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1. 2 2 1 L ge La majorit de nos interlocuteurs esti ment que le recours au vid o t moi gnage doit faire l objet d une valuation au cas par cas Il semble que d exp rience la plupart des magistrats du Par quet et des juges d instruction charg s de diriger les affaires de faits de m urs impliquant un mineur vitent d entendre l enfant et par cons quent ne deman dent pas le vid o t moignage en des sous d un certain ge De mani re g n rale les intervenants judiciaires toutes professions confon dues pr conisent de recourir au vid o t moignage pour des enfants de quatre quatorze ans Toutefois ils nous a t pr cis que chaque cas reste sp cifique et demande par cons quent d tre appr ci de mani re individuelle Ajoutons encore que autour de cette fourchette d ge dans laquelle les enfants concern s seraient apparemment enten dus de mani re audio visuelle il nous a aussi t pr cis lors de nos entrevues que d autres facteurs pouvaient venir faire exception cette pratique En ef fet il semble que le retard mental l tat psychique ainsi que les capacit s de ver balisation du mineur pourraient pousser les magistrats faire entendre de ma ni re audio visuelle des enfants de plus de quatorze ans et de moins de quatre ans 2 2 2 Le handicap Si certains handicaps comme le retard mental l ger peuvent motiver la d ci Le dossier doit tre pr par af
2. Dans un second temps nous analyserons l impact du vid o t moignage chez les enfants pr sum s victimes d abus sexuels en essayant de d terminer au regard de nos interviews quels sont les effets positifs ou n gatifs que cette nou velle technique d entrevue semble appor ter par rapport aux auditions classiques d autrefois Dans un troisi me temps finalement nous d crirons l impact des auditions audio visuelles sur le processus judi ciaire et ses intervenants cet gard nous verrons en quoi ce proc d a per mis d am liorer la qualit des auditions ainsi que la perception des magistrats des avocats et des experts quant au t moignage de ces enfants Par la suite nous aborderons la d licate question de l analyse de cr dibilit de cette entrevue apr s quoi nous aborderons le visionnage de la cassette l audience En dernier lieu nous valuerons l impact de ces auditions vid o film es sur les condamnations et les peines La fr quence d utilisation de cette technique 2 L utilisation du vid o t moignage 2 1 volution du recours au vid o t moignage D apr s nos interlocuteurs il semble qu il y ait effectivement eu une volution en ce qui concerne la fr quence d utilisa tion de cette technique De mani re g n rale nous avons cons tat au travers de nos interviews que le recours au vid o t moignage augmen tait pendant les premi res ann es qui suivaient l am nageme
3. En plus de cette rapidit relative d in tervention la majorit des experts psy chologues et des policiers ont ajout que les auditions vid o film es devai ent tre relativement courtes Enfin une autre de nos interlocutrices nous a pr cis que ces auditions audio visuelles devaient avoir lieu des mo ments ad quats de la journ e afin d tre le plus productives possible 2 3 3 Qualit s professionnelles Tel que prescrit dans la circulaire de juillet 2001 tous nos interlocuteurs nous ont rappel que les enqu teurs charg s de faire des auditions audio visuelles devaient tre imp rativement form s afin de r duire au maximum l impact traumatique potentiel de l entrevue sur l enfant et d obtenir un maximum d in formation non contamin e en posant des questions non suggestives et en respec tant la progressivit des tapes de l en trevue propos es par Yuille Toutefois les policiers ajouteront que si cette m thodologie d entretien constitue un cadre de r f rence elle n est pas tou jours applicable dans la r alit De ma ni re plus sp cifique il appara t que le respect de l enfant lors de ces auditions est primordial pour les experts psycho logues et les policiers Par respect les premiers entendent respect de sa parole comme de son silence tandis que les se conds se r f rent plus la volont ou non de l enfant de r v ler les faits dont il aurait t victime ainsi qu son bie
4. tre plus l aise face ces enfants et se remettre en question dans le but de s am liorer Enfin ajoutons qu en plus des th mes et sous th mes que nous avons choisis de d velopper lors de notre analyse d autres comme l organisation pratique des formations des supervisions ou en core des r seaux ont t soulev s lors de nos interviews Toutefois si ces su jets taient tr s int ressants nous n avons pu les d velopper car ces der niers n avaient pas encore t mis en place au moment o nous avons r a lis notre recherche E JDJ n 231 janvier 2004 La reconnaissance de la parole de l enfant au m me titre que celle des adultes Bibliographie 1 L gislation Loi du 28 d cembre 2000 relative la protection p nale des mineurs M B 17 mars 2001 Circulaire du Ministre de la Justice Wathelet 17 mars 2000 Circulaire minist rielle du 16 juillet 2001 relative l enregistrement audiovisuel de l audition des mineurs victimes ou t moins d infractions C instr crim art 28bis 61 9 1bis 93 96 100 2 Doctrine GAIDON G GOBERT P et RABINEAU Premier bilan de l exp rience M lanie la r union J D J n 32 f vrier 1994 p 5 9 HAESEVOETS Y H L enfant en ques tion De la parole l preuve du doute dans les all gations d abus sexuels Bruxelles De Boeck 2000 HAESEVOETS Y H et REES A Com ment auditionner les enfants Guide did
5. souvent tr s jeunes peuvent parfois tre impressionn s ou g n s par la cam ra de telle sorte qu ils refusent de se faire entendre de mani re audio visuelle ou sont distraits et d concentr s par la pr sence de ce cam scope 4 Impact du vid o t moignage sur le processus judiciaire 4 1 Am lioration de la qualit des auditions De mani re g n rale il ressort de nos entrevues que l enregistrement audio visuel du t moignage de l enfant est un plus par rapport aux auditions classiques En effet le vid o t moignage constitue une volution tant sur le fond gr ce au protocole d entrevue non suggestif et par tapes progressives que par son as pect technique car les policiers ne doivent plus acter la d claration de l en fant au moment de l audition 4 1 1 Optimisation de la relation entre le policier et l enfant En ce qui concerne les policiers il ap para t selon eux que cette technique d audition optimise leur travail au mo Des cassettes relativement ment de l entretien car le fait de pou voir se consacrer enti rement ce que dit l enfant sans devoir prendre note leur permet d tre plus attentif et plus ouvert la parole de ce dernier La rela tion entre les deux protagonistes na t alors plus facilement et l enfant est plus enclin raconter ce dont il aurait t vic time 4 1 2 Retranscription litt rale de l audition Gr ce ce proc d d entrevue la
6. fant est habituellement regard en audience publique Par contre Bruxelles il semble que cette pratique ne soit pas encore entr e dans les m urs de tous les intervenants judi ciaires par cons quent la cassette est relativement peu regard e en audience publique mais en revanche les juges la regardent souvent lors de leur d li b r ou en chambre du conseil huis clos Namur enfin la juge du fond que nous avons rencontr e tait con trairement aux deux autres partisane du visionnage en audience priv e De ce fait lorsque l une des parties de mande voir la cassette lors du pro c s lequel se d roule g n ralement en audience publique l ensemble des parties se retire en chambre du con seil pour la visionner huis clos 4 5 volution des condamnations et des peines Statistiquement parlant les juges du fond ont observ une l g re augmenta tion du nombre de pr venus condam n s pour des faits de m urs l encon tre de mineurs Cependant il semble qu il n y ait pas de v ritable corr lation entre l augmentation du nombre de con damn s et l utilisation du vid o t moi gnage Ce ph nom ne s expliquerait en fait plus simplement par le fait que de puis l affaire Dutroux en 1996 date laquelle les premi res auditions audio visuelles ont t r alis es le nombre de plaintes et par cons quent d af faires aboutissant au tribunal a for JDJ n 231 janvier 2004 t
