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Livret enseignant / Deep End - Languedoc Roussillon Cinéma

1. art du plaquage polonais www erudit org culture cb1068900 cb1081021 569ac pdf Bruce Hodson Eyes Wide Open http sensesofcinema com 2003 great directors skolimowski Thierry Jousse Jerzy Skolimowski http www festival larochelle org festival 1992 jerzy skolimowski Ewa Mazierska Jerzy Skolimowski the Cinema of a Nonconformist Berghahn Books 2010 Jean Narboni Jerzy Skolimowski et la fuite impossible Cin ma 03 printemps 2002 Marcos Uzal l adolescence ternelle Trafic n 43 automne 2002 para tre deux ensembles en fran ais sur le cin aste un volume de la collection Cin maAction et le n 50 de la revue Eclipses DVD Outre Deep End les films de Jerzy Skolimowski actuellement dit s en DVD en France sont les suivants Signes particuliers n ant Walkover La Barri re Le D part Haut les mains Travail au noir Les Eaux printani res Quatre nuits avec Anna Essential Killing Deux titres sont disponibles en import The Shout dit en Allemagne sans sous titres francais et The Lightship dit aux Etats Unis en zone 1 et sans sous titres francais Le film r alis par Robert Fischer en 2010 Starting Out The Making of Jerzy Skolimowski s Deep End Point de d part le tournage du film Deep End de Jerzy Skolimowski est inclus dans l dition DVD francaise de Deep End Le film de Damien Bertrand Contre la montre Jerzy Skolimowski peintre
2. a Et puis c est aussi un endroit o les personnages doivent travailler Positif n 135 f vrier 1972 En revanche pour les sc nes qui montrent le bassin la piscine alle mande tait trop majestueuse pour tre adapt e par le d corateur Tony Pratt Ces sc nes ont donc t film es dans une piscine de I East End quartier de Londres d favoris Dans la derni re s quence coexis tent ainsi les plans de bassin tourn s Londres et ceux du man uvre ouvrant les vannes de la piscine film s Munich De m me les prises de vues du parc enneig tourn es Munich raccordent avec celles du parking des bains tourn es Londres avec de la neige artifi cielle par le biais visuel commun d une grille plac e au premier plan de certaines d entre elles A l exception de la s quence du parc toutes les sc nes d ext rieur sont tourn es Londres en particulier celle de Soho avec les bo tes de nuit et le stand de hot dogs et celle du m tro Dans ce dernier Skolimowski fait partie des passagers qui assistent l esclandre de Mike un plan rapproch le montre lisant un journal communiste polonais clin d il ses compatriotes Des coupes consubstantielles Dans Deep End Remembering the Deleted Scenes Deep End souvenirs des sc nes coup es qui figure dans l dition DVD fran aise du film le monteur Barrie Vince voque la fa on dont Skolimowski et lui m me furent amen s carter plusieur
3. fuyait dans la voiture du professeur Roulant toute allure avec deux pneus crev s il avait un accident sans doute mortel Cette suren ch re tragique qui soulignait le d sespoir de Mike e t t anecdo tique Skolimowski pr f ra en rester au moment de la mort de Susan point de d part de l criture de son sc nario et l trange s duction n crophile de cette treinte avec un corps sans vie Notons que selon Barrie Vince qui a travaill cinq reprises avec Skolimowski l ventualit dune autre fin est typique de ce dernier m me si en fin de compte le montage impose comme d vidence celle qui est retenue Verdicts clipse et red couverte Deep End est termin juste temps pour participer la Mostra de Venise de 1970 L accueil est tr s enthousiaste mais depuis l ann e pr c dente et jusqu en 1979 en vertu de l id ologie de l poque le festival ne d cerne plus de r compense Au festival de San Francisco Skolimowski d couvre un autre type de r action tr s positive pour l essentiel mais n gative proportion partir de sa derni re s quence Ayant r alis tout le film pour aboutir celle ci le cin aste s tonne que les signes avant coureurs qu il a dispos s n aient pas t mieux compris Les variations de dur e de quelques minutes des copies de Deep End selon les pays o le film fut distribu s expliquent par les censures plus ou moins importantes qu il subi
4. bras et de cadrer l image tout en marchant de cette fa on exigeait une force physique doubl e d une ma trise consid rables autant qu il en fallait pour tourner le travelling multi circulaire autour de la r ceptionniste du night club la virtuosit plus voyante Toutefois Steinberger ne pouvait quand m me pas filmer en cam ra port e tout en courant Skolimowski l avait fait dans la longue descente d escalier de son premier long m trage Rysopis mais le plan en question ne souffrait pas de para tre chaotique C est pourquoi lors de la sc ne de la course dans le parc les prises de vues qui suivent les coureurs en plan rapproch ont t tourn es par l op rateur assis sur le capot d une voiture le cin aste tenant le volant et modulant ainsi le mouvement de ces plans son gr Skolimowski a laiss une marge d improvisation non seulement aux acteurs mais aussi son op rateur tant donn e l extr me mobilit des deux protagonistes Steinberger a eu par moments la libert de choisir de cadrer tel ou tel mouvement tel ou tel personnage plu t t que de chercher toujours tout saisir de l action en cours Pai suivi la danse avec ma cam ra r sume t il L important tait de ne pas interrompre ou entraver le mouvement des acteurs eux m mes en libert surveill e Dans certains plans tr s mouvement s las sistant de Steinberger n avait pas la possibilit de pointer c est dire de me
5. lorsque Deep End fait sourdre le comique de la r alit quotidienne en stylisant voire en g om trisant celle ci et en soulignant arbitraire du rapport entre l homme moderne et le d cor dans lequel il s inscrit le tout avec une conomie verbale soigneusement concert e C est le cas dans la sc ne o Susan nargue la caissi re des bains en mangeant une glace sous son nez Cette derni re toute de vert v tue semble affect e de mim tisme par rapport la couleur du couloir l arri re plan un Jour de f te Opening Week end Comacico ouvrier repeint un mur en rouge la caissi re accordera t elle ses v te ments cette nouvelle couleur La parent avec Tati est galement sensible dans la fa on qua Skolimowski de faire du sport un vecteur de com die et un r v lateur des corps Chez lui il s agit de v lo et de course pied mais pas de natation tonnamment chez Tati de v lo Jour de f te et de tennis Les Vacances de Monsieur Hulot Godard enfin En 1967 Skolimowski avait r alis Le D part avec deux des acteurs de Masculin f minin De son c t Godard n avait pas tari d loges quant aux premiers films du jeune Polonais En 1968 il tourne Londres One One qui montre l enregistrement par les Rolling Stones de la chanson Sympathy for the Devil et l ann e de Deep End il retourne en Angleterre pour British Sounds On trouve entre les deux hommes une parent th matique plus pr cise que c
6. po te cin aste 2003 est distribu en bibliotheques par CNC Images de la culture Boy and Bicycle et La Natation par Jean Taris cf FILIATIONS sont inclus respectivement dans le DVD du film Les Duellistes Paramount de Ridley Scott et dans le coffret DVD L Int grale Jean Vigo Gaumont CD Tea for the Tillerman 1970 l album de Cat Stevens qui comprend la chanson But I Might Die Tonight et Soundtracks 1970 Falbum du groupe Can qui comprend la chanson Mother Sky ont tous deux fait l objet de r ditions fran aises en CD en 2009 Enfin on a un aper u des six buts marqu s le 7 f vrier 1970 par George Best pour Manchester United contre Northampton Town aux adresses suivantes http www youtube com watch v FcPeaeJOId4 http www youtube com watch v mgrdWxfrm8 Pour toute information sur les actions d ducation au cin ma on consultera le site du CNC www cnc fr o les livrets des trois dispositifs Ecole et cin ma College au cin ma et Lyc ens et apprentis au cin ma sont en acc s libre depuis 2009 Concu avec le soutien du CNC le site Image wwwsite image eu est le portail de ces trois dispositifs d ducation l image On y trouve en particulier une fiche sur chaque film au programme des trois dispo sitifs comprenant notamment des vid os d analyse avec des extraits des films et le pr sent livret en version pdf un glossaire anim des comptes rendus d exp riences des liens vers le
7. trivial et multicolore dont elle tire litt ralement les ficelles un cocon qui semble maternel et protecteur version sexu e des parents de Mike elle leur d nie le droit de lui prendre son argent arr t dans le temps elle est immobilis e par un pl tre au contraire du night club agressivement moderne Mike sy r fugie avant que le lieu n apparaisse lui m me d vorateur ce qui n arrive toutefois que lorsque sy r introduit Fobses sion du jeune homme la musique s tait interrom pue son entr e dans la pi ce mais lorsque la pros titu e aper oit la pancarte et relance le doute quant la r alit de ce fantasme elle remet galement ga lement en marche la musique de Can sur son tourne disque Mother Sky ciel m re qui peut aussi sen tendre comme une exclamation d sesp r e de Mike face son obsession insatisfaite l quivalent du Oh mummy quil laissera chapper dans la piscine finale 13 14 MO FF Jaune sur blanc tout fout le camp Le premier effet visuel notable dans Deep End est un jeu chromatique au d but du g n rique une surface couleur bronze recoit une goutte de sang ou de pein ture rouge tandis qu une variation d clairage la fait rapidement passer du bronze au rouge puis de nouveau au bronze C est seulement ensuite qu merge une forme reconnaissable celle d un cadre de v lo rouge vif Si l apparition de ce cadre rouge peut favoriser apr s coup l hy
8. vient aux bains Elle sait qu il s est battu propos de Susan et s offre lui mais Mike dit qu il a trop chang pour cela Susan mange une glace au nez de la caissi re Celle ci apporte sa premi re paie Mike l accueil de la bo te de nuit Mike cherche a savoir si Susan et Chris y sont entr s Lorsqu ils arrivent Mike s clipse dans la rue En attendant leur sortie il ach te force hot dogs et d couvre une pancarte devant un strip club la silhouette semble tre celle de Susan Il vole la pancarte se r fugie dans la chambre d une prostitu e la jambe pla tr e croise de jeunes vang listes et deux jeunes filles affam es Susan et Chris sortent du night club elle veut aller chez elle et non l apparte ment o il cherche l emmener passer la nuit Elle part seule prendre le m tro o Mike la rejoint avec la pancarte Il lui demande des comptes au sujet de celle ci Apr s un esclandre devant les passagers il promet qu il ne fera pas d histoires lors de la course qui a lieu le lendemain Aux bains Mike jette la pancarte dans le bassin et l enlace sous l eau Au cours de cette treinte Susan sincarne jusqu ce que Mike merge la t te de la pancarte cass e la main Dimanche 01 03 09 Jour de neige Pendant que Susan l attend a quelque distance le profes seur d ducation physique donne le d part d une course de lyc ens proximit des bains Mike sy ins re de forc
9. 1970 The Adventures of Gerard Les Aventures du brigadier G rard 1971 Deep End 1972 King Queen Knave Roi Dame Valet 1978 The Shout Le Cri du sorcier 1981 Rece do g ry Haut les mains 1982 Moonlighting Travail au noir 1984 Success is the Best Revenge Le Succ s tout prix 1986 The Lightship Le Bateau phare 1989 Torrents of Spring Les Eaux printani res 1991 30 Door Key Ferdydurke 2008 Cztery noce z Anna Quatre nuits avec Anna 2010 Essential Killing Ce qui m int resse dans mes films c est d abord les personnages et leur volution Je fais confiance aux techniciens et je travaille sur les acteurs M me le script est un pr texte Cela redevient un r cit apr s le montage et peut tre alors existe t il une construction Mon film ne raconte pas une anecdote ou une suite de faits parti culiers mais il vise rendre compte du paysage mental du h ros Donc je marrange pour que la r alit que je pr sente agresse le spectateur de mani re aussi chaotique brutale indisciplin e quelle le fait avec mon h ros Ce fait de ne pouvoir tout comprendre ni tout saisir doit aboutir un certain agacement chez le spectateur La vie nous agace de la m me mani re C est cet agacement qui est pour moi le r alisme Roi Dame Valet Dans la construction m me de mes films il y a quelque chose qui res sortit au domaine du jeu Mais il ne faut pas oub
10. Brown du degr d improvisation auquel Skolimowski a incit ses acteurs diff rent quelque peu Moulder Brown se rappelant d un film dont le sc nario tout entier aurait t un canevas partir duquel les com diens taient encourag s broder quand Jane Asher garde en m moire un sc nario tout de m me assez pr cis mais m nageant des plages d improvisation A minima le film avait tout int r t int grer certains accidents de tournage qui s accordent avec la mal adresse du personnage de Mike ainsi qu avec les risques croissants qu il prend au fur et mesure du r cit la chute dans la piscine au d but du film un pur accident dans le souvenir de Skolimowski quoique Moulder Brown s en rappelle comme d une initiative qu il aurait prise celle v lo lorsque Mike tente de barrer la route de la ji L F j 5 F ne i s n EL ar R ad UJ gt 1 de pes NP i voiture du professeur la lampe que Mike casse en brandissant la pancarte dans la rame de m tro Quoiqu il soit permis de douter de la nature accidentelle de ce dernier passage tant les lampes bris es ou bouscul es scandent la filmographie de Skolimowski et Deep End en particulier le moment o apr s que son ex petite amie s est offerte lui Mike saute de banc en banc en frappant les plafonniers successifs est le r sultat d une indication pr cise de Skolimowski Moulder Brown D autres fru
