d identifier les figures de l nonciataire ce que nous ferons apr s avoir d montr qu il est explicitement sollicit La r duplication structurale qui r git le recueil de Loco Locass donne penser l nonciataire comme un autre lieu o doit se refl ter le pouvoir de la langue L nonciataire au sens o 136 Virginie Spies La t l vision dans le miroir th orie histoire et analyse des missions r flexives Paris L Harmattan 2004 p 86 137 Jean Pierre Esquenazi Le pouvoir d un m dia TFI et son discours Paris L Harmattan coll Champs Visuels 1996 p 41 94 nous l entendons regroupe toutes les instances dites de r ception rep rables dans le tex
73. D PARTEMENT DES LETTRES ET COMMUNICATIONS Facult des lettres et sciences humaines Universit de Sherbrooke L AUTOR F RENCE DANS LE RECUEIL MANIFESTIF DE LOCO LOCASS JACYNTHE PAR M MOIRE PR SENT pour obtenir LA MA TRISE S ARTS TUDES FRAN AISES Sherbrooke Septembre 2013 Library and Archives Biblioth que et Canada Archives Canada Published Heritage Direction du Branch Patrimoine de l dition 395 Wellington Street Ottawa ON K1A ON4 395 rue Wellington Ottawa ON K1A ON4 Canada Canada Your file Votre r f rence ISBN 978 0 499 00353 9 Our file Notre r f rence ISBN 978 0 499 00353 9 NOTICE AVIS The author has granted a non exclusive license allowing Library and Archives Canada to reproduce publish archive preserve conserve communicate to the public by telecommunication or on the Internet loan distrbute and sell theses worldwide for commercial or non commercial purposes in microform paper electronic and or any other formats The author retains copyright ownership and moral rights in this thesis Neither the thesis nor substantial extracts from it may be printed or otherwise reproduced without the author s permission L auteur a accord une licence non exclusive permettant la Biblioth que et Archives Canada de reproduire publier archiver sauvegarder conserver transmettre au public par t l communication ou par l Internet pr ter distribuer et vendre des th se
74. Dany Saint Laurent op cit p 53 Miron dans le vacarme D un peuple l accent circonflexe Qui ne veut pas tre en annexe Sheila p 25 1 20 Le peuple et la culture sont dans la position de deux miroirs qui se feraient face les essences individuelles se refl tent dans la culture et la culture se refl te dans les essences individuelles Sur le plan de l nonc ce qui frappe le plus c est de voir comment dans Manifestif chaque l ment du texte participe l autor f rence dans sa globalit La mise nu des m canismes du discours prend des formes aussi diversifi es qu inattendues Le texte parle constamment de lui m me Il fait monter sur les planches l appareil du scriptible lui donne un r le On assiste une subversion de l ordre syntagmatique En effet jouer avec les mots en inventer ou encore en ins rer dans un contexte surprenant contribue mettre en relief la pratique signifiante du texte surtout lorsque cela th matise le langage L enjeu des mots est signifi par le jeu des mots Le texte attire l attention sur sa forme dans un lan de surd termination Ce sont les figures de pens es comme la m taphore la litote la personnification l antilogie et l ironie qui font parler la langue d elle m me leur mani re d autres figures de style font le m me travail Ainsi les harmonies imitatives les t lescopages et les champs lexicaux agissent en v ritable miro
75. EXE VE ns ns nina aS ES aE So nn EA SeS OSES io Aa EN 136 ANNEXE VIE ubuntu mue rentals 137 ANNEXE VI nn rires aess te ee sr E aE aS ieee o nantes etes a du 138 ANNEXE IX msn ns nt ie LR tn n initie te 139 ANNEXE Kunst 140 ANNEXE XI prinesite nnne it and eau nid ipai 141 ANNEXE XII a baned a hubnarnmmnetancushuttandnanconnonvndiedram 142 Introduction Le rappeur est toujours un po te qui s efforce d insuffler sa culture Christian B thune Le rap une esth tique hors la loi Probl matique Loco Locass c est un groupe compos de trois hommes S bastien Ricard S bastien Fr chette et Mathieu Farhoud Dionne travailler ensemble ils cr ent des textes po tiques et engag s sur un fond de rap Ils deviennent alors respectivement Batlam Biz et Chafiik des pseudos qui les d finissent en tant que rappeurs Ils qualifient eux m mes leurs uvres de rapo mes Manifestif le premier album studio des Loco Locass est lanc le 24 octobre 2000 Il porte en lui un engagement politique certain mais plus sp cifiquement un langagement c est dire un engagement par et pour la langue en tant que pilier de la culture L angle politis de leur approche donne Loco Locass la chance de s exprimer sur des questions d actualit C est d ailleurs ce c t engag des textes qui frappe tout d abord et ce sans quivoque Or les rapo mes sont riches encore de bien d autres caract ristiques Les textes
76. N John Langshaw Gilles Lane trad Quand dire c est faire Paris Seuil 1970 183 p BARUK Henri La psychiatrie sociale coll Que sais je Paris PUF no 669 1958 128 p BENVENISTE mile L appareil formel de l nonciation Probl mes de linguistique g n rale 2 Paris Gallimard 1974 288 p B THUNE Christian Le rap une esth tique hors la loi coll Mutations Paris Autrement 1999 245 p BIZZONI Lise et C cile PR VOST THOMAS dir La chanson francophone engag e Montr al Triptyque 2008 186 p BOCK C T Mathieu Le conservatisme qu b cois de Lucien Bouchard Argument Politique soci t histoire ditions Liber vol 9 no 2 printemps t 2007 En ligne http www revueargument ca article 2007 03 01 378 le conservatisme quebecois de lucien bouchard html Page consult e le 8 ao t 2013 CACHIN Olivier L offensive rap coll D couvertes Gallimard no 274 Paris Gallimard 1996 112 p CAZABON Beno t Langue et culture unit et discordance Sudbury Prise de parole 2007 292 p CHANADY Amaryil Une m tacritique de la m talitt rature quelques consid rations th oriques tudes fran aises Montr al PUM vol 23 no 3 1987 p 135 145 144 CHAREST Gilles Le livre des sacres et blasph mes qu b cois Coll Connaissance des pays qu b cois no 2 Montr al ditions de L Aurore 1974 123 p CHASTAING Maxim
77. Psychologie des jurons Journal de psychologie normale et pathologique 3 4 1976 p 443 469 CHEVALIER Jean et Alain GHEERBRANT Dictionnaire des symboles Paris Robert Laffont 1982 1060 p CHOINI RE Paul Car nous croyons que les mots sont le terreau des id aux les plus hauts entretien avec Loco Locass Spirale no 185 juillet ao t 2002 p 18 20 CHRISTENSEN Inger The Meaning of Metafiction a critical study of selected novels by Sterne Nabokov Barth and Beckett Oslo Bergen Universitetsforlaget 1981 174 p D LLENBACH Lucien Le r cit sp culaire essai sur la mise en abyme Paris Seuil 1977 247 p DELVAU Alfred et Gustave FUSTIER Dictionnaire de la langue verte Paris Flammarion 1889 592 p DUCHET Claude et St phane VACHON dir La recherche litt raire objets et m thodes Montr al XYZ 1998 597 p DUCROT Oswald Le dire et le dit coll Propositions Paris Minuit 1984 237 p DUCROT Oswald Logique structure nonciation Lectures sur le langage Paris itions de Minuit 1989 191 p DUMASY Lise et Chantal MASSOL textes r unis par Pamphlet utopie manifeste XIX XX si cles coll Utopies Montr al L Harmattan 479 p DUPRIEZ Bernard Gradus les proc d s litt raires Dictionnaire Paris ditions 10 18 1984 540 p DRESCHER Martina Jurons et h t rog n it nonciative Travaux de linguistique 2 2004 no 49 p 19 37 En lig
78. a suppression de sons la fin ou dans un mot la sacre indique un registre celui du langage populaire parl Il est donc porteur d oralit et peut tre mis au service du rythme de la sonorit et de l expressivit de l uvre Loco Locass s approprie et promeut la voix du peuple gr ce au registre populaire qu il hisse au 7 Jean Forest Anatomie du parler qu b cois Montr al Triptyque 1996 p 23 35 rang d uvre d art voie qu avait inaugur e Parti Pris dans les ann es 60 noter que pour Martina Drescher le juron entendons ici le sacre qui agit de la m me mani re est un indicateur d autocitation ph nom ne sur lequel nous reviendrons plus loin Fermons la parenth se Visiblement le sacre est pour les Locass un outil artistique Il leur permet de s affirmer identitairement en insistant d une part sur un lexique propre leur culture et d autre part sur un accent particulier cette m me culture S il s agit pour Loco Locass d un accent circonflexe p 25 1 21 c est peut tre pour marquer l unicit de la langue qu b coise la mani re du signe diacritique si pratiques quand vient le temps de diff rencier des homonymes Revenons Malamalangue On constate que la propension du groupe s auto d finir se d voile encore dans l extrait les Loco Locass sont des koubra ss p 53 1 19 La signification du mot koubra ss d
79. aire pouvait tre un autre lieu o se refl te le pouvoir de la langue C est l que nous avons d couvert un nonciataire multipli Bien plus qu un simple t moin du spectacle langagier qui se d roule sous ses yeux le lecteur est fortement invit se rallier s exprimer d clamer ses id ologies ainsi qu s affirmer en prenant la parole Les th ses de Dany Saint Laurent et de Marie Claude Tremblay ont justement trait de l incitation l engagement rep rable dans l uvre de Loco Locass Nous pr cisons que l implication voire l engagement passe essentiellement par la langue dans Manifestif L identit culturelle demande un investissement personnel de chacun comme si la participation de la collectivit qu b coise un nouvel avenir culturel et social tait impensable sans que cette 126 derni re soit pleinement en possession de ses moyens linguistiques C est dire que Loco Locass milite en faveur d une identit culturelle notamment bas e sur un sentiment de comp tences en ce domaine Biz Chafiik et Batlam optent pour un discours proactif qui mise sur un combat culturel par la voie ou la voix de la langue En sollicitant constamment l nonciataire Loco Locass cherche susciter la participation du regardeur spectateur lecteur Concr tement dans le texte une forme artificielle de dialogue engendre Pincorporation dans l uvre de cette dynamique participative qui est souhait e
80. asse Le chanteur tout sourire a l air de s amuser du subterfuge L nonciateur ici imposteur dans l image devient instantan ment le centre d attention Tout comme l imposture le pastiche repose sur la notion d identit La c l bre phrase Alea jacta est r p t e trois fois en guise de refrain dans L empire du pire en pire est emprunt e C sar pour s accorder avec l ensemble de la chanson qui dissimule sous l image de l empire romain une repr sentation de tous les empires conomiques L nonciateur se 30 d guise Il actualise les personnages de l Antiquit en jouant le r le d un Ben Hur urbain p 42 I 20 qui aspire toujours obtenir la libert pour son peuple Il se compare Spartacus l instar de Spartacus J en appelle tous les gus p 43 1 1 Il donne m me la r plique N ron Non non N ron Regarde ton peuple p 45 1 7 puis Caligula Calcule Caligula p 45 1 11 Mais le lecteur n est pas dupe Il garde en t te les v tustes sc narios Son attention est m me raviv e alors qu il s agit de voir au del des masques En d autres mots l nonciateur se cache pour mieux se d voiler dans L empire du pire en pire Malamalangue le sacre typique de l identit qu b coise et manifestation expressive de l nonciateur Quand on parle des maux de la langue on r f re g n raleme
81. aut ultime que constitue la derni re chanson 151 Mathieu Bock C t Le conservatisme qu b cois de Lucien Bouchard Argument Politique soci t histoire ditions Liber vol 9 no 2 printemps t 2007 En ligne htip www revueargument ca article 2007 03 01 378 le conservatisme quebecois de lucien bouchard html Page consult e le 8 ao t 2013 118 L nonciataire L assaut La photo qui accompagne le texte L assaut a t prise du point de vue de la sc ne de sorte qu on a ainsi l impression d tre avec le groupe voir l annexe VII Les chanteurs ont l attitude et l imp tuosit de guerriers l attaque La position de cl ture dans un recueil est videmment tr s significative tout comme la fin d une phrase en d termine le sens Le texte doit laisser sa marque dans l esprit du lecteur Or ici une sorte d apoth ose est atteinte dans l appel l nonciataire L interjection contenue dans les mots lasso T embrassent et t enlacent toi public L assaut p 127 1 3 traduit un sentiment de liaison notamment gr ce la m taphore du lasso La relation entre l uvre et le public atteint son apog e c est le texte qui compte le plus grand nombre de nous et autres d terminants associ s Le ralliement ne fait pas de doute cette derni re tape du recueil nos mobiles Nous rendent habiles Car nous croyons on
82. c p cule d avoir le culturel vu vote le chums ethnique PQ choker c est pogne que toi le j vous que cul chante je de de nique la continuer au culture ti culs mic qui et mec jouit situez je au si rappelle bon vous mo ment tes ta oui pour m moire moman l affranchisse ment un je le certain me d frichage soir sOuvient et o mais le seul je changement dans pense ou le le noir demain marchandage de car achalant l isoloir quand le Je la l chage te contrainte la soup onne m reinte l chet mon j l trelns achet e homme c est j sais d avoir qu i sais qu i t ai eu qu la jet peur fin des du sanctifie choix bonhomme les un r f rendum moyens brin Rome b otien ne mais c est la pas fin contruite sanctifie en les jour moyens j en conviens mais tout vient point qui se souvient que lA fin sanctifie les moyens LLO0CO LOCARE 123 136 AU BatLon Big Chafiik A LAS 186 a t S LE near agi 137 138 139 ANNEXE IX 140 ANNEXE X IX AXANNV Ipi 142 ANNEXE XII Isabeille amp Biz 143 BIBLIOGRAPHIE ARISTOTE Pierre Chiron trad Rh torique Paris Flammarion coll Garnier Flammarion 2007 570 p AUB Jacques Chanson et politique au Qu bec 1960 1980 Montr al Tryptique 1990 127 p AUDET No l Ces tranges po mes qui se disent art po tique tudes litt raires vol 22 no 3 1990 p 101 111 AUSTI
83. contemple Nous avons vu dans les chapitres pr c dents que Loco Locass fait abondamment usage d une m taphore rapprochant acte de cr ation et rapport sexuel Le groupe exprime par l son d sir d entrer en relation par les mots avec un autre Tout r side dans l interaction la relation d un public l uvre est double la seconde est l objet du processus interpr tatif men par le premier elle est aussi une expression figurative de la d finition sociale 141 culturelle historique du public La m taphore sexuelle imageant l interrelation qui unit le public l uvre t moigne ainsi d une surconscience artistique 1 Dany Saint Laurent op cit p 19 1 Tir de Virginie Spies De l nonciation la r flexivit quand la t l vision se prend pour objet Semen En ligne 26 2008 mis en ligne le 18 mars 2009 consult le 09 f vrier 2012 URL http semen revues org 8458 En r f rence aux propos de Jean Pierre Esquenazi op cit 98 travers ses changes avec le r cepteur Loco Locass semble avoir trois vis es Dans un premier temps gr ce l nonciataire positif il interpelle le public de mani re ce que ce dernier se reconnaisse Dans un deuxi me temps par l entremise de l nonciataire n gatif ou rh torique Loco Locass identifie ses adversaires politiques et ce faisant circonscrit encore plus pr cis ment ses positions Dans un tr
