Stephen Holmes En cas d`urgence
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1. gles sans tre oblig de fournir des raisons plausibles de s expliquer avant un tribunal ind pendant Un tel ex cutif serait un pouvoir illimit ou non constitutionnel qui op re n cessairement hors la loi Un exemple d une r gle constitutionnelle ou de deuxi me ordre qui plut t que de lier les mains du gouvernement peut consolider sa position est la pr somption d innocence Nous allons discuter ce sujet avec plus de d tails dans la quatri me conf rence En effet nous pouvons observer les cons quences qu il y a ignorer la pr somption d innocence et le souci des erreurs d identit Guantanamo o des centaines de d tenus ont pass sept ans en d tention administrative sans que les autorit s qui les d tiennent n aient eu expliquer pourquoi En contournant l imp ratif d une audience individualis e m me sommaire c est dire en manquant de choisir avec un minimum de soin parmi les individus livr s contre argent aux autorit s am ricaines en Afghanistan et ailleurs le gouvernement des Etats Unis jexag re pour bien me faire comprendre a envoy les 700 premi res doublures lumi re au centre de d tention et d interrogatoire de Cuba d pensant mauvais escient les capacit s limit s du pays pour des individus de valeur strat gique minimale ou nulle Et Guantanamo n est pas le seul cas o jeter par dessus bord les r gles traditionnelles pour un soi disant avantage tactique s est r v l contre2. cutif Les urgences hospitali res sont urgentes m me quand elles sont parfaitement habituelles Des terroristes qui ont acc s des armes de destruction massive en revanche pr sentent une menace qui va se poursuivre pendant des d cennies peut tre m me plus longtemps Une menace de ce genre n est pas une urgence Apr s tout jusqu pr sent aucun attentat terroriste utilisant une arme nucl aire n a t tent avec succ s C est pour cela qu on parle de la guerre contre le terrorisme comme d une guerre pr ventive ou pr emptive Il ne faut pas sous estimer la menace terroriste Mais elle n est pas urgente au sens d un v nement soudain comme par exemple un b timent en feu qui demande v ritablement des d cisions r flexes sans possibilit de discussion ou de consultation Si une grande ville am ricaine tait frapp e par une arme nucl aire nous affronterions un cas massif d urgence du type b timent en feu o l importance des protocoles d urgence pratiqu s d avance pour diminuer l impact de la catastrophe serait vidente G rer les risques du terrorisme nucl aire demande des mesures suivies pour prot ger du vol les mat riaux nucl aires par exemple pas des arrangements court terme G rer les risques du terrorisme nucl aire demande des mesures suivies pour prot ger du vol les mat riaux nucl aires par exemple pas des arrangements court terme Ceci est faisable pr cis ment parce que
3. dites peuvent tre improvis es Autrement dit il ny a aucune raison valide d affirmer en tout cas pas de mani re g n rale que l importance de la flexibilit exclut la d pendance aux r gles en cas de urgence et cela inclut les urgences de s curit nationale L improvisation n est pas seulement compatible avec les r gles Sans les r gles connues l avance l improvisation serait difficile ou peut tre impossible Ceci est tout fait vident si on pense un instant la grammaire Le respect des r gles de la grammaire loin de r duire notre capacit communiquer des id es nouvelles et m mes choquantes l augmente Consid rez aussi le jazz o l improvisation surprenante est toujours v cue comme une d viation d une attente ou d une esp rance pr existante L exemple de la salle d urgences nous permet aussi d approfondir notre compr hension des crises de s curit nationale en mettant en lumi re la distinction cruciale mais parfois n glig e entre les menaces nouvelles et les menaces urgentes Un danger peut tre sans pr c dent sans rendre n cessaire pour autant qu on y r ponde en un clin d il A l inverse les menaces urgentes qui sont apparues de mani re r p t e dans le pass peuvent tre g r es en suivant des protocoles qui sont devenus automatiques et routiniers En effet on peut accepter l id e de deux concepts d urgence mais pas dans le sens des d fenseurs du pouvoir illimit de l ex