7. avec la personne qui fait cou ple avec son abuseur pourrait lui faire revivre le traumatisme de l abus Par cons quent il faut toujours tre tr s pru dent avant d entra ner ces enfants dans le processus judiciaire car m me si les techniques d audition se sont am lior es en faveur de l enfant son t moignage reste une preuve douloureuse 3 2 Ecoute active et attentive de l enfant L ensemble des intervenants que nous avons rencontr s dans le cadre de no tre recherche nous ont confi que selon eux un autre impact extr mement JDJ n 231 janvier 2004 y ATTEN TION PETIT OISE BL vA SORTIR Pep positif pour l enfant tait le fait qu il soit entendu et que son t moignage soit pris en consid ration par le syst me judiciaire En outre une psychologue nous a ex pliqu que suite leurs auditions les enfants se sentaient g n ralement mieux et qu il arrivait fr quemment que leurs sympt mes disparaissent ou du moins s att nuent Par ailleurs plusieurs experts ainsi que tous les policiers que nous avons ren contr s ont fortement insist sur le fait que le vid o t moignage permettait l investigateur de concentrer toute son attention et son coute sur l enfant qu ils interrogeaient ce qui selon eux favorisait le contact et facilitait l tablis sement de la relation de confiance in dispensable pour qu un dialogue puisse na tre entre le policier et l enfant 3 3 L aisa
8. f rent se cacher derri re des rapports la conclusion peu tranch e En outre ils se d fen dent en rappelant que la proc dure de validation de la d claration de l enfant est davantage un v rificateur de la v rit qu un d tecteur de mensonge D ailleurs les tudes d montrent que la m thode S V A est pr cise pour iden tifier les histoires vraies comme vraies alors qu elle l est beaucoup moins lors qu il s agit d identifier les histoires faus ses comme fausses 4 4 Visionnage de la cassette l audience Dans l ensemble les cassettes sont de plus en plus regard es par les juges du fond Aussi Namur la juge du fond nous a affirm qu elle et ses assesseurs regardaient toujours la cassette en Chambre du conseil et parfois lors de leur d lib r Nivelles le juge nous confia qu il regardait presque chaque fois la cassette soit en audience la de mande des parties soit lors de son d li b r Bruxelles enfin il semble que la cassette est relativement peu regar d e lors de l audience alors qu elle l est r guli rement lors du d lib r des ju ges Ces premi res constatations nous montrent bien que m me si la cassette n est pas toujours vue l audience il nous est apparu que les juges du fond reconnaissent l importance de la cas sette Ainsi chacun d eux tentait de la regarder aussi souvent que possible et ne se contentait pas simplement de lire les retranscriptions m me si c
9. autour de la validit de cette d claration Aussi pour pallier aux in terpr tations subjectives d autrefois des chercheurs et praticiens d velopp rent une proc dure de validation de la d cla ration de l enfant commun ment appe l e S V A Or l audition audio visuelle devait selon ces derniers permettre d ana lyser la validit du t moignage du mi neur puisque la proc dure S V A pr co nisait que l enfant soit interview de mani re non suggestive et ensuite sur la retranscription int grale de ses dires une analyse de contenu syst matique devait tre effectu e afin d valuer la cr dibilit du discours de la pr sum e vic time Enfin une liste de v rification tait utilis e pour valuer tous les aspects li s au t moignage autre que le contenu lui m me La plupart des magistrats et des experts travaillant dans les arrondissements ju diciaires de Bruxelles et Nivelles nous confi rent que la majorit des policiers r alisaient de tr s bonnes auditions exemptes de suggestibilit et fort respec tueuses de l enfant Namur leurs avis sont moins enthousiastes ce qui s ex plique s rement par le fait que d une part rares taient les policiers form s avant f vrier 2003 et d autre part ceux ci n avaient de toute fa on que peu d exp rience puisqu ils n avaient commenc qu en avril 1999 Par contre les analyses de cr dibilit faites par les experts sont quant elles compl tement
10. confi que la condition essentielle tait la non suggestibilit la seconde tait quant elle diff rente suivant leur m tier Les policiers et les experts psychologues consid raient que le respect de l enfant dans sa pa role comme dans son silence tait tout aussi primordial que l absence de sug gestibilit Les magistrats du parquet estimaient quant eux que c taient plut t les l ments constitutifs de l in fraction qui allaient leur permettre de poursuivre ou non le pr venu alors que les avocats ainsi que la magistra ture assise insistaient plus sur la neu tralit et l objectivit de l intervieweur Par ailleurs les interview s estiment que son usage pr sente plusieurs avan tages tant pour l enfant que pour les intervenants eux m mes En effet conform ment aux objectifs que nous avions d crits lors de notre recense ment des crits les interview s nous ont rappel que ce proc d r duisait le risque de traumatisme secondaire g n ralement engendr par des inter rogatoires successifs une confronta tion directe avec l inculp ou encore une comparution l audience En outre s il est vrai que la majorit des magistrats et des avocats ne regardent pas syst matiquement la cassette vi d o de la d claration de l enfant puis qu ils en ont d j la retranscription in t grale ainsi que le rapport d analyse de cr dibilit de l expert lequel est ac tuellement fort critiqu et
11. en fant et d viter les critiques non v rifia bles en ce qui concerne la qualit de l entrevue la cassette vid o permet comme nous l ont r v l tous les poli JDJ n 231 janvier 2004 peu utilis es ciers ainsi que deux experts de se remettre en question et par l de s am liorer 4 2 Meilleure perception du t moignage de l enfant Tous les magistrats et les avocats s en tendent sur le fait que visionner la cas sette de l enfant leur permet de se faire une opinion plus personnelle quant aux r v lations de ce dernier car ils peuvent mieux cerner le contexte dans lequel l enfant a r v l les faits ainsi que les expressions non verbales de celui ci Cependant il nous est apparu suite nos entrevues que les magistrats et les avocats ne regardent pas syst matique ment ces enregistrements vid os Il s av re en effet que les pratiques des magistrats et des avocats varient non pas en fonction de leur profession de leur sexe ou de leur lieu d exercice mais plu t t suivant leur personnalit En ce qui concerne les magistrats du parquet nous avons pu distinguer deux tendances Tout d abord il y a ceux qui estiment que le visionnage de la cassette n est pas toujours indispensable pour prendre une d cision concernant la poursuite ou non de l affaire en chambre du conseil et le cas ch ant au tribunal correctionnel L un d entre eux argumenta sa position en nous disant que
12. l audience en nous pr ci sant que de toute fa on elles taient toujours vues en Chambre du conseil Parmi les quatre avocats qui ont parti cip notre recherche deux d entre eux nous ont dit qu ils visionnaient presque toujours les d clarations des t moins alors que les deux autres ne le faisaient que rarement Quant aux juges du fond si les raisons qui les motivent visionner les d clara tions de ces enfants sont semblables celles des avocats de leurs coll gues de la magistrature debout et au juge d ins truction il nous est apparu que les cas settes taient en revanche regard es beaucoup plus r guli rement par les ma gistrats du fond D s lors il nous a t confi qu Bruxelles les juges les vi sionnent r guli rement lors de leur d lib r mais peu en audience publique Nivelles par contre les cassettes sont soit diffus es lors des d bats judiciaires si les parties en font la demande soit lors du d lib r des juges Namur enfin les enregistrements des t moignages de ces mineurs sont toujours regard s en chambre du conseil et parfois revus en d lib r 4 3 Outil d analyse de la d claration de l enfant Tr s souvent l all gation de l enfant n est pas corrobor e par d autres l ments de preuve L investigateur doit alors d ci der de poursuivre ou non le dossier sur la seule base de la d claration du mi neur ce qui centre singuli rement la pro bl matique
13. ne pas interroger l enfant 2 3 De la r alisation d une bonne audition Tous les intervenants que nous avons rencontr s nous confirm rent que les auditions vid o film es sont toujours tr s difficiles et tr s d licates r aliser car il s agit de situations impliquant des enfants qui souffrent et qui malgr tout vont tre amen s r v ler des choses qui en plus d tre tr s personnelles et tr s intimes sont en tout cas dans les cas d abus infra familiaux l origine de sentiments de culpabilit empreints JDJ n 231 janvier 2004 d un conflit de loyaut envers leur abuseur qui leur est tr s proche Or s il est vrai qu il n est en aucun cas ais de donner une liste de crit res stricts et d finis qui permettraient de garantir le bon d roulement et la qualit de l en trevue il n en r sulte pas moins que nos interlocuteurs ont pu nous exposer au travers de leurs exp riences quels taient selon eux et compte tenu de leur r le au sein du processus judiciaire les cri t res indispensables au bon d roulement d une audition vid o film e 2 3 1 Les conditions mat rielles Plusieurs intervenants nous ont rappel l importance de r aliser ces auditions dans un local sp cialement am nag tel que pr cis dans la circulaire minist rielle du 16 juillet 2001 2 3 2 Une bonne gestion du temps La plupart de nos interlocuteurs ont in sist sur la n cessit de proc der au v