84. de je prennent tour tour en charge la parole Nous l entrevoyons notamment dans l interf rence des je et des nous qui se chevauchent et mutent Cela n est pas sans effet sur le r cepteur qui doit rester en alerte Nous soutiendrons que l nonciateur fa onne l nonc au m me titre que l nonc fa onne l nonciateur Si cela s av re cela pourrait confirmer une hypoth se selon laquelle le th me fort de Manifestif est le rapport expressivit identit L nonciateur autor f rentiel prend des formes positives qui posent une qualit sans comparer autant que des formes n gatives bas es sur la comparaison voire l opposition qui contiennent d importantes informations Dans 26 N ologisme cr par les Loco Locass pour qualifier leur art Ainsi ils s autoproclament rapo tes Dany Saint Laurent op cit p 39 Nous faisons cette distinction des formes positives n gatives pour les besoins de notre cause 16 les pages qui suivent nous plucherons le recueil l affut de ces traces significatives laiss es par l nonciateur Nous tenterons de d celer les moindres marques de subjectivit telles l emphase l exclamation l autocritique l affiliation etc lesquelles traduisent la pr sence d un sujet En rapo sie l identit autor f rentielle de l nonciateur est fondamentale pour la contextualisation de l nonc Mais cet nonc lui m me a aus
85. du discours Isabeille et Biz la pr sence de l nonciateur dans la mise en valeur des pseudonymes Pour exploiter la m me veine que dans le dernier segment d analyse continuons de r fl chir sur l utilisation des pseudonymes Dany Saint Laurent dans son m moire de ma trise traite abondamment de la question de l identit dans son interpr tation de Manifestif Il y tudie entre autres les pseudonymes adopt s afin de comprendre comment l artiste se positionne par rapport l individu et comment il caract rise sa d marche par la mise en place d une identit rapo tique Se nommer dans une chanson hisse la pr sence du locuteur nonciateur au rang de sujet de l uvre Si en plus le nom appara t dans le titre de la chanson comme dans Isabe lle et Biz on peut d duire qu une place de premier ordre est attribu e l nonciateur dans cette T Dany Saint Laurent op cit p 3 42 chanson Probablement ce dernier profitera t il de l occasion pour se faire conna tre davantage se r v ler encore plus Effectivement Isabe lle et Biz est la chanson la plus intime du recueil Des allusions sexuelles y sont faites constituant une ouverture sur la sph re priv e de l nonciateur comme dans cet extrait du refrain Bises os es dans la ros e j ai les g nes rog nes p 77 1 22 noter que bien que l orthographe des mots soit diff rente Bises donne ent
86. dualit de l uvre est affich e i La r p tition La redondance syntaxique peut produire diff rents effets Nicole Fortin les classe en deux cat gories les effets de surprise et les effets de sens Les effets de surprise surviennent lorsque le regard du r cepteur est attir sur des carts inattendus alors que les effets de sens permettent de faire des parall les entre des structures syntaxiques sym triques ou de mettre l accent sur des mots pr cis 7 La r p tition nous int resse plus pr cis ment par ses propri t s r fl chissantes dans certains contextes elle agit en r flecteur L assertion L homme est l avenir de l homme Art p 105 I 2 en est un bon exemple Le vers fait miroiter autant les mots 125 M tonymie de po sie 126 Manifestif 1 de couverture 127 Nicole Fortin op cit p 115 84 que leur sens bien plus que ne le fait l hypotexte La femme est l avenir de l Homme d Aragon qui n inf re aucune circularit Ailleurs cette fois dans la chanson Vulgus v s Sanctus l expression La fin sanctifie les moyens est r p t e onze fois sans pour autant qu on ait affaire un refrain C est l insistance sur le concept la base du proverbe qui retentit et mart le la conscience de l auditeur R p ter sert l apprentissage c est bien connu Loco Locass veut marquer les esprits Alors m me si le groupe a norm ment de chose
87. e Mais quoi reconna t on un nonciateur dans un texte subjectif On le rep re bien s r dans le je mis en sc ne mais galement par son expressivit ou par la projection de son identit comme de sa subjectivit Sa pr sence se d tecte lPutilisation des pronoms personnels je ou nous ainsi qu aux formes pronominales associ es me notre etc De mani re g n rale le rap constitue un 34 Oswald Ducrot op cit 1984 p 205 Notions attribuables Benveniste et Kerbrat Orecchioni et reprises dans Nicole Fortin La rh torique mode d emploi proc d s et effets de sens coll Conna tre 5 Qu bec L instant m me 2007 p 25 20 discours subjectif puisque la pr sence d au moins un sujet nonciateur y est imm diatement rep rable d une mani re explicite Plus pr cis ment dans la rapo sie Dany Saint Laurent hisse au rang des principaux marqueurs du genre la figure textuelle de l artiste L expressivit rel ve galement de ce qu on appelle le vocabulaire axiologique ainsi que de la ponctuation affective C est du moins ce que nous rappelle Nicole Fortin dans son mode d emploi en r f rant aux principes tablis par Benveniste et Kerbrat Orecchioni en mati re d nonciation et de subjectivit La mise en sc ne de l identit quant elle qu elle soit conforme ou non la r elle identit du locuteur est une construction Elle peut tre d
88. e clairement son choix Il doit 117 d cider s il s engage ou pas Situez Si vous tes pour L affranchissement le d frichage et le changement Ou pour Le marchandage achalant le l chage la l chet achet e Vulgus p 121 I 2 L nonciateur semble d plorer d avoir insister de la sorte J sais qu t ai sic j t des choix un brin b otiens Mais la fin sanctifie les moyens Vulgus p 121 1 10 La suite permet de faire une pause en d tournant les projecteurs sur une cible qui se distingue mieux du lecteur v ritable Lucien Bouchard nonciataire d une missive interm de Le discours semble suspendu dans Vulgus v s Sanctus l espace d une lettre adress e Lucien Bouchard alors premier ministre du Qu bec ici pr nomm Lulu Loco Locass lui reproche son manque d ardeur souverainiste Bouchard ne s tait il pas quelques ann es avant son arriv e la direction du Parti Qu b cois officiellement ralli l id e d une r unification canadienne port e par l accord du lac Meech Mais le temps est venu de passer autre chose Si y a maldonne on pardonne Parce que la fin sanctifie les moyens Vulgus p 122 1 6 M me dans cette seconde partie de la chanson le proverbe la fin sanctifie les moyens retentit tel un cri de guerre qui motiverait les soldats aller au combat au del de leurs limites pour monter l ass
89. e contradictoire en elle m me Toutes ces oppositions permettent en outre de cr er une insistance sur des tats discordants v cus par le je Ben oui j aime qu on me ha sse I represent p 113 1 5 Je suis le grain d sel dans la poivri re I represent p 113 1 19 Ces oppositions sont pertinentes la pr sente tude puisque qu elles illustrent comment le caract re paradoxal de l autor f rentialit peut servir la probl matique de la construction identitaire Lorsque l nonciateur dit C est singulier mais j adviens pluriel Manifestif p 15 1 22 il fait allusion la langue la grammaire singulier pluriel en m me temps qu il proc de une 77 autor flexion Les sens que peuvent prendre les mots singulier et pluriel permettent la fois le contraste et l accord s mantique La forme paradoxale sert donc merveille le sens du vers lui aussi paradoxal qui formule autrement la th se voulant qu il y ait un secret communautaire par excellence sorte d instinct pr individuel ou hyperindividuel faisant que le moi de tout un chacun n existe qu en fonction d un Moi collectif L identit individuelle passe ainsi par l identit communautaire regroupement d identit s individuelles et ainsi de suite Difficile de concevoir la fois tre et n tre pas une fin en soi Art p 104 1 14 r
90. e derni re m taphore redit le conservatisme travers la saumure g n ralement utilis e comme conservateur d aliments L auteur insiste sur le pouvoir n faste de la solution am re donc d amertume dont on craint dans l extrait qu elle dissolve le peuple D entre tous les dangers li s l eau la noyade est sans conteste le pire Dans La voix francoaphone sic est noy e sous le son du sax Malamalangue p 49 71 1 20 le son du sax diminutif de saxophone qui convoque le monde anglo saxon c est la langue anglaise qui menace toujours de noyer le fran ais au Qu bec Loco Locass insiste de diff rentes fa ons sur l importance de ne pas se laisser emporter par le flot la vague voire la mar e sans offrir de r sistance Lorsque les moutons mlystifi s par la mar e La casse p 85 I 8 suivent b tement le troupeau ils sont condamn s pour leur manque de conviction id ologique dans un contexte d urgence Ainsi l eau sait tre d vastatrice Elle a la capacit d endommager de dissoudre de noyer Reprenons les derniers vers analys s Mystifi s par la mar e Les moutons l cume la bouche ont suivi La casse p 85 1 8 Le signe de l cume terme s mantiquement rattach au champ du mot salive a attir notre attention La salive tout l heure valoris e associ e travers l associat
91. e en giclant Priap e p 91 1 1 sugg re la transmission d un peu de l nonciateur dans l nonciataire par ce qu on pourrait qualifier de don de soi comme le veut la conception archa que de l homme qui fertilise la femme lors du co t Fertiliser du champ lexical de cultiver et de culture prend tout son sens dans Manifestif D noncer Alors que dans Priap e la p tite vite c est la richesse culturelle qui est pr n e dans M diatribes c est la culture de masse d ficiente qui est d nonc e Sous la forme d une critique acerbe des m dias qu b cois cette chanson met des noms pr cis sur les coupables Le titre de la chanson en dit d j long sur les figures de 114 l nonciataire rh torique encore une fois venir gr ce au mot valise qui fusionne m dia et mes diatribes Dans J informe qu on nous d sinforme M diatribes p 96 1 20 l nonciateur rel gu au rang des plaignants se joint son nonciataire Dans le m me bain On baigne dans le bordel M diatribes p 96 1 20 dit il S ensuit une s rie d invectives l endroit d acteurs sp cifiques du monde des m dias au Qu bec Les nonciataires se relayent pour tre bl m s tour tour Certains sont tutoy s pour tre mieux raba ss s comme dans Mes diatribes Jean Chr tien J te trust pas quand tu dis qu tu trust pas les m
92. e la vision de Cat gorisation tripartite elle m me emprunt e Jackobson D llenbach Le R cit sp culaire 62 le Paterson r f re Hutcheon Narcissistic Narrative pp 17 35 1 Dont Le D sert mauve D Amour P Q La Vie en prose Le Semestre La Maison Trestler Trou de m moire etc Benveniste voulant que le langage ser t tablir le d bat humain qu il est le lieu o se reconnaissent et s affrontent les individus tat de la question Jusqu ici les analyses de l autorepr sentation ont davantage port sur les textes narratifs mais certaines tudes ont port sur des corpus de textes lyriques auxquels on peut associer les textes de chansons Alexandra Tremblay dans son m moire de ma trise intitul La chanson en tant que discours sur elle m me l autorepr sentation dans la chanson qu b coise de 1957 aujourd hui d montre que les textes de chanson sans tre n cessairement narratifs peuvent contenir des l ments autorepr sentatifs Dans le genre rap en g n ral il se peut qu un rappeur raconte une histoire sur ses rythmes syncop s mais il n est pas obligatoire qu il le fasse Dans Manifestif par exemple la narration est pratiquement absente cela n emp che nullement l autorepr sentation de se manifester nous le verrons dans les pages qui suivent Dany Saint Laurent est le premier lever la rapo sie au rang de genre distinct Il remarqu
93. e pour avouer son imperfection OK Je te lconc de On est un peu cons et on c de Nous aussi la tentation Malamalangue p 52 1 13 Il n en demeure pas moins que l nonciateur a des conseils prodiguer l nonciataire Ton texte doit expliquer le contexte de ton cortex Malamalangue p 55 1 2 Remarquons que les conseils comme les ordres abondent dans Manifestif ce propos un autre bel exemple se trouve en page titre de la chanson Isabeille et Biz On y voit l image d un biscuit chinois rompu qui porte le message EN AMOUR SOYEZ ZEN voir l annexe XII L aphorisme nous parvient sous une forme sp ciale Le biscuit chinois se voulant la fois nourriture pour le corps et l esprit est en quelque sorte ici un symbole Certes le conseil est donn mais il n en tient qu l nonciataire de le mettre en pratique En cela le conseil n a de sens que si on en fait quelque chose L nonciateur a conscience de devoir au jour le jour faire agir les mots De mon verbe je d sherbe Notre jardin Au quotidien Isabe lle p 77 1 13 Le refrain Belle Isa je nous imagine jamais zen Isabeille et Biz jamais zen Isabeille 146 Les conseils et les ordres reposent sur un lien direct entre l nonciateur et l nonciataire 147 Connotation int ressante avec cultiver culture Comme quoi les mots la langue
94. e pro propos p 31 1 9 Mais l entreprise est loin d tre facile puisque C est dur d hurler sur les mots D une soci t rong e par le pire des maux Ce fl au qu est la perte de mots p 31 1 10 La difficult du projet artistique tient ici au fait que chanter est pour Loco Locass une lutte incessante contre le silence de ceux qui se terrent et se taisent p 32 1 13 Dans Langage toi le rythme est la mesure voire la tactique phon tique choisie par l nonciateur pour pallier au probl me Dans un but typiquement didactique Ma dactylo buccale fait Tic Tac C est une tactique phon tique pour faire contact p 31 1 14 Avec sa d finition du rythme comme organisation du sens inscrivant une subjectivit dans le discours Meschonnic soutient que le rythme est une sorte d empreinte du locuteur et ou de l nonciateur Aussi lorsqu il est textuellement question de rythme dans l uvre comme d un choix assum par l nonciateur l autor f rence se fait sentir et la densit de la pr sence du locuteur n en est que plus accrue Crois en ma parole la parole est un geste Mieux une action p 32 1 23 une action de construction de soi l homme qui nomme Se nomme lui m me autonome de sa propre personne Il se somme de donner aux mots la somme De sa propre donne p 34 1 4 Dans cet extrait on entend litt ralement une sorte d cho gr ce la pro
95. e que la figure textuelle de l artiste est un des principaux marqueurs du genre rapo tique Saint Laurent offre donc d j une tude sommaire de 16 Oswald Ducrot Logique structure nonciation Lectures sur le langage Paris ditions de Minuit 1989 p 158 17 Alexandra Tremblay La chanson en tant que discours sur elle m me l autorepr sentation dans la chanson qu b coise de 1957 aujourd hui Montr al UQAM 2007 174 p 1 8 Dany Saint Laurent Nos sillons d engagement La question de l engagement dans les chansons de Loco Locass M moire de ma trise D partement d tudes litt raires Montr al UQAM 2007 p 39 Pautor f rence chez Loco Locass sur le plan de l nonciateur bien que cette appellation ne soit jamais mentionn e en soi mais il ne traite pas des niveaux de l nonc ni de l nonciataire ce que nous projetons de faire pour notre part Marie Claude Tremblay dans son m moire Loco Locass La parole en gage aborde les proc d s nonciatifs pour faire ressortir la dimension engageante de l uvre du groupe Elle pose que l esth tique rap locassienne repose en grande partie sur la notion d engagement L engagement du groupe prendrait cette voie particuli re de l appel au r cepteur en suscitant l action du public Lise Bizzoni et C cile Pr vost Thomas regroupait en 2008 des articles portant sur la th matique de l engagement L ouvrage intitul La chans
