Détruire le film-réalité : William Burroughs et la critique du spectacle
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1. D truire le film r alit William OC Burroughs et la critique du spectacle The Soft Machine 1961 The ticket That exploded 1962 et Nova Express 1964 de William S Burroughs 1914 1997 constituent une trilogie qui pr sente la particularit d avoir t crite en suivant la m thode du cut up une technique d criture fond e sur le d coupage et le r agencement de fragments de textes pr existants d origines diverses de Shakespeare Rimbaud en passant par des publicit s des textes personnels ou des articles de presse Cette trilogie raconte l affrontement entre des Criminels Nova qui cherchent contr ler la plan te et des groupes de r sistants Pour avoir un contr le total sur les individus les membres du complot Nova ont cr e un film r alit qui se substitue au r el et maintient les individus dans un tat de passivit et de besoin constant Pour expliquer ce m canisme Burroughs recourt la science fiction le film r alit est un film biologique objet hybride entre l organique et le m canique qui intoxique les individus la mani re d un virus Dans la trilogie Nova la r alit ce qui nous est donn comme r alit est artificielle comme le serait un plateau de tournage William Burroughs explique que l implicite dans Nova Express est la th orie selon laquelle ce que nous nommons r alit est en fait un film C est une pellicule de film ce que j appelle un film biologiqu2. 30 op cit p 774 nous soulignons 23 William S Burroughs et Daniel Odier Le job Belfond 1979 p 30 Is the ability to see what in front of us a way of escaping from the image prison which surrounds us Very definitely But this is an ability which very few people have and fewer and fewer as time passes For one thing because of the absolute barrage of images to which we are subjected so that we become blunted if you re absolutely bombarded with images from passing trucks and cars and televisions and newspapers you become blunted and this makes a permanent haze in front of your eyes you can t see anything The job 1969 Penguin Books 1989 p 34 8 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire cest une vision du monde qui s est objectiv e dit Debord Les images devenues autonomes agissent ainsi sur l individu et non plus le contraire et cette action est d autant plus efficace qu elle est constante et banalis e la pr sence du spectacle tant permanente et le rendant invisible comme entit Anselme Jappe explique ainsi que dans la notion de spectacle lle probl me n est cependant pas l image ni la repr sentation en tant que telles mais la soci t qui a besoin de ces images le probl me r side dans l ind pendance atteinte par ces repr sentations qui se soustraient au contr le des hommes et leur parlent sous forme de monologue liminan
3. Le Reality Studio et le spectacle on l a vu pr sentent de nombreuses affinit s que ce soit dans leurs modes d action dans leurs propri t s addictives dans leur rapport au pouvoir ou dans la mani re dont on peut les combattre Les deux objets l un motif litt raire l autre concept philosophico politique ont enfin un point commun global majeur qui englobe tous les autres ils invitent entrevoir sous la construction de rapports sociaux une vraie vie mue par le d sir qui 4 Ann Douglas Punching a hole in that big lie the achievement of William S Burroughs op cit p xx For Burroughs the control machines is almost synonymous with Western psyche The point as he saw it was to get outside it to beat it at its own game by watching and decoding the extremely partial selections it makes from the outside world and then imposes on us as reality nous traduisons Timothy S Murphy Exposing the Reality Film WSB among the Situationists op cit p 39 c ut ups like d tournement are directly subversive methods that can be practiced and engaged by everyone because they use the omnipresent material of reality film against itself nous traduisons 15 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire s opposerait la soci t telle qu elle est organis e dans les soci t s occidentales contemporaines Debord appelle d ailleurs ceux qui construisen
4. hypnotique des images et la disparition des limites du vrai et du faux sont les deux 8 Guy Debord La Soci t du spectacle 219 op cit p 858 Guy Debord La Soci t du spectacle 9 op cit p 768 Guy Debord La Soci t du spectacle 8 op cit p 768 31 No lle Batt L criture de William Burroughs op cit p 43 32 Timothy S Murphy Exposing the Reality Film WSB among the Situationists op cit p 52 As such screens and images proliferate throughout the world the functionnal control of the spectacle increases nous traduisons 10 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire moyens qui permettent au spectacle et au Studio R alit de se maintenir comme structures de domination d un groupe restreint sur l ensemble des individus POLITIQUES DU SPECTACLE Pour Debord le spectacle est dans les soci t s marchandes un produit du pouvoir La s paration survenue entre l activit r elle de la soci t et sa repr sentation est une cons quence des s parations au sein de la soci t elle m me C est la s paration la plus ancienne qui a cr e les autres celle du Pouvoir La falsification g n ralis e du r el maintient l ordre en maintenant la passivit du peuple en emp chant l acc s au r el les masses restent dans un tat de servitude totale Chez Burroughs les processus de falsification du r el sont galement li s au fonctionnement de ce qu il appelle