14. remis en question il n en reste pas moins que tous nous ont r v l que le fait de la visionner leur permettait d appr cier les dires de l enfant de fa on plus person nelle car ils percevaient mieux le con texte dans lequel celui ci avait r v l les faits ainsi que ses expressions non verbales ce qui dans certains cas per mettait aux juges du fond de lever le doute et de condamner le pr venu N anmoins malgr que l opinion g n rale soit plut t positive ce proc d ne repr sente en aucun cas la panac e Effectivement si le recours au vid o t moignage est aujourd hui devenu chose courante dans les trois arrondis sements judiciaires que nous avons tu di s pour les enfants de quatre qua torze ans en moyenne il semble cepen dant que certains probl mes d ordre pra tique financier et thique subsistent Le premier nous renvoie aux retranscrip tions litt rales de l audition Bien que celles ci repr sentent une charge de tra vail consid rable pour les policiers el les sont pourtant indispensables aux ex perts psychologues requis pour analy ser la d claration de l enfant Par con s quent ce travail aussi laborieux soit il a son importance et doit tout prix tre effectu de la mani re la plus com pl te possible en attendant de trouver une m thode valable pour tous La se conde difficult fait r f rence au finan cement de l infrastructure laquelle est essentielle pour pou
15. remises en question et ce dans les trois arrondis sements Cependant si c est Bruxelles que les critiques taient les plus vives force tait de constater qu au d part elles avaient t consid r es comme l ultime espoir vers une meilleure approche de la v rit En effet en plein contexte de tensions socio politiques suite l affaire Dutroux et de surcro t d bord s par l afflux toujours plus important de nou velles affaires de m urs impliquant des mineurs d ge la justice tait en mal de certitudes Par cons quent les magistrats de l arrondissement judiciaire de Bruxel les ont dans un premier temps fort tenu compte des avis des experts Or apr s avoir t confront s des vi dences mat rielles qui venaient contre dire des rapports d expertise le doute JDJ n 231 janvier 2004 Manque de rigueur de cet outil et plus sp cifiquement de la grille d analyse du contenu du t moignage s installa de telle sorte qu aujourd hui nous avons remarqu que les magistrats n accordaient qu une faible importance ces avis d experts Quant aux arrondissements de Nivelles et Namur nous nous sommes aper ues qu aucun moment les magistrats n avaient accord une grande impor tance aux rapports d expertise Ils les ont apparemment toujours consid r s comme des avis int ressants connat tre mais dont ils se m fiaient assez que pour ne pas suivre l avis de l expert que ce soit pour
16. Belgique D s lors nous avons dans un premier temps d fini les diff rents termes de notre intitul de d part Puis nous avons discut de la probl matique qui entou rait le recueil de la parole de l enfant et l utilisation de cette technique d audition particuli re ainsi que de son opportunit Dans un second temps nous avons sou hait conna tre les perceptions des in tervenants judiciaires quant l utilisa tion des auditions audio visuelles et quant leurs impacts sur les enfants qui auraient t abus s sexuellement mais aussi sur le processus judiciaire Pour ce faire nous avons men des inter views dans les arrondissements judiciai res de Bruxelles Nivelles et Namur aupr s de cinq experts psychologues sept policiers dix magistrats et quatre avocats Introduction La victimisation sexuelle des enfants n est pas un ph nom ne sociologique ou historique nouveau Cependant depuis les ann es 80 en Am rique du Nord et depuis les ann es 90 dans les pays oc cidentaux la population s est fortement sensibilis e la question de l abus sexuel Par cons quent un nombre sans cesse croissant d abus a t signal Cette recrudescence a alors provoqu une augmentation du nombre de pour suites des auteurs soup onn s ce qui a eu pour effet d augmenter le nombre de t moignages d enfants pr sum s victi mes ou t moins d abus Or ces mineurs ne b n ficiaient en droit belge d aucun t
17. actique destin aux professionnels sous l gide de l AMADE publi dans le cadre de la campagne de pr vention La violence l gard des enfants mieux vaut pr venir 71998 1999 HAYER J Y et DE BECKER E L en fant victime d abus sexuels et sa famille valuation et traitement Paris PUE 1997 SOMERS P et VANDERMEERSCH D L enregistrement des auditions d en fants victimes d abus sexuels premiers jalons d valuation de l exp rience bruxelloise Rev dr p n crim n 4 Bruxelles 1997 pp 376 404 VAN GIJSEGHEM H L enfant mis nu L all gation d abus sexuel la recher che de la v rit Montr al M ridien 1992 VAN GIJSEGHEM H Plaidoyer en fa veur de l enregistrement vid o du pre mier interrogatoire de la pr sum e vic time d abus sexuels R D P 1995 pp 930 935 YUILLE J C L entrevue de l enfant traduit in L enfant mis nu L all ga tion d abus sexuel la recherche de la v rit s l d VAN GIJSEGHEM H Mon tr al M ridien 1992
18. d cla ration de l enfant peut tre int gralement retranscrite sans qu aucune s lection ou transformation de la parole n ait t ef fectu e ce qui selon plusieurs interve nants am liore consid rablement la qua lit de la preuve Par ailleurs les experts nous ont con fi que cet outil leur tait indispensa ble puisque l analyse de cr dibilit de la parole de l enfant ne pouvait tre ef fectu e que sur base de la retranscrip tion int grale de ses dires 4 1 3 Outil d appr ciation quant la qualit de l entrevue Gr ce la retranscription int grale mais aussi et surtout la cassette vid o les magistrats et les avocats se sentent ras sur s de pouvoir voir comment ces audi tions se sont r ellement d roul es Il appara t selon plusieurs magistrats avo cats et policiers que ce proc d d audi tion est en quelque sorte un moyen qui leur permet de v rifier la qualit du tra vail du policier intervieweur Un autre de nos interlocuteurs ira plus loin en nous disant qu en fin compte la cassette vid o est un moyen de garantie qui se suffit lui m me puisque dans de nombreux cas le simple fait d exister a sensiblement r duit les arguments et les critiques remettant en cause la qualit et l int grit des policiers charg s d in terroger les enfants pr sum s victimes 4 1 4 Outil d autocritique Hormis l avantage de permettre la r dac tion compl te de la d claration de l
19. de toute fa on sa d cision n est pas d finitive parce qu en fin de compte c est au juge du fond d ta blir la v rit judiciaire Puis en accord avec la plupart de ses coll gues il ajouta que visionner ces t moignages prenait trop de temps proportionnellement leur charge de travail totale Ensuite il y a ceux qui estiment que la cassette est une pi ce suppl mentaire au dossier et par cons quent elle doit tre examin e au m me titre que les autres d autant plus que seul le visionnage de l audition permet ces magistrats d avoir une id e plus juste de ce que l enfant a dit de ce qu il a voulu exprimer par sa parole ses gestes et ses attitudes non verbales Finalement il ressort de nos interviews aupr s des magistrats du Parquet et du juge d instruction que de mani re g n rale les cassettes sont relative ment peu utilis es Ainsi nous avons constat que pour l arrondissement judiciaire de Bruxelles l une des deux substituts que nous avons rencontr es visionnait les cassettes r guli rement tandis que sa coll gue ne le faisait que rarement Nivelles le constat fut le m me puisque sur les trois substituts et le juge d instruction que nous avons interrog s seule une substitut et le juge d instruction nous ont confi qu ils les regardaient presque tout le temps Namur le magistrat du parquet que nous avons entendu nous a dit qu il les visionnait le plus souvent possi ble avant