11. Mike REDACTEUR EN CHEF Simon Gilardi est charg de mission dition p da gogique au sein de Ciclic p le r gional d ducation artistique et de formation au cin ma et a l audiovi suel de la R gion Centre REDACTEUR DU LIVRET A propos du cin ma et de lui m me Jean Francois Buir dirait en fin de compte qu il tente essentiel lement de transmettre des enthousiasmes Sous des formes diverses criture enseignement pro grammation r alisation CICIIC BG LIVRE IMAGE g CULTURE MUM BIQUE cx amp Libert Egalit Fraternit R PUBLIQUE FRAN AISE
12. de Michael Powell et m me de Vertigo film hollywoo dien du plus c l bre cin aste anglais Rappelons enfin l tonnante proximit des plans de Mike v lo avec le motif de base du premier court m trage de l Anglais Ridley Scott Boy and Bicycle 1965 Mais il y a une diff rence majeure entre les films de la Nouvelle Vague anglaise et Deep End Quelles que fussent les qualit s de leurs films Lindsay Anderson John Schlesinger Karel Reisz Tony Richardson eurent tendance simplifier cette expression r alisme po tique soit en se contentant de po tiser le social au risque de tomber dans le pittoresque soit en dissociant les deux termes de l expression sous forme de registres juxtapos s Deep End n chappe pas toujours ces cueils mais le film tente constamment d enlacer les deux termes r alisme et po tique de fa on indissociable Ces cin astes anglais ne furent pas les premiers succomber aux risques du r alisme po tique Ce fut d j le cas de certains des cin astes fran ais des ann es 1930 propos desquels l expression fut forg e en particulier Marcel Carn Ren Clair Julien Duvivier et Jacques Feyder Or Deep End aurait plut t partie li e avec des repr sentants du cin ma fran ais qui ont contrevenu la simplification LAtalante Gaumont pittoresque du r alisme po tique laquelle constitue une tendance de fond de ce cin ma Cette parent le fran aise se
13. des bains tandis quelle tend le combin du t l phone en direction de tra vaux imaginaires a l intention de son fianc qui se trouve a l autre bout du fil Absurde le pr texte narratif du surgissement de cette origine du monde peine voil e d un collant ne saurait justifier celle ci En revanche ce plan qui flatte le voyeurisme du spectateur souligne le sort auquel la jeune femme semble ne pouvoir chapper bien que dans la sc ne pr c dente elle se soit soustraite a la tutelle du professeur de sport son premier amant celui d tre soumise au d sir de tous les hommes m me lorsque pour sa part elle ne le d sire nullement pour d sarmer le voyeur du hall du cin ma elle n a d autre choix que de s exposer lui La pancarte du strip club pourrait n tre qu une manifestation litt rale de la femme objet et une expression simplifi e de Susan en tant quic ne d si r e Cependant si d un c t elle peut tre vue comme l objectivation du fan tasme de Mike de l autre c est bien Jane Asher l interpr te de Susan qui a pos pour cette image Dans la sc ne du m tro Susan ne se prive pas de jouer ind cidablement sur cette diff rence entre image physique et image morale It does look like me doesn t it Pm much worse than that Ainsi qu elle le sugg re libre Mike et au spectateur voire dans une certaine mesure a Skolimowski lui m me cf GENESE de se rassurer en r suma
14. du morceau Cependant la musique sinterrompt trois reprises et le cin aste n en utili se finalement qu un peu plus de la moiti Ce refus du jusquau boutisme esth tique est typique du Skolimowski de la maturit transfuge du bloc com muniste il est bien plac pour se m fier du stakha novisme f t il artistique comme de la fascination occidentale pour la performance Or Deep End c est l histoire d un jusqu au boutisme burlesque puis tra gique une fable de la mont e en puissance incon tr lable des d sirs et des fantasmes que favorisent les syst mes modernes quels qu ils soient l intelligence du film en g n ral et de cette s quence en particu lier est de ne pas mimer syst matiquement cette mon t e en puissance Ainsi la s quence autour du night club ne tend pas toute enti re vers un paroxysme comme une vision trop rapide pourrait le faire croire Elle a ses flux et ses reflux ses stases et ses relances de m me que le morceau de Can ce qui contribue au moins autant au sentiment de dilatation du temps que la stricte dur e de cette musique en quatorze minutes et quelques ellipses adroitement dispos es on a l impression de faire l exp rience d une soir e enti re d espoirs d all es et venues et de sur place Mike entrant dans le night club c est la figure elle aussi tr s skolimowskienne du clandestin Il tait parvenu se fondre dans le d cor des bains mais ici tout le distingue s
15. jaune ce ne sont queffusion de lait tessons de bouteille et diamant perdu dans la neige ELAN Ceci n est pas une piscine Mercredi Mike vient de retrouver son ancien professeur de sport ils ont mim une partie de hand ball puis le professeur a pris froidement cong de Mike au d sarroi de ce dernier Scene typique de Deep End oti r gne le principe de la douche cossaise De m me peu apres le plan de prime abord serein que nous allons envisager Mike va t il se retrouver a boire la tasse sous l assaut du trio de sales gosses qui l aura entra n dans l eau Le r ve de l amoureux transi une pause d jeuner avec Jane au bord de l eau deviendra un cauchemar aquatique Qui deviendra a son tour un fantasme la vision de Susan nue sous l eau Entre ces deux douches se situe donc le plan que nous allons regarder de plus pr s 00 20 11 Cest un plan large qui donne a voir des tres et des choses concrets mais strictement s par s A la diff rence de l imaginaire et du r el qui pour leur part communiquent sans cesse dans Deep End dans le plan qui nous occupe ici des cages de water polo suspendues au dessus du bassin rappellent celles imaginaires devant lesquelles Mike et le professeur jouaient quelques ins tants plus t t C t tres humains on distingue gauche les trois coll giens en train de se d shabiller dans la piscine quelques nageurs un peu d cen tr s vers la droite S
16. locution doit saccorder l avance au doublage en question Pour ajouter la complexit linguistique Skolimowski ma trise encore tr s mal l an glais en 1970 et Sandford contribue r crire les dialogues que le cin aste a con us avec ses deux co sc naristes galement polonais Asher et Moulder Brown sont eux aussi invit s angliciser leur texte et celui des autres personnages et y instiller un argot typi quement londonien guv pour boss mot que le directeur des bains r cuse et dont Susan samuse quid pour pound mob pour shilling poof pour p d etc Quarante ans apres Jane Asher souligne qu une part du caract re surr el du film tient a cette fa on de placer dans la bouche de com diens allemands des expressions presque outranci rement britanniques le Nice weather for the ducks dit par la caissiere Mike par exemple Moulder Brown ajoute que certaines qualit s de l interpr tation tiennent ce d calage ainsi l aspect accabl du professeur apr s la semonce que lui adresse Susan vers la fin du film tiendrait ce que Karl Michael Vogler aurait ce moment l bredouill un texte anglais qu il ne ma trisait pas Profiter de instant present Ce texte l acteur allemand l aurait d autant moins ma tris que Skolimowski lui aurait demand de limproviser pour partie Les souvenirs qu ont respectivement Jane Asher et John Moulder
17. matin de ce premier jour il s est mis neiger C est un nouveau contre la montre cependant pour maintenir cet effet hivernal car la mince couche de neige fond vue d ceil La piscine tait trop belle La plupart des scenes d int rieur sont tourn es Munich le cin ma le night club et toutes les scenes des bains l exception de celles qui se d roulent dans la piscine proprement dite II fallait que je mette mes personnages dans des situations pr cises dans un d cor pr cis Au d but j avais pens tourner dans une usine mais c tait un endroit trop bruyant avec trop de monde J avais aussi pens une boucherie mais le sang et la viande auraient t trop agressifs Il me fallait un endroit calme un endroit que l on pouvait regarder en prenant son temps C est dr le je navais jamais t dans des bains publics en Angleterre En Pologne oui Et le d cor du couloir a t refait l image du d cor des bains publics polonais que j avais pu fr quenter il y a vingt ans Je nai pas essay de retrouver atmosphere des bains publics anglais mais j ai pris un d co rateur anglais pour refaire les couloirs et les loges Munich dans la M llersches Volksbad un bel tablissement de bains de style Art nou veau ensemble tait tr s propre tout blanc et moi je l ai rendu sale et laid vert et bleu Je crois que a va Et les gens qui fr quentent les bains anglais m ont dit qu ils taient comme
18. ne fait pas office ici de policier du r cit qui viendrait temp rer ses garements po tiques Ce principe d unit cristallise un paysage mental en mettant distance l approche natura liste le film pr sente de moins en moins le petit monde des bains anglais tel qu il est mesure que ce monde et tout ce qui len toure est comme r duit filtr par l id e fixe de Mike qui engendre plut t qu une unit d action une unit dobsession Heureusement Skolimowski ne limite pas son propre regard la subjectivit de Mike et laisse tres et choses exister l cran un peu au del de celle ci cette marge met en relief obsession du jeune homme tout en vitant au film de verser dans le pur fantasme film Un ado qui s enferme En fait de petit monde c est d s le d but que les bains publics consti tuent un microcosme dont on sextrait le soir venu contribuant l ambiance fantastique d un film dont les cr atures ne sortent que de nuit Apr s le g n rique de d but bouff e de libert qui montre Mike v lo on ne revoit la lumi re du jour que vers la fin du film ce qui r sume le sort de cet autre obsessionnel quest le spectateur de nudies ou de films d auteur Petite exception au matin du troisi me jour Mike est de nouveau montr v lo comme galvanis par son d sir pour Susan dont il a pris conscience la veille au soir D s son embauche Mike semble happ par ce microcosme De sa vie ant
19. ouvre les vannes de la piscine dans la nuit du dimanche au lundi La trame g n rale de Deep End est d une simplicit que la multipli cation des p rip ties occulte quelque peu la premi re semaine d un premier emploi coincide avec une premi re passion amoureuse Fra cheur des premi res fois qui rend d autant plus terrible le carac tere irr m diable de la fin du r cit comme dans Rom o et Juliette Avec son mat riau de base naturaliste le film aurait pu tre le sage r cit d un apprentissage une chronique sociale pittoresque doubl e d une com die de m urs Mais ce r cit tr s balis est heureusement d vi par la sensibilit de Skolimowski qui rel ve de ce que Pier Paolo Pasolini appela dans les ann es 1960 un cin ma de po sie Le monde que montre le film n est pas envisag avec l ext riorit d un nonciateur surplombant mais travers le croisement des regards du cin aste et des personnages qui ne se superposent pas tout fait si le regard de Mike est privil gi celui de Susan a aussi droit de cit C est sans doute cette mancipation po tique du r cit que pense Barrie Vince le monteur de Deep End quand il d finit le style de Skolimowski comme une libert bas e sur une structure solide en l occurence sur l unit aristot licienne de temps de lieu d action d un r cit o chaque jour est l quivalent d un acte dans la trag die classique Toutefois Aristote
20. premier client r calcitrant mais surtout le directeur des bains dont le visage est aussi us que celui de Mike est juv nile Dans le champ contre champ de leur premier dialogue film en tr s gros plans ce visage est effrayant Le rapprochement l cran des visages de Mike et de son p re accuse galement ce contraste contrastant avec Susan la cliente gar e dans la cabine de Mike la prostitu e clou e au lit par sa jambe cass e et pour les spectateurs anglais de l poque le personnage interpr t par une Diana Dors physiquement tres chang e depuis l poque o on lappelait la Marilyn Monroe anglaise les blessures de Mike r elles ou apparentes son doigt rougi sur la sonnette du v lo sa main en sang sur l alarme des bains sans pos sibilit de la soigner l armoire pharmacie est vide sa dent qu il croit perdue les paroles prononc es par les vang listes Il n y a que deux cer titudes La premiere c est que le soleil se levera demain La seconde c est qu un jour vous finirez dans un cercueil La Bible dit qu il n y a pas d is sue Mike demande aux deux filles a qui ils paient un hot dog de ne pas se moquer deux 4 Susan Les l ves mettent parfois des jugements s v res l gard de cer tains personnages La Monika de Bergman re ut des critiques acerbes en particulier de la part des jeunes spectatrices cause de son com portement l gard des g