4. quate il en va rarement de m me dans les cas de menace subite la s curit nationale De plus les sp cialistes des traumatismes rencontrent toujours les m mes probl mes d veloppant ainsi des m thodes formalis es comme d boucher la trach e art re d une victime d accident avant d emp cher la blessure de saigner des r gles qui si on les suit la lettre sauvent des vies Quand des situations d urgence successives pr sentent des similarit s qui demandent des traitements similaires il est pertinent de suivre les r gles g n rales M me si elles peuvent se r v ler tre des situations extr mement stressantes les urgences hospitali res sont de ce type Parce qu elles sont peut tre impr visibles mais qu elles ne sont jamais sans pr c dent on peut les g rer en suivant les r gles la lettre D un autre c t les urgences de s curit nationale plus particuli rement la menace d une attaque nucl aire du type du 11 Septembre sont compl tement diff rentes Ceci semble tre ce que les officiels qui prennent le programme antiterroriste pour un programme de pouvoir ex cutif discr tionnaire voudraient nous faire croire L analogie est certes un peu approximative mais cela veut il dire que nous n avons rien apprendre d utile qui pourrait s appliquer avec quelques adaptations la gestion d urgences nationales engendr es par le terrorisme jihadiste Dans le cadre de l antiterrorisme la raison la p
5. un membre de la minorit Uigur de Chine occidentale tait l gitimement d tenu en tant qu ennemi combattant Le pouvoir discr tionnaire pr sidentiel dans des situations d extr me secret est une porte ouverte aux influences illicites des petites cliques au sein m me de la branche ex cutive cette observation vaut la peine d tre mentionn e ici Bien qu un certain degr de secret soit indispensable pour mener bien la lutte contre le terrorisme il n est jamais sans risque d avoir recours au secret puisque cela accro t la probabilit que les d cisionnaires se lancent sur la mauvaise piste sur la foi de mensonges et de demi v rit s Le probl me des renseignements secrets fournis par des informateurs ayant des intentions cach es et accept s na vement cause d un manque d esprit critique sur la valeur de preuve de rumeurs est un probl me s rieux La strat gie qui consiste s emparer de l tat par ces moyens subtils pourrait tre appel e l effet Chalabi Le devoir du gouvernement de r v ler ses sources quels qu en soient les risques prot ge les employ s de l ex cutif non seulement de leurs propres certitudes fauss es mais aussi des mystifications perp tr es par des factions internes et les services secrets trangers ou par les terroristes eux m mes dont les int r ts ne co ncident pas avec ceux de la s curit nationale am ricaine C est pour cela que le devoir de transparence ne doit pas
6. un sc nario tabli et r p t avec soin la premi re infirmi re lisant dans son dossier Alexa Holmes Groupe A tandis que la seconde lisait sur le sac Groupe Le personnel hospitalier y compris le personnel param dical des services d urgences est bien conscient des risques graves qu implique une attente excessive Bien qu il comprenne l imp ratif d agir imm diatement et sans h sitation il prend syst matiquement un temps pr cieux pour suivre des protocoles qui lui ont t inculqu s et qu il a r p t l avance Pourquoi Pour minimiser le risque d erreurs fatales mais tout fait vitables commises sous la pression psychologique peu supportable du moment Mon but dans cette deuxi me conf rence est de d m ler ce que sugg re cette exp rience hospitali re courante des implications qui peuvent nous aider plus particuli rement concevoir une r ponse plus efficace ce que le Pr sident George W Bush lorsqu il tait au pouvoir s est ent t appeler une situation d urgence nationale DEUX CONCEPTS D URGENCE Les m decins et les infirmi res du service d urgence ne sont pas les seuls professionnels qui confront s une crise impr vue limitent leur propre libert d improviser et renoncent se fier leurs intuitions pour ob ir strictement aux r gles et aux protocoles qui leur donnent une sorte de sang froid artificiel Les proc dures d vacuation d urgence