20. du syst me judi ciaire ces enfants sont soumis des auditions successives alors que dans la plupart des cas ils ont d j subi de nombreux interrogatoires de la part de leur entourage Par cons quent victi mes une premi re fois d un crime sur leur corps ces enfants se voient victimiser une seconde fois par l en qu te judiciaire D s lors afin de limiter ce risque de victimisation secondaire nombreux Le t moignage initial sur cassette vid o dispense l enfant d tre maintes fois interrog sont ceux qui plaident pour que le pre mier entretien officiel lors duquel l en fant est amen r v ler ses all gations devant un policier soit enregistr sur cassette vid o Aussi en rendant compte des attitudes et des paroles de l intervieweur et de l enfant le t moi gnage audio visuel permet sans aucun doute de se faire une id e fort r aliste de la mani re dont s est d roul l en tretien et dont les faits ont t d voi l s De plus ce t moignage initial sur cassette vid o dispensera l enfant d tre maintes fois interrog ce qui tel que nous l avons d j pr cis ris querait de rench rir sur la victimisation d j pr sente puisque toutes les ta pes ult rieures disposeraient d un ma t riel de qualit Aussi de nombreux chercheurs nord am ricains et europ ens mais aussi des praticiens appartenant aux domaines psychologique social et juridique ont d ploy de
21. e Tandis que l enfant r v lant un abus inexistant n est pas n cessairement de mauvaise foi et m me si c est le cas sa d marche peut tre dict e par une obligation de loyaut envers un adulte G GAIDON P GOBERT et Y RABINEAU Premier bilan de l exp rience M lanie la r union J D J n 32 f vrier 1994 p 8 D s lors cette tape a t supprim e en Belgique puisque aucune disposition dans notre proc dure judiciaire n exigeait contrairement la proc dure canadienne la r alisation de cette derni re Hormis cette petite adaptation le protocole de Yuille reste la r f rence en mati re d auditions d enfants 13 J C YUILLE op cit 1992 p 83 84 14 Y H HAESEVOETS et A REES Comment auditionner les enfants Guide didactique destin aux professionnels Bruxelles Fondation Roi Baudouin et AMADE 1998 1990 Le troisi me enfin renvoie la n ces sit de collaborer avec les personnes ayant pour mandat de prot ger l enfant et celles ayant pour mandat de punir p nalement le ou les auteurs de l infrac tion d clar e par l enfant lors de l entre vue polici re En outre l enqu teur doit toujours veiller ce que l entrevue se centre davantage sur les faits que sur ses id es pr con ues Ainsi le protocole d entrevue de Yuille se voulant objectif successif progressif semi directif et respectueux permettrait de recueillir la parole de l enfant victime d abus sexuel de la man
22. e formation ou de conf rence soit mieux r glement de telle sorte que l autorisa tion soit accord e par la victime et que dans un second temps si et seulement si la victime a donn son accord la de mande puisse tre appr ci e par le pro cureur g n ral Cette solution nous sem ble en effet plus respectueuse de la vic time et de sa parole 3 Impact du vid o t moignage sur les enfants pr sum s victimes d abus Toutes les personnes que nous avons interview es per oivent cette m thode d audition comme tr s positive pour l en fant pour autant bien s r que cette der ni re soit appliqu e de telle sorte que l enfant soit respect et qu il ne ressorte pas traumatis de cette entrevue poli ci re 3 1 Moins traumatisant Tout d abord il nous a t rappel l una nimit que cette technique d entretien pargnait l enfant de r p ter son t moi gnage tout au long du processus judi ciaire ce qui r duisait son risque de victimisation secondaire ce propos les magistrats du parquet ainsi que les policiers nous ont fait remarquer que l enfant tait parfois r entendu la de mande du magistrat en charge de l in formation ou de l instruction Par ailleurs la majorit de nos interlo cuteurs nous ont galement indiqu que depuis la mise en uvre du vid o t moi gnage les enfants sauf s ils taient as sez g s et qu ils le demandaient avec insistance n taient p
23. e foule de facteurs affectifs et cognitifs inter f rent avec la clart la coh rence et la consistance de leur t moignage De plus l enregistrement audiovisuel de l entrevue permet de r duire consi d rablement le nombre d auditions aux quelles l enfant sera soumis Le deuxi me objectif est quant lui atteint par l utilisation des techniques de l entrevue non directive non suggestive et organis e selon des tapes progressi ves visant s assurer que l enfant li vre sa propre version des faits et non Cinquante deux entretiens pliquer tel quel il n en est rien En fait il ne s agit que d un ensemble de con duites suivre fournissant son utili sateur des points de rep re et quel ques conseils afin de l aider commu niquer plus facilement avec l enfant qu il est amen interroger dans le ca dre d une ventuelle agression sexuelle et de lui permettre de recueillir des in formations de meilleure qualit Toutefois s il est vrai qu actuellement la majorit d entre nous s accorde pour dire que la mise en place du vid o t moignage constitue en soi une volu tion car pour la premi re fois dans notre histoire p nale belge l int r t de l enfant victime de faits de m urs est pris en consid ration tandis que sa parole est cout e de mani re aussi respectueuse qu attentive En outre on reconna t que le vid o t moignage facilite la communication vite les r p tit
24. e la question du vid o t moignage avait d j fait l objet de nombreuses recher ches et qu une s rie d ouvrages et de m moires avaient t publi s ce pro pos sans compter que l enregistrement audiovisuel de l audition des mineurs pr sum s victimes ou t moins d infrac tions caract re sexuel avait fait l ob jet de plusieurs exp riences pilotes dont les premi res ont vu le jour en 1995 et que cette technique fut offi ciellement reconnue par une loi du 28 d cembre 2000 De ce fait il n tait plus selon nous l heure de plaider en faveur du vid o t moignage puisque sa n cessit et son utilit autant pour l enfant que pour la recherche de la v rit taient ce jour largement reconnues par la majorit d en tre nous Par contre il nous semblait opportun de mener une recherche aupr s des intervenants judiciaires concernant leur perception quant l utilisation et la pertinence du vid o t moignage ainsi qu son impact sur les enfants pr su m s victimes d abus et sur la proc dure judiciaire cet effet nous avons d cid de mener des entretiens aupr s de toutes les personnes ayant acc s la cassette vid o de l audition de l enfant et qui participent professionnellement l information l instruction ou au juge ment dans le cadre de dossiers judiciai res impliquant des enfants qui auraient t abus s sexuellement dans les arron dissements judiciaires de Bruxelles Ni
25. e ne l a t dans l arrondissement de Namur qu en 1999 cette premi re constatation relative la croissance et la stabilisation de la demande nous devons tout de m me ajouter une nuance en ce qui concerne l arrondissement judiciaire de Bruxelles car il appara t que ce dernier a chapp l espace de quelques mois notre constat g n ral suite des pressions socio politiques En effet il semble que l affaire Dutroux ait t la cause di recte de la croissance fulgurante du nombre de demandes de vid o t moi gnage alors que cette technique d audi tion n existait que depuis quelques mois Suite cette affaire de p dophilie les magistrats du parquet comme les juges d instruction eurent recours au vid o t moignage de mani re impulsive et sys t matique par peur de passer c t d une autre affaire de m urs qui aurait t source de nouvelles critiques la fois politiques et populaires Cependant bien vite cet enthousiasme pour cette nouvelle technique d audition et son uti lisation excessive va tre remis en ques tion parce que tant les magistrats que les policiers et m me les experts psy chologues vont se rendre compte que la n cessit de ces auditions doit tre valu e au cas par cas car ces entre tiens prennent beaucoup de temps aux enqu teurs et le cas ch ant l expert psychologue si le magistrat requiert sa pr sence lors de l audition vid o film e d auta
26. ement cru Toutefois les juges du fond nous ont tout de m me pr cis que le fait de pouvoir visionner la d claration de l enfant permettait dans certains cas de lever le doute quant la culpabilit du pr venu En ce qui concerne la gravit des pei nes il semble qu elle soit fonction de la personnalit des juges du fond Aussi il nous a t r v l que dans les arron dissements judiciaires de Nivelles et Namur aucun changement n a t ob serv depuis l utilisation du vid o t moignage contrairement Bruxelles o cette gravit se serait sensiblement ac crue depuis 1996 5 Conclusion En guise de conclusion nous allons r capituler les principaux r sultats que nous ont apport s notre recherche Tout d abord nous avons pu consta ter en comparant les r ponses de nos interlocuteurs que celles ci ne va riaient ni en fonction des sexes ni en fonction de leurs ann es d exp rien ces et qu entre les professions et les arrondissements judiciaires les diver gences d opinion taient g n ralement faibles ou ne pouvaient tre g n rali s es l ensemble du corps profession nel ou de l arrondissement Toutefois bien que l ensemble de nos interlocu teurs taient favorables l utilisation de cette technique et trouvaient que sa mise en uvre se d roulait relative ment bien nous avons rep r une dif f rence significative concernant leur conception d une bonne audition Si tous nous ont
