La Géocritique. Réel, fiction, espace
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1. je me demanderai qui du texte ou du lieu fait l autre Au cr puscule du struc turalisme le texte fictionnel est rentr dans le monde pour s y installer son aise Se peut il qu il s engage dans la cr ation du monde L un de mes objectifs est de dresser le d but d un inventaire spatiologique par del les fronti res nationales du champ critique par del les confins linguistiques du corpus fictionnel par del aussi les seuils disciplinaires puisque la litt rature est ici recontextualis e dans un environnement qui fait la part belle la g ographie l urbanisme bien d autres disciplines encore Car autant se rendre l vidence la litt rature de m me que les autres arts mim tiques parce qu ils sont juste ment mim tiques ne paraissent plus isolables du monde en ce d but de mill naire Tout est dans tout et inversement Peut tre Et c est bien le probl me Mais on n exclura pas que c est dans l absolument h t rog ne que la libert de la parole critique s exprime le plus son aise et en regard d enjeux major s 21 Voir Bertrand Westphal Pour une approche g ocritique des tex tes in La G ocritique mode d emploi Bertrand Westphal d Limoges Presses Universitaires de Limoges 2000 p 9 40 22 Voir Henri Lefebvre La Production de l espace 1974 Paris Anthropos 1986 TABLE DES MATI RES INTRODUCTION CHAPITRE I SPATIO TEM2. espace qualifi entre dans la constitu 11 Ibid p 115 12 Yi Fu Tuan Space and Place The Perspective of Experience 1977 Minneapolis London University of Minnesota Press 2002 p 54 13 Ibid p 83 14 Ibid p 161 15 Flavia Schiavo Parigi Barcellona Firenze forma e racconto Palermo Sellerio 2004 p 77 16 LA G OCRITIQUE tion du lieu tandis que la connexion des deux participe d un contexte La ph nom nologie a focalis beaucoup d nergie sur cette question Pour sa part elle s pare la Lebenswelt Hus serl Sch tz qui est le lieu des activit s intentionnelles de l homme et de la femme de l Uzzwelt qui est le cadre dans lequel ces activit s s accomplissent L encore la difficult consiste d gager une typologie des interactions entre l espace proprement humain Lebenswelt et l espace qui environne l homme Umwelt Du reste si l on s accorde avec Maria De Fanis toujours italienne mais g ographe les sujets sont enten dus comme des entit s qui se modelant sur l espace le char gent d actions d id es de valeurs individuelles et collectives qui le transforment en ieu Il n est d cid ment pas simple de sortir tout de go de la dichotomie du spatial et du local Hans Robert Jauss le promoteur des tudes de r ception cri tique a lui aussi contribu alimenter le d bat S appuyant sur les travaux des sociologues Alfred Sch tz auteur de la th orie des axes de pertinenc
3. et de la repr sentation dont la crise a t d cel e et analys e par Wittgenstein et ses successeurs L harmonie fond e sur une perception dite objective positiviste mais qui au fond tait id ologique a v cu et au moment de son implosion a lib r toutes les subjectivit s nombreuses Les discours se sont multipli s dans une belle profusion et dans une non moins belle confusion Par l m me nous sommes vou s l chec dans notre entreprise de repr sentation c est dire dans le rapport objectif des r sultats de notre recherche et dans nos tentatives de r concilier des interpr tations conflic tuelles constatent Dear et Flusty Et d ajouter dans le sil lage de Jean Fran ois Lyotard et de maints autres En somme le postmodernisme sape la croyance moderniste qui voulait que la th orie put refl ter la r alit et la remplace par un point de vue partiel relativiste qui souligne la nature contingente m diate de la construction th orique Les m ta th ories et les pens es structurantes sont rejet es au profit de micro explications et de l ind cidabilit Davantage que bien des penseurs les postmodernistes apprennent contextualiser tol rer le relativisme et tre toujours conscients de la dif f rence Dans cet environnement dont on admettra qu il a t relativis d faut d tre coup sur relativiste la r alit est devenue un mot pluriel E
