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Entre nos mains

1. R DACTEUR EN CHEF Simon Gilardi est charg de mission dition p da gogique au sein de Ciclic p le r gional d ducation artistique et de formation au cin ma et l audiovi suel de la R gion Centre R DACTRICE DU LIVRET Amanda Robles enseigne le cin ma l cole Sup rieure d Audiovisuel de Toulouse Elle est aussi r dactrice pour Bref le magazine du court m trage Elle a consacr une th se au cin ma d Alain Cavalier et publi un ouvrage sur ses films autobiographiques Alain Cavalier filmeur De L Incidence diteur 2011 Ciclic LIVRE IMAGE CULTURE MUM RIOUE q EH pr A Egalit Fraternit Libert Egal R PUBLIQUE FRAN AISE
2. Cette id e de collectivit semble pourtant d mentie par les premi res s quences o par le cadrage et le montage les ouvri res sont isol es les unes des autres et clairement mises l cart du groupe des d cideurs en r union dans les bureaux voir l analyse de s quence page 14 La r alisatrice quant elle n affirme pas sa pr sence Dans les premiers moments du film aucune inter vention de sa part ni regards adress s sa cam ra l quipe se fait oublier et la r alisatrice se pr sente comme une observatrice ext rieure Cependant le fait d associer le titre un plan de mains d une couturi re comme sur l affiche puis des bobines de fil qui se d vident permet de rapprocher le tra vail cin matographique et en particulier celui du montage de celui des ouvri res de Starissima Ne parle t on pas aussi de bobines pour un film et les gestes d une monteuse qui colle des morceaux de pellicule ne rappellent ils pas ceux utilis s en couture La mise en exergue et l insistance sur ces mains de couturi re d s louverture d Entre nos mains rappelle une s quence c l bre de l Homme la cam ra de Dziga Vertov 1929 des mains de monteuse sont mises en parall le avec une multi tude de travaux manuels pr sentant les m tiers du cin aste et de ses collaborateurs comme une acti vit comparable celles de tous les ouvriers de la ville Par ces quelques plans d introduction Mariana Otero
3. MARIANA OTERO entre nos main MODE D EMPLOI Les premi res rubriques de ce livret plut t informatives permettent de pr parer la projection Le film fait ensuite l objet d une tude pr cise au moyen d entr es vari es r cit s quence plan associ es des propositions de travail en classe Les derni res rubriques offrent d autres pistes concr tes pour aborder le film avec les l ves Des rubriques compl mentaires s appuyant notamment sur des extraits du film sont propos es sur le site internet www site image eu O Le pictogramme indique un lien direct entre le livret et une des rubriques en ligne z i e Site im Directeur de la publication ric Garandeau Propri t Centre National du Cin ma et de l image anim e 12 rue de L beck 75784 Paris Cedex 16 T l 01 44 34 34 40 R dacteur en chef Simon Gilardi Ciclic R dactrice du livret Amanda Robles Conception graphique Thierry C lestine Conception printemps 2012 Ciclic agence r gionale du Centre pour le livre l image et la culture num rique 24 rue Renan 37110 Ch teau Renault T l 02 47 56 08 08 www ciclic fr Correction Muriel Bourgeois Point Final Remerciements un grand merci Mariana Otero pour sa disponibilit Achev d imprimer par l Imprimerie Moderne de PEst juillet 2012 SOMMAIRE Synopsis et fiche technique R alisateur l intime et l
4. est pas une structure en dehors de nous cela nous touche nous transforme Mes films sont toujours des portraits collectifs car ce qui m int resse c est de faire lien de montrer les liens entre les choses les gens les concepts Propos recueillis par Amanda Robles Tours le 17 novembre 2011 sauf mention contraire les propos de Mariana Otero cit s dans le livret proviennent de cet entretien GENESE Patience et longueur de temps La gen se d un projet documentaire peut suivre diff rents chemins Ce peut tre une rencontre avec une personne un lieu ou une r a lit particuli re qui d cide un r alisateur faire un film Parfois c est davantage une id e d ordre g n ral qui le pousse enqu ter pour trouver un sujet qui corresponde ce premier d sir La Loi du coll ge est ainsi n d une envie de faire un film sur un coll ge sans savoir pr cis ment lequel Si le film s est tourn dans le coll ge Federico Garcia Lorca en Seine Saint Denis c est que le principal a t l un des seuls accueillir le projet avec bienveillance Le cin ma documen taire est donc toujours une affaire de rencontres mais qui peuvent intervenir diff rentes tapes de la conception du film L id e de d part d Entre nos mains tait encore plus g n rale que pour La Loi du coll ge apr s avoir centr ses films pr c dents sur l obser vation des r gles autour desquelles s organise le fonctionnement de lieu
5. du travail Certaines ont cr leur entreprise La Laotienne qui chante a cr sa petite entreprise de retouches Une autre a cr une entreprise de cr ation de v tements et pense peut tre l agrandir et faire une coop ra tive D autres ont fait des formations et ont chang de m tier Je pense que cette exp rience leur a donn de l nergie pour faire d autres choses a leur a donn confiance en elles e w 7 ES TOUL gt i d SS ttt mi 1 No mia atelier piquage Moi je vais r fl chir encore un peu Parce que j ai peur c est tout J ai peur de perdre de largent et de perdre le boulot Si a ne marche pas tu perds tout 2 Jane Rose service exp dition On sait que des fois des entre prises qui sont dans la m me situation elles s en sortent Pour l instant on vit au jour le jour Moi je ne suis pas trop pessimiste Il faut croire jusqu au dernier souffle 3 Sylvie service exp dition Apr s quelques r flexions je rentre dans la Scop Mon mari il m a dit coute Sylvie la participation aux b n fices c est de largent qui t est revenu c est l entreprise qui te l a donn Tu Pas gagn si on veut mais tu l as pas gagn de tes propres mains Alors tas qu le leur remettre T IA AS kiu i 4 Denis porteur du projet et futur dirigeant de la Scop La guerre est ouverte non Si monsieur Spanier est dans ce projet de pr s ou de
6. duo form par Muriel et No mia Cette sc ne dans l atelier est suivie de deux plans des entrep ts vides puis du premier plan ext rieur du film o l on peut lire le nom de l entreprise Ce plan laisse entendre qu une nouvelle journ e commence et permet un changement de lieu nous voil cette fois dans len trep t o l on observe les ouvriers en plein travail puis deux hommes en train de sentir des culottes suspendues un cintre La parenth se se cl t ainsi sur une sc ne humoristique qui nous fait oublier la gravit des questions qui assaillent les employ s depuis le d but du film Ainsi le film n avance pas de mani re monotone il alterne des s quences vari es tant dans leur propos que dans leur rythme interne parfois rapide parfois plus d tendu Le montage est un jeu sur la dur e en resserrant dila tant acc l rant ou tirant les actions le monteur pour reprendre les mots d Andrei Tarkovski sculpte le temps en fonction de l effet recherch sur le spectateur 1 De l image au cin ma Temps rythme et montage in Le Temps scell Cahiers du Cin ma Paris 1989 Montage sonore Anny Danch la monteuse et Mariana Otero ont construit la premi re s quence du film comme une partition de musique concr te compos e de sons de machines coudre et de coups de ciseaux Le rythme sonore guide le montage des images les changements de plans se font sur les diff rents bruits de l
7. fabrication de pyjamas et plus r cemment le court m trage Le Silence des machines de Paul Calori et Kostia Testut 2007 o des couturi res chantent et dansent pour protester contre l envoi de leurs machines en Chine Le cadre industriel offre une richesse sonore int ressante et les gestes r p titifs du travail peuvent donner naissance des chor graphies originales Dans Pique nique en pyja ma les diff rentes activit s de l atelier couture repassage transport des tissus permettent de composer un ballet virevoltant3 l inverse dans le court m trage la disparition des machines coudre laisse les gestes des ouvri res dans le vide procurant un effet comique et tra gique la fois Dans d autres films on chante et on danse en tra vaillant Les Parapluies de Cherbourg 1964 et Les Demoiselles de Rochefort 1967 de Jacques Demy mais aussi Golden Eighties de Chantal Akerman 1986 ou plus r cemment le court m trage La Pr vention de l usure de Gilles Charmant 2009 Dans Dancer in the dark 2000 Lars Von Trier a travaill avec la chanteuse et compositrice Bjork qui a utilis les bruits di g tiques du film pour cr er une v ritable musique concr te Le sujet du film est en accord avec ce proc d puisqu il s agit d une ouvri re qui perd la vue et se fait de plus en plus attentive aux sons qui l entourent Elle s chappe ainsi de son quotidien difficile et simagine dans une com die musicale La pr
8. titions de th tre dans une prison J ai commenc filmer et je me suis dit c est g nial l je peux raconter des histoires mais d une fa on diff rente C tait quelque chose de beaucoup plus vivant de beaucoup plus incarn o on avait une immense libert On tournait quand on voulait au fur et mesure des inspirations et du d sir de ceux qu on filmait C tait une mani re de faire qui m a compl tement enchant e et je me suis dit je vais faire du documentaire Et comme je n en avais jamais vu j ai fait a avec une esp ce d innocence C est seulement apr s que j ai commenc voir les films de Frederick Wiseman Pierre Perrault Raymond Depardon Ce que j aime dans le documentaire c est que comme ca ne co te pas cher beaucoup moins cher que la fiction on n a de comptes rendre personne et on peut inventer une forme celle qu on veut personne ne vous impose quoi que ce soit C est un espace d criture tr s libre dans lequel je peux aussi raconter des histoires Je ne suis pas venue au documentaire par le social mais par le cin ma et c est important dans la mani re dont je tra vaille l histoire Pour moi la forme a beaucoup d importance pas seule ment le sujet Et finalement la fiction et le documentaire se m lent tou jours dans mes films d une mani re ou d une autre Mais ce que j aime c est m immerger dans un milieu tre avec les gens et un moment donn trou ver une forme et
9. Philippe Herv SYNOPSIS Orl ans avril 2009 Six employ s d une entreprise de lingerie en faillite Starissima font appel la responsable r gionale du r seau Scop Soci t Coop rative et Participative afin d tudier la possibilit de la reprise de la soci t en coop rative Jugeant le projet viable ils le pr sentent aux autres salari s majoritai rement des femmes Mais pour tre s r que la Scop puisse voir le jour il faut d abord conna tre le nombre d employ s pr ts investir au moins un mois de salaire Un formulaire est dis tribu Chez les ouvri res cette nouvelle suscite beaucoup de questions et le montant de l argent investir pose probl me Petit petit la parole se libere et les discussions se font plus politiques Finalement la majorit des employ s d cide d en trer dans la Scop Le projet commence prendre forme jus qu au jour o le patron fait une contre proposition Les salari s refusent en masse cette autre solution pr f rant mettre en place la coop rative sans s associer lui Peu de temps apr s Cora un client important annonce qu il ne renouvellera pas ses commandes La responsable du r seau revient pour annon cer la triste nouvelle sans ce client la Scop ne peut pas voir le jour Les employ s de Starissima se remettent au travail en chantant une chanson pleine d espoir qui explique combien cette exp rience m me inaboutie a t panouissante et encoura
10. Plut t que d couper le film en chapitres il peut sembler plus adap t de distinguer comme pour une pi ce musicale les diff rents mouvements de l uvre Entre nos mains s organise en trois mouvements dont chacun pr sente une tonalit et un tempo singuliers Le premier mouvement correspond la premi re moiti du film Le r cit avance touche par touche et d voile une s rie de micro v nements bien diff rents des rebondissements plus marqu s de la deuxi me partie On entre petit petit dans le film au fil des questions et des h sitations des diff rents personnages Ce premier mouvement semble une sorte de lent pr lude o les instruments font leur entr e tour tour et s accordent progressivement Dans le deuxi me mouvement qui commence exactement la moiti du film le rythme va s acc l rant et les preuves s encha nent rapidement contrepro position du patron retrait de Cora bilan n gatif du r seau Scop Le climax point culminant de ces diff rents moments de crise est marqu par l annonce du retrait de Cora et suivi d une retomb e du rythme venant appuyer l attente difficile du d nouement Le troisi me mouvement op re un nouveau retournement de situation Alors que la situation semblait d sesp r e le film se termine par une sorte de happy end Apr s la violence des preuves travers es le rythme ne s est pas essouffl le film se termine de mani re dynamique comme un finale sympho