21. profiter de ces c t s Arriv e surprise des parents de Mike Au d sarroi de ce dernier Susan lui dit quelle a d remettre sa m re sa place D part des parents Sous le regard de Mike Susan quitte les bains dans son manteau jaune Mercredi 00 17 00 Mike donne Susan un pourboire selon lui de la part de sa m re Susan lui confie une nouvelle cliente et il fait tout pour vi ter une m saventure telle que celle qu il a connue avec la pr c dente Dans un couloir des bains Mike tombe sur le pro fesseur d ducation physique dont il a t l l ve Mike se dispute avec trois gar ons qui tiennent des propos salaces au sujet de Susan Ils entra nent Mike dans la piscine Vision Susan nue fr le Mike en nageant sous l eau Sous l il amus de Susan le man uvre des bains rend Mike ses v tements mis s cher dans la chaufferie En fin de journ e Mike l aide d mar rer sa voiture l homme voque son d sir de poss der Susan et les nombreuses aventures de celle ci Jeudi 00 22 38 Discussion de Susan et de Mike autour d une affiche du planning familial Mike serait il plus prudent sil pouvait tre enceint Susan s tonne d apprendre que le jeune homme est vierge la pause d jeuner Mike propose Susan de la raccompagner apr s le travail mais son fianc Chris doit passer la prendre Le soir Mike suit Susan et Chris jusque dans un cin ma ducatif Il se place
22. puis l image avaient ouvert le film apr s le g n rique Le tout finira dans l eau dans la peinture et dans le sang Enfin la passion de Skolimowski pour la dimension concr te des choses l am ne dans Deep End tourn dans une langue qui lui tait au d part tran g re donner corps l cran des expressions verbales telles que souf fler le chaud et le froid to blow hot and cold voir le moment o Susan attire un chien elle puis lui jette une boule de neige et chercher une aiguille dans une botte de foin to search for a needle in a haystack ou plut t dans ce film chercher un diamant dans la neige Petite topo Une large part de Deep End se d roule dans un tablissement de bains un endroit qui s est rar fi depuis la fin des ann es 1960 consacr au loisir et au sport comme les actuelles piscines mais galement l hygi ne publique ce qui d finit d embl e le cadre social du film Au d but Susan pr sente som mairement les lieux Mike et mesure que le film avance leur topographie devient sinon parfaitement claire du moins plus famili re Au regard de lieux r els la topographie de ceux qui sont particuli rement associ s certains films avec une tradition dans le cin ma de terreur Psychose L Exorciste Shining m lange souvent pr cision et impr cision coh rence et incoh rence Avec les l ves on peut tenter d tablir la t
23. que Skolimowski pourrait sans doute faire siens le drame de Mike est d avoir un moment donn d laiss l int r t passionn pour le d roulement au profit de celui pour le d nouement Lui qui auparavant a h roiquement engag tout son tre dans des actions incertaines n glige in extremis l accomplissement d un processus tel que celui de la recherche du diamant pour se focaliser sur l chec d un seul acte Inventaire Si Skolimowski est l un de ces cin astes chez qui les corps parlent celui de Mike s exprime tout particuli rement peut tre justement parce qu il s agit d un adolescent Ici pas de probl mes d acn mais une s rie de lapsus corpo rels ou de comportements tranges dont certains annoncent le geste fatal de la fin du film vider de rage le contenu d un coussin recouvrir Susan de fil coudre l encercler dans la neige couvrir sa bouche de la main pour l emp cher d appeler courir en frappant les lampes d un couloir briser dans l eau la t te de la pancarte etc Ceci dit le cin aste n accorde pas seulement une attention particuli re aux manifestations concr tes des corps Il conf re galement une grande densit de pr sence l cran aux objets l ments et substances et leur diff rents tats La fin du film est consacr e faire fondre de la neige pour retrouver un dia mant gr ce un collant une lampe et surtout une bouilloire dont le son
24. qui joue la nymphomane avait t une grande vedette glamour surnomm e la Marilyn Monroe anglaise Ayant beaucoup grossi elle apparait dans Deep End comme le triomphe de la matiere et du sexe tari sur la beaut et sur la jeunesse A la fin de cette scene le plan qui la montre de dos affaiss e est assez path tique Enfin l actrice principale du film Jane Asher est surtout connue de tous les Anglais comme la fianc e de Paul McCartney qu elle a quitt en 1968 Les Beatles se sont eux m mes s par s moins d un mois avant le d but du tournage de Deep End Sur le film plane l ombre de la fin du plus c l bre groupe de musique pop et de l re d optimisme qu il a incarn e D autres l ments du film contribuent l inscrire dans l poque quoi qu ait pu en dire son auteur l affiche de l homme enceint emprunt e une campagne de pr vention qui marqua les esprits en 1970 et The Science of Sex la parodie de film ducatif que Skolimowski samusa tourner lui m me Toutefois ne confondons pas les cin astes qui expriment intens ment le pr sent et ceux qui se contentent de filmer l actualit ou de t moigner de lair du temps Jerzy Skolimowski fait partie des premiers of course m We oat Y 1 Dans ce texte nous entendons le mot outsider au sens litt ral de celui qui se tient en dehors Cependant dans le cas de Mike le film met galement en jeu le sens
25. qui nous occupe Le caract re la fois totalement logique et impr visible de la fin du film lattente d un v nement important d une preuve d ci sive la fr n sie d autant plus intense qu elle est rigoureusement entro pique les certitudes fuyantes et les points de rep re m con naissables le provisoire comme seule r alit les rapports entre le spontan et le pr m dit le r ve et la r alit l vident et l arbitraire du cin ma la recherche du d paysement du trop de sens plut t que de l insens la prise en charpe de plu sieurs registres et de plusieurs niveaux de lecture toutes notations entre autres qu on pourra confronter avec l exp rience que les lyc ens auront eu de Deep End quitte au passage revenir au D part Le D part Malavida SELECTION BIBLIOGRAPHIQUE Deep end Olivier Assayas Eaux troubles Cahiers du cin ma n 346 avril 1983 Philippe Azoury John Moulder Brown la m che est dite http next liberation fr cinema 01012348683 john moulder brown la meche est dite Michel Ciment Bernard Cohn Entretien avec Jerzy Skolimowski et Michel Sineux Le pourpre et le jaune Positif n 135 f vrier 1972 Dossier de presse de Carlotta Films http www mont blanc distribution ch deep_end DP 20DEEP 20END pdf Jerzy Skolimowski Jean Philippe Gravel
26. rieure on ne conna t que ce qui sen manifeste dans l espace des bains ses parents son ex petite amie Lorsque Susan lui demande o emporter la neige il r pond Aux bains bien s r comme s il n avait plus d autre horizon Susan travaille aussi aux bains mais m me si son amant y vient la retrouver elle a une vie en dehors de ceux ci D s lors qu il tombe amoureux de Susan Mike n a plus de vie priv e si ce n est celle de la jeune femme qu il tente de vampiriser On entre voit l endroit o loge Susan mais m me si l on suppose qu il vit chez ses parents on ne sait rien de celui o Mike passe ses nuits Quand on le voit plonger de nuit dans la piscine avec la pancarte du strip club un doute simmisce en est il venu dormir aux bains Autre cons quence de cette vie en vase clos la perte du sentiment du temps Le film s me des indices de sa continuit temporelle dans le dialogue des personnages mais les ellipses qui s parent chacune des journ es en ramenant chaque fois au m me microcosme don nent l impression d un temps indiff renci La compr hension tardive du fait que l int gralit du r cit s est d roul e sur une semaine peut tonner le spectateur comme peut l tonner le dernier jour la d cou verte de la neige bien que le film ait dispos des signes du contexte hivernal dans le dialogue et en montrant chaque soir cette nuit noire qui semble tomber tr s t t La confusio
27. sportif du terme le jeune homme est souvent montr en position de regard ext rieur mais aussi de concurrent a priori non favori et dont la performance est sinon victorieuse du moins inattendue Tea for the CAT STEVENS 4 ri en Blow up Warner Georges Best dans ses ceuvres Hillerman D COUPAGE NARRATIF Le minutage indiqu entre parentheses corres pond a celui du DVD dit par Carlotta Films G n rique La cam ra parcourt un v lo en gros plan Un jeune homme a v lo roule dans une rue vide Lundi 00 01 29 Mike est embauch par le directeur d un tablissement de bains Susan qui soccupe de la clientele f minine lui pr sente les lieux et le travail a effectuer Selon elle tant un garcon il percevra de bons pourboires Deux con frontations Mike 4 un premier client peu coop ratif Susan a la caissi re des bains Mike quitte les bains a la nuit tomb e Mardi 00 06 19 Un groupe de lyc ennes arrive aux bains Susan demande a Mike de s occuper d une cliente Le professeur profite du cours de natation pour peloter ses l ves Susan l observe a distance Pr textant un malaise la cliente appelle Mike a l aide en r alit pour lui faire subir un corps corps dont elle le lib re une fois parvenue l extase Susan rejoint Mike dans les combles et lui donne le pourboire que la cliente a laiss pour lui Elle tente de le convaincre de s arranger avec elle pour
28. tre pi g Ainsi ce qui semblait spontan peut r v ler soudain il suffit d un travelling avant arri re ou d un zoom son appartenance un plan pr m dit Tout est lisible plu sieurs niveaux on voit ainsi les irr alismes et les tranget s de Walkower et de La Barri re devenir explicables r alistes en un certain sens Le r ve et la r alit se livrent un change de bons proc d s au terme duquel il se ressemblent beaucoup Voil le domaine de Skolimowski convaincre en m me temps du carac t re vident et arbitraire du cin ma Un plan peut appartenir simultan ment deux ou trois contextes possibles o il aurait un r le diff rent mais plausible Il s agit uniquement de ne pas limiter le sens non pas en fai sant des films insens s mais au contraire en leur donnant trop de sens Ce qui compte cest le d paysement pendant quelques secondes ne plus reconnaitre le monde ne plus m me savoir si ce monde est fait a notre usage Pendant une seconde douter de tout et ne pas s habituer On s habitue moins vite aux choses lorsqu elles sont double ou triple sens C est ce que racontent les films il vaut mieux s agiter dans tous les sens que darriver quelque part C est aussi la mani re dont ils sont racont s il vaut mieux agiter tous les sens tous les registres Skolimowski est l homme qui dit voila un personnage si je le filme de loin cest de la com die musicale
29. 15 d cembre 1971 John Moulder Brown Jane Asher Karl Michael Vogler Christopher Sandford Karl Ludwig Lindt Erica Beer Diana Dors Anita Lochner Eduard Linkers Annemarie Kuster Burt Kwouk Louise Martini SYNOPSIS A quinze ans Mike a quitt l cole et trouv un premier emploi pr pos au vestiaire des hommes dans un tablissement de bains publics 4 Londres Susan plus ag e de quelques ann es s oc cupe de la client le f minine Elle l initie ce travail et lui pro pose un arrangement il pourrait arrondir leur paie aupr s de certaines clientes Mike s y refuse apr s en avoir fait l exp rience son corps d fendant mais tombe amoureux de Susan Il est vierge elle est fianc e un jeune homme ais qui lui a offert une bague orn e d un diamant tout en maintenant une liaison avec un professeur d ducation physique dont Mike a t l l ve Le soir venu Mike simmisce dans la vie de Susan du fianc et de l amant Il les suit au cin ma en discoth que fait barrage leur voiture Mike repousse les avances de son ex petite amie venue le voir aux bains et dune prostitu e Au cours d une de ses p r grinations nocturnes il sempare d une pancarte de strip club qu il croit tre une image de Susan et lui demande des comptes a ce sujet Un jour de neige il force les rangs d une course en plein air organis e par le professeur amant puis fait en sorte que Susan cr ve deux pneus de la
30. JERZY SKOLIMOWSKI MODE D EMPLOI Les premieres rubriques de ce livret plut t informatives permettent de preparer la projection Le film fait ensuite l objet d une tude pr cise au moyen d entr es vari es r cit sequence plan associ es des propositions de travail en classe Les dernieres rubriques offrent d autres pistes concretes pour aborder le film avec les leves Des rubriques compl mentaires s appuyant notamment sur des extraits du film sont propos es sur le site internet www site image eu consul tatio Le pictogramme indique un lien direct entre le livret et une des rubriques en ligne Directeur de la publication ric Garandeau Propri t Centre National du Cin ma et de limage anim e 12 rue de L beck 75784 Paris Cedex 16 T l 01 44 34 34 40 R dacteur en chef Simon Gilardi Ciclic R dacteur du livret Jean Fran ois Buir Conception graphique Thierry C lestine Conception printemps 2012 Ciclic agence r gionale du Centre pour le livre l image et la culture num rique 24 rue Renan 37110 Chateau Renault T l 02 47 56 08 08 www ciclic fr Achev d imprimer par Imprimerie Moderne de l Est juillet 2012 SOMMAIRE Synopsis et fiche technique R alisateur Signes particuliers Acteurs Deux jeunes pros improvisent Gen se Londres sur lsar Contexte Swinging or not swinging D coupage n