7. Stephen Holmes En cas d urgence Comment ne pas comprendre la guerre contre le terrorisme Deuxi me Conf rence Coll ge de France 11 mars 2009 Deux concepts d urgence La semaine derni re je vous ai parl de l id e d un arbitrage obligatoire entre la libert et la s curit dans la guerre contre le terrorisme J ai montr que cette id e tr s r pandue obscurcit plus qu elle n claire et qu il faut la remplacer par l id e beaucoup plus r aliste d un arbitrage obligatoire entre la s curit et la s curit Cette id e a cet avantage parmi d autres de nous permettre de responsabiliser les autorit s politiques pour leurs choix risqu s Aujourd hui je vais poursuivre mon projet de d manteler une id e ou m taphore qui a mon avis nous emp che de consid rer d une mani re claire et sens e la guerre contre le terrorisme Pour d fendre l id e que la branche ex cutive peut contrer de mani re plus efficace une menace terroriste si elle est par exemple d livr e de l Habeas corpus et de la Convention de Gen ve les tenants d une ind pendance maximale de l ex cutif pr tendent que le pouvoir a les mains li es par la loi Parce que les r gles lient les mains de l ex cutif et le g nent en temps de crise on doit les assouplir les rel cher s en d barrasser Parce qu ils interdisent des pratiques qui permettraient de vaincre l ennemi terroriste les r glements et les trait s qui en temps normal nous enc
8. ad quate de certaines r gles dans certaines situations ne justifie pas qu on repousse en bloc toutes les proc dures d urgences Le fait que les r gles jouent un r le positif crucial dans les crises et les calamit s est assez illustr par l exemple des protocoles des urgences hospitali res et il est facile d expliquer pourquoi Les r gles n ont pas toujours un r le d entraves elles peuvent aussi se r v ler tre des directives stabilisatrices elles nous permettent de nous concentrer sur notre but et de garder l esprit notre objectif long terme ainsi que les dangers collat raux qui autrement pourraient nous chapper dans l agitation de la crise Pour utiliser un vocabulaire plus philosophique ou quasi philosophique on peut dire que les r gles introduites pour am liorer les performances des pompiers des ambulanciers et des pilotes d avion lorsqu ils perdent un r acteur sont des r gles r gulatrices qui sont en m me temps des r gles constitutives d une r action sens e et de sang froid De telles r gles sont aussi des exemples clairants du rule utilitarianism l utilitarisme des r gles ou de la th se selon laquelle il est souvent plus efficace sur le long terme d adopter l action dict e par les r gles que de chercher pour chaque cas l action particuli re pour la situation particuli re La plausibilit de cette th se dans les cas d urgence o le temps de penser et de consulter nous manque est
9. dans une crise qui se prolonge ainsi le personnel en charge de la s curit nationale a amplement le temps de penser et de repenser de faire des projets et de les r viser En peignant le terrorisme actuel comme une urgence les d fenseurs du pouvoir discr tionnaire de l ex cutif amalgament l urgence et la nouveaut C est une erreur intellectuelle de grande port e Mais cela donne en m me temps aux critiques du pouvoir discr tionnaire de l ex cutif la possibilit de se faire entendre Si les urgences classiques de type maison en feu ou urgences hospitali res si ces cas n cessitent des r actions de r flexe appris de r flexe entra n guid par des r gles alors se d barrasser de ces r gles en cas de lutte contre le terrorisme semble beaucoup moins justifi et peut tre mis en question Dans les crises o le temps est le facteur primordial et la consultation difficile ou m me impossible il est important pour ceux qui y r agissent de suivre des r gles de premier ordre des r gles de conduite de comportement afin de faciliter une action corrective prompte et coordonn e Dans les crises qui ne sont pas soudaines et ph m res mais qui au contraire durent et laissent le temps la r flexion et la consultation d experts il est essentiel de se reposer sur des r gles de second ordre des proc dures de d cision qui sont dict es pour encourager ceux qui vont faire des choix et prendre des d cis
