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1. 33 Fig C 5 inspir s par les mobiles musicaux de Morton Feldman Fig C 1 La proposition r v lait des liens troits entre l espace et le temps de la sc ne mais sa r alisation s annon ait plut t lourde De cette id e a d riv l option retenue d une partition symbolique tal e au sol o les interpr tes volueraient d un mobile l autre en faisant seulement quelques pas La mezzanine offrait le recul n cessaire pour une lecture musicale en surplomb La division de l espace au sol permettait quant elle d en faire un v ritable terrain de jeu les interpr tes s inscrivant dans la partition au moment m me de l ex cuter Le d part du compositeur a boulevers et compromis nos projets Nous avons toujours pens le chantier de TDT avec et en fonction de la musique Poursuivre le projet amorc travers une nouvelle collaboration semblait risqu et difficile tant donn nos d lais de production Or la trame musicale n tait pas assez avanc e pour la reprendre L entreprise de la partition tait en danger Nous avons tout compte fait d cid de garder les grandes lignes de l id e dans son abstraction picturale Des jeux d clairage se sont substitu s la peinture pour marquer le sol Moins imposante et plus mall able la lumi re offrait l avantage de modifier et de reprendre la composition volont da capo al fine Qui plus est cette option venait inscrire la lumi re dans la partition de la
2. The biggest difference between theatre work and visual work is the use of the observer s time In theatre the creator determines the time an image is observed In a work of visual art the observer himself determines this time In my theatre work I use the notion of the borderline image This is an image which because I extend the normal duration of the observation has time to penetrate into the observer s brain This image then makes history for the observer The image becomes a memory At this moment the distinction between a borderline image in the theatre and a visual work ceases to exist If art does not penetrate into the observer s memory it does not exist Lauwers mai 2011 L image limite borderline image utilis e par Lauwers renvoie une temporalit mitoyenne La m me temporalit marque aussi le paysage de Stifters Dinge dont Goebbels affirme ralentir le temps seconde apr s seconde non pas pour provoquer l ennui mais pour d velopper de l attention Goebbels 2008 La dimension plastique du rythme se manifeste travers cette lenteur dans l volution des images qui autorise un ordre de lecture relativement libre modulable Stifters Dinge est une forme en formation Les temps de suspension encouragent le spectateur retrouver ses rep res dans une banque d associations personnelles loin de la repr sentation Il compl te la mise en sc ne en r sonance avec les propos de Stifter ou L v
3. 3 Un clin d il aux aventures d Alice au pays de merveilles la carotte rivalise avec les champignons magiques qui transforment la petite fille tant de reprises C est aussi la fantaisie d un lapin qui en cho au Lapin Blanc traverse le spectacle comme un fil conducteur 68 codes dans une suite d v nements difficilement attendus Jusqu alors subordonn s au discours du conf rencier les interpr tes s mancipent peu peu dans leur mode d expression respectif Pourtant l exp rience continue rigoureuse malgr la d sinvolture Et les artistes en sont la fois sujets et objets laborantins et cobayes Le mat riau humain surprend volue chappe la cat gorisation Comment figer ses traits dans une hypoth se scientifique C est un clin d il au paradoxe des tudes savantes dans les arts vivants Si la recherche acad mique tient dans une certaine mesure d gager des lois objectives comment composer avec les subjectivit s en jeu Les interpr tes et les cr ateurs biaisent in vitablement les r sultats de toute tude de terrain Avec la chute de la conf rence TDT questionne donc la pertinence d un discours savant et par extension joue sur l cart entre sa propre forme volontairement compromise et son propos qui ne peut se passer du vivant Peut on parler du rythme sans taper des mains Rappelons que la conversation entre Alice et l uf est difficile suivre d s le d but partir du
4. la division parfois en l espace de quelques instants Que se passe t il au juste entre les arts Comment nommer les enjeux sans se perdre dans un syst me de r f rences crois es Jean Yves Bosseur auteur d une tude sur les quivalences structurelles entre musique et arts 4 C est le premier terme d signer les uvres hors cat gorie dans les arts vivants Voir Richard Kostelanetz The Theatre of Mixed Means New York RK 1980 5 Paul Val ry a su cerner toute l anomalie de la rencontre hybride dans sa d finition de l homme d affaires hybride du danseur et du calculateur in Grand Robert L o la pens e classique voit g n ralement des objets isol s qu elle met ensuite en relation la pens e contemporaine insiste sur le fait que les objets sont avant tout des n uds de relations des mouvements de relation assez ralentis pour para tre immobiles M choulan 2003 p 11 19 plastiques au XXe si cle propose un mod le de classification bas sur trois axes d int gration Bosseur 2006 1 Imitation analogie parall lisme m taphore C est notamment le principe de toute musique d accompagnement tr s r pandue au cin ma o elle colle l image 2 D calage intervalle qui unit et s pare la fois Bosseur renvoie Wozzeck de Berg o le livret et la musique entretiennent un change polyphonique anticipation m moire 3 Ind pendance autonomie des moyens d expressio
5. 1 3 4 Dramaturgie et gen se des formes D un point de vue strictement formel la partition crite cherche d finir l uvre enti rement et sans ambigu t chaque signe correspond donc un son un geste une variation La r alit s av re manifestement plus complexe moins d invalider de nombreuses partitions musicales et th trales marqu es par une grande libert d interpr tation Au del du signe la partition permet d administrer l espace temps de la repr sentation et de d terminer l acc s l uvre Elle convoque aussi l entre deux des l ments du spectacle ceux l m me qui chappent la notation L a partition organise tout Elle r git les v nements principaux et secondaires leur intensit leur devenir les textes abstraits ou porteurs de sens les clairages les gestes La partition n ordonne pas seulement le sonore mais toutes les composantes de la repr sentation jusqu aux comportements histoires objets etc Elle assure ainsi une certaine dramaturgie de l indicible Aperghis 1990 p 62 63 Outre qu elle rassemble aligne et compile des informations parall les la partition propose un ordre porteur de sens la fois signification et direction du parcours Tout changement dans l encha nement d une uvre ou des modalit s de son assemblage a un impact sur la r ception Un geste suivi d un mot ou pr c d par celui ci ne produit pas le m me effet sur le spectateur En
6. Hughes Lynn et Marie Jos e Lafortune dir 2001 Penser l indiscipline Recherches interdisciplinaires en art contemporain Montr al Optica gt Clark Tim Libri IX Disciplinarium Disciplina and Disciplinary Research p 72 85 gt Dubois Jean Le mythe du bricoleur un mod le de r sistance la standardisation technologique p 49 51 gt Loubier Patrice Du moderne au contemporain deux versions de l interdisciplinarit p 22 29 Kandinsky Vassily 1998 Du th tre d par Jessica Boissel Trad par Jean Claude Marcad et a Paris Adam Biro Lachaud Jean Marc 1999 Notes sur le m lange des arts et les arts du m lange In Hybridation m tissage m lange des arts dir par Dominique Berthet Recherches en esth tique no 5 p 35 40 Lesage Marie Christine 1995 Le th tre et les autres arts Mat riaux composites In Le th tre qu b cois 1975 1995 dir par Dominique Lafon p 335 360 Montr al Fides 2008a L interartistique une dynamique de la complexit Registres no 13 p 11 26 Paris Presses Sorbonne Nouvelle 2008b Une th tralit d territorialis e et r invent e propos d Eraritjaritiaka Le mus e des phrases de Heiner Goebbels Ligeia no 81 84 janvier juin p 133 141 M choulan ric 2003 Interm dialit s le temps des illusions perdues Interm dialit s no 1 p 9 27
7. Extrait du programme de la conf rence dessin de Franck Vignal 93 Fig E 2 Exposition le conf rencier et les interpr tes s ex cutent dans leurs cases respectives photo de Marc Andr Goulet Fig E 3 Essouffl s par leur course les interpr tes se r unissent derri re la chaise du conf rencier photo de Marc Andr Goulet 94 Fig E 4 Six coups de l horloge l heure fatidique du th une parenth se dans la parenth se photo de Marc Andr Goulet Fig E 5 lt L effet de la carotte photo de Marc Andr Goulet Fig E 6 Mises au point photo de Marc Andr Goulet Fig E 7 Salve de questions adress es au chercheur photo de Marc Andr Goulet 95 R F RENCES La rencontre des arts Adorno Theodor 2002 1967 pour le texte original L art et les arts Trad de l allemand par Jean Lauxerois Paris Descl e de Brouwer Adolphe Jean Marc 2003 Tout le monde il performe Mouvement no 22 mai juin p 28 et David Sanson 2009 Merde l indiscipline Mouvement no 52 juillet septembre p 13 et Charlotte Imbault 2011 Au c ur des choses Dossier Thierry de Mey Un cahier sp cial de Mouvement no 59 avril juin p 19 26 Aperghis Georges 1990 Quelques r flexions sur le th tre musical In Georges Aperghis le corps musical dir par Antoine Gindt p 61 63 Arles Actes Sud
8. Meyerhold Vsevolod 1973 1975 1980 1992 crits sur le th tre 4 t Trad du russe et d par B atrice Picon Vallin Coll Th 20 Lausanne L Age d homme 2005 Vsevolod Meyerhold Trad du russe et d par B atrice Picon Vallin Coll Mettre en sc ne Arles et Paris Actes Sud Papiers CNSAD Monnier Mathilde et Jean Luc Nancy 2005 Aflit rations Conversations sur la danse Paris Galil e 98 Nancy Jean Luc 1994 Les muses Paris Galil e 2000 Les arts se font les uns contre les autres In Art regard coute La perception l uvre dir par Christian Doumet Mich le Lagny Marie Clair Ropars et Pierre Sorlin p 157 166 Coll Esth tiques hors cadre Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes Pavis Patrice 2001 Les tudes th trales et l interdisciplinarit Dossier M thodes en question L annuaire th tral no 29 printemps p 13 27 Peyret Jean Fran ois et Valero Julie Jean Fran ois Peyret ou la strat gie de l invitation Registres no 13 p 93 99 Paris Presses Sorbonne Nouvelle Picon Vallin B atrice 2001 La mise en sc ne et le texte In L art et l hybride dir par Christian Doumet Mich le Lagny Marie Clair Ropars et Pierre Sorlin p 103 117 Coll Esth tiques hors cadre Saint Denis Presses Universitaires de Vincennes 2004 Meyerhold Coll A
9. arts de la sc ne Bomy 2011 p 2 Cela dit les inspirations du cr ateur allemand sont souvent litt raires mais jamais dramatiques Sa volont d explorer les rapports entre texte et musique passe par la multiplicit et la juxtaposition la fragmentation et le collage des proc d s sans doute consolid s au fil de sa longue collaboration avec Heiner M llerf Goebbels utilise un large ventail de moyens d expression artistique Avec Stifters Dinge il convoque la fois la litt rature la musique la peinture et le th tre bien que l exp rience se passe d interpr tes en chair et en os Comme dans ses uvres ant rieures une confrontation entre diff rentes pratiques artistiques conduit ici une composition inusit e qui d fie la classification Des projections de l eau des pianos m caniques mais aussi un concerto de Bach et des chants indiens de Colombie se retrouvent r unis l occasion d un inventaire po tique des choses Dinge d Adalbert Stifter un crivain autrichien du XIXe si cle En l absence d acteurs c est un paysage musical mouvant qui entra ne le spectateur travers des descriptions de la nature qui dans un dialogue inattendu se m lent tant t la voix de Claude L vi Strauss tant t celle de Malcolm X travers quelques exemples de TDT et des spectacles du corpus le premier chapitre cherche explorer les modes d interaction entre les arts en questionnant les enjeux de leur re
10. dont les habits noirs envahissent graduellement la sc ne la cinqui me reprise peu avant la fin la 30 conversation est loin de la calvitie mais ses marques accentuelles m triques prosodiques et gestuelles demeurent fid les au dialogue de d part De la m me mani re le motif en d gradation est r current dans la trame de TDT une conf rence qui tombe en panne suivant le d traquement progressif de la machine L effet de la carotte provoque une reprise acc l r e du d but de la pr sentation de l exposition dans des cases lumineuses jusqu au mouvement brownien dans un rectangle de lumi re 55 44 57 07 fig E 5 Comme chez Sagna la r p tition des l ments d place le regard L acc l ration escamote les transitions pourtant essentielles la premi re occurrence du motif Comme chez Carroll ce sont des modulations agogiques qui viennent combler le manque de sorte que la s quence reste reconnaissable et coh rente 1 3 2 Exp rimentations Le m rite d un impact d cisif sur l mancipation de la notation musicale classique revient Erik Satie seul musicien de son poque qui ait des yeux pour reprendre la formule de Man Ray in Bosseur 2006 p 166 Il pars me ses uvres de didascalies po tiques d anecdotes de dessins sans compromettre la rigueur de la notation L h t rog n it d une partition de Satie est une br che pour l invention l excursion crit Bosse
11. la place r serv e au futur est pour le moins incertaine Il est en quelque sorte exclu de l quation r duit la r p tition d un canevas familier Pourquoi le pass a t il autant d impact sur le pr sent de la sc ne La r ponse se trouve notamment chez le spectateur qui a besoin de rep res pour appr cier le spectacle Il est toujours la recherche des r f rences reconnaissables points d ancrage rep res pour situer l action sc nique Meschonnic parle du savoir comme le pr sent du pass 1990 p 7 La m me id e surgit chez Blanchot l intelligence est profond ment r actionnaire conna tre est d abord reconna tre La r ception du public est donc conditionnelle une reconnaissance ancr e dans le pass ritournelle in vitable 76 3 2 3 Parenth ses La sc ne admet toutefois des temps superpos s crois s ou parall les La vari t des configurations potentielles est notamment responsable de la richesse de ses moyens amener le spectateur ailleurs exige une autre temporalit Les univers imaginaires se dressent souvent en dehors des rep res chronologiques quotidiens Manipuler la conscience du temps devient alors un privil ge pr cieux et un outil de pr dilection pour les arts de la sc ne Sous les feux de la rampe les lois du pr sent absolu sont plut t souples Elles permettent de nombreux motifs dans le canevas temporel certes la r p tition sous tous ses masques mais aussi le ralentissement
12. la r flexion se heurte l impr vu C est un des int r ts de la rencontre entre le savoir et sa mise en jeu propos e par la conf rence performance Ce n est pas un choix qui cherche vacuer la repr sentation publique ou le travail de r p tition mais une solution adapt e au caract re exp rimental de la d marche La conf rence performance tend rendre justice aux tapes th oriques de la recherche hypoth ses d finitions et exposer un chantier plut t qu un r sultat En assumant son caract re performatif elle revendique un statut voisin de la cr ation De plus la conf rence performance soul ve n cessairement la question de l effraction du r el dans la repr sentation ou vice versa Quelle est la part de v rit dans une conf rence livr e par des performers Certains exemples de la derni re d cennie affili s surtout la danse fournissent des pistes de r ponse mentionnons Relation publique 2002 une fausse conf rence de presse imagin e par Caterina Sagna l expos performatif de la th oricienne Laurence Louppe dans Dispositif 3 1 2001 d Alain Buffard ou encore Tout ceci n est pas vrai 2003 de Thierry Ba un petit trait de l histoire de la danse re trac e l occasion Bien que TDT partage les caract ristiques d une conf rence performance il s agit d une forme plus th trale qui d borde le cadre performatif avec une trame narrative parall le au discours du conf ren
13. orie du discours alors que Gilles Deleuze l l ve au rang d une puissance vitale 1981 p 31 qui s affirme travers la r p tition et la diff rence Les id es de l un comme de l autre franchissent les barri res disciplinaires et alimentent notre tude prolongement r flexif du volet pratique de ce m moire Nos recherches sur le rythme au carrefour des arts ont abouti une conf rence indisciplin e bricol e partir de r flexions et d exercices sc niques Articul s par un faux conf rencier jou par un acteur les propos de la conf rence se trouvent illustr s appuy s d plac s ou contredits par l action de six interpr tes venant du th tre du cirque de la danse et de la musique Sous l intitul Toujours d j tomb TDT dans le texte cette pr sentation r unit des invit s pour reprendre le terme de Peyret 2008 qui largissent chacun sa mani re les territoires connus de l habitude Dans le partage des savoir faire l exp rience commune conduit ici une d territorialisation individuelle Par ailleurs une s rie de laboratoires d exploration en amont des r p titions de TDT a permis de confronter la pens e la pratique afin de compl ter et de nuancer l une et l autre Nos tentatives de d finition se sont frott es la r alit dont les contraintes ont mis l preuve voire parfois tourn en d rision certaines pr misses th oriques En passant par la sc ne
14. partitions proprement sc niques La didascalie th trale seule s adresser directement aux moyens de la sc ne retrouve chez Kandinsky son plein potentiel L inspiration est f conde la fin des ann es 1950 Beckett se pr te son tour l exercice de la didascalie dans les Actes sans paroles pour leur part tout fait possibles Cela dit cent ans apr s la cr ation de Sonorit jaune les partitions sc niques contemporaines demeurent tr s h t rog nes sans tradition ni format tabli Ce sont les fruits de notations artisanales sur mesure appel es r pondre aux besoins sp cifiques du spectacle 1 3 3 Partition dans Toujours d j tomb Lors de la conception de TDT nous avons cherch mettre profit le potentiel f d rateur et diff rentiel de la partition Donner voir la partition mat rialis e sur le plateau permettait d exposer certains enjeux de la conf rence de rendre visible le principe de composition et m taphoriquement de mettre nu la production de la petite fabrique du savoir De concert avec le compositeur et l artiste peintre associ s au projet nous avons donc envisag un dispositif qui pouvait accueillir la partition de la pr sentation sur des panneaux mobiles 18 Plus r cemment l auteur autrichien Peter Handke publie Le moment o nous ne savions rien les uns des autres 1992 pi ce de soixante dix pages compos e exclusivement de didascalies pas un mot n est prononc
15. pr sentation faire prendre conscience de son incidence comme m dium dans la rencontre des arts Le dispositif des mobiles s est finalement r duit un jeu de cases lumineuses au sol une solution certes symbolique mais n anmoins fid le aux intentions de d part D limiter les territoires est aussi le propre de la partition Par ailleurs nos recherches graphiques notamment des essais sur des toiles de grand format ont abouti une r alisation somme toute discr te qui accompagne l pisode de la danse baroque une partition g ante de sept m tres se d roulait sur la longueur de la mezzanine d sormais d serte alors qu un faisceau lumineux se d pla ait de cour jardin en balayant le temps Avec une 19 Il s agit de mesures d tach es inscrites dans l espace de la partition en dehors de toute s quence d termin e moins d indication contraire l interpr te est donc libre de choisir sa propre s quence au moment de l ex cution 34 allusion l orgue de barbarie cette s quence tient lieu de pendant m canique aux partitions install es l avant sc ne Sa taille monumentale renvoie galement l id e d une partition d ensemble Dans le prolongement de la petite fabrique elle se pr sente comme une trame ex cuter par une machine omnisciente Un clairage trop faible et les pirouettes concomitantes des danseurs restreignent malheureusement l acc s cette image aux spectateurs les plus vigilants
16. Art Montr al Wynants Jean Marie 2008 Entre les mots et les corps une danse en d composition Entretien avec Caterina Sagna sur lesoir be 12 f vrier http blogs lesoir be tousenscenes 2008 02 12 entre les mots et les corps une danse en decomposition Autres sources Blanchot Maurice 1969 L entretien infini Coll NRF Paris Gallimard 1973 Le pas au del Paris Gallimard Bogdanov Gennadi 2007 Notes de l atelier sur la biom canique l Universit Concordia Montr al Carroll Lewis 1999 1871 Through the Looking Glass Mineola NY Dover TLG dans le texte 2005 The Complete Works London CRW Cixous H l ne 1971 Au sujet de Humpty Dumpty toujours d j tomb In Lewis Carroll Cahier de l Herne no 17 dir par Henri Parisot p 11 16 Paris L Herne Derrida Jacques 1992 Points de suspension Entretiens d par Elisabeth Weber Paris Galil e Lamnaoui Slimane 2006 Le temps du Toujours d j dans l uvre de Blanchot In L preuve du temps chez Maurice Blanchot dir par Eric Hoppenot p 51 65 Coll Compagnie de Maurice Blanchot Pars Complicit s Martin Jean Paul 1971 Alice chez Polys me Lewis Carroll Cahier de l Herne no 17 p 51 56 Paris L Herne Tomiche Anne 2002 Penser le non sens Gilles Deleuze Lewis Carroll et Antonin Artaud In Litt rature et philosophie dir par A
17. Bablet Denis 1995 L uvre d art totale et Richard Wagner In L uvre d art totale dir par Denis Bablet et Elie Konigson p 19 38 Coll Arts du spectacle Paris CNRS Bauchard Franck 2003 Esth tiques des mutations sc niques Dossier Brouillages de fronti res une approche par la singularit tudes th trales no 28 29 hiver p 131 138 Bosseur Jean Yves 2005 Du son au Signe Histoire de la notation musicale Paris Alternatives 2006 Musique et arts plastiques Interactions au XXe si cle Paris Minerve Boucris Luc 2004 Trait du bon voisinage Dossier Formes hybrides vers de nouvelles identit s dir par Luc Boucris et Marcel Freydefont tudes th trales no 30 juin p 146 152 et Marcel Freydefont dir 2003 2004 Arts de la sc ne sc ne des arts Singularit s nouvelles nouvelles identit s Actes du colloque en 3 volumes publi s dans Etudes th trales no 27 28 29 30 Brecht Bertolt 1978 1948 pour le texte original Petit organon pour le th tre Trad de l allemand par Jean Tailleur Coll Sc ne ouverte Paris L Arche 97 Caullier Jo lle dir 1998 La synth se des arts actes de colloque Coll Ateliers no 16 Villeneuve d Ascq Presses Universitaires du Septentrion Goumarre Laurent 2003 D sob issance et bricolage Alternatives th trales no 80 octobre p 18 20
18. Enfin le mouvement aboutit une stoika une position de garde o le corps retrouve 10 D velopp e dans les ateliers du ma tre russe partir des ann es 1920 la biom canique occupe malheureusement peu de place dans ses crits Les fondements de la m thode ont r sist au temps travers quelques tudes devenues classiques L arc La pierre La gifle Le coup de poignard 50 l quilibre Elle marque la fois une halte boum et un prochain d part Bogdanov 2007 Comme chez Schirren c est au moment du repos que se d cide avant ou se r v le apr s le sens du mouvement Le choix de la destination se fait pendant cet interstice immobile Puis peine atterrie la balle rebondit otkaz posyl sto ka Le sch ma biom canique manifeste son tour la dualit fondamentale du principe rythmique renferm e dans une temporalit v cue qui est toujours structur e c est dire indivis ment continue puisque l appui et l lan sont ins parables et discontinue en tant que scand e par l alternance de l lan et du repos Court 2005 p 38 2 2 Rythme pluriel perception et interactions Dans le terrain du sens o tout est toujours d j du sens dans tous les sens la multiplicit des rythmes devient la multiplicit interne du rythme Henri Meschonnic La critique du rythme Une des nombreuses d finitions que Paul Val ry a donn es au rythme voque une