5. 1989 BURROUGHS William S et ODIER Daniel Le job Belfond 1979 DEBORD Guy uvres Quarto Gallimard 2006 DOUGLAS Ann Punching a hole in that big lie the achievement of William S Burroughs in GRAUERHOLZ James et SILVERBERG Ira dir Word Virus The William S Burroughs Reader Grove Press 1998 JAPPE Anselm Guy Debord Editions Sulliver 1998 MURPHY Timothy S Exposing the Reality Film William S Burroughs among the Situationists in SCHNEIDERMAN David et WALSH Philip dir Retaking the Universe William Burroughs in the age of globalization Pluto Press 2004 PRIGENT Christian Morale du cut up in La Cure de d syntaxication K De M Editions 1993 ZERBIB David Le spectacle et son double in ROGOZINSKI Jacob et VANNI Michel dir D rives pour Guy Debord Ed Van Dieren 2011 17 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire
6. William S Burroughs among the Situationists in Retaking the Universe William Burroughs in the age of globalization ed David Schneiderman and Philip Walsh Pluto Press 2004 p 30 Debord s primarly political analysis and Burroughs primarily aesthetic one and perhaps vice versa nous traduisons Guy Debord La Soci t du spectacle 11 op cit p 768 Eric Mottram W S Burroughs l alg bre du besoin 1977 trad Emilia Smirmopki Christian Bourgois 1980 p 144 1 Guy Debord La Soci t du spectacle 4 op cit p 767 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire la r alit v cue est mat riellement envahie par la contemplation du spectacle et reprend en elle m me l ordre spectaculaire en lui donnant une adh sion positive La r alit positive est pr sente des deux c t s Chaque notion ainsi fix e n a pour fond que son passage dans l oppos la r alit surgit dans le spectacle et le spectacle est r el Cette ind termination de la fronti re entre la r alit v cue et la contemplation du spectacle c est dire l ind termination entre un rapport direct au monde et l autre et un rapport m diatis par des images se mod lise dans le Reality Studio de la trilogie Nova et renvoie au film biologique c est dire un hybride de vivant et de construction de r el et d artefact Dans Nova Express est expliqu le fonctionnement du film biologique
7. les soci t s de contr le et loin de rel guer ce mod le la fiction il affirme que c est l le fonctionnement de nos soci t s contemporaines L image et le mot sont les instruments de contr le utilis s par la presse quotidienne et par les revues d actualit comme Time Life Newsweek leurs quivalents anglais et continentaux d clare t il dans son entretien avec Daniel Odier Debord affirme que Ile spectacle est absolument dogmatique et en m me temps ne peut aboutir aucun dogme solide Rien ne s arr te pour lui c est l tat qui lui est naturel et toutefois le plus contraire son inclination Le spectacle s il est permanent et n gation de l histoire remod le sans cesse ses formes et ses contenus il est le lieu d un mouvement productif incessant sans quoi il ne fonctionnerait pas si efficacement comme sc ne de nos vies au point de nous faire oublier que cette machination est avant tout une machinerie dont nous sommes autant les acteurs que les op rateurs En effet le spectacle fait du spectateur un Anselm Jappe Guy Debord op cit p 25 William S Burroughs et Daniel Odier Le job op cit p 43 Image and word are the instruments of control used by the daily press and by such news magazines as Time Life Newsweek and their English and Continental counterparts The job op cit p 59 Guy Debord La Soci t du spectacle 71 op cit p 791 6 David Zer
8. earth Combat troops show board books and dictate out symbol language of virus enemy Fight controlled body prisoners Cut all tape Vibrate board books with precise shared meals scraps remains of Love from picture planet Get up off your rotting combos lit up by a woman Word falling Free doorways Television mind destroyed Break through in Grey Room Love is falling Sex word is falling Break photograph Shift body halves Board books flashed idiot Mambo on their dogs William Burroughs The Ticket that Exploded Grove Press 1967 p 104 105 3 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire up Nous nous int resserons plus particuli rement au Reality Studio donc aux images et ses similitudes avec le spectacle debordien toutefois les Livres du Conseil partagent avec le Reality Studio d tre un moyen de production d une r alit falsifi e destin e maintenir en place une vaste structure de contr le des individus Le spectacle debordien est consid rer en tant que th orie critique et le Reality Studio burroughsien comme mod lisation d un monde fictionnel ou pour reprendre les termes de Timothy S Murphy il s agira de consid rer l analyse essentiellement politique de Debord et celle essentiellement esth tique de Burroughs et peut tre vice versa aussi le Reality Studio peut il tre consid r comme l extrapolation
