Stylistique et génétique. Pour une nouvelle approche
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1. L ouvrage s ouvre ainsi par les trois coups du qu est ce qu crire trois temps d une r flexion men e par B No l depuis 1989 et dont le troisi me volet est in dit pour La Licorne Cette entr e en mati re pose d embl e la question du corps crivant et de l criture elle s interroge sur la pr sence dans l acte d crire du corps et de sa m moire si toute uvre crite est en effet une machine de langage cette machine de langage ne serait elle pas une sorte de corps ext rieur construit pour sortir du n tre afin de mettre hors de nous la rumeur de la mortalit et les hantises d avant la langue p 19 La r flexion se poursuit par un entretien avec A Emaz interrog par S B douret Larraburu celui ci voque notamment les deux temps de l criture celui du premier jet dans l urgence du dire et celui du travail du texte processus de relectures successives beaucoup plus lent et les deux tats du po me d abord une sorte de magma de langue pr c dant le travail de menuiserie avant de proposer une distinction entre le style relevant de l unit d criture d un livre et la voix qui concerne l unit d une uvre Entre les trois grands ensembles chafauder riger r nover de l architecture dynamique de l ouvrage ont t am nag s des espaces intersticiels nomm s en reprenant la proposition de J Roubaud entre deux chapitres et qui sont en r alit des espaces r2. d conomie et d expressivit partir de diff rents tats d un po me de Peau et de l analyse critique livr e par l auteur lui m me dans le cahier de r flexion Cambouis Examinant les corrections des preuves de Du c t de chez Swann I Ser a s int resse au mouvement de l interpolation en s appuyant sur le concept de continu et sur les traces tangibles du mouvement de l criture que sont les signes de ponctuation m moire du texte p 246 et d crypte ainsi la perp tuelle expansion en intercalage et selon un mouvement d apr s coup de la r criture proustienne Au terme du parcours G Philippe propose une r flexion sur le statut stylistique des variantes paraphrastiques dans un manuscrit de Sartre r cit du voyage de 1960 Cuba Ce texte au croisement de l autobiographie et de l analyse politique fait tat d une activit de r criture qui r duit essentiellement la variation stylistique une op ration de reformulation paraphrastique en mettant en relation un ensemble de s ries G Philippe montre qu il est possible de faire appara tre une forme de congruence d placement des compl ments adjoints vers le centre de la proposition variation lexicale manifestant la recherche de termes moins marqu s id ologiquement et invite envisager m thodologiquement la r criture de fa on globale tout en maintenant l id e que la r flexion stylistique ne peut se construire sans se confronte
3. gen se stylistique g n tique La premi re partie intitul e chafauder ouvre le vaste chantier d une stylistique de la gen se et rassemble une s rie d articles plus volontiers th oriques qui interrogent la notion de style en montrant que la prise en compte n cessaire de la dimension processuelle dans l approche stylistique de la gen se oblige repenser ou du moins questionner des cat gories fond es jusqu pr sent sur la cl ture et la stabilit Anne Herschberg Pierrot reprend la perspective d une stylistique transformationnelle en l orientant du c t des transformations des tats de la gen se dont l objet serait l criture en mouvement parcours stylistiques singuliers et interroge la conception plus transversale d une po tique des styles de la gen se historicit et aspects sp cifiques de la gen se travers la notion de rythme Le style de gen se est ainsi pens en relation avec le mouvement de diff renciation singuli re d une gen se comme une rythmique d ensemble qui int gre des rythmiques particuli res La rythmique concerne le mouvement de l criture au sens graphique de la scription au sens r dactionnel de l criture p 59 La construction d une po tique de l criture en mouvement devient alors l objet de la stylistique F Pennanech s appuyant notamment sur les crits de L Spitzer et de M Riffaterre puis dialoguant avec ceux d A Herschberg Pierrot choisit d interroge