19. alit 1968 p 18 4 Rappelons Meschonnic pour qui le rythme est ant rieur au langage dans la gen se du sens Les rythmes sont la part la plus archa que dans le langage Ils sont dans le discours un mode linguistique pr individuel inconscient comme tout le fonctionnement du langage CR p 100 82 Le rythme se pr sente en effet comme un n ud diff rentiel dans sa capacit d articuler de livrer aux sens et la raison une forme ouverte Les tensions qu il produit et maintient autant dans sa fonction structurante qu titre de pulsion nerg tique sont essentielles la coh sion de l uvre Dans un contexte indisciplinaire celle ci passe par une m diation entre les pratiques artistiques dont chacune a un rythme propre Le rythme f d rateur n est toutefois pas un d riv ou un m lange des rythmes individuels Expos s les uns aux autres les rythmes subissent un changement d tat un passage qui d place les tensions sur un terrain d sormais indisciplinaire D une certaine mani re ils cessent d exister La confrontation d une tension musicale une tension plastique fait dispara tre les deux au profit d une troisi me par exemple entre le geste et le son D s lors le rythme devient aussi un principe de re composition traduit notamment par le mode de la partition qui permet d inscrire les tensions entre les arts dans un contexte signifiant lui m me renouvel en ces points remarquables
20. art pour qu il devienne art quelque chose qui lui est h t rog ne p 54 55 En s ouvrant sur le monde l art reste actuel l coute de son poque et donc n cessaire Le m lange des arts synth se mais aussi contamination abrasion enchev trement renvoie la naissance de cat gories in dites dont la place dans la soci t est encore incertaine D finir ces formes mergentes est un exercice laborieux Le choix des termes engage la responsabilit d une d finition non limitative capable de rendre compte des enjeux relatifs aux divers modes d interaction entre les arts Il s agit de d terminer les fronti res et les moyens de les transgresser sans tomber pour autant dans le flou d une d d finition Nuance et pr cision sont de mise les uvres hybrides d bordant les conventions appellent souvent un vocabulaire trop vaste et englobant 3 Adorno voque la m taphore structurelle de l orchestre On peut sans forcer comparer le rapport de l art aux arts et celui de l orchestre tel qu il s est form historiquement ses instruments l art est aussi peu le concept des arts que l orchestre est le spectre des timbres 2002 p 67 tienne Souriau pour sa part propose de d Jonner aux arts ce qui diff re l art ce qui demeure 1969 p 25 faisant de l art le tronc commun des arts premi re vue attirante la formule est difficile mettre en uvre lorsqu on en vient c
21. changer de camp Thierry De Mey in Adolphe et Imbault 2011 p 22 Ainsi l usurpation du rythme par la musique d truit le potentiel interartistique de l uvre En s opposant cette tradition plusieurs artistes du XXe si cle ont d velopp et d fendu des rythmes propres la danse ou bien des modes de composition mixtes Dans Fraritjaritjaka Mus e des phrases un spectacle de Goebbels qui pr c de Stifters Dinge la d marche de composition passe justement par un dialogue entre la musique le geste par le biais de la vid o et le discours Le rythme des transitions est assur tant t par la trame musicale tant t par les nuances du jeu et les paroles d Andr Wilms porteur des aphorismes d Elias Canetti Environ la moiti du spectacle le com dien quitte la sc ne et rentre chez lui Son parcours suivi par une cam ra ambulante jusqu l int rieur de l appartement est projet sur le dispositif sc nique Entre temps les musiciens du Mondriaan Quartet poursuivent leur concert assis c t jardin en bordure du plateau Malgr l loignement apparent les gestes du com dien et la musique sont coordonn s dans une partition d ensemble pr cise Ils s accompagnent sans se suivre Et lorsqu Andr Wilms bat les ufs et d coupe un oignon pour se faire une omelette les bruits de son quotidien int grent la trame sonore sur le mode de la diff rence cet effet Lesage souligne que les connexions ent
22. composition progressive et assum e du dispositif initial Basso ostinato se compose de quatre fragments narratifs r it r s avec des Variations d gradantes Sagna 2010 Et c est chaque fois pire annonce le programme Les sanglots longs des violons de l automne blessent mon c ur d une langueur monotone une strophe de Verlaine qui ouvre le spectacle se transforme ainsi en Les floraisons sans passion des gazons sucent la sueur de ces acteurs qui s en vont Sagna 2008 Alors que ses multiples reprises jouent avec les mots le substrat rythmique demeure immuable et toujours nonc Tolololon tolololon tololon tolololon tolololon tololon Le texte des dialogues se d forme rem ch voire aval au fil des r p titions les danseurs vont jusqu manger leurs textes travers la d sarticulation du discours et du mouvement Sagna provoque une rosion des fronti res entre les pratiques artistiques Tant t par le relais une phrase qui devient danse tant t dans la simultan it le verbe se frotte sans cesse au geste Si la gestuelle des danseurs table para t d abord impromptue ses reprises t moignent du contraire tout est soigneusement chor graphi pr cis et l volution de la danse se fait toujours en cho la mutation du texte De m me l int gration du troisi me danseur qui vient se greffer au duo de d part passe notamment par un apprentissage par imitation en m
23. des codes et des techniques entre les arts Adorno parle notamment du principe du montage l origine d une panoplie de proc d s d riv s le recyclage le brassage le bricolage l appropriation l interf rence le brouillage le tissage l enchev trement ont ainsi trouv leur place dans l art moderne C est en apprenant les uns des autres par la contamination mutuelle des savoir faire que les arts se r inventent continuellement L effrangement g n re donc des formes nouvelles hybrides juste titre qui branlent les arts dans leurs d limitations traditionnelles et stimule le mouvement des fronti res Il s agit certes d un ph nom ne actuel or d j en 1967 Adorno en saisit le potentiel en voquant des sympt mes d une tendance puissante interpr ter 2002 p 43 Le travail de Caterina Sagna tend l effrangement voire l effritement des moyens d expression sc nique et des images qui r sultent de leur rencontre Dans Basso ostinato cet effritement des formes dans une interaction de plus en plus troite entre la parole le geste et le mouvement va de pair avec l effilage du tissu narratif En guise de point de d part la chor graphe propose une mise en situation avec deux danseurs Fin du repas D bris de conversation Bavardage sur eux m mes sur la danse sur rien Sagna 2008 Telle est la matrice du 25 spectacle le motif qui revient en ostinato obstin ment au cours d une d
24. devenir est le principe d entropie le souffle vital du ph nom ne rythmique RR p 168 194 C est le fluide et le mouvant retrouv par Benveniste M est aussi la part du jeu dans le rythme jeu au sens ludique musical et m canique Le mouvement litt ralement donne du jeu au rythme p 192 2 1 2 Rythme sens sujet 8th day of September FT d write the birds in their treble scale Ezra Pound Canto 82 de Cantos Comprendre le rythme passe in vitablement par le langage On n y chappe pas le raisonnement appartient au discours La phrase est parsem e de rep res 42 pour faciliter la lecture de la syntaxe la ponctuation de la prosodie l intonation Au del des conventions linguistiques et sociales ces indices formels permettent d articuler le sens m me du discours jusqu le transformer Jakobson raconte qu un acteur du th tre de Stanislavski devait tirer quarante messages diff rents de l expression Sevodnja ve erom Ce soir en variant les nuances expressives Plus que de nuances expressives il s agit de variations de situations donc de variations compl tes du sens CR p 221 222 L impact s mantique de l intonation est aussi frappant que commun Tout arrangement de mots a en effet un potentiel d nonciation qui contient plusieurs situations possibles Ce potentiel est r gi par des marques que Meschonnic associe au rythme Je d finis le rythme dans le langage comme
25. dotant l uvre de sens la partition permet de la mettre au monde Dans cette optique elle se confond avec la gen se des formes Escoubas 1997 p 113 Escoubas distingue dans la partition des formes tectoniques lignes de construction plis cassures charpentes dislocations entrelacs stratification 35 etc et des formes nerg tiques lignes de forces pesanteurs attractions contractions l vations chocs et arr ts ou suspens etc p 114 Elles cr ent la structure dynamique de l uvre un vecteur qui assure son volution dans le temps Ensemble elles constituent le rythme CHAPITRE II RYTHMES SINGULIERS RYTHME PLURIEL Repr sentant de l incompr hensible le rythme est la mati re privil gi e de l aventure Les visions les m taphores se font en lui Il est le laboratoire des sens nouveaux Henri Meschonnic La critique du rythme la rencontre des arts lorsque plusieurs l ments h t rog nes sont en jeu il y a forc ment mati re composition composition au sens large autant comme configuration dans le temps et dans l espace que comme gestion des interactions l int rieur de l ensemble Composer et disposer n est ce pas le d fi de l artiste indisciplin Le relever implique des aptitudes particuli res une vision globale le sens de l instant Donner du souffle r gler le pouls et voil le rythme qui revient la fois r gulier et impr visible r
26. dynamique entre clart froide et artificielle et gr ce chaude et humaine Grace and Clarity 19441 in Cage 1961 La tension entre les deux permet de concevoir la mesure lib r e de son dogmatisme juste un peu d rout e d pass e ou anticip e Le rythme c est le retard disait Pablo Casals in RR p 231 2 1 3 Et Boum des points remarquables En effet qu est ce qu un coup Rien Ou si peu Un point Un point qui sugg re cela cela m me que nous vivons entre les coups Entre les pas Entre les mots les lignes les couleurs les volumes Fernand Schirren Le rythme primordial et souverain Dans ses passages que ce soit vers l inconnu ou dans la confirmation du m me le rythme prend appui sur des accents Ce sont les temps forts des marqueurs des connecteurs Les accents identifient les points saillants du parcours pour tablir un ordre dans la dur e ou g n rer une forme dans l espace Leur disposition est toujours variable en fonction de la composition souhait e Bien qu ils accompagnent souvent des structures rythmiques r guli res ces rep res de navigation ne sont pas des indices de proportion Deleuze affirme m me qu ils marquent n cessairement une polyrythmie des intervalles in gaux et incommensurables On se tromperait sur la fonction des accents si l on disait qu ils se reproduisent intervalles gaux Les valeurs toniques et intensives agissent au contraire en cr ant des in
27. e EA AE 76 CONCLUSION DENQUER LES TENSIONS ahini ekanin EAn Aek RAEk Rahen h ae tata taie dent 79 APPENDICE A LISTE DES EXTRAITS VIDEO sir anann AEE ES e Pnuatt rate scihtstatantestness 85 APPENDICE B GARTE HEURIS TIQUE sacs san fanst ABE Eka sation penser acmemnmcrene ester 86 APPENDICE C PARTITIONS DANS TOUJOURS D J TOMB issnin 87 APPENDICE D SPECTAGLES DU GORPUS 4srsrenensents kirke piian dun aaa Vaaka E ENA mer CNAE 90 APPENDICE E OR TOR coince tres unten 92 RPM EIRE ann et ie St SR AE RER Er MS te 96 R SUM La sc ne contemporaine privil gie de plus en plus une approche indisciplinaire en r sonance avec une r alit fragmentaire Elle produit des uvres hybrides dont ce m moire cherche identifier les rouages travers l id e d un n ud rythmique form par des forces d attraction et de r pulsion Ce n ud est un l ment essentiel la structure la coh rence et la coh sion du spectacle Dans un premier temps un aper u des modes d interaction entre les arts de la s paration la fusion permet de d terminer les enjeux de leur coexistence S en d gage par une analogie musicale la notion de partition capable d organiser de fa on dynamique les diverses composantes de l uvre La r flexion se pr te ensuite une tude du ph nom ne rythmique Au terme d un survol des d finitions et des l ments fondamentaux le rythme s impose comme modalit de corresponda
28. galit s des incommensurabilit s dans des dur es ou des espaces m triquement gaux Elles cr ent des points remarquables des instants privil gi s qui marquent toujours une polyrythmie Deleuze 1968 p 33 Ce sont aussi ces points remarquables qui permettent de personnaliser le langage de rendre unique chaque lecture d un m me texte Rousseau appelait l accent l me du discours Pour Meschonnic les diff rentes formes de l accent sont ces marques du sujet dans le rythme qui constituent la signifiance 47 Le linguiste parle notamment de l accent syntaxique dans l ensemble de la phrase de l accent prosodique qui englobe tous les accents initiaux d attaque d insistance etc et de l accent de rh torique gt oratoire affectif motionnel CR p 217 220 Par le biais des accents le rythme comme signifiance se veut le principe g n rateur de la parole ce qui fait le discours plus que ce qu il dit Court 2005 p 44 Bien entendu la notion d accent est aussi pr sente en musique en po sie et en danse Les Grecs avaient d j saisi la dynamique des temps forts dans le couple arsis thesis l origine de la m trique classique Dans la danse ils appelaient e evatio arsis le mouvement ascensionnel l lan du corps et positio depositio thesis la d position le repos du corps au point terminus de son mouvement crit Dom Andr Mocquereau dans ses travaux sur le chant gr
29. h t rog ne cherche un quilibre de forces qui se trouve pr cis ment dans cette logique des sens que le philosophe attribue quelques pages plus t t au Rythme avec une majuscule de puissance p 31 Mobiliser les sens dans un ordre particulier tant t ensemble tant t tour de r le permet d organiser les lignes d nergie de mani re en d gager le mouvement celui de la vie celui de la f te Par ailleurs Escoubas propose une piste parall le pour chapper la question des cat gories artistiques et leurs d bordements En retournant le d bat d Adorno sur l art et les arts elle avance l id e que l art est dans l uvre 1997 p 109 Ou encore ni l art au singulier ni les arts au pluriel mais avant tout l infinie multiplicit des uvres qui est constitutive de leur absolue singularit p 123 Escoubas abonde ainsi dans le sens de la r flexion de Meschonnic sur le langage au del des signes qui n existe v ritablement que par l individualisation du discours La logique des sens est a fortiori valide au th tre art impur par excellence Deleuze en fait un terrain d application aux r flexions de son ouvrage pr c dent Diff rence et r p tition 1968 Si le th tre lu par le philosophe est surtout celui de la pens e ses m taphores n en sont pas moins pertinentes la sc ne La qualit principale que Deleuze reconna t au th tre est celle du mouvement de l
30. il l articule il le g n re Tous ces modes d interaction engagent des relations complexes avec le temps auquel le rythme donne forme et sens Cioran parlait du rythme comme temps devenu palpable RR p 123 Le rythme d finit les liens entre le sujet et son pr sent Il donne un sens l instant Autre donateur de sens Humpty Dumpty ma tre du langage incarne un paradoxe du temps qui m rite d tre explor pour sa parent avec le temps de la sc ne 3 1 Polys mie et probl mes de sens Humpty Dumpty sat on a wall Humpty Dumpty had a great fall All the King s horses and all the King s men Couldn t put Humpty Dumpty in his place again Comptine anglaise Selon Meschonnic le rythme fait partie de l inconscient du langage Il pr c de le discours et se manifeste dans les articulations entre les mots Les phrases et non les mots sont donc l l ment premier du langage Dans cette optique une virgule peut tre d cisive au sens de la phrase Rappelons la fameuse sentence du g n ral Fairfax pour l ex cution du roi d Angleterre Charles I 1649 Si omnes consentiunt ego non dissentio Le g n ral avait volontairement omis la ponctuation afin de laisser une marge d interpr tation son consentement Alors qu une virgule avant ego approuvait l ex cution une L exemple est rapport par Beauz e dans son article Ponctuation gt de l Encyclop die de Diderot 1765 63 deuxi me avant dissentio impli
31. it again Alice s Adventures in Wonderland in Carroll 1995 p 30 75 un personnage son r le rel ve de l autofiction mais n en reste pas moins un r le L ambigu t temporelle des deux moments de suspension d coule du rapprochement entre le pr sent de la sc ne et celui de la salle Tel un ma tre de c r monie le chercheur est la fois l int rieur et l ext rieur du r cit Il emprunte ses mani res au Lapin Blanc du pays des merveilles Toujours press et fuyant celui ci est essentiel au p riple d Alice qui tente de le rattraper depuis le d but de l histoire Carroll introduit une sorte de navigateur dynamique en la figure du Lapin un guide dont les apparitions incitent la petite fille passer aux pisodes suivants Le chercheur creuse aussi ses souterrains sa derni re entr e se fait par un tunnel form de cubes noirs alors que le discours sur les sens commence en dessous des gradins d o il merge avec une lampe de mineur sur la t te Le choix de la carotte comme racine des choses et x polyphonie des sens TDT 53 03 et 53 33 est par ailleurs une fantaisie sur le m me th me supposer que le chercheur connaisse la suite de l histoire son temps s apparente celui de l crivain que Blanchot situe dans un toujours d j ambivalent Entre le d j vu et le toujours d j un pr sent qui se croit pass un leurre et un pass qui se fait pr sent une reprise
32. jusqu la crise une crise d adolescence dans le cas de Pinocchio En rejetant les mod les tablis la d sob issance stimule une recherche d alternatives sur le mode de la recomposition et du montage En effet l artiste indisciplinaire est toujours un peu bricoleur Il improvise sans mode d emploi ni recette C est quelqu un sans discipline En fait ce qui caract rise le mieux le bricoleur c est l indisciplinarit une tactique chappatoire qui s applique trouver une solution hors champ ou du moins croire qu une telle possibilit existe Dubois 2001 p 51 3 Refuser les r gles en vigueur sans pour autant les nier en y injectant des modalit s et pratiques provenant d autres champs artistiques la danse la performance le concert les arts plastiques l image anim e le cirque les marionnettes crit Bruno Tackels 2009 p 63 Refuser sans nier implique une d marche structur e sans discipline s point d indiscipline 4 Selon Claude L vi Strauss la pens e bricoleuse proc de par analogie et laborfe des ensembles structur s en utilisant des r sidus et des d bris d v nements odds and ends dirait l anglais ou en fran ais des bribes et des morceaux t moins fossiles de l histoire d un individu ou d une soci t La Pens e sauvage 1962 Paris Plon p 32 Entre les mains du bricoleur les croisements sont circonstanciels le bricolage rel ve du cas par cas De
33. les accents jalons de la r p tition C est par l inscription dans un contexte toujours diff rent qu op re la donation du sens caract ristique du rythme comme n ud Au c ur des changes que Deleuze rapporte au transcodage ou la transduction entre des milieux le rythme remplit une fonction dramaturgique importante en situant chaque moment du spectacle par rapport ses diverses composantes notamment le temps et l espace de la sc ne Pour les arts comme moyens d expression il y a donc une raison rythmique qui pr side la rencontre Autrement dit le n ud est une cl de convergence un facteur de r conciliation Cowan et Guido 2010 p 21 Si Deleuze ancre sa vision du rythme dans la r p tition et la diff rence implicite celle ci c est que malgr la complexit de la notion le rythme reste la base une parabole de l alt rit Meschonnic 1995 p 156 un ternel retour soi m me travers l autre 5 Le transcodage ou transduction c est la mani re dont un milieu sert de base un autre ou au contraire s tablit sur un autre se dissipe ou se constitue dans l autre Deleuze 1980 p 384 83 Le rythme est ce qui survient quand le m me et l autre n tant pas indiff rents l un l autre se rencontrent Est rythme ce par quoi le m me et l autre accordent leurs moments relatifs d ouverture et de fermeture Il est la modulation de ce battem
34. m me l indiscipline est en quelque sorte toujours conjoncturelle En refusant toute affiliation disciplinaire elle ne peut pas aspirer la transmission Sa d finition est donc d embl e priv e de stabilit s mantique impossible transmettre elle est vou e l errance Si l indiscipline s enseignait et s apprenait elle deviendrait une discipline parmi d autres L approche indisciplinaire semble particuli rement ad quate la r alit fragmentaire de la soci t occidentale des derni res d cennies La sc ne contemporaine succombe l hybride au point o l affirmation se passe d exemples Le th tre emprunte d sormais sans h sitation la musique la danse au cirque aux nouveaux m dias C est l endroit privil gi du m lange L a sc ne est le lieu de convocations concertations unions fusions ajustements entretiens distance communications montages interactions de tous les arts qui collaborent l uvre commune en se transformant ou non en visant une cr ation de type homog ne ou dissonant en rupture Picon Vallin 2001 p 104 Le th tre indisciplinaire r pond une volont d explorer des zones de coexistence entre les arts Qu il proc de par enchev trements courts circuits recyclages ou d tournements ce th tre de l impuret Scarpetta 1985 adopte souvent d autres modes de composition d autres paradigmes que le genre dramatique traditionnel th tre
35. musicale pour questionner et enrichir autant le cahier de r gie th tral que les syst mes existants de notation chor graphique ou le sc nario cin matographique Comme en musique la partition permet non seulement de transcrire et de transmettre l uvre mais aussi d organiser les l ments pour en faire un ensemble signifiant La pr cision et la distribution des dur es d terminent sa temporalit la mesure marque une division qui fait ressortir des rep res essentiels son ex cution De plus la partition articule les intentions de composition et de correspondance entre les moyens d expression en jeu Au th tre Vsevolod 12 La division sugg r e par la mesure n est pas unique En musique le m me ensemble de notes peut donner lieu une partition alternative exigeant une autre lecture capable de transformer la pi ce jusqu la rendre m connaissable l oreille 28 Meyerhold est parmi les premiers reconna tre son importance La notion de partition rythmique du spectacle devient r currente dans son travail partir de ann es vingt Le rythme dans son acception musicale sous tend pour lui la composition sc nique et se pr sente comme mati re de coh sion entre les arts D abord la recherche de l harmonie puis en qu te du contrepoint le ma tre russe montre beaucoup d admiration pour la musique Plusieurs de ses notes t moignent d un d sir de transposer les principes de la composition music
36. point de fuite un l ment sc nique pr cis dont la vocation change en cours de route Le tricot de la Brebis de l autre c t du miroir est un point de fuite saillant en un clin d il ses 16 aiguilles deviennent une paire de rames et la boutique se fond entre deux rives De m me lors de la sc ne du th dans TDT ce sont les tintements de cuill res sur les tasses qui permettent le relais En effet les quatre convives sont encore plong s dans une c r monie th trale quand peu peu leurs coups de cuill res distraits amorcent une sonate 42 42 musique reprise aussit t par la fl te et le hautbois Plus loin la fin de TDT un glissement entre le discours et le chant vient donner des airs de jazz la salve de questions adress es au chercheur 1 04 45 fig E 7 Le passage n est pas sans rappeler la musicalisation de la Reine Blanche Much be etter Be etter Be e eetter Be e ehh Le mode de la simultan it quant lui se passe d interactions apparentes entre les arts C est le cas par exemple de l exposition gt au d but de la pr sentation lorsque le conf rencier et les interpr tes s ex cutent dans leurs cases respectives 1353 fig E 2 Les parcours du th tre de la danse du chant de la musique du cirque voluent en parall le s par ment avant de s accorder sur le d compte Et Boum f d rateur Il s agit d une attitude de reconnaissance o les arts dial