4. f d ratrice renvoie ce que Douglas Hofstadter a appel T lt h t rarchie gt une hi rarchie d sacralis e d o toute id e de priorit s est va nouie Que devient l espace temps dans un contexte anomique ou la fiction devient une cl de lecture raisonnable du monde parmi d autres Quelle m thodologie concevoir pour essayer d appr hender ce qui pourtant est cens chapper toute appr hension Dans ce qu ils ont de paradoxal ces question nements montrent combien les pages qui vont suivre consti tuent une tentative un essai ressortissant un environnement mobile dont le fuyant m me incite la prudence la plus grande humilit Une autre question demeure en suspens Qu entend on par espace priori l espace est un concept qui englobe l univers que celui ci soit orient vers l infiniment grand ou r duit l infiniment petit qui lui m me est infini t simale ment vaste Au demeurant si j ignore peu pr s tout de cet espace macro cosmique ou microcosmique les sp cialistes paraissent peine plus avanc s l chelle des toiles sub specie aeternitatis Selon Herv Regnauld un g ographe on ne sait pas s il est infini ou pas on ne sait pas s il va vers une contraction ou une dilatation infinie on ne sait pas quelle forme il a On sait juste qu il n a pas grand chose voir avec l exp rience psychologi que qu on a de lui et qu il demande une intellection beaucoup plus qu
5. une perception Ce n est pas cet espace absolu totalisant qui accaparera mon attention bien qu vrai dire la litt rature ou le cin ma lui r servent une place non n gligeable Cet espace l est en effet investi par la science fiction et par tous les mondes possibles qui se projetteraient au del du per ceptible sans quitter le concevable pour autant Mon effort portera donc sur les espaces perceptibles qui eux m mes res tent assez r tifs la d finition car comme l crit avec propos Regnauld il n existe pas d espace global qui contienne toutes 9 Voir Douglas Hofstadter G del Escher Bach Les brins d une guir lande ternelle 1979 traduit de l am ricain par Robert French et Jac queline Henry Paris Dunod 2000 1985 10 Herv Regnauld L espace une vue de l esprit Rennes Presses Universitaires de Rennes PUR 1998 p 34 INTRODUCTION 15 les probl matiques g ographiques m me r duites des lois th oriques Et ce qui est vrai pour la g ographie l est a fortiori pour la litt rature et les autres arts mim tiques En prenant quelque risque on pourrait proposer deux approches fondamentales des espaces perceptibles l une serait plut t abstraite l autre davantage concr te la premi re embrasserait T lt espace gt conceptuel space la seconde le lt lieu gt factuel place Mais l une n est pas exclusive de l autre ne serait ce que parce que la d marcation entre espa
6. ENSER Jean Frangois Hamel REVENANCES DE L HISTOIRE R p tition narrativit modernit Nathalie Heinich DU PEINTRE L ARTISTE Artisans et acad miciens l ge classique Nathalie Heinich LE TRIPLE JEU DE L ART CONTEMPORAIN Sociologie des arts plastiques Nathalie Heinich CE QUE L ART FAIT LA SOCIOLOGIE David Lapoujade FICTIONS DU PRAGMATISME William et Henry James Ali Magoudi LA LETTRE FANT ME Serge Margel LE TOMBEAU DU DIEU ARTISAN pr c d de AVANCES par Jacques Derrida Richard Marienstras SHAKESPEARE AU XXI SI CLE Petite introduction aux trag dies William Marx L ADIEU LA LITT RATURE Histoire d une d valorisation XVIII XX si cle William Marx VIE DU LETTR Cl ment Rosset LE D MON DE LA TAUTOLOGIE suivi de CINQ PETITES PI CES MORALES Cl ment Rosset LE R GIME DES PASSIONS et autres textes Cl ment Rosset IMPRESSIONS FUGITIVES L ombre le reflet l cho Cl ment Rosset FANTASMAGORIES suivi de LE R EL L IMAGINAIRE et L ILLUSOIRE Cl ment Rosset LA NUIT DE MAI Cl ment Rosset L COLE DU R EL Cl ment Rosset TROPIQUES Cinq conf rences mexicaines Peter Szendy COUTE Une histoire de nos oreilles pr c d de Ascor TANDO par Jean Luc Nancy Peter Szendy MEMBRES FANT MES Des corps musiciens Peter Szendy LES PROPH TIES DU TEXTE L VIATHAN Lire selon Melville Peter Szendy SUR COUTE Esth tique de l espionnage Peter Szendy TUBES La p