31. Tati Deep End porte lui aussi un regard distanci sur la soci t des loi sirs et sur l individualisme qui lui est inh rent Cette distance sensible dans la largeur du plan que nous tudions contribue l ironie dont les deux cin astes font preuve l gard de la soci t en question bienveillante chez Tati plus acide chez Skolimowski On pense galement Ren Magritte ce plan ayant quelque chose dA la fois sur et hyper r aliste les tres et les choses qui y figurent s obs tinent tant n tre visiblement qu eux m mes le plongeur plonge les coll giens font des b tises les employ s prennent leur pause que leur essence finit par tre frapp e d un doute Paradoxe inqui tant Se m fier de l eau qui dort l inqui tude est aussi due l extr me stylisation visuelle de ce plan Les teintes d eau qui le dominent menacent de dissoudre les personnages quand les mul tiples lignes qui sy entrecroisent accentuent leur division en groupes s par s de ce point de vue c est plut t Mondrian qui vient l esprit La disposition des objets est au mieux instable voire absurde tout est suspendu la lampe au bout de son c ble la cage au dessus du bassin pr caire l installation du d jeuner de Mike et de Susan la planche aux pots de peintures pos e sur deux chelles ou vibratoire la planche du plongeoir A posteriori on peut consi d rer plusieurs des composantes de ce plan ici diss min es comme d
32. a choisi de placer cette phrase en ouverture du film au d but de la chanson mais aussi de rendre la chute de celle ci encore plus soudaine et brutale que dans la version de l album Ces deux variations vont dans le sens de la structure en boucle du film qui se termine comme il a commenc intens ment dans le sang et au son de Cat Stevens 2 Deep End un titre double fond En anglais the deep end d signe en premier lieu la zone la plus profonde d une piscine celle o l on n a pas pied Cette expression a donn le titre fran ais rarement utilis Le Grand Bain qui sugg re la dimension initiatique du r cit en sous entendant que le h ros va devoir grandir et se jeter l eau mais qui occulte les sens de lex pression to go off the deep end li s au danger que repr sente cet endroit o l on peut s enfoncer Cette expression a plusieurs sens aller trop loin en particulier dans le domaine amoureux agir de fa on irrationnelle en se laissant d passer par ses motions et par ses fantasmes basculer soudainement dans une col re violente Toutes ces nuances d finissent le comportement de Mike l gard de Susan Elles permettent aussi de mieux anticiper la fin du film o avant m me son geste fatal Mike si doux jusqu alors se comporte violemment avec Susan d abord dans le m tro puis dans la piscine quand il la baillonne pour l emp cher de r pondre au professeur de s
33. a jeunesse sa m connaissance des usages ses v tements de prol taire endimanch Pas swinging pour un penny et pourtant c est lui que nous allons voir danser vitant toute incursion inutile sur la piste de danse c est aux basques de Mike et ses d placements en tous sens que la cam ra va coller 2 Pourparlers Notons la fr quence chez Skolimowski des guichetiers caissi res agents d accueil en tous genres F roces parfois ou charmants comme la r ceptionniste du night club ce ne sont pas les tres qui sont vis s mais la fonction celle du contr le des fronti res et du maintien de l ordre en particulier co nomique Les mani res polic es ne changent rien l affaire le directeur du cin ma de sexploitation a beau se prendre pour un gentleman c est le triste cer b re d un endroit sordide Une plume doie a beau remplacer le simple stylo un contrat reste un contrat Les tractations autour du prix d entr e et d inscrip tion au night club sont les premi res manifestations mercantiles d une s quence o pratiquement tout fera l objet d un monnayage As you know the job pays reasonably well cette phrase avait t la premi re adress e Mike au d but du film par le directeur des bains La progression de cette s quence sera celle de la fonte de la paie raisonnable que Mike s est vu remettre la fin de la pr c dente mesure que lui sera demand de l ar
34. a r ceptionniste et Mike lui m me qui sont pris dans les rets de ce travelling circulaire peut tre parce que la jeune femme n est que le substitut d une Susan alors invisible C est une autre donn e structurante de cette s quence a la quasi absence de Susan a P cran r pond une nu e d avatars de celle ci incar nant tel ou tel de ses qualit s ou de ses d fauts la r ceptionniste les deux jeunes filles affam es la pros titu e enfin la pancarte du strip club qui semble l aboutissement de ces figures de substitution et de la frustration de Mike face a celles ci Mais dans la scene ou Susan avait annonc quelle f terait ses fiancailles le lendemain c tait bien sur elle que Mike avait d vid son fil 4 coudre comme pour la prendre effectivement dans des rets t nus mais pas moins inqui tants Plus tard le cerle qu il trace autour d elle dans la neige peut tre vu comme une n cessit pratique mais aussi comme une prise de possession magique et c est dans l espace cette fois rectangulaire du bassin que Mike attirera Susan la retiendra et la tuera 4 Parmi les substituts de Suzanne la prostitu e occupe une place de choix cette figure de femme m re dans le spectre f minin que met en sc ne le film elle est moins s duisante que Susan mais plus que la caissi re des bains et beaucoup plus que la premi re cliente est consacr e une s quence dans la s quence un arri re monde en r duction
35. ar ons et de son enfant Le personnage de Susan pourrait faire l objet de critiques similaires du fait de son atti tude envers Mike Parfois bienveillante elle lui explique ses t ches lui conseille de ne pas croire les graffitis tendre maternelle voire amou reuse scene o elle l observe dans la chaufferie et celle de l homme enceint elle embrasse m me au cin ma Mais elle se montre aussi violente gifle coups v lo cras attitude avec la m re de Mike et entretient l ambiguit en ne disant pas clairement si elle est la strip teaseuse de la pancarte Pour nuancer ces jugements on peut rappeler les aspects positifs de ce personnage mais aussi les propos de l acteur John Moulder Brown Ce gar on lui pourrit la vie Elle volue dans un milieu agressif pas dans celui des classes moyennes Ils souffrent et s endurcissent face la vie Alors que Jane Asher est nettement plus s v re l gard de Susan Moulder Brown cherche expliquer son comportement en pointant les exc s de Mike mais surtout en rappelant l arri re plan social du film Skolimowski signale les efforts de Susan pour s lever de sa condition initiale les pourboires la confection des coussins l importance quelle donne au prix de sa bague de fian ailles Pour d passer le simple jugement moral on se demandera si l image que Mike se fait de Susan est conforme a celle que le film semble donner d elle A quel point id alise t
36. arratif R cit hard week of days and nights Mise en scene faut bien que le corps exulte S quence La fi vre du samedi soir Motif Jaune sur blanc tout fout le camp Plan Ceci n est pas une piscine Technique Acteurs et cam ra m me combat Filiations Un h ritage fran ais Pistes de travail Critique L ternel retour S lection bibliographique 10 12 14 15 16 17 18 20 FICHE TECENIQUE Affiche originale fran aise Deep End tats Unis R F A Royaume Uni 1971 R alisation Sc nario Image Son D cors Musique Montage Producteurs Production Distribution France Dur e Formats Tournage Sortie France Interpr tation Mike Susan Le professeur d ducation physique Chris le fianc de Susan Le directeur des bains La caissi re des bains La premi re cliente de Mike Kathy son ex petite amie Le directeur du cin ma L h tesse du night club Le vendeur de hot dogs La prostitu e Jerzy Skolimowski Jerzy Skolimowski Jerzy Gruza Boleslaw Sulik Charly Steinberger Carsten Ulrich Christian Schubert Tony Pratt Max Ott Jr Cat Stevens The Can Barrie Vince Judd Bernard Lutz Hengst Helmut Jedele Maran Film Bavaria Atelier Kettledrum Productions Inc 1971 Ursulines Distribution 2011 Carlotta Films 1h 31 35 mm couleurs 1 1 85 avril juin 1970
37. ces trois citations Dans Deep End la vis e essentielle ne serait pas de dresser un tableau du Londres de la fin des sixties mais a travers celui ci d avoir un point de vue critique sur un tat plus g n ral de civilisation disons occidentale ou la d termination majeure n est plus politique comme c tait le cas dans le monde communiste que Skolimowski a d quitter mais mat rielle Dans la mesure o il s exprime en cin ma ce point de vue est d autant plus pertinent quil sexerce dans le cadre de ce champ d exp rimentation particulier Londres fin des ann es 1960 a la fois plus spectaculaire et cin g nique et plus repr sentatif d un tel tat de civilisation que ne l auraient t au m me moment d autres chantillons de celle ci Ce nest pas un hasard si Skolimowski a d plac son regard de la Belgique du D part au Londres triomphant De m me trois ans plus t t Italien Michelangelo Antonioni est il venu y tourner Blow Up autre film rien moins que b at face la capitale culturelle de l poque A son propos on pourrait reprendre ce qu un r dacteur du New York Sun a crit en 2007 en parlant de Jane Asher et Paul McCartney Deep End perhaps the least swinging vision of swinging London ever made peut tre la vision du swinging london la moins swinguante jamais propos e Mettons de c t P prouvant R pulsion du camarade de Skolimowski Roman Polanski ce huis clos horrif
38. cipation a propos d un cin aste a ses d buts qui plus est il fallait un talent peu commun Et si l tude pour lui m me d un texte critique sans s en tenir au strict b n fice analy tique concernant Deep End est susceptible de pr senter quelque int ret p dagogique dans le cadre d un cours de lyc e on pourra sat tarder avec les l ves sur ce ph nom ne Au besoin en le distin guant de ce qui constitue la grande majorit de l activit dite cri tique savoir a minima une prescription consum riste courte vue chaque film comme objet de consommation potentiel plus ou moins recommand au mieux ou au pire la reprise comme un acquis de ce fameux auteurisme promu par les Cahiers o l on sen tient montrer en quoi tel nouvel opus d un r alisateur d cr t auteur vient peu ou prou confirmer lunivers qu il est cens avoir cr dans ses pr c dents films Ce qui n a que peu voir avec la fa on dont Serge Daney dans le texte ci dessus explore avec acui t une vision du monde pour reprendre une vieille expression de la Politique des auteurs celle de Skolimowski qui par une alchi mie critique rien moins que myst rieuse se trouve sans doute aussi en partie tre la sienne Et puis tout de m me par sa hauteur de vue qui participe de sa capa cit d anticipation critique ce texte pourra permettre d effectuer avec les l ves un travail dappro ondissement du film
39. club sexcuse platement aupres du portier rivalise de courbettes avec le vendeur de hot dogs garde une distance respectueuse avec la prostitu e n envoie pas promener les deux donzelles affam es la faim est un des motifs sous jacents du film voir celle qui tenaille Susan dans le bassin final mais leur dit de ne pas se moquer du groupe d vang listes C est cependant le m me Mike qui sous l empire de la frustration fera peu apres un esclandre dans le m tro et sen prendra a ses passagers en termes peu choisis Taccueil du night club Skolimowski use d un effet de cam ra voyant dont on ne prend la mesure pro ph tique qua la lumiere du film tout entier Pendant toute une minute la cam ra effectue un travelling circulaire autour de la r ceptionniste et de Mike Tour de force technique d autant qu au tournage ce mou vement qui parcourt plusieurs cercles complets avait t r alis d un seul tenant Au montage Skolimowski Fa d compos en portions de cercle successives s pa r es par de courtes ellipses Malgr cette d coupe ce vertige visuel garde quelque chose d un peu m as tu vu bien qu apr s ses deux premiers films Skolimowski se f t promis d carter tout mouvement de cam ra par trop virtuose Sur le moment on a tendance a l as socier a la transe musicale cens e r gner en ces lieux mais r trospectivement on peut le faire entrer dans une s rie d encerclements de Susan par Mike Ici ce sont l
40. de plus pres c est du m lodrame d en core plus pr s c est du cin ma v rit Tout est vrai Que chacun choisisse ce qui lui convient Moi je choisis tout Un texte pr monitoire Fin du suspense l auteur du texte qui pr c de n est autre que Serge Daney Vingt ans apr s sa mort ses crits sur le cin ma ne cessent d tre cit s Un peu trop souvent pense t on parfois Mais c est un fait depuis la disparition d Andr Bazin Daney reste le meilleur cri tique de cin ma que la France ait connu Du coup quitte a le d plo rer on ne peut semp cher dy revenir Pour justifier tout de m me cet ni me retour Daney il faut pr ci ser que ce texte n est pas une critique pr te a l emploi de Deep End qu on serait all chercher pour la reprendre a notre compte Paru dans le n 192 des Cahiers du cin ma sous le titre Moins par moins gale plus il s agit en fait de la critique d un film ant rieur de Jerzy Skolimowski qu il tourna en Belgique en 1967 Le D part Pourtant ce texte semble nous parler tout aussi bien de Deep End Pr monition critique Plut t confirmation a priori du fait que Skolimowski est un auteur au sens ott l entendaient les Cahiers du cin ma entretenant au dela de la diversit des films et des contextes de r alisation une certaine constance du regard et du propos Rien de magique dans cette affaire donc Cependant pour r ussir une telle critique par anti