37. pur s il en est Il se pr sente comme un art de l h t rog n it faisant appel une perception morcel e L activit de synth se s effectue alors du c t du spectateur L hybridit envahit les arts vivants elle devient aussi une tendance forte En t 2009 la revue Mouvement publie un dossier dont le titre r sonne tel un manifeste Merde l indiscipline Dans l ditorial Jean Marc Adolphe et David Sanson expliquent En appelant cette revue l indisciplinaire des arts vivants nous voulions essentiellement manifester une curiosit en veil ouverte tous les champs de la cr ation contemporaine Que les uvres qui ces derni res ann es ont prioritairement retenu notre attention aient t hybrides c est tout simplement qu elles nous semblaient plus particuli rement r pondre une question complexe dont la ecture ne saurait tre lin aire Mais de cette indiscipline esth tique nous ne voulons faire une chapelle ce n est pas n cessairement parce qu une uvre m lange vid o danse texte musique nouvelles technologies etc qu elle est g niale ou tout simplement productrice de sens Adolphe et Sanson 2009 En effet devant la multiplication de propositions o la rencontre des arts rel ve davantage d un effet de mode que d une exigence proprement artistique l indiscipline n est pas garante de richesse Car c est bien au c ur de la d march
38. qui coute battre les rythmes les ressent jusqu en lui m me Saison 1998 p 72 Le rythme efface la fronti re entre l uvre et le spectateur Leur rencontre se d roule non pas dans un va et vient entre deux structures distinctes mais l int rieur d une structure commune celle de l objet artistique reconstitu par les sens Le partage du m me rythme ne garantit pourtant pas la complicit LJe rythme est la forme commune du regardant et du regard ce qui ne veut pas dire qu il y a n cessairement harmonie consonance entre le regardant et le regard La forme commune du regardant et du regard peut tre aussi bien dissonante contradictoire contrariante Escoubas 1997 p 114 Par le m canisme de perception qu il d clenche le rythme r concilie l espace avec le temps jusqu transformer l un en l autre notamment dans les arts plastiques Et ce Rythme parcourt un tableau comme il parcourt une Jacques Chailley in Encyclop die Larousse en ligne www larousse fr encyclopedie musdico rythme d finit le rythme comme la perception consciente ou subconsciente d un rapport de temps dans la succession des points d appui 53 musique crit Deleuze la suite de son loge du rythme dans Logique de la sensation 1981 p 31 En effet un tableau n est gu re diff rent d une symphonie en ce qu il acquiert son sens dans la dur e Le temps d exposition varie avec le spectateur et chaque lecture traver
39. reflet dans le miroir il est la fois ce qui n a pas de sens mais qui comme tel s oppose l absence de sens en op rant la donation de sens Deleuze 1969 p 89 Si Carroll est un virtuose du non sens sa prose et ses vers sauvent toutefois les apparences vus de pr s ils sont intelligibles et coh rents La logique qui r git les relations entre les l ments du r cit est souvent impeccable Pourtant elle trompe nos habitudes de pens e Le lecteur des aventures d Alice reconna t des objets familiers mais leur usage sort de l ordinaire L exploit de 13 Carroll consiste pr cis ment d vier les choses de leurs trajectoires convenues pour trouver le sens du non sens C est le propre du paradoxe qui d truit le bon sens comme sens unique mais ensuite d truit le sens commun comme assignation d identit s fixes Deleuze 1969 p 12 Si le bon sens est imposition d une direction et d un sens fixe qui est le bon le paradoxe lui souligne le caract re bidirectionnel de la ligne de sens comme possibilit d aller dans deux sens oppos s la fois Tomiche 2002 p 2 Or comment Carroll fait il pour trouver des r sonances entre des l ments par ailleurs disparates Comment se retrouver dans le paradoxe L chiquier du miroir est muni d un mode d emploi incluant un code de conduite et des lois physiques particuli res Il est certes fantaisiste mais toujours cons quent jusqu renv
40. sans cesse soir apr s soir travers la r p tition du m me Il n y a que la diff rence qui se r p te affirme Deleuze 1968 p 145 Dans le pr sent de la sc ne la r p tition est paradoxalement porteuse de changement Comme chez Blanchot la redite am ne du souffle Deleuze pour sa part parle du renouvellement par la r p tition travers la notion de ritournelle la forme a priori du temps qui produit chaque fois des temps diff rents Deleuze et Guattari 1980 p 431 On imagine une spirale dont l axe vertical est le temps alors que les coordonn es du refrain sont fixes sa position absolue varie d une spire l autre La ritournelle toujours la m me revient chaque fois autrement Le th tre produit l vidence l art dans son v nementialit c est dire la fois dans la n cessit de sa r it ration et dans l impossibilit radicale d une r it ration l identique la reprise au th tre est monstration du m me et mise en vidence de l infini de ses virtualit s c est dire de sa caract ristique d tre sur le mode de la partition et non sur le mode du f tiche Saison 1999 p 7 8 73 3 2 2 Le th des fous Ce pr sent de la sc ne a aussi quelque chose d un d j vu La r p tition au c ur du d j vu est apparente mais illusoire il s agit d un souvenir du pr sent au pr sent Dans un essai intitul justement Le souvenir du pr sent Paolo Vir
41. truit la convention du langage comme code Qu advient il la communication lorsque le sens des mots ne d pend que d un usage individuel Le sujet qui a le pouvoir absolu sur le signifiant en l occurrence un uf lui r serve un triste sort When I use a word Humpty Dumpty said in rather a scornful tone it means just what I choose it to mean neither more nor less TLG p 57 Rien d tonnant donc si glory devient a nice knock down argument alors que impenetrability signifie we ve had enough of that subject Les mots se commentent eux m mes et prennent le lecteur dans un cercle vicieux de renvois o pour reprendre Meschonnic la v rit des noms se substitue la v rit des choses 1990 p 7 Passer de l autre c t du miroir crit Deleuze c est passer du rapport de d signation de choses au rapport d expression de sens 1969 p 38 Humpty Dumpty a l avantage de ma triser les deux Enfin c est avec le Jabberwocky que Carroll expose l imagination fertile de son prot g son meilleur jour La seule explication des toves suffit pour perdre Boccia Boccia en italien Chouli Buka du japonais invent Namaspamousseilroule Schtroum Lou Shim shim Flim Mli Crochnu rond pachrochnu Mouliroula etc 3 I meant by impenetrability that we ve had enough of that subject and it would be just as well if you d mention what you mean to do next as I suppose you d
42. une peinture tout comme l auditeur interpr te une m lodie Cela dit contrairement la musique o la s quence de lecture est normalement pr d termin e l ordre de l ex cution d une uvre plastique est largement Variable Le spectateur d un tableau est libre de choisir les modalit s et la dur e de son exp rience 12 petits plaisirs fait partie des trois court m trages r unis dans Kandinsky A Close Look commande du mus e Guggenheim New York l occasion de la r trospective du peintre russe en 2009 Voir aussi www grahameweinbren net 13 Le eyetracking ou l oculom trie est un ensemble de techniques permettant d enregistrer les mouvements oculaires notamment l aide d une cam ra 54 Par ailleurs la vision du rythme comme organisation interne du sujet compromet la distinction traditionnelle entre les arts du temps et les arts de l espace En termes de perception la s paration n est pas pertinente Bien que la dur e d un spectacle de th tre ou de danse soit normalement peu pr s fixe ces pratiques interrogent souvent leurs cadres temporels C est d autant plus le cas des formes interdisciplinaires instables Dans l infolettre de Needcompany Jan Lauwers explique sa motivation faire durer les images sc niques afin de r aliser leur potentiel intemporel propre aux arts visuels Un temps d exposition suffisant permet de p n trer la m moire du spectateur d entrer dans l histoire
43. volution dans la diff rence Le th tre c est le mouvement 1 Lorsque Benveniste d finit la signifiance il en distingue deux types celle des langues syst mes unit s signifiantes et celle des syst mes artistiques par exemple o les termes du sens sont toujours d couvrir illimit s en nombre impr visibles en nature donc r inventer pour chaque uvre Benveniste in Bourassa 1997 p 15 Les unit s de signification sont alors red finir chaque usage dans une convention circonstancielle unique ph m re L uvre devient un syst me signifiant autonome 81 r el et de tous les arts qu il utilise il extrait le mouvement r el p 18 Ce mouvement poursuit Deleuze c est la r p tition qui se tisse d un point remarquable un autre en comprenant en soi les diff rences p 19 La r p tition l essence et l int riorit du mouvement est son tour caract ristique du rythme notamment au th tre C est elle qui d finit le mouvement r el non pas l opposition non pas la m diation pr cise Deleuze p 18 Les forces de l opposition tension et de la m diation liaison r unies dans le n ud sont ainsi compl mentaires celles de la r p tition Dans le th tre de la r p tition on prouve des forces pures des trac s dynamiques dans l espace qui agissent sur l esprit sans interm diaire et qui l unissent directement la nature et l histo
44. 005 3 Depuis 2005 trois recueils importants fruits de nombreuses tables rondes ont vu le jour 1 Cowan et Guido 2010 2 Christian Doumet et Aliocha Wald Lasowski dir Rythmes de l homme rythmes du monde Paris Hermann 2010 3 Bonhomme et Symington 2005 38 Pierre Sauvanet souligne une difficult inh rente l tude du rythme rares sont les artistes ou les philosophes qui n en parlent pas or ils ne parlent pas du m me ph nom ne RR p 11 Il s agit d un concept tellement vaste que sa d finition pose n cessairement le probl me de la multiplicit Comment rendre raison du divers sans le r duire l un s interroge l auteur Car le rythme appara t de fait comme un probl me transversal et interdisciplinaire gt p 12 avec l ambition de trouver un d nominateur commun aux vagues de la mer les battements cardiaques et la section dor e Les rythmes collaborent en s appuyant les uns sur les autres Ainsi le rythme esth tique s appuie sur les rythmes biologique le pouls le souffle la marche et cosmologique l alternance des saisons des mar es des jours et des nuits Le rythme d une symphonie ou d un tango renvoie au corps interm diaire incontournable dans notre perception du monde la fois r guliers et variables le pouls et la respiration participent activement au rythme d une uvre d art autant du c t de l interpr te que du spectateur Avant de pouvoir d cli
45. 03 2 Du latin disciplina le terme a d abord t adopt comme punition ravage douleur par l ancien fran ais 1080 Il d signait aussi le fouet de mortification Moli re menace d ailleurs d administrer des coups de discipline son Tartuffe Laurent serrez ma haire avec ma discipline III 2 dans le cadre de ce m moire a l avantage de rejeter les rep res d une cat gorisation quelconque Contrairement l interartistique l indiscipline n esquive pas la clause disciplinaire mais s oppose elle dans un esprit de r bellion Insoumise et inclassable l indiscipline ne se r duit pourtant pas une d d finition une d finition par la n gative Sa r volte se veut constructive notamment travers l importation de ce qui se fait ailleurs dans les territoires artistiques adjacents l o la discipline cherche d limiter son antipode veut d border et largir Voir fig B 1 Dans une r flexion sur l mergence de nouvelles formes en danse contemporaine D sob issance et bricolage Laurent Goumarre voque la naissance de Pinocchio dont la bouche peine achev e rit d j de son cr ateur et lui tire la langue pas encore termin et d j tu commences de manquer de respect ton p re lui reproche celui ci in Goumarre 2003 p 18 L irrespect l insolence la transgression marquent aussi les formes indisciplinaires Ces attitudes t moignent d une r sistance allant parfois
46. 1 2 Modes d interaction entre les arts ss 16 id Entre s parationr et fusionne manne sc iana aha Tsi 18 1 2 2 De la communaut l loignement 19 124 laditf rencens ds unten nacre ot none 21 TAA L e rangemMent issus nreti e T EE EEA tan E 24 Lo La PUTON sions a a a R 26 lil lemod l MUSICA meton a T E a AEE ARA 27 1912 EXDENMENCALION S iorn anr A E E A te 30 1 3 3 Partition dans Toujours d j tomb 32 1 3 4 Dramaturgie et gen se des formes sise 34 CHAPITRE II RYTHMES SINGULIERS RYTHME PLURIEL iserccaenss iredi o En TEA TENER 36 2 1 Rythmes singuliers approches et d finitions 37 del Premieres dJeEnMMON Seane Ea hh 39 22 RAMIE Sens BUET sssesracsenen mane monardeerenemenrmtan i 41 2 1 3 Et Boum des points remarquables 46 2 2 Rythme pluriel perception et interactions sssssesessrarsesrssnrsrrreerso 50 2 2 1 La P FEBONuisensentemreneenenenmenttimnenenmennnetnctennersdsur S1 2 242 POYA E oneens r E AENA S E EOE ANSNES 57 2 2 3 Correspondances et composition ss 59 CHAPITRE III AUMPTY DUMPTY ET LES SENS D TEMP Sie sarnnscnnssseeneestesenensscunnsatre 806 62 3 1 Polys mie et probl mes de sens 62 3 1 1 Humpty Dumpty ma tre du langage 63 DAA A CUS aa a tn ent Rent me or ons on least 66 3 L temps de SCENE ke ean aa e l anea ani 69 3 2 1 letemps duw toujours d ja biseau means ati o 70 32 gt Lethe ES TOUS Unes sean sera e a E ank 73 SD9 Parenthe SeSe aikoo kE R A e
47. 67 Rhythm Etc In A Year from Monday New Lecture and Writings p 120 132 Middletown Wesleyan University Press Collot Michel 1990 Rythme et m tre entre identit et diff rence Prot e vol 18 no 1 hiver Dossier Rhythmes dir par Lucie Bourassa p 75 80 Court Raymond 1992 Rythme musical et forme esth tique In Les rythmes lectures et th ories dir par Jean Jacques Wunenburger p 183 194 Paris L Harmattan Cowan Michael et Laurent Guido dir 2010 Dossier Rythmer Rhythmize Interm dialit s no 16 automne gt F ron Fran ois Xavier L art du trompe l oreille rythmique p 145 165 gt Vasold Georg Optique ou haptique le rythme dans les tudes sur l art au d but du 20 si cle p 35 55 Trad de l allemand par H l ne Sicard Cowan Deleuze Gilles 1968 Diff rence et r p tition Paris PUF 1969 Logique du sens Paris Minuit 1978 Le temps musical Une conf rence l IRCAM www webdeleuze com php texte php cle 109 amp groupe Conf E9rences amp langue 1 1981 Francis Bacon Logique de la sensation Paris Diff rence et F lix Guattari 1980 Capitalisme et schizophr nie t 2 Mille plateaux Coll Critique Paris Minuit Escoubas liane 1997 La partition du visible plasticit rythme uvre In De la diff rence des arts dir par Jean Laux
48. Liam Fennelly Jan Van Outryve Avec Capilla Flamenca EE www lesballetscdela be 91 Basso ostinato 1h05 _ cr en novembre 2006 Conception et _chor g raphie Caterina Sagna EAA EAA Dramaturgie et texte T Roberto Fratini Serafide R gie plateau Frank Condat Alessandro Bernardeschi Antonio Montanile Mauro Paccagnella http caterina carlotta sagna org Stifters Dinge 1h10 cr en septembre 2007 Th tre Vidy Lausanne Composition musique et mise en sc ne Sc nographie lumi re et vid o Programmation Kinye Gr nberg Wi lli Bol p po li sonore APPENDICE E TOUJOURS D J TOMB florence Blain mes appartements hautbois Sarah Dagenais les abysses voix Harmonie Fortin L veill mon lit danse Xavier Malo dans quel sens conf rence Hugues Sarra Bournet la voiture z ro mission acrobaties M lanie Tardif l horizon du champ notes en bas de page Elsa Vadnais Malo Paris fl te llya Krouglikow les carottes mise en sc ne Jessie Mill assistance la mise en sc ne dramaturgie Franck Vignal espace lignes couleurs Nancy Bussi res lumi res Elena Frantova coucou et tic tac Jeanne lo se Ouellet aide aux costumes Martine Lampron manipulations et soutien technique Fig E 1
49. UNIVERSIT DU QU BEC MONTR AL TOUJOURS D J TOMB OU LE RYTHME COMME N UD DIFF RENTIEL D UN SPECTACLE INDISCIPLINAIRE M MOIRE PR SENT COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MA TRISE EN TH TRE PAR ILYA KROUGLIKOV MARS 2012 UNIVERSIT DU QU BEC MONTR AL r Service des biblioth ques Avertissement La diffusion de ce m moire se fait dans le respect des droits de son auteur qui a sign le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles sup rieurs SDU 522 R v 01 2006 Cette autorisation stipule que conform ment l article 11 du R glement no 8 des tudes de cycles sup rieurs l auteur conc de l Universit du Qu bec Montr al une licence non exclusive d utilisation et de publication de la totalit ou d une partie importante de son travail de recherche pour des fins p dagogiques et non commerciales Plus pr cis ment l auteur autorise l Universit du Qu bec Montr al reproduire diffuser pr ter distribuer ou vendre des copies de son travail de recherche des fins non commerciales sur quelque support que ce soit y compris l internet Cette licence et cette autorisation n entra nent pas une renonciation de la part de l auteur ses droits moraux ni ses droits de propri t intellectuelle Sauf entent contraire l auteur conserve la libert de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont il
50. aborations de Cherkaoui des quatre derni res ann es figurent par exemple un ensemble vocal de polyphonies corses Apocrifu 2007 un groupe de moines Shaolin Sutra 2008 une danseuse de flamenco Maria Pag s dans Dunas 2009 et une danseuse indienne de kuchipudi Shantala Shivalingappa dans Play 2010 De toute vidence le d fi de la diff rence est cher au chor graphe La place de chacun est taill e sur mesure Et la rencontre des arts comme celle des interpr tes se passe dans le respect de leurs particularit s Foi qui ouvre une trilogie sur la qu te de soi et de dieu est un lieu d changes et de dialogue o la danse contemporaine se m le aux gestes quotidiens les anecdotes personnelles aux citations bibliques les annonces l interphone aux chants m di vaux La pr sence de l ensemble vocal et instrumental Capilla Flamenca sur sc ne tout au long de la repr sentation assure un quilibre entre le geste et la musique Au del d une alliance heureuse des pratiques leur interaction est porteuse de sens Elle interroge la norme et donne une profondeur aux images de la joie de l amour et de la guerre Le travail de Caterina Sagna s inscrit pour sa part en filiation avec la danse th tre de Pina Bausch Depuis une dizaine d ann es la chor graphe d origine italienne se consacre l indiscipline artistique qui questionne sans cesse la place de la danse et ses modes de repr sentation Avec Relation
51. ale au th tre Vers 1925 Meyerhold introduit dans sa pratique un proc d de r p tition sur la musique la m lod clamation 1975 t 2 p 147 Il s appuie sur la certitude du temps musical sans pour autant tourner le discours au chant Un spectacle organis de fa on musicale n est pas un spectacle dans lequel on fait de la musique ou bien on chante constamment derri re la sc ne c est un spectacle avec une partition rythmique pr cise un spectacle dont le temps est organis avec rigueur Meyerhold 2005 p 123 Cette rigueur trouve des chos dans la pratique de plusieurs metteurs en sc ne contemporains Giorgio Strehler par exemple passait par la partition rythmique pour mesurer avec minutie le temps de ses spectacles Par ailleurs pouvoir noter le spectacle dans son ensemble les r pliques des com diens leurs gestes leurs d placements la trame sonore les changements d clairage est le r ve de plus d un metteur en sc ne Toujours sous l emprise du mod le musical Meyerhold parle de la partition comme d un dessin orchestral C est dans l air du temps de 1926 1928 Rudolph Laban publie les fondements de la cin tographie une m thode de notation similaire pour transcrire la danse au m me moment Brecht pr pare ses premiers 13 L harmonie a t le point de mire des premi res mises en sc nes professionnelles d op ra de Meyerhold au th tre Mariinski Pourquoi donc les mouveme
52. andinsky 1998 p 146 Ainsi les arts s approfondissent chacun en lui m me au contact les uns des autres Comme dans la ronde de Wagner ils alternent l coute et l expression cette fois dans une r ciprocit technique exig par l ensemble Adorno 2002 p 49 Chaque art se place au premier plan quand lui et pr cis ment lui peut dire ce qui est n cessaire en une seule minute de la fa on la plus forte possible Un autre au m me moment ou bien est un arri re fond favorable ou bien s il le faut il peut se taire Kandinsky 1998 p 148 La contamination des arts propre la synth se wagn rienne n est ici ni une pr occupation ni un r sultat souhaitable si Wagner h ritait de la pens e romantique Kandinsky reste tributaire du credo moderniste Quand les arts s expriment tous ensemble chacun profite d un moment privil gi pour d ployer son plein potentiel Le mode de la diff rence s inscrit donc forc ment dans la dur e Les pratiques artistiques peuvent partager l espace temps de la sc ne de deux fa ons en s rie dont les connexions se font par relais ou en parall le dans la juxtaposition des l ments Dans la simultan it ou en d calage la configuration des arts s apparente la structure d un atome Les lectrons autour du noyau sont certes interd pendants mais ne se touchent jamais Malgr la distance la liaison est forte et indispensable Pour reprendre Nancy il s agit d
53. aris Gallimard 1972 p 129 77 nu sur la galerie du c t jardin c est l den le sexe de l homme couvert par une feuille verte la nudit de la femme dissimul e sous ses longs cheveux Une autre nue Alexandra Gilbert prend le relais sur la sc ne en suivant l homme en noir d sormais s par de sa dulcin e Sa nudit voque l innocence lui aussi est un nouveau n mis au monde peine dix minutes plus t t Leur duo est pourtant loin de la premi re danse de la Gen se Alors que la femme une sorte de f e grimpe sur ses paules et s enroule autour de son cou l homme ne la remarque m me pas Le chant des musiciens serein et triste devine sa peine c est le chagrin d amour Quant ma dame me het hait et je Vaour l adore persiste le refrain Le malheur est cependant relay par le bonheur avec une s rie de mots et de courtes phrases des sensations et des souvenirs marquants Smelling the back of a baby s neck feeling old wooden furniture coffee autant de r pliques et de moments forts qui ram nent les joies de la vie Du p ch originel au plaisir du caf ces cinq minutes forment donc un pisode part enti re un motif authentique dans le canevas du spectacle Les parenth ses comme celle ci s av rent indispensables pour la respiration du spectacle soit pour moduler l attention du public Il ne s agit pas n cessairement de temps morts quoique une halte en bonne et d
54. ation des arts l oppos du spectre se situe l loignement des arts leur mode d interaction minimale Inspir du montage il renvoie la s paration des l ments avanc e par Bertolt Brecht dans les ann es 1930 Celui ci d fend une collaboration distance les arts se rassemblent et se distancient r ciproquement Brecht 1978 par 70 74 L entreprise commune n enl ve toutefois pas l autonomie de chacun les limites entre les arts restent ici clairement d finies Il s agit donc de deux ou plusieurs v nements sc niques qui se produisent travers des mediums diff rents th tre musique danse peinture etc sans relation apparente C est la cat gorie d ind pendance que 7 Sa th orie se d veloppe en r action l id e de fusion des arts qu il croit saisir comme beaucoup d autres dans le Gesamtkunstwerk et qui lui semble corr lative d un pouvoir hypnotique sur le spectateur Picon Vallin 2001 p 104 21 Bosseur illustre dans sa classification par les collaborations de Cage et Cunningham 1 2 3 La diff rence La diff rence des arts est un mode d riv des principes de la composition d velopp s par Vassily Kandinsky Le peintre russe propose une combinaison dans la diff renciation qui pr serve l int grit de chaque art constituant L interaction se passe d hi rarchie et vite la fusion les arts parlent tous ensemble mais chacun dans sa propre langue K
55. atique mais le rythme est critique il noue des instants critiques ou se noue au passage d un milieu dans un autre poursuivent Deleuze et Guattari 1980 p 385 Meschonnic reprend et compl te l id e du passage en l appliquant au langage Le rythme est le passage du sujet dans le langage le passage du sens et plut t de la signifiance du faire sens CR p 225 mais aussi le passage entre les arts un changement de milieux qui sollicite justement sa facult critique Contrairement la mesure le 45 rythme s adapte capable de se transformer en fonction des circonstances Il est conjoncturel subjectif sensible au contexte de son closion Incidemment l adaptabilit assure la p rennit de la notion La mesure reste fondamentalement binaire entre l accent et son absence comme le pied en po sie frapp puis lev temps fort suivi de temps faible Son dogmatisme impassible au changement entra ne la s paration implicite entre la forme et le sens Peu importe les nuances du discours le temps fort sera suivi de temps faible Le m tre l talon de la mesure est discontinu et chiffrable mais le rythme est continu discontinu m trique ou antim trique selon le contexte Il inclut la mesure tout en lui tant irr ductible comme le sens est irr ductible la forme CR p 224 225 En musique Cage traduit cette inclusion par le rythme ap riodique Aperiodic rhythm admits of periodic