7. IENT D AUTEUR Bernard Cerquiglini L ACCENT DU SOUVENIR Bernard Cerquiglini UNE LANGUE ORPHELINE Jean Louis Chr tien PROMESSES FURTIVES Jean Louis Chr tien LA JOIE SPACIEUSE Essai sur la dilatation Jean Louis Chr tien CONSCIENCE ET ROMAN I La conscience au grand jour Gilles Deleuze CRITIQUE ET CLINIQUE Gilles Deleuze L ILE D SERTE ET AUTRES TEXTES Textes et entretiens 1953 1974 Gilles Deleuze DEUX R GIMES DE FOUS Textes et entretiens 1975 1995 Georges Didi Huberman PHASMES Essais sur l apparition Georges Didi Huberman L IMAGE SURVIVANTE Histoire de l art et temps des fant mes selon Aby Warburg Georges Didi Huberman IMAGES MALGR TOUT Georges Didi Huberman GESTES D AIR ET DE PIERRE Corps parole souffle image Georges Didi Huberman LE DANSEUR DES SOLITUDES Georges Didi Huberman LA RESSEMBLANCE PAR CONTACT Arch ologie anachronisme et modernit de l empreinte Georges Didi Huberman QUAND LES IMAGES PRENNENT POSITION L il de l histoire 1 Georges Didi Huberman SURVIVANCE DES LUCIOLES Georges Didi Huberman REMONTAGES DU TEMPS SUBI L il de This toire 2 Pascal Engel LA DISPUTE Une introduction la philosophie analytique St phane Ferret LE BATEAU DE THESEE Le Probl me de Piden tit travers le temps Jean Marc Ghitti LA PAROLE ET LE LIEU Topique de l inspiration Evelyne Grossman LA D FIGURATION Artaud Beckett Michaux Evelyne Grossman L ANGOISSE DE P
8. PORALIT Histoire la derni re ligne droite La s mantique des tempuscules modalit s d une variabilit spatio temporelle La spatialisation du temps en r gime postmoderne L espace contre attaque Les nouveaux agencements du temps et de l espace La saisie interdisciplinatre de l espace et du temps G ographie architecture urbanisme et litt ra ture Le d sordre et l ordre litt raire CHAPITRE II TRANSGRESSIVIT ee Passants l me arlequine De la transgression l tat de transgressivit L espace navicule G ologie des grands ensembles et transgressivit 1 le polysyst me et la s mio sph re G ologie des grands ensembles et transgressivit 2 d territorialisation reterritorialisation Les tourments du cartographe postmoderne Corps et mouvance Le tiers espace CHAPITRE III R F RENTIALIT L espace et sa repr sentation prol gom nes Demain est il avant hier Repr sentation de l encore vide repr sentation du trop plein R el litt rature espace Entre le pav et la page La th orie des mondes Les oscillations r f ren tielles Consensus bomotopique Brouillage b t rotopi que Excursus utopique lo 278 LA G OCRITIQUE CHAPITRE IV L MENTS DE G OCRITIQUE 183 La g ocritique une approche g ocentr e La g ocritique une a
9. Paradoxe BERTRAND WESTPHAL LA G OCRITIQUE R EL FICTION ESPACE Ki Les ditions de Minuit Extrait de la publication LA G OCRITIQUE DU M ME AUTEUR m LA G OCRITIQUE R EL FICTION ESPACE 2007 Chez d autres diteurs AUSTRO FICTIONS UNE G OGRAPHIE DE L INTIME Rouen Publi cations des Universit s de Rouen et du Havre coll Aus triaca 2010 L IL DE LA M DITERRAN E UNE ODYSS E LITT RAIRE La Tour d Aigues Aube 2005 ROMAN ET VANGILE Limoges Presses Universitaires de Limoges coll Espaces Humains 2002 Extrait de la publication BERTRAND WESTPHAL LA G OCRITIQUE R EL FICTION ESPACE Dn LES DITIONS DE MINUIT L auteur est reconnaissant Juliette Vion Dury professeur l Untver sit de Limoges d avoir accept de relire le manuscrit et pour ses fid les encouragements Il remercie les autorit s de Texas Tech University Lubbock qui ont mis sa disposition la tr s riche biblioth que de leur tablissement ainsi que David Troyansky et Hafid Gafaiti qui de janvier juin 2005 ont simplifi son s jour dans le West Texas o les trois premiers chapitres de cet essai ont t r dig s Il exprime enfin et surtout sa gratitude l gard de l Universit de Limoges dans son ensemble ainsi qu la R gion Limousin dont le concours a facilit la publication de ce livre 2007 by LES DITIONS DE MINUIT 7 rue Bernard Palissy 75006 Paris
