Pour télécharger l`intervention de Patrick Lagadec
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1. Les ann es 1960 1980 ont t celles des certitudes il suffit d tre conforme aux proc dures et les choses sont ainsi limit es sous contr le Les ann es 1980 2000 ont t celles de la complexit l incertitude est pr sente mais heureusement la ma trise de la complexit avec tous les instruments nous permet de maintenir une stabilit fondamentale Aujourd hui nous sommes dans une logique proche de celle du monde financier la stabilit fait d sormais place quelque chose de tr s fluide et touch par l incertitude non simplement la marge mais v ritablement au c ur Cela bouscule donc nos logiques habituelles Quels branlements cela donne t il sur le terrain Nous avions connu auparavant des alertes tr s s rieuses avec cet op rateur qui dit mais je n y comprends plus rien et ce haut responsable qui r plique nous sommes comme un couple d aveugles qui titube et tourne en rond On retrouve peu pr s la m me chose Fukushima Il n y a 1 Intervention P Lagadec Assises Nationales des Risques Technologiques 2012 plus de mode d emploi on ne sait plus Comme nous le disions tout l heure devons nous nous pr parer des v nements en dehors des cadres Ou bien devons nous ajuster les cadres pour qu ils pr voient ce type d v nements La difficult est la suivante si l on est strat giquement d pass quel que soit l h ro sme tactique il y aura un2. INTERVENTION DE PATRICK LAGADEC DIRECTEUR DE RECHERCHE L COLE POLYTECHNIQUE LORS DES ASSISES NATIONALES DES RISQUES TECHNOLOGIQUES 2012 Incertitude nouvelle donne nouvelles cartes Patrick Lagadec a sign aux ditions Preventique Du risque majeur aux m gachocs L expression risque majeur marquait d j les esprits mais nous passons aujourd hui dans une autre dimension ce qui nous menace s apparente plut t des m gachocs Tout l heure j voquais l id e de la cl et cette cl avait disparu Mais quand la cl dispara t c est qu elle existe Or ce dont vous allez nous entretenir c est quand il n y a pas de cl Autrement dit vous allez nous parler de l impensable donc de l impens et des r volutions conceptuelles qui sont n cessaires pour qu aujourd hui nous puissions peut tre imaginer des v nements comme ceux qui se sont d roul s r cemment Fukushima Patrick LAGADEC Il y a deux ans j avais mis mon intervention sous le mot de la surprise Cette ann e je la mettrai sous celui des grandes turbulences dans lesquelles nous sommes J entends bien que chacun fait tr s bien son travail et que c est d j tr s difficile Je vais n anmoins creuser la question suivante avons nous bien pris en compte le niveau de complexit de turbulences de volatilit dans lequel nous sommes actuellement Nous avons pu observer des mutations entre trois sch mas
3. clone ce n tait pas j vacue ils reviennent c est fini je paie C tait tout fait autre chose destruction des r seaux vitaux en trois heures 1 5 million de personnes vacu es impossibilit de revenir Thad Allen finira par dire ceci est comme une arme de destruction massive sans dimension criminelle Cela am ne requalifier l ensemble de la situation Ces situations donnent imm diatement une irruption de complexit avec des amas d organisations qui arrivent de tous les c t s On a un d ficit de capacit s intellectuelles pour comprendre ces univers et je crains que souvent on compense la non compr hension par la multiplication des organismes de coordination chose inutile pour ces cas d esp ce J avais propos et je suis de plus en plus convaincu que c est n cessaire de mettre en place des petits groupes en recul qui aussi bien en pr vention qu en r action soient capables de s interroger sur les situations et donc de faire des points strat giques distance au lieu d avoir imm diatement des r ponses toutes faites qui ne collent pas et qu il faut contrecarrer au bout de 48 heures Il s agit de d velopper une capacit la fois re caract riser les v nements imm diatement voir quelles sont les cartes d acteurs 3 Intervention P Lagadec Assises Nationales des Risques Technologiques 2012 impliqu es identifier clairement les deux gaffes majeures ne pas imm