11. cr ateur La multitude d images enregistr es pendant le tournage soixante dix heures pour Entre nos mains pourrait en effet donner lieu plusieurs films tres diff rents Le r alisateur devra donc affirmer autant de choix et de partis pris au montage qu il a d le faire au moment du tournage Le travail de montage consiste donc dans un premier temps organiser et trier l ensemble des images tourn es appel es rushes Les monteurs rangent les images selon diff rents classements qui peuvent ensuite se recouper par exemple par personnage par bloc temporel ou par type de plan plan ext rieur ou int rieur Puis un premier essai d agencement permet de construire un bout bout galement appel ours c est dire une continuit pr sen tant grossi rement la structure du film et les s quences principales l tape sui vante celle que d taille Mariana Otero dans le texte crit apr s le tournage page 4 consiste ciseler couper raccourcir ellipser resserrer afin d affiner et de dynamiser la construction du film Le risque est alors d agencer trop troitement les sc nes les plus significatives en touffant la temporalit du r cit le film ne devant pas tre une vision condens e en une heure et demie des trois mois de tournage Il est important de m nager des temps de pause qui permettent au spectateur de respirer entre chaque nouvelle avanc e du r cit Respirations ponctuations tra
12. d bat sans fin concernant le cin ma direct le cin ma peut il vraiment tre un t moin objectif du r el Est il possible de croire une v rit ext rieure ind pendante de notre point de vue et que la cam ra serait capable de capter sans influer sur elle Ces questions sont au coeur des r flexions de Mariana Otero Faire un documentaire ce n est pas raconter la v rit car il n y a pas de v rit r elle Personne ne vit les choses de la m me mani re donc un documentaire ne raconte pas ce qui s est pass Faire un documentaire C est raconter telle ou telle his toire On fait des choix en fonction de l histoire qu on a envie de mettre en vidence Ca ne m int resse pas de raconter la r alit comme si je n tais pas l Je fais du cin ma je raconte une histoire je ne suis pas une cam ra de surveillance La cam ra va changer quelque chose Par cette volont d change avec les personnes fil m es mais aussi par son sujet le film de Mariana Otero a quelque chose de l utopie du cin ma de la fin des ann es 1960 En 1967 le cin aste Chris Marker suivi par Jean Luc Godard tourne un film sur les gr ves de la Rhodiaceta Besan on bien t t j esp re puis invite les ouvriers s emparer de la cam ra Classe de lutte Les exp riences fil miques men es par le groupe Medvekinel qui venait d montrer dans la mouvance des id olo gies de 1968 que le pouvoir pouvait changer de m
13. de Sylvie Nourry commence sur la fin du dernier plan de l atelier comme pour indiquer au spectateur qu il s agit bien de la m me entreprise et que les deux actions se d roulent au m me moment Si ce type de pont sonore est une pratique courante en montage on peut remarquer qu ici Peffet est appuy puisqu il dure presque quatre secondes Gr ce cette dur e les premiers mots prononc s par Sylvie Nourry Nous soussign s employ s de l entreprise semblent aussi englober les couturi res On peut donc d abord penser que la d cision a t prise par davantage de salari s que ceux pr sents la r union Cependant la r p tition du montage altern donne par la suite le sentiment que les ouvri res ne sont pas au courant de la d cision des cadres ce qui se confirme lors de la s quence 2 Le d cor de la salle de r union donne un nouvel indice concernant l entreprise en arri re plan on aper oit des dessous en dentelles dispos s sur un cintre En reliant les informations du bloc la et 1b on peut d duire qu il s agit d une entreprise de confection de lingerie f minine lc L atelier Cette fois le raccord sonore est plus brutal On retrouve le m me type de plans que dans le premier bloc mais le rapport est invers on commence sur les personnes les m mes que dans les premiers plans du film pour finir sur des gros plans de leurs mains au tra vail Autre diff rence alors que dans le premier bloc il tai
14. l avanc e du projet N exprimant d abord que des doutes les ouvri res osent peu peu formuler des id es importantes et n ont ensuite plus peur de a x y eN A A soulever des questions essentielles ou d affirmer leur col re Leur timidit et leur modestie s effacent elles discutent de plus en plus entre elles changent leurs points de vue et ne craignent plus de prendre la parole m me devant un groupe La force du film est d avoir su donner tout leur int r t ces bribes de paroles qui peuvent d abord sembler confuses ou mal formul es mais qui si Pon y pr te un peu plus attention apparaissent pleines de bon sens et por teuses de grandes v rit s La r alisatrice pr cise que l entreprise Starissima pr sentait la particularit de n avoir aucun employ syndiqu ce qui induisait un type de parole singulier Les personnes ne sont pas politis es et leurs questions mergent de la pratique Elles n ont pas une th orie C est par le fait de s engager dans ce processus que petit petit elles vont se poser des questions C est un film la fois politique et intime Qu est ce que le politique nous fait chacun intimement Le politique ce n est pas juste une structure en dehors de nous a nous touche a nous transforme Loin des discours militants bien r d s le film montre une pens e politique en mou vement qui se construit petit petit Il faut savoir d chiffrer tout ce que c
15. la m me mani re que si on indique leur nom par un sous titre on les regarde comme s ils taient com pl tement ext rieurs nous Le probl me de la voix off c est que a met le specta teur dans un tat de passivit il ne cherche plus comprendre les choses il attend qu on lui dise ce qui se passe et du coup il ne regarde plus de la m me mani re il n coute plus de la m me mani re Il faut vraiment que le specta teur soit actif pour aller chercher les infor mations et ce n est que comme ca qu il pourra comprendre ensuite la valeur de ce qui est en train de se passer D COUPAGE S QUENTIEL G n rique dans les ateliers d une entreprise des couturi res travaillent s quence la Dans une salle de r union Sylvie Nourry la responsable r gionale du r seau Scop tudie avec six employ s la viabilit de la reprise en soci t coop rative de cette entreprise en redressement judiciaire 1b Retour dans les ateliers o chaque femme travaille en silence lc Dans la salle de r union Sylvie Nourry semble confiante 1d Dans un entrep t des ouvri res tiquettent et emballent les produits le Dans la salle de r union Sylvie Nourry pr vient l quipe d une possible r action n gative du patron 1f Retour chez les couturi res 1g La r union 00 04 32 Sylvie Nourry serre la main de tous les employ s r unis dans la salle de conf rence Le titre du film appara t suivi d un
16. loin moi je me retire du projet e i i F a al Fe F H A i EN An a ki ga P 5 mba LS 5 Muriel atelier piquage Mais tous les petits clients qu on avait 7 Laurent d l gu du personnel Il faut avoir de l espoir et en qui c est qui les a l ch s c est nous ou c est eux Parce que maintenant m me temps tre r aliste c est dur ils seraient peut tre importants ces petits clients l C tait trop com pliqu de les garder 6 Val rie Je crois pas aux coincidences moi C est bizarre jeudi le 8 Sylvie Nourry conseill re du r seau Scop Ce que vous avez patron il en a parl et hier on perd Cora Comme par hasard fait c est quelque chose de formidable dont vous vous souviendrez long temps Et je regrette vraiment qu on wait pas pu aller au bout de laven ture mais essayez de sortir tous la t te haute de cette histoire parce qu une grande partie des gens que je vois wont pas ce courage l 11 12 L Homme la cam ra Arte USE EN SCENE Les mains l ouvrage Le titre du film ainsi que les premi res images du g n rique donnent des indications importantes sur le positionnement de la r alisatrice La formule choisie intrigue d signe t elle comme instance nonciatrice les ouvri res elles m mes le titre n est pas entre leurs mains ou bien sous entend elle que la r alisatrice s inclut dans le groupe qu elle a film
17. mobile au fur et mesure que le cadre de travail habituel des employ s se modifie La r alisatrice assouplit sa fa on de filmer comme pour accompagner la trans formation des relations entre les employ s Documentaire et fiction De plus en plus de films se jouent des fronti res entre les genres cin matogra phiques habituels et par des m langes inattendus donnent une nergie nouvelle au langage cin matographique Jean Pierre Rhem directeur du Festival Interna tional de Documentaire FID de Marseille explique ainsi que face l mergence de plus en plus fr quente de nombreux films hybrides il pense n cessaire d ouvrir sa programmation des uvres cheval entre documentaire et fictiont Quant aux festivals habituellement consacr s la fiction ils se montrent de plus en plus sensibles des films fort penchant documentaire La fiction se nourrit du documentaire tandis que celui ci trouve dans les ressorts fictionnels des moyens de transcender ses propres limites L une des exp riences les plus ton nantes de ces derni res ann es a certai nement t Valse avec Bachir d Ari Folman 2008 un film d animation docu mentaire On peut aussi penser Be with me d Eric Khoo 2005 qui int grait sa galerie de personnages fictionnels un personnage r el le t moignage de cette femme sourde aveugle et muette don nait au propos du film une force suppl mentaire Plus r cemment le r alis
18. 010 10 07 Entre nos mains apres les utopies Ingrid Merckx Dans le m me bateau Politis 7 octobre 2010 Emanuele Peyret Entre nos mains usine en Cin mascop Lib ration 6 octobre 2010 Isabelle R gnier Lutte ouvri re dans la dentelle Le Monde 6 octobre 2010 Entretiens avec Mariana Otero Une double cr ation sociale et cin matographique propos recueillis par Dominique Widemann PHumanit 6 octobre 2010 T nergie du collectif propos recueillis par Christophe Kantcheff Politis 7 octobre 2010 Divers Le cin ma documentaire Guy Gauthier Le Documentaire un autre cin ma A Collin Paris 2008 Gilles Marsolais L Aventure du cin ma direct revisi t e Les 400 coups Laval 1997 Francois Niney Le Documentaire et ses faux sem blants Klincksieck Paris 2009 Com die musicale et travail Dossier p dagogique sur La Pr vention de l usure de Gilles Charmant atelier Com die musicale et monde ouvrier par Adrien Heudier http www centreimages fr livretcourts2 PRE VENTIONUSURE ATELIERS html Les Scops www les scop coop sites fr Films cit s Cin ma direct Raymond Depardon Depardon cin aste Arte Pierre Perrault La Trilogie de l le aux Coudres 1963 1968 ditions Montparnasse 2007 Frederick Wiseman La Danse 2009 ditions Montparnasse Sur le travail Jean Louis Comolli La Vraie Vie dans les bureaux 1993 ditions Montparnasse Herv L
19. C Centre National du Cin ma Puisqu elle ne peut m me pas conna tre le nom ni le genre d entreprise o elle va tourner le sc nario risque de para tre trop abstrait La situation semble tres compliqu e d autant que lors de ses rep rages Mariana Otero a ressenti quelques r ti cences chez les responsables du r seau qui craignent que la pr sence d une cam ra ne perturbe le d roulement du projet de Scop AS Devant de si nombreuses complexit s elle d cide d abandonner le projet puis quelques ann es plus tard elle relance le processus lors qu une nouvelle aide au financement est cr e par le CNC l aide au d veloppement renforc qui semble faite pour ce type de film au sc nario si incertain Puis un jour Sylvie Nourry directrice de l Union r gionale des Scop l appelle Orl ans des employ s d une entreprise en redressement judiciaire veulent cr er une Scop Elle doit les rencontrer dans quelques jours Mariana Otero obtient lau torisation du patron et part filmer cette premi re r union Le tour nage commence alors qu elle n est pas encore s re d accompagner le projet jusqu au bout Finalement au bout d une semaine elle est conquise tant par les employ s surtout des femmes d ge d origine et de milieux culturels tr s diff rents que par les d cors tonnants de l entreprise de lingerie et d cide de suivre l aventure de Starissima Alors que sa premi re id e tait de film
20. ains suscit rent de nombreuses r actions Jean Rouch ayant lui m me exp riment la cr ation documentaire coop rative en Afrique crivait dans une lettre son int r t pour cette tonnante aventure fran aise le travail est en cours puisque d sormais Nanook of the North filme avec la cam ra de Robert Flaherty Une r volution sociale et cin matographique tait alors en cours et ses chos r sonnent encore dans le cin ma d aujourd hui 1 Les documentaires engag s du r alisateur russe Alexandre Medvekine 1900 1989 eurent un impact important dans le cin ma militant des ann es 1960 des groupes Medvedkine furent cr s dans beaucoup de pays d Europe occidentale d Afrique et d Am rique latine bl qn bient t j esp re 1967 68 Les ditions Montparnasse Avant la s ance Avant la s ance il peut tre int ressant de donner quelques br ves informations sur l histoire des Scop En effet comme dans le film le projet choue certains l ves auront l impression que la cr ation d une coop rative est difficilement r ali sable voire utopique Les coop ratives ont vu le jour la fin du XIXe si cle Actuellement on compte environ deux mille Scops en France dans lesquelles travaillent plus de quarante mille salari s Si l analyse plus pr cise du fonctionne ment des Scops peut faire l objet d un travail ult rieur il ne semble pas n ces saire de d livrer davanta