10. ard entre r el et fiction entre vraisemblable affirm et invraisemblable suppos Dante a con u sa Commedia selon cette orientation panoptique et verticale qui lui consentait d embrasser les trois dimensions de l Au del l Enfer le Purgatoire le Para dis Avec lui c est tout le Moyen Age qui a id alement pos ce que Mikhail Bakhtine a appel la coexistence de toutes choses dans l ternit L espace tait dans son int gralit sp culation d une surnature et reflet de la Cr ation Si la conception du temps tait statique au m tre de l action mat rielle celle de l espace tait plus dynamique Dans la Comme dia le personnage de Dante est visc ralement li l environ nement spatial qu il d crit et affronte alors que le temps passe peine et ne passerait pas du tout si le protagoniste ne conser vait ses qualit s de vivant dans un contexte o seul le Purga toire chappe la stricte ternit La conception de l espace temps a volu partir de la Renaissance Bakhtine a comment ce passage dans son Esth tique et th orie du roman 1975 il a soulign l importance d un basculement capital celui de la verticalit du temps 2 Giuseppe Tardiola Atlante fantastico del medioevo Roma De Rubeis 1990 p 20 3 Mikha l Bakhtine Esth tique et th orie du roman 1975 traduit du russe par Daria Olivier Paris Gallimard coll Tel 1987 p 303 INTRODUCTION 11 l horizontali
11. ce et lieu est quelque peu flottante Dans Space and Place The Perspective of Expe rience 1977 le g ographe am ricain Yi Fu Tuan voyait plut t dans l espace une aire de libert op la mobilit s exprime alors que le lieu serait un espace clos et humanis Compar l espace le lieu est un centre calme de valeurs tablies gt Cette acception trouve aux Etats Unis un cho particulier Pour Tuan l espace ne se transforme en lieu que lorsqu il entre dans une d finition et prend un sens Et d ajouter Tout le monde entreprend de transformer l espace amorphe en une g ographie articul e P gt Pour le commun des mortels le lieu est un rep re sur lequel le regard se pose et o il fait une pause un point de repos gt La distinction entre espace et lieu a t tudi e par les g ographes les sociologues au fond par tous ceux qui ont dQ appliquer au lieu une r flexion th orique Devant le flou qui marque la d limitation entre espace et lieu certains ont pr f r explorer d autres voies Apr s avoir pr conis un recours mod r et critique au terme espace l urbaniste italienne Flavia Schiavo a tout bonnement propos de lui substituer la notion de contexte qui rassemble les valen ces mat rielle et immat rielle contenues dans les deux termes espace lieu Le contexte int gre selon elle l aire sociale culturelle etc qui organise l architecture globale d un lieu habit P gt En somme l
12. e et Thomas Luckmann l ve de Sch tz Jauss a fait de l inscription dans l espace temps une r alit quotidienne prouv e comme un monde inter subjectif que je partage avec les autres Cette r alit est constitu e par la relation spatiale ici et l bas et comme monde relationnel Mztwelt par la situation de vis vis gt Si V Umwelt rel ve du constat la Mztwelt suppose une action ou plus exactement une interaction qui donne son sens l exis tence de l individu Comme les ph nom nologues dont il s ins pire Jauss voque alors la relation spatiale ici et l bas partir de laquelle la r alit quotidienne s organise en monde environnant gt 16 Maria De Fanis Geografie letterarie Il senso del luogo nell alto Adriatico Roma Melteni 2001 p 22 17 Voir l essai posthume de Alfred Sch tz Reflexions on the Problem of Relevance R Zaner ed New Haven London Yale University Press 1970 voir aussi Alfred Sch tz Thomas Luckmann Strukturen der Lebens welt 1975 2 vol Frankfurt am Main Suhrkamp 1979 1984 18 Hans Robert Jauss Pour une esth tique de la r ception 1975 tra duit de l allemand par Claude Maillard Paris Gallimard coll Tel 1990 1978 p 320 19 Ibid 20 Ibid p 321 INTRODUCTION 17 De fait c est l tude de cette relation qui motive l ensemble de la g ocritique 1 s agira de sonder les espaces humains que les arts mim