9. et les raisons de sa permanence Note Postulez un film biologique du d but la fin de z ro z ro comme tous les films biologiques dans un temps univers quelconque Appelez ce film X 1 et postulez plus avant qu une qualit de film X 1 existe dans un temps univers voulu X 1 est le film ainsi que les acteurs X 2 est l audience qui tente de p n trer dans le film Personne ne peut quitter le th tre biologique qui dans ce pays est le corps humain Si quelqu un quittait le th tre il verrait un film diff rent Y et le film X 1 et l audience X 2 cesserait d exister par d finition math matique On ne peut pas quitter le th tre sortir du film il s est substitu au r el il est donc devenu le r el On comprend ici toutes les potentialit s du choix de la science fiction pour mod liser un monde d vor par le spectacle sous la forme d une r alit virtuelle L omnipr sence du spectacle selon Debord tient pourtant de la m me mani re la domination d un mod le dont les individus ne peuvent s extraire Sous toutes ses formes particuli res information ou propagande publicit ou consommation directe de divertissements le spectacle constitue le mod le pr sent de la vie socialement dominante Il est l affirmation du choix d j fait dans la production et sa consommation corollaire Le spectacle est aussi la pr sence permanente de cette justification en tant qu occupation de la part prin
10. identit lui chappe plus il est la merci du besoin d intoxication 4 Guy Debord La Soci t du spectacle 5 op cit p 767 5 Anselm Jappe Guy Debord Editions Sulliver 1998 p 24 26 Timothy S Murphy Exposing the Reality Film William S Burroughs among the Situationists op cit p 34 The reality film like the Word or the spectacle is a totality that is not so much a set of words that we speak or images that we watch as it is a general condition in which we are immersed even and especially when we are apparently not focused on words or images nous traduisons Guy Debord La Soci t du spectacle 30 op cit p 774 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire De la m me mani re que les fronti res entre l identit et le produit intoxiquant celles du r el v cu et de la r alit fabriqu e s effacent comme l explique Debord Le spectacle qui est l effacement des limites du moi et du monde par l crasement du moi qu assi ge la pr sence absence du monde est galement l effacement des limites du vrai et du faux par le refoulement de toute v rit v cue sous la pr sence r elle de fausset qu assure l organisation de l apparence Cette th se est mettre en relation avec la th se 9 fondatrice de La Soci t du Spectacle Dans le monde r ellement renvers le vrai est un moment du faux Cette assertion d tourn e d une phrase de La Ph n
11. le feu Faites exploser les lignes mots de la terre Les troupes de combat montrent les Livres du Conseil et dictent le langage symbolique de l ennemi virus Combattez vous les prisonniers contr l s du corps coupez toutes les bandes Faites vibrer les Livres du Conseil avec les repas pr cis partag s bribes restes d Amours d une plan te image Levez vous de vos combos pourris illumin s par une femme Mot tombant Porti res gratuites Esprit T l vision d truit irruption dans la Chambre Grise Amour tombe Le mot sexuel tombe Brisez la photographie D placez les moiti s de corps Les Livres du Conseil et leur flash Mambo idiot sur leurs chiens On voit ici que les images issues du Reality Studio les mots des Livres du Conseil et tous les processus d intoxication proc dent d un m me mouvement il s agit de moyens de contr le que les opposants au Complot Nova veulent an antir par le cut 5 No lle Batt L criture de William Burroughs th se de troisi me cycle d Etudes nord am ricaines Paris 8 1975 p 40 Wiliam S Burroughs Trilogie The Soft Machine The Ticket That Exploded Nova Express Pr sentation de G G Lemaire traductions de Claude et Mary Beach P lieu Bourgois 1994 p 249 Photo falling Break through in grey room Click tilt vibrate green goo planet Towers open fire Explode word lines of the
12. science fictionnelle du spectacle ce moment historique qui nous contient On notera toutefois que si La Soci t du Spectacle est bien une th se politique la trilogie Nova et le cut up dans leur dimension performative invitent le lecteur consid rer l id ologie sous jacente la di g se De plus ce caract re id ologique de la trilogie affleure dans de nombreux passages o les appels la r volte peuvent tre lus comme des adresses aux lecteurs La performativit du cut up la fois proc dure et motif dans la di g se alli e l ambigu t entre r cit et discours id ologique tend s accentuer dans le dernier volet de la trilogie comme l explique Eric Mottram Nova express le dernier titre de la s rie est d lib r ment didactique et adopte la forme d une s rie de sc nes d avertissement Le souci didactique dont Burroughs fait preuve laisse donc entrevoir un but politique ou du moins id ologique qui s il n est pas aussi clairement exprim que l est celui de Debord ne peut se laisser ignorer Le spectacle n est pas un ensemble d images mais un rapport social entre des personnes m diatis par des images crit Debord En tant que rapport social le spectacle repose sur l hybridation du v cu et du spectaculaire de sorte que le r el est p n tr par le spectacle et que le spectacle lui m me devient r el 7 Timothy S Murphy Exposing the Reality Film