56. au dans le m me mais attention est ce vraiment le m me Le passage d Alice cette table est par exemple tout fait unique Du reste que sait on du pass et du futur imm diats de la c r monie Si la r p tition s av re illusoire le diagnostic du d j vu est concluant Le pr sent de la Mad Tea Party est alors masqu par l extension d un pass lourd de cons quences le moment o les fl ches de l horloge ont suspendu leur cours Ils ont tu le pr sent souligne Deleuze 74 Le pr sent ne survit plus entre eux que dans l image endormie du loir leur compagnon supplici mais aussi qui ne subsiste plus que dans le moment abstrait l heure du th ind finiment subdivisible en pass et en futur 1969 p 97 Une r plique ouvertement inspir e par le th des fous se retrouve au c ur de TDT juste apr s la chute de la fabrique du savoir Sans paroles et chor graphi avec un artifice assum cet interm de annonce un changement de r gime le mode de la conf rence est chose du pass Une tasse la main le conf rencier se d tache peu peu du propos scientifique dont il est porteur Par ailleurs la s ance du th est une r flexion sur le temps autant dans le clin d il l horloge arr t du pays des merveilles que par son emplacement strat gique dans la trame de la pr sentation Elle se veut comme une parenth se une pause syndicale pour les uns et un temps de respiration pour les au
57. cier La conf rence devient l objet d une fabrique du savoir dont le fonctionnement se d voile peu peu au cours de la premi re partie de la pr sentation jusqu ce qu un bris fatal ne vienne rompre la proc dure usuelle pour amener les participants s exprimer autrement travers une multiplication de trames et d pisodes sc niques TDT r v le une structure fragmentaire qui ob it une dramaturgie d ensemble puis e en grande partie dans De l autre c t du miroir de Lewis Carroll Through the Looking Glass TLG dans le texte Alors qu aucun l ment du r cit ne participe tel quel la conf rence l imagination l humour et la logique impeccable de son auteur ont beaucoup aliment les rouages de la cr ation Suite au succ s des aventures d Alice au pays des merveilles Carroll d cide d envoyer son h ro ne dans un nouveau voyage cette fois de l autre c t du miroir Les personnages qu elle y croise sont certes farfelus mais souvent familiers au public victorien car leurs origines remontent au folklore anglais Les conflits et les dilemmes auxquels sont confront s Humpty Dumpty Tweedledee et Tweedledum le Lion et la Licorne viennent tout droit des comptines traditionnelles Carroll anime et compl te le parcours de ces cr atures sans les d rober l histoire De plus De l autre c t du miroir est un terrain de jeu o l auteur prouve les codes du langage jusqu les r inventer dans le Jabberwock
58. e cr atrice et au plus profond de l uvre dans sa structure interne que doivent s affirmer la n cessit et la pertinence de ces dialogues changes entre les arts Lachaud 1999 p 11 Au del d une juxtaposition des pratiques la rencontre des arts implique des correspondances au sein de l uvre Dans une alliance f conde les composantes artistiques s associent par n cessit mais sans perdre leurs sp cificit s respectives Des d finitions et des codes divergents s affrontent in vitablement la recherche d un d nominateur commun d un l ment f d rateur Cheville ouvri re d une uvre indisciplinaire cet l ment permettrait d organiser les interactions en une structure coh rente o les diff rences produiraient des tensions constructives Ainsi le rythme agirait comme n ud diff rentiel du spectacle indisciplinaire Avant de d velopper cette hypoth se davantage il faut bien s r circonscrire les termes Quels sont au juste les d fis de l indisciplinarit Pourquoi un n ud diff rentiel Et surtout comment d finir le rythme dans la mesure o il s agit d une notion tentaculaire dont les acceptions divergent m me l int rieur de chacune des pratiques artistiques Dans cette optique est il possible de trouver une d finition op ratoire m me de rendre compte des variations s mantiques du terme en musique en danse en po sie etc Au th tre comme en musique le rythme est souve
59. e d j Benveniste in Bourassa 1997 p 14 15 L extrait du Canto 82 d Ezra Pound en exergue ci dessus illustre avec l gance la pens e de Meschonnic ce mariage entre la forme et le sens par le biais de la signifiance La configuration du discours est ici clairement indissociable de son propos la fois langage et musique les lettres f f d g inscrivent les notes du chant sur les trois lignes de la port e qui servent aussi de fils pour accueillir les quatre oiseaux chanteurs La mise en page du po me en oriente la lecture Le rythme organise le sens sans tre distinct de celui ci la disposition 5 Parce que le langage inclut la communication les signes mais aussi les actions les cr ations les relations entre les corps le montr cach de l inconscient tout ce qui n arrive pas au signe et qui fait que nous allons d bauche en bauche CR p 72 6 En anglais la gamme musicale suit l alphabet Ainsi les lettres f f d g gt correspondent aux notes fa fa r sol 44 du texte am ne des informations autrement absentes En outre Pound arrive doter les deux derniers mots de l extrait de trois sens parall les Litt ralement une triple chelle le perchoir des oiseaux treble scale d signe aussi la clef de sol et la gamme des aigus soprano qui pr cisent le registre de la partition Symington 2005 Voil un d fi pour le traducteur Une s paration entre la forme et le contenu m co
60. e du drame lyrique 20 AJucun art isol ne peut se r v ler dans le drame au public commun et pour une compl te intelligence que par une communication collective avec les autres arts car l intention de chaque genre d art isol n est r alis e qu avec le concours intelligible de tous les arts Wagner L uvre d art de l avenir 1850 in Bablet 1995 p 25 Le promoteur de l uvre d art totale ou commune selon les traducteurs parle aussi de la ronde altern e o les les arts fr res la musique la danse et la po sie se relaient et se compl tent Le mod le est donc la fois paritaire et hi rarchis les arts sont gaux entre eux mais les choix du relais dans la ronde ob issent aux exigences du drame lyrique seul La totalisation proc de plut t par adjonction que par amalgame indistinct Adorno sugg re les termes de symbiose ou d agglom rat 1967 p 49 Fondamentale pour la conception du th tre moderne la pens e de Wagner a t maintes fois reprise et souvent mal interpr t e L id e de la fusion des arts par exemple ce magma qui efface toute diff rence contredit les changes de la ronde altern e La notion de synth se quant elle remonte aux commentaires d Appia Le metteur en sc ne suisse l investit d une hi rarchie qui commande des transformations dans les arts constitutifs Picon Vallin 2001 p 104 La synth se suppose une interp n tr
61. e la d finition que Cage r serve au rythme However rhythm is duration of any length coexisting in any states of succession and synchronicity 1961 p 15 41 modalit s variables selon le domaine d application Il s agit d un syst me de concepts ouvert qui d termine non pas l essence mais les conditions n cessaires la manifestation du ph nom ne rythmique Tout ph nom ne per u subi ou agi auquel un sujet peut attribuer au moins deux de crit res suivants structure p riodicit mouvement RR p 195 211 212 Une combinatoire exhaustive SP MS PM SPM arrive r unir la plupart des acceptions usuelles Cela dit l int r t d une telle d marche reste en grande partie th orique la d composition en crit res se pr te mal un usage direct par exemple pour d crire un rythme si ce n est dans son d ploiement complet Le trio SPM a sans doute ses faiblesses mais il claire bien les enjeux majeurs du rythme Le S de structure skh ma syst me forme arrangement r unit la dur e l intensit le timbre et la hauteur Sauvanet d montre que le rythme s inscrit clairement dans un mod le organique qui privil gie une structure d ensemble irr ductibles ses parties Le P de p riodicit cycle retour cadence r p tition se caract rise par la p riode la fr quence et le nombre Il s agit du versant arithm tique de la notion Enfin le M de mouvement volution m tamorphose
62. e par ce qui est mouvant mobile fluide d montre Benveniste 1966 p 333 Le mouvement sans d placement indique un tat d quilibre sans pour autant impliquer la fixit En effet l uvre d art est soumise des forces oppos es dont les actions simultan es s annulent contractions Vibrations tremblements Reste pourtant une nergie de l opposition potentielle plut t que cin tique pr te se transformer le moment venu Car la tension se r sout au passage au changement de configuration La transition d place la tension ailleurs ou bien la rel che au risque de la perdre compl tement Il y a donc une force dans le n ud ou plut t des lignes de force qui g n rent les formes au m me titre que les lignes tectoniques de construction Escoubas 1997 p 114 La probl matique interartistique s appuie principalement sur une dynamique de tension d attraction et de r pulsion Ce 80 sont toujours des forces aux vecteurs variables qui interagissent au sein de l uvre Dans Logique de la sensation Deleuze va plus loin L a question de la s paration des arts de leur autonomie respective de leur hi rarchie ventuelle perd toute importance Car il y a une communaut des arts un probl me commun En art et en peinture comme en musique il ne s agit pas de reproduire ou d inventer des formes mais de capter des forces Deleuze 1981 p 39 Entre les p les de la s paration et de la fusion toute uvre
63. ent Le rythme supposant le commun d une rencontre est la ligne temporelle comportant arr ts acc l rations r p titions monnayages et variations des nergies chang es Marchand 1996 p 222 Or la rencontre des arts a n cessairement lieu travers celle des sujets autant artistes que spectateurs Chaque uvre a des mat riaux qui h t rog nes font face au sujet et des proc d s qui d rivent autant des mat riaux que de la subjectivit admet Adorno 2002 p 55 Le rythme est donc la modulation d un jeu d ouvertures et de fermetures au rendez vous des sujets En nouant des tensions il rend possible le transfert de sensations et de sens m me si le sens investi par l artiste ou dans les codes d un art et le sens per u par le spectateur ou dans les codes d un autre divergent in vitablement Tel est l attribut diff rentiel du n ud rythmique L id e du transcodage propre tout transfert se retrouve dans la notion d interpr te En effet l interpr te d code adapte traduit incarne Pourtant dans les nouvelles formes inclassables mergeant surtout du c t de la danse les interpr tes c dent la place aux performers Adolphe 2003 Il ne s agit pas seulement d un effet de mode ni d un caprice s mantique Alors que la notion d interpr te s appuie sur une multitude des possibles en repr sentation celle de performer est davantage centr e sur l authenticit de l exp rience L opposition
64. entre la repr sentation et l exp rience n est pas sans rappeler le clivage entre le rapport de d signation des choses et celui d expression de leur sens voqu par Deleuze Dans le th tre de la r p tition l artiste serait donc davantage performer dans l imm diatet de l exp rience sc nique tandis que le th tre de la repr sentation l emploie plut t comme interpr te L exp rience et la repr sentation se compl tent dans l id al de l artiste polyvalent performer et interpr te la fois capable de r viser sa pratique selon 5 Le mot de performer s est d sormais infiltr dans le jargon usuel du spectacle vivant rempla ant dans les g n riques comme dans les m dias les obsol tes danseurs acteurs et plus encore interpr tes un mot quasiment banni Adolphe 2003 84 les exigences de l uvre Ici surgit l image de Humpty Dumpty Pour affirmer son h g monie sur le langage le ma tre des mots puise des deux c t s du mur tant t dans l expression tant t dans la d signation Il est la fois lui m me un uf symbole de la gen se et son personnage celui de la comptine Humpty Dumpty exerce l art du langage dont il n h site pas red finir les termes En ce sens il r alise l id al de l artiste indisciplinaire lui aussi en quilibre pr caire sur une fronti re lui aussi vou basculer t t ou tard Le rapprochement s arr te la chute seul Humpty Dumpty a la promesse
65. erois et Peter Szendy p 109 123 Coll Les cahiers de l Ircam Paris L Harmattan 100 Garcia Martinez Manuel 2001 Le temps et le rythme au th tre Dossier M thodes en question dir par Patrice Pavis L annuaire th tral no 29 printemps p 69 81 http id erudit org iderudit 041456ar Maldiney Henri 1967 L esth tique des rythmes In Les rythmes Conf rences pr sent es au colloque sur les rythmes Lyon en d cembre 1967 dir par Pierre Mounier Kuhn et Jean Claude Lafon p 225 245 Lyon Simep Marchand Jean Pierre 1996 Pas vers une th orie de la commotion In Rythmes et philosophie dir par Pierre Sauvanet et Jean Jacques Wunenburger p 215 235 Paris Kim Meschonnic Henri 1982 Critique du rythme Anthropologie historique du langage Lagrasse Verdier CR dans le texte 1990 L criture le rythme et le langage ordinaire Prot e vol 18 no 1 hiver Dossier Rhythmes dir par Lucie Bourassa p 7 9 1995 Politique du rythme politique du sujet Lagrasse Verdier et G rard Dessons 1998 Trait du rythme Des vers et des proses Paris Dunod Mourey Jean Pierre 2000 Rythme sch me et r gle In Art regard coute La perception l uvre dir par Christian Doumet Mich le Lagny Marie Clair Ropars et Pierre Sorlin p 81 92 Coll Esth tiques hors cadre Saint De
66. erser les mondes en projetant Alice dans le r ve du Roi Rouge Peut on transposer l exp rience de l chiquier sur une sc ne hybride Croisant les moyens d expression la musique le mouvement la parole le chant la sculpture etc comment red finir leurs fonctions pour d passer le sens attendu 1 1 1 Glissements travers l chiquier Le pays du miroir est habit et anim par des personnages des plus improbables Ils n appartiennent ni la m me famille ni la m me comptine Alice d couvre ainsi plusieurs univers diff rents au cours de son voyage o les changements de d cors sont fr quents et parfois surprenants Comment Carroll arrive t il encha ner les pisodes qui ont a priori tr s peu en commun Car les ponts entre les cases ne sont que des faux semblants Si les transitions ob issent souvent des lois imaginaires elles n en sont pas moins efficaces pour rapprocher la petite fille de la couronne Alice flotte et glisse travers des m tamorphoses la barbe du Bouc fond melt s away entre ses mains pour nous transporter dans un jardin la Reine Blanche se transforme en Brebis Much be etter Be etter Be e eetter Be 14 e ehh tricotant d sormais dans une boutique puis ses aiguilles deviennent des rames tout d un coup dans une barque Enfin l uf que la petite fille ach te la Brebis grandit pour r v ler nul autre que Humpty Dumpty le grand quilibriste sur s
67. exion sur l exp rience de l criture Il s agit d un temps fondateur de l instance scripturale Entre un perp tuel devenir et un temps qui tente de remonter son propre cours Lamnaoui 2006 p 64 le toujours d j gt blanchotien repose sur la r p tition et la r criture comme source de renouvellement Ce qui importe ce n est pas de dire c est de redire et dans cette redite de dire chaque fois encore une premi re fois Blanchot 1969 p 459 Il y a donc une lueur d espoir dans la fatalit de la reprise espoir d inscription espoir de laisser une trace La r p tition du toujours d j n est pas seulement reproductive mais aussi productive pr te transformer Blanchot s loigne de la perspective chronologique du temps lin aire et vectoriel en la substituant par un mod le cyclique le pr sent rattrap par le pass qui s apparente la doctrine nietzsch enne de l ternel Retour Au commencement tait le recommencement crit il Le recommencement comme commencement la d sappropriation comme authenticit la r p tition comme diff rence Blanchot 1973 p 62 S ensuit un certain rejet du futur futur r duit un palimpseste du pass D ailleurs Blanchot est tr s proche du palimpseste dans sa conception de l criture crire en ce sens c est toujours d abord r crire et r crire ne renvoie aucune criture pr alable gt p 48 Carroll tombe t il dans
68. gorien in Court 1992 p 187 travers la chironomie le trac d une main qui monte et descend s est ensuite implant dans la battue musicale Par ailleurs dans le chant gr gorien terrain glissant des d bats musicologiques la succession de lev s et de pos s prend appui sur des ictus alors que les inflexions du texte reposent sur des accents La distinction est pratique et tymologique ictus vient de icere frapper et d signe le battement musical un pouls un coup un choc l accentus est d riv de cano chanter Quoique l accent marque un point tournant un temps fort il ne peut en r alit se trouver l origine du mouvement Il y a une inspiration un lan qui pr c de l appui Le premier geste du chef d orchestre avant d entamer une uvre est toujours muet En musique c est l id e de l anacrouse qui lance le rythme sur le temps faible de la mesure pr c dente avant le d but Le musicien doit toutefois tre d j dans le rythme pour l avoir L anacrouse expose ainsi une ambigu t d origine Elle d joue de la sorte deux difficult s en situant le rythme la fois dans et hors la mesure mais aussi dans et hors l origine il y a 7 Les travaux de Meschonnic s appuient sur le mod le des te amim les accents disjonctifs conjonctifs dans la cantillation h bra que dont la signification est la fois musicale grammaticale et s mantique 48 toujours une anacrouse avant la crouse
69. hercher ce qui demeure au sein de la vari t de manifestations artistiques contemporaines L art tiendrait tr s peu de choses 18 Mixte hybride et h t rog ne sont parmi les termes les plus sollicit s pour classer l inclassable Quel que soit le mot juste si tant est qu il y en ait un pour d signer ces formes artistiques fuyantes une notion capable d voluer avec son r f rent semble propos Ainsi l h t rog n it est consid rer dans une perspective relationnelle o les param tres en jeu sont dynamiques m me si leur mouvement s tend sur des d cennies 1 2 1 Entre s paration et fusion Faisons certaines mises au point sur la d signation de spectacles impurs th tre de l h t rog n it Ce qu on cherche signaler n est pas tant l union des arts sur la sc ne mais au contraire peut tre les tensions les frictions et la contamination issues de la rencontre TDT 21 00 Bien que Jean Luc Nancy n autorise aux arts ni hi rarchie ni autre taxinomie 2000 p 157 leurs interactions sont souvent soumises aux m mes modalit s La simultan it et le glissement voqu s pour TDT sont des exemples voisins Les liens se font donc dans le temps par relais comme dans l espace par juxtaposition tant t en accord tant t dans la discorde Selon le degr d imbrication mutuelle les rapports entre les pratiques artistiques vont du rapprochement l loignement jusqu
70. i toute tentative d universaliser le rythme finirait par d naturer le concept Selon Meschonnic une d finition commune la po sie et la musique serait ruineuse pour le langage Le transfert de l une l autre tant vou l chec le discours et la musique ne 19 In gales dans leurs effets la donation de rythme par la musique au discours la donation de sens par le discours la musique toutes deux sont impossibles CR p 135 59 peuvent que s accompagner CR p 135 La mise en garde est d autant plus valable qu elle rel ve de l exp rience car le linguiste r agit quantit de tentatives infructueuses d harmoniser les rythmes en jeu 2 2 3 Correspondances et composition Si l envie de d finir le rythme en art s av re peut tre trop ambitieuse tentons quand m me d examiner son potentiel d int gration et de m diation entre les arts certes mais aussi entre l uvre et son spectateur Selon Deleuze et Guattari il y a rythme d s qu il y a passage transcod d un milieu un autre communication de milieux coordination d espaces temps h t rog nes 1980 p 385 Or n est ce pas la m canique d une uvre indisciplinaire un syst me complexe de transcodage perp tuel Le rythme s y manifeste comme un moyen de transitivit c est dire comme la capacit de l uvre de passer au del d atteindre le spectateur de changer de genre Le grand d fi de l artiste consiste donc
71. i Strauss passant par un processus de cr ation analogue l criture 14 Henri Maldiney inscrit cette expression dans le sillon de la philosophie d H raclite 1967 p 232 233 55 Dans Stifters Dinge la crise de la repr sentation est enlev e dans une criture audio visuelle qui demande au spectateur de tisser son propre rapport limaginaire et au symbolique selon le mode d une th tralisation c est lui qui fonde en cr ant stiftet la relation des choses comme le font l criture ou la po sie Finter 2011 s p Le spectacle de Goebbels t moigne en outre d une r flexion sur le rapport entre le fond et la forme relatif la source litt raire de son inspirationt Comme dans Fraritjaritjaka le cr ateur allemand cherche rendre signifiante l interaction entre les moyens d expression et les th mes convoqu s Par exemple le th me de la nature au c ur des crits de Stifter trouve des r sonances autant dans le choix de mat riaux l eau le bois et le dispositif sc nique les arbres une surface d eau la for t de pianos que dans les l ments de la trame sonore les chants aborig nes des bruits de la mer et les peintures projet es un paysage et une sc ne de chasse Si l uvre d art peut aspirer l ternit son spectateur ne saurait en faire autant Les limites du regard imposent un rapport quivoque au temps Lin aire ou circulaire parfois arr t ou lastique le temp
72. iat le parcours du motif est plus subtil mais aussi virtuose Les mises au point que les interpr tes de TDT livrent au public en reprenant le conf rencier 59 20 fig E 6 empruntent aux exp riences mentionn es Scand s par un ch ur de six voix et accompagn s d une gestuelle partag e les propos de Nancy et de Lesage deviennent un pr texte aux variations sur le discours Le m me expos se fait il plus convaincant ou au contraire peine cr dible prononc depuis le plan inclin form par les cubes sur lesquels les interpr tes prennent appui dans un exercice d quilibre La multiplication de sources d nature autant les mots que les gestes Le nouveau contexte d sormais chor graphique am ne le spectateur changer de perspective Le discours savant d bit en groupe est d s lors trait comme une partition interpr ter 1 3 La partition Les diverses interactions entre les arts rel vent aussi de la partition notion propos e en surplomb de notre classification Elle englobe les cat gories sans pour autant les dominer Il s agit la suite d une r flexion d Eliane Escoubas 1997 d un principe de division de l uvre qui prend part la probl matique interartistique la fois en tant que mode de composition et d interaction et dispositif de notation Les deux sens du terme s appliquent juste titre 1 partition comme division s paration et 2 partition au sens musical d une 11 La q
73. il appartient un toujours d j cyclique toujours d j sur son mur et toujours d j tomb immortel dans la r p tition de la comptine 3 2 Le temps de la sc ne Donc le temps du rythme est un temps de pr sence et non pas un temps d univers Henri Maldiney L Esth tique des rythmes Selon Augustin le temps est affaire de conscience C est un concept ph m re dont les tats se r duisent au triple pr sent le pr sent de l attente futur le pr sent de l attention pr sent et le pr sent du souvenir pass Confessions XI 20 Il n y a que l instant Cette id e d un pr sent f d rateur ouvre les portes d autres conceptions non lin aires du temps Comme une partition musicale le temps peut avoir des motifs telle une ritournelle dont le cas du toujours d j est un exemple limite Il importe d en signaler l artifice Inspir par le grand physicien Niels Bohr Claude R gy crit La notion du temps propre nos actions le temps de nos horloges est tout autre Il est en fait parfaitement artificiel Notre sensation de la dur e est variable et subjective Je trouve le temps long Le temps passe vite ph m res nous passons mais le temps lui ne passe pas Il est imperturbable On ne tue pas le temps 1 Le Chapelier du pays des merveilles ne saurait mieux dire Et si le temps est une question de perception le sujet devient un l ment primordial de l quatio