21. alle de r union puis l espace collectif o tous les personnages sont r unis la s quence 2 lan ant v ritablement le film et apportant une sorte de conclusion la pre mi re s quence En construisant des jeux d opposition et de juxtaposition entre ces diff rents espaces dont on ne per oit pas encore la contiguit le montage sert le propos du film qui trouve ainsi une forme cin ma tographique en accord avec le sujet trait essayer de les r unir en les faisant communiquer entre eux Par ailleurs ce d but emprunte un certain nombre de formes au r cit de fiction effet de suspense il se d cide des choses linsu des ouvri res effet d annonce il faut se m fier du patron la L atelier Le film commence sur une s rie de gros plans mains qui cousent bobines de fil bouts de machines a coudre On d couvre ensuite en plan plus large les diff rentes ouvri res dans leur cadre de travail Aucun change entre elles ni mots ni regards Toutes travaillent en silence les yeux riv s leur ouvrage On n entend que le bruit des machines et des ciseaux 1b La r union Dans un espace tr s diff rent bien plus petit d autres personnes sont r unies autour d une table Elles sont plus proches les unes des autres se parlent se regardent et ces changes sont appuy s par l utilisation du champ contrechamp Le passage de Patelier la salle de r union s est fait gr ce un effet de montage sonore la voix
22. arriver raconter leur histoire et aussi d une certaine fa on arriver la sublimer C est ce qui m int resse dans le documentaire donner la vie une forme un sens essayer de sortir du chaos J imagine qu il y a aussi de a chez les r alisateurs de fiction ce d sir de mettre de l ordre mais ce que j aime c est que dans le documentaire on peut le sentir Mariana Otero et Fred Fresson physiquement Quand quelque chose est en train d arriver sous vos yeux il faut savoir imm diatement comment on doit le filmer et imaginer comment a prendra un sens dans le montage C est extraordinaire Ce qui m int resse ce sont les films politiques dans le sens premier la vie de la cit la question de comment on vit ensemble comment on s or ganise comment on r partit les pouvoirs La d mocratie en entreprise c est un sujet tr s politique Mais Entre nos mains n est pas ce qu on appelle un film militant car il ne sert pas v hiculer un discours Avant j ai film une prison un coll ge une t l vision commerciale en observant comment ces espaces sont r gis par des r gles et j en avais assez de filmer des histoires autour d institutions un peu fig es J avais envie de filmer un lieu o les gens remettent en question les r gles les bousculent et essaient d inventer autre chose Le film est la fois politique et intime puisqu il essaie de montrer ce que le politique nous fait chacun intimement Le politique n
23. atelier voir l ana lyse de s quence page 14 La musi calit de cette s quence initiale permet d int grer plus naturellement dans le corps du film la chanson finale qui na t la suite d une s quence similaire alternant une s rie de plans sur les ouvri res au travail Le film construit ainsi une boucle sty listique dont les diff rences viennent servir le propos de la r alisatrice Dans la premi re s quence les bruits m caniques dominent et semblent cra ser les ouvri res silencieuses alors que dans la com die musicale le niveau sonore des machines est bien plus faible et recouvert par l air de guitare puis par le chant Les bruits du travail forment une ambiance sonore un ar ri re fond sur lequel se d tache la voix de chaque individu Ces deux s quences en miroir ren dent ainsi vident le fait que les ou vri res ont pris confiance en elles et ont chang leur relation au travail Afin de mieux tre attentif au montage et au mixage sonore il peut tre int res sant d couter ces deux s quences sans les images consulat te o Site mo Law and Order 1969 La Danse 2009 Les ditions Montparnasse 10e chambre instants d audience 2004 Arte E La Loi du college 1994 Blaq Out GENRE Cin ma direct cin ma engag Le cin ma de Mariana Otero s inscrit dans la lign e du cin ma direct un cin ma en prise avec le r el et qui revendique
24. ateur fran ais Jean Charles Hue crivait La BM du Seigneur 2010 avec un groupe d ac teurs non professionnels qui interpr taient leur vie r elle et r v e dans un r cit entrem lant les inventions de la fiction et la force brute du document Entre nos mains ne propose pas un v ri table m lange La com die musicale vient apr s le documentaire comme une ex croissance Elle permet de magnifier le r el en fiction tout est permis et les r ves des personnages peuvent s affirmer dans un chant utopique Plus largement le do cumentaire pour Mariana Otero n est pas seulement un t moignage sur une r alit mais aussi une fa on de la d passer en la donnant voir un regard ext rieur qui dit spectateur dit narration mais aussi r flexion sur la forme ad quate qui met tra le mieux en valeur le propos du film Ce qui fait le film c est l accumulation de petites choses qui au fur et a mesure dessinent une histoire Et c tait tres im portant de venir tous les jours pour avoir ces choses minuscules Ca pouvait surgir n importe quand Ce que j aime c est m immerger dans un milieu tre avec les gens et a un moment donn trouver une forme qui me permette de raconter leur histoire et de la sublimer aussi Dans son film pr c dent Histoire d un secret la r alisatrice avait d ja alli documentaire et fiction mais d une mani re diff rente Comme pour tablir une certaine distance vis vis
25. carton Orl ans avril 2009 Elle annonce tous le projet de Scop et expose les r gles de fonction nement d une coop rative 2 Premi res r actions 00 06 00 la r union a soulev de nombreuses interrogations chez les ouvri res La question de l argent investir pose probl me 3 Dans les bureaux les employ s sont plus enthousiastes mais se demandent com ment arriver convaincre les autres salari s 4 Le formulaire 00 10 46 les six employ s l origine du projet r fl chissent la r daction du formulaire qui permettra de savoir qui accepte de s associer au projet de Scop en s engageant ver ser au moins un mois de salaire 5 Dans les ateliers les ouvri res s appr tent partir en week end 6 Plan ext rieur de l entreprise Starissima Une nouvelle journ e commence Dans les entre p ts le travail suit son cours 7 Quatre des six employ s l origine du projet s interrogent sur la facon dont ils doivent distribuer le formulaire aux autres salari s Ils d cident de s adresser eux par petits groupes 8 Muriel semble int ress e par le projet 9 Lors de la r union o l une des six cadres explique le contenu du formulaire elle pose des questions 10 Du c t des magasiniers le formulaire suscite aussi des interrogations Une fois retourn s leur poste de travail tous lisent le document 11 changes de points de vue 00 21 08 Muriel et Sylvie cha
26. coup dans Paile 01 04 02 la journ e com mence par une mauvaise nouvelle Cora d r f rence la marque Belamy Le projet de Scop est compromis 47 Les cadres vont annoncer la nouvelle aux ouvriers 48 On cherche des id es pour sauver le projet 49 Muriel regrette qu on ait abandonn les petits clients au profit des supermarch s 50 Pendant la pause d jeuner on s tonne de ce changement brusque dans la position de Cora 51 52 Dans l entrep t Val rie explique qu elle ne croit pas aux co ncidences 53 Sylvie sindigne contre les grandes surfaces qui font aussi la loi chez les agriculteurs 54 Certains gardent espoir d autres pensent que c est fini 54 La journ e se termine sur un plan des bureaux o ne restent que les mannequins arbo rant les dessous Starissima 55 Pattente 01 14 33 les journ es sont longues Des ouvri res avouent qu elles ont pleur hier 56 58 Mais la bonne humeur est toujours l et l humour va bon train Muriel regrette qu elles n aient pas fait la c r monie du poulet pour chas ser les mauvais esprits de l entreprise 59 La derni re r union 01 18 42 la boucle est boucl e Sylvie Nourry revient pour expliquer que le projet de Scop n est plus r alisable 60 La com die musicale 01 20 42 les employ s chantent ensemble une chanson d espoir tout en continuant leur travail 61 Le film se termine sur un plan de Sylvie qui observe l entrep t
27. de cette enqu te autobiographique elle avait choisi d crire et de tourner son film comme un r cit de fiction 1 Aux fronti res du documentaire la fiction ne suffit plus entretien avec Jean Pierre Rhem http www telerama fr cinema aux frontieres du documentaire 1 la fiction ne suffit plus 30947 php juillet 2008 13 14 SEQUENCE Une scene d exposition originale Le g n rique d ouverture s tend sur la dur e Les cartons viennent ponctuer les premi res sc nes et le titre m me du film n appara t qu au bout de cinq minutes Le g n rique repr sente donc une s quence part enti re qui joue le jeu de la classique sc ne d ex position le d cor est plant les principaux personnages sont montr s et l enjeu du film clairement nonc Cependant par le tra vail du montage le film trouve une mani re originale de pr senter ces informations Un montage altern entre les diff rents espaces cr e une tension laissant imaginer la possibilit d un affrontement ou d un d saccord Par ailleurs le rythme enlev de ces premi res sc nes est l image de l organisation g n rale du film la cam ra passe d un endroit l autre d une personne l autre pr levant au passage quelques phrases gestes et attitudes qui c te c te fini ront par construire un r cit Les deux s quences analys es sont compos es de huit blocs sept alternances entre l espace ouvrier et la s
28. depuis les bureaux et commente On a une belle vue l Carton En novembre 2009 le Tribunal de Commerce a prononc la liquidation de Starissima Les 50 salari s se sont retrouv s au ch mage G n rique de fin RECI Sc nariser le r el Mariana Otero dit souvent qu elle aime avant tout raconter des histoires Pour construire une histoire documentaire il faut d abord savoir rep rer dans le r el une mati re qui pourra faire r cit Un long travail de rep rage a ainsi per mis la r alisatrice d identifier entre diff rentes situations concernant les Scops celle qui pouvait se r v ler la plus riche en rebondissements et en mo tions la reprise en Scop d une soci t en faillite par les employ s eux m mes Ce cas de figure permettait en effet d observer plusieurs processus de transfor mation celui de l entreprise modifi e dans sa structure et dans son mode de fonctionnement et celui des employ s boulevers s dans leur relation au tra vail et la hi rarchie Un r cit est toujours l histoire d une double transformation l volution d une situation initiale vers une situation modifi e et l aventure initiatique d un h ros l histoire d Entre nos mains peut ainsi tre analys e selon les r gles clas siques des sch mas narratifs il est bien question d une qu te le projet Scop ponctu e d une s rie d v nements et d obstacles qui conduisent une situa tion de crise Ici pa
29. dressement judiciaire C comme courageux On s en sortira tous victorieux Alors en avant lingerie d hier comme d aujourd hui Ribambelles de satin Jolis rubans de dentelles Soutiens gorge et culottes Ce sera la plus belle des Scop SCOR O comme optimistes Nous savons ce projet r aliste P pers v rants Tous unis quel projet motivant Maintenant Apr s avoir travaill activement On obtient ce rendez vous client Mais il a dit non pas d argent La Scop est r duite a n ant Mais de ce projet on sort grandi La Scop a n est pas une utopie SCOR Aux entreprises en faillite Ne soyez pas pessimistes La Scop est un projet r aliste Bient t peut tre la r ussite VOTE La parole Le cin ma documentaire a toujours port une attention particuli re au geste et la parole Les savoir faire de chacun et les formes de pens e v hicul es par diff rents types de discours en disent long sur notre rapport au monde et aux autres Entre nos mains pr sente une grande richesse langagi re tant au niveau de la formulation que du contenu La fa on de parler propre chacun influe sur la compr hension et Pempathie du spectateur Les accents divers des ouvri res ainsi que leurs particularit s d locution font que ces femmes nous deviennent plus rapidement famili res et sympathiques que les employ s de bureaux dont les prises de parole sont plus monotones En effet les trois sph res principales du film ouvrier