41. derri re Susan et se met la caresser Elle le gifle puis embrasse tan dis que Chris va chercher le directeur du cin ma Deux agents de police emm nent Mike dans le bureau de ce dernier Susan et Chris tant partis les policemans donnent cong au jeune homme Chris raccompagne Susan chez elle Ils se dispu tent propos de Mike qui continue de les suivre distance puis se r concilient Chris repart seul pr c d de Mike qui dit un policeman que lhom me qui le suit l importune Mike s clipse pendant que le policeman contr le l identit de Chris Vendredi 00 34 30 Pause de Susan et de Mike dans les combles Le lendemain Susan doit choi sir avec Chris sa bague de fian ailles La soir e se terminera au Skol une boite de nuit Susan demande a Mike de soccuper de sa sec tion Comprenant quelle a rejoint le professeur d ducation physique il d clenche le signal d alarme Susan est interrompue dans ses amours les clients des bains se rassemblent dans le couloir Col re du directeur panique de la caissi re qui fait se r pandre au sol la mousse de l extincteur Le policeman qui la veille a interpell Chris passe la cabine de Mike lequel est soulag lorsqu il lui demande la direction des toilettes Le soir Mike tente de barrer la route la Triumph du professeur qu accompagne Susan Susan prend le volant et crase le v lo de Mike Samedi 00 41 08 Kathy l ex petite amie de Mike
42. diamant Layant r cup r elle s appr te partir puis revient vers Mike Ils s treignent mais leur rapport semble un chec Susan veut rejoindre Chris Mike la retient Le ma noeuvre arrive dans la nuit et ouvre les vannes de la piscine qui se remplit tandis que Susan tente d chapper Mike Alors quelle sort du bassin il pousse la lampe sur elle Frapp e la nuque elle sa aisse Mike treint dans l eau son corps inanim RECIT A hard week of days and nights Vous aurez votre paie chaque samedi cette simple phrase du direc teur des bains lors de l entrevue qui ouvre Deep End permet de dire que l histoire s tend sur une semaine du lundi au dimanche A par tir de cette sc ne initiale on assiste une succession de jours dont chacun se pr sente l cran sous une forme scind e la journ e de travail puis la soir e Au sixi me jour Mike re oit sa paie c est donc le samedi On peut ainsi identifier chaque jour qui compose le r cit le lundi correspondant au premier d entre eux Envisag a pos teriori le r cit para t ob ir la temporalit famili re d une semaine de travail de la classe moyenne avec sortie le samedi soir et loisir le dimanche La trag die finale a lieu lors du passage de la tr ve dominicale dans Deep End jour d clatement des conflits au d but d une nouvelle semaine de travail la main du destin semble tre celle de l ouvrier des bains qui
43. e mais il s arr te trop t t croyant avoir remport la course D pit il brise une bou teille et place les tessons sous les pneus arri re de la Triumph qui cr vent lorsque Susan d marre celle ci Exc d e Susan frappe Mike qui croit qu elle lui a cass une dent en r alit lors du choc avec cette derni re le diamant de la bague de fian ailles est sorti de son logement et s est perdu dans la neige Mike trace un cercle autour de Susan Ils ramassent la surface de neige ainsi d limit e et lemportent aux bains Susan place une tiquette des bains sous l essuie glace de la Triumph Aux bains Mike a l id e d utiliser la bouilloire du directeur et une lampe suspendue au dessus de la piscine vide pour faire fondre la neige en la fil trant a travers le collant de Susan Guid par l in dice laiss par celle ci le professeur arrive aux bains et lui demande les cl s de la voiture Susan press e par son amant que la situation exasp re refuse de le suivre et lui ass ne ses quatre v rit s Il part accabl Pendant que Mike continue faire fondre la neige Susan t l phone son fianc pour lui dire quelle sera en retard Lorsqu elle revient dans le bassin elle trouve Mike allong sous des draps nu avec le diamant sur le bout de la langue Elle l enjoint de ne pas l avaler fait mine de s en aller se ravise et se d shabille Au lieu de profiter de la situation qu il a cr e Mike lui rend le
44. elle qui existe entre Skolimowski et les jeunes cin astes britanniques En effet Deep End semble reprendre l id e que Godard de Vivre sa vie Deux ou trois choses que je sais d elle n a cess de moduler au cours des ann es 1960 celle de la prostitution ordinaire laissant entendre que l tat de prostitu e s est g n ralis dans les soci t s modernes Godard et Skolimowski se rejoignent galement par une distanciation grin ante qui passe par le nom de certains personnages Angela Continental le nom de la strip teaseuse l image de Susan rappelle Eve Democracy de One One par une m fiance l gard d une virtuosit trop mani feste Skolimowski scindant son travelling multi circulaire l accueil du night club rappelle Godard coupant en deux l immense travelling lat ral de Week end et par l utilisation de la couleur de m me que Jacques Demy mais de fa on plus explicite Godard et Skolimowski semblent de prime abord perp tuer une utilisation spectaculaire de la couleur pour mieux la sectoriser la th oriser la traiter froid utilisation du rouge dans Deep End semble reprendre la formule fameuse de Godard C est pas du sang c est du rouge 17 18 PIS TES DE TRAVAIL 1 But I Might Die Tonight La chanson de Cat Stevens ouvre le film puis reparait avec des arran gements diff rents chaque fois que Mike est montr sous l eau avec Susan Les paroles de la chanson semb
45. es pi ces du puzzle de la mort finale de Susan la lampe l eau du bassin l cha faudage qui croulera au moment fatidique Une pancarte plac e sous le grand plongeoir mentionne d ailleurs DANGER DEEP END en lettres rouge sang D cid ment au dela de la tasse que Mike va boire quelques instants apres ce plan s avere faussement tranquille De beaux petits cubes Mike va chercher du shampoing dans la cabine de Susan qu on d couvre en meme temps que lui 00 07 43 Ce plan s inscrit dans une s quence mar qu e par la perversion sexuelle entre le professeur qui pelote ses leves et le quasi viol de Mike par la folle de football On peut s attendre a ce que l int rieur de la cabine de Susan soit lui aussi sexualis sur le mode r v lation de l intimit d une femme un jeune puceau mais le plan d joue cette attente Ce qu on voit c est un ali gnement de cubes souriants l image des smileys dont la vogue commen ait au debut des ann es 1970 dont la nature nous echappe un ilot d inno cence au coeur d un grand bain de per versions Avec les leves on tentera de se rememorer les moments ou ces coussins reapparaitront dans le film et comment ils seront leur tour associ s l argent la col re au d sir ou la frustration On s int ressera aussi a la fa on dont la mise en scene souligne le caract re nigmatique de ce petit moment de sid ration les cubes sem blent se
46. ession suscit e par ces plans d nu s de mouvement manifeste est diff rente de ce quelle e t t avec une cam ra pos e sur un support Apr s le g n rique de d but o la cam ra embarqu e sur un v hicule pr c de et accompagne le mouvement de Mike v lo les premiers gros plans dans le bureau du directeur des bains sont apparemment fixes mais en fait affect s de micro mouvements F t ce un niveau infra conscient ces mouvements minimes d s la cam ra port e modifient la per ception des premiers plans aux bains apr s l nivrante libert du g n rique celle ci se fige pour laisser place une f brilit un peu inqui te Travail manuel Quand s agissant de 35 mm on parle de cam ra port e on sous entend l paule Or certains plans de Deep End n ont pas t tour n s cam ra l paule mais litt ralement la main Ainsi de ce plan qui au deuxi me soir du r cit montre la sortie des bains de Susan en manteau jaune qui vient au devant de la cam ra Tourner ce plan l paule aurait entra n des saccades dues au fait que Steinberger a film Susan en marchant reculons pour mieux saisir son pas conqu rant En 1970 il n existait pas encore de syst me de stabili sation des prises de vues en cam ra port e le proc d Steadicam ne serait invent et mis en service que quelques ann es plus tard tant donn le poids d une cam ra 35 mm le fait de la porter bout de
47. faire fondre pour le r cup rer Le cin aste ajoute Le sujet du film cest Crime et chdtiment Crime de la fille contre le garcon Elle le trompe avec son exp rience ses vingt trois ans sa beaut des armes auxquelles il ne peut r sister lui naif de quinze ans Elle le d truit Elle sera d truite Je veux laisser les gens sur un sentiment mitig de piti et de satisfaction Rendre la fille anti pathique mais qu on regrette sa mort Le Monde 16 d cembre 1971 Une premiere version du sc nario s duit le producteur am ricain Judd Bernard qui convainc la soci t allemande Bavaria d entrer en coproduction En cons quence ce film so british sera tourn en grande partie Munich Le producteur allemand souligne que si le sc nario est termin en deux semaines il sera possible d avoir de la vraie neige l cran a Munich il neige encore parfois fin avril Ce coup dacc l rateur place d embl e le film sous le signe d une fr n sie cr atrice qui le sous tendra tout entier ce qui convient au carac tere bouillonnant de Skolimowski Du fait de cette pr cipitation il est impossible d organiser des r p titions Jane Asher et John Moulder Brown ne se rencontrent que le premier jour de tournage a Munich pour leur scene de bagarre dans le parc enneig une preuve du feu qui par chance atteste d embl e l alchimie entre les deux acteurs Le tournage semble b ni le
48. gard d un m pris plus ou moins affich et simposaient en l accompagnant l int rieur des bains Outre que cette scene explicitait des questions de rapports de classe que le film pr f re voquer implicitement elle trahissait une constante du r cit ne pas sortir des bains au cours de la journ e Bien quelle claircit certains aspects de Deep End la dis pute au bord de la piscine la scene de la course dans le parc mieux valait donc la retrancher Dans une autre scene cart e Mike ayant recu sa premiere paie dis posait largent devant lui de telle sorte que cela forme le pr nom Susan Pour sa part cette sayn te ne d rogeait pas a la ligne prin cipale de lobsession de Mike au contraire elle l assenait de fa on peut tre trop directe Barrie Vince quant a lui pr cise que le pr nom n tait pas suffisamment lisible Ce qui d signe la marge troite dans laquelle Deep End se tient viter d tre trop explicite tout en faisant en sorte que ce qui appara t l cran ait une limpidit presque clas Deep End Souvenirs des sc nes coup es Fiktion Factory sique De plus ce moment suspendait la musicalit du film en le ralentissant juste avant le passage la fi vreuse s quence de Soho Une quatrieme scene avait t tourn e mais ne fut m me jamais mont e qui aurait d prendre place la toute fin du film Apres la mort de Susan Mike se ruait en pleurs l ext rieur des bains et sen
49. gent pour l entr e au night club et au club de strip tease pour satisfaire deux jeunes filles affam es et m me selon la prostitu e qui a fait mine de lui offrir boire pour son temps sa boisson ses motions Plut t que de fonte r elle il s agit d ailleurs de la menace de celle ci car Mike fait la plupart du temps en sorte d chapper la ponc tion Par un beau paradoxe le seul personnage au b n fice duquel il d bourse r guli rement de largent en consommant jusqu l absurde est le vendeur de hot dogs Il est pourtant aussi le seul qui ne para t pas prompt vampiriser sa paie au point d avoir son gard un geste commercial qui a toute l ap parence du d sint ressement le don d un ni me hot dog Il y a bien galement le groupe de jeunes van g listes que croise Mike mais la saintet ne semble pas int resser Skolimowski outre mesure Quoi qu il en soit dans ce contexte de marchandisation g n ralis e le vol de la pancarte qui conclut la s quence para t presque moralement justifi Anglais jusqu au bout Mike oscille entre Robin des Bois et Jack l ven treur sans oublier un autre mythe anglais celui de Jekyll et de Hyde 3 La s quence joue d ailleurs discretement de ces deux visages de Mike Pour l essentiel il y est exem plaire de politesse et d gards Il n oublie pas de lan cer un sonore Thank you avant de s enfuir du night
50. hriller dans lequel l assassin use d un objet tranchant de Psychose Scream en passant par Halloween et Vendredi 13 Diana Dors ann es 1950 CON TEXTE Swinging or not swinging Swinging London c est une des expressions les plus utilis es propos de Deep End Comme toute vidence qu on ressasse un peu trop il faut toutefois la relativiser Jerzy Skolimowski nous y invite Pai voulu traiter une histoire qui pouvait se d rouler n importe o nimporte quand voila pourquoi le film n est pas dat pr cis ment ni plac sur un plan social ou autre Ecran n 2 f vrier 1972 N anmoins il ne faut pas non plus prendre cette citation pour argent comptant d autant qu on peut lui en opposer une autre Je filme ce que je vois ce que je ressens Deep End est peut tre marqu par le regard d un tranger sur l Angleterre Un stand de hot dogs me fascinait parce que a n existait pas en Pologne alors que les Anglais ne le remarquaient m me plus Les Inrockuptibles 7 avril 2011 Ou encore Je n avais pas de grand projet critique ma cible tait petite et pr cise Mais si on y r fl chit si on prolonge la critique Sur les rapports entre les gens largent le pouvoir Ici En Pologne les filles ne sont pas comme a elles n utilisent pas le sentiment pour leur promotion sociale Elles pen sent l amour Le Monde 16 d cembre 1971 Tentons de faire la synth se de