96. e un jeu de surd termination qui surpasse l uvre et induit la participation du r cepteur Le pr sent m moire aura servi clairer la s rie de proc d s que Loco Locass a utilis s pour assurer la coh sion de son discours ici fond et forme fabriquent le sens dans une collaboration aussi troite qu incessante Nous pouvons maintenant dire de Manifestif qu il forme un habile syst me de repr sentations la fois mim tique 164 Marina Yaguello Alice au pays du langage Paris ditions du Seuil 1981 4 de couverture 130 reflet de sa soci t stylis tr s litt raire et fantasm encourage mieux qui donne entendre le pouvoir social et culturel de la langue cet gard Batlam Biz et Chafiik sont toujours pr ts d fendre leur point de vue Lors de l v nement Nous qui se d roulait le 7 avril 2012 durant la gr ve tudiante visant contester la hausse des droits de scolarit propos e par le gouvernement Charest Loco Locass a livr une prestation qui une fois de plus actualise l interd pendance entre l identit la culture et la langue Probablement ce leitmotiv se retrouve t il dans les autres uvres du groupe qui rec lent toutes en leur titre une autor f rence IN VIVO S 2003 Amour oral 2004 Poids plume 5 2005 Le Qu bec est mort vive le Qu bec 2012 La pertinence de l autor f rence tenant son omnipr sence du point de vue du fonctionnement
97. ejoint encore cette id e que l agir commun en collectivit sacre les potentialit s de l individu La forme manifeste en elle m me est tr s paradoxale La chercheuse H l ne Millot dit du manifeste qu il est un Objet litt raire probl matique complexe ambigu souvent paradoxal et qui s av re d autant plus difficile cerner qu il est la fois un texte et un geste un texte qui se fait geste un geste qui se fait texte et qu il articule par cons quent de fa on tout fait singuli re le dire et le faire Le paradoxe semble agir petite tout comme grande chelle dans Manifestif On le retrouve sur le plan des mots mais galement sur le plan de la facture g n rale du texte M9 Patrick Roy et Serge Lacasse textes dit s et rassembl s par op cit p 47 120 H l ne Millot Vertus du nombre les proc d s cumulatifs dans la pratique manifestaire dans Pamphlet utopie manifeste XLX XX si cles textes r unis par Lise Dumasy et Chantal Massol Montr al L Harmattan coll Utopies p 223 78 f L ironie L ironie est une autre figure d opposition L introduction la chanson M diatribes est un dialogue entre deux personnages Les r pliques gagnent en th tralit du fait qu elles sont parsem es de rimes d hom ot leutes et d allit rations La cruaut des propos tenus par les personnages sur un ton outrageusement rim parle d elle m
98. emeure toutefois ind finie puisqu il n appara t dans aucun dictionnaire Sur le site web du groupe les fans y vont de leurs interpr tations Certains croient qu il s agirait de l expression fou braque travestie d guis e Peut tre qu il faut entendre qui brasse ce qui ferait allusion leur c t engag Que penser du fait que Loco Locass se serve d un mot sans amp Martina Drescher Jurons et h t rog n it nonciative Travaux de linguistique 2 2004 no 49 pp 19 37 En ligne www cairn info revue travaux de linguistique 2004 2 page 19 htm Page consult e le 30 avril 2013 Loco Locass Loco Locass site officiel En ligne http www locolocass net Page consult e le 30 avril 2013 36 signification certaine pour se qualifier Une premi re hypoth se serait que ce soit pour faire comprendre au lecteur qu il ne faut jamais tenir pour acquis son identit Une deuxi me hypoth se serait que ce soit pour attirer jouer avec le son et l instar de Gauvreau cr er des mots Le m me ph nom ne survient dans la chanson Isabe lle et Biz alors que l association moi rapo te p 77 1 11 lie l identit de l nonciateur au n ologisme rapo te Selon Saint Laurent le terme est propre au groupe Sans pr c dent il doit donc construire sa signification au fil d emplois Le sens jaillirait de lui m me en cours d utilisation du mot comme l explor
99. en de Gauvreau dont on ne peut dire que les po mes soient d pourvus de sens En ce sens l autod signation participe la construction identitaire de l nonciateur d une fa on toute particuli re en insistant sur la construction justement L autor f rence tient ici sa profondeur du fait que le sujet m me de l uvre est la promotion de l autoconstruction identitaire Se d finir pour exister en tant que peuple voici le message que nous retenons la lecture et la relecture de Manifestif Que les proc d s utilis s artistiquement dans le texte soient les m mes que ceux qui sont promus dans le texte titre de solution la crise identitaire qu b coise est de l ordre de la r flexivit Pour nous le rapo te est un sujet chantant encore mieux situ que pour illustrer les pouvoirs de l autod signation du fait que sa pratique sugg re une simultan it nonciation acte Plus loin dans le recueil la chanson I represent rien pantoute donne r entendre cette position de l nonciateur Avec 65 savoir l autod signation comme l autor f rence autant que l autocitation 37 J reste loquace fid le c que j suis p 113 1 22 c est un pouvoir accessible dans l imm diatet qui est signifi De cette mani re on dit ce qu on est pour tre ce qu on dit Potsot job l metteur un tre de relation d fini dans son rapport l autre
100. endre Biz M me transform voire cach le pseudonyme attire l attention Isabelle la conjointe de S bastien Fr chette l poque de la conception de l album devient Isabeille dans la chanson pour symboliquement marquer le lien d intimit qui l unit avec le chanteur Biz sugg re en effet le bourdonnement de l abeille D une page l autre de Manifestif les pseudonymes se relayent rappelant constamment la pr sence de l nonciateur Voici deux exemples Ch us rien que Chafiik artiste tics anti statiques p 16 1 10 et l affluent verbeux de Snou Le d bit d bile de Biz p 25 1 14 Dans le premier exemple la caract risation de l nonciateur passe par l association de ce dernier un style particulier ponctu de tics anti statiques l inverse dans le deuxi me exemple c est la nature du style langagier utilis qui est d finie par la r f rence l nonciateur Autrement dit tics anti statiques est compl ment de Chafiik alors que de Snou est compl ment de l affluent verbeux et que de Biz est compl ment de Le d bit d bile 73 Autre surnom de S bastien Ricard parfois agenc pour cr er Snou de Batlam comme sur le site officiel du groupe Cet autre nom ajoute la confusion des identit s de l nonciateur 43 Comme l affirme Dany Saint Laurent dans domaine culturel l usage d un pseudonyme sert carac
101. epr sentante du peuple fran ais Dans la r alit historique la Marianne est personnifi e par une femme coiff e d un bonnet phrygien anc tre du bonnet n o phrygien port par les Loco Locass lors des spectacles Pour en revenir l nonciateur ajoutons qu il d finit son identit en se disant fils ton gars de la France m re patrie repr sent e par la Marianne Adopt par les Fran ais lors de la r volution fran aise le bonnet phrygien est symbole de libert et de r volution puisqu il tait port par les esclaves affranchis en Gr ce et Rome Loco Locass s appuie sur l histoire pour se d finir Le groupe utilise cette appellation Chapeau voquant le bonnet de fou du roi 24 Le rap est un art urbain il est n de la rue dit on L appartenance un quartier une ville est d ailleurs une mani re couramment utilis e par les rappeurs pour marquer leur identit sociale psychologique et id ologique Il n est donc pas anodin que les premi re et derni re chansons du recueil contiennent des paroles relatives cette caract risation de l nonciateur par les lieux occup s Ainsi Manifestif contient des r f rences spatiales qui ont d autant plus d importance que l id e de localit est contenue au sein m me du nom du groupe dans l homonymie Loco locaux J reste sur la rue l Esplanade Montr al dans un 8 2 x 11 p 13
102. est le mot Une fleur a peut d ailleurs tre un ornement po tique Dans cette optique je veux tre la fine fleur de ma po sie Art p 103 1 2 reprend l id e de l artiste qui aspire ne faire 122 Comme dans L ornement po tique du discours les fleurs de la rh torique 80 qu un avec son art La locution fine fleur d signe ce qu il y a de meilleur de plus beau et de plus distingu Le vers appuie donc lui aussi sa mani re la corr lation identit expression de soi Mes mots dans mes veines Art p 106 I 2 est un autre exemple de ce ph nom ne le sang irrigue le corps humain pour le maintenir en vie mais en dehors du corps il se corrompt rapidement par coagulation il y a donc interd pendance le po te ici est po sie g L harmonie imitative L harmonie imitative est une figure par nature autor f rentielle puisqu elle fait entendre des sons qui imitent la r alit d sign e Les harmonies imitatives les plus significatives dans notre contexte de recherche sont celles qui donnent entendre la langue Dans Co te que co te mes mots d gouttent Sur ton tympan goutte goutte coute et go te mon babil Sheila p 25 1 9 les signifiants doivent tre mis en parall le avec les signifi s pour que l allit ration en k g t p d imite le son des gouttes que sont l es mots tombant une une L anal
103. fusion d assonances et d allit rations Encore mieux 5 Michel Murat Le vers libre coll Litt rature de notre si cle Paris Honor Champion 2008 p 44 29 dans Si tu parles maie crainte L on t entend longtemps temps temps p 32 1 26 l cho qui se perp tue en d crescendo est le pendant sonore et visuel de la mise en abyme litt raire De plus le fait que ce soit le nom de l metteur qui retentisse en cho dans J entends du fin fond des temps Les rebonds de mon nom p 34 1 1 pose la question de l identit comme pr occupation r currente L metteur crie d abord son nom son identit qui ne s teindra pas au contraire qui gagnera en amplitude gr ce au relais assum par le r cepteur c est du moins ce que sugg rent les vers L cho des mots lointains ne s teint pas si au relais tu es l p 33 1 1 La m taphore illustre bien l effet d entra nement et m me de propagation que l nonciateur souhaite donner ses mots cela rel ve d ailleurs de la dimension engageante de l uvre d j tudi e par Marie Claude Tremblay L empire du pire en pire travestissement et pastiche comme jeux identitaires La page titre de la chanson L empire du pire en pire nous pr sente l image d un billet de vingt dollars voir l annexe HI Toutefois en lieu et place du visage de la reine on retrouve celui de Chafiik Un message ludique p
104. ge la teneur du vers si tu es offusqu tu reviendras lorsque cela te sera pass La diaphore associant repasser synonyme de revenir la t che m nag re du repassage fait sourire Un peu plus loin dans Avis aux astie d aspic assiettes I represent p 114 1 10 un mot valise fait se c toyer l aspic et le pique assiette pour rehausser une insulte qui pourra ainsi piquer plusieurs degr s les journalistes souvent accus s de ne courir les conf rences de presse que pour les bouch es et les cocktails qu on y sert La tension monte et pr pare le r cepteur la prochaine chanson L nonciataire provoqu L insistance sur le potentiel militant de l nonciataire profite de l intonation belliqueuse de Vulgus v s Sanctus Ce texte engage clairement une lutte entre deux opposants Dans un coin du ring il y a le vulgaire et dans l autre le sanctifi La barre oblique v s mat rialisant la fronti re entre les deux contraires renforce l opposition L intensit de la chanson provient entre autre de l effet de simultan it qu offrent les changes directs entre l nonciateur et l nonciataire Tout a l air de se d rouler en temps r el Heille R veille Vulgus p 119 1 13 C est tu clair Vulgus p 120 1 13 dit l nonciateur imp tueux comme pour provoquer l nonciataire L nonciataire doit fair
105. gi re non normalis e si on veut met en lumi re cette propri t formelle du sacre qu est la polymorphie Un m tadiscours surgit L occurrence ostie est la plus attendue du fait qu il s agit de l orthographe correcte du mot caract re religieux dont elle est tir e Cette attention orthographique c toie le nom mal orthographi de l mission anim e par Julie Snyder le Poing Jf dans Mes diatribes l ostie d Point J qui avilit ici comme Paris la vie tivi p 98 1 44 Loco Locass discr dite ainsi l mission en subvertissant que ce soit de mani re volontaire ou non son nom en plus de le faire pr c der d un sacre signifiant l exasp ration Cependant le m me ostie figure plus loin dans le recueil pour produire un tout autre effet Dans La salle soir est sale Hostile en ostie not style p 113 1 1 une analogie phon tique produit un rapprochement entre les mots Hostile ostie et donne du rythme au texte Dans ce cas ci l expression en En cherchant d mythifier la pr tendue neutralit des m dias Chomsky est un intellectuel am ricain qui entend uvrer pour l mancipation et l autod fense intellectuelles de la soci t Il d fend la libert d expression notamment dans les m dias de masse 6 Le Poing J est une mission anim e par Julie Snyder et pr sent e sur la cha ne TVA entre 1997 et 1999 Il semble que les deux fa
106. global de l autorepr sentation il est essentiel de remarquer que c est un processus 169 d accumulation qui r git la pratique signifiante le corpus de notre tude pourrait s tendre encore jusqu englober m me la dimension musicale des chansons de Loco Locass qui semble elle aussi porteuse d autor f rence 165 Se dit d un fait qui volue d une exp rience ou d une exploration qui est observ e ou pratiqu e dans l organisme vivant Le titre du cd interactif laisse croire que la th matique de l identit transform e par l art y sera exploit e 16 Dans Amour Oral l artiste entend faire l amour au public gr ce aux jeux avec le langage 167 Le syntagme convoque le pouvoir de l crit 168 La formule n est pas sans sugg rer que l uvre ainsi titr e aurait le pouvoir de redonner la vie la culture 16 Janet Paterson op cit p 30 131 ANNEXE I 132 ANNEXE II TE RES L empire du pire en pire IT AX ANNV tel 134 ANNEXE IV Elle m aime Car Je me commets Comme un Gamin Gam te Chevauche le temps com te Mets tes culottes quand tu baisses tes culottes 8 cuse l j te d culotte J sais ch us culott J t un sans culotte et J te parle sans capote Capote pas ma botte Secr te C est ma verve Turgescente Dure gorg e d sens J sens l urgence D une purge purpurine pur e de prunes a fleure les agrumes Mon verbe Canneberge Co
107. guistique li l nonciation Nous savons que selon la linguistique pragmatique l usage c est le sens Autrement dit parler c est agir pour paraphraser J L Austin dans Quand dire c est faire L ensemble de l uvre Manifestif par les actes d nonciation les nonc s et les nonciataires qu on y retrouve parle de l identit comme intimement rattach e l agir Crois en ma parole la parole est un geste Mieux une action p 32 1 23 Dans le premier chapitre nous avons mis au jour un nonciateur multiple qui s autod finit en m me temps qu il s exhibe au fil des pages du recueil la fois dans le discours et dans les marques formelles le je est omnipr sent Au point o Danny Saint Laurent fait de l inscription de la figure textuelle de l artiste un trait fondamental de la rapo sie Nous sommes all e plus loin en cherchant le plus de formes d expressivit possible dans le texte La mise en sc ne de l identit qu elle soit conforme ou non la r elle identit du locuteur est une construction Nous supputions d s lors que l autor f rence dans Manifestif pouvait exemplifier et promouvoir l autoconstruction identitaire l nonciateur travaillant sans cesse se faire conna tre du r cepteur Il nous dit d o il vient quelle soci t il appartient 155 John Langshaw Austin Quand dire c est faire Paris Seuil 1970 p 18 13 Dany Saint Laurent op cit