74. ilence qui pr c de le d but toute ma phrase est d j contenue et tout le sens de celle ci vous le comprenez dans le silence qui succ de son terme Le mouvement entre les silences cette balle en vol marque ainsi le pr sent ph m re o regrets et promesses se confondent 1996 s p L application premi re du couple arsis thesis au mouvement du corps trouve une r sonance int ressante au th tre dans la biom canique de Meyerhold l ve de Stanislavski Meyerhold choisit pourtant de baser sa technique de jeu sur la ma trise du corps plut t que la psychologie du personnage L acteur doit avant tout s approprier ses outils physiques le corps mais aussi la voix les expressions faciales des masques etc Aspirant explorer la m canique de la machine humaine la biom canique s int resse naturellement au mouvement Ses principes se r sument la s quence otkaz posyl sto ka applicable toute action physique L lan et y est pr c d de l otkaz litt ralement refus un pr mouvement dans la direction oppos e au mouvement Tel un ressort qu on comprime pour mieux le faire bondir l otkaz charge le corps d une nergie cin tique qui augmente la port e du posyl l envoi imminent Ce dernier est le vecteur dynamique du mouvement Le posyl implique une ferme intention l autre sens du mot et l acteur doit conna tre clairement l objectif de son action avant de l entamer
75. ine artistique une dynamique du m lange APPENDICE C PARTITIONS DANS TOUJOURS D J TOMB Intermission 6 for 1 or 2 Pianos Morton Feldman 1953 Composition begins with any sound and proceeds to any other With a minimum of attack hald Copyright 1963 by CF Peters Corporation sound until barely audible Grace notes 373 Park Avenue South New York NY 10015 are not played too quickly ALI sounds are 10 be Intemational Copyright Secured AL Rights Reserved Fig C 1 Zntermission 6 de Morton Feldman 1955 Voir www kapostroff com tdt mm pour d autres exemples de partitions musicales graphiques et sc niques John Cage Karlheinz Stockhausen Brian Ferneyhough Henri Matisse Robert Delaunay Franti ek Kupka Thierry De Mey Jos Montalvo Caterina Sagna Fig C 3 Esquisse de travail Franck Vignal 2009 88 Fig C 5 Esquisse de dispositif sc nique Franck Vignal 2009 89 APPENDICE D SPECTACLES DU CORPUS _Foi 1h30 __ cr en mars 2003 Conception et chor graphie Sidi Larbi Cherkaoui Costumes Isabelle Lhoas Christine Leboutte Joanna Dudley Alexandra Gilbert Erna marsd ttir Ulrika Kinn Svensson Laura Neyskens Darryl E Woods Damien Jalet Nicolas Vladyslav Nam Jin Kim Marc Wagemans Avec les Ballets C de la B Gunther Vandeven Jan Caals Lieven Termont Dirk Snellings
76. ique de la partition est donc un espace de n gociation entre la forme et le propos de l uvre Le ph nom ne de la notation est bien videmment un creuset pour les interactions potentielles entre son graphisme et espace constate Bosseur 2006 p 190 En 1944 John Cage signe Chess Pieces une pi ce embl matique en forme de partition chiquier Elle devient une des premi res uvres au statut ambigu en raison des difficult s de son interpr tation si son int r t graphique est ind niable le potentiel d ex cution demeure incertain C est aussi le cas de plusieurs compositions post rieures savamment cod es entre l absurde litt raire et la logique formelle Leur accessibilit se borne par cons quent la complexit du d codage Chacune impose ses r gles et ses contraintes Une consid ration nouvelle pour l espace de la page est galement l origine d exp rimentations formelles en po sie Avec Un coup de d s de Mallarm ou les calligrammes d Apollinaire dont l cho retentit travers les uvres de Breton de Ma akovski de Pound les po tes deviennent de plus en plus attentifs la pr sentation graphique de leur uvre Entre temps un int r t croissant pour la composition dans les arts visuels am ne des peintres tels Kandinsky Matisse Klee Kupka Delaunay cr er eux aussi de v ritables partitions plastiques Comme chez les compositeurs leur pratique va souvent de pair avec une riche r fle
77. ire un langage qui parle avant les mots des gestes qui s laborent avant les corps organis s des masques avant les visages des spectres et des fant mes avant les personnages Deleuze 1969 p 19 Dans ce th tre l exp rience pr c de la repr sentation C est une forme imm diate qui parle avant les mots et profond ment rythmique dans la mesure o le pr sent de la sc ne se construit en direct sans m diation du langage Chez Deleuze la r p tition est diff rentielle in vitablement transformatrice m me lors d une reproduction l identique Comme chez Blanchot c est une source de renouvellement qui assure une volution perp tuelle l uvre Car l uvre d art est une forme ouverte n on pas inachev e mais dont justement l ach vement r side dans son inach vement dans l ouverture souligne Escoubas 1997 p 117 2 Le th tre chercherait avant tout mouvoir l me Tel est le plus haut probl me th tral le probl me d un mouvement qui atteindrait directement l me et qui serait celui de l me crit Deleuze en reprenant Kierkegaard 1968 p 17 3 Deleuze oppose le th tre de la r p tition qu il trouve dans la pens e de Nietzsche et de Kierkegaard au th tre de la repr sentation propre l esth tique h g lienne Le rapport de repr sentation ram ne le mouvement au concept l abstraction plut t qu l exp rience sensible de la r
78. iroir Il se fait l ombre de l un ou l autre des compagnons reproduit leurs gestes et double leurs r pliques en les pronon ant au m me moment L effrangement est dans la contamination Les codes du th tre et de la danse sont ici d jou s parce que re jou s d tourn s par le retournement Despr s 2006 3 L ostinato r p tition obstin e est un proc d musical commun notamment la base de la musique minimaliste d Erik Satie Philip Glass 10 Le proc d de r duction vers le bas revient aussi dans les notes du programme 1 Dans Basso Ostinato la forme glisse plus ou moins rapidement dans ses nombreux trous noirs dans ses multiples orifices devient 2 Dans Basso Ostinato la norme pisse plus ou moins tacitement danse ses ombreux trous noirs pense les ultimes orifices et se conclut avec un loquent 3 orifice Sagna 2008 26 Comme Cherkaou i la chor graphe travaille sur la reconstitution du geste ordinaire La premi re s quence de Basso ostinato vient ainsi d une improvisation sans consignes capt e sur vid o et minutieusement apprise pour tre ensuite r p t e et d clin e tout au long du spectacle Alors que dans Zero Degrees o dans Loin le proc d de reconstruction se d ploie sur le mode de la simultan it deux ou plusieurs personnages reproduisent le fragment narratif en m me temps Sagna l emploie davantage en relais dans la dur e Moins imm d
79. ition des t ches entre les Muses n aurait pas fait l unanimit aujourd hui En 12 effet les cat gories de la Gr ce antique ne sont plus les n tres Pour reprendre l analogie de Franck Bauchard les territoires artistiques s apparentent aux territoires g opolitiques dont les fronti res sont constamment remises en question 2003 p 137 Comment rendre compte de pratiques artistiques dont les param tres ne cessent d voluer L approximation reste in vitable mais f conde Les d nominations sont prendre comme des approximations riches de sens non comme des cat gories rigides elles ouvrent la discussion Boucris 2004 p 149 En outre nommer une chose ne suffit pas la d finir encore moins l analyser sinon Alice n aurait pas eu de mal d chiffrer Jabberwocky ce grand myst re du pays du miroir dont seul Humpty Dumpty est capable de saisir les nuances 1 1 Au pays du miroir And certainly the glass was beginning to melt away just like a bright silvery mist Lewis Carroll Through the Looking Glass Les jeux de mots et les paradoxes de langage abondants chez Carroll pr sentent un d fi de taille pour quiconque y cherche un ou des sens M me un lecteur averti s y perd parfois Et ce n est pas un hasard si Gilles Deleuze trouve le terrain suffisamment fertile et complexe pour camper sa Logique du sens de l autre c t du miroir Le non sens remplace mais n abolit pas le sens Tel un
80. l organisation des marques par lesquelles les signifiants linguistiques et extralinguistiques dans le cas de la communication orale surtout produisent une s mantique sp cifique distincte du sens lexical et que j appelle la signifiance c est dire les valeurs propres un discours et un seul Ces marques peuvent se situer tous les niveaux du langage accentuelles prosodiques lexicales syntaxiques CR p 216 217 La notion de signifiance h ritage de Benveniste au c ur de la r flexion de Meschonnic permet de personnaliser le discours C est gr ce elle que l acteur de Stanislavski pouvait esp rer tirer autant de sens diff rents de la m me paire de mots Car le privil ge du sens revient au sujet metteur du discours Organisant ensemble la signifiance et la signification du discours le rythme est l organisation m me du sens dans le discours Et le sens tant l activit du sujet de l nonciation le rythme est l organisation du sujet comme discours dans et par son discours p 217 Le sujet du discours est alors incontournable dans l tude du rythme Comme il n y a de sens que par et pour des sujets il n y a de rythme que par et pour des sujets affirme Meschonnic CR p 72 Puisque le discours n existe pas sans locuteur le rythme dans le langage est n cessairement subjectif contextuel chaque rythme son sens Et l ensemble des sens contenus dans une configuration particuli re du disco
81. l acc l ration l arr t l inversion Un temps tir comprim suspendu un temps cyclique en spirale rebours anticip ou impromptu construit ou improvis Car vous savez qu au th tre nous manipulons le temps comme un accord on notre plaisir les heures durent et les jours sont escamot s crit Claudel f travers des configurations particuli res ces motifs g n rent des rythmes Comme en peinture le rapport entre le motif et le fond r git en grande partie le rythme de l uvre Matisse d clare Je donne un fragment et j entra ne le spectateur par le rythme je l entra ne poursuivre le mouvement de la fraction qu il voit de fa on ce qu il ait le sentiment de la totalit in Bosseur 2006 p 64 De m me la s ance du th dans TDT tire son impact de la composition en entra nant le spectateur dans une autre temporalit La parenth se ouvre un d paysement rythmique Dans Foi par exemple la sc ne du baiser la fois liaison et rupture au milieu du spectacle a l enchantement d une digression bien plac e L homme en noir Nicolas Vladyslav et la femme en rouge Ulrika Kinn se retrouvent enfin apr s une s rie de maladresses dans un baiser originel moment de suspension Cette br che dans le pr sent permet d acc der un autre temps parall le ou anachronique Une allusion Adam et ve est clairement soutenue par un couple 16 Paul Claudel Le soulier de satin P
82. l espace m diateur du dialogue Loubier 2001 p 25 Or qu est ce qu une discipline en art Instruction enseignement ob issance le terme d signe galement une branche de la connaissance La notion de discipline artistique se r sume ainsi grossi rement un savoir faire transmissible d un ma tre un disciple La contrainte de formation renvoie un contexte institutionnel le mot sent l cole gt remarque Jean Fran ois Peyret 2008 p 95 De plus afin d tre partag ce savoir faire doit se ranger dans un ensemble de codes et de r gles Une discipline artistique peut donc difficilement muter vers d autres formes l hybride ne peut tre disciplin Pour rem dier aux faiblesses de l approche disciplinaire Marie Christine Lesage propose la notion d interartistique qui s appliquerait la fois la d marche pour qualifier le processus de cr ation et au r sultat l uvre polymorphe Son article L interartistique une dynamique de la complexit Lesage 2008a pr sente une analyse rigoureuse des enjeux et de la terminologie de la sc ne hybride Par ailleurs la notion d indiscipline retenue 1 Le pr fixe inter renvoie la fois un espace partag une intersection et un espace neutre contigu mais distinct de ses voisins Pour une analyse m thodique de tous ses sens voir ric M choulan L interm dialit le temps des illusions perdues Interm dialit s no 1 p 9 27 20
83. le mur curieux et attentif il a le privil ge de conna tre la fin de l histoire avant m me qu elle n ait commenc Le temps de la sc ne est aussi artificiel que celui de la comptine v ritable ritournelle qui se red couvre chaque soir Serait il lui aussi de l ordre du toujours d j 3 2 1 Le temps du toujours d j Deleuze situe les aventures d Alice dans un devenir dont le propre est d esquiver le pr sent comme la confiture que la Reine Blanche offre Alice Deleuze 1969 p 9 11 C est un paradoxe du temps de l autre c t du miroir Il avance et recule la fois toujours dans les deux sens en liminant la distinction entre les souvenirs du pass et du futur M me la m moire s tend dans les deux directions Le renversement du temps va de pair avec celui de la cause et de l effet le messager du roi est en prison pour le crime qu il n a pas 12 The rule is jam to morrow and jam yesterday but never jam today TLG p 44 71 encore commis alors que la Reine Blanche crie et saigne avant de se piquer le doigt p 11 Le miroir d forme le pr sent et l histoire de Humpty Dumpty refait surface dans un temps d chir toujours venir et d j pass L expression toujours d j ch re Jacques Derrida c tait sa signature secr te d j dans De rrida Ja cques et reprise par Cixous revient Maurice Blanchot qui la d veloppe surtout dans sa r fl
84. les contenus plut t que de les multiplier On peut imaginer un spectacle qui commence par de la musique que l on doit entendre vraiment pendant un temps suffisant pour qu elle occupe le plateau avant l arriv e du com dien qui fait advenir le texte avant que la lumi re ne vienne l clairer et qu on d couvre ainsi le d cor qui peut comprendre de la vid o Ainsi chaque art occupe le plateau dans la pl nitude de sa forme avant que n apparaisse la complexit de ce m lange Goebbels 2008 Dans Stifters Dinge f erie pour pianos robots et arbres les diff rents moyens d expression sc nique conservent leurs lignes de d marcation Ils voluent tant t tour de r le tant t ensemble mais sans empi ter les uns sur les autres tels des tats de la nature qui prend une place importante dans l uvre de Stifter la projection d un paysage de Jacob van Ruisdael se superpose sur un fond sonore la diffusion de l histoire de la glace 14 15 laquelle succ de un extrait de Bach aux pianos m caniques d voil s graduellement derri re l cran 1710 Il se met pleuvoir 21 30 mais la pluie r sonne aussit t travers les souvenirs d enfance de L vi Strauss que l ethnologue partage lors d un entretien radiophonique Je ne crois pas qu il y ait de grandes raisons de faire actuellement confiance l homme 23 50 conclut il tristement et pourtant c est un sublime coucher du soleil qui vient dissiper la g
85. lle ne se sait pas rythmique Et il n y a de rythmes de la nature que par l esprit qui lui pr te sa propre forme et sa propre dur e gt Brelet in RR p 31 De la m me mani re en art l uvre peut difficilement avoir une existence propre en dehors de son rapport avec le spectateur Son rythme est compos avec et par celui ci Le spectateur devient co auteur de l uvre sans pour autant abandonner son r le de t moin ext rieur Sauvanet explique ce d doublement par un d placement du sujet Le ph nom ne rythmique est en m me temps agi et subi C est le d placement du sujet je saisis le rythme en m me temps que je suis saisi par lui 2000b p 124 L opposition apparente entre la perception passive et l articulation active s efface lorsqu on l applique au rythme Il ne s agit pas d une structure ind pendante mais plut t d une impulsion destin e configurer l appareil de perception Selon Mourey celui ci proc de par des sch mes des mod les op ratoires qui facilitent l analyse et l assimilation des objets artistiques La perception esth tique n est pas seulement immersion dans un rythme Sans doute dans l uvre d art un rythme advient et je l habite il m investit Mais la perception esth tique n est pas qu un sentir un mode pathique et empathique elle est activit sensitivo intellectuelle Elle implique un construire et la saisie de l uvre travers des sch mes des mod les de construc
86. mment dans l un comme dans l autre Humpty Dumpty r alise une utopie de communication un retour au langage universel ant rieur Babel Si la m taphore biblique rapproche l uf de dieu tout puissant et ternel la communication qu il c l bre n en est pas moins ph m re Que se passe t il apr s la chute Il y a clatement et perte de sens D sormais impossible de communiquer Le voyage d Alice se poursuit toutefois sans encombre et rien ne trahit l incompr hension qui aurait frapp les habitants de Babel apr s la punition divine du moins l chelle locale car les conventions du miroir sont parfois trompeuses Aurait on exag r l importance de Humpty Dumpty Quoi qu il en soit son personnage a certes re u beaucoup d attention dans la composition et le propos de TDT Au del des inspirations il est rapidement devenu l embl me de la conf rence 67 Ce n est pas un hasard si la conf rence indisciplin e emprunte son titre l article de Cixous elle aussi sa mani re est vou e une chute Alors que les pistes de r flexion se multiplient les mots s affrontent dans une saturation de signes pour clater enfin dans un cri d impuissance qui marque une rupture dans le d roulement de la conf rence La petite fabrique du savoir d clare faillite Pourtant comme chez Beckett quelque chose suit son cours Le conf rencier ma tre du sens tente de reprendre les r nes apr s un garement bar
87. moment o le Ma tre des mots instaure ses propres conventions le potentiel de communication se trouve r duit aux d finitions et aux al as de leur usage De la m me mani re un discours savant peine parfois se rendre l auditeur pris dans ses r f rences sp cifiques qui r sistent au partage L chec du langage n implique toutefois pas la fin de tout change l absence de d finition n est pas fatale Les choses existent aussi sans nom comme Alice le constate dans le bois o les choses n ont pas de nom au pays du miroir Car la langue agit elle m me en miroir elle r fl chit plut t qu elle ne signifie Cixous 1971 p 16 Par ailleurs la chute de Humpty Dumpty entra ne d autres chutes l effondrement de la petite ouvri re du savoir elle aussi perch e sur un mur mais galement le cours de chute administr par Harmonie 25 39 Il faut d abord apprendre tomber car dans la vie a risque de vous arriver souvent TDT 25 50 Alice elle m me aurait pu profiter de pareille technique pour adoucir ses atterrissages En effet son tout premier voyage commence par 69 une longue descente dans le terrier du lapin au fond duquel se trouve la porte du pays des merveilles Cette chute initiatique am ne la petite fille dans l univers que Carroll dote d un temps imaginaire le temps d un livre Et le cas de Humpty Dumpty trouve aussi sa source dans le fait litt raire en dehors d une chronologie lin aire
88. n Dans un pr sent multiple en devenir le sujet se d finit entre autres 10 Carroll avait d ailleurs intitul la premi re version du livre Alice s Adventures under Ground Claude R gy Au del des larmes Besan on Les Solitaires Intempestifs 1997 p 38 70 par la motivation de ses actions cette n cessit int rieure que Kandinsky la suite de Schoenberg place l origine du geste cr ateur Pour Meschonnic elle rel ve du rythme et permet d inscrire le sujet dans son histoire CR p 85 Le rythme appara t aussi comme une pulsion originelle la fois primitive et essentielle Il se peut que les rythmes et que les dur es vitales ne soient pas organis es et mesur es par une forme spirituelle mais tiennent leur articulation du dedans de processus mol culaires qui les traversent sp cule Deleuze 1978 Le primat du rythme est perceptible sur une sc ne de th tre ou au cin ma o la manipulation du temps fait partie des conventions assum es par le spectateur Il me semble que c est Scriabine qui avait appel le rythme le temps enchant crit Meyerhold C est g nialement dit 2005 p 102 Tel un charmeur de serpents le rythme enchante et le temps prend des plis inattendus dans le pr sent de la sc ne C est un pr sent particulier marqu par la r p tition celle qui pr c de la premi re mais aussi celle qui la suit Le spectateur partage la posture d Alice devant
89. n Un axe relativement r cent o les liens entre le sonore ou le visuel sont absents du moins en apparence C est le cas par exemple dans le travail de Cage et Cunningham Le mod le de Bosseur s applique par extension aux arts du spectacle o tous les croisements sont possibles Or les composantes en jeu se multiplient au contact de la sc ne Les pages qui suivent tentent une synth se une classification parall le qui reconna t aux uvres hybrides quatre modes d interactions distincts entre les arts l loignement la diff rence en relais ou par juxtaposition l effrangement gt et la communaut Fig B 1 Ces cat gories se placent entre deux p les la s paration et la fusion Dans leur extr me les deux rel vent de l utopie de l id al plut t que de la r alit En effet peut on vraiment vacuer tout lien entre les arts Ou au contraire effacer leurs sp cificit s jusqu confondre musique th tre et danse Dans cette optique les modes mitoyens la diff rence et l effrangement sont plus d licats et riches de nuances Sans pr tention l exhaustivit cette classification cherche situer la dynamique relationnelle et diff rentielle dans un spectre de contextes indisciplinaires 1 2 2 De la communaut l loignement La communaut des arts renvoie au rapport de coop ration du Gesamtkunstwerk Wagn rien qui suppose l interd pendance le concours intelligible des arts sous l empris
90. n dramatique chor graphique musicale soigneusement orchestr e et d codable dans les tournants de son ex cution La parole et le geste voluent sur des port es parall les qui commencent l unisson et d veloppent progressivement une interaction complexe pour trois voix et trois corps Des syncopes des silences des contrepoints animent une suite obstin e d pisodes o le geste perd le verbe qui l accompagne des bribes de mots tombent dans des trous de m moire des silences s paississent et r sonnent les langues se fourchent comme les gestes butent Despr s 2006 Par un jeu de d composition et recomposition les variations de la partition deviennent en quelque sorte l objet du spectacle Le motif s inscrit dans la partition et la g n re la fois car le spectacle entier repose sur ses retours L change sur la calvitie par exemple revient cinq fois d abord en duo comme une confidence quotidienne accompagn e d une gestuelle naturelle ensuite en trio o les r pliques se succ dent alors que les interlocuteurs se jettent par terre tour de r le puis dans une approche chorale avec des r ponses simultan es deux ou trois voix Lorsque la d cadence prend des couleurs sombres et que les boissons virent au noir le texte c de la d rive Il s agit d une descente dans la mati re corps Despr s 2006 vers la terre dont les corps se rapprochent de plus en plus vers la mort
91. nce et de composition Principe structurant il organise le temps de l uvre en le dotant de sens Agent de perception le rythme s av re aussi ins parable du sujet qui l articule Le m moire est ponctu par des renvois au volet pratique de cette recherche un essai sc nique intitul Toujours d j tomb La dramaturgie de cette conf rence indisciplin e s est appuy e sur De l autre c t du miroir de Lewis Carroll et son cho critique Logique du sens de Gilles Deleuze la fois ma tre et victime des mots coinc dans la ritournelle de sa comptine Humpty Dumpty est embl matique de l exp rience il est toujours d j tomb La polys mie caract ristique du personnage permet de r fl chir au sens du discours notamment celui de la conf rence Le destin tout trac du c l bre uf est l occasion de revenir la question du temps cette fois dans un rapport plus troit la sc ne MOTS CL S rythme interdisciplinaire th tre spectacle Humpty Dumpty partition Il vaut mieux ne pas tre trop press si on veut savoir quelque chose du rythme Henri Meschonnic INTRODUCTION INDISCIPLINE Les uvres hybrides ont du mal trouver leur place dans la nomenclature du spectacle vivant Elles sont multi pluri trans interdisciplinaires voire simplement indisciplin es Si les pr fixes multi et pluri mettent l accent sur la dimension quantitative trans et inter soulignent surtout