51. ica Beer dans le r le de la cais si re Karl Michael Vogler dans celui du professeur d ducation phy sique expression entendre tr s litt ralement en occurence au physique d clinant Diana Dors ex sex symbol ayant consid rable ment forci qui interpr te la premi re cliente de Mike ou carr ment d cati le directeur des bains dont le visage ravag est oppos celui du jeune homme d s le d but du film le premier client r calcitrant la grosse dame gar e dans la cabine de Mike Skolimowski a tr s vite retenu Asher et Moulder Brown la premi re pour sa force de caract re et sa flamboyance rousse le second pour sa gr ce m l e de gaucherie et de timidit inqui te sous un vernis de sophistication Tous deux devront forcer leur accent afin d vo quer l origine prol taire de leurs personnages Un autre acteur anglais compte pour beaucoup dans la gen se du film m me Sil y tient le r le relativement mineur du fianc de Susan Ex enfant vedette au creux de la vague en 1970 Christopher Sandford accepte outre son r le d tre le r p titeur chaperon d un John Moulder Brown qui a dix sept ans n a pas l ge l gal pour travailler en Allemagne o une bonne part du tournage a lieu voir GEN SE p 4 Sandford fait galement office de dialogue coach pour les acteurs allemands qui forment l essentiel de la distribution ils seront en fin de compte doubl s par des acteurs anglais mais leur
52. il Susan Dans quelle mesure la jugeons nous non pas objectivement mais par empathie avec le jeune homme son sourire lorsque Mike boit la tasse sa moue lorsqu elle part en manteau jaune et mini jupe sous le regard de Mike On peut galement observer la fa on dont Skolimowski tri vialise l image de Jane Asher li e au Swinging London 5 The Science of Sex La scene au cin ma ducatif est l occasion d une mise en abyme moins th orique plus l g re qua l accoutum e Jerzy Skolimowski s est plu filmer lui m me le risible The Science of Sex plus silly que dirty pour reprendre les termes de Susan Rejet par celle ci ce lieu de plaisir suppos donne bien lieu une jouissance pour Mike et pour le spectateur et non a un discours facilement r proba teur Mike h ros de cin ma ose un acte de bravoure il pelote Susan est pay d une gifle puis d un baiser qui le rend b at Ici toute gravit s clipse C est moins la cruaut de Susan que son amu sement qui pr vaut son sourire on sait que Mike ne sera pas mis en danger Les m les le voyeur l entr e du cin ma le fianc de Susan et ses cacahu tes sont montr s de sorte que l attitude de Mike en soit grandie bien qu il se comporte comme un pervers de salle obscure Cette sc ne pr c de d autres moments de drague ado lescente en salle de cin ma Un t 42 Robert Mulligan Amarcord Federico Fellini Mes
53. ique tourn un peu avant la p riode de plus grande efflorescence du Swinging London prend vite le parti de s enfermer double tour Mais m me si l on s en tient Antonioni et a Skolimowski on peut faire mentir l affirmation du journaliste Christopher Booker selon laquelle il semblait que personne ne se tint en dehors de la bulle et n observat combien elle tait superficielle gocentrique voire horrible en cin ma au moins deux outsiders le firent un Italien et un Polonais Cato Georgie Diana and Jane Un Polonais qui de surcro t fit un d tour par Munich afin de repr senter Londres bien qu il f t imputable des contraintes de production ce d tour renfor a peut tre cette position d outsider qui favorise le regard critique De m me la face du film e t elle t chang e si Skolimowski pour la musique ne s tait adress quau Londonien Cat Stevens Les accents sombres du groupe allemand Can sur la s quence de Soho haut lieu du Swinging London entra ne celle ci vers une ambiance moins swing que pr pogo regardant moins vers la fin des sixties que vers des seventies plut t d senchant es Ce d senchantement sera d entre autres choses une crise mondiale li e au prix du p trole et donc ce qui chez l auteur du D part fait office de symbole principal du mat rialisme capitaliste l automobile Tous les l ments typiquement britanniques que convoque le film participent peu ou p
54. its de improvisation sont les courbettes chang es par Mike et par le vendeur de hot dogs c est l interpr te de ce dernier Burt Kwouk qui initie ce geste que Skolimowski fait ensuite r p ter sans cesse aux deux com diens la sc ne qui se d ploie partir de l affiche de l homme enceint la relation de complicit de s duc tion et d rotisme entre Asher et Moulder Brown est alors d une fra cheur remarquable et le corps corps entre Mike et sa premiere cliente Ayant adopt sans broncher la tenue dont Skolimowski latfuble pour cette scene Diana Dors accepte l invitation de celui ci a improviser une part de ses dialogues en sinspirant de l intensit qu il a mise lui raconter le match Manchester United Northampton Town auquel il a assist Le cin aste polonais aurait recommand a Moulder Brown de se laisser aller A la fantaisie de Diana Dors et suppose ce dernier a Diana Dors de ne pas le m nager le moins du monde GENESE Londres sur Isar Le premier titre envisag pour Deep End est Starting Out Or de points de d parts le film en a au moins trois l partir de 1967 Jerzy Skolimowski est persona non grata en Pologne Il r alise Le D part en Belgique puis sacquitte sans convic tion d une com die historique The Adventures of Gerard Deep End est son v ritable premier film anglais irrigu par ce qu il per oit du pays ow il va vivre pendant de nombreuses ann es 2 Londres un fai
55. lent d crire la situation de Mike La phrase work hard boy and you ll find one day you ll have a job like mine est reprise lors du dialogue de Mike avec le direc teur des bains and if you work hard who knows You may end up behind this desk one day On pourrait donc assimiler le narrateur de la chanson Mike Pourtant le rejet d un travail envahissant I don t want to work away et le refus du conformisme doin just what they all say contrastent avec l attitude plut t docile de Mike qui semble satisfait de son emploi aux bains La chanson exprime rait donc tr s t t un d sir d mancipation que Mike assouvira plus tard dans le film To say yes or sink low dire oui ou couler lente ment associ au titre du film rend cette anticipation encore plus vidente la fois pr monition vocation de la mort et fausse piste puisque ce n est pas Mike qui mourra Il nest pas tonnant que Skolimowski se soit int ress Cat Stevens dont les ambiances musicales et la voix passent souvent du calme la tension sans crier gare Mais le cin aste a tout de m me retravaill la chanson Dans la version de l album Tea for the Tillerman la phrase titre que Skolimowski avait indiqu e Stevens comme source d ins piration surprend par sa violence en pr cipitant la fin de la chanson tr s courte Elle produit donc le m me effet que la fin du film pour beaucoup de spectateurs Skolimowski
56. li ser lors de chacune des ann es qui m nent au dipl me pour consti tuer au bout du compte son premier long m trage Rysopis Il y joue un jeune homme tiraill entre jeunesse encore vive et maturit personnage qu il interpr te de nouveau dans Walkower Un quatri me opus Rece do g ry anti stalinien est interdit par la censure polonaise Skolimowski le remontera en 1981 D s lors p r grinations internationales tournages et coproductions entre Belgique Tch coslovaquie Italie Royaume Uni Suisse R FA France tats Unis Pauses cin matographiques 1972 1978 1991 2008 durant la seconde il se consacre la peinture Retour en force avec deux films Quatre nuits avec Anna et Essential Killing o se retrouvent ses motifs th mes et proc d s de pr dilection personnage solitaire survie concentration temporelle minoration de la technologie minimisation des dialogues dialectique d placement immobilit fascination pour le processus et pour le changement d tat femme d sir e et ou scrut e objectiv e r v r e abus e Jerzy Skolimowski dans Walkover 1965 Ce qui suit est un montage d extraits dentretiens que Jerzy Skolimowski a accord s tout au long de sa carri re Le d part La base de mes deux premiers films c est un petit po me que j avais crit dans un recueil publi en 1960 il me semble que dans les quelques vers de ce po me il y a non seulement les sujets de mes deux fi
57. lier que mes films renvoient aussi cette part de jeu qui se trouve normalement dans la vie et que le jeu proprement dit se trouve concr tiser cette part de jeu profond qui ne se trahit pas toujours l ext rieur mais qui ren voie souvent ce qui se passe bien en dessous de la peau Je crois aux caract ristiques behavioristes Je suis attentif aux gestes des gens aux mouvements presque fortuits aux pauses dans le dis cours Ce sont les l ments d une mosaique dont on peut jouer Un sport ne r v le pas uniquement votre attitude face a la victoire ou a la d faite pendant une partie les joueurs sont nus ils n ont pas le contr le de tous leurs muscles Ce qui nous plait dans une partie de poker cest le moment ou un visage impassible laisse chapper un tressaillement d motion ultar pe atio U 2 r m ACTEURS Deux jeunes pros improvisent D Les Anglo Saxons qualifient Deep End de coming of age film film de passage l ge adulte bien que Jerzy Skolimowski quilibre la sentimentalit li e ce type de r cit par un sens aigu de la cruaut et du grotesque Ce qui en revanche conforte cette cat gorisation Cest le fait que trois des acteurs du film ont uvr au cin ma et la t l vision depuis ladolescence voire depuis l enfance dans le cas de Jane Asher et de John Moulder Brown et que le cin aste polonais les confronte a des acteurs d ge m r Er
58. lms mais encore les sujets de tous les films que je pourrai faire lavenir Le po me en question Quand il aura tu les ann es Quand il aura fait fi de la jeunesse et de lamour La gorge serr e il voudra tout refaire Ft il ne refera que le n ud de sa cravate Je suis tr s romantique La charge des cavaliers polonais contre les tanks allemands est elle aussi romantique Jai pratiqu un peu tous les arts de la boxe la litt rature Jai une peur panique d ennuyer les gens Ma propre vie est tr s rapide Je ne supporterais donc pas de raconter quelque chose de facon lente Jai t po te ce qui me porte naturellement montrer les choses de fa on symbolique ou m taphorique Travail au noir D s que je commence penser un film je vois ce film l devant moi Je ninvente pas un sujet mais seulement des images ces images bougent il y a quelqu un qui marche et il lui arrive telle et telle chose Je vois ces choses de fa on floue tr s li e en un flot o tout est continu Au bout de ce flot il y a le film termin Je pense que moins il y a de dialogue meilleur est le film parce que les mots prennent alors une v ritable importance Jai toujours cru dans ce bon vieux mod le grec un seul lieu une courte dur e un petit nombre de personnages FILMOGRAPHIE 1964 Rysopis Signes particuliers n ant 1965 Walkower Walkover 1966 Bariera La Barri re 1967 Le D part
59. n temporelle li e aux bains culmine lorsque Susan et Mike s y enferment de nouveau pour faire fondre la neige le plan ext rieur de l arriv e de la voiture du man uvre dans la nuit r v le un coulement de plusieurs heures dont malgr la dilatation de la scene on n avait pas pris la pleine mesure En outre le film joue du temps long du r cit d apprentissage qui doit faire croire que l apprenti du d but la fin du r cit a beau coup v cu Apr s seulement quelques jours aux bains Mike fait le blas aupr s de ses parents de la deuxi me cliente et de son ancienne petite amie Il dit m me celle ci d un air aguerri Cette vieille his toire semble si trange comme si ce n tait plus du tout moi 10 USE EN SCENE Il faut bien que le corps exulte la fin de Deep End un suspense s av re tre une fausse piste la crainte d une mort par lectrocution du fait de la proximit des fils lectriques d nud s et de l eau du bassin Plus que le d nudage des fils c est la mise nu des corps qui est en fin de compte fatale ce qui peut conforter ceux pour qui la lib ration sexuelle de la fin des ann es 1960 n aurait t qu une vue de l esprit Quoi qu il en f t de son opinion Skolimowski avait ce sujet deux possibi lit s Soit mettre en sc ne son r cit d une initiation amoureuse comme si cette lib ration sexuelle n tait pas devenue un sujet majeur de son temp
60. nt Susan a une tease une allumeuse quitte a invoquer pour cela la pancarte et l attitude de la jeune femme dans le m tro comme pour compenser sa fin tra gique ce personnage conserve jusqu au bout son quant a soi f t ce libert supr me vis a vis de son auteur Susan effectue d ailleurs bien un strip l cran mais il n a que tr s peu un effet de teasing cest le d shabillage auquel face au d sir de Mike elle se r soud dans la piscine vide film de loin et de fa on clinique Les plans de d tail de l acte sexuel qui s ensuit sont d ailleurs aussi peu excitants la d coupe en inserts typique du cin ma pornographique produisant au bout du compte un effet plus chirurgical qu rog ne Mike en mauvaises postures Sur l ensemble de la semaine durant laquelle se d roule Deep End le corps de Mike passe par trois phases successives Les trois premiers jours il est r gu li rement mis mal Le lundi un client Faccable de coups de chapeau et de up yours va te faire mettre Le mardi c est la fan de football qui le violente et le mercredi il est jet dans la piscine par les trois coll giens sous l il amus de Susan Le quatri me jour constitue un pivot Le rapprochement corporel et la bagarre pour rire de Mike et de Susan apr s que celle ci a appris qu il tait vierge ou fait mine de l apprendre theres always a first time lui a t elle dit la veille sont l envers posi