108. i re qui a attir notre attention sur l importance des m taphores aquatiques ou liquides dans la po sie locassienne Apr s une relecture attentive du recueil nous avons t frapp e par l omnipr sence de la th matique du fluide qu on dirait presque in puisable tant elle est reprise sous diverses formes au fil des textes Tir de la chanson Sheila ch us l voici un extrait pr sentant une s rie de m taphores toutes affili es laire s mantique du liquide 1 L expression s abimer peut signifier se plonger dans qqch comme dans un ab me tout comme il peut signifier se d t riorer Le grand Robert de la langue fran aise 195 Se perp tuer dans la perp tuit est aussi assez pl onastique 1 Paul Choini re Car nous croyons que les mots sont le terreau des id aux les plus hauts Entretien avec Loco Locass Spirale juillet ao t 2002 L odyss e du lys assoiff d ind pendance Jamais de mon vivant je ne veux voir endigu Le fleuve de ma nation dans un bassin folklorique Qu on a chlor color rouge et bilinguis J ouvre les vannes en amont gare l inondation lyrique J active ma salive je me LOCOmotive Mon discours d eau prend sa source dans ma bouche Et termine sa course en douce l estuaire de tes deux h misph res Co te que co te mes mots d gouttent Sur son tympan goutte goutte coute et go te Mon babil habile hydrodynam
109. i lecteur RAPatrier la rythmie intrins que des mots en les pronon ant voix haute 4e de couverture L nonciataire reflet du public est maintenant situ l int rieur du cadre il est engag dans le processus de d termination du sens Le lecteur n est pas qu un r cepteur passif D embl e s imposent deux types d nonciataires l nonciataire positif et son oppos l nonciataire n gatif un nonciataire rh torique qui surgit momentan ment sans tre pragmatique Par exemple les baby boomers sont directement invectiv s dans Boom Baby Boom il est entendu que les boomers constituent un ennemi 97 commun pour Loco Locass et son public cible et donc qu il s agit d une prise partie strat gique Tout au long du recueil un paradoxe se tisse entre les divers nonciataires qui se r v lent Fort parier que le r cepteur se situera naturellement par rapport aux valeurs nonc es dans l uvre s associant tant t telle figure de l nonciataire se dissociant tant t d une autre La comparaison qui suit de Dany Saint Laurent renforce l id e que l nonciataire occupe une grande place dans les textes de Loco Locass Selon Saint Laurent le rapo te est comme le com dien les pi ces auxquelles il prend part veulent dire l homme l homme montrer le monde au monde L uvre miroir devient surface r fl chissante pour celui qui la
110. identifie ceux qu il consid re comme nuisibles au projet de d veloppement de la culture qu b coise ce qui surd termine le premier Ce qui ressort finalement c est une figure am lior e de l nonciataire positif reflet de ce que devrait tre le public auquel Loco Locass se joint en une symbiose qui fait office de renforcement positif La culture s op re par l oralit dit Cazabon Loco Locass choisit d autres mots L anthropologue Benjamin Whorf sugg re dans le m me sens que la langue joue un r le pr dominant dans le fa onnage du monde perceptuel d une culture Et si c tait justement cet effet de prendre part au fa onnement du monde perceptuel de la culture ici qu b coise que produisait Loco Locass avec Manifestif Sur les trois principaux plans de l nonciation tels que d finis dans notre introduction Manifestif regorge d effets stylistiques qui fabriquent le message pourrait on dire Le plan de l nonciateur bien qu on puisse aussi dire nonciateurs au pluriel puisqu il est changeant se situe dans un espace ouvert o le principe d identit est soumis d incessantes remises en question L nonciateur incarne notre avis la th se de Bourdieu voulant que les agents sociaux Loco Locass en est 158 Umberto Eco Lector in fabula Traduction M B Paris ditions Grasset 1979 15 Benoit Cazabon op cit p 156 1 Benjamin Lee Whorf Linguistique et An
111. if du texte et le r le du r cepteur Les th oriciens de la m talitt rature soulignent toujours la lucidit manifeste du sujet crivant qui fait des commentaires sur son propre nonc et sur sa fa on d crire ainsi que sur d autres uvres litt raires L nonciateur qui se nomme en dit beaucoup sur lui m me Prenons Loco Locass Loquace en fran ais c est videmment tre bavard Dany Saint Laurent s int resse la pr sentation orthographique du nom qu il interpr te ainsi r f re au pr fixe loco de la racine grecque locus qui signifie lieu et qui sert indiquer la capacit de se mouvoir d un objet Saint Laurent oppose locaux formation locale loco g n rateur de mouvement pour faire ressortir que derri re l apparent paradoxe se cache peut tre une signification la capacit de se mouvoir l int rieur d un cadre restreint ou circonscrit le cadre de la langue notamment cela ajoutons que loco en espagnol fou doit tre pris en consid ration pour comprendre toute la port e du nom de groupe choisi par le trio Par ailleurs Locass fait du sens pour l anglophone qui entend lock ass comme tireur d lite et ce parall lement la signification fran aise botter des Amaryli Chanady Une m tacritique de la m talitt rature quelques consid rations th oriques tudes fran aises Montr al PUM vo
112. ime unanime qui prime dans le r gime G rontocrate dans lequel tu te complais Bureaucrate dans ton complet veston cravate Boom p 65 1 7 Sans m nagement l nonciateur lui ordonne D barrasse Boom p 65 L 12 Si l nonciateur s adresse aux baby boomers le locuteur ne prise pas r ellement cette g n ration mais bien plut t ses descendants directs Sache que ton fils coute ce rap Boom p 69 1 13 La phrase peut d ailleurs para tre illogique si on n glige cette dynamique qui fait s opposer ici pour les besoins de la cause la figure de l nonciataire au r el public cible Le locuteur qui ne parle pas vraiment aux boomers fait jouer l nonciateur avec des expressions de jeunes qu il n a aucun soin de traduire pour les g n rations pr c dentes Tu catch sic pas mon slang Boom p 67 1 9 Le clivage entre le r el destinataire les jeunes qu b cois de la rel ve sociale et l nonciataire interlocuteur accessoire les baby boomers qui refusent de laisser leur place est net Le fils se dresse peu peu contre le p re L nonciateur parle pour intimer l nonciataire de choisir Entre parenth ses en sous entendu une insulte lui est lanc e Heille le casse toi ou viens jouer avec moi Boom p 67 1 14 Le r cepteur se fait mentalement une id e de l insulte peut
113. ion la communication devient associ e la figure des moutons sympt me d abrutissement de d g n rescence La salive a donc elle aussi sa symbolique n gative Comme quoi lambivalence des symboles est prise en charge dans Manifestif La dualit des images choisies donc leur part de double participe la propension autor f rentielle de l uvre Bref les m taphores rattach es au symbole de l eau abondent dans Manifestif D embl e la m taphore est une figure de style effet r flexif du fait qu elle est figure d analogie ou de contigu t s mantique Lorsqu elle repose sur l image de 72 l eau sa port e r flexive se trouve renforc e tant donn les propri t s miroitantes de l eau Quand en plus la duplicit du symbole est mise en lumi re par l utilisation des connotations tant positives que n gatives la r flexivit atteint un nouveau sommet Voyons maintenant comment la litote autre figure d analogie peut elle aussi tre mise au service de l autor flexivit c La litote La litote au sens de Morier cit par Dupriez consiste en une mani re de dire beaucoup en peu de mots de rester en de de la substance exprimer Dans la litote canonique de Corneille Va je ne te hais point avec laquelle Chim ne signifie son amour Rodrigue on remarque la pr sence d une n gation qui permet au lecteur de comprendre l nonc dans un sens contraire amp
114. ique Qui coule cool le long de la rive rythmique Cette longue m taphore fil e s tend de l odyss e du lys assoiff d ind pendance voquant le p riple d Ulysse jusqu la rive rythmique retour au port En fait tout le recueil est parsem d allusions hydriques Dans Langage toi on lit Le d compte go te Amer Quand au compte goutte Tu tombes et deviens goutte D eau dans l am re Am rique Contre le tangage d une langue qui ne s arrime rien Langage toi p 32 1 1 La chanson Malamalangue quant elle d bute avec ces mots Peuple la mer la merci des courants Malamalangue p 49 1 1 Mais en quoi ces r f rences m taphoriques participent t elles l autor f rence du discours Le symbole miroitant qu est l eau renforce t il la r flexivit de l uvre Sans aucun doute En fait le symbole de l eau peut tre envisag sur deux plans diam tralement oppos s L eau est source de vie et source de mort cr atrice et destructrice On sait qu au Qu bec le r seau hydrographique est une richesse naturelle qui a grandement influenc le d veloppement de la nation Afin de mieux saisir l ampleur des allusions faites aux fluides dans Manifestif analysons les plus 107 Sheila ch us l pp 23 25 65 repr sentatives d entre elles Nous s parerons en deux cat gories les citations invoqu es selon qu elles o
115. ire Le grand Robert de la langue fran aise Troisi mement il parle de l impact qu a cette prise de parole elle frappe ou fesse pour reprendre ses termes Enfin quatri mement par l entremise de l adverbe festivement une pr cision encore suppl mentaire nous est donn e quant la mani re d op rer du discours en cause Dany Saint Laurent remarque que les polices de caract res utilis es pour la mise en page des textes s apparentent et en certains endroits sont identiques celles qu on retrouve dans l dition originale du Refus Global le manifeste par lequel les Dans ce deuxi me chapitre toutes les r f rences faites au recueil seront pr sent es sous cette forme renvoyant au titre de la chanson abr g autant que possible au num ro de la page puis de la ligne dans le corps du texte 6l Automatistes montr alais en 1948 ont livr une analyse sociologique tr s critique de la soci t qu b coise de l poque Ce clin d il contribue inscrire l uvre dans une litt rature d id es et dans une pratique ludique du langage Il y a donc un discours sur la prise de parole dans Manifestif On constate alors une surd termination du processus autor f rentiel cause justement des fonctions pragmatiques du discours qui sont l objet m me du discours Concr tement nous nous proposons dans ce chapitre d tudier les proc d s textuels qui contribue
116. ire dans 138 On reconna t notamment Gilles Vigneault po te auteur de contes et de chansons auteur compositeur interpr te qu b cois et Louise Paquet pr sidente du mouvement national des Qu b cois de 1998 2002 139 Cette fois Louise Paquet et Lise Payette femme politique f ministe crivaine animatrice de t l vision et animatrice de radio qu b coise Manifestif comme un apport synergique au reste de l uvre D autant que les figures reconnaissables sont toutes associ es la d fense du fait fran ais au Qu bec Ces deux photographies encadrent donc les textes de chanson Cela ne va pas sans instaurer une orientation de lecture Bien qu il soit possible d aller d un texte l autre dans le d sordre les photos balisent le recueil cl turent le sens tout en le r fl chissant Le public photographi a volu entre le d but et la fin du spectacle S il tait passif au d but car en entente que le spectacle commence il est anim la fin et il s active communiquer son appr ciation par applaudissements Entre ces deux moments les spectateurs de la photo sont inspir s par ce qu ils viennent de voir et d entendre transform s par ce qu ils viennent de vivre On retrouve d ailleurs en quatri me de couverture cette id e que le r cepteur a un r le jouer dans l uvre Ceci est un disque Vous les hauts parleur sic 4e de couverture tu devras am
117. irs qui font se relancer les images que la langue projette d elle m me C est essentiellement par un processus de r it ration r it ration d l ments intertextuels r p titions des jeux sur le plan du signifiant etc Pourtant Loco Locass reprend rarement les m mes mots dans le recueil Le groupe pr ne Putilisation diversifi e d une langue dont la richesse a tout offrir Toutefois 91 quelques endroits les rapo tes r p tent parce qu apr s tout la fin sanctifie les moyens Pour leur part les inversions de type verlan par exemple brillent par leur raret Loco Locass vite les st r otypes accol s au rap pour d marquer son identit de celle des rappeurs ordinaires En somme c est maintenant au public de fournir 135 Loco Locass le un cho au message afin de le renforcer en le parachevant dit clairement son nonciataire L cho des mots lointains ne s teint pas si au relais tu es l Langage toi p 33 1 1 135 Marie Claude Tremblay op cit 107 p 92 Chapitre III Mise en sc ne de l nonciataire comme une invitation participer Au premier chapitre nous avons proc d chanson par chanson pour tudier une figure nonciatrice multiple parfois ambig e qui interroge sa mani re la notion d identit Nous avons fait ressortir que l nonciateur est le plus souvent la fois sujet et objet de son propre discours Par le biais de
118. iticiens et les grands acteurs qui contr lent la machine sociale est carr ment oppos l nonciateur pour sa part associ des justiciers militants Ben Hur urbain bien s r Je circule L empire p 42 1 20 l instar de Spartacus L empire p 43 1 1 L autre nonciataire dans L empire du pire en pire Mais le texte L empire du pire en pire sous entend galement un autre nonciataire peut tre prioritaire par rapport celui que nous venons de voir Il s agit de celui qui souffre de l emprise d une culture dominante On le retrouve indirectement puisqu il rev t temporairement la troisi me personne du pluriel dans le vers J en appelle tous les gus esclaves avachis L empire p 43 Benoit Cazabon Langue et culture unit et discordance Sudbury Prise de parole 2007 p 161 106 1 2 C est donc aux esclaves de l h g monie am ricaine que l nonciateur se joint lorsqu il dit J ai une telle vision tellement belle dans laquelle Nous brisons les cha nes et les c bles avec lesquels Ces fils de pub nous entubent L empire 1 p 43 1 5 Retenons l aspect performatif de la fa on qu a l nonciateur de s adresser l nonciataire Ailleurs dans le recueil l nonciataire est encore indirect L nonciataire rh torique Le je de la chanson Malamalangue
119. l nonciateur n est plus tout fait lui m me puisque son je pr suppose un travestissement porteur de d rision J ai une bonne nouvelle la maternelle pendant qu y jouait la marelle un ti cul s est fait ouvrir la cervelle coups de pelle Int ressant t as des photos videmment Y a tu du sang Non mais on distingue clairement les filaments blancs de l enc phale de l enfant sur ses v tements Excellent Je veux la r action des parents La table est ainsi mise pour la suite de la chanson qui prend une forme radicalement diff rente En effet dans les strophes qui suivent l nonciateur critique revient sur la sc ne dans le mot valise construit partir des mots m dia et diatribes on entend mes diatribes Le d terminant possessif marque l enti re appropriation de l nonciateur de ces diatribes dont on note au passage qu elles sont par essence expressives am res voire injurieuses Et pour terminer comme la fin de chacune des chansons du recueil le symbole du groupe fait office de signature la fin de M diatribes pour que l endossement soit sans quivoque Art po tik l art po tique po me didactique qui donne un acc s privil gi la th se artistique de l auteur L art po tique est une po sie didactique qui nonce les principes de composition et de style propres une conception artistique De tout le recueil Art po