13. aract re performatif du cut up en dialectisant le rapport entre repr sentation et action permet donc de sortir de l impasse dans laquelle s enferrerait sans son concours la lutte contre le Reality Studio et plus globalement contre le complot Nova Il s agit d int grer les m canismes de l ennemi et de les utiliser contre lui de les d tourner Ainsi le langage et l image pass s par les ciseaux du cut up jouent contre les m canismes contr leurs du complot Nova et selon Burroughs contre tous les m canismes de nos soci t s de contr le Comme l explique Ann Douglas dans son introduction l anthologie Word Virus Pour Burroughs les machines contr le sont presque synonymes de la psych occidentale L id e comme il l a vue tait d en sortir pour les battre leur propre jeu en regardant et d codant les s lections extr mement partielles qu elles font du monde ext rieur et qu elles nous imposent ensuite comme r alit Le d tournement repose de la m me mani re sur l utilisation des productions spectaculaires contre elles m mes comme en t moignent les films de Debord ou les d tournements de bandes dessin es Comme le r sume bien Timothy S Murphy les cut ups comme le d tournement sont directement des m thodes subversives qui peuvent tre pratiqu es et mises en uvre par chacun parce qu ils utilisent le mat riau omnipr sent du film r alit contre lui m me
14. bib Le spectacle et son double in D rives pour Guy Debord dir Jacob Rogozinski Michel Vanni Ed Van Dieren 2011 p 209 11 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire des op rateurs de son m canisme un point coordonn dit Burroughs un point d entr e de l intoxication un maillon de la cha ne certes d pourvu de volont mais n anmoins participant son fonctionnement Dans The Ticket that exploded on voit que m me si le Reality Studio est au bord de la faillite il perdure car il est trop risqu de s en extraire Le film r alit est devenu instrument arme et monopole Tout le poids du film est dirig contre celui qui met le film en question appuyant particuli rement propos des crivains et des artistes Travaillez pour le studio r alit ou Ou bien vous verrez ce que c est d tre hors du film Litt ralement je veux dire sans assez de film pour vous amenez d ici jusqu au coin de la rue Ainsi le r el se trouve remplac par une bande pr enregistr e dont il est impossible de s extraire un spectacle g n ralis qui laisse les individus dans un r le passif dans une conscience r ifi e Tout est falsifi dans un tat interm diaire entre vrai et faux de sorte que le pouvoir reste aux mains de ceux qui manipulent ces images les soci t s de contr le pour reprendre le terme de Burroughs les soci t s capitalistes pour reprendre celui de Debord dans les deux cas i
15. cientes d un comportement hypnotique Le spectacle conduit ainsi une sorte d endormissement g n ral il est le mauvais r ve de la soci t moderne 15 William S Burroughs Trilogie op cit p 355 Since junk is image the effects of junk can easily be produced and concentrated in a sound and image track Like this take a sick junky Throw blue light on his so called face or dye it in blue or dye the junk in blue it don t make no difference and now give him a shot and photograph the blue miracle as life pours back into that walking corpse That will give you the image track of junk Now project the blue change onto your own face if you want The Big Fix Nova express op cit p 9 1 Guy Debord La Soci t du spectacle 18 op cit p 770 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire encha n e qui n exprime finalement que son d sir de dormir 7 tout comme dans la trilogie Nova lle film r alit de Martin est le divertissement le plus ennuyeux pr sent une audience captive 8 Hypnotique amenant la l thargie le spectacle agit comme une drogue conditionnant la vie des individus et alt rant leurs facult s de jugement mais plus encore il cr e un processus d accoutumance Le spectacle est une guerre de lopium permanente pour faire accepter l identification des biens aux marchandises et de la satisfaction la survie augmentant selon ses propres lois Mais si
16. cipale du temps v cu hors de la production moderne Ibid 8 p 768 12 William S Burroughs Trilogie op cit p 355 Postulate a biologic film running from the beginning to the end from zero to zero as all biologic film run in any time universe Call This film X 1 and postulate further that there can only be one film with the quality X 1 in any given time universe X 1 is the film and performers X 2 is the audience who are all trying to get in the film Nobody is permitted to leave the biologic theater which in this case is the human body Because if anybody did leave the theater he would be looking at a different film Y and Film X 1 and audience X 2 would then cease to exist by mathematical definition William Burroughs Nova express 1964 Grove Press 1992 p 8 13 Cette configuration n est pas sans rappeler le film Matrix d Andy et Larry Wachowski sorti en 1999 dans lequel le personnage principal Neo prend conscience qu il vit dans un monde virtuel la Matrice dont chaque individu est en r alit prisonnier 14 Guy Debord La Soci t du spectacle 4 op cit p 767 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire On voit que la pr sence permanente du spectacle debordien trouve son cho fictionnel dans l impossibilit de sortir du film r alit C est un enfermement plus temporel que spatial la notion de permanence nous r v le en effet un rapport au temps qui s est m