61. opographie des bains en sen rem morant d abord les diffe rentes parties le hall d entr e la loge de l accueil les vestiaires hommes d un c t femmes de l autre les ca bines des deux employ s la piscine proprement dite la chaufferie le bu reau du directeur les combles Ces parties sont elles toutes localisables les unes par rapport aux autres et for ment elles un ensemble coh rent Quelles sont leurs importances res pectives dans le r cit et quelles sont les sc nes qui nous permettent de les d couvrir Dans quelle mesure cha cune d entre elles est elle trait e de fa on r aliste ou po tique On mon trera que Skolimowski ne pr pare pas la d couverte des lieux en question par des plans d exposition mais met le spectateur devant les lieux accom plis 11 12 SEQUENCE La fievre du samedi soir 1 Entr e abrupte Mike p n tre dans le night club par une porte rouge vif qui tranche sur le noir ambiant lequel contastre lui m me avec les cou leurs d eau de I tablissement de bains A Toreille cela tranche tout autant avec lirruption du riff sur volt qui ouvre le morceau Mother Sky du groupe Can Skolimowski avait demand au groupe d tirer ce morceau de sorte qu il couvre l int gralit de la s quence autour du night club De lentr e de Mike dans la bo te son irruption dans le m tro elle dure quatorze minutes ce qui correspond presque exac tement la dur e
62. petites amoureuses Jean Eustache LArgent de poche Francois Truffaut La Nuit du chasseur de Charles Laughton MGM United Artists 6 La morte dans Peau L image de Susan d rivant morte dans la piscine rappelle le person nage d Oph lie qui dans Hamlet meurt noy e Cr au th tre ce personnage a fait l objet de nombreuses repr sentations picturales surtout au XIXe si cle Au cin ma on pense LAtalante de Jean Vigo la vision sous l eau de Juliette par son poux cf FILIATIONS mais aussi a La Nuit du chasseur de Charles Laughton la m re des deux enfants gisant dans une voiture au fond de la riviere A chaque fois ce motif de la morte dans l eau suscite une fascination qui pousse les artistes a en donner une repr sentation sublim e Po sie n crophile Cette fa on de repr senter la mort dans Deep End oni rise la fin du film d autant que l image de Mike enlacant le cadavre de Susan dans l eau renvoie aux deux moments ou le garcon fantasmait cette treinte immerg e avec la jeune femme nue Le film joue sans doute aussi du souvenir d une image biblique c l bre celle de la chaste Suzanne surprise au bain par deux vieillards i L e PP rat ni WET WER Ophelia par John Everett Millais 1852 Tate Gallery Londres 19 20 CRITIQUE L ternel retour Ce qui est tr s fort dans cette histoire c est qu aucun moment on nen visage cette fin alors qu en tou
63. port Les anglophones auront ainsi plus de chance de voir venir la fin violente du film qui surprend nombre de spectateurs Pour les non anglophones c est seulement la derni re sc ne que le titre se justi fie deep end d signant alors la mort finale de Susan dans l eau pro fonde de la piscine Rappelons que le premier titre choisi par Skolimowski tait Starting Out point de d part et que c est pr cis ment l image de cette fin sanglante qui a servi de point de d part l criture du film Et si le titre ne trouve pour beaucoup son sens profond qua fin du film n oublions pas que la mention Deep End appara t au premier plan du film sur l image dune goutte de sang ou de peinture dont la chute est accentu e par la musique par un break de batterie et par une voix qui prononce but I might die tonight mais je vais peut tre mourir ce soir 3 Memento mori En faisant commencer Deep End par la phrase Je vais peut tre mou rir ce soir Skolimowski introduit le motif r current dans le film du memento mori expression latine signifiant Souviens toi que tu mourras un motif artistique surtout pr sent dans la peinture dite de vanit consistant voquer la finitude de toute vie humaine Dans Deep End qui se termine par la mort violente dune jeune femme plusieurs l ments rel vent de ce motif contrastant avec Mike les personnages masculins g s le
64. poth se de la peinture plut t que celle du sang elle n enleve rien la stylisation picturale de cet incipit qui donne le ton de l utilisation venir des couleurs utilisation et non pas traitement emploi du mot psych d lique a t contest a propos de Deep End pou vant donner l impression que le film ne fait que relayer une mode visuelle de son temps Mais il est pertinent si l on revient son sens premier qui mani feste la psych Skolimowski Le choix des couleurs vives agressives m me s est fait naturellement parce qu il collait l histoire et qu il d veloppait la dua lit du film sur son double versant r aliste et onirique cran n 2 f vrier 1972 Double versant r aliste et onirique il s agissait de trouver dans le r el voire dy susciter en variant vue un clairage par exemple des intensit s chro matiques qui permettent d exprimer l int riorit du protagoniste selon le prin cipe de subjectivit objectiv e l uvre dans le film ce principe prenant corps litt ralement dans la pancarte du strip club l image de Susan La cou leur principalement retenue cette fin expressive n a rien doriginal en elle m me c est le rouge qui balise le film en exprimant selon les cas la col re le d sir de meurtre ou de d floration ou encore la conscience plus ou moins confuse d un drame venir le clignotement rouge tre d
65. rait form e d irr ductibles francs tireurs un contemporain du r alisme po tique des ann es 1930 Jean Vigo un des jeunes Turcs de la Nouvelle Vague Jean Luc Godard un oncle et un cousin de celle ci Jacques Tati et Jacques Demy propos de ce dernier voir MOTIF Le lien le plus vident est sans doute celui avec Jean Vigo dont deux des quatre films sont fonci rement aquatiques Le court m trage La Natation par Jean Taris 1931 pr sentation de la discipline par un champion de France associe constamment p dagogie et po sie Comme ce sera le cas dans Deep End les plans immerg s sont d j clair s par des lumi res supra aquatiques en m me temps qu elles permettent de voir ce qui se passe sous l eau elles conf rent aux plans en question une troublante tranget Dans L Atalante Juliette se marie avec Jean capitaine de la p niche qui donne son titre au film Elle s enfuit Paris il abandonne mais sombre dans une profonde d pression et finit par se jeter l eau son image immerg e se super pose alors celle ondoyante de Juliette en robe de mari e Dans cet tat particulier de conscience le marinier semble revoir sa bien ai m e de fa on id ale Le souvenir de ces plans survient lors des trois moments de Deep End o Susan appara t nue sous l eau autre image fantasm e de l tre aim le nu y rempla ant la robe virginale On pense au Tati de Mon oncle 1958 et de Playtime 1967
66. reinement soutenir le regard de Mike et du spectateur de meme que intermede musical compos par Cat Stevens Chaque cube porte une cou leur differente on envisagera la fagon dont ce paisible arc en ciel contraste avec la focalisation du film sur le rouge par rapport auquel les autres couleurs n existent que par variation ou par con trepoint 19 16 TECHNIQUE Acteurs et cam ra meme combat Du fait de la mise en route pr cipit e de Deep End et sans doute du gotit de Jerzy Skolimowski pour les films r alis s sans filet les acteurs n ont pas eu la possibilit de r p ter avant le premier jour du tournage C est galement sans essais pr alables que Skolimowski et son chef op rateur allemand Charly Steinberger d cident de tour ner la quasi totalit du film en cam ra port e c est dire tenue par l op rateur au lieu d tre pos e sur un support pied ou chariot ou fix e un bras Lorsqu il voque Deep End Steinberger insiste sur le fait que les seules exceptions cette cam ra port e sont les panora miques en longue focale qui montrent distance les coureurs dans le parc enneig un support a t employ pour ces prises de vues qui sinon auraient trembl Cela signifie que d autres plans pour lesquels la cam ra n a pas eu se d placer dans l espace et qui auraient donc pu tre film s avec un pied ont galement t tour n s en cam ra port e Mais l impr
67. rou de ce regard critique l interpr te du vendeur de hot dogs Burt Kwouk est aussi celui de Cato le majordome chinois de l inspecteur Clouseau depuis le deuxi me pisode de la s rie de films La Panth re rose Son person nage est charg d agresser Clouseau par surprise d s qu il rentre chez lui afin de l entra ner aux arts martiaux Dans Deep End le vendeur de hot dogs est au contraire parfaitement pacifique observant placidement les all es et venues de Mike avec le regard lui aussi de l outsider Bien que commer ant c est sans doute avec Mike l un des personnages les plus d sint ress s d o que ces deux la se reconnaissent et s changent politesses et services Quant a George Best le footballeur invoqu par la cliente nymphomane pendant le corps a corps quelle impose a Mike il marqua effectivement six buts lors du match Manchester United Northampton Town du 7 f vrier 1970 Skolimowski grand amateur de foot y avait assist Le lien entre sport et consum risme est maintenant bien connu mdis au moment ott Skolimowski commenca sa carri re de r alisateur et de sportif c tait un ph nom ne nouveau Ce ph nom ne fut parti culi rement observ l Ouest par exemple travers le footballeur George Best dont le train de vie devint un sujet d int r t pour les tabloids traduit par nous d Ewa Mazierska Jerzy Skolimowski the Cinema of a Nonconformist p 41 Diana Dors elle m me
68. s c est l option romanesque qu adoptent encore au m me moment des films tels que Erste Liebe d apr s Tourgueniev dont John Moulder Brown vient d interpr ter le r le principal Un t 42 Le Messager Harold et Maude Le Jardin des Finzi Contini Les Deux Anglaises et le Continent et Le Souffle au c ur Soit prendre bras le corps le probl me de la jouissance et de la frustration des corps en pla ant ceux ci plut t que le r cit romanesque en premi re ligne Skolimowski choisit cette seconde option en se donnant pour exigence de ne pas pour autant mettre profit la vogue de la jouissance tout prix Dans la sc ne de projection d un nudie Deep End marque ironiquement sa distance avec la sexploitation dans laquelle s taient sp cialis es les cin mas pr pornogra phiques La marge de man uvre du cin aste tait troite comme le confirme rent les interdictions aux jeunes spectateurs dont le film patit 4 sa sortie du fait de ses scenes de nudit Pourtant comme Skolimowski le dit lui m me Voyez dans mon film le nu il n y a rien qui puisse attirer les voyeurs rien de moche ou de g nant Le Monde 16 d cembre 1971 Susan aux bains Rien de g nant Pas tout fait Un plan tonnamment obsc ne constitue l ex ception a la regle que se donne par ailleurs le film celui qui montre les cuisses d nud es et l entrejambe de Susan pench e en arri re sur le bureau du direc teur
69. s sc nes qui avaient t tour n es et dont le n gatif aurait t d truit depuis lors La premi re de ces sc nes assez longue se d roulait dans le bain de vapeur par tie de l tablissement de bains invisible dans le reste du film Elle montrait une r union syndicale au cours de laquelle on envisageait progressivement de r duire la semaine de travail a une seule jour n e Elle fit tant rire lors de deux projections tests que d apres Skolimowski ces rires d bord rent sur la sc ne suivante emp chant de pr ter attention a celle ci C est pourquoi le cin aste la mort dans lame se serait r solu a la couper Lexplication de Barrie Vince para t au moins aussi convaincante quelle que f t son effica ce comique cette sc ne reflet des tractations politiques de l poque d tournait de la ligne principale de l obsession de Mike pour Susan autour de laquelle se structure ce r cit faussement buissonnier et que Skolimowski avait d gag e en vitant justement de contextua liser trop pr cis ment le film La seconde sc ne coup e au montage montrait ce qui pr c de la dis pute de Mike avec les trois garcons au bord de la piscine Mike allait chercher son d jeuner l ext rieur des bains et rencontrait les gar cons en question en tenues d coliers On comprenait alors qu il s agissait d anciens camarades de classe du jeune homme Celui ci ayant interrompu ses tudes ils faisaient preuve son
70. s sites sp cialis s dans l ducation l image Enfin la plupart des sites internet des coor dinations r gionales du dispositif Lyc ens et apprentis au cin ma propose des ressources compl mentaires au pr sent livret capta tions de journ es de formation partage d ex p rience Consultez votre coordination ou retrouvez ces liens sur le site Image M canique des fluides I love her You perverted little monster I m not a perverted little monster Pour titre de cet ditorial on aurait pu reprendre Apn e juv nile un jeu de mots souvent de mise a propos de Deep End Mais celui que nous proposons nous semble tout aussi pertinent dans ce film qui enchaine des ses premieres images sang peinture et bicyclette cest le jeu d entrainement des fluides vitaux eau sperme sang voire liquide amniotique qui mene la danse M canique vivant si le film de Jerzy Skolimowski n est pas consid r comme une com die le comique y exsude a chaque plan Son titre est dailleurs lui m me un jeu de mots a sens multiples qui associe d embl e quoti diennet et fatalit trivial et tragique Trivial tragique cest sur ce double mode que souvent l adolescence se vit et m me Sil serait r ducteur de qualifier Deep End de teen movie nous sommes curieux de savoir si les lyc ens de 2012 se reconnaitront peu ou prou quarante ans apr s dans les d sirs et dans les souffrances du jeune