120. l 23 no 3 1987 p 136 7 Dany Saint Laurent op cit p 34 Loc cit Cette image trouve cho dans le passage Nos mots sont des balles blanc Pan p 53 1 6 et dans Ma culasse est loco locass p 66 1 21 la culasse tant l extr mit post rieure du canon d une arme feu par o on charge un fusil 26 derri res que prend la traduction de l expression C est donc dire que le fran ais l espagnol et l anglais trois langues parmi les principales parl es en Am rique s entrem lent dans Loco Locass nom aux multiples sens form dans une langue qui parle en somme simultan ment plusieurs langues celles d un territoire en l occurrence un lieu Le festif de m me qu un aspect interculturel seraient un trait d terminant de l identit du groupe Ce vers tir de la chanson L assaut le confirmerait d ailleurs D bile mobile volubile Voil nos mobiles p 129 I 1 Notons que l id e d appartenance un lieu fait son chemin d une couverture l autre de Manifestif L assaut derni re chanson du recueil se cl ture sur ces mots Loco Locass On arrive drette Du Faubourg M lasse p 129 1 19 Le faubourg m lasse est le nom donn un quartier jadis ouvrier du centre sud de Montr al Il s agit de l endroit o Loco Locass a r alis la version maison de son album dont on comprend encore mieux
121. la fois le moyen de d fense et la chose d fendre ce qui repr sente bien l engagement de Loco Locass par et pour la langue M thodologie Tout au long de notre recherche visant retracer les dispositifs g n rateurs d autor f rence dans Manifestif nous devrons rep rer les premier deuxi me voire troisi me degr s que peuvent receler les m mes vers ainsi que le paratexte Autrement dit il nous faudra d coder les signaux m tacommunicationnels tant donn que Manifestif n est pas une uvre narrative nous nous devions d adapter le mod le analytique propos par Janet Paterson Pour ce faire nous avons adapt le mod le propos par Janet Paterson de sorte qu il convienne des textes empruntant la forme lyrique forme dominante chez Loco Locass Voici donc l outil modifi 3 Lise Bizzoni et C cile Pr vost Thomas dir Dany Saint Laurent La rapo sie ambigu t g n rique et culturelle dans La chanson francophone engag e Montr al Triptyque 2008 p 89 12 Tableau II Les niveaux d analyse de l autor f rence dans l uvre po tique Manifestif 1 nonciation nonciateurs auteurs rappeurs Biz Batlam Chafiik Principalement la mise en sc ne d un personnage rappeur ou d une figure auctoriale Quand le je se met en sc ne 2 Enonc nonc l uvre la parole le langage La rapo sie un m talangage Plan th matique a La mise en abyme b
122. lifi Le m me effet se produit avec les premi res paroles de la chanson Manifestif Mon rap est pas trop pro gansta Y est pas trop pro ganja C t un topo pro langage p 13 1 1 L habilet des Loco Locass s approprier en partie le style rap tout en rejetant les caract ristiques dites pro gansta sic et pro ganja est remarquable on dit qu il ne l est pas trop pour signifier clairement qu il ne l est pas du tout On l associe plut t encore une fois la force du discours un topo pro langage En outre le groupe Loco Locass profite de ce que le rap est originellement un v hicule de la culture Alors que les rappeurs afro am ricains traitent de la mis re conomique 113 Bernard Dupriez op cit p 277 114 Le gangsta rap associ au mot gangster m lange des musiques funk m lodiques paroles souvent ultra violentes ou sexistes 115 Le ganja rap est un genre militant pour la cause cannabique 73 et des conflits raciaux qui ont marqu leur culture Loco Locass touche une probl matique depuis toujours d terminante pour l identit des Qu b cois la langue Il est donc circonstanciel que Loco Locass veuille sortir son peuple de la pauvret identitaire par la valorisation de l expressivit C est c que j fais avec mon rap j essaye d tre raccord avec mon histoire Boom p 68 1 26 L idiome de la commu
123. lui m me voire se d finit tout comme le mot parle de lui m me dans Manifestif titre d exemple invoquons l extrait en caract res virilliques Priap e p 90 1 6 Le terme caract re renvoie aussi bien une lettre crite qu une mani re d tre Le n ologisme virilliques donne entendre d une part de viril ce qui s accorde avec la m taphore sexuelle de la chanson et d autre part de cyrillique l alphabet slave Virilliques fait r sonner les deux sens du mot caract re pour un rapprochement entre les deux acceptions du mot caract re que sont l ment graphique d une criture langage et mani re d tre identit Cela pousse encore une fois au rapprochement des notions de langage et d identit dont le lien est au c ur de Manifestif 88 k L inversion L inversion consiste en un renversement de l ordre des constituants de la phrase mots ou groupes de mots Dans la chanson Isabeille et Biz lorsque l nonciateur annonce C est en vers l envers que je lui rappe la pomme p 78 1 5 on s attend voir quelques inversions l uvre D j dans le refrain la d signation Belle Isa est la nette inversion du nom du personnage Isabelle Le verlan le mot lui m me illustrant ce qu il op re l envers constitue un argot qui inverse les syllabes de certains mots Plus sp cifiqueme
124. lus de temps se faire voir Sheila p 26 1 1 Vu sous cet angle la modalit interrogative r currente inquisitrice comme autant de coups d cisifs est une fa on d acculer au pied du mur la ministre qui aurait failli son 104 mandat La mont e vers cette percutante finale se fait pourtant avec un nonciataire parall le qui serait plut t un t moin dont l nonciateur se r clame dont il cherche l adh sion La premi re personne du pluriel et ses d terminants possessifs nous laissent toujours croire un lien de connivence entre l nonciateur et l nonciataire Sans l ignorance crasse on Crisserait not camp Non Sheila p 24 1 15 L oasis de notre langage p 25 1 18 Nous nous Miron Sheila p 25 1 20 L imp ratif commande moins qu il n invite dans cette chanson ce qui nous porte penser que le rapport avec l nonciataire se veut doux Passons sur l impasse de la Constitution Sheila p 24 1 1 coute et go te Sheila p 25 1 11 fait appel deux des cinq sens de l nonciataire donc sa sensibilit L nonciateur veut le sensibiliser au combat mener contre Copps Il veut le stimuler de mani re provoquer chez lui une r action automatique pour d fendre sa culture un r flexe majeur face la mise l index Sheila p 25 1 24 Bien loin de s
125. me mani re socialement les jeunes veulent se d marquer de leurs pr d cesseurs Dans Boom baby boom il y a m pris de la figure paternelle qui finit par tre vinc e de toute sorte de fa on Notamment l nonciateur n h site pas flush er le patriarche avec l eau du bain Boom p 68 1 24 comme quoi l heure est au renouveau La charge contre la g n ration des boomers se poursuit r troactivement cette fois dans la chanson La casse L nonciateur reproche aux jeunes de 1968 les boomers de 2000 d avoir mal servi la cause ind pendantiste lors du d fil de la St Jean cette ann e l L nonciataire appel Jeunesse de chien est tenu responsable de l meute lors du rassemblement pour l ind pendance nationale C est d ailleurs la photo d un manifestant dans une foule houleuse qu on retrouve sur la page titre de la chanson voir l annexe XI quatre reprises il y a un appel direct fait aux meutiers de l poque sous la forme Jeunesse de chien Ailleurs dans la chanson l nonciateur s adresse une jeunesse larv e puis une jeunesse chienne peut tre par allusion au mouvement Jeunesse chr tienne L nonciataire est trait de p tit criss Il y a omnipr sence de l id e de jeunesse comme pour rappeler aux boomers qu ils ont t jeunes et cervel s Mais toi t en souviens tu ou ben t tais
126. naut qu b coise correspond un mode de penser sp cifique h rit de l histoire des g n rations pass es Promouvoir l idiome c est inviter ses titulaires reprendre contact avec l essence de leur communaut Nous pourrions num rer d autres litotes apparaissant dans Manifestif ne serait ce que celle ci La cure C est de ne pas s emmurmurer vivant Langage toi p 116 et la litote s enrichissent l une l autre 32 1 11 Dans cet exemple l autor f rence Notons qu il est significatif que plusieurs litotes aient pr cis ment pour sujet la langue crite parl e et d autres moyens d expression dans Manifestif Le ph nom ne contribue assur ment au mouvement de retour sur soi du vers si particulier qui mane de l uvre Voyons maintenant comment la personnification peut elle aussi supporter l autor f rence d La personnification La personnification est un jeu d identit en ce qu elle fait d un tre inanim ou d une abstraction un personnage r el La plus significative dans le contexte de notre tude 116 Celle ci est introduite par le mot valise emmurmurer la cure c est de ne pas se cantonner dans le silence donc c est d utiliser la langue comme on le fait implicitement et explicitement dans le vers 74 est celle qui met en sc ne la langue En voici une premi re Ma langue mal embouch e couche Avec le butcher Malamala
127. ne www cairn info revue travaux de linguistique 2004 2 page 19 htm Page consult e le 14 avril 2012 145 ECO Umberto Myriem Bouzaher trad Lector in fabula Le r le du lecteur ou la coop ration interpr tative dans les textes narratifs ditions Grasset 1979 315 p ESQUENAZI Jean Pierre Le pouvoir d un m dia TFlet son discours Paris L Harmattan 1996 256 p ESQUENAZI Jean Pierre Sociologie des uvres de la production l interpr tation coll U S rie Sociologie Paris Arman Colin 2007 226 p FONTANIER Pierre Les figures du discours coll Champ Paris Flammarion 1977 500 p FOREST Jean Anatomie du parler qu b cois Montr al Triptyque 1996 232 p FORTIN Nicole La rh torique mode d emploi proc d s et effets de sens coll Conna tre no 5 Qu bec L instant m me 2007 160 p GAUVIN Lise crivains contemporains du Qu bec anthologie Montr al Hexagone 1998 595 p GAUVIN Lise Langagement Montr al Bor al 2000 254 p GENETTE G rard Seuils Paris Seuil 1987 388 p GERVAL AROUFF Jeanne Art primitif La grotte orn e de Sormiou 27 000 ans de peintures rupestres En ligne 13 d cembre 2003 http presse ffspeleo fr article php3 id_article 418 Page consult e le 11 avril 2013 GIDE Andr Journal 1889 1939 Paris Gallimard Pl iade 1948 215 p HUTCHEON Linda Modes et formes du narcissisme litt raire Po tique
128. ne cessent d attirer notre attention dans l uvre locassienne 157 ma nation p 25 L 2 123 Dans le deuxi me chapitre nous avons poursuivi notre investigation du recueil sous l angle cette fois de la typologie de l nonc Nous avons vu que le texte dans Manifestif se repr sente en parlant constamment de lui m me Nous r p tons qu il est propre au genre litt raire du manifeste de th oriser la pratique de l criture Il allait donc de soi qu un discours ludique sur la prise de parole soit rep rable dans Manifeste tif Mais plus encore l uvre locassienne entra ne une surd termination du processus autor f rentiel notamment par la mise en avant des fonctions pragmatiques du discours qui constituent l objet m me du discours Concr tement nous avons tudi dans ce chapitre les proc d s textuels qui contribuent mettre sous les projecteurs la pragmatique du discours Pour ce faire nous avons relev des figures de pens es m taphores etc puis des figures de mots jeux phon tiques graphiques etc ayant l criture et la parole pour objet ce qui nous a aussi permis d laborer un portrait des diverses formes rev tues par l autor f rence sur le plan de l nonc dans Manifestif L ampleur du r seau s mantique du liquide admettait diverses interpr tations l eau miroir l eau figure paradoxale quant sa force qui peut servir mais aussi d
129. nfrontation L analogie du ring avec ses coins oppos s est propice l autod finition car quand il y a confrontation il y a forc ment comparaison entre les parties qui se positionnent l une contre l autre donc l une par rapport l autre Par l nous voulons dire que la figure de l nonciataire n gativis e peut avoir t cr e pour rehausser le caract re de l nonciateur Ainsi le je du texte se caract rise par rapport l alt rit qui est souvent le tu ou l nonciataire Cette strat gie de mise en vidence des contrastes tait d j rep rable dans Sheila ch us l avec la m taphore ta terre anglaise mes racines latines Sheila p 23 1 15 Ailleurs dans Boom baby boom on lit l opposition suivante Toi t es pay pour t en aller Moi faut que j paye pour travailler Boom p 66 1 13 Je et tu sont oppos s dans ces vers En fait dans Boom baby boom l nonciataire est le p re ou la figure paternelle Mais l o tu me perds p re C est quand je te vois Boom p 70 1 9 Mais crois moi papa Boom p 70 1 28 Un autre clivage entre nonciateur nonciataire se forme celui du foss interg n rationnel Les modes vestimentaires ou autres se 111 succ dent souvent comme des r actions par rapport aux modes pr c dentes De la m
130. ngue p 51 1 5 En octroyant la langue le pouvoir de coucher avec on concr tise une abstraction la communication qu on humanise La personnification renforce ici le lien conceptuel r versible qui unit l homme sa langue en plus de permettre la critique de lali nation anglo saxonne Par ailleurs De mon verbe je d sherbe Isabe lle p 77 L 13 attribue au verbal l action perceptible de d sherber Un des r sultats de ces personnifications sera d insister sur le pouvoir tangible de la langue dans la vie de tous les jours De la m me mani re 300 000 ans qui crient bout portant Dans mon sang Art p 105 1 9 fait passer l id e que la communication repr sent e par le cri est porteuse de toute l Histoire de 1 Humanit Lorsque La voix est noy e Malamalangue p 49 1 20 la voix manque de souffle lorsque le verbe est v rol Langage p 34 1 22 il est atteint d une maladie d g n rescente lorsque la syntaxe est en voie d extinction Malamalangue p 49 1 24 c est que sa survie est menac e Toutes ses personnifications du mat riau langagier contribuent fondre les concepts de langage et d humanit ce qui met en lumi re l apport de la langue dans l identit et vice versa L autor f rence est renforc e du fait que la langue elle m me soit personnifi e 75
131. nismes autor f rentiels qui travaillent l uvre Sur quels plans sont ils le plus actifs Au del des motifs de l identit et de la nation la parole communique t elle d autres r f rents Voire quelles autres cl s r flexives que celle de la parole l uvre met elle en place Et quel s effet s de sens est il produit in fine Cadre th orique La notion d autor f rence puisqu elle encadre notre tude doit d abord tre bien d finie Puis il convient de rappeler les principales notions de la pragmatique de l nonciation et de la linguistique nonciative principaux cadres analytiques de notre tude La formation du lex me autorepr sentation provient des particules auto en grec autos qui signifie soi m me lui m me et de refectorium qui veut dire refaire en latin Le terme autor f rence d signe ainsi toute portion de discours qui se prend elle m me comme r f rent Dans le domaine linguistique l autorepr sentation et le m talangage sont deux termes techniques qui sans tre quivalents renvoient des ph nom nes similaires La chercheuse Josette Rey Debove propose cette d finition le syst me m talinguistique cod est une m talangue par rapport une langue donn e et la r alisation de ce syst me en discours est un m tadiscours par rapport un discours dans une langue donn e Par rapport cette notion de m tadiscours