30. e Cette absence de contrechamp est la fois li e une contrainte ext rieure le refus du patron d tre film et a un choix esth tique revendiqu par la r alisatrice En effet Mariana Otero se souvient que le patron de Starissima qui lavait autoris e tourner dans son entreprise sans souhaiter tre film avait pourtant accept qu elle le filme lors de cette importante r union Cependant explique t elle il ne m a jamais donn l autorisation d utiliser son image Quand on a commenc monter on s est dit qu on demanderait l autorisation apr s et trangement on s est rendu compte que ce qu il disait par rapport au reste des sc nes ce n tait pas du tout int ressant Sa figure de patron on la devine et il n y a pas besoin d en savoir plus Au contraire le voir c est anecdo tique et il nous fait sortir des vrais enjeux de l histoire l absence de contrechamp dans le cadre d une sc ne de discussion va len contre des r gles habituelles du langage cin matographique et souligne bien le manque de communication entre les deux parties L effet est renforc par le fait que la figure du patron est laiss e hors champ non seulement l image mais aussi au son Les employ s lui coupent la parole et contredisent des propos que l on n a pas entendus mais que l on devine d autant plus ais ment que leur teneur a t pr alablement d chiffr e lors de la s quence de la lettre voir analyse pa
31. e Roux Reprise 1996 ditions Montparnasse Claire Simon Sinon oui suivi de Co te que co te Shellac Sud Sophie Bruneau et Marc Antoine Roudil Ils ne mou raient pas tous mais tous taient frapp s Carlotta Le Groupe Medvekine Chris Marker bient t j esp re 1967 et Bruno Muel Classe de lutte 1968 ditions Montparnasse Cin ma et coop ratives Jean Renoir Le Crime de Monsieur Lange 1936 Studio Canal Com die musicale et travail Lars Von Trier Dancer in the dark 2000 Warner Home Video George Abott Pique nique en pyjama 1957 Warner Home Video ATT LAT 3 A LA Pour toute information sur les actions d ducation au cin ma on consultera le site du CNC www cnc fr o les livrets des trois dispositifs Ecole et cin ma College au cin ma et Lyc ens et apprentis au cin ma sont en acc s libre depuis 2009 Concu avec le soutien du CNC le site Image www site image eu ou www lux valence com image est le portail de ces trois dispositifs d ducation l image On y trouve en particulier une fiche sur chaque film au programme des trois dispositifs comprenant notamment des vid os d analyse avec des extraits des films et le pr sent livret en ver sion pdf un glossaire anim des comptes rendus d exp riences des liens vers les sites sp cialis s dans l ducation l image Enfin la plupart des sites internet des coor dinations r gionales du dispositif Lyc ens et appren
32. e collectif Gen se Patience et longueur de temps criture Pr voir l inconnu Technique Montage Genre Cin ma direct cin ma engag Avant la s ance D coupage s quentiel R cit Sc nariser le r el Personnages Un film choral Mise en sc ne Les mains l ouvrage S quence Une sc ne d exposition originale Plan Le plan manquant Atelier Hors champ Motif La parole Pistes de travail Filiations Com die musicale S lection bibliographique 10 12 14 16 17 18 19 20 FICHE EOHNIQUE EDAN entre nos mains Un film de Mariana Otero E ikp z yA 3 inter Entre nos mains France 2010 Image et r alisation Son Montage image Montage son Mixage Collaboration com die musicale Musique originale Production Distribution France 2012 Date de sortie Interpr tation Les porteurs du projet Scop Les d l gu s du personnel Au bureau d industrialisation A l atelier piquage Au service exp dition Mariana Otero Pierre Carrasco Anny Danch C cile Ranc Yann Legay Pascal Deux Fred Fresson Denis Freyd Archipel 33 Diaphana 6 octobre 2010 Christian Alain Alice Nadine Martine Denis Ircilia Natalie Christine Laurent Jacqueline C line Isabelle No mia Muriel Thi Lien Anong Lo Jacqueline Sylvie C line Sylvie Martine Val rie Jane Rose
33. e continuit sonore Pour une plus grande harmonie avec le reste du film la r alisatrice a tenu enregistrer le chant en son direct en rajoutant l accompagnement musical seulement au montage Les apprentis chanteurs n taient guid s que par le musicien compositeur hors champ et une discr te bo te rythme On peut apercevoir des traces de ce dispositif sin gulier dans un des bonus du DVD Le travail du montage a aussi uvr pour une plus grande fluidit avec le reste du film En effet cette s quence finale est pr par e par trois moments pr c dents le g n rique o le montage sonore compose une partition musicale avec les bruits des machines puis deux plans o Jane Rose et une piqueuse fredonnent en travaillant Le travail en chantant Associer documentaire et com die musicale peut para tre tonnant mais que la musique le chant et pourquoi pas la danse s panouis sent dans les d cors d une usine peut surprendre encore davantage En effet la com die musicale est plut t associ e un univers roman tique fantaisiste voire f erique qu au monde du travail Pourtant plu sieurs r alisateurs se sont amus s mettre en sc ne des s quences musicales dans des usines et parfois m me comme Entre nos mains dans des entreprises de confection textile Ainsi la com die musi cale Pique nique en pyjama 1957 de Stanley Donen et George Abott qui raconte la naissance d une idylle amoureuse dans un atelier de
34. emiere chanson du film Cvalda a lieu dans l usine o travaille Selma D s que les chants et les danses commen cent l esth tique se transforme Contrairement Mariana Otero Lars Von Trier a choisi d accentuer la rupture entre les sc nes de fic tion traditionnelle tourn es dans le plus grand r alisme cam ra paule et plan s quence et les sc nes chant es extr mement d coup es et film es avec plusieurs cam ras num riques qui offrent une moins bonne d finition et des couleurs plus satur es 1 Entretien avec Mariana Otero compl ment de l dition DVD Diaphana 2011 2 Le film est visionnable sur Youtube 3 On peut visionner la s quence sur Dailymotion http wwwdailymotion com video x4bniy_the pajama game slvostf 1957_shortfilms La Pr vention de l usure SELECTION BIBLIOGRAPHIQUE Entre nos mains Documents p dagogiques Fiche p dagogique Unifrance par Charlotte Garson www unifrance org actualites 6245 my french film 70433 Dossier p dagogique Z ro de conduite par C cile Faure Clarisse Guiraud et Vital Philippot http www zerodeconduite net entrenosmains Revues sp cialis es Nicolas Azalbert Cahiers du cin ma n 660 octobre 2010 Serge Kaganski Les Inrockuptibles 6 octobre 2010 Yann Tobin Positif n 596 octobre 2010 P riodiques Mehdi Benallal Entre nos mains apr s les uto pies blog du Monde Diplomatique 7 octobre 2010 http blog mondediplo net 2
35. endront une place importante dans le film Ce d but fonctionne donc un peu comme une galerie de portraits Le retour la salle de r union se fait encore gr ce un effet sonore la coupe est amen e par un bruit de carton 1f La r union Sylvie Nourry pr vient les employ s de la possible r action n gative du patron En mettant en valeur cette annonce d s les premiers moments du film la r alisatrice construit un effet de suspense Pour accentuer la tension le cadre se resserre sur les visages Lun des em ploy s parle de convaincre les autres employ s On est donc main tenant certain que les ouvri res ne connaissent rien du projet lg L atelier Retour sur des mains en train de coudre Le changement de lieu est accentu par le bruit sec de la machine coudre Pour ce dernier moment dans l atelier on reste sur la m me ouvri re comme pour insister sur le fait que le film se centrera sur des personnes et ne se contentera pas de survoler plusieurs espaces et de ne pr senter que des groupes On remarque que dans les espaces ouvriers nous n avons rencontr que des femmes 2 La salle de conf rence Ce bloc est coup en deux par le titre du film suivi d un carton indi quant le lieu et la date Ce type de carton indique que c est v ritable ment maintenant que le film commence Pendant l apparition du titre le retour du bruit des machines coudre soul ve des questions qui d signe v ritablement le nos d
36. er de lance de la Nouvelle Vague et du cin ma moderne Jean Luc Godard n a cess de bousculer les r gles du langage cin matographique Apr s avoir utilis de nombreux jump cuts et faux raccords dans bout de souffle 1959 comme pour tenter d imprimer dans la mati re cin matographique m me les affolements et les incons quences de son personnage principal il d truit la r gle habituelle du champ contrechamp dans Vivre sa vie 1962 Lors d une sc ne de rupture entre Nana Anna Karina et Paul accoud s c te c te au comptoir d un bar la cam ra reste constamment dans le dos de celui qui parle accentuant ainsi le manque de communication entre les deux amants Plus tard dans le film la discussion entre Nana et Raoul un souteneur assis cette fois face face autour d une table est fil m e de mani re tout aussi surprenan te La cam ra se d place sans cesse dans le dos de Raoul qui vient ainsi masquer ponctuellement le visage de Nana L encore l absence de contre champ instaure un sentiment de malaise et le corps du souteneur tou jours situ en amorce semble craser la jeune femme Vivre sa vie Opening LAN Le plan manquant La s quence 37 dans laquelle le patron de Starissima convoque les employ s pour leur exposer sa contre proposition pr sente la particularit d tre fil m e sous un seul axe face aux salari s laissant ainsi constamment le patron dans l ombr
37. er le processus de transfor mation sur un an minimum l aventure s arr te au bout de trois mois puisque la Scop ne r ussit pas voir le jour La r alisatrice n est pas imm diatement persuad e qu elle puisse construire un film autour de cette histoire court e et qui s est ter min e par un chec Et surtout elle n est pas certaine que la trans formation intime des employ es soit vraiment visible dans ce qu elle a film Puis petit petit en regardant les soixante dix heures de rushes et en commen ant assembler des s quences cette transformation prend corps elle est fragile faite de toutes petites choses mais elle existe bel et bien la vision de ce premier bout bout le producteur est convaincu et investit de largent pour finaliser le montage ECRITURE Pr voir l inconnu De nombreux r alisateurs de documentaires ont exprim leur diffi cult mettre par crit leur projet Comment d crire ce qui ne s est pas encore produit Cet exercice est cependant n cessaire pour trouver des financements mais aussi pour communiquer avec ceux qui accompagnent le projet Mariana Otero a d tablir deux dossiers de demande de subvention Dans le premier elle pr sente le projet dans ses grandes lignes puis qu elle ne sait pas encore dans quelle entreprise elle va tourner Elle insiste sur l importance de la dimension intime du film Elle ima gine le type d entreprise qui se pr terait le mieu
38. es mots d apparence si simples contiennent en creux comme r flexions minem ment politiques Il est int ressant par exemple de noter comment la Scop est d abord d sign e comme un projet ext rieur Ils ont dit ceci Ils ont fait cela pour tre ensuite envisag e comme une r alisation collective la Scop c est nous quand m me explique Muriel apr s avoir d abord avou qu elle ne pensait pas que de simples ouvri res comme elles pouvaient prendre part aux d cisions Certaines r flexions des ouvri res r v lent par leur simplicit m me Pabsurdit de l conomie de march Sylvie considere que la part des b n fices que lui reverse l entreprise n est pas de l argent qu elle a gagn de ses propres mains et que donc il ne lui appartient pas vraiment et pointent du doigt le pouvoir des grands groupes commerciaux Muriel se demande pour quoi Starissima n a pas conserv ses petits clients tandis que Sylvie accuse les grandes surfaces d tre un peu les rois HIS ES DE TRAVAIL Les LIP Pimagination au pouvoir Les films du R ve d usine Cin malta paradoxe Politique On pourra se demander dans quelle mesure Entre nos mains est un film politique Pour Mariana Otero c est un film politique au sens de la vie de la cit comment on s organise comment on vit ensemble com ment on r partit les pouvoirs La d mocratie en entreprise car c est vrai ment a la coop rative c est tr
39. es politique L tymologie des termes politique et d mocratie peut entra ner une r flexion en classe Dans quelle mesure l entreprise peut tre consid r e comme un lieu de vie collective l entreprise appel e aussi souvent soci t fonctionne t elle selon les m mes principes qui r gissent le fonc tionnement d un tat On peut s interroger sur l int r t et les risques ventuels d un fonctionnement d mocratique en entreprise et red finir avec les l ves les fondements de la d mocratie pour la comparer avec les r gles de fonctionnement des Scops Dans une Scop le dirigeant est lu par les salari s associ s et le principe une personne une voix met tous les employ s galit Ces r gles peuvent pr ter discussion tandis que les termes regroup s sous le sigle Scop Soci t coop rative et participative m ritent d tre aussi red finis Ce travail pourra entra ner des discussions plus larges autour de l id e de d mocratie participative par exemple Les coop ratives au cin ma Le cin ma fran ais a mis en sc ne deux c l bres coop ratives une imprimerie en faillite reprise par ses ouvriers dans Le Crime de Monsieur Lange de Jean Renoir et une guinguette au bord de la Marne construite et g r e par un groupe de ch meurs ayant gagn la lote rie dans La Belle quipe de Julien Duvivier R alis s tous deux en 1936 ces films sont marqu s par l espr