27. ers que les expertises pour les quelles ils sont requis par les magistrats du parquet ou les juges d instruction por tent entre autres sur l analyse de cr di bilit du t moignage de l enfant mais que celle ci ne peut tre r alis e que sur base de la retranscription int grale de la d claration de l enfant Par cons quent la pratique du r sum de l audition audio visuelle mise en place depuis peu par certains magistrats au parquet de Nivel les va au devant de nouveaux probl mes mais avec les experts cette fois D s lors certains policiers misent tous leurs espoirs dans la technologie infor matique en esp rant que les progr s futurs leur r duiront leur charge de tra vail d autant plus qu apparemment l tat serait pr t allouer un budget pour ce type de logiciel dit de reconnaissance vocale En fin de compte nous devons nous rendre l vidence que si la retranscrip tion constitue un probl me majeur et en particulier pour les policiers il sem ble que malheureusement ce jour aucune solution favorable tant pour les policiers que pour les experts n a en d finitive t trouv e pour pallier ce tra vail pesant qui paralyse les services de police et donc indirectement le travail de l expert psychologue et du magistrat en charge de l affaire Par ailleurs nous pensons que le fait de chercher et de proposer des solutions cette question des retranscriptions constitue lui seu
28. ertains soutiennent que les juges n accordent pas encore assez d importance au t moi gnage des enfants Quant au visionnage de la cassette lors de l audience nous avons pu dis tinguer au fil de nos entrevues deux types de tendances D un c t il y a les partisans du visionnage en audience publique et de l autre il y a ceux qui pr conisent le visionnage de la cassette l audience mais huis clos Parmi nos interlocuteurs seuls les juges du fond de Bruxelles et Ni velles ainsi qu une substitut du pro cureur du Roi de Bruxelles taient par tisans de la premi re tendance alors que les autres magistrats taient plus pour le huis clos Les premiers consid rent en fait que le huis clos n a pas vraiment lieu d tre La condition essentielle la non suggestibilit requis car la cassette ne relate que le t moignage de l enfant aussi dou loureux soit il ce qui ne porte pas atteinte sa vie priv e Les d fenseurs de l audience priv e par contre estiment que l identit de l en fant qui aurait t abus sexuellement doit tre respect e et prot g e du regard des personnes autres que celles qui sont parties au proc s parce que le t moi gnage de ces enfants touche leur inti mit la plus profonde savoir leur vie sexuelle Concr tement dans l arrondissement de Nivelles les juges acceptent de deman der le huis clos si les parties le deman dent bien que le t moignage de l en
29. i d o t moignage le plus rapidement pos sible apr s le d voilement initial de l en fant en raison du fait que plus le temps passe plus le risque de contamination de son r cit original augmente ce qui rend la t che des experts plus difficile car les inductions mises par l entourage de l enfant peuvent venir biaiser son t moignage et par l rendre l analyse de cr dibilit plus complexe En plus du risque de contamination de la part de l entourage de l enfant une de nos interlocutrices soutient que le re cours l audition vid o film e doit tre d autant plus rapide que l enfant est jeune Parall lement cette n cessit de pro c der rapidement au vid o t moignage de l enfant pr sum victime de faits de m urs plusieurs policiers et avocats nous ont pr cis que cet interrogatoire ne devait pas tre fait pour autant dans la pr cipitation ce qui signifie que le dossier doit tre pr par afin que l inter rogatoire soit le plus complet possible de sorte que l enfant ne doive pas subir une deuxi me audition vid o film e En effet si la r it ration de ce type d audi tion est tr s rare il semble qu elle existe quand m me et notamment dans les cas o de nouveaux l ments seraient apparus alors que la vid o audition de l enfant avait d j eu lieu ou lorsque le policier intervieweur avait omis d abor der certains points avec l enfant lors de sa premi re audition audio visuelle
30. i re la plus exhaustive possi ble sans l influencer Cependant il con vient de rester vigilant car si de prime abord ce protocole pourrait ressembler un mode d emploi qu il suffirait d ap il 15 Y H HAESVOETS op cit 2000 p 111 JDJ n 231 janvier 2004 de vingt six intervenants chacun ayant donc t interroger deux fois pr sent nous allons vous pr senter les r sultats de notre chantillon Pour ce faire nous avons choisi de d crire les perceptions des diff rents interve nants judiciaires autour des principaux th mes et sous th mes abord s lors de nos entrevues Pour chaque point nous avons com par les r ponses de nos interlocuteurs afin d en d gager de mani re g n rale les tendances et divergences selon les professions et ou les arrondissements judiciaires ainsi que selon leur sexe et leurs ann es d exp rience le cas ch ant Ensuite nous avons affin notre analyse en y ajoutant des nuan ces et des pr cisions apport es par les personnes interview es Dans un premier temps nous allons discuter de l utilisation du vid o t moi gnage Ainsi nous allons d abord tenter de r pondre la question de la fr quence du recours cette technique d audition puis nous examinerons les circonstan ces entourant son utilisation les condi tions indispensables la r alisation d une bonne audition et enfin les difficult s inh rentes ce proc d d entrevue
31. in que l interrogatoire soit le plus complet possible sion du magistrat de recourir l enre gistrement audiovisuel d un jeune de seize ou dix sept ans d autres comme l autisme sont comme nous l a racont un policier l origine du refus de pro c der une quelconque audition Par contre il semble que la surdit ne soit pas un probl me car d apr s trois de nos interlocuteurs deux policiers et un magistrat du parquet il appara t que l en tretien s est bien d roul autant pour l en fant que pour les policiers 2 2 4 Le contexte de d voilement Deux magistrats du parquet et une ex pert psychologue nous ont dit qu en plus de tenir compte des caract ristiques pro pres l enfant elles prenaient en compte les circonstances dans lesquelles les r v lations ventuelles avaient t faites avant de prendre la d cision de proc der l enregistrement audiovisuel ou pas Une de ces personnes ira m me jusqu dire que parfois elle h site faire enten dre l enfant de quelque fa on que ce soit lorsque ce dernier a d j t entendu par un nombre important de personnes de son entourage ou d intervenants autres que judiciaires 2 2 5 Les autres l ments de preuve Une expert psychologue soucieuse du bien tre de l enfant nous confia que si les magistrats charg s de l enqu te avaient assez d l ments dans leur dos sier pour poursuivre l affaire l audience il tait pr f rable de
32. ions traumatiques et permet de r colter des informations de meilleure qualit Cependant en d pit de tous ces atouts certaines lacunes subsis tent En effet il existe encore certaines difficult s au niveau de la qualit des interviews de la protection de l image des enfants auditionn s et de l analyse de cr dibilit des dires de ces enfants Aussi tel que nous le propose Haesevoets afin de mieux contr ler l usage du vid o t moignage et d affiner sa technique il faut organi semi directifs ser une valuation continue une ex pertise l gale et judiciaire de bon ni veau et tablir une r glementation d ontologique rigoureuse IL Analyse des entretiens 1 Introduction Maintenant que nous avons poser les bases th oriques de notre recherche nous pouvons donc soutenir que de mani re g n rale le recours au vid o t moignage pour des mineurs qui auraient t victimes de faits de m urs est per u comme un outil profitable quant la r duction du risque de victimisation secondaire de ces enfants et quant la qualit de leur t moignage en tant que preuve Pour tant en d pit de tous ces atouts des enjeux importants associ s l usage du vid o t moignage ont t soule v s dans la litt rature C est dans ce contexte que nous avons cherch comprendre les perceptions des inter venants judiciaires quant l utilisation et l impact de ces auditions d enfants dans les ar