4. la po tique de la gen se B Weck cherchait mettre en avant l uvre non plus monumentale mais movimentale exhibant l dification dans le but avou de cr er un nouveau genre litt raire Il propose selon une approche f conde qui envisage dans la lign e des travaux d Anne Herschberg Pierrot le style comme un processus de transformation l oppos d une cat gorie homog ne et stable de prendre en consid ration le mouvement dans sa totalit de r futer l id e d une autonomie de la critique g n tique et de l avant texte pour promouvoir celle d une compl mentarit avec l tude du texte sinon achev du moins arr t par l auteur p 9 La critique g n tique qui a pour objet d tude les brouillons les notes la progression r dactionnelle les ajouts les ratures se proposait d analyser l acte d crire en tant que processus dynamique po tique de l criture d veloppement transformations et opposait cette tude allant jusqu l exclure afin de se pr munir de toutes tentations t l ologiques la po tique du texte texte entendu comme ach vement et donc statique L ambition affirm e est ici de rassembler po tique de l criture et po tique du texte au sein d une m me approche transversale une po tique de l uvre mouvante allant de l avant texte au texte m me du manuscrit l uvre imprim e la notion de style se comprend alors en fonction d une tension et doit tre r inte
5. 005 p 181 4 Il s agissait galement de sortir de l id ologie du texte clos avanc e par le structuralisme 5 Herschberg Pierrot A Le Style en mouvement Litt rature et art op cit p 181 processus non plus restreint ou ferm mais ouvert partir de l avant texte envisag comme t moignage et comme l ment de la construction dynamique C est donc une conception ouverte de la stylistique que nous am ne cet ouvrage en interrogeant de fa on constructive tous les aspects pertinents de ce croisement disciplinaire Style et uvre sont ainsi envisag s comme des ph nom nes dynamiques et ouverts selon une tripartition chafauder riger r nover laquelle structure judicieusement l difice en articulant contributions th oriques et tudes monographiques sur le passage l criture et le travail de r criture I Ouverture et entre deux chapitres ateliers intimes Une des qualit s de cet ouvrage repose sans nul doute sur le dispositif original qui permet de faire entendre l ouverture ou la crois e d un chapitre la voix des auteurs Aux travaux de S Bikialo et S P tillon sur les dossiers g n tiques de B No l ou l analyse de S B douret sur ceux d A Emaz font cho judicieusement le questionnement et la r flexion des auteurs A l ouverture place est laiss e la parole des po tes B No l et A Emaz lesquels nous font p n trer l atelier intime de la m moire et du corps crivant
6. Stylistique et g n tique Pour une nouvelle approche du style J Rault Dans l atelier du style Du manuscrit l uvre imprim e La Licorne n 98 tudes r unies et pr sent es par S Bikialo et S P tillon PUR 2012 En faisant le choix de l atelier lieu du travail montr qui donne voir l bauche l inachev mais surtout le jaillissement le titre de cet ouvrage manifeste imm diatement la volont de mettre en avant l artisanat du travail des mots Ce volume critique de La Licorne dont la couverture offre un aper u du travail de l artiste peintre J P Richard sur la feuille propose ainsi un retournement en amont du c t du processus de cr ation Du c t du travail de menuiserie selon le mot d A Emaz atelier de astelle morceau de bois coup Du brouillon Du travail en cours Quand l auteur se d couvre man uvrant c est dire uvrant la main sur un document vivant avec lequel il semble faire corps On repense alors la notion de scription selon l ultime acception donn e par R Barthes dans les ann es 1970 celle qui relie la production du texte au corps et se d finit par l acte musculaire d crire le geste par lequel la main prend un outil le poin on le style Le volume num ro 98 de La Licorne offre au lecteur une visite dans l atelier du style dans l espace de l uvre parmi les reproductions et les transcriptions de manuscrits avec pour initiateur et guide Francis Ponge dont