71. surer la distance de l objectif aux tres ou aux objets film s afin de r gler la nettet et il devait en cours de prise modifier le point au jug en estimant les incessantes variations d loignement des acteurs par rapport la cam ra Enfin comme dans les films d autres cin astes privil giant la vitalit des interpr tes John Cassavetes par exemple les d cors int rieurs ont t clair s par larges portions De la sorte les acteurs n taient pas prisonniers de n cessit s de place ment par rapport aux sources de lumi re Faire voyager le gros plan Dans Deep End n anmoins la cam ra ne se borne pas suivre la danse des acteurs De m me qu il donne le ton de l utilisation venir de la couleur le d but du g n rique engendre le mouvement de la prise de vues la cam ra parcourt le cadre d un v lo mais l troitesse du champ film ne nous permet de l identifier assur ment comme tel que lorsqu elle arrive la cha ne de celui ci Dans ses entretiens avec Fran ois Truffaut Alfred Hitchcock dit que si un personnage bouge et que l on veut conserver l motion sur sa figure il faut faire voya ger le gros plan Au g n rique Skolimowski applique ce principe non un personnage mais un objet inanim et l motion consiste en un sentiment d tranget in dit face une chose aussi famili re qu un v lo En marge du drame en cours et l clairant d un jour sin gulier c est
72. t Fut coup e par exemple dans cer taines copies la scene o Mike r cup re ses v tements dans la chauffe rie sous l il amus de Susan R trospectivement Skolimowski pense que si le corps corps avec Diana Dors ne fut pas censur c est que If you can t have the real thing you do all kinds of unreal things ha mi a m E oe M I Affiche originale am ricaine ce quasi viol tait camoufl par des r pliques portant sur le football Le film fit l objet d interdictions partielles comme en France ou il fut longtemps interdit aux moins de dix huit ans Ces interdictions ajout es au fait que Paramount distributeur am ricain de Deep End ne sut pas trop comment le promouvoir l affiche qu il dita appa rentait un slasher movie et que le film ne b n ficia pas du prix international auquel il pouvait l gitimement pr tendre contribue rent son enterrement prolong Il fut exploit en seconde partie de doubles programmes puis en dehors de rares reprises en salles ou la t l vision disparut pratiquement des crans pendant quatre d cen nies En 2011 la restauration du film par Bavaria Media contempo raine du retour de Skolimowski la r alisation avec Quatre nuits avec Anna puis Essential Killing entra ne sa large red couverte Au dam relatif de ceux qui le consid raient comme leur perle rare 1 Du verbe to slash taillader t
73. t divers retient lattention de Skolimowski un jeune homme a tu une femme dans une piscine de lEast End Cela lui inspire l image qui cristallise une de ses pr occupations origine du sc nario a t tout simplement l image que je voyais tr s nettement avant de commencer le film du lustre se balan ant qui vient frapper par derri re le cou de la jeune fille La mort au cin ma C est a En tant que spectateur j ai vu la mort au cin ma un nombre incalculable de fois Et d apr s moi a a toujours t trop ou trop peu La mort est la derni re des surprises de la vie et jamais au cin ma on n a montr la mort de cette fa on comme une surprise un l ment auquel on ne s attend pas et qui arrive de fa on tr s quotidienne C est un peu dans ce sens l que jai essay de travailler la derni re sc ne du film C est donc partir de la derni re scene que j ai commenc de l j ai remont tous les maillons de la cha ne qui menaient cette mort finale M me si cette mort peut appara tre au public comme choquante en analysant psychologiquement le film vous verrez que c tait la solution la plus logique la seule valable et la seule possible en fait Image et son n 257 f vrier 1971 3 autre point de d part paradoxal partir duquel Skolimowski va concevoir son r cit rebours une histoire vraie propos de quel qu un qui avait perdu un diamant dans la neige et qui avait d la
74. te logique c est la seule possible Lorsqu on arrive la derni re sc ne on se dit bien s r mais c est trop tard Les personnages de Skolimowski sont d autant plus obstin s li s une id e fixe que le monde ne cesse de se d rober leur contact Ils ne peu vent vivre que dans l attente d un v nement important d une preuve d cisive toutes choses qui n arrivent jamais ou qui arrivent mal Ne sub siste qu une fr n sie d autant plus intense qu elle est rigoureusement entropique Il ne saurait y avoir de point final de le on d finitive par contre toutes les parodies sont permises C est que le provisoire est la seule r alit la seule valeur et peut tre la derni re Certitudes fuyantes points de rep re m connaissables d guis s le monde continue sur sa lanc e mais quelque chose mais quoi nest pas sa place Ce naturel m me est suspect c est un r ve dont le r veur sait d j qu il va finir bient t Moments o tout est suspendu provisoire inachev dont Gombrowicz dit qu ils sont la recherche provisoire de l immaturit Le go t de Skolimowski pour les farces les gags est sans doute polo nais certainement une survivance potache coup s r une chose grave Si tout film se r v le pour finir une mystification beaucoup de bruit pour rien et de fausse rigueur pour un r el sentiment du vide il va de soi que chaque plan chaque instant peut
75. tif du quasi viol de Mike par la premi re cliente Le soir au cin ma Susan embrasse Mike sur la bouche apr s l avoir gifl Pour elle un simple baiser pour lui un basculement extatique il se jette en arri re dans son fauteuil Les trois jours suivants Mike va lutter contre la d possession de cette extase au profit d autres hommes mais chaque fois il ne trouvera que frustration d bouchant sur une nouvelle mise mal de son corps et sur une explosion de violence en guise d exutoire Le vendredi au terme d une flamb e de rage qui semble prendre possession de lui il tente de perturber la rencontre sexuelle de Susan et du professeur avec pour cons quence une main bless e une effusion suggestive de neige carbonique et un peu plus tard la destruction de cette extension de son corps qu tait son v lo Le samedi lui d ordinaire si r serv expose ses gestes convulsifs aux usagers d une rame de m tro et finit par y bri ser une lampe Quant au dimanche il a la conclusion tragique que l on sait apr s que le corps du jeune homme a t confront son impuissance sexuelle la nature exacte de celle ci important peu Au passage toutefois cette derni re journ e aura donn lieu l un des rares moments de communion entre Susan et Mike l extraordinaire d ploiement d efforts ding niosit et d opini tret qui pr side la tentative de r cup ra tion du diamant Pour reprendre des termes de Bertolt Brecht
76. u premier plan du film le raccord rouge du c ble de la bouilloire dans le bureau du directeur des bains les messages de pr vention en lettres carlates qui pars ment ceux ci etc propos de cette fa on de filmer la couleur dans le r el mais dans un but quasi expressionniste et quitte l y avoir amen e au pr alable le chef d cora teur Anthony Pratt avoue qu l poque de la r alisation de Deep End il tait marqu par les films de Jacques Demy surtout Les Parapluies de Cherbourg En 1964 Demy y met en pratique un r alisme po tique de la couleur esquiss dix ans plus t t par Jean Renoir dans French Cancan au lieu de la consid rer comme le fruit d un traitement technique au tournage ou en laboratoire il la place devant la cam ra comme un l ment du monde sensible D ot les authentiques pans de rues repeints en couleurs vives des Parapluies et le fantasme de g n ra liser cette pratique une ville enti re dans Les Demoiselles de Rochefort Dans la sc ne o Mike attendant Susan et son fianc l ext rieur du night club passe et repasse devant un mur d un jaune clatant ce souvenir de Demy saute aux yeux Skolimowki pr tend avoir trouv le mur tel quel Soho mais plusieurs collaborateurs affirment qu il a en fait t repeint comme l ont t les deux ta blissements de bains o le film a t tourn Aux bains l op ration de peinture est m me mise en abyme sous la forme de travau
77. une motion du m me ordre qu on prouve tout au long d un film qui am ne se demander savions nous bien quoi res semble une piscine une rue de Londres une course pieds Ou la chambre d une prostitu e la jambe d ailleurs hitchcockiennement pl tr e Dans l espace confin de celle ci la cam ra est comme ani m e d une vie autonome allant p cher par mouvements ou par inserts des d tails plus ou moins s duisants ou incongrus Si Mike n ose pas avoir la main baladeuse la cam ra de Skolimowski n a quant elle pas froid aux yeux FLATONO Un h ritage francais Boy and Bicycle Paramount La Solitude du coureur de fond Doriane On a souvent rapproch Deep End du cin ma anglais des ann es 1960 surtout des films r alis s dans le sillage du Free Cinema Les parent s th matiques avec des films tels que Samedi soir dimanche matin ou La Solitude du coureur de fond restent toutefois relativement superficielles personnages de jeunes prol taires accent mis sur une certaine rage sociale mais refus de la propagande r alisme po tique En outre si l on suppose une acclimatation cin matographique de Skolimowski son pays d accueil on peut galement d celer un lien avec une veine soit plus l gere et musicale celle des films de Richard Lester A Hard Days Night Le Knack ou comment l avoir soit au contraire plus noire quitte remonter un peu dans le temps celle du Voyeur
78. usan et Mike qui s appr tent manger en haut droite un vieux plongeur Quant aux choses inertes gauche une lampe suspendue que Pun des coliers fait descendre en Fair la cage de water polo au centre une zone d volue aux travaux de peinture en cours droite le grand plongeoir L tendue d eau constitue un troisi me terme ni inerte ni vivant et peut tre est ce ainsi que l l ment aqueux fonctionne l chelle du film comme une alternative la dialectique de l anim et de l inanim du vivant et du mort Le microcosme est ici flagrant tout un petit monde d tres et de choses se loge dans ce seul plan Ce monde offre une vision contradictoire la fois comique et inqui tante l image du film Comique comme toutes les fois que l on d c le du m canique plaqu sur du vivant pour reprendre la formule d Henri Bergson dans Le Rire Or dans ce plan quelle que soit sa vitalit le trio de potaches men manque pas chaque groupe de personnages joue sa partition de fa on ce point autonome que cela finit par avoir quelque chose pr cis ment de m ca nique en actionnant la manivelle qui fait descendre la lampe un des coll giens dit qu il se sent comme un joueur d orgue de Barbarie Le seul point commun ces diff rents groupes est l attention port e au saut du vieux plongeur quelque peu saugrenu de devenir ainsi la star d un instant Trois ans apr s Playtime de Jacques
79. voiture de celui ci Exasp r e la jeune femme le gifle et le diamant de fiancailles saute dans la neige Mike prend alors les choses en main Avec Susan il ramasse le p rim tre de neige autour d eux et l emporte aux bains publics Dans la piscine vide il fait fondre la neige afin de r cup rer le dia mant Durant cette qu te Susan rompt avec son amant et se dis pute au t l phone avec son fianc Cependant Mike a retrouv le diamant Une suite de ruses et d abandons tacites am ne Susan a faire lamour avec le jeune homme le rapport semble un chec Susan doit rejoindre son fianc mais Mike tente de la retenir tan dis que l eau commence monter dans le bassin Il pousse une lampe suspendue qui vient heurter Susan la nuque Le coup lui est fatal et c est un corps sans vie que Mike treint dans l eau R ALISATEUR Signes particuliers Au d but on est toujours avant que Rysopis Tu vas te battre Non je vais lutter Walkover Na t en 1938 Lodz en Pologne Enfance marqu e par la guerre p re tu par les nazis m re r sistante arrangements de fa ade avec l occupant survie de justesse aux bombardements Boxe football po sie th tre exp rimental batterie Avec Roman Polanski r crit en trois jours et trois nuits le sc nario du premier long m trage de ce dernier Le Couteau dans l eau Ecole de cin ma de Lodz d tourne le court m trage qu il doit r a
80. x de r fection en cours Dans la sc ne o Susan nargue la caissi re avec son ice cream on voit appara tre l ar ri re plan un ouvrier qui badigeonne un mur vert de peinture rouge Ce gag visuel souligne qu en plus d tre des couleurs d eau le vert et le bleu qui dominent aux bains fonctionnent comme les compl mentaires du rouge sur lesquelles ce dernier vient particuli rement trancher jusqu son panchement final dans l eau du bassin D autres couleurs sont plut t des variations du rouge qui anticipent ou font craindre son irruption ainsi du cama eu de jaune et d orange que forme un essai de couleurs sur un des murs de la piscine devant lequel Susan et sa chevelure rousse viennent se poser A posteriori la mort violente de celle ci semble avoir t pr par e par la fa on dont elle a t plac e sous le signe du jaune celui du yellow brick wall de Soho qui voque Pat tente fleur de mur de la jeune femme par Mike et bien s r celui de son manteau luisant Skolimowski l aurait achet dans un grand magasin avec lin tention d viter le rouge dans la sc ne du parc enneig Le clich visuel du sang sur la neige y est la fois vit et reconduit le jaune venant se substituer au rouge afin de r server celui ci pour la sc ne finale Le go t de Skolimowski pour la modernit picturale saute ici aux yeux dans une modulation quasi supr matiste sur le blanc et sur la transparence en contrepoint du

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