17. cut up au texte de la trilogie Burroughs place l issue du conflit au sein m me son criture performative tout en montrant les limites de la repr sentation No lle Batt explique ainsi que ce conflit d esprit r volutionnaire est r solument non dialectique tant qu il s exprime au niveau de la repr sentation Condamn l improductivit totale il ne peut que se reproduire intervalles r guliers selon un sch ma inchang Il faut pour voir appara tre un mouvement dialectique passer sur un autre plan celui de l criture Pi La dialectisation s op re donc dans le passage du texte repr sentation au texte action et ici cette dialectisation repose sur la performativit du texte action Chez Debord de m me La Soci t du Spectacle pr sente une dimension performative dans l usage qui y est fait du d tournement que Debord d finit comme le contraire de la citation le d tournement qui donne le caract re performatif au texte est donc un moment de la mise en uvre de ce style de la n gation comme langage portant en lui m me sa propre critique pour revenir l allusion de Debord 44 No lle Batt L criture de William Burroughs op cit p 64 5 Ibid p 63 14 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire Barthes c est un renversement du degr z ro de l criture en une criture z ro degr une criture sans nivellement sans autorit et sans propri t Le c
18. e Le Reality Studio est le lieu o est produit un film biologique int gr dans le monde en relation directe biologique avec ses acteurs c est dire avec 1 William S Burroughs The Art of Fiction interview de Conrad Knickerbocker Paris Review n 36 1965 Implicit in Nova Express is a theory that what we call reality is actually a movie It s a film what call a biologic film nous traduisons tout individu Christian Prigent dans Morale du cut up commente cette th orie burroughsienne la r alit n est pas le r el la r alit n est qu un trucage un leurre C est une fiction une repr sentation propos e et prise pour le r el La r alit c est le Spectacle au sens que Guy Debord donne ce mot La notion de spectacle appara t dans la pens e de Guy Debord d s 1957 dans Rapport sur la construction de situations et reprend la notion de distanciation de Bertold Brecht qui il rend hommage Seule l exp rience men e par Brecht Berlin est proche par sa mise en question de la notion classique de spectacle des constructions qui nous importent aujourd hui Dans son Rapport Debord d finit le spectacle dans un cadre artistique il distingue ainsi comme Brecht le th tre d inspiration aristot licienne o le spectateur est passif d un th tre qui permettrait l mancipation du public devenu partie prenante active de l uvre th trale comme c
19. e aux marchandises est g r e et entretenue par les dirigeants du complot Nova le maintien du Reality Studio repose sur les diff rents processus d intoxication en place L intoxication est si totale que l ordonnateur du Studio lui m me Mr Bradly Mr Martin est le produit d une 17 Guy Debord La Soci t du spectacle 21 op cit p 771 8 William S Burroughs Trilogie op cit p 287 Martin s reality film is the dreariest entertainment ever presented to a captive audience The Ticket that Exploded op cit p 150 19 Guy Debord La Soci t du spectacle 44 op cit p 779 780 2 No lle Batt L criture de William Burroughs op cit p 4 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire intoxication et un mod le d auto intoxication Bradly Martin est le grand pr tre bic phale ressuscitant toujours et dou d ubiquit roi et dieu archi ing nieur de ce syst me pestilentiel dont il a besoin et qui a besoin de lui crit encore Eric Mottram Tout comme les entit s qui contr lent le Studio R alit et entretiennent l intoxication des individus le spectacle cr e une d pendance Debord explique ainsi que l ali nation du spectateur au profit de l objet contempl qui est le r sultat de sa propre activit inconsciente s exprime ainsi plus il contemple moins il vit plus il accepte de se reconna tre dans les images dominantes du besoin moins il comprend sa propre e
20. est le cas dans le projet brechtien Dix ans plus tard en 1967 Debord publie La soci t du spectacle o la notion de spectacle est g n ralis e toute la vie sociale occidentale et qui d bute ainsi Toute la vie des soci t s dans lesquelles r gnent les conditions modernes de production s annonce comme une immense accumulation de spectacles Tout ce qui tait directement v cu s est loign dans une repr sentation Ainsi la vie dans son ensemble est devenue spectacle on entrevoit ici les affinit s qu une telle affirmation peut avoir avec le film biologique de Burroughs William S Burroughs a collabor au milieu des ann es 1960 avec l ancien situationniste Alexander Trocchi il est tr s vraisemblable que Burroughs et Debord connaissaient leurs travaux respectifs sans pour autant y faire directement r f rence S il ny a pas de relation explicite entre le Reality Studio et le spectacle plusieurs commentateurs ont d j observ des affinit s profondes entre ces deux mod les c est notamment le cas du chercheur am ricain Timothy S Murphy qui y a consacr l article Exposing the Reality Film William S Burroughs among the Situationists en 2004 Nous nous proposons ici de syst matiser cette comparaison la lumi re des textes des deux auteurs Christian Prigent Morale du cut up in La Cure de d syntaxication K De M Editions 1993 en ligne sur http www le terrier net lestextes