13. e chaos que le nouvel espace temps C est pourtant dans les parages labyrinthiques du postmoderne que je vais placer mon tude Il est a priori plus simple de retracer l histoire du postmo dernisme que celle des repr sentations de l espace une soixan taine d ann es au plus pour l une contre toute la dur e de l humanit pour l autre Devant cette statistique confondante on baissera pavillon Mais il n en demeure pas moins que le postmodernisme se d finit volontiers par son absence m me de d finition Ce vide recherch lt mani riste gt interpr te raient les mauvaises langues fonde une d multiplication des approches Il ne saurait tre question de faire le tour de cel les ci ni m me de se lancer dans la qu te De toute fa on l ouvrage sera fugitivement remis sur le m tier au cours des d veloppements qui suivront Je me bornerai ici exposer 4 Ibid p 352 12 LA G OCRITIQUE quelques principes rappel s par Michael J Dear et Steven Flusty dans The Spaces of Postmodernity Readings in Human Geography 2002 Selon eux le postmodernisme approvi sionne une ontologie de l incertitude radicale nantie cepen dant de principes dans un r gime de totale ubiquit Le postmodernisme se distingue ensuite en cela qu il est n sur les ruines du XX si cle des vestiges fumants laiss s par les conflits et surtout par la Deuxi me Guerre mondiale mais aussi des d combres cacophoniques de l unit du langage
14. hilosophie dans le juke box Esth tique de l espionnage Michel Th voz L ESTH TIQUE DU SUICIDE Antoinette Weber Caflish CHACUN SON D PEUPLEUR Sur Samuel Bec kett Bertrand Westphal LA G OCRITIQUE R el fiction espace Edgar Zilsel LE G NIE Histoire d une notion de l Antiquit la Renais sance BERTRAND WESTPHAL LA G OCRITIQUE FICTION ESPACE Fon Les ditions de Minuit Cette dition lectronique du livre La G ocritique R el fiction espace de Bertrand Westphal a t r alis e le 10 octobre 2011 par les ditions de Minuit partir de l dition papier du m me ouvrage ISBN 9782707320049 2011 by LES DITIONS DE MINUIT pour la pr sente dition lectronique www leseditionsdeminuit fr ISBN 9782707322357 Extrait de la publication
15. oit plus vrai que le monde de papier J voquais plus haut le d dale postmoderne or chaque labyrinthe spatialement hi rarchis dispose d un monstre en son centre Dans la t rato logie antique le Minotaure tait mi homme mi taureau Et qu en est il aujourd hui Qu en serait il si le Minotaure avait surv cu Il serait rest un monstre un tre composite mais comme beaucoup de monstres il aurait t r habilit Que l on songe la romance empathique tress e autour des diff rents King Kong cin matographiques et toutes les B tes que des Belles ont crois es aim es parfois C est que les temps sont l h t rog ne Au c ur du labyrinthe le Minotaure constitue rait le signe tangible d une nouvelle alliance entre une r alit normative la normalit en un mot qui ne serait plus tranch e d une fiction hors norme Au demeurant reste t il aujourd hui un point de vue qui puisse revendiquer le primat La domination coloniale s est discr dit e et avec elle la domi nation d une civilisation d une couleur de peau et d une reli gion sur les autres de la m me facon sont r volues les domi nations d un sexe sur l autre d une sexualit sur l autre L heure est derechef la copr sence du divers mais dans le silence de Dieu L analogie est ainsi relative avec la perception 14 LA G OCRITIQUE m di vale des dimensions de l existant mais la divergence est absolue L absence d une norme unitaire et
16. pproche interdisciplinaire La multifocalisation ou comment sortir de ses foyers La polysensorialit ou l empire des sens Une vision stratigraphique L asynchro nie la polychronie ou les espacements du temps Le destin du st r otype CHAPITRE V LISIBILIT 241 Deux Italiens Paris Italo Calvino et Umberto Eco Un Parisien place Saint Sulpice Georges Perec De la pierre et du papier Le texte pr c de t 1l le lieu La lisibilit des lieux Lecture du texte lecture de l espace et nouveau r a lisme de la m taphore l hypoth se de travail ACHEV D IMPRIMER LE DIX JUIN DEUX MILLE SEPT DANS LES ATELIERS DE NORMANDIE ROTO IMPRESSION S A S LONRAI ORNE FRANCE N D DITEUR 4408 N D IMPRIMEUR 070998 D p t l gal septembre 2007 PARADOXE Pierre Bayard LE PARADOXE DU MENTEUR Sur Laclos Pierre Bayard MAUPASSANT JUSTE AVANT FREUD Pierre Bayard LE HORS SUJET Proust et la digression Pierre Bayard QUI A TU ROGER ACKROYD Pierre Bayard COMMENT AM LIORER LES UVRES RAT ES Pierre Bayard ENQU TE SUR HAMLET Le Dialogue de sourds Pierre Bayard PEUT ON APPLIQUER LA LITT RATURE LA PSYCHANALYSE Pierre Bayard DEMAIN EST CRIT Pierre Bayard COMMENT PARLER DES LIVRES QUE L ON N A PAS LUS Pierre Bayard L AFFAIRE DU CHIEN DES BASKERVILLE Pierre Bayard LE PLAGIAT PAR ANTICIPATION Pierre Bayard ET SI LES UVRES CHANGEA