4. diatement commettre sur le mode ce n est pas grave cela dit je n avais aucune information Ensuite et enfin il nous faut aujourd hui des id es pour injecter de la confiance pour injecter des dynamiques qui ne soient pas des cercles vicieux mais qui permettent au contraire de redonner du sens et de l nergie dans un milieu chaotique Il ne faut pas oublier qu on n aura plus jamais l ensemble de la carte avec l ensemble des r ponses Alors quelle pr paration devons nous avoir pour domestiquer les incertitudes Nous avons besoin de grandes comp tences encore plus qu auparavant puisque vu cette turbulence si on laisse partir les choses a peut aller vraiment tr s tr s loin Je crois que pour naviguer dans l inconnu ce qui va tre notre cas pour viter d tre t tanis d s que l on n est plus dans les r gles du jeu normal le probl me n est pas de pr voir l impr visible mais de s entra ner lui faire face L important n est pas d avoir tous les outils pour ne pas tre surpris mais de s entra ner tre surpris sur feuille blanche L important n est pas d avoir r ponse tout mais d tre capable de travailler avec des gens que l on ne conna t pas sur un sujet que l on ne conna t pas pour tre cr atif avec eux dans l inconnu Et cela est diff rent de nos logiques d exercice qui se limitent souvent v rifier que les quipes en place ont bien les r ponses en t t
5. e et qui restent n cessaires pour tout ce qui rel ve des difficult s bien r pertori es Il est vraiment incontournable de travailler en plus pas la place mais en plus une capacit d inventivit avec d autres sur des situations qui sont de type feuille blanche Il y a quelques mois nous avons organis avec l Acad mie de l Air et de l Espace un colloque sur la surprise dans le cockpit C tait tr s int ressant on marchait un peu sur des ufs parce que la qualit et la s curit a rienne reposent depuis des dizaines d ann es sur le respect de la check list et sur de grandes comp tences relatives la check list Pourtant les gens taient extr mement int ress s car c est sur l id e suivante qu il faudrait se former comment faut il inventer dans ces situations impr vues et nombreuses Je terminerais par quelques petites choses A l heure des m gachocs le grand pi ge est de se cabrer de se replier sur des donjons qui vous donnent toujours la m me doctrine Le micro management a marche court terme mais tous les jours on change et on arrive au final des r organisations d lirantes des r gles de moins en moins comprises par les gens qui sont suppos s les appliquer des bombardements de fiches toutes faites des provocations d vastatrices Et pourtant c est tellement tentant de faire cela S il y a des h morragies il faut savoir les traiter et rapidement On ne reste pas de
6. extures sociales dans lesquels une gestion du risque est n cessaire Quels sont les pi ges Le claquage imm diat Cela ne marche plus Ou bien des logiques de pilotage ont du mal trouver leurs marques ou bien c est le claquage instantan Ou on passe son temps l h pital comme pour le naufrage du Costa Concordia comme disait le Canard Enchain on est rest s au sec pendant le naufrage ou on tombe dans les communications suicidaires instantan ment Quelles sont nos pistes aujourd hui Je crois qu un changement de paradigme va tre n cessaire Nous ne devons plus tre s rs de nous Nous devons regarder il faut le faire mais cela ne suffira plus les statistiques les accumulations d exp riences tirer des le ons de ces exp riences alors nous serons meilleurs en s curit Nous connaissons des discontinuit s des irr gularit s des volatilit s qui vont nous dicter de nouvelles approches de nos territoires Ce n est pas parce que l on a t excellent nageur qu on sait faire de la plong e sous marine en situation compliqu e Nous sommes l tr s loign s de nos cultures habituelles dans lesquelles il y a un terrain bien stable et bien segment et pour lequel il y a des disciplines qui en s ajoutant permettent d arriver optimum L on joue autre chose quelque chose de chaotique et de tr s volatile J ajoute deux petits l ments concernant Thad Allen Ce n tait pas un cy
7. probl me Tout d un coup on d couvre que c est de la d fense de la vuln rabilit en profondeur Au regard de l analyse de ce rapport il convient de s interroger sur les racines de fond ce que l on ne fait pas forc ment chaque fois que l on fait une tude de s curit Les dynamiques de communication explosent aujourd hui si vous n tes pas content vous prenez une photo vous l envoyez sur Internet En hyper local instantan mondial Si les autorit s prennent 4 heures 10 heures 3 jours pour faire un bilan officiel alors on observe une comp tition comme celle que l on a vue sur Marcoule J ai essay l poque de suivre le nombre de tweeters et j tais compl tement d pass par les v nements Ils ont commenc 300 un quart d heure apr s il y avait 1 000 tweets On pouvait quand m me y lire ne perdez pas votre temps il y a deux sites internet qui ne fonctionnent plus ceux de la pr fecture et du CEA qui ont crash dans l affaire Puis on peut s interroger sur la confiance dans les outils mis en place si la situation se d t riore O va t on Comment va t on Et on doit faire avec des ovnis aujourd hui vous avez entendu parler de ce grand blackout en Inde Quelqu un me disait y a peut tre des choses que l on fait faire t l distance et sur lesquelles on n a pas forc ment la carte Tant que c est pour savoir comment on r pare sa machine laver pa