21. l s agit bien d une classe particuli re d tenant le pouvoir politique largent et les m dias Mais une sortie de cet tat d oppression reste envisageable comme l explique Timothy S Murphy dans la trilogie Nova alu lieu de la r alit nous avons le studio r alit au lieu des gens nous avons des personnes sosies et des junkies images qui cherchent une dose sans autre but que de ne pas tre exclus du film r alit Mais Burroughs croit qu une contre offensive est encore possible que la tactique de lennemi peut lui tre soutir e et tre utilis e contre lui par des brigands de l information comme lui 37 William S Burroughs Trilogie op cit p 288 289 The reality film has now become an instrument and weapon of monopoly The full weight of the film is directed against anyone who calls the film in question with particular attention to writers and artists Work for the Reality Studio or else Or else you will find out how it feels to be outside the film mean literally without film left to get yourself from here to the corner The ticket that exploded op cit p 151 38 Ann Douglas Punching a hole in that big lie the achievement of William S Burroughs in Word Virus The William S Burroughs Reader dir James Grauerholz Ira Silverberg Grove Press 1998 p xx lijnstead of reality we have the Reality Studio instead of people person impersonators and i
22. la survie consommable est quelque chose qui doit augmenter toujours cest parce qu elle ne cesse de contenir sa privation S il ny a aucun au del de la survie augment e aucun point o elle pourrait cesser sa croissance c est parce qu elle n est pas elle m me au del de la privation mais qu elle est la privation devenue plus riche La satisfaction du besoin que cr e le spectacle s accompagne toujours de sa propre privation entretenant ainsi un manque permanent Ce processus correspond l alg bre du besoin qui est la notion d velopp e par Burroughs dans The Naked Lunch il s agit de l quation qui r git le rapport du toxicomane la drogue et les rapports d engendrement perp tuel du manque par la satisfaction du besoin Si ce rapport a t mod lis par l exp rience de l auteur lorsqu il a expliqu les effets de l h ro ne il est tout aussi op ratoire pour des intoxications diff rentes notamment une intoxication l image No lle Batt analyse les m canismes de l exploitation du besoin de drogue ou de sexe il s agit pour les organismes de contr le de rendre impossible leur satisfaction naturelle et spontan e et sur la base de cette insatisfaction de cette frustration impos e proposer des formes de satisfaction b tardes qui ne r pondront que partiellement au manque mais seront consomm s avec avidit par les sujets en renonce Dans la mesure o toute intoxication la drogue au sex
23. mage junkies looking for a fix with no aim save not be shut out of the reality film But Burroughs believe that a counteroffensive might still be possible that the enemy s tactics can be pried out of their corporate context and used against him by information bandits like himself nous traduisons 12 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire SORTIR DU STUDIO REALITE Prenez le Studio R alit d assaut et reprenez lunivers d clare le personnage de Uranian Willy dans The soft machine et dans Nova Express ce personnage ambigu qui est menac d tre envoy dans les Fours Nova pour avoir tent de se r volter contre le complot invite le narrateur et du m me coup le lecteur une violente attaque pour prendre d assaut en m me temps le Studio R alit et les Livres du Conseil en coupants les lignes mots Prenez le Studio Prenez les Livres du Conseil Coupez les lignes mots Si le cut up est de mani re g n rale un moyen de lib rer le langage de sa lin arit il est aussi dans le cas de la lutte contre le Reality Studio une fa on de contrecarrer le projet du complot Nova En effet couper les lignes d images et de mots c est briser la r ification de celles ci pour se les approprier C est couper pour ouvrir le sens la communication briser la forme fig e r ifi e des images et du langage Debord pr ne le d tournement comme moyen d enseignement artistique 1 en r acti