10. des zones c ti res lors de catastrophes m t orologiques ou dans les centres urbains lors d attaques terroristes nous fournissent d autres exemples clairs De la m me mani re faire vacuer un pompier inconscient par la fen tre du troisi me tage d un immeuble en flammes ne s improvise pas mais se fonde sur l adh sion unanime une proc dure pr tablie rendue pratiquement instinctive par l entra nement et la r p tition Et comme tous les voyageurs le savent si la pression en cabine baisse on doit s assurer que l on a bien attach son masque oxyg ne avant d aider l enfant qui nous accompagne Tout manuel d instructions destin nous pr parer affronter des situations d urgence impr vues insiste sur une s rie de r gles soigneusement con ues l avance Cette adh sion des r gles pr existantes en cas de situation d urgence est elle pertinente lorsqu il s agit de la gestion efficace d urgences mettant en jeu la s curit nationale Cette question est pos e avec une rh torique dramatique fr quemment utilis e lorsque Bush tait pr sident pour faire taire les critiques du pouvoir effr n dans la lutte contre le terrorisme quiconque pr f re se plier des r gles l gales h rit es comme par exemple l Habeas Corpus ou la convention de Gen ve sous estime grandement le danger auquel nous sommes confront s Pour faire face la menace terroriste l efficacit exige de la flexibilit et la fle
11. ha naient doivent tre suspendus pour la dur e de la crise Pour viter que le Pr sident et ses collaborateurs ne soient trangl s par la loi surtout en p riode de danger grave les r gles restrictives doivent tre remplac es par la concession d un pouvoir discr tionnaire immense l ex cutif c est dire par des lois d habilitation qui transforment le Congr s et les tribunaux en observateurs passifs et mal inform s de l action unilat rale de l ex cutif Cet arrangement semble logique mais seulement si ses partisans ont raison de soutenir que le pouvoir sans limite est par d finition un pouvoir efficace Je doute qu arguments et preuves suffisent mettre en question une fa on de voir les choses aussi enracin e dans la culture populaire C est pourquoi j ai plut t d cid d introduire une contre analogie Peut tre qu une analogie peut assouplir l emprise d une autre sur les esprits Il y a plusieurs ann es ma fille qui va tr s bien maintenant s est retrouv e dans le coma apr s une chute grave Au moment crucial deux infirmi res l ont emmen e d urgence dans une chambre d h pital pour lui faire une transfusion L une d elle tenait le sac en plastique contenant le sang transfuser et l autre son dossier m dical La premi re a r cit les mots sur l tiquette du sac Groupe Sanguin et l autre a lu dans le dossier Alexa Holmes Groupe A Puis elles ont chang leurs r les suivant
12. herchant obtenir une r duction de peine qui tentent d utiliser le pouvoir d Etat des fins illicites Ainsi la proposition du Juge Posner que les crit res de la preuve soient abaiss s quand les menaces la s curit augmentent sous estime les risques pour la s curit associ s la cr dulit du gouvernement face des l ments d sinformateurs strat giquement dissimul es ou accidentellement produits Oui les terroristes peuvent parfois r colter les b n fices du syst me de droit am ricain mais ce n est qu une partie de l histoire Les terroristes peuvent aussi tirer avantage de la cr dulit des employ s la s curit nationale de leur incapacit faire la diff rence entre des informations fiables et des informations douteuses apr s qu ils se sont eux m mes d barrass s des r gles d velopp es sur le terrain justement pour leur permettre de faire cette distinction De cette mani re lever les contraintes traditionnelles qui portent sur le pouvoir ex cutif aide les organismes mal intentionn s manipuler ce pouvoir ex cutif dans des buts trangers sinon totalement contraires la s curit nationale Des preuves sugg rant que les services secrets chinois avaient d lib r ment fourni des informations fausses des officiels cr dules de la branche ex cutive am ricaine ont conduit un panel de trois juges de la Cour d Appel du District de Columbia annuler la d cision du Pentagone qu
13. improvisation en situation de crise cette analogie attire notre attention sur les dangers possibles qu il y a se d barrasser des r gles lors d une crise et nous rappelle que ces r gles peuvent augmenter notre capacit r soudre le probl me m me en des circonstances p rilleuses et pr cis ment parce qu elles sont contraignantes