40. ge 15 Cette mise hors champ s apparente donc une mise hors jeu semblant signifier que ce personnage n a plus sa place dans len treprise ni son mot dire dans l laboration du projet de Scop Force de l invisible L absence de ce plan tonne d autant plus que l apparition du patron b n fi ciait depuis le d but du film d un fort effet de suspense des le prologue Sylvie Nourry nous pr venait d une possible r action n gative de sa part tan dis que la s quence de la lecture de la lettre renforcait la tension autour de ce personnage invisible en d coupant Paction de fa on inhabituelle comme pour accentuer l impact de l v nement chez les diff rents employ s Dans la s quence de la r union la suppression au montage de cette image tant attendue peut alors prendre une autre signification Rest invisible le patron ne b n ficie t il pas ainsi d une plus grande aura d une puissance cach e digne d un deus ex machina En effet sans que l on n en ait jamais la preuve il semble vident que le retrait du client Cora qui entra nera l effondrement du projet Scop est li une man uvre souterraine du patron Ce qui reste dans l ombre s av re souvent bien plus inqui tant que l apparition d un individu en chair et en os C est la le on que nous donne Jane Rose travers son proverbe lingala expli quant qu il faut craindre le serpent m me quand il est mort Mariana Otero nous montre e
41. ge d informa tions avant la projection car le film a jus tement t con u de mani re mettre le spectateur dans la m me position que les employ s de Starissima qui au d part ne savent rien sur la question Ne pas en savoir plus que les personnages Une r flexion pr alable sur la diff rence entre documentaire et reportage peut permettre aux l ves d accepter la posi tion inconfortable ressentie au d but du film o tous les personnages ne sont pas identifi s et o les enjeux peuvent sem bler complexes L un des points de diver gence est par exemple la place accor d e au spectateur alors que le reportage par souci d efficacit prend en quelque sorte le spectateur par la main pour lui expliquer la situation notamment par luti lisation de la voix off le documentaire t che de lui faire davantage confiance en le laissant analyser les faits par lui m me Mariana Otero explique ainsi son refus de la voix off Dans une fiction il y a des informations fondamentales qu on n a pas des le d but on ne sait pas tout de suite qui est qui et on accepte ca tres bien Ce n est pas parce qu on est dans un documentaire que tout d un coup il faut savoir tout On apprend et on com prend au fur et a mesure Une voix off donne l impression d tre en avance de savoir plus de choses que les gens qui vivent la situation Or je voulais qu on soit avec eux qu on h site avec eux qu on ait peur avec eux De
42. ge les entreprises en faillite croire en la possibilit de r ussite d un projet Scop REALISATRICE L intime et le collectif N e Rennes en 1963 Mariana Otero suit d abord des tudes de lettres Paris avant d entrer l Institut des Hautes tudes Cin ma tographiques C est sa sortie de PIDHEC qu elle d couvre le cin ma documentaire lorsque les Ateliers Varan lui proposent de filmer des r p titions de th tre la prison de Fleury M rogis Petit petit ce qui devait tre un simple travail de captation prend la forme d un film plus global ce sera Non Lieux 1991 suivi d un court m trage Loin de toi 1991 Suite cette premi re exp rience elle s int resse d autres espaces collectifs Elle essaie dit elle de dresser un tat des lieux de notre soci t en observant les r gles mises en place dans diff rentes insti tutions Apr s la prison elle filme pendant une ann e la vie d un coll ge en banlieue parisienne en centrant son regard sur la question de la socialisation et de la transmission de la loi La Loi du coll ge 1993 Suivra Cette t l vision est la v tre 1997 sur le fonctionne ment d une t l vision commerciale portugaise Avec Histoire d un secret 2003 elle aborde un sujet a priori plus intime la mort de sa m re en 1968 la suite d un avortement clandestin Cependant en interrogeant les non dits pr sents dans sa propre famille elle montre aussi le silence
43. i sur ce point Un responsable commercial propose sa candidature 26 Sylvie a chang d avis elle rentre dans la Scop 2 La lettre 00 42 58 carton Alors que la quasi totalit des salari s a d cid d entrer dans la Scop le patron fait une contre proposition Tout le monde lit la lettre du patron et essaie de d crypter sa pro position Cette nouvelle s me le trouble 28 36 La r union avec le patron 00 52 02 carton Le 4 juin tous les salari s sont pr sents pour assis ter la r union avec le patron On n entend pas les propos du patron seulement les r actions qu elles suscitent chez les employ s Les discus sions sont houleuses 37 Apr s la r union on fait le bilan tout le monde est nerveux explique Sylvie 38 39 Les six se r unissent la guerre est ouverte conclut le futur dirigeant de la Scop 40 Jane Rose voque un dicton lingala qui dit qu il faut craindre le serpent m me quand il est mort 41 Le projet avance 01 00 03 carton Fin juin la proposition du patron a t cart e et le projet de Scop avance Dans les bureaux on d cide de la nouvelle collection et des nouveaux march s 42 l ambiance semble plus sereine la cantine dans les bureaux et dans les ateliers 43 45 Un pot est donn pour f ter la naissance de l enfant du futur dirigeant de la Scop 46 Mais un plan de Pentrep t de nuit semble pr sager une menace prochaine Un
44. it du Front populaire Cependant dans les deux sc narios l utopie que repr sentent ces projets collectifs se voit menac e par les r actions violentes du Reprise Les ditions Montparnasse patron les coups du sort ou les dissensions entre les associ s Dans l entretien film pour les compl ments du DVD Mariana Otero sou ligne les rapprochements possibles entre la situation d crite par son film et celui de Jean Renoir Comme dit Jane Rose il faut craindre le serpent m me quand il est mort En effet dans Le Crime de Monsieur Lange Batala le patron abandonne son imprimerie en faillite et se fait passer pour mort Les employ s reprennent Pimpri merie en coop rative Batala revient alors et esp re reprendre la main et r colter les b n fices mais Am d e Lange un employ pourtant docile le tue La Belle quipe dans sa premi re version se terminait aussi sur un drame plus douloureux puisque le person nage interpr t par Jean Gabin en venait tuer son ancien ami et associ Les producteurs refus rent ce d nouement tragique et Duvivier fut contraint de tourner une fin plus optimiste Fermetures d usines On pourra comparer la r action des salari s d Entre nos mains avec celle d autres ouvriers confront s la fermeture de leur usine en tu diant en classe des faits r els tels qu ils sont rapport s dans les jour naux ou montr s au cin ma Quelles sont les diff rentes possibilit s qu ont les ouv
45. leur il y a plein d autres choses et a on ne le voit jamais la t l vision parce qu on ne prend jamais le temps de montrer le monde ouvrier autrement qu en pleurs ou en r volte ce qui est important mais il y a aussi plein d autres choses montrer Le patron m avait donn l autorisation de filmer dans l entreprise ce qui est d j norme car il y a tr s peu de films documentaires qui se pas sent en entreprise Ce sont des lieux qu on considere comme priv s et sou vent les patrons ne veulent pas qu on vienne filmer Cela pose vraiment question dans un monde o ce qui domine c est justement l entreprise les rapports conomiques Et pourtant ca reste infilmable On dit qu on est dans un pays de libert d expression il n emp che qu il y a des lieux inter dits la cam ra 17 18 La chanson La lib ration de la parole des ouvri res atteint son sommet dans la s quence finale La chanson a t crite par deux employ s et mise en musique par Fred Fresson L analyse des paroles r v le une insistance sur l id e de col lectivit Le vocabulaire laudatif id a lise la Scop Les derni res phrases de la chanson sortent du contexte pour adresser un message d espoir tous ceux qui voudraient se lancer leur tour dans l aventure d une Scop Dans le film ce passage est interpr t par tous les protagonistes l unisson face la cam ra S comme solidaires Sortir du re
46. lle est entr e ici la pubert pour en sortir la m nopause Par ailleurs le d cor de cette entreprise de lingerie semble accentuer cette conscience f ministe et l id e germe dans les bureaux d aller d filer en sous v tements devant chez Cora afin de s duire nouveau l an cien client 19 20 FILIATONS Com die musicale Au d but du projet Mariana Otero avait imagin suivre la transfor mation de Starissima en Scop sur plus d un an et raconter cette aventure dans une s rie documentaire t l vis e comme La Loi du coll ge voir p 4 Insatisfaite de l utilisation de la voix off dans ce pr c dent film mais bien consciente de l importance de r sumer les pisodes pr c dents pour un spectateur qui d couvrirait le feuille ton en cours de route elle avait imagin d livrer ces informations sous forme de pr ludes chant s Le projet Scop n ayant pas pu voir le jour l id e d une saga documentaire a t abandonn e et avec elle les s quences musicales Mariana Otero explique combien ces images r v es sont rest es fortement pr sentes dans son esprit et ont donc naturellement refait surface deux reprises Lorsque le projet Scop s est vu menac la r alisatrice a envisag de tourner avec les salari s un clip musical dont la mise en ligne aurait pu susciter des investissements financiers ext rieurs Plus tard lorsque les emplo y s lui ont signifi qu ils ne souhaitaient pas que le film
47. mble ces deux dimensions celle de l entreprise et celle de l individu celle du travail et celle de la vie priv e famille loisir rapport au monde celle du politique et celle de l intime Le choix de l entreprise Je souhaite tourner dans une entreprise de taille assez modeste une vingtaine ou trentaine d ouvriers au maximum Je choisirai plut t une entreprise du secteur secondaire o le travail des cadres soit tres distinct de celui des autres salari s et ou la hi rarchie dans le travail est assez forte l Les personnages Je choisirai les personnages principaux quatre ou cinq parmi les cadres et les ouvriers Sans doute y aura t il plus d ou vriers que de cadres Je les choisirai en fonction de leurs diff rences l un pourra tre un ancien syndiqu l autre pas Lune pourra tre r ticente la cr ation de la Scop l autre enthousiaste Je les choisirai aussi en fonction de leur d sir de par ticiper au tournage La structure finale Je vois ce film comme une grande fresque roma nesque qui pourra durer entre trois et cinq heures compos e de plusieurs parties qui correspondront chacune plus ou moins l une des grandes tapes de cette aventure Ces parties pourraient faire l objet d pisodes de cinquante deux minutes au sein d une s rie documentaire t l vis e plus que d un feuilleton Ce film m lera les histoires singuli res de quatre ou cinq personnages pris dans une m me aventu
48. n d li vrant une information pouvant tre comprise sans lui contribue la dra matisation de l v nement Le carton marque ainsi un tournant partir de ce coup de th tre les p rip ties vont s accumuler 10 PERSONNAGES Un film choral Entre nos mains pr sente une grande vari t de personnages Si cer tains prennent une place plus importante que d autres on ne peut cependant pas d gager de personnage central Semblant suivre la lettre le pr cepte de la Scop une personne une voix Mariana Otero construit ici un film choral o diff rentes trajectoires indivi duelles se rencontrent autour d une aventure collective Alors qu on ne conna t pas toujours le nom ni la fonction de cha cun le film accomplit le miracle de faire exister tous ces individus en nous les rendant rapidement familiers La r alisatrice s int resse principalement trois types de personnages les ouvri res les d l gu s du personnel et les cadres D autres individus que Pon ne voit pas ou tr s peu jouent aussi un r le primordial puisque c est d eux dont d pend l avenir de l entreprise le patron les banquiers et les partenaires commerciaux Dans ce foisonnement de personnalit s C est le groupe des ouvri res qui sera l objet de plus d attention sa diversit tant au niveau des ges que des origines sociales ou cul turelles en fait un groupe plus vivant que celui des cadres qui semble davantage hom
49. ncore une fois que le documentaire ne doit pas craindre d utiliser les m mes effets de style et r gles dramaturgiques que les films de fiction Dans le film de Vicente Minelli Les Ensorcel s 1952 Kirk Douglas interprete le r le d un jeune producteur et r alisateur faisant ses pre miers pas Hollywood Suite de ridicules essais de costumes visant trans former de simples figurants en hommes chats monstrueux il comprend qu il n y a rien de tel pour susciter la peur chez le spectateur que la suggestion et le suspense car si l on montre tout alors l imagination n agit plus La r gle non c e dans ce film est un hommage d guis au film de Jacques Tourneur La F line 1945 qui par un jeu d ombres et de lumi res un travail habile du d coupage et du montage ainsi qu une virtuose partition sonore parvient sugg rer la pr sence de cr atures terrifiantes sans jamais les montrer ATELIER Hors champ a 6 Ll pl EE s p La Un film existe par ce qu il montre mais aussi par tout ce qu il ne montre pas ce qu il cache volontairement au spectateur ou ce qu il pr fere seulement sugg rer Essayer de rep rer ce qui n est pas mon tr dans un film ou dans une s quence pr cise peut permettre de mieux comprendre les partis pris du r alisateur Nous avons vu pr c demment combien le fait de ne pas montrer le patron de Starissima g n rait une tension int ressante pour la construction dramatiq