24. odifi SPECTACLE ET REALITY STUDIO LES NOUVEAUX OPIUMS DU PEUPLE Pour atteindre cette permanence le spectacle et le Reality Studio s appuient sur des effets d intoxication Dans la trilogie Nova les proc d s d intoxication par la sexualit et les drogues proc dent d un vaste projet visant maintenir l ensemble des populations sous contr le L identit de la drogue et de l image est ainsi explicit e dans Nova Express dans une note de bas de page Note Puisque la came est image les images produites peuvent tre facilement concentr es et fix es sur une bande son image comme ceci Prenez par exemple un cam malade Jetez une lumi re bleue sur son soi disant visage et teignez le en bleu teignez la drogue en bleu cela n a aucune importance poussez lui une bulle et photographiez la miracle bleu quand la vie revient dans ce corps ambulant mort Cela vous donnera la bande image de la came Maintenant projetez la transformation bleue sur votre propre visage si vous d sirez la Grande Vape Le spectacle comme le Reality Studio repose sur l effet anesth siant qu il a sur les masses La r alit v cue le r el est supplant et infiltr par la contemplation du spectacle l individu en devient ainsi le spectateur passif en tat d immersion permanente comme le d clare Debord l o le monde r el se change en simples images les simples images deviennent des tres r els et les motivations effi
25. om nologie de l esprit de Hegel le faux est un moment du vrai mais non plus en tant que faux gt pose le constat de l omnipr sence de la falsification du r el le vrai m me devient un moyen de l tablissement du faux dans ce monde renvers qu est le spectacle o ce sont les images qui agissent sur l individu et non le contraire Le spectacle utilise le r el puisque la r alit surgit dans le spectacle et le spectacle est r el La th se 9 est mettre en rapport avec la maxime d Hassan i Sabbah figure embl matique de la lutte contre le Reality Studio Nothing is true Everything is permitted Rien n est vrai Tout est permis gt dans laquelle l inexistence de la r alit lib re un champ de possibles o tout devient permis No lle Batt rappelle ainsi que pour Burroughs il n y existe pas de v rit en soi mais uniquement une v rit pour soi subjective l inverse l objet du Film R alit est de pr senter de la r alit la version des contr leurs celle qu ils ont fabriqu e en fonction de leurs objectifs comme une r alit en soi Cette autonomisation des images et leur prolif ration leur donne leur pouvoir et en font un outil du pouvoir Celui ci est d ailleurs destin s tendre selon Timothy S Murphy mesure que les crans et les images prolif rent travers le monde le contr le fonctionnel du spectacle augmente Le caract re
26. on au prol tarien la premi re bauche d un communisme litt raire capitalisme car l e spectacle est le capital un tel degr d accumulation qu il devient image Aussi contre le capital devenu image il faut que le communisme devienne litt raire contre la communication sens unique du spectacle le d tournement est une v ritable communication c est dire l appropriation des images et du langage leur d tournement De plus Debord propose de refonder les moyens de communiquer la critique La th orie critique doit se communiquer dans son propre langage C est le langage de la contradiction qui doit tre dialectique dans sa forme comme il l est dans son contenu Il est critique de la totalit et critique historique Il n est pas un degr z ro de l criture mais son renversement Il n est pas une n gation du style mais le style de la n gation 3 William S Burroughs Trilogie op cit p 136 et p 393 Storm the Reality Studio and retake the universe The Soft machine Grove Press 1966 p 151 Nova express op cit p 59 William S Burroughs Trilogie op cit p 136 137 Take Studio Take Board Books Cut word lines The Soft machine op cit p 152 4 Guy Debord et Gil Wolman Mode d emploi du d tournement 1956 Quarto Gallimard 2006 p 225 Guy Debord La Soci t du spectacle 34 op cit p 775 43 Guy Debord La Soci t du s
27. pectacle 204 op cit p 853 13 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire Dans cet extrait et faisant r f rence Barthes Debord fait de la th orie critique un mouvement dialectique qui se manifeste par le caract re performatif de La Soci t du spectacle en effet Debord y d nonce le spectacle en mettant en pratique le d tournement En janvier 1973 pour aider ses traducteurs Debord publie un Relev provisoire des citations et des d tournements de La soci t du spectacle dans lequel il appara t que 67 th ses de son essai qui en contient 221 sont des phrases d tourn es de Marx Hegel Feuerbach Freud Hermann Melville Blaise Pascal Machiavel L nine Robert Musil H raclite Swift Lautr amont ou encore Stirner Ainsi le dire et le dit se rejoignent le d tournement comme style de la n gation repose donc sur sa dimension performative Ce mouvement a t mis en lumi re par No lle Batt qui explique que l issue du conflit entre le Complot Nova et les r sistants serait truqu e si le texte de Burroughs ne reposait pas sur une dialectisation du conflit sur le plan de l criture Elle montre ainsi que le texte de Burroughs est double il est la fois un texte repr sentation et un texte action Dans le texte repr sentation le conflit entre le Studio et le cut up est vou se r p ter sans trouver d issue mais passant un texte action c est dire appliquant le