17. s religieux et moral du terme Bien s r le Moyen Age tait enclin cette attitude Alors que le temps m di val tr s t t d fini par saint Augustin scande le cheminement de l homme vers un Dieu qui accapare son esprit et conditionne son me 1 Youri Lotman La S miosph re 1966 traduit du russe par Anka Ledenko Limoges Presses Universitaires de Limoges coll Nouveaux actes s miotiques 1999 p 90 10 LA G OCRITIQUE l espace est comme l a rappel Giuseppe Tardiola lt minem ment ontologique psychologique d monstratif comme le temps il devient le champ d action du symbole et de la litur gie Lorsque saint Brendan l gendaire moine irlandais quitte la c te du Kerry pour entreprendre une Navigatio vers le Paradis il adopte un calendrier liturgique et un parcours balis par les r miniscences de la Bible Euclide est oubli jamais il n a t pris en consid ration par les moines et les scolastiques L espace et le monde qui se d ploie en lui sont le fruit d une symbolique d une sp culation qui est aussi miroitement de l au del et osons le mot d un imaginaire Cet imaginaire ne se scinde en aucun cas du r el L un et l autre s interp n trent selon un principe de non exclusion qui est r gl sur le canon religieux Toutes les choses tant cr es par Dieu elles participent d une m me r alit transcendantale qui lude par avance les clivages qui mergeront plus t
18. t qui s est traduit lt par un lan en avant gt Voire une fuite en avant Bakhtine aurait pu ajouter qu inversement la perception de l espace se verticalisait avec l introduction de la perspective en peinture et en cartographie et avec l aligne ment de notre plan te sur la profondeur sid rale du syst me solaire Ce revirement s est affermi au fil des si cles il se v rifie encore aujourd hui Mais quelque chose donne penser que notre espace et notre temps ont renou avec une partie des caract ristiques marquantes du cadre en vigueur avant la Renaissance Dieu est peut tre mort qui sait Nietzsche est mort en tout cas N anmoins quel que soit le sort de Dieu il n est plus au c ur des d bats Notre soci t n aspire pas la transcendance L agencement de son espace temps n a pas r int gr la verticale Mais l espace temps n est plus tout fait inclin dans le sens d une horizontale non plus La validit des rep res s est att nu e Le postmoderne s est install et r vo quant en doute les certitudes de la modernit a r concili le contemporain avec un certain proto moderne celui qui pro clamait la coh rence d un monde plac sous le signe de la non exclusion et de la coexistence de toutes choses Le post moderne s ing nie lui aussi tablir le r gne d une coh rence holistique mais dans l h t rog ne Coh rence et h t rog ne cette alliance de mots d finirait aussi bien l
19. t la r alit qui est ici vis e est bien la r alit objective celle dont on aurait t en droit 5 Voir Michael J Dear Steven Flusty The Spaces of Postmodernity Readings in Human Geography Michael J Dear Steven Flusty ed Oxford Malden MA Blackwell 2002 6 Ibid p 6 7 Ibid 8 Ibid p 254 INTRODUCTION 13 d attendre que des g ographes comme Dear et Flusty fussent les d fenseurs acharn s Dans ce contexte devenu ou rendu mouvant le r le des arts qui sont susceptibles d entretenir avec le monde une rela tion mim tique rev t une importance nouvelle La litt rature le cin ma la peinture la photographie et j en passe comme pour le moins la musique la sculpture sortiraient ils de leur confinement esth tique pour r int grer le monde Question difficile qui appelle un d but de r ponse tout juste provisoire en tout cas al atoire Sans vouloir anticiper sur le d bat on postulera d embl e que si la perception du cadre spatio tem porel de r f rence s estompe le discours fictionnel que v hi culent les arts trouve ipso facto une port e originale Moins nettement d port sur les marges du r el qu il ne l tait voici un demi si cle encore ou peine plus il a gagn en force de persuasion Et si la cr dibilit se mesure toujours l aune de la r f rence au vrai monde il n est plus dit en pleine re postmoderne que le monde de ciment de b ton ou d acier s