7. annoux laquelle s attache montrer que le processus de recherche de l avant texte inachev discontinu fragmentaire caract ristiques de l criture sc narique innerve le journal et construit une criture en tension li e aux ind cisions g n riques traces autobiographiques et r cit fictionnel Du manuscrit l uvre imprim e se joue la transition progressive d une criture sc narique notation d id es un style sc narique i e une criture de l exp rience ouverte IV R nover le pluriel du texte L ultime tape est consacr e aux ph nom nes d criture seconde qui concernent les ratures et la r criture de soi Chaque contribution semble mettre en avant un p le diff rent du travail de r criture substitution V Nabokov suppression A Emaz extrapolation M Proust variations d placements J P Sartre Le propos d O Anokhina porte sur la traduction anglaise des uvres de V Nabokov traduction retravaill e par l auteur lui m me selon trois principales orientations recherche des effets sonores cr ativit lexicale et multilinguisme Ce processus de r criture met en avant un ensemble d exigences constantes tout en signalant une volution des pratiques scripturales de l auteur de Lolita S B douret Larraburu analyse selon une perspective rythmique mouvement et musicalit la po tique de l chafaudage du po te A Emaz fond e sur le refus du style litt raire et sur l exigence
8. ation critique entre rh torique et logique Eric Bordas met ainsi l accent sur l impens th orique sur lequel repose une discipline qui n a jamais pris conscience de son objet En faisant l conomie d une th orie propre de la valeur la stylistique reste tributaire d une conception de la valeur relevant d une essence langagi re esth tisable pos e par une institution respectable p 86 et se condamne l essentialisme lorsqu elle pourrait se faire critique engag e II Eriger crire et preuves La deuxi me tape de ce travail critique est consacr e au temps du passage l criture temps dont les trois preuves telles qu elles sont d finies par R Barthes sont rappel es dans l avant lire le Doute la Patience la S paration la S cession Les contributions sont ici monographiques et montrent travers l tude pr cise de manuscrits emprunt s des auteurs des XX et XXT si cles B No l S Beckett A Ernaux que la probl matisation de l acte d crire et le processus de subjectivation dans la langue sont au c ur des enjeux L analyse des dossiers g n tiques est par ailleurs anim e par la volont de se confronter une grande diversit g n rique monologue roman essai Journal S Bikialo propose sous forme de notes d envisager le monologue du Syndrome de Gramsci en tant que fiction th orique du style comme processus comprenant la fois l acte d critur
9. e la 6 Barthes R La Pr paration du roman 1 et II Cours et s minaires au coll ge de France 1978 1979 et 1979 1980 Le Seuil IMEC 2003 p 235 236 gen se et la r ception de l uvre et faisant merger un sujet dans son rapport la langue et autrui p 103 Reprenant les notions de ratures mentales de pr cipitation mentale il montre comment la mise en avant de la dimension processuelle du style la trace permet de construire une fiction de gen se d un sujet le trajet dans sa langue J Piat apr s un travail sur les manuscrits de Molloy propose une lecture de l uvre fond e sur l ambition beckettienne du mal dire autour d un imaginaire du brouillon entretenu par travail d exp rimentation syntaxique ou par les nombreux commentaires m tadiscursifs et m ta nonciatifs qui participe l exhibition de la gen se Montrant comment ces l ments font partie int grante du projet esth tique de l auteur il confronte son tour gen se v ritable et fiction de gen se S P tillon revient sur le texte de B No l Qu est ce qu crire IT et apr s avoir propos une transcription du manuscrit et interrog le statut g n rique de l essai ainsi que la fronti re entre exo et endogen se envisage la question de l criture et de la texture selon des perspectives macrotextuelle et intertextuelle Les diff rentes phases de la gen se du Journal du dehors d A Ernaux sont ensuite analys es par C R
10. r une langue de r f rence Dans l atelier du style Du manuscrit l uvre imprim e ouvrage de belle facture s duit ainsi par de nombreux aspects par le souci tout d abord d alterner et de mettre en r sonance r flexions critiques universitaires et paroles d auteurs interrogeant et commentant leur pratique scripturale par sa vari t formelle ensuite qui voit se succ der table ronde fictive mode d emploi notes entretiens par la coexistence enfin de contributions th oriques essentielles qui interrogent les fronti res des champs disciplinaires de l avant texte la r ception tout en invitant re penser et cela n est jamais vain la d licate notion de style et d tudes monographiques sollicitant des dossiers g n tiques vari s afin de sonder la mise en acte de l criture et de la r criture savoir l investissement progressif de la langue par un sujet dans une uvre p 10