92. ncontre Comprendre la n cessit artistique du m lange permet de situer la probl matique du rythme dans son contexte Le second chapitre se pr te par cons quent une tude du ph nom ne rythmique avec un survol des d finitions et des composantes fondamentales qui permet de d velopper l id e du rythme comme modalit de correspondance et de composition Dans sa fonction structurante le rythme organise le temps de l uvre pour le spectateur Il s av re donc porteur de sens et ce titre ins parable du sujet qui l articule C est travers la figure de Humpty Dumpty du pays du miroir que les questions de sens et de temps de la sc ne se font cho Voir Heiner Goebbels Le texte comme paysage in De la diff rence des arts dir par Jean Lauxerois et Peter Szendy Paris L Harmattan p 187 197 10 dans le dernier chapitre la fois ma tre et victime des mots pris dans sa comptine Humpty Dumpty est embl matique de TDT c est lui qui a le malheur d tre toujours d j tomb CHAPITRE I ENTRE LES CASES ENTRE LES ARTS Une tout autre logique est ici requise capable de penser un rassemblement disjonctif des langages mobilis s une polyphonie h t rog ne une esth tique de catastrophe au sens math matique une r union non synth tique fonctionnant par articulation de codes et de vitesses diff rents ruptures d placements d intensit d construction des ensembles d flagrations
93. nd la morale de la Duchesse au pied de la lettre et met Saussure au d fi En effet la polys mie dont il est la fois le ma tre et l incarnation implique l instabilit des signes chaque mot peut d signer ou exprimer plusieurs choses notamment celles qui n existent pas Pour Deleuze il s agit de l absence du sens commun Humpty Dumpty est la simplicit royale le Ma tre des mots le Donateur du sens qui d truit l exercice du sens commun distribuant les diff rences de telle mani re qu aucune qualit fixe aucun temps mesur ne se rapportent un objet identifiable ou reconnaissable lui dont la taille et le cou la cravate et la ceinture se confondent manquant autant de sens commun que d organes diff renci s uniquement fait de singularit s mouvantes et d concertantes Deleuze 1969 p 98 5 Pour une tude comparative des traductions fran aises de Jabberwocky voir Bernard Cerquiglini Le Jabberwocky de Lewis Carroll onze mots valises dans huit traductions Pantin Le Castor Astral 1997 6 Antonin Artaud dont l adaptation audacieuse du chapitre sur Humpty Dumpty fait l objet d une psychanalyse dans la treizi me s rie de Logique du sens Du schizophr ne et de la petite fille gt a t envahi d incertitudes propos de la port e du sens qu il donnait aux mots en tant qu crivain JJusqu quel point l crivain a t il le droit de se croire le Ma tre du langage Artaud in T
94. ner le rythme comme un outil de composition ou un crit re de perception tentons sinon une d finition du moins un survol des possibilit s La t che est fastidieuse d j en musique les sources se contredisent sans g ne mais incontournable dans le cadre de ce m moire Notre d marche prendra appui sur le travail de recensement et d analyse monumental d Henri Meschonnic po te linguiste et traducteur Sa Critique du rythme Anthropologie historique du langage 1982 CR dans le texte est sans conteste un pivot pour l tude du rythme L aspiration de Meschonnic fonder une th orie l am ne consulter des centaines de sources en fran ais anglais allemand russe et examiner des dizaines de d finitions po tiques linguistiques musicales philosophiques CR p 149 176 Il passe notamment en revue les Cahiers de Paul Val ry qui apr s avoir consacr au rythme plus de trente ans finit par s avouer vaincu J ai lu ou j ai forg vingt d finitions du Rythme dont je n adopte aucune in CR p 173 D une grande humilit son aveu inqui te tout comme la majuscule et l italique appliqu s au Rythme le mot trouble 39 2 1 1 Premi res d finitions Le Grand Robert 2001 d finit le rythme comme distribution d une dur e en une suite d intervalles r guliers rendue sensible par le retour d un rep re S y rajoutent des pr cisions disciplinaires A Retour p riodique des temps forts et des tem
95. nis Presses Universitaires de Vincennes Pavis Patrice 2002 Rythme Dictionnaire du th tre Paris Armand Colin p 209 212 Sauvanet Pierre 2000a Le rythme et la raison t 1 Rythmologiques Paris Kim RR dans le texte 2000b Le rythme et la raison t 2 Rythmanalyses Paris Kim Schirren Fernand 1996 Le rythme primordial et souverain Coll Pens e du mouvement Bruxelles Contredanse 101 Les spectacles du corpus Adolphe Jean Marc 2003a Sur le fil d une d rision consentie Mouvement net 7 mai www mouvement net site php rub 30 amp id 2e74b19a4497cae3 amp fiche_alias mouvement Bomy Charlotte 2011 L bas les dieux restent petits tandis que les hommes se d veloppent Heiner Goebbels et les nouveaux territoires du th tre musical Dossier Utopies de la sc ne sc nes de l utopie Repr senter l utopie sur les sc nes contemporaines Ag n en ligne no 3 mis jour le 4 mars 2011 http agon ens lyon fr index php id 1384 Cherkaoui Sidi Larbi 2003 Foi Captation du spectacle ARTE ZDF Theaterkanal 2004 1h30 Vu en juin 2010 la Grande halle de la Villette Paris 2006 P lerinage sur soi Entretien avec Justin Morin Arles Actes Sud Despr s Aurore 2006 Consistances chor graphiques Mouvement net 14 d cembre www mouvement net html fiche php doc_to_load 11510 Finter Helga 2011 sous pres
96. nna t n cessairement le ph nom ne rythmique qui se manifeste toujours dans le va et vient entre les deux Or autant en musique qu en po sie le rythme a longtemps t confondu avec une m trique d tach e du sens de l uvre La critique de Meschonnic se dresse notamment contre l emprise traditionnelle de la mesure sur la po sie Il accuse la musique d envahir le discours avec une terminologie intransitive La musique est toutefois elle m me victime d un abus du nombre L aussi le rythme ne se limite pas la mesure On sait bien que le rythme n est pas mesure ou cadence m me irr guli re rien de moins rythm qu une marche militaire Le tam tam n est pas 1 2 la valse n est pas 1 2 3 la musique n est pas binaire ou ternaire mais plut t 47 temps premiers comme chez les Turcs Deleuze et Guattari 1980 p 385 Deleuze et Guattari font allusion l aksak du turc boiteux qui d signe une famille de rythmes irr guliers et asym triques r pandus dans les Balkans en Gr ce en Turquie et en Bulgarie Irr ductible des pulsations isochrones aux intervalles gaux l aksak est impossible penser en termes de mesure Celle ci est donc une notion artificielle sans existence propre Arom 1992 p 204 Son concept n a de sens que par rapport la graphie musicale p 195 la barre de la mesure est un secours optique rien de plus Maurice Emmanuel in Court 1992 p 190 La mesure est dogm
97. nne Tomiche et Philippe Zard p 123 145 Coll Cahiers scientifiques Arras Presses Universitaires d Artois Virno Paolo 1999 Le Souvenir du pr sent essai sur le temps historique Trad de l italien par Michel Valensi Paris Eclat
98. no reprend les recherches de Bergson pour analyser ce ph nom ne dans une optique plus large du temps historique Pour une victime du d j vu crit il le devenir est prescrit par un pr sent qui se montre sous les traits d un pass irr vocable De plus le rythme historique des v nements est suspendu ou fig la distinction entre avant et apr s entre cause et effet lui semble futile et m me d risoire Virno 1999 p 14 Le temps du d j vu est donc suspendu dans une r p tition qui n en est pas une Est ce une conjoncture famili re Bien s r du moins pour un lecteur de Carroll qui n aurait pas de peine se souvenir de la fameuse Mad Tea Party le th des fous au pays des merveilles Rappelons le contexte assis une grande table le Chapelier fou le Li vre de mars et le Loir sont condamn s un five o clock perp tuel Depuis que le temps s est brouill avec eux c est toujours l heure du th En bons Anglais ils assument le rituel jusqu au bout et se d calent d une place pour avoir des tasses propres man uvre d ailleurs douteuse puisque seul le premier en ligne gagne le privil ge d un nouveau service Officiellement arr t le temps de la Mad Tea Party n en est pas moins vivant dans la r p tition travers le cycle des tasses remplir Comme dans la spirale de la ritournelle chaque reprise s inscrit ici dans un dispositif sans cesse modifi Le tour de table assure du nouve
99. nsemble le rythme spatialise autant qu il situe dans le temps ceci pr s que l uvre d art est une forme intransposable puisqu elle apporte et emporte avec elle son espace et son temps Escoubas 1997 p 118 Dans l immanence de la dur e le rythme provoque une mutation continue des formes assum es par l espace temps Belic 2002 p 145 En effet le rythme inscrit le temps dans l espace et l espace dans le temps crit Patrice Pavis 2002 p 312 Faisant cho la th se de Meschonnic il proclame la s quence signifiante gt comme le nouveau paradigme de la repr sentation th trale p 309 La formule englobe mais d borde le texte dramatique traditionnel Pavis voque l influence de Brecht dont les th ories pr parent le terrain l id e d un sens en dehors du discours avec le gestus et le souci de la disposition des acteurs en tableaux ou en sous tableaux gt p 311 Les d placements des com diens la musique les changements de d cor et d clairage sont autant de milieux faire vivre dans un spectacle et autant de mouvements ordonner dans la dur e L enjeu de la mise en sc ne est donc essentiellement rythmique car le rythme constitue et destitue les unit s op re rapprochements et distorsions entre les syst mes sc niques dynamise les rapports entre les unit s variables de la repr sentation lod Cp 312 Ces syst mes sc niques voluent en parall le selon
100. nt Les recueils d essais multidisciplinaires de la derni re d cennie t moignent de l enthousiasme renouvel pour le sujet notamment au sein des communaut s scientifiques germanophone dont la barri re linguistique nous loigne malheureusement et francophone En 2010 une plateforme virtuelle dynamique d tudes du rythme www rhuthmos eu a r uni des dizaines de chercheurs dans l optique d changer et de consolider les savoirs Le rythme est aussi la mode 2 1 Rythmes singuliers approches et d finitions Immobilise toi et essaie de te repr senter un rythme Impossible Paul Val ry Cahiers Si tant de recherches sur le rythme ne parviennent pas puiser le sujet c est qu il est complexe Dans la pr face du Rythme et la raison 2002 RR dans le texte avant d ouvrir une enqu te philosophique m thodique et m ticuleuse 1 titre de r f rence la bibliographie du rythme publi e dans l American Journal of Psychology en 1913 contenait 361 entr es Vasold 2010 p 41 2 Dans l introduction du dernier num ro d Interm dialit s consacr au rythme Michael Cowan cite notamment deux recueils d essais interdisciplinaires 1 Christa Br stle Nadia Ghattas Clemens Risi et Sabine Schouten dir Aus dem Takt Rhythmus in Kunst Kultur und Natur Bielfeld Transcript 2005 2 Barbara Naumann dir Rhythmus Spuren eines Wechselspiels in K nsten und Wissenschaften W rzburg K nigshausen und Neumann 2
101. nt r duit aux changements de tempo au d bit la mesure Pourtant il marque la dynamique enti re de l uvre en orchestrant l ensemble de ses l ments Usant de l harmonie et du contrepoint le rythme contribue articuler les tensions engendr es dans l interaction entre les arts En ce sens il s approche en effet de la vocation du n ud Le n ud diff rentiel est cependant une expression inusit e en tudes des arts l exception notable de quelques articles de Lesage qui parle tant t d une dynamique relationnelle et diff rentielle 2008a p 21 tant t des n uds de relations carts p 25 voire des nouages diff rentiels 2008b p 136 S en d gage l id e d une tension dynamique dans une toile d araign e d un entrelacement de composantes qui maintiennent une certaine ind pendance Les lignes de tension sont diff rentielles explique Lesage dans la mesure o regard et sonorit travaillent sur des plans connexes mais s par s gt p 135 Si le n ud assure une liaison et par extension des transitions et des correspondances son caract re diff rentiel pr serve les diff rences La relation rel ve d une f d ration non pas d une assimilation Peu d ouvrages publi s ce jour traitent en profondeur du rythme au th tre Le rythme est toutefois l objet de nombreuses r flexions en po sie en musique en philosophie Le linguiste Henri Meschonnic en fait ainsi une th
102. nts et les gestes des acteurs d op ra ne suivent ils pas avec une pr cision math matique le rythme de la musique le dessin m lodique de la partition s exclame t il 1973 t 1 p 125 14 Une partition rythmique du spectacle a t labor e assimil e par les acteurs ou r affirm e chaque soir l int rieur d une conduite sonore faite de bruitage et de musique Une sorte de m tronome scande le temps de la repr sentation de sc ne en sc ne et d acte en acte avec des tempi des accelerando et des rallentando calcul s Odette Aslan Le travail corporel chez Giorgio Strehler in Le corps en jeu Paris CNRS 2000 1993 p 263 29 Modellbuch des guides d taill s pour une mise en sc ne exemplaire la recherche d outils pratiques pour rassembler les informations ces initiatives visent aussi faciliter la reproduction potentielle de l uvre La partition du spectacle devient un moyen d assurer sa p rennit Le d fi est d envergure puisque la transmission exige un syst me universel dans une certaine mesure exhaustif et accessible la fois Dans un autre registre la partition musicale est souvent sollicit e dans les uvres indisciplinaires polyphoniques par nature Elle est intrins que leur composition Dans cet esprit l affiliation musicale affecte la structure de Basso ostinato au del de son titre Avec des d bris de conversation Sagna compose une v ritable partitio
103. oguent distance Comme le glissement la simultan it refl te un rapport une disposition dont l objectif demeure la coh rence du spectacle 1 2 Modes d interaction entre les arts Le vent c est tous les vents Victor Hugo La question du m lange des arts pr occupe plusieurs philosophes et praticiens minents de la modernit de Wagner Nancy en passant par Kandinsky Adorno et Souriau Les modalit s de coexistence et la perm abilit des fronti res entre les arts ne sont pas trang res la prolif ration et l effritement des domaines artistiques Reprenons l interrogation de Jean Luc Nancy sur la pluralit des Muses pourquoi y a t il plusieurs arts alors qu un seul l ART en majuscules aurait suffi pour d signer toute forme d expression 17 artistique 1994 Car la complexit des rapports entre les arts d coule notamment de cette pluralit Dans son essai fondateur L art et les arts Theodor Adorno pr cise et nuance le r le de l art face ses branches Celui ci n est pas juste un concept subsumant qui rassemble les cat gories artistiques comme un genre rassemble ses esp ces Il volue dans une dynamique complexe la fois contenu dans les arts l art n existe que dans les arts Adorno 2002 p 67 et puisant l ext rieur dans la r alit qui devient le r ceptacle des r alisations artistiques Adorno exclut une vision herm tique de l art Il faut l
104. omiche p 137 7 il n est pas au pouvoir de l individu de rien changer un signe une fois tabli dans un groupe linguistique Saussure in Martin 1971 p 55 66 3 1 2 La chute Le donateur du sens est lui m me un grand paradoxe Assis la turque sur un mur tr s troit such a narrow one that Alice quite wondered how he could keep his balance TLG p 53 Humpty Dumpty n a aucune chance de rester son poste longtemps Sa position est explicite au del des mots il est fatalement l uf tombant du mur tel que le rappelle la comptine Cixous souligne que wall n est pas sans fall qu il promet et qui l accomplit dans un cruel glissement de la lettre de t te 1971 p 18 Le pouvoir a la coquille mince le ma tre des signifiants est loin de ma triser son histoire Il contient sa chute et son fracas T La r f rence la comptine brouille les rapports au temps Si Humpty Dumpty est d j tomb comment se fait il qu Alice passe tout un chapitre en sa compagnie Il s agit donc d un temps circulaire en boucle recommencer L uf prodige contient son pass et son futur Il est en quelque sorte toujours d j tomb Cixous 1971 Selon Deleuze le mur qu il domine est la mince fronti re entre la certitude des codes tablis et le devenir du r cit C est aussi le mur de l imp n trabilit qui s pare les deux c t s du sens et les deux c t s du miroir En puisant indiff re
105. on mur La m tamorphose de visages et d objets entra ne aussi presque incidemment des changements de d cor d une sc ne l autre La for t s parpille en choses fuyantes tal es sur les rayons de la boutique qui leur tour redeviennent arbres quand Alice s avance pour r cup rer son uf Alors qu ils transportent le lecteur au risque de l garer ces glissements assurent la fluidit du r cit dans De l autre c t du miroir Le jeu des cases surprend mais ne d route pas il a un sens bien que celui ci soit r fractaire au bon vieux common sense qui est la chose du monde la mieux partag e H l ne Cixous parle d un encha nement d actions qui subsiste la logique d une cha ne narrative dont la succession est ordonn e non point par quelque n cessit de sens ou d action mais par un m canisme r p titif d apparition disparition 1971 p 14 Le sens de la lecture serait donc indiqu par la cadence l alternance des glissements aussi inattendus et absurdes soient ils Comme si les changements de tableaux battaient le pouls de l aventure ponctuant le r ve d Alice La coh sion du texte repose ainsi sur des modulations agogiques qui modifient le temps en l acc l rant ou en le ralentissant Le non sens de certains passages est att nu par les modalit s de leur encha nement Ml me si au niveau du r cit ou du discours ou de la simple p rip tie la causalit est escamot e son escam
106. on t mean to stop here all the rest of your life That s a great deal to make one word mean Alice said in a thoughtful tone TLG p 57 58 4 Well toves are something like badgers they re something like lizards and they re something like corkscrews They must be very curious looking creatures They are that said Humpty Dumpty also they make their nests under sun dials also they live on cheese TLG p 58 65 le plus audacieux des experts dans cette norme ponte textuelle l expression est de Cixous 1971 p 14 Devenu une r f rence classique le po me interroge notamment le fonctionnement du langage dans une multiplication infinie de possibles s mantiques Tomiche 2002 p 140 Comment se fait il que le sens commun ce d nominateur partag de l usage collectif d une langue reste accessible alors que tous les mots du r cit sont invent s Incidemment se pose la question de la traduction le d fi de trouver des quivalents syntaxiques en d autres langues et de fil en aiguille l interrogation philosophique sur la ma trise absolue du langage par l crivain Carroll est fid le lui m me et sa recette est d j prouv e au pays des merveilles Take care of the sense and the sounds will take care of themselves dit la Duchesse Alice pendant la partie de croquet Carroll in Deleuze 1969 p 44 Contrairement la jeune fille Humpty Dumpty pre
107. oque mais son emprise ne dure pas sous l effet de la carotte le discours savant perd d finitivement sa saveur En reste un tas de questions auxquelles il n a pas su r pondre L chec du discours tient ici aux limites de la communication verbale Quelle est la port e r elle des mots Et si le langage n arrive pas tout exprimer comment lui venir en aide quitte le remplacer Lorsque les mots manquent la conf rence assume de mani re th trale l impasse qui la guette Cette mise en chec de la conf rence est un artifice Le discours dispara t mais n choue pas tout comme la chute de Humpty Dumpty n arr te pas l histoire Dans un clatement d lib r il est repris au vol ou au rebond en dehors du verbe la sc ne dispose de nombreux moyens pour relancer la f te Le geste la danse la musique sont autant de langages artistiques capables de traiter du rythme Mieux encore ils se r v lent parfois plus probants que les circonvolutions de la parole Quand la fabrique du savoir tombe en panne et son cerveau tombe en bas de la galerie heureusement rattrap par les deux hommes 33 00 c est un point de non retour aux modalit s de la conf rence traditionnelle La table du conf rencier trahit sa vocation en laissant appara tre une nappe et un service de th Elle annonce ainsi la deuxi me partie de la pr sentation qui confond les 8 C est la r plique r currente de Clov dans Fin de partie 1957
108. os l anc tre de l arithm tique dont le champ s mantique inclut la mesure la proportion et le nombre pur Belic 2002 p 131 Par ailleurs la d finition classique adopte implicitement la dialectique du m me et de l autre Le mouvement s oppose l immobilit le son au silence l alt rit l identit la variation la r p tition tout se passe entre les p les du changement et du non changement Le rythme commence d s lors qu une diff rence se combine une ressemblance Collot 1990 p 76 Les rythmes les plus simples sont par cons quent binaires deux temps du type inspiration expiration l origine du geste cr ateur C est aussi une relation de compl mentarit qui associe le mouvement la dur e Uniforme et continue la dur e se pr sente comme la r p tition et la confirmation du m me le degr z ro du mouvement Belic 2002 p 167 Elle en est le revers c est dire autant son contraire que son chec Rendre compte de l ensemble des acceptions du rythme sans pointer les unes au d triment des autres est un d fi de taille Sauvanet propose une solution m thodique bas e sur trois crit res porteurs S pour structure P pour p riodicit M pour mouvement Le rythme en serait Une combinaison aux 4 Au seuil du mouvement la dur e est sa forme la plus primitive C est la seule caract ristique partag e par le son et le silence Notion ambivalente elle s inscrit au c ur d
109. otage est escamot par la simple vitesse des changes et de d placements qui donne l illusion d une telle continuit Une lecture ralentie disloquerait l ensemble Cixous 1971 p 16 1 She looked at the Queen who seemed to have suddenly wrapped herself up in wool Alice rubbed her eyes and looked again Was she in a shop And was that really was it really a sheep that was sitting on the other side of the counter TLG p 47 2 Can you row the Sheep asked handing her a pair of knitting needles as she spoke Yes a little but not on land and not with needles Alice was beginning to say when suddenly the needles turned into oars in her hands and she found they were in a little boat gliding along between banks so there was nothing for it but to do her best TLG p 48 49 15 En effet le lecteur ne se demande pas pourquoi Alice se retrouve tout d un coup dans une barque avec la Brebis ou comment l uf de la boutique devient il Humpty Dumpty Ces questions semblent superflues dans un contexte o des v nements hors du commun se succ dent toute allure Il en serait autrement si les transformations taient rares ou ponctuelles La vitesse des changements a donc une influence d cisive sur le d roulement de l histoire Alice a d ailleurs rarement le temps de saisir les m tamorphoses de son entourage 1 1 2 Toujours d j tomb en relais Dans une uvre hybride l itin raire du
110. phrase ritournelle ils respirent Les souffles vont en decrescendo sans dispara tre toujours audibles Quand le conf rencier tourne la page les interpr tes se remplissent les poumons d air et se figent sur place Cet arr t complet pose parfaite pour une photo de famille dure peine quinze secondes mais son impact est consid rable Ayant eu le temps de changer d air le spectateur est d sormais disponible pour la suite CONCLUSION D NOUER LES TENSIONS Toute me est un n ud rythmique St phane Mallarm L id e du rythme comme n ud implique un double rapport entre les l ments le n ud enlace et attache mais il suppose aussi une force de r sistance Le n ud met en tension Tension ton tonos en grec c est dire rythme Le rythme comme degr s des tensions sensibles comme mouvement sans d placement crit Escoubas 1997 p 112 La tension caract rise donc la fois le n ud et le rythme en ce sens tout n ud est rythmique Pourtant Mallarm n est pas coupable de pl onasme le rythme ne se r duit pas la tension m me si celle ci en est constitutive et le n ud qu il d couvre de toute me est sans doute complexe voire gordien Dans la tension le rythme marque un battement une r p tition l ternel retour Le mouvement lui est fondamental m me dans l acception platonicienne aussi ordonn e et fixe soit elle Le rythme est la forme dans l instant qu elle est assum