132. nne con oit un mod le qui permet de distinguer les diverses strates du roman o il est possible de rep rer l autorepr sentation Le voici sous forme de tableau voir tableau I page suivante 10 Janet Paterson op cit p 33 Tableau I Les niveaux d analyse de l autorepr sentation dans le roman selon Paterson nonciation narrateur auteur Principalement la mise en sc ne d un personnage crivain ou d une figure auctoriale nonc narration l uvre litt raire i Di g se a La mise en abyme b La r duplication et l ench ssement c Les m taphores d Les figurations ii Code La parodie a b L intertextualit c Les structures de surformalisation Les jeux du signifiant Le champ lexical 3 Enonciation narrataire lecteur Principalement l inscription de l activit de la lecture dans la pratique du texte marque un lien analogique Source Janet Paterson Les niveaux d analyse Moments postmodernes dans le roman qu b cois Ottawa Presses de l Universit d Ottawa 1993 p 26 Ce tableau synth tise d habile fa on les typologies formelles d Inger Christensen narrateur narration narrataire de Jean Ricardou croix de l autorepr sentation 1 Paterson se reporte Inger Christensen The Meaning of Metafiction a critical study of selected novels by Sterne Nabokov Barth and Beckett Oslo Bergen Universitetsforlaget 1981 p 13 14
133. nt mettre sous les projecteurs la pragmatique du discours Nous rel verons le plus de figures de style possible des m taphores aux jeux phon tiques graphiques etc afin d laborer un portrait des formes rev tues par l autor f rence sur le plan de l nonc Tout d abord sur le plan th matique de Manifestif nous verrons que la mise en abyme la m taphore la litote la personnification ainsi que l ironie portent souvent sur la langue d une mani re particuli rement autor f rentielle 10 Dany Saint Laurent op cit p 48 62 Puis sur le plan formel de l uvre nous constaterons que l harmonie imitative le t lescopage la r p tition le champ lexical et l inversion sont des proc d s qui supportent facilement une surcharge s mantique Plan th matique a La mise en abyme D llenbach consid re qu est mise en abyme tout miroir interne r fl chissant l ensemble du r cit par r duplication simple r p t e ou sp cieuse La mise en abyme repose enti rement sur la notion de r flexivit et toute r flexion est donc porteuse de surcharge s mantique Un nonc devient r flexif gr ce la relation de d doublement qu il avoue avec l un ou l autre aspect du r cit Aussi la mise en abyme est elle la figure r flexive par excellence Comme processus de redoublement la mise en abyme agit d une fa on tellement magistrale qu on a tendance y voir l
134. nt la pauvret linguistique per ue notamment travers l emploi abusif de mots qui contreviennent au bon usage l utilisation excessive de mots vulgaires tels les sacres rel gu s au niveau populaire de la langue etc Gilles Charest dans Le livre des sacres et blasph mes qu b cois affirme que sjacrer r pond des imp ratifs motifs certains cet gard la force expressive du sacre ne fait plus de doute En fait le sacre a pour effet d amplifier le sens de la phrase ou du mot En cela on le consid re comme un marqueur de discours fonction principalement affective Le sacre 54 Prince juif fictif 55 Spartacus tint en chec l arm e romaine pendant deux ans 73 71 av J C Il tait le chef des Ne par 54 69 se voit proclam ennemi public par le s nat 5 Caligula empereur romain 37 41 atteint de d s quilibre mental gouverne en tyran 5 Gilles Charest Le livre des sacres et blasph mes qu b cois coll Connaissance des pays qu b cois no 2 Montr al ditions de L Aurore 1974 p 31 31 souvent utilis comme interjection peut v hiculer diff rents sentiments allant de l exasp ration l tonnement la frustration etc Au Qu bec ce type de jurons participe l identit sociale de l nonciateur puisqu il est forg m me son histoire On sait que sacrer est un ph nom ne qui d coule notamment des conjonctures d avant la R volution Tranquille
135. nt les palindromes tels Ben Hur urbain L empire p 42 1 20 et fou ouf Art p 104 1 20 produisent un effet miroir qui rappelle l autor f rence globale de l uvre Janet Paterson l ve ce genre de ph nom nes au rang des caract ristiques fondamentales de l uvre autorepr sentative Elle note ce sujet il est rare de ne pas trouver dans un texte autorepr sentatif un d tail exprimant ce fonctionnement Qu il s agisse d un jeu d checs Kamouraska d Anne H bert d un tableau noir La Peste d un miroir le nombre d exemples est infini retenons L Emploi du temps de Butor d allusion la sexualit 4da de Nabokov ou aux fonctions du corps Beckett de r f rences aux couleurs noir et blanc La Jalousie de Robbe Grillet et l uvre d art Trou de m moire d Aquin un texte qui parle de soi transpose g n ralement l chelle d un signe sa pratique signifiante Le miroir en tant que surface r fl chissante supporte un symbolisme extr mement riche dans l ordre de la connaissance La sym trie de mots rel ve de l autor f rence 131 Janet Paterson op cit p 29 89 Or malgr l annonce et contrairement au rap typique le rap locassien ne contient que tr s peu de verlan Nous croyons que cela tient cette posture n gociant la fois l inscription dans le mouvement rap la fois au maintien distance du m
136. nt en lien avec son identit L nonciateur qui exploite habilement le sacre r v le par la m me occasion la contribution r ciproque de l tre sur le langage et du langage sur l tre Dans une autre chanson l nonciateur parle des influences artistiques qui ont contribu faire de lui ce qu il est De cette mani re nommer ses artistes comme 57 dire sa culture lui permet de consolider son identit La mise en avant plan de l utilisation des pseudonymes rappelle encore l omnipr sence de l nonciateur qui ne cesse de se dire au fil du recueil Une nouvelle mise en abyme ressort du morcellement de l instance nonciatrice Apr s avoir puis dans plusieurs strat gies pour se r v ler l nonciateur attire encore l attention lorsqu il joue cache cache travers des calligrammes L introduction la chanson M diatribes constitue une parodie mettant en sc ne des personnages Le jeu critique est rapidement point du doigt par son homologue s rieux que sont les diatribes acerbes qui lui succ dent videmment il fallait que toutes ces observations soient tay es dans Art po tik pour confirmer que la pr sence marqu e de l nonciateur est un point important de la construction de l uvre L art po tique en tant que po me didactique donne un acc s privil gi la th se artistique de l auteur et comme de fait Art po tik est une chanson o la profusion de je
137. nt une connotation positive ou n gative d apr s leur contexte Dans l extrait Batlam Slam Lame de fond qui fond sur toi Boom p 67 1 4 l nonciateur s associe la vague soudaine qu est la lame de fond La puissance motrice du ph nom ne est mise en relief L eau en mouvement s oppose l eau stagnante corrompue Revoyons le passage de Sheila ch us l cit quelques lignes plus haut pour le d cortiquer davantage sous l angle du mouvement L opposition stagnation mouvance de l eau se fait bien sentir dans Jamais de mon vivant je ne veux voir endigu le fleuve de ma nation dans un bassin folklorique J ouvre les vannes en amont gare l inondation lyrique Sheila p 25 1 1 La m taphore contient l id e que l nonciateur a le pouvoir d ouvrir les vannes c est en cela qu il d tient le moyen de r animer la nation Le cours d eau par ailleurs est un symbole int ressant du fait qu il est la fois fixe et la fois mouvant Le lit du fleuve demeure le m me mais l eau suit son cours de sorte que l on ne se baigne jamais deux fois dans le m me fleuve Dans ces exemples on per oit une c l bration de l nergie cin tique de l eau L eau a une connotation positive 108 Citation d H raclite Un peu plus loin toujours dans Sheila ch us l on lit J active ma salive Mon discours d
138. nverge Vers Ton Verger J ai d l air fort mais dans mon for J sais pus o ch us j ai jamais su mais chuk Une chose ch us s r Quand j vais vers toi j verdoie 89 ANNEXE V Comme Priape priant pris en flagrant d lice en guise de pr misse la d floraison de ton Jardin des D lices flairant ta fragrance j acte avec jactance des oraisons jaculatoires o le lyrisme me fait entrevoir les horizons de ma d raison p remptoire en caract res viriliques je franchis ton Rubicond au seuil critique J entre cambr en ton antre et j entraper ois un concentr d ternit j ternue une nu e d abeilles si je r garde le soleil de trop pr s comme Alice et Lewis au pays des groseilles j entends des christmas Carroll J ris car j me sens comme Icare c est bizarre j entends comme mon p re qui m crie gare oups y est trop tard la cire vermeille me coule le long des ailes j appelle j pelle j p le tous les maudits mots dits mon secours y pas d recours j oours mon tour ma perte me tue me perp tue dans l pertuis d la perp tuit effar par l effroyable p rennit de l ph m re dire qu on cherche l effet b uf alors que tout tient dans un uf l j ai une vol e d oies blanches qui veut s envol er en V du bout de mon Cap aux Oies mes hanches flanchent mon c ur clenche j sens qu j pus tanche 135 ANNEXE VI Cacule c est laisse sp cule en faire sur chat le le chaud fri
139. ociation Vulgus v s Sanctus le je partisans la missive une forme sign e K NONCIMOUE D nca in em ini nets nt m ere dire Run tete ae L assaut l nonciateur combattant rene rrrrsnesssessscnsee Conclusion sa e A a i a a irait Chapitre II Mise en sc ne de l nonc le langage devient objet du discours la rapo sie est un m talangage eereerersssseosoreseessosesnenesestseoroseneaesesnssessnesesosesesusssvoreresssenesesssssreste Plan th matique de l oeuvre inner a LA mise en abyme srn nn monnaies D LA m taph re nn nnienaeseneminianRosintee its 63 La On nent unanime 72 d La DErSONNICATONE ed pannimnd ennuis 73 Pandora ane ie onnendnnstss 75 SEN BAT aoi t Ul nas nune indie nent nn ner 78 Plan formel de l OORNTe ne Nine 79 g L harmonie imitative eeseeseeseeseerressesreseoreererecoreseeseosvorcoressosserresessessesreneese 80 h Ee t l scop ge ennemi nt eur rero rasido Eten 82 i La t p titiOn ossis siioesssssodiosiosssteesnissssisissseioi danesi paseito sioner on Vaa iior 83 j Le champ l xical n seosrsissrrosroesssssississeasessscorabspesresievesdae doire ro N ases a aaiae 85 L INVENIOR ne teen E E ein nes 88 Conclusion seoss00 RSR I RE PR S 89 Chapitre III Mise en sc ne de l nonciataire Comme une invitation participer 92 Un nonciataire averti en vaut deux ssseseererssessessosesserse
140. ogie langage eau est vidente comme nous l avons vu plus haut Les mots donc le langage permettent d entendre l eau qui est m taphoriquement le langage Voil donc une fa on de faire participer l harmonie imitative l autor f rence Un autre exemple d harmonie imitative autor f rentielle se trouve dans l extrait L cho des mots lointains J entends du fin fond des temps Les rebonds de mon nom Taper mes tympans a sonne comme l homme qui nomme Se nomme 81 lui m me Langage p 33 1 1 Le rebond des sons doubl s tripl s et m me quadrupl s on om imite l cho de la voix qui est une figure autor f rentielle dans la mesure o elle est un ph nom ne de r flexion du son Le terme cho peut galement d signer des propos rapport s par quelqu un donc une forme de langage des rumeurs etc M me chose avec Tel un h lico Pareilles des pales mes paroles Hachurent et d chiquettent L empire p 41 1 1 dont les sons durs reproduisent l action des pales de l h lice qui ne sont autres que les paroles de l extrait sur Pair La simultan it des effets concourt ici encore une surench re du sens D une mani re plus visuelle cette fois dans Priap e la p tite vite la disposition du texte donne voir ce que le texte dit Nous avons parl plus haut de cette forme qu est l anagramme En voici un
141. oisi me temps le groupe enrichit la figure de l nonciataire positif reflet du public auquel il se joint en une symbiose qui fait office de renforcement positif En d autres mots Loco Locass par la voie de l nonciataire invite le r cepteur dans le jeu du langage De cette mani re le groupe plonge son public dans un ludisme langagier qui entend r pondre au probl me identitaire qu b cois Marie Claude Tremblay con oit qu une dimension engageante ressort de l art locassien c est dire que le r cepteur se sent impliqu dans ce qu il lit Nous croyons que la mise en place de figures de l nonciataires contribue la port e engageante de l uvre Manifestif Comme vu pr c demment aux niveaux de l nonciateur et de l nonc une id ologie prend forme la construction identitaire par l utilisation de la langue Nous nous faisons maintenant une id e de la vision qu a Loco Locass du Qu b cois accompli celui qui actualise sa langue qu b coise Un nonciataire averti en vaut deux D s les premi res lignes de Manifestif la chanson d ouverture du recueil l nonciataire est interrog quel point tu catch quand j tchatche du Loc sic Locass Manifestif p 13 1 3 Or l interpellation est provocatrice l nonciateur questionne ses comp tences interpr tatives De cette mani re le lecteur est avis F at tention Manifestif p 13 1 22
142. oits dans le recueil Manifestif permet d inscrire m me le texte cette dynamique participative qui est souhait e L nonciateur comme impatient d obtenir une r ponse interroge Tu m entends tu Manifestif p 17 1 23 Ce jeu de mise en sc ne traduit l importance du r le du r cepteur en tant qu agent actif dans la signification de Manifestif L nonciataire qui contribue ce que a sonne Il arrive quelques endroits dans Manifestif que la figure de l nonciataire ou du moins l aspect phon tique de son appellation dans le texte soit temporairement mise au service de la rythmique d une phrase voire de la sonorit d un vers Par exemple l interpellation g n rale mec sert la figure de style de l inversion dans Me gerbe son Mc Do dans le dos mec Sheila p 24 1 3 Ailleurs le m me mot permet la r p tition du son que la mission Intrins que qui vient avec mec 142 Notons que le dialogue peut para tre dissimul par le fait que la r ponse de l nonciataire ne nous parvient que par l entremise de l nonciateur 102 Potsot job p 59 1 3 L effet est repris dans PQ parti v hicule qui me m ne la Mecque mec Vulgus p 120 1 11 Ces appels au public qui prennent la forme de man ou mec sont typiques du style rap Leur principal r le est de ponctuer les vers maintenir le
143. on francophone engag e donne la parole sept chercheurs qui se penchent sur la probl matique de lengagement Les termes nonciateur nonciataire y figurent mais c est toujours l angle de la sollicitation du public par l artiste engag engageant qui est adopt En outre l autor f rence n est jamais abord e comme telle Tout en prolongeant ces travaux notre tude en posant les trois niveaux d analyse de l autorepr sentation propos par Janet Paterson veut consid rer l ensemble du 1 Marie Claude Tremblay Loco Locass La parole en gage Loco Locass une esth tique engag e et engageante M moire M A Sherbrooke Universit de Sherbrooke 2009 p 89 2 Lise Bizzoni et C cile Pr vost Thomas dir La chanson francophone engag e Montr al Triptyque 2008 185 p 10 ph nom ne syst me qu est l autorepr sentation pas seulement un volet pour d montrer la richesse de son action dans l uvre locassienne o elle est mise au service de l engagement comme plusieurs l ont d montr Ainsi notre tude par l entremise de l analyse po tique de l autor f rence cherchera prouver le mat riau de Paterson des textes non narratifs en l occurrence lyriques Nous pourrons d s lors offrir une tude de Manifestif sous un angle sp cifique in dit l autor f rence qui ne n gligera aucune des strates nonciatives de l uvre Objectifs et hypoth ses