28. prigmoralecut htm consult le 14 novembre 2011 Guy Debord Rapport sur la construction de situations in uvres Quarto Gallimard 2006 p 320 Guy Debord La soci t du spectacle 1 in uvres Quarto Gallimard 2006 p 766 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire DEUX MODELISATIONS D UN MEME CONCEPT Dans la trilogie Nova les deux grands ordres maintenant la plan te sous contr le sont les Livres du Conseil et le Reality Studio qui via respectivement le mot et l image produisent une r alit Les Livres du conseil constituent l organe officiel 5 o se concr tisent les possibilit s contr lantes du Verbe explique No lle Batt Comme nous allons le voir le spectacle est plus proche dans le fonctionnement d crit par Guy Debord du second organe le Reality Studio qui op re partir d images Mais les Livres du Conseil participent au m me projet de contr le par falsification du r el que le Reality Studio il s agit d ailleurs pour les opposants au complot de couper toutes les bandes celles diffusant des images comme celles diffusant des mots Les Livres du Conseil apparaissent galement li s des processus de cr ation d images comme le montre par exemple cet extrait de The Ticket that Exploded qui donne lire un appel la r sistance Photo tombant Irruption dans la Chambre Grise D clic tilt faites vibrer la plan te de glu verte Tours ouvrez
29. t de la vie tout dialogue Elles naissent de la pratique sociale collective mais se comportent comme des tres ind pendants Les cons quences de cette autonomisation sont d une part qu elle entra ne une s paration de l activit humaine qui fait du spectacle une communication sens unique les images agissent sur l individu sans que celui ci ne puisse agir sur les images d autre part leur omnipr sence permet au spectacle et au film r alit de devenir le r el Comme l explique Timothy S Murphy le film r alit comme le Verbe ou le spectacle est une totalit qui n est rien de plus qu un ensemble de mots que nous disons ou d images que nous voyons comme une condition g n rale dans laquelle nous sommes immerg s m me et particuli rement quand nous ne sommes pas concentr s sur les mots ou les images En effet l immersion totale dans le monde des images entra ne la disparition des limites du r el et du reality film tout comme celle des limites de la conscience par son caract re permanent donc addictif de m me Debord crit du spectateur que plus il contemple moins il vit plus il accepte de se reconna tre dans les images dominantes du besoin moins il comprend sa propre existence et son propre d sir Cette perte d identit entre dans l alg bre du besoin comme la fois r sultat de l intoxication et moteur de celle ci plus le sujet est intoxiqu plus son identit lui chappe plus son
30. t des situations des viveurs Cl mentine Hougue Centre d Etudes et de Recherches Comparatistes Universit Paris 3 Sorbonne Nouvelle Pour citer cet article Cl mentine Hougue D truire le film r alit William Burroughs et la critique du spectacle Revue Ad Hoc n 1 Le Spectaculaire publi le 02 07 2012 en ligne URL http www cellam fr p 3166 8 Le r le du public sinon passif du moins seulement figurant doit y diminuer toujours tandis qu augmentera la part de ceux qui ne peuvent tre appel s des acteurs mais dans un sens nouveau de ce terme des viveurs Guy Debord Rapport sur la construction de situations Op cit p 325 326 16 Revue Ad Hoc Num ro 1 Le Spectaculaire Bibliographie BATT No lle L criture de William Burroughs th se de troisi me cycle d Etudes nord am ricaines Paris 8 1975 BURROUGHS William S The Soft machine Grove Press 1966 BURROUGHS William S The Ticket that Exploded Grove Press 1967 BURROUGHS William S Nova express Grove Press 1992 BURROUGHS William S Trilogie The Soft Machine The Ticket That Exploded Nova Express Pr sentation de G G Lemaire traductions de Claude et Mary Beach P lieu Bourgois 1994 BURROUGHS William S The Art of Fiction interview de Conrad Knickerbocker Paris Review n 36 1965 BURROUGHS William S et ODIER Daniel The job 1969 Penguin Books
31. xistence et son propre d sir le spectacle ne se sent chez lui nulle part parce que le spectacle est partout L omnipr sence du spectacle alli sa capacit cr er une d pendance que d crit ici Debord renvoie aux processus d intoxication g n ralis e en place dans la trilogie Nova Dans l entretien avec Daniel Odier Burroughs explique la difficult sortir de cette alg bre du besoin Est ce que la capacit de voir ce qui est devant nous est un moyen d chapper la prison image dans laquelle nous vivons Oui tr s pr cis ment Mais c est une capacit que poss dent tr s peu de gens et ceux qui la poss dent sont de moins en moins nombreux cause du barrage absolu d images auquel nous sommes soumis Nous devenons insensibles Si vous tes bombard d images camions qui passent voitures t l viseurs journaux vous vous moussez et cela cr e un brouillard permanent devant vos yeux vous ne voyez plus rien Dans le fait d tre bombard d images on retrouve l id e que celles ci ont acquis dans la soci t capitaliste d apr s 1945 un statut ind pendant le reality film s auto suffit Le spectacle son fondement et son fonctionnement c est cette objectivation donc cette autonomisation des images qui deviennent un instrument de contr le 21 Eric Mottram W S Burroughs lalg bre du besoin op cit p 169 Guy Debord La Soci t du spectacle
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