111. plus les structures rythmiques se distinguent un d croissement de la complexit am ne une plus grande diff renciation rythmique L id e formelle de la pi ce est celle d une interaction entre les rythmes individuels p riodiques d termin s et une structure polyrythmique g n rale tr s complexe Ligeti in F ron 2010 p 152 Le Po me de Ligeti explore d une mani re assez brute les interactions des rythmes primitifs dans une structure plurielle o leur copr sence fait l objet d une coordination du moins par les sens la r ception l ou e en particulier Si les relations entre les arts au sein d une uvre indisciplinaire sont peut tre plus complexes que celles des m tronomes de Ligeti toujours est il que son dispositif illustre bien les enjeux d une structure polyrythmique S agit il d un ensemble de rythmes singuliers ou d un seul rythme pluriel Sont ils mutuellement exclusifs ou compl mentaires 18 Le m tronome n est il pas l incarnation m me de la m trique un clich simpliste l gard du rythme comme mesure de temps 58 Qu entend Meschonnic par la multiplicit interne du rythme D un point de vue structurel il y a deux fa ons d aborder la question D une part la polyrythmie refl te une multiplicit de rythmes singuliers transform s en un rythme pluriel un rythme ma tre dont les donn es changent chaque instant Une telle transformation suppose l existence de cellules rythmiques p
112. poss de un exemplaire REMERCIEMENTS Fr d ric Maurin qui m a attendu sans abandonner de loin comme de pr s Pour sa patience sa contagieuse minutie et ses mots justes Josette F ral qui m a rattrap la d rive sans elle ce m moire n aurait pas vu le jour Pour sa sagesse sa d termination enviable et son don de persuasion qui valent bien un abonnement au chocolat Jessie Mill complice dans les bricolages pour son in puisable optimisme et des constellations surprenantes Robert Reid pour ses apparitions salutaires sa confiance et l esprit de r bellion partag Aux interpr tes et concepteurs de Toujours d j tomb qui ont os l aventure quitte risquer leur coquille Hugues M lanie Xavier Harmonie Elsa Florence Sarah et aussi Frank Julien Nancy Elena un bel quipage pour voyager de l autre c t du miroir Marion Bec pour la r sidence aux quatre fromages ma m re Tatiana Krouglikova last but not least on ne grandit jamais assez TABLE DES MATI RES RESUME onminiiinneunelastinnsciroinssmatentah nisevanatit tete v INTRODUCTION INDISGIPLINE oani arae A a a a a aa 1 CHAPITRE I ENTRE EES CASES ENTRE LES ARPS a tiin iaeia iie ENE REEE TE AA AE Ea JL LL CAUIPAYS UNION esse entrer RM RE tbe AN de ete 12 1 1 1 Glissements travers l chiquier sisi 13 i2 Toujours d jatomb n relais sentent dot es sean ee chut 15
113. pr cis ment composer avec ces espaces temps pour les rendre compatibles entre eux et accessibles pour le spectateur Le rythme de correspondance est avant tout un rythme de transformation Dans les arts comme ailleurs il s agit d un processus au cours duquel les cellules rythmiques primitives dont la nature exacte varie selon le contexte de l uvre se r organisent dans une nouvelle configuration Celle ci devient une mesure commune entre les disciplines artistiques en jeu sans cesser d voluer chaque instant comme le soulignent Deleuze et Guattari Le rythme de correspondance est donc le lieu propre de la m taphore vive Paul Ric ur une transcription mouvante des codes d un art dans le langage d un autre Et Belic ne manque pas l occasion d insister sur le r le du rythme seul permettre une vraie correspondance et concordance entre les arts en tant que mesure commune entre les diff rents modes d expression 2002 p 136 20 Chaque milieu est cod un code se d finissant par la r p tition p riodique mais chaque code est en tat perp tuel de transcodage ou de transduction Deleuze et Guattari 1980 p 384 60 Il n est pas tonnant que le rythme f d rateur rel ve d un relais entre les impulsions appartenant aux rythmes constitutifs Les disciplines artistiques s alimentent et se dominent tour de r le Leur confrontation est a priori f conde condition que le pouvoir puisse
114. proximit leur rapport est sans domination malgr l entraide une distance persiste plusieurs reprises la parole et le geste la danse et le discours voluent ensemble autonomes et unis la fois Ils entretiennent non pas un dialogue mais pour reprendre Peyret un double monologue en h lice l image de l ADN 2008 p 96 Cherkaoui s int resse beaucoup la gestuelle quotidienne inconsciente de son expressivit qu il reprend dans Foi avec des danseurs qui se font a ter ego ou doublures des personnages parlants travers la reproduction m canique d une mimique naturelle au discours ces bin mes soulignent le clivage entre le geste et la parole Loin de la redondance le proc d pose aussi la question de l authenticit du mouvement Le motif est familier Cherkaoui des s quences similaires chor graphi es partir de gestes ordinaires apparaissent d j au d but de Zero Degrees en duo avec Akram Khan et dans Loin avec une dizaine d interpr tes en m me temps Contrairement au travail de Cherkaoui le th tre musical de Goebbels s inscrit dans le mode de diff rence surtout par un relais entre les arts Dans un 23 entretien autour de Stifters Dinge le compositeur exprime le d sir d approfondir le potentiel de chaque art Son ambition fait cho aux propos de Kandinsky Il faut que tous les arts soient forts sur le plateau et qu il n y ait pas de hi rarchie Il faut ouvrir
115. ps faibles disposition r guli re gt pour les arts notamment la musique et la po sie B Distribution p riodique des phases d un ph nom ne pour le reste La formule est classique traditionnelle le retour p riodique d un rep re fait l unanimit jusqu la deuxi me moiti du XXe si cle et continue de dominer la conception du rythme aujourd hui R p tition mesure cadence sont des acceptions convenues Cela dit le rythme est aussi associ parfois une libert artistique une pulsion sans contraintes L tymologie permet d appr cier le potentiel s mantique de rythme venu du grec travers le latin En 1951 le linguiste mile Benveniste publie un article intitul La notion de rythme dans son expression linguistique qui retrace l volution du terme dans l Antiquit Une analyse d taill e de plusieurs sources grecques lui permet de d mentir certains pr jug s bien tablis notamment l association du rythme aux mouvements r guliers des flots 1966 p 327 Loin d tre une intuition naturelle inspir e par les vagues de la mer la notion de rythme s av re profond ment artificielle ancr e dans une longue r flexion relay e par des g n rations de penseurs L acception actuelle de rhythmos remonte ainsi la p riode attique et se r f re une configuration des mouvements ordonn s dans la dur e p 335 Benveniste lui d couvre cependant un sens an
116. publique une op ration en quilibre entre une conf rence spectacle une r p tition ouverte et un d bat public programme du spectacle Sagna touche la conf rence performance Malgr les efforts d une mod ratrice hors pair Viviane De Muynck la d rision consentie gt Adolphe 2003 renverse peu peu l quilibre annonc pour d voiler les coulisses de la cr ation travers l ironie critique de la chor graphe Relation publique est une r flexion sur le rapport de l uvre au monde le public les producteurs la presse Dans Basso ostinato c est la figure du danseur qui se retrouve dans le vif du sujet Sagna d cline un dialogue quotidien dans une suite de variations o paroles et gestes se compl tent se remplacent puis s estompent au fil du temps La structure de Basso ostinato est proprement musicale fid le son titre la basse obstin e ou contrainte d signe la r p tition continue d un court motif du d but la fin de la composition Pourtant ici la r p tition d nature le m me revient chaque fois autrement La musique est par ailleurs le domaine de pr dilection de Heiner Goebbels Il est d j un compositeur confirm au moment d aborder la cr ation titre de metteur en sc ne Concerts sc niques H rst cke uvres de th tre musical 5 Avec Myth en 2007 puis BABEL words en 2010 ses r alisations engagent une r flexion sur l autonomie de la musique face aux
117. quait le contraire De la m me mani re l tude 1 1 des textes fondateurs dont la Bible se heurte souvent une ponctuation ambigu qui ouvre la porte des interpr tations contradictoires 3 1 1 Humpty Dumpty ma tre du langage Lorsque le contexte d un mot sa position dans la phrase a un impact sur son sens la polys mie devient une question de rythme Or l uvre de Carroll est sa fa on une ode la polys mie Et c est ind niablement Humpty Dumpty qui vole la vedette Sa figure est embl matique du traitement que Carroll r serve au langage Elle permet d acc der au plus profond des secrets de l autre c t du miroir et par cons quent l ve le voile sur les rythmes internes du r cit Comprendre Humpty Dumpty revient aussi entrevoir la gen se du sens notamment la lumi re de la th orie de Meschonnic Car l uf pr tentieux s approprie les mots sans se soucier de leur r ception Pos sur le mur comme la t te sur le corps Humpty Dumpty est l ombilic gt du livre Cixous 1971 p 17 Il est la fois le Ma tre des mots et un uf image du signifiant o les signifi s ne sont qu en germe virtuellement l uf corps indiff renci o cravate et ceinture se confondent corps indiff renci du langage avant que ne s y introduisent les distinctions du sens l uf corps polys me Martin 1971 p 56 Pour ce qui est de la forme le virtuose du sens a un nom r v lateur Les indice
118. re les langages h t rog nes convoqu s par Goebbels sont assur es par le rythme Le spectateur est mis aux aguets par cette multiplicit en dialogue tout en vivant une exp rience concr te celle d une composition nouvelle inusit e fond e sur l h t rog n it des langages que le rythme et la musique interconnectent Lesage 2008b p 140 Les r sonances du batteur travers le Quatuor cordes de Ravel qui accompagne Andr Wilms dans sa cuisine rel vent elles de la correspondance ou 21 C est notamment le cas de Cage qui d j dans les ann es 1930 pr ne une composition simultan e en musique et en danse Goal New Music New Dance 1938 in 1967 p 87 61 de la composition Confront s la r alit les deux notions finissent rapidement par se croiser Il y a une correspondance manifeste entre les gestes du com dien et la cadence musicale Or la superposition des trames qui permet le dialogue n est pas fortuite L interaction des deux sources rythmiques est aussi une composition Peu importe sa nature exacte le rythme assure la transition entre deux milieux Son entit ne change pas avec le point de vue car la distinction entre correspondance et composition se r sume un angle d approche Ce sont deux fa ons de voir la m me chose si l une proc de de l int rieur cherchant identifier les points de contact et de croisement entre les disciplines l autre se situe en surplomb par rappo
119. relation particuli rement simple entre le percevoir et le produire qu on ne peut faire se correspondre que moyennant une loi ou un r gime musculaire moteur in CR p 174 L articulation du rythme passe donc par les lois du corps objectives et subjectives la fois objectives car physiologiques subjectives car uniques chacun dans la mesure o les corps ne sont jamais identiques Le rythme n est pas un objet il rel ve plut t d une modalit appliqu e quelque chose par quelqu un Le rythme est en fonction de ce qui doit tre rythm crit Jean Mitry in RR p 237 Il lui faut ainsi un champ d application et un sujet ex cutant m me si l ex cution se r sume souvent une coute active Le rythme doit tre entendu pour retrouver son sens Aussi le r le du sujet metteur ou r cepteur est il essentiel pour compl ter le tableau L arbre qui tombe dans la for t fait il du bruit si personne ne l entend 2 2 1 La perception Time travels in divers paces with divers persons l Il tell you who Time ambles withal who Time trots withal who Time gallops withal and who he stands still withal William Shakespeare As You Like It III 2 Le rythme n est pas une abstraction objective car il est in luctablement li au sujet qui l articule Il est la fois principe d organisation et condition de la perception M me les rythmes naturels n y chappent pas Si la vie est rythmique e
120. rhythm crit il tout en notant entre parenth ses que l inverse est impossible 1967 p 128 Sans l avouer explicitement Meschonnic est plut t h raclit en gt que platonicien dans son approche du rythme Tout s coule mais tout ne se mesure pas Suivre le courant suppose parfois de sortir du m tre pour renouveler le mouvement l avant garde de son poque Meyerhold l avait d j bien compris Le rythme c est ce qui domine le m tre ce qui entre en conflit avec lui Le rythme c est quand on sait sauter hors du m tre et y revenir 2005 p 150 Revenir parce que l irr gularit ne vaut pas mieux que la r gularit elle en est prisonni re CR p 214 Le rythme trouve son souffle au passage sans pr f rences et d joue l attente travers le changement qu il provoque C est donc l l ment de la surprise qui oppose le rythme au m tre bien que l opposition ne soit pas exclusive Le rythme est le sens de limpr visible statue Meschonnic p 85 et la mati re privil gi e de l aventure p 102 Il ny a pas de r gle sans exceptions Tiraill entre la reprise et la syncope l attente et sa d ception le rythme participe de l esth tique moderne du heurt de la rupture Mazaleyrat in CR p 214 C est encore Cage qui a su bien cerner l quilibre pr caire entre structure et mouvement qui caract rise fondamentalement le rythme Il s agit pour lui d une 46 opposition
121. rimitives des unit s de base communes tous les rythmes Le rythme ma tre serait alors le r sultat d un r arrangement continu de ces cellules partir de plusieurs sources Par ailleurs le fait d avoir des composantes communes ouvre la porte aux transferts et aux correspondances entre les rythmes entre les voix entre les arts La multiplicit interne du rythme aboutit un rythme de correspondance D autre part la polyrythmie pr serve l int grit des rythmes singuliers dans une f d ration dirig e par un rythme de second degr le rythme des rythmes Son r le consiste organiser les sources dans une entit collective Ce m ta rythme rel ve de la composition arranger assembler disposer Bien entendu son champ d application est diff rent de ceux des rythmes singuliers Si les rythmes de la musique et de la danse co ordonnent respectivement les sons et les mouvements le m ta rythme touche invariablement d autres rythmes Il dirige une partition plusieurs voix La multiplicit interne du rythme indique donc aussi un rythme de composition Le rythme d une uvre indisciplinaire est a fortiori polyphonique ce qui rend la qu te d une d finition convenable d autant plus d sesp r e Celle ci rel ve d une utopie moins de consentir perdre les sp cificit s propres la musique la danse la po sie la peinture etc Le tronc commun de leurs acceptions respectives est trop mince Ains
122. risaille Il n est pas tonnant que Goebbels rejette explicitement le mod le wagn rien son art puise sa force dans les diff rences Le foisonnement des formes qui d filent devant les sens du spectateur est presque d concertant Pourtant loin du chaos le d roulement du spectacle est minutieusement ordonn Le discours la musique et les arts plastiques prennent place dans un contexte o comme chez Carroll le sens merge dans l encha nement travers le relais de la peinture vers la musique par exemple avec Van Ruisdael et Bach et la simultan it Le relais compose et signifie 8 Marie Pierre Genecand F erie pour pianos robots et arbres Le Temps Gen ve 18 septembre 2007 24 1 2 4 L effrangement L effrangement des arts terme introduit par Adorno est un mode d interaction mi chemin entre la diff rence et la communaut entre la sp cificit et la synth se Ce sont les fronti res entre les genres qui s effrangent jusqu devenir perm ables Les arts se frottent se contaminent se rongent les uns les autres Adorno 2002 p 74 mais gardent une identit propre Il semble alors d autant plus fondamental que le m lange des arts ne se fasse pas au d triment de leurs codes et langages particuliers L int r t demeure dans la tension dans le prolongement d un art par un autre le glissement ou l irruption TDT 2140 L effrangement engage un transfert constructif
123. royale d tre relev APPENDICE A LISTE DES EXTRAITS VID O Les extraits vid o suivants sont disponibles en ligne www kapostroff com tdt mm Toujours d j tomb 2009 Histoires marches souffles les relais Parenth se des hal tements Cours de chute Sc ne du th Reprise de l exposition Mises au point montage Passages du chercheur montage Foi 2003 de Sidi Larbi Cherkaoui Doublures a Parenth se du baiser Chant d adieu Basso ostinato 2006 de Caterina Sagna s Calvities montage Stifters Dinge 2007 de Heiner Goebbels Transitions du paysage de Van Ruysdael au concerto de Bach puis la voix de L vi Strauss dans la pluie Eraritjaritjaka 2003 de Heiner Goebbels Omelette vue du spectateur Omelette vue de la cam ra Loin 2005 de Sidi Larbi Cherkaoui a R cit en groupe Zero Degrees 2005 de Sidi Larbi Cherkaoui et Akhram Khan Histoire du passeport APPENDICE B CARTE HEURISTIQUE RYTHME Dynamique relationnelle N ud diff rentiel LES ARTS PURS musique chant po sie IMPURS th atre pernormance danse peinture sculpture les Muses cin ma installation etc gt SP 4 aama rn g m Multidisciplinaire AN i RE PES interartistique Interm dialit Pluridisciplinaire Indisciplin l Transdisciplinaire interdisciplinaire Lesage M choulan Fig B 1 L indiscipl
124. rt la configuration de l ensemble o l accent est mis davantage sur l arrangement des parties Dans les deux cas le rythme remplit la fonction de m diation entre les l ments d un ensemble esth tique qu il s agisse d un rapport d interaction entre les parties ou d int gration dans l ensemble lui m me Chaque l ment volue cependant selon une trajectoire individuelle Sa forme assum e dans l instant est unique tout comme l instant lui m me du moins dans une conception chronologique du temps Le rythme devient donc une dynamique d individualisation de la forme Marchand 1996 p 217 inscrite fermement dans le contexte de l ensemble auquel elle appartient Il y a rythme quand la partie d un tout tend vers l affirmation de son individualit sans ignorer sa relation aux autres parties et au tout qu elle forme avec elles pr cise Marchand p 226 La formule n est pas sans rappeler le sc nario id al que Kandinsky souhaite retrouver sur la sc ne un consensus responsable o chaque art s exprimerait au bon moment mais se plierait par ailleurs aux besoins de l ensemble Les l ments du spectacle se trouvent r unis en une partition dont la gestion rel ve du m ta rythme que pointe Pavis 2002 p 311 C est la cl de vo te d une uvre indisciplinaire CHAPITRE III HUMPTY DUMPTY ET LES SENS DU TEMPS Le rythme a un rapport troit avec le pr sent Les hypoth ses sont multiples il le fragmente
125. rts du spectacle Les voies de la cr ation th trale t 17 Paris CNRS Scarpetta Guy 1985 L impuret Paris Grasset Souriau tienne 1969 1947 nouv d La correspondance des arts Paris Flammarion Tackels Bruno 2009 Faire scandale de tout Mouvement no 52 juillet septembre p 62 65 Le rythme Arom Simha 1992 la recherche du temps perdu m trique et rythme en musique In Les rythmes lectures et th ories dir par Jean Jacques Wunenburger p 195 205 Paris L Harmattan Belic Milija 2002 Apologie du rythme Le rythme plastique prol gom nes un m ta art Coll L ouverture philosophique Paris L Harmattan Benveniste mile 1966 1951 La notion de rythme dans son expression linguistique Probl mes de linguistique g n rale t 1 ch 27 p 327 335 Paris Gallimard Bonhomme B atrice et Mic ala Symington dir 2005 Le rythme dans la po sie et les arts Interrogation philosophique et r alit artistique Paris Champion 99 gt Court Raymond Pour une ph nom nologie du rythme p 33 44 gt Symington Mic ala Le rythme absolu Po sie musique et spatialit chez Maliarm et Pound p 215 238 Bourassa Lucie 1997 Henri Meschonnic pour une po tique du rythme Paris Bertrand Lacoste Cage John 1961 Silence Lectures and writings Middletown Wesleyan University Press 19
126. s tymologiques renvoient le lecteur humpy bossu dumpy courtaud et ventuellement au verbe to dump jeter d verser Tomiche 2002 p 134 M y name means the shape I am avoue le principal int ress TLG p 54 alors que son destin est d j tout trac il est vou une chute fatale 2 Une piste curieuse s ouvre en suivant l onomatop e fatidique dans son voyage travers les langues Humpty Dumpty est aussi Gros Coco traduction de Jacques Papy Dodu Mafflu traduction d Antonin Artaud Boule Boule B uf L uf Humpelken Pumpelken en allemand Tentetieso en espagnol Lille Trille en su dois Chalta Bolta en russe Lors d un atelier pour TDT les interpr tes ont allong la liste de quelques propositions officieuses Pappu Tappu en indien petit homme gros et boudeur 64 En attendant Humpty Dumpty s occupe de miner le terrain du sens et brouille les pistes Si Alice cherche des rep res fiables bien mal lui en prend car son interlocuteur est un libertin La diversit des sens assum e par les mots qui lui chappent est soumise uniquement la volont du locuteur Celle ci devient d terminante The question is said Alice whether you can make words mean so many different things The question is said Humpty Dumpty which is to be master that s all TLG p 57 Possiblement rh torique Humpty Dumpty semble plut t confiant de son autorit la question d
127. s est difficile cerner Sa relation fondamentale avec le rythme se d cline en fonction de la question des origines le temps serait il ant rieur au rythme ou est ce l inverse Soit le temps pr c de et accueille le rythme dans une s rie continue d instants en devenir la suite d Augustin et de Kant soit il en est l essence l exp rience m me RR p 104 Pour chapper cette dialectique Sauvanet sugg re une piste interm diaire qui rejoint la th orie critique de Meschonnic Il s agit du rythme comme sens du temps au sens de signification mais aussi en termes d orientation et de sensation ou pour reprendre Meschonnic du rythme comme forme sens Le rythme n est pas dans le temps il n est pas non plus e 15 Les crivains que j appr cie sont toujours ceux qui travaillent la fois le fond et la forme comme Gertrude Stein Elias Canetti Alain Robbe Grillet qui modifient la forme de leurs r cits en fonction du contenu d velopp confie t il dans le programme du spectacle Goebbels 2008 16 Le rythme d un texte fait du temps de ce texte une forme sens qui devient la forme sens du temps pour le lecteur Meschonnic in RR p 109 56 temps il est du temps pr cise Sauvanet au sens o il le produit en lui donnant un sens Fondamentalement le rythme temporalise p 105 Or la perception unit les dimensions sensibles La formule s tend alors l espace temps dans son e
128. se La voix atopique pr sences de l absence In Pratiques performatives Body Remix dir par Josette F ral Rennes Presses Universitaires de Rennes Goebbels Heiner 2004 Eraritjaritjaka Mus e des phrases Captation du spectacle Archives du Th tre Vidy Lausanne 1h25 Vu en mai 2006 au Festival de Th tre des Am riques Montr al 2007 Stifters Dinge Captation du spectacle Marc Perroud 2008 Archives de Heiner Goebbels 0h40 1h10 pour le spectacle en entier Vu en juillet 2008 au Festival d Avignon 2008 Programme de Stifters Dinge au Festival d Avignon du 6 au 14 juillet Propos recueillis par Jean Fran ois Perrier Sagna Catarina 2006 Basso ostinato Captation du spectacle Archives de la compagnie Caterina et Carlotta Sagna 1h05 Vu en octobre 2008 la Cinqui me Salle de la Place des arts Montr al 2008 Programme de Basso ostinato la 5 salle de la Place des Arts Montr al du 1 au 4 octobre http caterina carlotta sagna org MainFrame Sagna contMain Spec fbasso htm 2010 Entretien mission Affinit s lectives anim e par Francesca Isidori France Culture 11 d cembre www franceculture com emission affinites electives caterina sagna 2010 12 11 htmi 102 Weinbren Grahame 2009 Kandinsky A Close Look New York Solomon R Guggenheim Museum 0h33 Vu en mai 2011 au Festival International des Films sur l