50. ngent leurs doutes 12 la pause d jeuner les d l gu s du personnel se deman dent comment faire pour convaincre les salari s encore h sitants 13 Jane Rose elle a d j pris sa d cision mais ne veut encore rien dire Plan g n ral de l entrep t et fondu au noir 14 Des doutes persistent 00 25 33 carton Une semaine plus tard La journ e commence par une petite sc ne dans les bureaux o l on apprend que les cadres travaillent tard 15 Dans les entrep ts on discute propos de la d cision probl matique de Sylvie qui explique qu elle est pour la Scop mais pr f re ne pas s engager pour l instant 16 Les discussions senchainent et d autres doutes percent peut on payer en plu sieurs fois Le montant investir peut il aug menter Une ouvri re asiatique a lair convaincue par la Scop La journ e de travail se termine avec ces questions en suspens 17 20 En avant 00 31 30 le lendemain on apprend que les chiffres de l entreprise remontent 21 Muriel continue de s interroger qu est ce qui va changer dans la nouvelle convention 22 Dans les ateliers comme dans les bureaux on remplit le formulaire 23 Des banquiers vien nent visiter l entreprise 24 Les rapports changent explique Val rie les diff rents employ s parlent davantage entre eux Elle s interroge sur sa l gitimit choisir le futur diri geant de la Scop 25 Le groupe des six discute auss
51. nique o tous les interpr tes jouent ensemble la m me partition Les cartons informatifs Hors g n rique le film est ponctu de six cartons Alors qu une voix off se fait souvent plus intrusive en interve nant sur les images elles m mes les cartons semblent plus neutres laissant les images se d rouler au pr sent Mais au del de cette neutralit apparente chaque carton poss de des fonctions informatives narratives et ou drama tiques particuli res Le premier carton Orl ans avril 2009 appara t juste apr s le titre du film et lance v ritablement le r cit donnant r trospectivement la pre mi re s quence une valeur de pr am bule Les informations sont tr s som maires On n est par exemple pas infor m du nom et des activit s de l entre prise La concision de ce premier texte proche de certains cartons utilis s dans les d buts de films de fiction permet de donner le ton du film et d affirmer une volont de ne pas trop guider le spectateur Le deuxi me carton Une semaine plus tard permet de donner une cer taine ampleur la premi re partie du film et de faire comprendre qu il s agit de suivre la naissance de la Scop sur la dur e Presque exactement la moiti du film appara t le troisi me carton Alors que la quasi totalit des salari s a d cid d entrer dans la Scop le patron fait une contre proposition Ce car ton dresse un premier bilan et e
52. nsitions La progression du r cit d Entre nos mains est ainsi r guli rement a r e par des sc nes plus silencieuses et descriptives vues ext rieures plans des entrep ts vides courtes s quences d arriv e et de d part de l entreprise viennent ouvrir ou clore une nouvelle journ e de travail et signifier le passage du temps Ces moments jouent aussi un r le de transition entre les diff rents espaces du film et permettent au spectateur de se rep rer dans les b timents de l entreprise Apr s douze minutes et trente secondes le film introduit un long temps de respiration s quences 6 et 7 Depuis la premi re sc ne l action a en effet avanc sans tr ve un rythme soutenu Apr s cette avalanche d informations et de questions une pause s av re n cessaire Suite une nouvelle r union du groupe des six commence alors une s rie de plans dont les actions et les dia logues ne sont pas directement li s au projet de Scop Cependant la phrase de Muriel qui ouvre la s quence Je sens qu il va y avoir de la bagarre fait de ce temps suspendu un moment de suspense Est ce un moment de tr ve avant l explosion des conflits Cette parenth se dans le d roulement de l action principale permet toutefois de d livrer de mani re plus t nue de nouvelles informations par un jeu de montage altern on comprend que l atelier piquage est divis en deux clans d un c t le groupe des piqueuses de Pautre le
53. ntre nos mains se construit ensuite dans une volont d largissement et de d cloisonnement des espaces En commen ant son film au plus pr s des ouvri res la r ali satrice affirme imm diatement son intimit avec elles et peut d s lors s loigner pour trouver la dis tance exacte qui lui permettra d tre la fois proche des personnages et sensible au d cor qui les entoure En effet le propos du film est bien d observer des personnes dans leur cadre de tra vail en montrant comment leurs relations sont amen es se modifier gr ce au projet de Scop Il tait donc essentiel de filmer en plans assez larges pour montrer l espace de travail de chacune Les tr s gros plans sur les visages ne reviennent que lors des sc nes de r union o cette fois la r alisa trice souhaite se concentrer sur la parole L espace du film est essentiellement int rieur On ne d couvre l ext rieur de l entreprise qu assez tar divement et les rares moments o l on sort des ate liers et des bureaux sont l occasion de tr s courtes sc nes de transition o les ouvri res se rendent au travail ou s accordent une pause cigarette Un plan ext rieur se distingue par la bouff e d espoir qu il semble faire na tre juste avant la fin du film Muriel d jeune seule au soleil La lumiere d t baigne la scene d une douceur m lancolique comme un temps de bonheur suspendu juste avant le coup de gr ce Au d but du film les diff
54. og ne Le film donne voir les particularit s de chacune Jane Rose cite un proverbe en lingala langue de la R publique D mocratique du Congo Thi Trang d crit une tradi tion religieuse pratiqu e dans son pays d origine une autre ouvri re chante en laotien tandis que Sylvie femme d agriculteur parle de vendre ses poules pour trouver l argent investir dans la Scop Ces personnages hauts en couleur prennent le devant de la sc ne et Entre nos mains malgr la pr sence importante de quelques personnages masculins en particulier l ancien patron et le nouveau diri geant est un film au f minin Tout en individualisant chaque personnage le film met en sc ne l mergence d une pens e collective Au d but du film chaque ou vri re arrive seule lusine et dans l atelier de couture les Fran aises et les Asiatiques semblent former deux clans bien distincts comme le fera remarquer plus tard Val rie Quand les ouvri res apprennent le projet de Scop elles h sitent d abord en parler entre elles et on comprend que c est chez elles aupr s de leur famille ou de leurs amis qu elles entendent prendre leur d cision Ainsi dans la pre mi re partie du film chacune ne parle que pour soi dans la retenue Puis petit petit le projet fait na tre une parole collective plus libre les ouvri res dialoguent entre elles changent leurs interro gations et se mettent dire nous Mariana Ote
55. olice pour n en citer que quelques uns et plus r cemment en France Por ganisation quasi militaire de l Op ra Garnier La Danse Raymond Depardon de son c t a explo r toujours sans aucun commentaire le fonction nement d un service hospitalier d urgence Ur gences d un h pital psychiatrique San Clemente et poussant plus loin encore l id e de neutralit de la cam ra a film en plans fixes un tribunal 10e chambre instants d audience ou les coulisses d un commissariat Faits divers Dans la froideur des rapports codifi s par l institution le cin ma direct semble trouver la distance exacte pour mener bien son projet d observation quasi scien tifique de notre soci t Cependant dans Entre nos mains Mariana Otero transgresse les r gles pro pres ce cin ma pour faire du film un territoire partag entre la personne qui filme et celles qui sont film es Cin ma participatif Contrairement ses films pr c dents Mariana Otero ne cherche pas ici gommer la pr sence de la cam ra Les personnes film es regardent sou vent l objectif et s adressent directement la r ali satrice Elle m me interroge r guli rement les employ s aux ateliers comme dans les bureaux mais ne conserve ses propres interventions que dans les discussions plus famili res avec les ouvri res comme pour affirmer sa plus grande complicit avec ces femmes artisanes En conservant aussi au montage les au revoi
56. qui p se encore aujourd hui sur l histoire de ces femmes confront es l avortement Ainsi dans chacun de ses films la question du lien social et de ses r gles tacites est mise au premier plan Mais cette observation des modes de fonctionnement collectif ne va pas sans une attention aux enjeux individuels et intimes Pour Mariana Otero filmer une aventure collective c est avant tout filmer la richesse des liens qui unissent les individus J ai voulu faire du cin ma quand j tais tr s jeune vers l ge de 13 ans J allais au cin ma tous les samedis soirs c taient des moments de f te Je ne connaissais que le cin ma de fiction parce que j habitais en province et qu l poque il n y avait pas de documentaires dans les salles Et puis je n avais pas la t l vision J ai d cid tr s jeune que je ferai PIDHEC qui tait la grande cole de cin ma Paris On y faisait surtout de la fiction Et j ai t tr s d ue Je wai pas du tout aim le fait d crire des sc narios d attendre avant de tourner je n ai pas aim le travail d quipe cette lourdeur qui oblige jouer avec les ego des uns et des autres cette artifi cialit En sortant de PIDHEC j tais un peu d sesp r e car je voulais encore faire du cin ma je voulais raconter des histoires mais je n aimais pas du tout la fa on dont le cin ma se fabriquait Par hasard j ai rencon tr les Ateliers Varan qui m ont propos de filmer des r p
57. r que lui adressent les cou turi res avant de partir en week end elle souligne l importance de la relation qui est en train de se tisser entre elle et les ouvri res Elle d voile ainsi combien la pr sence de la cam ra a t importan te pour ces femmes qui dans un premier temps ne comprenaient pas l int r t que leur portait la r alisatrice et qui ont ensuite r alis l importance de laventure qu elles taient en train de vivre ensemble Elles inventaient leur avenir et dans le m me temps elles taient les h roines d un film D abord impressionn es par la pr sence de la cam ra elles ont ensuite compris que ce projet de film et la pr sence encourageante de la r alisatrice qui semblait croire leur projet leur donnaient davantage de force pour essayer de construire ce projet collectif Le film n est donc pas seulement un t moignage sur une r alit ext rieure il fait partie du processus d mancipation de ses person nages Avec Entre nos mains Mariana Otero trans forme aussi son propre cin ma elle invente un cin ma de l change un cin ma participatif o le film devient lui aussi un projet commun Un film coop ratif en somme En effet si le film a trans form ces femmes celles ci ont en retour influ sur la construction du film le plus bel exemple tant la s quence finale de com die musicale n e de leur refus que le film se termine sur un chec Le film permet de soulever nouveau le
58. r ni re configuration celle o les employ s reprennent une entreprise sur le point de fermer lui semble cin matographiquement parlant la plus int ressante car les enjeux y sont plus importants il s agit pour les salari s d essayer de sauver leurs emplois et la situation plus ris qu e Elle imagine suivre cette transformation sur la dur e un an ou deux et construire comme pour La Loi du coll ge une s rie docu mentaire Les difficult s s encha nent Le projet commence prendre corps mais il s av re plus difficile financer que La Loi du coll ge car le sc nario n est pas aussi pr visible et stable qu une ann e scolaire Si elle d cide de suivre une Scop d s sa naissance elle devra donc filmer d s le premier jour o la res ponsable du r seau se rend dans l entreprise pour rencontrer les salari s Ce dispositif entra ne de grosses difficult s logistiques puisque la r alisation de son film d pend de nombreuses personnes mais aussi d une bonne part de hasard Les responsables des r seaux vont ils jouer le jeu et l informer de chaque entreprise qui d cide de se transformer en Scop Le patron autorisera t il le tournage Les employ s accepteront ils d tre film s quel genre d entreprise sera t elle confront e Le projet de Scop aboutira t il ou non Avec toutes ces questions en suspens il devient tr s difficile d crire un dossier type de demande d aide la production pour le CN