33. l un premier pas vers une am lioration possible des conditions de travail 2 4 2 L infrastructure Telle que nous l avons d j abord e et telle que d crite dans la circulaire de 2001 la r alisation des auditions vi d o film es demande une infrastruc ture relativement importante Or il res sort de nos entrevues que si l tat sem ble tre d accord pour subventionner les futurs logiciels de reconnaissance vocale il n en va pas toujours de m me pour l am nagement de tous les locaux d audition notamment dans l ar rondissement judiciaire de Nivelles o un de leur local a t financer par des fonds priv s 2 4 3 Protection de l image Parmi nos interlocuteurs seul un avo cat d non a une des lacunes laiss es par notre l gislateur en soulevant la d licate question de la protection de l image de l enfant En effet malgr la r glemen tation du statut juridique et de l utilisa tion de la cassette il semble que certai nes d rives aient t remarqu es Des copies seraient effectu es dans un ca dre qui n est pas toujours l gal et sans contr le des fins de formation ou de conf rence sans l autorisation des vic times Des lacunes d ordre juridique se raient donc l origine de cette impasse Or afin de pallier ces manques notre l gislateur dicta le 28 novembre 2000 une loi ins rant de nouveaux articles au sein de notre Code d instruction crimi nelle Ainsi sont r glement s
34. la majo rit des magistrats est la retranscription de ces auditions vid o film es En effet comme nous l ont expliqu les policiers ces retranscriptions prennent un temps consid rable qui engendre soit un re tard dans leurs autres dossiers en cours soit comme nous l a fait remarquer un substitut du parquet de Namur un re tard dans leurs retranscriptions parti culi rement depuis la r forme des poli ces De ce fait l enqu te ainsi que l ana lyse de cr dibilit du t moignage de l en fant car l expert charg de cette ana lyse a besoin de la retranscription int grale de l audition pour pouvoir effec tuer son travail sont paralys es Pour pallier cette difficult il semble que dans certains arrondissements ju diciaires dont Nivelles les magistrats qui requi rent les policiers pour r aliser ces auditions vid o film es ne leur de mandent pas syst matiquement de leur fournir une retranscription int grale de l audition proprement dite En fait le magistrat en charge de l affaire en va lue la n cessit et si elle ne lui semble pas essentielle pour son dossier il ne demandera au policier qu un r sum de l audition vid o film e Or s il est vrai Proposer des solutions cette question des retranscriptions que ce syst me de r sum est une solu tion positive pour les enqu teurs il n en est rien pour les experts que nous avons rencontr s En effet il appara t selon ces derni
35. le nombre d exemplaires et les personnes auto ris es visionner les cassettes Quant aux autres personnes que celles vis es l article 99 et 61ter du Code d instruc tion criminelle telles que les interroga teurs en formation ou les chercheurs scientifiques par exemple elles doivent introduire une demande aupr s du pro cureur g n ral pour pouvoir visionner la cassette D s lors si nous constatons que des efforts ont t fournis pour combler certaines lacunes juridiques certaines d ficiences subsistent En effet force est de constater qu en ce qui concerne la protection de l image de l enfant audi tionn des efforts doivent encore tre faits pour que dans un futur proche le 18 Circulaire minist rielle du 16 juillet 2001 relative l enregistrement audiovisuel de l audition des mineurs victimes ou t moins d infractions annexe Il p 23 19 Cinstrcrim art 97 20 Cinstrcrim art 6lter et 99 c est dire les parties au proc s ainsi que les personnes qui participent profes sionnellement l information l instruction ou au jugement dans le cadre du dossier judiciaire magistrats avocats expert l inculp non d tenu et la partie civile 21 Circulaire minist rielle du 16 juillet 2001 relative l enregistrement audiovisuel de l audition des mineurs victimes ou t moins d infractions point 6 3 1 2 p 17 JDJ n 231 janvier 2004 visionnage de la cassette des fins d
36. lus jamais con front s la personne suspect e d avoir abus d eux ni appel s t moigner l audience En outre nos interview s nous ont pr cis que ces confrontations taient assez rares puisque dans la plu part des cas elles ne menaient rien ou pire traumatisaient l enfant Toutefois un avocat de la d fense nous a fait remarquer que le t moignage de l enfant l audience avait son int r t pour la recherche de la v rit D autres nous ont encore rappel que le vid o t moignage permettait de con fronter en diff r l auteur pr sum des Le t moignage reste une preuve douloureuse faits la d claration de l enfant or s il est vrai que cette confrontation indirecte est respectueuse et non traumatisante pour l enfant il semble d apr s les quel ques substituts et policiers qui l ont d j utilis e que son impact soit peu efficace en termes d aveux En accord avec les experts psycholo gues plusieurs magistrats et avocats ajouterons encore que s il est vrai que l enregistrement audio visuel du t moi gnage de l enfant permet de limiter son risque de victimisation secondaire li notamment aux r p titions successives de son histoire et sa confrontation avec son abuseur pr sum il n en demeure pas moins que le simple fait de d voiler ce qu il aurait subi surtout s il est sou mis des conflits de loyaut envers son entourage l auteur des faits et le cas ch ant
37. mande il ne fallait pour autant pas tom ber dans l exc s inverse en l infantilisant Par ailleurs les intervenants judiciaires et plus particuli rement les avocats ont insist sur l importance de la neutralit de l enqu teur ce titre plusieurs poli ciers nous ont indiqu que s il tait utile de conna tre son dossier avant d inter viewer l enfant ils devaient par cons quent redoubler de prudence lorsqu ils interrogeaient l enfant car ils risquaient m me inconsciemment d induire des l ments du dossier r pressif chez l en fant Enfin notons que tous les magistrats les avocats et les experts psychologues nous ont r v l que l absence de suggestibi lit est un condition sine qua non pour pouvoir accorder une quelconque atten tion aux dires de l enfant Les magistrats du parquet ont quant eux rappel qu en plus d tre non suggestible l audi tion devait imp rativement tre porteuse d l ments de preuve quant la culpa bilit ou non de la personne soup on n e d avoir abus d un enfant ou du moins leur apporter des l ments leur permettant de voir plus clair dans leur affaire afin de pouvoir poursuivre le pr sum abuseur en chambre du conseil et le cas ch ant devant les juridictions de fond ce propos deux policiers nous ont galement dit qu il ne fallait tout de m me pas oublier que l audition vid o film e tait judiciaire et que par cons JDJ n 231 janvie
38. n tre lors du vid o t moignage Concernant le respect de la parole et du silence de l enfant une de nos interlo cutrices pr cisa que respecter la parole de l enfant c est d abord et avant tout res pecter son expression spontan e Plu sieurs autres nous expliqu rent qu il ne fallait en aucun cas soumettre l enfant des pressions lors de l audition en ques tion En ce qui concerne les policiers il sem ble que suite leur formation et leur sensibilisation la psychologie ainsi Veiller ce que la pr sum e victime vienne t moigner le plus sereinement possible qu au traumatisme potentiel que l en fant pourrait subir l occasion de leur t moignage car redire c est souvent revivre l insupportable son conception d une audition r ussie a v ritablement volu au profit de l enfant Or si le respect et l coute attentive de l enfant en ce qu ils permettent d tablir une relation de confiance entre l enqu teur et l enfant sont des conditions es sentielles au bon d roulement d une audition vid o film e il appara t selon la majorit des personnes que nous avons interrog es que l enqu teur devra en outre tre capable de s adapter au voca bulaire de l enfant afin qu un dialogue puisse na tre entre les deux protagonis tes Cependant une de nos interlocutri ces a ajout que s il tait n cessaire de s adresser l enfant de mani re telle qu il comprenne ce que le policier lui de