129. se une s quence visuelle unique Il y a toutefois des motifs r currents dans les encha nements des points d appui L exp rience de Grahame Weinbren pionnier du cin ma interactif en offre une d monstration probante dans Petits plaisirs Un essai documentaire qui cherche comprendre le regard pos sur l uvre Le r alisateur fait appel la technologie du eyetracking pour tracer les parcours oculaires de cinq sujets plac s devant le tableau de Kandinsky Les trajectoires enregistr es par l ordinateur sont loin d tre arbitraires Alors que les sujets choisis par Weinbren ont une sensibilit et une exp rience artistiques diff rentes les trac s de leurs regards se recoupent souvent Les lignes de lecture reviennent toujours au centre du tableau mais la fr quence de ces retours la vitesse des d placements et le souci du d tail changent sans cesse Sur l cran de l ordinateur l organisation des formes dans le temps devient manifeste presque palpable La notion de rythme plastique qui concerne d ordinaire la composition visuelle de l uvre correspond par cons quent une d ambulation du sujet dans l espace notamment celui d un tableau Ses impressions recueillies chaque arr t du parcours l il voyage par relais d un point d inflexion un autre forment une s rie d instantan s dont le sens est r vis au fur et mesure Toujours dans l optique d une reconstitution le spectateur ex cute
130. solument pr sent mais fuyant l approche Son potentiel de coh sion dans De l autre c t du miroir est certes inspirant Pourtant tout d pend du lecteur qui ex cute le texte car il y aussi mati re interpr tation Enfin et surtout qu est ce que le rythme Un ph nom ne physique un instrument de mesure un principe ph nom nologique Est il singulier sont ils pluriels Et si les acceptions sont multiples il faudrait bien s entendre pour en parler Le rythme n est pas le propre de la musique son champ d action d passe de loin les notions de cadence et de mesure Depuis l Antiquit philosophes po tes scientifiques historiens de l art et psychologues ont r fl chi au ph nom ne sans pour autant l avoir cern ou d mystifi Le caract re fuyant du rythme semble presque intrins que sa d finition D j au temps d H raclite son prototype grec rhythmos servait d signer une mani re particuli re de fluer gt Benveniste 1966 p 333 alliant la forme et la dynamique du mouvement Le rythme ne se laisse pas fixer comme tel il semble 37 insaisissable il tient la fronti re du th orique crit Philippe Lacoue Labarthe in RR p 10 Depuis la fin du XIXe si cle le rythme est devenu le foyer d un grand engouement d abord en psychologie et en histoire de l art puis chez les artistes et les philosophes qui lui d couvrent les propri t s d un mod le transversal polyvale
131. spectateur d pend entre autres des passages entre les arts comparables aux glissements narratifs qui ne cessent de surprendre Alice dans sa travers e Les arts sont certes des modalit s d expression mais aussi des l ments de construction dont l assemblage d termine la r ception Comme la lecture du texte de Carroll l ordre la vitesse et la fr quence des passages ont le potentiel de transformer le sens de l uvre Or quelle est la nature exacte de ces moments privil gi s o les arts se passent le relais Comment s op re le transfert Dans TDT ces transferts adoptent notamment deux modes distincts le glissement et la simultan it Le premier rel ve d un relais lorsqu un th me ou un motif provoque la rencontre des arts Au d but de la conf rence alors que la pr sentation simultan e et chaotique des artistes est subitement suspendue les interpr tes reviennent dans leurs cases respectives pour entamer chacun une histoire 16 19 Assez rapidement les discours se confondent d abord en une mati re sonore puis en un ch ur de souffles 1913 les corps se d placent l int rieur d un rectangle de lumi re de plus en plus petit dans une sorte de mouvement brownien Le mouvement se substitue la parole avant de c der au souffle dans une r partition qui moyennant quelques pr cautions pourrait se r clamer respectivement du th tre de la danse et de la musique Le glissement op re souvent travers un
132. t rieur celui de forme distinctive figure proportionn e disposition p 332 Il est question d une configuration non plus temporelle mais spatiale Selon les contextes le mot d signe la forme dans l instant qu elle est assum e par ce qui est mouvant mobile fluide Rhythmos reste marqu par la philosophie h raclitienne panta rhei tout s coule C est la forme improvis e momentan e modifiable conclut le linguiste p 333 Le sens de l ordre dans le mouvement appara t seulement avec Platon Alors qu il emploie encore rhythmos dans le sens de ses pr d cesseurs le philosophe innove en l appliquant la forme du mouvement 40 que le corps humain accomplit dans la danse p 334 La forme se soumet d sormais un ordre garant de la mesure La suite se retrouve autant chez Augustin que dans les grands dictionnaires des Lumi res D une certaine fa on l article de Benveniste lib re la notion de rythme de sa fixit Platon rencontre H raclite l ordre s ajoute l impr vu La configuration des mouvements ordonn s dans la dur e n est que passag re Cette conclusion est fondamentale pour la th orie critique de Meschonnic qui applique et d fend les d couvertes de son confr re Elle remet galement en question les nombreuses tentatives d assimiler le rythme au nombre Or c est l tymologie m me qui brouille les pistes rhythmos partage sa racine grecque avec arithm
133. te phrase avant que les autres ne la terminent Il provoque la surprise une surprise excitatrice la surprise qui secoue la s curit l ennemie au travers de laquelle s infiltre la mort une surprise dont la tension le renouvellera ce rythme sic r p t sans cesse et par ainsi une surprise qui relancera la f te Schirren 1996 s p La m taphore de la f te pr sente aussi ailleurs chez Schirren rejoint l opposition entre la vie et la mort que l auteur transpose au mouvement Le boum est donc un point mort une syncope dans tout ce qu elle a de paradoxal Le 8 Pianiste percussionniste et compositeur Fernand Schirren 1920 2001 consacre les trente derni res ann es de sa vie l enseignement du rythme aux futurs danseurs et chor graphes notamment l Ecole Mudra fond e par Maurice B jart Bruxelles en 1970 Pour traduire les nuances des rythmes compos s Schirren ajoute au couple et boum un bim une sorte de virgule dans la ponctuation musicale 49 paradoxe de la syncope est de simuler une mort comme on dit une petite mort pour mieux exprimer la vie gt Sauvanet 2000b p 126 En effet le temps suspendu du boum est g n rateur de vie et de sens La phrase est toujours d chiffr e au moment de l arr t quand les mots et les sons reprennent haleine C est alors que surgissent des hypoth ses de signification des chos de sens Schirren pr cise Dans le s
134. tion L uvre institue un rythme dans lequel se prendre s engager Le sch me labor par le travail de d chiffrage du spectateur aid par les l ments m diateurs internes l uvre saisit son ordre Mourey 2000 p 88 89 52 travers ce d chiffrage le spectateur participe une reconstruction de l uvre D une fa on ou d une autre il est amen lui trouver un sens Mais la donation du sens passe par le langage m me lorsqu elle n est pas formalis e dans un discours Ce qui confirme la th se de Meschonnic La d finition du rythme sous entend un sujet de r ception et une r ception av r e Or celle ci est limit e par un seuil de saturation au del duquel le spectateur n arrive plus reconna tre les configurations inh rentes l uvre Incapable de d chiffrer les mod les en jeu il se retrouve dans une impasse de compr hension Ainsi les structures rythmiques cessent d tre per ues comme telles les rythmes trop complexes superpos s ou simultan s finissent par s annuler et dispara tre Le seuil du chaos reste toutefois variable subjectif expliquant parfois les divergences dans l appr ciation de certaines pi ces de musique contemporaine De plus contrairement la vision ou l ou e la perception du rythme est imm diate Si la vision proc de d un dualisme la sensation de rythme est v cue dans un plan d immanence Le voyeur s exclut de l alt rit alors que celui
135. transferts d nergie d un registre l autre Guy Scarpetta L impuret La rencontre des arts implique naturellement des diff rences des disciplines des pratiques des cat gories et donc des fronti res Des fronti res qui prot gent et d limitent la fois n cessaires et dangereuses trop souples elles m nent au chaos trop rigides elles figent le mouvement essentiel tout concept vivant Les deux extr mes sont viter afin d assurer une volution quilibr e des formes circonscrites par ces fronti res Par extension le raisonnement s applique aux d finitions d finir est aussi fixer des limites Parler de l art sans mentionner les sp cificit s des pratiques restreint la r flexion aux g n ralit s ontologiques et essentialistes D autre part une nomenclature trop fragmentaire est condamn e la technicit un manque de recul et de profondeur Le juste milieu est fuyant toujours mais il m rite la qu te Nous sommes dans une culture de cat gorisation crit Cherkaoui Pourtant il suffit de d placer l g rement ces cloisons de les largir ou de les resserrer pour cr er ainsi des espaces mieux d finis plus justes 2006 p 18 Les vraies fronti res entre les arts sont poreuses et mouvantes Elles tiennent plusieurs facteurs notamment aux conventions culturelles et sociales ancr es dans l histoire En ce sens elles rel vent de la construction voire de l artifice La r part
136. tres Le public jusqu alors bombard d informations verbales gagne un moment de r pit Enfin les six coups de l horloge l heure fatidique du th d clenchent un temps d arr t local une parenth se dans la parenth se 40 08 fig E 4 Quand tous les regards se figent sur le g teau le responsable du laboratoire fait un passage clair avec un br guet dans la main Il trempe sa montre dans le th en hommage au Li vre de mars mais aussi comme pour expliquer la suspension Son heure est elle la bonne Pourquoi le temps des interpr tes s arr te t il son arriv e Le ph nom ne s est d j produit une fois la culmination des et boum dans la premi re moiti de la pr sentation Le chercheur intervient alors pour d samorcer le chaos imminent et tout s arr te d un coup Le responsable du laboratoire semble chapper la chronologie de la conf rence au profit d un pr sent ext rieur celui du public Pourtant lui aussi est 14 Faites une petite pause disait Meyerhold Pour le spectateur elle signifie la fin d un morceau Qu il reprenne son souffle en m me temps que vous Ensuite commencera un nouveau morceau Il faut sentir la respiration du spectateur et savoir o il doit reprendre souffle Quand vous jouez bien le spectateur respire en m me temps que vous 2005 p 86 87 15 The March Hare took the watch and looked at it gloomily then he dipped it into his cup of tea and looked at
137. ue forme soit parfois salutaire l ensemble La sc ne du baiser dans Foi et la c r monie du th dans TDT sont au contraire bien anim es Il importe cependant que la parenth se d tonne de son environnement imm diat Son sujet sa forme sa cadence doivent produire un changement Dans un texte dramatique des pauses bien plac es permettent souvent d indiquer les passages importants Pris par surprise le spectateur peut perdre la notion du temps et se laisser absorber par le pr sent de la sc ne 17 La deuxi me partie du spectacle s ouvre sur un accouchement impossible la femme noire gardienne des bonnes m urs et de la foi jou e par un homme Darryl E Woods donne naissance un homme blanc 18 Riches d amour chanson de Guillaume de Machaut crivain et compositeur fran ais du 14 si cle 78 Enfin la parenth se n a pas besoin d tre longue Dans TDT apr s la culmination des et boum le conf rencier s arr te sur une phrase qu il r p te en boucle plusieurs fois Afin d viter la saturation il faut que des trous des appels d air creusent l exp rience esth tique pour permettre la respiration 1950 La forme correspond ici au propos car le changement de mode d nonciation est une parenth se en soi La r p tition sonne d j comme une alerte Entre temps les interpr tes essouffl s par leur course se r unissent derri re la chaise du conf rencier Fig E 3 En cadence avec la
138. uestion de la d route du sens et des sens est intrins que au mode de la conf rence performance L action peut appuyer le savoir mais elle peut aussi le d noncer 27 composition en vue d une ex cution Escoubas 1997 p 109 110 Qu il s agisse de l architectonique d une uvre de sa dynamique ou de ses composantes le mode de la partition semble appropri sa compr hension et sa r ception La notion de partition met en vidence plusieurs enjeux spatio temporels dans la pr sentation de l uvre Elle la rend aussi accessible aux sens engag s par la perception ces principes de pr sentation et d acc s Escoubas ajoute celui de d limitation qui tablit l existence d un avant un apr s un entour un dehors p 110 Ainsi la partition permet de situer et de pr senter l uvre afin de l ouvrir aux sens Elle r unit tous les l ments d un spectacle autant les moyens sc niques que les langages artistiques convoqu s notamment dans l esprit du performance score propos par Richard Schechner 1 3 1 Le mod le musical Pour voquer la partition il est difficile d chapper la pr gnance du mod le musical et de sa terminologie Au cours du XXe si cle la musique se m lange progressivement aux autres arts du temps le th tre la danse le cin ma qui partagent le m me besoin de structurer la repr sentation L id e de partition s panouit alors en dehors de la composition
139. un rapport mutuel de proximit et d exclusion d attraction et de r pulsion 2000 p 157 qui fait voluer les arts dans un climat d mulation o chacun initie tous les autres et les tient l cart de soi Monnier et Nancy 2005 p 113 22 La simultan it des arts est r currente dans le travail de Cherkaoui Intimement li es les pratiques convoqu es se c toient souvent dans un foisonnement d actions et de symboles concomitant Elles gardent pourtant leurs sp cificit s voire leur espace singulier Ainsi les musiciens de Foi par ailleurs tr s pr sents dans le spectacle sont isol s des danseurs Install s sur la passerelle c t jardin ils maintiennent une distance et une fronti re Un dispositif similaire revient sur le plateau de Myth le volet suivant de la trilogie Dans les deux uvres le clivage physique est embl matique du rapport entre la musique et la danse dont la rencontre survient seulement dans la mise en regard L ambivalence de leur interaction atteint son comble dans la sc ne finale de Foi qui pr sente un archipel d interpr tes dispers s dans l espace les uns debout sur d autres couch s au sol 1 25 20 Ces lots humains forment une communaut exemplaire unie dans les diff rences Deux musiciens s immiscent parmi les corps au sol et tournent ensemble tout en jouant une chanson chinoise d adieu C est alors qu une interpr te s installe sur la poitrine du luthiste Malgr la
140. un temps faible avant le temps fort qu on imagine RR p 9 Et Boum Et Boum et Boum et Boum retentit la voix de l acrobate dans TDT alors que ses figures s encha nent de plus en plus vite Ses complices la danseuse la chanteuse et les musiciennes tentent de suivre la cadence chacune dans sa case lumineuse 14 50 Le et rassembleur s tire pendant la pr paration l lan le boum vient marquer un arr t Il s agit d un hommage Fernand Schirren dont l enseignement du rythme s articule autour de ce bin me r v lateur qui s inscrit dans le sillon de la tradition de l arsis thesis grec Un couple ins parable le et boum lui sert analyser des s quences rythmique afin d en d gager le sens l image d une balle lanc e dans l air et suspendue un instant au sommet de sa trajectoire toute phrase se compose de mouvement et l l vation la continuit et de non mouvement boum la chute la r p tition Schirren 1996 Puisque la balle n a d autre choix que retomber l lan du et aura un aboutissement Ce et ne lie pas mais introduit un temps puls il propulse Si le syst me de Schirren est binaire ou ternaire comme la m trique classique il n exclut pas les d rogations la r gle La gr ce dont parlait Cage est aussi au rendez vous l improviste devan ant l instant attendu de tous comme on pose une tuile sur une tuile il r p te la peti
141. une boucle de r criture infinie en reprenant la comptine de Humpty Dumpty Si oui la chute du donateur du sens en devient elle moins fatale 13 Expression puis e chez Martin Heidegger immer schon Derrida 1992 p 312 314 72 Hiatus temporel entre avant et apr s le temps du toujours d j est un temps fronti re qui chappe aux cat gories communes pr sent pass futur Il n a ni commencement ni fin C est un hors temps un pr sent absolu Or n est ce pas aussi la niche privil gi e de l uvre d art Lorsqu une uvre parvient toucher juste le spectateur s avoue souvent perdu ne serait ce qu un moment en dehors de ses rep res chronologiques Pourquoi a t il du mal valuer le temps pass devant un tableau ou un roman passionnant La r ponse est sans doute complexe d autant plus que le cerveau humain est largement capable de garder l heure juste Toujours est il que la perception de l uvre mobilise les sens dans un temps parall le et que son pr sent est diff rent du pr sent quotidien Il y a un cart entre le temps des horloges et le temps de la conscience Au th tre le pr sent de la sc ne est aussi un hors temps Malgr une dynamique interne importante l objet sc nique est fig dans les rep res du quotidien Son cadre est d termin par la convention son cycle temporel est r gulier heure fixe d une dur e donn e etc Pourtant le spectacle se renouvelle
142. une logique interne et un rythme propre chacun Une fois de plus c est au spectateur qu il incombe de compl ter l ensemble la perception des diff rences de vitesse des d phasages des embrayages des hi rarchies est proprement le travail de mise en ordre logique et narratif de la mise en sc ne par le spectateur Celui ci devient donc le foyer de ce que Pavis appelle le m ta rythme p 311 Il 17 Bernard Dort introduit pour sa part la notion de polyphonie signifiante in La repr sentation mancip e Paris Actes Sud 1988 57 contribue la recherche du signifiant travers une nonciation unique des mat riaux textuels et paratextuels Le m ta rythme remplit ainsi un r le dramaturgique important 2 2 2 Polyrythmie En 1962 Gy rgy Ligeti compose le Po me symphonique pour 100 m tronomes Il s agit d un ensemble de cent m tronomes m caniques remont s l identique et ajust s des tempi diff rents entre 50 et 144 battements par minute Les m tronomes sont tous d clench s en m me temps mais s arr tent progressivement des moments diff rents selon leur vitesse respective les plus fougueux s puisent en premier Il y a donc un effet de ralentissement et un diminuendo continu tout au long de la pi ce Les cadences individuelles partant de cent deviennent de moins en moins nombreuses et de plus en plus perceptibles Plus le nombre d instruments qui s arr tent cro t
143. ur sa musique appelle toutes sortes de voies d approche travers le jeu l coute ou la lecture Bosseur 2006 p 165 Son parcours inspire et nourrit Stravinsky Cage Feldman Ligeti 15 Ainsi le d but du dialogue sur la calvitie chez un danseur classique se transforme peu peu en une histoire fun bre Justement devient enterrement magnifique c de une panique Premi re version Mais par exemple si un danseur classique tiens s il a un probl me de calvitie Ah tu sais ce que je faisais Justement Moi je faisais un truc magnifique Magnifique Quatri me version Mais si on te garde et t es un danseur classique tiens c est un probl me d hydrophysique Ah tu sais comme on roulait Justement Moi je faisais un saut magnifique Magnifique Cinqui me version Mais par exemple si un fossoyeur sans fric tiens s il fait quand m me des autopsies Ah tu sais ce qu il faisait Enterrement Moi j avais un trac une panique Une panique 31 Stockhausen qui leur tour explorent le potentiel paramusical gt de la partition Des codes novateurs transforment les apparences parfois jusqu oublier la vocation initiale de l entreprise de notation Si la partition est le lieu de la rencontre des arts son aspect visuel devient une extension de l organisation qu elle propose L espace plast
144. urs une phrase un manifeste un po me compose le potentiel rythmique de l uvre 43 Le rythme est en interaction constante avec le sens Il peut amplifier compl ter ou contredire le sens des mots Les jeux du rythme ne sont pas r serv s la po sie ni m me la litt rature en g n ral le langage quotidien abonde lui aussi d exemples loquents De plus en mati re de sens le rythme semble devancer les mots Il suffit d examiner le pr langage enfantin par exemple ou les onomatop es dont la forme est le seul garant de signification Tout se passe comme si le rythme disposition organisation de la signifiance tait une forme ant rieure du sens conclut Meschonnic CR p 115 En d coule l id e du rythme en tant que degr z ro du signifiant Belic 2002 p 139 Le sens fuit les mots crit Meschonnic Les mots ne sont que des passages du sens CR p 259 Du haut de son mur Humpty Dumpty en fait une d monstration exemplaire la suite de Benveniste Meschonnic revendique un langage lib r de l emprise du signe o chaque mot est indissociable de son contexte C est que la th orie des signes consid re le rythme comme une cat gorie formelle distincte du sens et inf rieure celui ci Pourtant lle rythme d borde la partition du signe CR p 715 comme le langage d borde la communication Bien avant de communiquer le propre du langage est d abord de signifier soulign
145. xion th orique 16 La partition ne se r sume plus un interm diaire destin s effacer derri re sa r alisation Bosseur 2005 p 125 L lan de Cage trouve des chos des d cennies plus tard dans de v ritables monuments de l art de la partition gt comme Unity Capsule 1976 de Brian Ferneyhough ou Death Waltz 1980 de John Stump voir App C 17 Voir le chapitre La notation partir des ann es cinquante in Jean Yves Bosseur Du son au Signe Histoire de la notation musicale Paris Alternatives 2005 p 102 132 et pour la danse Rosita Boisseau Panorama de la danse contemporaine 100 chor graphes Paris Textuel 2008 nouv d 32 L inspiration de la partition musicale conduit Klee d velopper la notion de peinture polyphonique Kandinsky pour sa part s aventure notamment dans quelques compositions pour la sc ne dont la premi re et la plus connue Sonorit jaune date de 1909 Il s agit d une suite de didascalies sans dialogues qui touchent au jeu th tral la musique au ballet la peinture C est une tentative de r ponse au Gesamtkunstwerk de Wagner qui Kandinsky reproche la superficialit des liens entre les arts et leur assimilation excessive La m me ann e voient le jour Sonorit verte et Noir et blanc pi ces jug es impossibles faute de rep res ancr s dans la r alit de la sc ne Ces sc narios abstraits du r gne de la couleur sont des amorces de
146. y Nou sur des rimes des ricochets et des quiproquos le texte de Carroll est la fois musical et th tral dans ses proc d s narratifs Autant la r flexion th orique que le travail de laboratoire pr alables TDT se sont nourris de diverses uvres de la sc ne contemporaine de la danse th tre l installation du th tre musical la conf rence performance Afin d viter l parpillement nous ne retenons que trois inspirations majeures Foi 2003 de Sidi Larbi Cherkaoui Basso ostinato 2006 de Caterina Sagna et Stifters Dinge 2007 de Heiner Goebbels Chacun de ces cr ateurs m riterait une tude approfondie tant leur pratique est riche et stimulante mais tel n est pas l objet de ce m moire Seuls quelques exemples ponctuels viendront appuyer nos propositions Chor graphe et danseur belge issu des Ballets C de la B Sidi Larbi Cherkaoui d veloppe assez rapidement sinon une signature au moins une approche de la cr ation qui lui vaut une renomm e internationale D une fa on ou d une autre ses spectacles traitent des diff rences de race d appartenance de croyance d ge et de leur dialogue Il travaille avec des interpr tes qui viennent des contextes sociaux culturels vari s Les rapports l identit et l h ritage sont donc au c ur de sa d marche La personnalit la sp cificit mais aussi l expertise artistique de chacun contribuent tisser des liens inusit s parmi les coll

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