144. ouffrir d un conservatisme born Loco Locass int gre l apport multiculturel des immigrants qui font partie au Qu bec du paysage social Ainsi un passage crit en arabe puis traduit en fran ais entre parenth ses indique que le multilinguisme est moins v cu sous forme de tension que d enrichissement verbal et textuel Comme le soutient Cazabon une appartenance fond e sur la valorisation du r alisme intrasoci tal peut donner un sens d appartenance une fiert 144 En 2000 les Qu b cois lui reprochaient de trop subventionner la culture d tat plut t que d encourager le patrimoine historique et national 105 et un go t d actualisation c est justement l nous semble t il que Loco Locass souhaite en arriver L nonciataire sous la forme d am romain Si dans la chanson pr c dente le ton est la connivence dans le texte satirique L empire du pire en pire l nonciateur proc de une critique acerbe des travers de la soci t am ricaine l nonciataire qu il juge en plein d clin Des associations sont faites avec des empereurs romains au despotisme reconnu qui ont dirig des r gimes de terreur Non non N ron Regarde ton peuple Calcul Caligula L empire p 45 1 7 L nonciataire dont on comprend ici qu il regroupe les dirigeants de l empire am ricain ou am romain pour poursuivre la m taphore de Loco Locass soit les pol
145. ouvement dont nous avons d j parl Notre hypoth se veut que ce soit dans la m me intention d appropriation distanciation que Loco Locass ne colle pas totalement au rap De toute fa on le verlan argot associ aux ghettos fran ais n offre peut tre pas d avantages consid rables pour Loco Locass qui privil gie un jeu avec la langue plut t rapo tique que rap et plut t franco qu b coise que fran aise Conclusion Loco Locass joue avec la langue ce qui a pour effet de donner le go t au r cepteur de faire de m me Biz Batlam et Chafiik nous invitent lever la voix notre tour comme le r sume si bien Pierre Falardeau en pr face au recueil Une soci t qui ma trise sa langue au point de pouvoir s en amuser est une soci t qui a franchi un grand pas vers la consolidation de son identit La langue constitue selon Gaston Miron qui entre autres est d di Manifestif le fondement de l existence d un 133 peuple Une circularit r git la dynamique de l uvre locassienne la mani re d une forteresse la langue est la fois le moyen de d fense et la chose d fendre ce qui repr sente bien l engagement de Loco Locass un engagement par et pour la 134 langue Cette vision sociologique trame le recueil du d but la fin NJous nous 12 Manifestif p 7 133 Jacques Aub Chanson et politique au Qu bec Montr al Tryptique 1990 p 75 134
146. qu il expose des pr occupations relatives l industrialisation et la distribution des richesses Sheila ch us l vocabulaire axiologique et champs s mantiques autor f rentiels partir de la premi re chanson nous venons de saisir que Loco Locass accorde une place primordiale ses nonciateurs Dans la deuxi me chanson l nonciateur est 5 Cette autre signification trouve aussi un cho dans tu pourras me mettre pied Mais le mien mec o veux tu que je t le mette p 66 I 17 5l Dany Saint Laurent voit en Chafiik dont la m re l crivaine Abla Farhoud est d origine libanaise un t moin voire un reflet de la r alit d mographique du Qu bec contemporain Dany Saint Laurent op cit p 26 27 toujours l il nous le dit lui m me Le vocabulaire axiologique abonde dans cette chanson comme dans Les interminables palabres Me rendent malade p 23 1 1 nous offrant un acc s direct aux tats d me de l nonciateur Ce dernier va jusqu exposer son identit id ologique en divulguant clairement sa position politique Il r v le ainsi qu aux lections Moi j avais vot Bloc p 23 1 4 Un peu plus loin dans le texte il fait une remise en question rh torique de sa perception des choses En r sulte une forme de prise de recul de l nonciateur par rapport lui m me avec C est tu moi qui capote Hyst rique Pour quelques
147. r pouvoir prendre la parole et ainsi faire honneur au crachoir I represent p 114 L 7 qu il prend Notons au passage qu un baiser voire un french comme on le dit au Qu bec est jusqu 67 un certain point un change de salive qui symbolise l adh sion ins parable d esprit esprit Ma bouche s abouche ta bouche Pis t french en fran ais Smack Sache que c est pour mieux t embrasser Manifestif pp 13 15 Remarquons qu ici le mot embrasser est employ la fois au propre et au figur L nonciateur fait la bise en m me temps qu il cherche inclure l nonciataire se le rallier Il s agit d une syllepse de sens Lorsque Loco Locass fait Amour oral son public il vise par son art communiquer dans une sorte de communion bilat rale autant que possible il vise partager ses points de vue proposer ses id es L change des fluides corporels qui survient principalement lors de l acte sexuel est aussi porteur de symbolique La m taphore des oraisons jaculatoires Priap e p 90 1 3 repose sur le lien conceptuel qui associe le partage artistique entre l artiste et son public la relation sexuelle L exemple qui suit exploite cette m taphore qui se d ploie en m me temps qu elle s illustre par sa forme anagrammatique 0 0 m5 53 en 10 Bernard Dupriez Gradu
148. re quel point le pr judice est grave pour Loco Locass qui le d nonce presque comme un crime contre l humanit 8 Pierre Fontanier op cit p 434 32 mile Zola J Accuse Lettre M F lix Faure Pr sident de la R publique L Aurore Paris no 87 jeudi 13 janvier 1898 p 1 ou En ligne http www cahiers naturalistes com jaccuse htm Page consult e le 2 mars 2013 45 Du coup l usage de J accuse tend confondre les nonciateurs De plus parce qu elle est performative elle devient un acte de langage simultan ment endoss par plusieurs instances nonciatrices Lorsqu en spectacle Biz interpr te la chanson d une voix agressive il prononce le j enrage p 85 1 16 seul mot du vers en donnant une dimension encore plus performative aux paroles tant donn que Manifestif regorge de performatifs on assiste une exhibition du proc d En d autres mots la quantit d occurrences frappe ce qui met en vedette le pouvoir concret du langage Voici quelques exemples tir s de d autres chansons du recueil j acte avec jactance p 89 1 3 je d lire lyriquement p 104 L 19 Je jure p 128 1 21 noter qu il y a redoublement de la port e autor f rentielle de ce type discours lorsqu il est chant sur sc ne Comprenons que l imm diatet liant le rappeur aux mots ce moment pr cis amplifie l effet de simultan it caract
149. rent op cit p 14 0 Titre du deuxi me album du groupe La casse du 24 quand la passion parle On croirait que c est la rage elle m me qui parle dans La casse du 24 tellement le ton du texte est explosif par rapport au reste du recueil L nonciateur n y va pas par quatre chemins pour invectiver son interlocuteur qu il traite d s les premi res strophes de la chanson de larve p 83 1 4 de jeunesse de chien 1 16 de p tit criss l 23 de jeunesse chienne 1 28 etc Fontainier nomme impr cation cette figure rh torique o la fureur et la vengeance clatent sans conna tre de frein ni de mesure L ouverture de la chanson se fait dans ces termes J accuse p 83 1 1 r f rant au pamphlet d mile Zola Dans la conclusion de sa l gendaire lettre au pr sident de la r publique Zola crit Ma protestation enflamm e n est que le cri de mon me Quelque cent ans plus tard La casse du 24 est le produit du fiel des Locass qui fuse p 83 1 2 la rem moration de la tournure d vastatrice qu avait prise la manifestation du rassemblement pour l ind pendance nationale de 1968 lors du d fil de la St Jean Baptiste La conduite scandaleuse des meutiers comme des policiers en cet historique lundi de la matraque est qualifi e d atteinte envers La notion d mancipation des nations p 85 1 10 dans la chanson C est di
150. s Le char d assaut Loco Prend la sc ne d assaut p 127 1 1 la m taphore du puissant v hicule militaire installe l id e du mouvement par la mobilit qu offre la machine de guerre Il s agit en l occurrence D une guerre Langagi re p 128 1 16 que les Locass comparent un bon match de boxe p 129 1 4 dans lequel ils joueraient Les coqs p 129 L 5 Le mot coqs peut ici tre interpr ter au sens de la cat gorie de boxe des poids plume La page titre de la chanson offre un visuel Loco Locass sur sc ne comme l attaque voir l annexe VII Chafiik donne l impression qu il allonge une gauche de par sa posture En extrapolant on comprend qu il s agit bien moins ici du poids l ger que du poids de la plume en tant que symbole de l criture L image des coqs s accorde aussi avec la fiert que disent ressentir les locaux p 128 1 18 et p 129 L 6 ni plus ni moins fiers comme des coqs Le chant du coq est commun ment associ l annonce du jour nouveau Le chant des Loco coqs augurerait il lui aussi une r volution un jour nouveau Quoi qu il en soit l nonciateur aguerri plus que Loco Locass reprend la m taphore plus tard 2005 avec son recueil de textes Poids plume qui pr sente sur sa couverture l image d un ring Sur le ring poings lev s munis de gants de boxe pr t au combat un vieillard C est une r appropriation de Un
151. s dire il prend le temps de r p ter parce que la fin sanctifie les moyens Le syntagme J prends la place est formul trois fois dans la chanson Manifestif Pour prendre la place en d autres mots pour se faire entendre r p ter est un bon moyen Pourtant la r p tition n est pas une figure de style souvent utilis e dans Manifestif Au contraire Si un m me mot revient c est g n ralement pour mieux faire ressortir les diff rents sens qu il peut rev tir Prenons par exemple Il se somme de donner aux mots la somme De sa propre donne Langage p 34 1 7 Le nom commun somme succ de au verbe conjugu sommer qui ont tous deux des sens diff rents Le m me mot est r p t mais une nouvelle nuance 130 de signification est apport e Il s agit d une diaphore M me principe dans J te 128 Une chanson du chanteur fran ais Jean Ferrat porte comme titre cette phrase d Aragon Ferrat lui cite clairement l auteur dans une phrase performative qu il r p te quelques reprises Sur Youtube on peut l entendre chanter Je d clare avec Aragon La femme est l avenir de l homme 2 On conna t davantage l expression sous la forme La fin justifie les moyens plus courante 130 Bernard Dupriez op cit p 155 85 parle sans capote Capote pas Priap e p 89 1 12 Peut tre le groupe pense t il que la solution au
152. s les proc d s litt raires Paris ditions 10 18 1984 p 434 110 Titre du deuxi me album du groupe 10 De oraisons jaculatoires pri res courtes et ferventes Oraison peut galement signifier un discours prononc en public Le grand Robert de la langue fran aise 68 Est litt ralement sugg r par la disposition des lettres que le liquide spermatique gicle J immigre projection de soi en giclant en claboussant comme comparatif j acte agir ou jouer un r le avec jactance attitude d une personne qui manifeste la haute opinion qu elle a d elle m me donc avec assurance autre autor f rence Comme on peut le constater ces occurrences et bien d autres montrent que les fluides corporels participent l autor f rence dans Manifestif En fin de compte l eau sous sa forme dynamique connote trois principales id es dans Manifestif la cr ation un potentiel nerg tique puis la communication Ces trois propri t s sont mises contribution pour donner au symbole de l eau une port e fortement autor f rentielle Apr s le c t positif de l eau voyons que son c t n gatif est aussi exploit dans Manifestif L eau stagnante est propice la prolif ration de bact ries nuisibles En phase avec ce donn c est toujours dans un sens p joratif que Loco Locass utilise 2 Priap e p 91 L 1 69 l image de l eau immobile Par exemple dans J en ai
153. s la chanson Manifestif le vers C est ma force phosphorescente qui m fait signe p 15 1 21 a une forte charge autor f rentielle Tous les sens qu il peut prendre vont dans la m me direction On peut comprendre ce texte est la mat rialisation de ma force phosphorescente car elle permet de briller l instar du chanteur sur la s ne et elle me fait signe donc m interpelle On peut aussi comprendre et l l autor f rence est son paroxysme que la force phosphorescente de phosphorer travailler intellectuellement Le grand Robert de la langue 87 fran aise de l crivain r side en ce qu il parvient se mettre en mots se faire signe Ailleurs dans la m me chanson j milite Pour une po sie elliptique O bruit le silence sic Manifestif p 15 L 13 heurte certes le sens litt ral L autor f rence agit ici en deux temps Premi rement j milite a ici une port e performative puisque l instrument de lib ration par excellence selon Loco Locass c est la langue Deuxi mement le qualificatif elliptique qui voque la figure de l ellipse comme nous l avons dit plus haut en m me temps qu un perp tuel retour sur soi selon la figure physique d finit une po sie dont il est partie int grante Pour ce qui est des mots cr s par Loco Locass on se doute qu ils auront galement une port e autor f rentielle Le texte parle de
154. s partout dans le monde des fins commerciales ou autres sur support microforme papier lectronique et ou autres formats L auteur conserve la propri t du droit d auteur et des droits moraux qui protege cette th se Ni la th se ni des extraits substantiels de celle ci ne doivent tre imprim s ou autrement reproduits sans son autorisation In compliance with the Canadian Privacy Act some supporting forms may have been removed from this thesis While these forms may be included in the document page count their removal does not represent any loss of content from the thesis Conform ment la loi canadienne sur la protection de la vie priv e quelques formulaires secondaires ont t enlev s de cette th se Bien que ces formulaires aient inclus dans la pagination il n y aura aucun contenu manquant Composition du jury L autor f rence dans le recueil Manifestif de Loco Locass Jacynthe Par Ce m moire a t valu par un jury compos des personnes suivantes Isabelle Boisclair directrice de recherche D partement des lettres et communications Facult des lettres et sciences humaines Christiane Lahaie examinatrice D partement des lettres et communications Facult des lettres et sciences humaines Universit de Sherbrooke Patricia Godbout examinatrice D partement des lettres et communications Facult des lettres et sciences humaines Universit de Sherbrooke Il
155. seessoreosernessoserens RE DO Le ma tre et son l ve nid eee lite 100 L nonciataire qui contribue ce que a sonne esessssssesessseseserseseseesuessssssesesosesessesree 101 Un nonciataire qui doit se sentir attach au texte 102 L nonciataire qui a des comptes rendre ss 103 L nonciataire sous la forme d am romain serres 105 L autre nonciataire dans L empire du pire en pire sn 105 L nonciataire rh torique usant 106 Un nonciataire qui prend trop de place sen 108 L nonciataire et sa contribution dans l oeuvre e ssssesssenseosesserosesrossoeoseressessesesereoosseoensese 112 D nbneer ntm S E retenir 113 De l empathie pour ses semblables 114 S jouer d P nonciataire sisssscssisssssocisrssssossseessvaneseonessrssissssssisssovevossiosassassosks odredsi esoivsssi 116 L nonciataire DrOVOQU iranien ndeniitnsnisiaduns 116 Lucien Bouchard nonciataire d une missive interm de s ososesesesssoscssescreseesesees 117 L nonciatair CL Assabt in usssnensssesenannlesttetasnenvinnadeniesebueuedes 118 COCHON nn nn Net ne de 118 VE CONCLUSION ra an teen ennemie dinars sn 120 ANNEXE in dan ent E U eede aaia n ne EN ht 131 ANNEXE nanas E E EEEE 132 ANNEXE TEn ist ee net tn ere R T Rens enii 133 ANNEXE IV nn nid din nent ss ste dernier re NO dei tnr 134 ANNEXE Viennent e ee E EEE E oia r TEE en fine ne ei queen 135 ANN