39. nce ressentie par l enfant Nombreuses taient les personnes qui nous ont dit que le local d audition sp cialement am nag ainsi que la m thode d entrevue appliqu e lors du vid o t moignage permettaient aux enfants d tre plus l aise En effet le confort et l intimit de la pi ce d audition favorise le contact entre l enqu teur intervieweur et l enfant et diminue le stress d cette audition judiciaire cette premi re constatation une po lici re et un avocat ajout rent que l ab sence de formalisme et de d corum ren dait le t moignage de l enfant plus ais et plus naturel En ce qui concerne la m thode d entre tien plusieurs policiers soulign rent que celle ci pour autant videmment qu elle soit bien appliqu e tait tr s respec tueuse de l enfant et faisait tout pour qu il se sente accueilli cout et en confiance En outre la plupart des intervenants que nous avons interrog s ajout rent que la pr sence de l expert psychologue et de la personne de confiance avait pour ef fet de rassurer l enfant Cependant con trairement leur opinion une avocate nous expliqua que la pr sence de toutes ces personnes dans le local d audition pouvait au contraire tre n faste pour l enfant Le vid o t moignage appara t en fin de compte tous nos interlocuteurs comme une volution positive pour l en fant malgr peut tre que pour quel ques uns d entre eux certains enfants
40. nt du local d audi tion Cette p riode d adaptation qui tait en moyenne pour les arrondissements judiciaires de Bruxelles Nivelles et Namur de deux trois ans correspon dait en fait au temps n cessaire pour que l utilit de cette technique soit reconnue et entre dans les m urs des magistrats charg s de diriger l information et l ins truction des affaires d abus sexuels im pliquant des mineurs d ge Ajoutons encore qu un policier dont le r le est d aider les enqu teurs en mati re d audi tions de mineurs et ce dans diff rents arrondissements judiciaires depuis f vrier 2001 nous a pr cis que la l ga lisation du vid o t moignage en novem bre 2000 a elle aussi fait voluer les mentalit s et par cons quent le recours ce proc d Actuellement nous pouvons consid rer en accord avec nos interlocuteurs que les arrondissements de Bruxelles et Ni velles ont atteint ce que nous pourrions appeler une vitesse de croisi re ce qui signifie que la quantit de demandes est relativement stable En ce qui concerne l arrondissement ju diciaire de Namur il nous semble que la demande d utilisation du vid o t moi gnage commence seulement se stabi liser En fait ce d calage s explique sim plement par le fait que cette technique particuli re d audition a t mise en place au cours des ann es 1995 1996 1997 dans les arrondissements judiciaires de Bruxelles et Nivelles tandis qu ell
41. nt fonc tion de l exp rience des enqu teurs D ailleurs les enqu teurs eux m mes nous ont confirm cet argument 2 3 6 Absence de pressions S il est vrai que ces auditions audio vi suelles aussi respectueuses soient elles seront toujours sources de stress et d un minimum de pression pour l en fant ne f t ce que parce que l interro gatoire se fait dans un lieu inconnu avec des personnes inconnues il faut cependant veiller ce que la pr sum e victime vienne t moigner le plus serei nement possible ce titre deux des experts psychologues que nous avons rencontr s nous ont confi que mal gr toute l exp rience les formations et les qualit s d tre de l enqu teur il semble que si des pressions sont exer c es sur l enfant pour qu il vienne t moigner il ne pourra r v ler les faits dont il aurait t victime 2 4 Probl mes li s l enregistrement audio visuel des auditions de mineurs Bien que bon nombre de nos interve nants aient manifest leur enthousiasme en ce qui concernait le recours au vid o t moignage autant pour les enfants que pour les adultes et ce quelles que soient les affaires dans lesquelles ils seraient impliqu s il n en reste pas moins que des inconv nients li s sp cifiquement cette technique d audition ont t soule v s lors de nos entrevues 2 4 1 La retranscription Le probl me majeur qui a t soulev par l ensemble des policiers et
42. nt plus qu elles ne sont pas tou jours utiles 2 2 valuation de la n cessit du vid o t moignage De mani re purement th orique notre l gislateur pr conise l enregistrement audiovisuel de l audition de toutes per sonnes n ayant pas encore atteint l ge de dix huit ans pour autant qu elles soient victimes ou t moins de faits de m urs Or il semble que dans la prati 16 Sept policiers cinq experts psychologue six substituts du procureur du Roi un juge d instruction trois juges du fond quatre avocats 17 Vu le caract re restrictif de cet article nous n avons pu y ins rer les illustrations de nos consta tions par des extraits de nos entretiens Aussi nous renvoyions le lecteur L VAN CALOEN op cit 2003 p 67 97 JDJ n 231 janvier 2004 que le recours cette m thode d audi tion ne soit pas aussi syst matique et soit entour d une s rie de crit res li s l enfant et au contexte de d voilement Cette valuation aurait pour but d une part d viter l enfant de subir un trau matisme suppl mentaire et d autre part d conomiser l nergie et le temps du policier charg de faire l audition de son coll gue en r gie et bien souvent de l ex pert psychologue qui assiste l audi tion si d s le d part on sait que l enre gistrement audiovisuel du t moignage de l enfant ne donnera rien ou aurait pu tre vit vu les preuves mat rielles con tenues dans le dossier
43. poursuivre ou pour juger Toutefois s il est vrai que c est Bruxelles que les voix se sont le plus lev es peut tre parce qu ils sont d sillusionn s et d us par cet outil qui contrairement ce qu ils avaient cru ne leur permettait pas de tout r soudre nous nous sommes rendu compte que les magistrats les avocats ainsi que plusieurs policiers des trois arrondissements d noncent le man que de rigueur de cet outil et plus sp cifiquement de la grille d analyse du contenu du t moignage de l enfant la quelle constitue le c ur m me de la proc dure S V A Effectivement les dix neuf crit res de cette grille sont apparemment des indi cateurs de la validit de la d claration ce qui veut dire que leur pr sence est consid r e comme un signe de v ra cit par contre leur absence ne signi fie pas n cessairement que les all ga tions sont fausses tant entendu que plus un t moignage est caract ris par un nombre significatif de crit res plus la probabilit est lev e que cette d claration soit bas e sur des faits r elle ment v cus Cependant les magistrats que nous avons interview s reprochent cette m thode d analyse soi disant objective d tre en fin de compte plus subjective qu elle n y para t car le choix de retenir un crit re ou non est person nel et donc subjectif Par cons quent les experts mis mal par les magistrats ont peur de prendre trop position et pr
44. r 2004 quent il ne fallait pas perdre de vue que leur mission tait de r unir les l ments constitutifs de l infraction dont l enfant aurait t victime Cependant force tait de constater que si obtenir des all gations et des preuves concer nant la commission ou non de l infrac tion paraissait secondaire pour les po liciers par rapport au respect de l en fant ceci tait primordial et essentiel pour les magistrats du parquet 2 3 4 Qualit s d tre De mani re g n rale les personnes que nous avons interrog es nous ont con firm que pour pouvoir r aliser ces auditions vid o film es de mani re ef ficace tant sur le plan de la recherche de la v rit que sur le plan du respect de l enfant de sorte qu il ne soit pas traumatis la suite de cet interroga toire judiciaire nous ne pouvions dis socier les comp tences professionnel les re ues lors des formations des qualit s humaines Plus sp cifiquement nos interlocuteurs nous ont pr cis que les enqu teurs charg s de ce type d audition devai ent aimer travailler avec les enfants tre l aise avec la sexualit en g n ral et faire preuve de psychologie de pa tience de tol rance de p dagogie d ouverture d esprit et de d tachement par rapport ces dossiers motionnellement lourds 2 3 5 L exp rience Nombreuses taient aussi les person nes qui nous ont soulign que la qua lit des entrevues tait galeme
45. raitement particulier D s lors au vu des nombreux rapports de recherche et des multiples ouvrages consacr s ce sujet qui d non aient d une part le traumatisme v cu par ces La perception des intervenants judiciaires L utilisation et l impact des auditions video film es des enfants pr sum s victimes d abus sexuels Par Laetitia van Caloen Dans les ann es 90 et plus sp cifiquement depuis l affaire Dutroux la population belge s est fortement sensibilis e la question de l abus sexuel Ainsi devant le nombre sans cesse croissant d auteurs soup onn s d abus l encontre de mineurs et les lacunes juridi ques concernant le traitement de ce type d affaires nos l gislateurs conscients du trau matisme v cu par ces enfants que ce soit lors de leurs agressions ou lors de leurs t moignages successifs dans le cadre du processus judiciaire se mobilis rent pour mettre en place un syst me juridique plus adapt pour traiter ces dossiers Le vid o t moignage fut donc mis en place dans les diff rents arrondissements judiciaires de enfants pr sum s victimes d abus et d autre part les effets pervers dus aux interrogatoires successifs notre pouvoir l gislatif se mobilisa pour mettre en place un syst me juridique plus adapt pour informer et instruire sur le plan p nal les infractions caract re sexuel et plus sp cifiquement celles commises sur les mineurs d ge C est dans cet or dre d id es q