20. th orie des mondes possibles dont les illustrateurs ont t nombreux en Europe et dans les pays anglo saxons depuis que Alexius Meinong et Ludwig Wittgenstein eurent tabli une analogie entre le monde de la r alit dite objective et les mondes abstraits les mondes du texte Si l on se reportait au distinguo traditionnel entre espace et lieu on noterait que les trois premiers chapitres privil gient l espace car la spatio temporalit la transgressivit et la r f rentialit d li n ent le cadre conceptuel avec lequel la g ocritique s harmo nise Mais quoique cette opposition soit biff e dans les d ve loppements qui vont suivre l espace et le lieu confluant selon moi dans les espaces humains force est de reconna tre que la g ocritique s assortit prioritairement l approche du lieu Le quatri me chapitre expose la m thodologie g ocriti 18 LA G OCRITIQUE que Il me donnera l opportunit de compl ter ce que j avais une premi re fois voqu dans l article Pour une approche g ocritique des textes paru en 2000 dans La G ocritique mode d emploi qui avait en quelque sorte lanc l aventure g ocritique Dans un dernier chapitre dont la nature conclu sive ne saurait tre que provisoire il s agira d interroger l importance du texte dans la construction du lieu de passer de la spatialit du texte la szbilit des lieux Poussant jusqu au bout la question de la r f rentialit
21. tiques agencent par et dans le texte par et dans l image ainsi que les interactions culturelles qui se nouent sous leur patronage Avant d aboutir une tentative de d finition de la m thodologie g ocritique trois escales sont program m es Elles me permettront de cerner les fondements th ori ques de la g ocritique C est par une r flexion sur la spatio temporalit que va s ouvrir ce livre On y verra comment les m taphores du temps tendent se spatialiser depuis les len demains de la Deuxi me Guerre mondiale et de quelle fa on l espace a t revaloris au d triment d un temps qui dans la critique et la th orie avait exerc jusque l une supr matie sans partage Je m attarderai ensuite sur une constante de l espace contemporain sa mobilit qui est peut tre bien devenue chronique Y aurait il d sormais un tat permanent de transgression de franchissement une ransgresszvit qui ferait de tout espace un ensemble fonci rement fluide La p r grination travers la spatialit constituant une odyss e de plus une troisi me escale s imposait sans doute Elle est d vo lue une sp culation th orique sur les liens entre le monde et le texte ou l image le r f rent et sa repr sentation C est dans ce troisi me chapitre qu est sond e la r f rentialit la nature du lien entre le r el et la fiction entre les espaces du monde et les espaces du texte Une place sp ciale sera r serv e la
22. www leseditionsdeminuit fr Titti Extrait de la publication Extrait de la publication INTRODUCTION La perception et la repr sentation de l espace ne participent pas de l vidence Point n est d appr hension immuable des crit res spatiaux point de lecture statique des donn es topi ques Notre culture est encore redevable de sch mas h rit s des Lumi res ou mieux du positivisme De m me que le temps n est pas r ductible une m taphore fluviale qui en consacrerait le d roulement progressif et horizontal ou une m taphore sagittale qui tablirait sa r versibilit l espace n est pas le contenant unidimensionnel qu aurait d termin une g o m trie euclidienne adapt e au go t du positivisme La r volu tion einsteinienne est pass e par l Tout est d sormais relatif m me l absolu Depuis l aube du xx si cle Euclide n est plus celui qu il tait ce qu il tait O sont les rep res o sont les coordonn es stables de l espace Du reste l espace a peut tre chapp depuis le d but l ordre euclidien De tout temps il a t soumis une lecture symbolique Les d tails concrets de la g ographie relevaient d une herm neutique spirituelle et non d une observation imm diate Parlant de l espace g ographi que dans les textes russes m di vaux Youri Lotman notait La G ographie est devenue une forme d thique Ainsi chaque mouvement de l espace g ographique est il signifiant au sen
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