156. si beaucoup dire sur lui Dans le second chapitre nous traiterons de l nonc Si le plan de l nonciation est celui du dire le plan de l nonc est pour sa part celui du dit Sur ce plan la r flexivit se rep re aux r f rences faites tout ce qui s apparente au textuel c est ni plus ni moins lorsque l criture parle d elle m me Dans Manifestif c est constamment le cas Le texte fait monter sur les planches l appareil langagier le met sous les projecteurs Dans ce chapitre nous proposons d tudier les figures du langage qui contribuent r v ler la pragmatique du discours Ainsi non seulement rel verons nous tous les moyens stylistiques mis profit pour signifier l uvre et ses composants mais nous rel verons les proc d s nomm s par le texte Nous serons m me de dresser un constat l autor f rence sur le plan de l nonc s apparente un m talangage Catherine Kerbrat Orecchioni L nonciation de la subjectivit dans le langage Paris Armand Colin 1980 p 151 30 Janet Paterson op cit p 19 17 Dans le troisi me chapitre nous nous pencherons sur les nonciataires eux aussi construits dans et par le discours Le r cepteur dans Manifestif devrait tre une autre figure r fl chissante de l ensemble de l uvre Les tu les vous et autres formes associ es viendraient souligner l importance du propos autor f rentiel locassien
157. t riser l artiste et ses diverses d marches C est effectivement ce qui ressort des deux pr c dents exemples L inscription dans le texte du nom de l nonciateur rappeur peut ainsi avoir plusieurs fonctions dont on comprend d j qu elles sont toutes plus ou moins directement autor f rentielles Dans Isabeille et Biz toute la charge autor f rentielle du choix du pseudonyme Biz se r v le Biz peut tre le diminutif de bizarre le son de l abeille ou encore la bise froid mordant typique des hivers qu b cois Une autre hypoth se celle l redevable Dany Saint Laurent est encore sugg r e dans Isabeille et Biz qui ferait de Biz la bise renvoyant baiser dans tous les sens qu on lui connait incluant celui du rapport sexuel Cette derni re hypoth se nous int resse particuli rement parce que pour Loco Locass le rap constitue une mani re de faire l Amour orailement La charge sexuelle ainsi attribu e l art se refl terait dans l adjonction Biz bise En effet l association voquerait la relation amoureuse selon laquelle l auteur et son art se construisent mutuellement en se d finissant continuellement l un dans l image de l autre et inversement L nonciateur est passionn d amour dans ce texte mais dans La casse du 24 c est une autre passion charg e de r volte qui se fait entendre 7 Dany Saint Lau
158. t parfois contrastants d une chanson l autre suivant une logique synchronis e celle du recueil 95 D s que des indices nous permettent de d celer la pr sence d un nonciataire il y a mati re tenter d identifier cet nonciataire Mais quoi reconna t on un nonciataire dans un texte On le rep re bien s r dans la deuxi me personne tu ou vous ainsi qu aux formes pronominales associ es te votre etc Le mode imp ratif agit de la m me mani re c est l que se situe l interlocuteur anticip dont parle Esquenazi La pr face de Manifestif pr c de une photo voir l annexe VIII montrant des spectateurs apparemment en attente qu un spectacle commence D entr e de jeu on assiste donc une repr sentation de l nonciataire Les visages des spectateurs dans le public sont identifiables comme pour signifier que oui Loco Locass s adresse un groupe en g n ral mais qu il s adresse galement aux individus dudit groupe dans leur unicit De plus une fl che dessin e pointe en direction de la photo pour souligner cette image du public en soi et reconfirmer l importance de la place faite l nonciataire la fin du recueil une photo voir l annexe IX donne voir 139 un public heureux applaudissant la fin d un spectacle Ce sont ces photographies qui les premi res nous mettent sur la piste de la place qu occupe l nonciata
159. te Il y en a plusieurs et toutes interpellent leur mani re les lecteurs lectrices du monde r el Le verbe interpeller est particuli rement appropri dans ce cas ci En effet nous verrons que bien souvent l nonciateur apostrophe directement l nonciataire pour le questionner Une chose est certaine et comme nous venons de le voir c est dit mot pour mot dans le recueil il en va de susciter un cho Le pr sent chapitre vise d montrer qu il y a dans Manifestif exhibition du troisi me acteur du contexte d nonciation l nonciataire Dans Manifestif le r cepteur anticip public cible est invit tour tour s identifier ou au contraire se d marquer des nonciataires du texte dans une dynamique volutive qui encourage le lecteur s autod finir et pr ciser son identit Nous l avons vu aux chapitres pr c dents nous croyons que c est l autor f rence qui gouverne les principales articulations de Manifestif Nous nous proposons donc dans ce dernier chapitre de d couvrir de faire ressortir et d analyser les nonciataires rep rables dans les chansons du recueil de Loco Locass puisqu ils sont autant de figures r fl chissantes de l ensemble de l uvre Nous reprendrons la structure utilis e au premier chapitre pour tudier dans l ordre chanson par chanson les nonciataires visibles Le choix de cette organisation tient du fait que les nonciataires son
160. thropologie Deno l Gonthier 1969 p 20 128 un dans leurs pratiques ordinaires sont les sujets d actes de construction du monde social qui expriment leur propre position en son sein Tant t l nonciateur revendique la reconnaissance de son identit tant t il se remet en question en avouant son incertitude quand par exemple vient le temps de se situer parmi d autres membres de sa communaut les boomers la soci t de consommation l industrie musicale les m dias etc L histoire des canadiens fran ais nous apprend que ces derniers se sont longtemps r fugi s dans l ethnocentrisme afin de contrer l assimilation Cela aurait eu pour effet de g n rer des tres accultur s sur la d fensive Il faut rompre avec ce pass cesser cette attitude r trograde dit l nonciateur dans Manifestif Puis le c t festif de la manifestation s impose la survivance d une langue est avant tout la proclamation d un amour Et r ciproquement pourrait on dire en croire les paroles de la derni re chanson du recueil chaud les mots lasso T embrassent et t enlacent toi public p 127 1 3 Aimer la langue jouer avec elle f ter avec elle c est la triple incitation que supportent les mots dans Manifestif Pour Marina Yaguello Jouer avec le langage c est violer les r gles la norme c est tirer parti de ses points faibles de l ambigu t de l homophonie Mais
161. tre casse mis pour casque pour aller avec le mot casse qui suit ou encore cave D autre part la conjonction de coordination ou marque qu un choix est offert l nonciataire Il doit prendre position soit se casser se retirer de la sc ne soit participer l uvre et accepter de jouer avec l nonciateur Dans Batlam Slam Lame de fond qui fond sur toi Boom p 67 1 4 l nonciateur entend fondre sur l nonciataire au sens de foncer d ailleurs la consonne s qui succ de au mot fond laisse entendre qui fonce sur toi Les mots Batlam Slam sonnent comme des onomatop es voquant 148 Ayant ici la valeur de Ti Casque en langage vernaculaire 110 par exemple celles qui surgissaient en plein cran lors des bagarres dans la s rie t l vis e Batman Par accumulation des proc d s stylistiques une tension s installe entre l nonciateur et l nonciataire Un combat en direct a m me lieu entre les deux instances gr ce la m taphore J t allonge une gauche une droite J ach ve cette chicane te d boule ma finale dans les dents Boom p 69 1 18 C est l insinuation d une pr sence physique de l nonciataire dans l uvre qui rend possible cet effet Dans L j te tiens Boom p 69 1 11 le fils a rattrap le p re Le contact s entend il y a co
162. u trop plein motif exprim par le locuteur dans ces lignes Finalement le calligramme de la troisi me page nous l avons reproduit la page 66 de ce m moire donne voir un jet qui s tend en une sorte de coul e liquide voquant le sperme expuls de la verve Turgescente Dure gorg e d sens p 89 1 15 de l nonciateur Quoi qu il en soit dans Priap e la p tite vite la disposition des mots participe la caract risation de l nonciateur qui s y trouve refl t Il se pourrait que ce soit encore pour exprimer cette id e d omnipr sence de l nonciateur toutes les strates de l uvre que le patronyme de S bastien Ricard l auteur de cette chanson se trouve camoufl dans j ris car j me sens comme Icare c est bizarre j entends comme mon p re p 90 I 11 je souligne L oreille attentive entend effectivement le p re de l auteur ou du moins son nom de famille Ricard 47 M diatribes quand la parodie autod rision introduit une prise de position s rieusement assum e par l nonciateur Dans Manifestif le manifeste passe par le festif comme le mot valise le sous entend Or notre hypoth se selon laquelle le manifeste de Loco Locass en d autres mots le programme locassien s attaque la question identitaire des Qu b cois doit trouver son compte dans le penchant ludique de Manifestif Le philosophe am ricain Richard Shusterman
163. ue nous retrouvions sur la couverture du recueil Sur la photo un homme crit c t d un journal il s agit du Devoir et d un paquet de films polaroid L image mise en abyme pr sente une figure nonciatrice qui se r v le du coup on apprend certains d tails de son identit et ce sur plusieurs plans Par exemple il s agit d un homme et bien qu il soit l int rieur il porte une tuque on attribue d embl e son style vestimentaire la culture hip hop L homme accomplit un travail d criture inspir de l actualit celle ci tant sugg r e par le journal Il s int resse la politique ce qui induit un statut d intellectuel Il se situe finalement dans une poque et un lieu historique gr ce au titre de la une du quotidien Trudeau s teint Voici pour l image qui introduit le texte Les premi res paroles de la chanson proprement dite Mon rap p 13 1 1 inscrivent d s le d but la pr sence de l nonciateur gr ce au d terminant possessif Suivent des phrases minemment expressives D entre elles d gageons j m explique j milite Pour une po sie elliptique p 15 1 13 Le pronom l Notons au passage que le choix d utiliser le polaroid plut t qu un appareil num rique pourtant commun en 2000 connote une id e d instantan it qui donne mati re r flexion 2 Dans un contexte qu b cois la tuque signifie l identit qu
164. un auteur C est probablement la mise en sc ne de l uvre la plus charg e qui soit du fait qu elle permette la copr sence de l illustration et de l nonciation des principes po tiques On anticipe d s lors que la chanson intitul e Art po tik sera riche en autor f rences de l nonc En effet le titre pr pare le lecteur recevoir un art po tique mais pas n importe lequel crit avec un k Po tique sugg re que l emphase sera mise sur la phon tique V ritable gyrophare la lettre inconvenante attire l attention sur le mot qu elle termine Par rapport po tique bien orthographi l erreur peut relever de la transgression de la r invention de l adaptation ou encore d une r appropriation du concept Notons que po tik voque la racine grecque du mot poi tik qui renvoie la facult de faire de cr er Tout cela nous porte croire qu ici la chanson se d finit jusque dans son nom Nommer est certes l acte de construction identitaire le plus significatif La corr lation langue identit est toujours en filigrane Les paroles Je veux tre fleur de mot Art p 103 1 12 de cette chanson reprennent aussi le lien L expression fleur de peau est ici travestie pour s enrichir d un sens nouveau La commutation de mot mis pour peau laisse croire que la peau du po te donc le mat riau dont il est constitu son essence c
165. urrici re et cr atrice de leau Il faut maintenant convoquer la puissance et la force de l eau Si elle peut tre anim e d un 70 courant vigoureux elle peut par l se montrer destructrice mener la perdition Le plus souvent c est la situation de la langue en tant qu l ment de base de la culture au Qu bec qui est ainsi malmen e par la vague dans Manifestif En effet Loco Locass d plore le tangage d une langue qui ne s arrime rien Langage toi p 34 L 15 De plus l extrait Peuple la mer la merci des courants Dont la langue vau l eau Navigue entre deux eaux Dont la culture d rive au large Malamalangue p 49 1 1 exprime la d solante d sagr gation d un peuple qui devien t goutte D eau dans Pamer Am rique Langage toi p 32 L 4 Ailleurs encore Loco Locass prend partie l image de la mer pour parler de la d g n rescence de la langue au Qu bec Par exemple cette m taphore L insidieuse rosion du langage et ses suites me terrifient Je Suis l homme calcaire en beau calvaire Devant les assauts s culaires d une mer qui me sape les pieds Malamalangue p 50 1 12 Les occurrences sont nombreuses si bien que la symbolique antinomique de l eau appara t dans toute sa force M me son pouvoir de dilution est invoqu j veux pas qu mon peuple se fasse Dissoudre dans la saumure Manifestif p 14 1 2 Cett
166. uvre sur elle m me Pour Janet Paterson l autorepr sentation est un processus selon lequel un texte se repr sente Toujours d apr s Paterson une des caract ristiques fondamentales de l autorepr sentation c est qu elle est syst mique Bien que Paterson ait surtout th oris l autorepr sentation dans la fiction narrative nous croyons que ses notions sont pertinentes notre probl matique qui rel ve d un domaine somme toute contigu celui du texte rap Nous reprendrons en outre notre compte l id e voulant que l autorepr sentation soit rJ gie par une surd termination maximale selon laquelle chaque paradigme est multiplement motiv et multiplement Jean Ricardou Nouveaux Probl mes du roman Paris Seuil 1978 p 104 Lucien Dallenbach Le r cit sp culaire Paris Seuil 1977 p 65 7 Janet Paterson Moments postmodernes dans le roman qu b cois Ottawa Presses de l Universit d Ottawa 1993 p 25 8 l autorepr sentation d pend non seulement d une certaine redondance mais galement d une corr lation entre plusieurs niveaux textuels Ibid p 34 Plusieurs chansons rap arborent une dynamique narrative bien que cela ne soit pas une pr rogative du genre n cessaire En d autres mots l autor f rence motive autant le tout que les parties de l uvre La pulsion r flexive du texte na t du syst me d autor f rences lui m me La th oricie
167. vieux de 37 par Henri Julien en 1916 symbole de l esprit r volutionnaire du Canadien fran ais des patriotes 56 jamais en cette fin de recueil brandit Comme une unique p e pour Communiquer p 129 1 14 Comme quoi Manifestif n est que l inauguration du combat Conclusion Tant t minemment distinctes tant t similaires les instances nonciatives se c toient s entrem lent se jouent l une de l autre et ne cessent d attirer l attention sur elles m mes L nonciateur se d double sous nos yeux en recourant des identit s g n riques il s apparente au rappeur et au po te ainsi qu des figures religieuses divines ou mythologiques L omnipr sence d un je en pleine d finition de lui m me nourrit le paradigme identitaire Le vocabulaire axiologique et les champs s mantiques autor f rentiels amplifient le narcissisme du texte Le rythme en tant qu empreinte de l nonciateur est rehauss par l image de l cho qui se perp tue en v ritable duplicateur de l instance nonciatrice Le travestissement et le pastiche en tant que jeux identitaires sont galement mis profit dans Manifestif L nonciateur prend le soin d accentuer le jeu de r le pour mieux faire valoir la contribution du discours la construction identitaire Les sacres nous ont ouvert les yeux sur une r alit linguistique propre au peuple qu b cois par cons quent directeme

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