11. r davantage les gestes analytiques que constituent la stylistique et la g n tique en lien avec les propositions de M Charles autour des textes possibles La notion de tension est interrog e confront e celle de convergence pour nourrir la r flexion sur la question de l unit comment concevoir et faire jouer la notion de textes possibles au sein de la stylistique si celle ci admet l existence d un continuum entre gen se et style continuum qui fait des brouillons les l ments d un seul texte et repose encore en grande partie sur la principe de l unit Ou plus largement peut on penser le style ind pendamment de la question de l unit Il est bien question d une stylistique ouverte substituant le geste hypertextuel au geste m tatextuel fond e sur les possibles de la langue Eric Bordas poursuit l investigation th orique sur la stylistique en s int ressant la notion de valeur par opposition notamment celle d essence i e l valuation critique et interroge son tour les contours de cette m thode d analyse Il appara t vident que la stylistique ne peut chapper l valuation dans la mesure o le choix des textes comporte d j des pr suppos s axiologiques Au del de ce premier postulat qui renvoie une forme de corpus id ologique c est toute l ambigu t de la d marche stylistique qui est d crite ici entre th orie du discours objectivit descriptive et critique litt raire valu
12. rrog e selon les m tamorphoses de la gen se et de l uvre Il est bien question ici de mouvement de mouvement du style et de l uvre au sens o l entendait d j Anne Herscberg Pierrot dans Le Style en mouvement Le style est bien le processus de l uvre en mouvement et les brouillons sont bien du style l uvre m me s ils se diff rencient du style de l uvre En invitant au croisement de la critique g n tique et de la stylistique adjoignant donc la premi re l orientation interpr tative de la seconde l ouvrage interroge de fa on pertinente la notion de style et invite repenser les d marches analytiques travers la question centrale de l unit de la cl ture En se confrontant l une avec l autre la g n tique et la stylistique interrogent leurs fondements et leurs pr suppos s respectifs La g n tique domaine de l inachev peut elle acc der l interpr tation si cette derni re rel ve n cessairement de la cl ture Si l analyse stylistique du discours pr suppose l id e d unit sa pr sence a t elle du sens dans la critique g n tique L interaction des deux champs d analyse doit permettre de ressaisir la notion de style comme un 1 Barthes R uvres compl tes 5 vol Seuil 2002 IV p 267 2 Moins donc un monument que s il me faut inventer ce mot un moviment p 8 3 Herschberg Pierrot A Le Style en mouvement Litt rature et art Belin coll Belin sup Lettres 2
13. serv s aux auteurs le premier prend la forme ludique d une table ronde fictive proposition critique originale anim e par S Bikialo lequel met en r sonance une s rie de propos emprunt s M Butor P Michon R Pinget F Ponge et CI Simon portant sur les sentiers de la cr ation et le cheminement de l criture CI Simon En rebondissant astucieusement sur les propos des uns et des autres S Bikialo interroge dans un premier temps ces auteurs majeurs du XX si cle sur la question de la cl ture de l uvre prolongeant ainsi les r flexions critiques de la premi re partie sur le style et la question du ferm avant de les faire converser sur leur pratique scripturale et leur rapport aux manuscrits dans un assemblage de propos qui claireront de fa on pertinente la partie suivante consacr e au passage de l preuve mentale au premier jet Le deuxi me espace vert est occup par le mode d emploi de la feuille livr par J P Richard d abord sous la forme d une notice explicative dans laquelle l artiste peintre aborde le processus de cr ation chaque feuille est un voyage sur le papier La feuille termin e est une vue a rienne du chemin parcouru p 203 puis sous forme de d ambulation travers la Page 407 janvier 2012 o se m lent aux propos de l artiste ceux de L de Vinci de J P Luminet de B No l de P Reverdy de M Butor d A Kristof IL chafauder enjeux th oriques style
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