59. re collective mais qui ne la vivront pas de la m me mani re Ce sera un film choral o le sens na tra de l interaction et des diff rences entre les volutions de chacun des personnages Ces r volutions int rieures au c ur d un m me dessein collectif seront racont es en m nageant de grandes ellipses le film ne se perdra pas dans les d tails techniques de la transformation et de la nouvelle organisation de la Scop tout ne sera pas forc ment expliqu de mani re pr cise et d taill e Extraits du texte crit apr s tournage Le montage et le sens du film La construction g n rale du film va pouser la chronologie des v nements la dramaturgie propos e par le r el Mais je vais au montage sc nariser cette chronologie du r el ciseler cou per raccourcir ellipser reserrer non seulement les v nements mais aussi les dialogues et les sc nes afin de faire merger au del de l histoire des axes forts et des probl matiques qui m int ressent en termes humain politique et conomique l Le sc nario au final va donc s crire pendant le mon tage l Le rythme et le ton du film Le film va alterner des sc nes de r union en haut chez les cadres et d autres en bas avec les manutentionnaires et les couturi res Les m mes probl mes et questions sont parl s et pens s tout fait diff remment selon qu ils sont abord s par ceux d en haut ou par ceux d en bas et c es
60. rents espaces semblent cloisonn s Le montage marque une s paration importante entre les groupes et insiste sur Poppo sition entre le haut les bureaux et le bas les ate liers et Pentrep t M me la salle manger qui pourrait tre un espace commun n est pas inves tie au m me moment par les diff rents employ s et Pon peut supposer que les pauses d jeuners ne sont pas les m mes pour les cadres et les ouvriers Pourtant petit petit ces diff rents personnages se rencontrent et sont m me amen s partager les m mes lieux au cours de discussions en petits groupes ou lors de r unions collectives propos es par les porteurs du projet Scop ou par le patron Le film se conclut sur un symbole fort de ce bou leversement des hi rarchies venue dans les bureaux pour observer d en haut les entrep ts o elle travaille Sylvie conclut malicieusement on a une belle vue l La r alisatrice qui s est d abord employ e filmer chaque personne individuellement en plan fixe semblant recueillir leur parole comme une confi dence cherche suivre de plus en plus les changes entre les ouvri res La cam ra se permet davantage de mouvements des panoramiques accompagnent les discussions entre Muriel et Sylvie et se fait de plus en plus attentive aux espaces de transition les portes communiquant entre les bureaux et les ateliers deviennent peu peu des l ments impor tants du d cor Le film devient plus
61. riers pour essayer de sauver leur emploi Comment le cin ma peut il t moigner de ces diff rentes luttes et quelles formes cin matographiques privil gient ces films engag s On pourra visionner des extraits de Louise Michel de Beno t Del pine et Gustave Kervern 2009 ou les films documentaires Reprise d Herv le Roux 1996 Les Lip l imagination au pouvoir de Christian Rouaud 2007 ou R ves d usine de Luc Decaster 2008 en observant par exemple comment ces derniers utilisent les interviews pour mieux exprimer leurs revendications Pourquoi Mariana Otero a t elle refus ce dispo sitif et quels effets sur le spectateur ce parti pris engendre t il Condition f minine L veil politique des ouvri res d Entre nos mains se teinte d une prise de conscience f ministe On pourra relever dans le film les diff rents moments o les ouvri res questionnent la place de la femme dans la soci t et dans l entreprise Val rie accuse la trop grande part de t ches m nag res assum es par les femmes Nettoyage repassage gamins On dirait qu on est faites pour a Sylvie explique combien elle a besoin de conserver son travail pour ne pas d pendre de son mari De son c t Jane Rose explique que si elle a discut du pro jet de Scop avec son poux la d cision finale lui revient elle puisque c est elle qui bosse No mia rit am rement en pensant que ce travail correspond toute sa vie de femme puisqu e
62. ro explique combien la mixit sociale des employ s de Starissima a t l une des raisons qui Pont convaincue de tourner son film dans cette entreprise Elle a aussi t s duite par le fait que la majorit des employ s soit des femmes car elle pressentait que la r volution intime qu elle souhaitait filmer serait peut tre plus pro fonde encore que chez des hommes Devenir actrice La premi re fois que Muriel est film e elle enl ve ses lunettes se recoille et semble un peu g n e Elle est ensuite de plus en plus naturelle et la fin du film elle s amuse m me de la pr sence de la cam ra et jette la r alisatrice des regards complices elle est deve nue une v ritable actrice Au d but les changes taient un peu fig s car elles taient mal laise devant la cam ra Il y avait beaucoup de temps morts il a fallu couper beaucoup Puis au fur et mesure elles ont pris confiance et du coup entre elles c tait plus naturel Elles sont deve nues excellentes dans les sc nes Pour la s quence du poulet c est Muriel qui fait la sc ne Il y a une aisance li e l volution de tout le monde elles et moi Apr s le film Mariana Otero est rest e en contact avec certaines des employ es Elle peut ainsi r pondre la question que se pose immanquable ment le spectateur la fin du film que sont devenus les employ s et en particulier les ouvri res de Starissima Elles ont toutes trouv
63. s cadres patron n ont pas le m me rap port au langage Le patron s exprime par crit via une lettre dans laquelle il entend convaincre les employ s de son nouveau projet ou bien lors d entre tiens individuels d stabilisants chacun son tour on y a droit une demi heure tu sors tes en vrac raconte une employ e Le maniement habile du langage est un outil qui lui permet de conserver son pouvoir par ses propos complexes et bien huil s il parvient semer le trouble J ai pas tout compris Apr s il faut lP plucher Mais de la fa on dont c est tourn j ai pas l impression qu il ait envie de travailler avec nous commente Laurent apr s avoir lu la fameuse lettre Les cadres aussi ont la parole ais e mais ils se posent constamment le probl me de la communication avec le reste des employ s ils r fl chissent longtemps la juste formulation du texte qu ils font circuler et d cident de mettre en place des discussions par petits groupes afin de mieux expliquer leurs id es Quant aux d l gu s du personnel ils circulent dans les ateliers et entrep ts afin de discuter individuellement avec les ouvriers Cependant ils ne s av rent pas toujours tr s bons p dagogues Laurent par exemple ne sait pas toujours trouver les bons arguments La parole des ouvri res se r v le la plus int ressante car elle est la plus vivante c est une parole en gestation qui se transforme et se module au fur et mesure de
64. s de h ros unique aux qualit s exceptionnelles mais un groupe d individus plut t ordinaires qui vont pourtant vivre une aventure exceptionnelle dont ils sortiront grandis Ces multiples personnages s entrai dent ou s affrontent ils sont adjuvants de la qu te Sylvie Nourry les employ s les banquiers ou opposants le patron Cora les banquiers encore Le film va m me jusqu emprunter aux r gles du th tre classique unit de lieu unit d action tandis que la s quence de com die musicale n est pas sans rappeler les ch urs des trag dies antiques Ici le ch ur pr sente la particularit d tre constitu par les personnages principaux et non par des intervenants ext rieurs Les h ros eux m mes se font ainsi les commentateurs de leur propre histoire ce qui permet de mettre en avant leur attitude r flexive et la naissance de leur regard critique sur la situation complexe qu ils ont travers e Un r cit en trois mouvements La construction dramatique du film est soutenue par le travail du montage qui vient donner chaque tape du r cit un rythme propre progression lente pour la sc ne d exposition situation trouble qui s claircit graduellement accumulation des p rip ties accalmies et relances acc l ration jusqu au der nier revers puis decrescendo et final harmonieux Le vocabulaire musical peut ainsi s av rer tr s appropri pour d crire la construction d un r cit cin mato graphique
65. s interroger personnellement sur l int r t et la viabilit d un tel projet St r otypes et images interdites Mariana Otero s interroge sur les images de l entreprise et du monde ouvrier que v hiculent les m dias francais La puissance respective des clich s et des tabous menacent la repr sentation de cette r alit sociale D autres documentaristes tels Marcel Trillat 300 jours de col re Les Prolos Femmes pr caires Jean Louis Comolli La Vraie Vie dans les bureaux Claire Simon Co te que co te ou Sophie Bruneau et Marc Antoine Roudil Ils ne mouraient pas tous mais tous taient frapp s ont film les luttes ouvri res le monde de l entreprise ou la souffrance des travailleurs mais ces uvres ne b n ficient pas tou jours d une large diffusion la t l vision on montre tr s peu les ouvriers Soit c est parce qu ils font gr ve et ils sont en col re et c est normal car comme on leur donne cinq minutes pour parler il faut qu ils disent ce qui ne va pas soit len treprise ferme et ils pleurent et c est normal aussi parce qu on les filme juste ce moment l parce que c est ce que veut la t l vision les larmes etc Les femmes de Starissima ont pleur elles aussi mais pas devant moi et surtout pas devant la cam ra et je n aurais de toute fa on pas film car ce n est pas ce qu elles voulaient raconter Dans le film elles le disent on a pleur hier mais une fois qu elles ont p
66. se d signe ainsi comme une artisane du cin ma qui se positionne galit avec les personnes qu elle d sire filmer Ce proc d de mise en abyme le film montre le film en train de se faire ici subtilement d guis est fr quent au cin ma et de nombreux incipit de films s amusent d signer leur outil de travail En effet le g n rique s av re le moment id al pour ce genre d exercice car il s affirme comme un espace de signature privil gi accord l auteur Observer sur quelles images les noms du r alisateur et ceux des membres de l quipe apparaissent permet sou vent d obtenir des indications int ressantes sur la conception du cin ma que d fend le r alisateur On peut penser Edward aux mains d argent de Tim Burton 1990 dont les mots du g n rique d filent sur un enchainement de m canismes complexes mis en place par un savant fou Le r alisateur s amuse associer chaque m tier du cin ma l un des rouages de ces tranges machines et celui du monteur est videmment associ aux ciseaux objet crucial du r cit Plus largement cette mise en parall le permet de placer l excentrique r alisateur sur un pied d ga lit avec son personnage Ing nieux exp rimen tateur des techniques cin matographiques Tim Burton sait lui aussi donner vie des cr atures monstrueuses D cloisonner l espace Bien qu il d bute sur une s rie de gros plans iso lant des morceaux de corps E
67. se termine sur un sentiment d chec l id e de la com die musicale s est nou veau impos e elle semblait le moyen parfait pour r enchanter leur histoire et donner la fin du film une note d espoir Le chant serait un beau prolongement du mouvement d mancipation sensible tout au long du film les personnages t moignant d un regard critique envers leur situation et apparaissant plus solidaires que jamais en s exprimant Punisson Mariana Otero explique je me suis dit que cette s quence allait enchanter le film comme la coop rative avait enchant l entreprise La difficult principale tait de parvenir raccorder deux genres cin matographiques aux codes si diff rents les effets de r el du documentaire et la mise en sc ne plus th tralis e de la com die musicale Avec l aide d un r alisateur de fiction Pascal Deux Mariana Otero a t ch de lier cette s quence au reste du film La qualit des images reste la m me les gestes du travail continuent et les voix sont toujours synchrones Seul changement radical la cam ra s autorise quelques travellings d accompagnement r alis s gr ce aux chariots utilis s dans les magasins de l entreprise Ces dif f rents partis pris en particulier la volont de conserver un son direct ont fait du tournage une exp rience hors norme En effet les com dies musicales sont habituellement tourn es en play back pour privil gier malgr le d coupage un
68. son synchronisme avec l v nement et son d sir d objectivit pas d interven tion affich e du cin aste mais un long travail d ob servation et une attention silencieuse une r alit qui se d voile d elle m me sans tre d crypt e par un commentaire ou expos e dans le cadre d entre tiens La r alisatrice d Entre nos mains rapproche volontiers son travail de celui de l Am ricain Frederick Wiseman des Canadiens Pierre Perrault et Michel Brault ou du Fran ais Raymond Depardon Comme eux elle cherche un rapport plus direct avec le r el et se positionne en obser vatrice de notre soci t Elle aussi est la fois r a lisatrice et cadreuse et tourne ses films accompa gn e uniquement d un preneur de son exception faite d Histoire d un secret o tant un personnage du film elle s est vue oblig e de confier la cam ra un op rateur La naissance du cin ma direct est intimement li e l volution technique de Poutil cin matogra phique En effet pour que cin ma direct il y ait encore fallait il qu il existe des cam ras assez l g res pour tre port es par un op rateur et qui soient assez silencieuses pour permettre d enregis trer simultan ment du son direct Jusqu au d but des ann es 1960 les cam ras 35 mm p sent extr mement lourd n cessitant d tre pos es sur pied et mani es par un ou plusieurs op rateurs Le bruit de leur moteur est si important que les films sont bien sou