46. rondissements judiciaires de Bruxelles Nivelles et Namur Pour ce faire nous avons mener cinquante deux entretiens semi directifs aupr s celle sugg r e par des tiers 11 H VAN GUSEGHEM op cit 1992 p 32 12 En Belgique la deuxi me tape faisant partie int grante du protocole initial de Yuille a t supprim e En effet si en 1995 lors des exp riences pilotes les policiers appliquaient l tape de la discussion de la v rit lors de laquelle l intervieweur devait valuer selon l ge de l enfant sa compr hension du concept de v rit celle ci fut rapidement l objet de critiques Tout d abord les policiers d nonc rent l effet n gatif que cette tape avait sur la relation de confiance qu ils venaient d tablir avec l enfant Effectivement le simple fait de demander l enfant d expliquer la diff rence entre la v rit et le mensonge pouvait induire chez ce dernier le sentiment que sa parole tait remise en doute ou qu il tait consid r comme un menteur sauf s il parvenait diff rencier formellement le vrai du faux Ensuite des auteurs soutiendront que une telle approche inductive en termes de v rit et de mensonge ne nous convainc pas dans la mesure o l interpr tation d une fausse all gation d abus sexuels en termes de mensonges ne nous para t pas pertinente La parole de l enfant n est pas le calque de celle de l adulte qui est cens pouvoir faire la part entre la r alit et l imaginair
47. s efforts consid rables pour arriver construire une proc dure sys t matique d entrevue dans le but de mi nimiser le pr judice port aux enfants et de maximiser la validit de leur t moignage C est en 1988 que fruit de ce travail collectif l entrevue par tapes progressives a vu le jour en prenant en consid ration la plupart des probl mes soulev s pr c demment tant donn que son but est d obtenir la d claration la plus exhaustive pos sible sans influencer l enfant De mani re plus pr cise cette entrevue a trois objectifs principaux minimiser l impact traumatique potentiel de l entre vue sur l enfant obtenir le maximum d information tout en r duisant la 4 Circulaire du Ministre de la Justice Wathelet 17 mai 1995 5 Cf supra note 2 6 Veuillez excuser le caract re tr s restreint de notre partie th orique ainsi que l absence de m tho dologie dans cet article Aussi nous invitons le lecteur prendre connaissance de notre m moire dans L VAN CALOEN La perception des intervenants judiciaires quant l impact et l utilisation des auditions audio visuelles des enfants pr sum s victimes d abus sexuels 2003 p 3 68 T H VAN GIJSEGHEM in J Y HAYER et E de BECKER L enfant victime d abus sexuel et sa famille valua tion et traitement Paris P U F 1997 p 11 8 H VAN GIJSEGHEM Plaidoyer en faveur de l enregistrement vid o du premier interrogatoire de la pr s
48. u m e victime d abus sexuel R D P 1995 p 931 9 Ce travail est le r sultat de travaux entrepris conjointement par des chercheurs et des praticiens du Canada des Etats Unis de la Grande Bretagne et de l Allemagne J C YUILLE L entrevue de l enfant traduit in L enfant mis nu L all gation d abus sexuel la recherche de la v rit s l d H VAN GIJSEGHEM Montr al M ridien 1992 p 83 84 10 J C YUILLE L enfant mis nu L all gation d abus sexuel la recherche de la v rit Montr al M ridien 1992 p 83 84 JDJ n 231 janvier 2004 contamination et respecter les princi pes relatifs au processus d investiga tion Le premier est atteint par le biais de la sensibilisation et de la formation des intervieweurs aux diff rents besoins des enfants en fonction de leur ge afin que ces intervieweurs soient plus res pectueux de leur parole mais aussi de leurs silences Formation qui est d autant plus importante que trop sou vent les enqu teurs charg s d inter roger ces enfants pr sum s victimes d abus sexuels prouvent certaines dif ficult s s entretenir avec ces derniers et recueillir leurs propos en raison notamment de leur language de leur comportement et de leur style narratif Par cons quent il nous para t indis pensable de former les intervieweurs la psychologie de l enfant et de les sen sibiliser la probl matique de l abus sexuel afin qu ils sachent qu un
49. ue l enregistrement audio visuel du t moignage de ces mineurs pr sum s victimes d abus fut recom mand puis l galement reconnu et mis en uvre dans les diff rents ar rondissements judiciaires belges Aussi ayant r alis notre stage la Police f d rale de Namur en section jeunesse nous avons eu l occasion Extrait du m moire de fin d tudes de licence en criminologie l UCL La perception des intervenants judiciaires quant l utilisation et l impact des auditions video film es des enfants pr sum s victimes d abus sexuels promoteur Professeur J Kinable 2002 2003 1 Y H HAESEVOETS L enfant en question De la parole l preuve du doute dans les all gations d abus sexuels Bruxelles De Boeck 2000 pp 55 57 2 Loi du 28 d cembre 2000 relative la protection p nale des mineurs M B 17 mars 2000 3 P SOMERS et D VANDERMEERSCH L enregistrement des auditions d enfants victimes d abus sexuels premiers jalons d valuation de l exp rience bruxelloise Rev drp n crim n 4 Bruxelles 1997 p 376 JDJ n 231 janvier 2004 d assister depuis le local de r gie une s rie d auditions audio visuelles d en fants soup onn s d avoir t abus s Fort int ress s par cette technique d audition qui pour nous tait nou velle nous nous sommes document s sur le sujet Notre premi re d marche exploratoire nous a permis de nous ren dre compte tr s rapidement qu
50. velles et Namur D s lors nous allions pouvoir comparer les perceptions des intervenants appartenant une m me profession les perceptions des interve nants appartenant des professions dif f rentes et travaillant dans des arron dissements judiciaires distincts sachant que nous en avions choisi respective ment un grand un moyen et un petit et que de surcro t leurs premiers locaux d auditions furent install s quelques ann es d intervalle Notre article sera divis en deux par ties La premi re sera consacr e l ta blissement des bases th oriques sur lesquelles ont repos notre tude em pirique Tandis que la seconde nous permettra de pr senter les r sultats de nos entretiens effectu s aupr s des in tervenants judiciaires I Recensements des crits Comme beaucoup tendent le penser si le nombre d abus sexuels d enfants n est probablement pas plus lev qu autrefois la loi du silence dans la quelle ils s enferment est quant elle beaucoup plus souvent bris e ce qui explique le nombre sans cesse croissant de victimes signal ces derni res an n es Face cette recrudescence de nombreux intervenants sont amen s de plus en plus souvent recueillir les pro pos de ces enfants victimes d abus sexuels ou pr sum s tels Uniques t moins de ce qu ils ont subi ces enfants constituent souvent les seules sources d informations Ainsi projet s malgr eux dans l engrenage
51. voir assurer cor rectement l enregistrement audio vi suel de la d claration de l enfant Or lors de nos interviews il nous a t r v l que l am nagement de certains locaux a dans l arrondissement judi ciaire de Nivelles notamment d tre subsidi par des fonds priv s tant donn l absence de fonds publics La troisi me probl matique pose la d li cate question de la publicit relative de l image de l enfant par le biais de la cassette vid o de sa d claration D ailleurs c est ce titre que la plupart des interview s taient partisans du visionnage de sa d claration mais huis clos de sorte que sa vie priv e et sa personne soient respect es Ainsi bien que l enregistrement audio visuel n a apparemment pas engendr de modifications spectaculaires dans la mani re de travailler des magistrats et des avocats il semble par contre que le simple fait d avoir mis en place cette technique d audition a fait prendre cons cience tous les intervenants judiciai res que les enfants taient capables de t moigner et que leurs all gations taient en principe bas es sur des faits r els Par cons quent le changement majeur apport par le vid o t moi gnage selon les personnes que nous avons rencontr es est la reconnaissance de la parole de l enfant au m me titre que celle des adultes Quant aux poli ciers intervieweurs ils ajout rent que leur formation et les supervisions leur avaient appris

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