8. rce que le call center est d localis ce n est pas tr s engageant Mais s il y a des l ments fondamentaux de notre s curit qui ont t d localis s dans un pays dont on dit qu il y a des groupes lectrog nes sympathiques o en sommes nous Comment sont ils pris en compte Il y aussi des gens qui ne jouent pas le jeu Tout tait bien clair pourtant tout le monde devrait comprendre qu on ne va pas l que c est trop dangereux Mais tout d un coup on joue avec des gens qui sont pr ts non pas prot ger leur vie mais la sacrifier comme tant la premi re arme d intervention Quelque part on voit aujourd hui des d crochages o tout ce qui tait absolument s r s est renvers ou ce qui tait dans l angle mort et tenait bien ne tient plus On ne sait plus comment on fait Alors si en m me temps on observe une dissolution du c ur de m tier li la gestion des risques si on observe que des s curit s qu on devait tenir n ont pas t tenues o va t on Si en plus il y a un peu de provocation rappelons nous ce qui a t dit sur le cas Three Mile Island o 80 des affaires taient des probl mes de dimension humaine et d organisation si on 2 Intervention P Lagadec Assises Nationales des Risques Technologiques 2012 observe un d chirement des textures cela pose un norme probl me non seulement en termes techniques mais aussi en termes de tenue des syst mes des t
9. repose sur une capacit de recul qu on a travaill e avant en entra nant des groupes r fl chir en situation de recul 360 et surtout en posture d inventivit il ne s agit pas de faire une th se sur le sujet Si on n a pas finalement pr par les gens inventer nous aurons beaucoup de mal travailler dans ces univers non stabilis s Puisque l incertitude est bien le th me aujourd hui je conclurais en disant qu il faut maintenir une rigueur absolue sur la pr servation des comp tences c ur de m tier relatives la gestion des risques d velopper d une mani re extraordinairement imaginative et confiante une capacit piloter dans l inconnu et de fa on participative plut t que dans quelque bunker particulier Philippe LEFAIT En vous coutant je me disais de deux choses l une ou on est capable d acc der aux m ta connaissances dont parlait l amiral am ricain tout l heure ou on demande Bruce Willis Clint Eastwood ou G rard Depardieu dans Ob lix d intervenir Patrick LAGADEC Comme disait Karl Jaspers on attend le Proph te et c est alors le F hrer qui arrive Nous avons int r t vraiment nous mettre au travail 5 Intervention P Lagadec Assises Nationales des Risques Technologiques 2012
10. vant en se disant s on avait de l eau ce ne serait pas mal W fait re cartographier parce que sur tous les sujets que l on va voir d sormais on n aura plus la carte cela sortira des cartes a ne sera plus soit du technologique soit du naturel soit du social Cela sera imm diatement extraordinairement compliqu D tecter mobiliser intervenir cela ne 4 Intervention P Lagadec Assises Nationales des Risques Technologiques 2012 concerne pas uniquement les signaux faibles mais aussi les signaux aberrants Devant un signal faible vous mettez un amplificateur cela donne un vrai signal vous le comprenez devant un signal aberrant si vous ne changez pas le paradigme vous ne comprendrez rien du tout Nous n avons pas toutes les r ponses mais nous pouvons et devons au moins tracer des trajectoires Tracer pointer planter des rep res auxquels on peut se raccrocher et ventuellement corriger Cela ne va pas se faire tout seul Dans des univers extr mement complexes comme les soci t s d aujourd hui o tout est la fois hyper local et international il va falloir s appuyer sur l nergie des acteurs pour tre capable de trouver la fois de l intelligence et de la capacit d action C est tr s tr s loin de nos logiques hi rarchiques C est tr s tr s loin de l id e selon laquelle si c est grave alors on concentre tout Une capacit de r flexion j en ai parl est n cessaire Elle
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