69. t ce qui rend passionnant cet aller et retour entre le haut et le bas Le film va passer d un service l autre et alterner les sc nes en s appuyant tout autant sur le langage que sur les v nements Ou dit autrement les mots doivent faire partie des v nements non pas par rapport l informa tion qu ils v hiculent mais par rapport aussi ce qu ils charrient comme sous texte comme sous entendu ou comme vision du monde On pourra monter parfois sur la parole non pas seulement pour faire avancer lhis toire mais plut t pour que les uns c t des autres les mots puissent r son ner de toute leur ampleur Le montage sonore tout autant que le rythme des images rendront pr sente la r p titivit du travail Ils apporte ront une musicalit au film qui donnera une forme d vidence la s quence finale de com die musicale dont Porchestration est compos e de bruits de machines coudre et du bruit des scotchs Unit de ton unit de son de personnages et de texte incluront cette s quence dans la continuit Et tout au long du film la musique des mots des gestes et au final de la chanson pourra contribuer donner ce film son aspect enchan teur en d pit de l chec final TECHNIQUE Montage Le montage est une tape particuli rement importante dans la r alisation d un film documentaire Il ne s agit pas seulement d une op ration d assemblage mais v ritablement d un travail
70. t difficile d associer les mains des visages et de relier les tapes de travail cette fois la s quence est mont e de mani re plus lin aire On est pass d un montage de type impressif un montage de type narratif dans le d but du film le montage insistait sur des impressions alors que dans ce deuxi me moment il commence raconter une histoire On peut maintenant relier les visages aux mains et comprendre le lien entre les diff rentes t ches des ouvri res puisque c est le m me tissu que d coupe l une et que va coudre l autre Ces personnes qui nous taient d abord apparues comme les l ments d un groupe clat sem blent maintenant former un groupe plus harmonieux 1d La r union Cette fois encore le raccord sonore est sec le coup de ciseaux de la couturi re lance la phrase de Sylvie Nourry qui lance son tour l image On comprend cette fois que Sylvie Nourry ne fait pas partie des employ s de l entreprise Elle annonce que le projet semble pos sible l impression d change est l aussi plus forte que dans la pre mi re partie de la r union o Sylvie Nourry lisant le texte tait la seule parler Maintenant la parole circule entre les diff rentes personnes le Lentrep t Nous d couvrons un nouvel espace un entrep t o deux ouvri res changent quelques mots tout en travaillant Ainsi la gradation dans la communication continue Les ouvri res film es sont toujours celles qui ti
71. tis au cin ma propose des ressources compl mentaires au pr sent livret capta tions de journ es de formation partage d ex p rience Consultez votre coordination ou retrouvez ces liens sur le site Image Cin ma coop ratif Entre nos mains propose une approche documentaire originale mi chemin entre Pobjectivit du cin ma direct et l engagement du cin ma militant En suivant sur plusieurs mois des employ s qui tentent de transformer une entreprise en faillite en Soci t Coop rative et Participative Mariana Otero rend visible la naissance d une parole politique et l panouissement personnel que peut repr senter l la boration d un projet collectif Le film se veut intime autant que poli tique pas de grands discours mais une attention aux bouleverse ments petits et grands qu entra ne cette red finition du fonction nement de l entreprise et de la place des travailleurs La force du film est d avoir fait bien plus que capter cette aventure humaine l image du projet d fendu par les ouvriers la r alisatrice a construit un cin ma coop ratif et participatif qui accompagne et partage leurs doutes et leurs espoirs La recette un long temps de rep rages une immersion totale lors du tournage un travail minutieux de montage le tout accompagn d une pr cision dans la construction dramatique qui permet d organiser les micros v nements du r el en un r cit riche en suspense et rebondissements
72. u titre Tous les salari s de Pentre prise ou plus sp cifiquement les couturi res Le doute est lanc d au tant que le son voque l image d j vue d une main en train de coudre En effet ce sont les ouvri res qui prendront le plus de place dans le film Mais pour le moment elles restent silencieuses La parole pr cise et didactique est port e uniquement par Sylvie Nourry E R P mi ll Y a Tr E Di al ar Tei E PETITIE E 14 738 js LE entre nos mains Du montage altern au montage choral Lors de la d couverte de la contre pro position du patron le montage met en relation d une autre fa on les diff rents protagonistes de l histoire Il ne s agit plus ici de montage altern mais de montage choral puisque la lettre est lue morceau par morceau par diff rentes voix et dans diff rents lieux Par sa forme cette s quence annonce en quelque sorte la com die musicale finale Le moment le plus fort est celui o Muriel lit le texte haute voix pour ses coll gues les piqueuses qui semblaient un peu l cart au d but du film sont maintenant partie prenante des r flexions du groupe des coutu ri res Le geste de No mia et la fa on dont elle les nomme Vous coutez les filles montrent bien leur nouvelle complicit Comme lors de la s quence d ouverture le choix de montage ac compagne ainsi le propos du film 19 16 Champ contrechamp F
73. ue du r cit On peut demander aux leves d identifier d autres l ments que Mariana Otero n a pas souhait faire appa ra tre dans son film puis de r fl chir aux effets que produisent ces multiples restrictions Le film ne d taille pas toutes les activit s de l entreprise on ne sait pas en quoi consiste le travail de chaque personnage on ne s attarde pas ou tr s peu sur la description du savoir faire des uns ou des autres on ne voit jamais les clients et Pon ne sait rien des relations avec les ateliers de confection en Chine dont on peut seulement apercevoir une carte derri re une des employ es pendant la s quence finale Certains rebondissements ne sont pas bien expliqu s on com prend par exemple qu un des employ s du groupe des six lori gine du projet est parti mais cela reste flou De m me la visite de l entreprise par les banquiers est montr e de telle mani re que ces derniers sont mal identifi s ce qui suscite linqui tude du specta teur Par ailleurs des ellipses temporelles laissent vraisemblable ment de nombreux micro v nements dans l ombre Les employ s ne sont jamais film s hors de leur cadre de travail La r alisatrice avait d abord pens filmer certaines ouvri res chez elles afin de mieux observer ce que le projet Scop venait aussi bou leverser au sein des relations familiales mais elle a finalement aban donn l id e estimant qu il serait plus efficace po
74. ur le r cit de se concentrer sur un seul lieu celui du travail et des relations des ouvri res entre elles et avec leur hi rarchie On passe sous silence l histoire de l entreprise et le pass des rela tions entre les employ s Le film aurait pu nous en dire davantage sur les Scops et sur les difficult s auxquelles elles sont confront es Cette liste non exhaustive des aspects que Mariana Otero a choisi d carter montre combien le travail de r alisation est avant tout un tra vail de choix on ne peut pas tout dire on ne peut pas tout montrer encore moins en une heure et demie La r alisatrice concentre notre regard sur ce qui importe vraiment l volution personnelle de chaque ouvri re au sein d un projet collectif et la naissance fragile d une parole politique Cette volont d purer le r cit a aussi un autre effet en refusant de donner certaines informations contextuelles au specta teur la r alisatrice Poblige se faire plus attentif chaque situation chaque change verbal Il n a pas imm diatement toutes les cartes en main pour comprendre ce qui se joue au sein de l entreprise et doit tre davantage l coute de ce que peut lui apprendre chaque personnage Il se retrouve en quelque sorte dans une position similaire celles des ouvri res qui ne comprennent pas tout des enjeux du projet Scop il les regarde et les coute donc d gal gal et comme elles il est amen
75. vent post synchronis s la bande son est reconstitu e apr s le tournage L volution technique entra n e par le d veloppement des reportages t l vis s permet d all ger consid rable ment les cam ras 16 mm de faciliter Penregistre ment du son synchrone et contribue transformer radicalement le cin ma De jeunes cin astes s em parent de ce nouveau mat riel plus maniable et moins on reux et quittent les studios pour filmer la rue cam ra l paule et imaginer des fictions novatrices les premiers films de la Nouvelle Vague en France en sont un bel exemple ou inventer un nouveau genre de cin ma documentaire le cin ma v rit de Jean Rouch le cin ma direct des r alisateurs de l ONF au Canada ou de Richard Leacock et ses collaborateurs aux tats Unis Filmer les institutions Un autre aspect qui permet de rapprocher le tra vail de Mariana Otero et celui de Frederick Wiseman ou de Raymond Depardon est leur int r t com mun pour les institutions Mariana Otero a film une prison un college une t l vision commer ciale et une entreprise en observant dans ces lieux extr mement polic s les ressorts du pouvoir et de l organisation sociale en France mais aussi au Portugal Cette t l vision est la v tre C est aussi le projet de Wiseman qui a film de nombreuses institutions am ricaines Titicut Follies dans un h pital psychiatrique High School dans un lyc e Law and Order sur la p
76. x au propos du film et pressent qu elle sera amen e filmer davantage les ouvriers c t de ces pr visions qui s av reront justes certaines envies devront tre abandonn es par exemple celle de construire une grande fresque romanesque Dans le deuxi me texte crit apr s le tournage Mariana Otero peut d crire pr cis ment l entreprise les personnages et raconter le film presque comme pour un sc nario de fiction Concernant le montage le texte se fait nouveau prospectif mais le futur proche donne cette fois le sentiment que le film est sur le point de trouver sa forme finale On remarque limportance accord e au langage th me qui n avait pas t mis en avant dans le projet de d part Extraits du texte crit avant tournage premi res intentions Ce que je veux ce n est pas filmer l histoire d une entreprise qui devient une Scop ni raconter une exp rience collective de mani re objective ou du point de vue du groupe ni faire un film sur la mani re dont le pouvoir se redistribue au sein d une coop rative Ce que je veux c est construire un r cit et le filmer de mani re faire prouver le bouleversement intime que vont vivre les salari s du fait du changement politique profond que repr sente l organisation coop ra tive en racontant l histoire singuli re de quatre ou cinq d entre eux L enjeu du film et de sa mise en sc ne r side dans ma capacit faire tenir ense
77. x institutionnels prison coll ge t l vision Mariana Otero d si rait cette fois s int resser un lieu qui essaie de bouleverser ces codes Un jour elle lit un article de journal sur les Scop soci t coop ra tive et participative et pressent tout l int r t politique et humain que peut repr senter une telle aventure Elle d cide donc de ren contrer des employ s de coop ratives ainsi que des responsables du r seau Scop On ne peut pas vraiment parler encore de rep rages car elle ne sait pas alors si un film est possible et surtout quelle forme il pourrait prendre En recueillant les t moignages des personnes qu elle rencontre elle commence distinguer les diff rentes tapes qui ponctuent chaque cr ation de Scop et que l on retrouvera dans Entre nos mains la premi re r union avec le responsable du r seau une p riode de questionnements et de doutes la mise en place financi re de la Scop le choix d un d l gu et bien souvent les dif ficult s pos es par l ancien patron Plus largement trois sc narios sont possibles suivre une Scop qui se cr e ex nihilo ou bien qui na t partir d une entreprise saine ou encore d une entreprise en faillite La r alisatrice comprend que c est la transformation d une entreprise traditionnelle en Scop qui seule pourra permettre d observer ce qui l int resse profond ment le bou leversement des r gles et des rapports sociaux Par ailleurs la de

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