14. ions examiner les gains et les pertes ainsi que les alternatives possibles aux plans d action propos s En m decine une r gle de premier ordre typique serait toujours se laver les mains avant de pratiquer un acte chirurgical et une r gle de second ordre serait toujours demander une seconde opinion avant d entreprendre une op ration importante Les r gles de second ordre comme celle ci sont parfaitement applicables dans un contexte de contreterrorisme comme le n tre Par exemple m me si nous ne pouvons sp cifier l avance quand le gouvernement sera autoris crouer une personne sans porter plainte contre lui nous pouvons sp cifier l avance les proc dures que le gouvernement doit suivre pour augmenter les chances qu une telle d cision soit raisonnable et r visable Dans la th orie constitutionnelle on peut distinguer trois formes de flexibilit compatibles avec la force obligatoire des r gles de premier ordre On peut r viser ces r gles les interpr ter ou refuser de les appliquer en fournissant une raison plausible Ces trois formes de flexibilit sont normalement divis es gr ce aux r gles de deuxi me ordre que sont les constitutions lib rales entre le pouvoir l gislatif le pouvoir judicaire et le pouvoir ex cutif La tyrannie par contre peut se d finir comme un syst me qui met les trois formes de flexibilit dans les m mes mains ou qui donne l ex cutif le pouvoir de violer les r
15. ions La r gle est inflexible mais n anmoins pragmatique elle n est ni dogmatique ni moraliste Elle comprend l observation empirique que m me les membres d un personnel professionnel lorsqu ils sont r duits leur jugement personnel ne vont pas se comporter syst matiquement comme la situation l exigerait De m me elle illustre le clich particuli rement pertinent en contexte de lutte contre le terrorisme que limiter les options disponibles lors d une crise peut tre bon ou mauvais selon ce que les d cisionnaires d urgence que l puisement peut pousser vouloir prendre des raccourcis feront avec toute la latitude qu on leur donne ou qu ils se donnent Les tenants de la discr tion ex cutive voquent syst matiquement le besoin imp ratif de flexibilit pour expliquer pourquoi le contreterrorisme ne peut pas tre men dans le respect de la Constitution et des lois Mais les r gles g n rales et l improvisation qui s attache une situation sp cifique loin d tre mutuellement exclusives sont parfaitement compatibles Appliquer m caniquement un protocole con u pour emp cher une infirmi re troubl e de transfuser le mauvais groupe sanguin son patient n emp che pas cette m me infirmi re d improviser des solutions uniques aux probl mes uniques de ce patient lors de son traumatisme Les protocoles d urgence fournissent un espace stabilisant partag par les coll gues gr ce auquel des solutions in
16. l urgence elle m me Ceci est fascinant parce que dans les services hospitaliers l urgence est la raison principale d viter le pouvoir discr tionnaire du personnel et de compter sur les r gles les infirmi res suivent un protocole labor d avance parce que lorsqu un d sastre survient elles ont peu de temps pour penser et consulter En plus de diminuer le risque d erreur vitable les r gles qui gouvernent ces r ponses d urgence r duisent consid rablement les co ts de d cision et de coordination Elles ont galement une fonction rassurante ce qui est d une valeur pratique immense lorsque les enjeux sont consid rables et le temps limit Comme je l ai d j mentionn g rer plusieurs situations en suivant des r gles g n rales n est possible que si les situations en question pr sentent des similitudes observables Suivre des r gles g n rales pour les transfusions semble logique car du point de vue de la pratique m me de la transfusion les patients sont tous les m mes Mais ce n est qu une partie de la question Une autre raison pour laquelle des r gles g n rales sont applicables dans des cas comme ceux ci est que les gens qui r agissent aux situations d urgence ont tendance r pondre de mani re pr visible le stress les paralyse les immobilise ou les fait paniquer Nous faisons tous des erreurs co teuses et parfois irr parables quand nous sommes sous pression Sous l emprise d une menace imminente n
17. lus fr quemment invoqu e pour rejeter les r gles h rit es est que la menace terroriste r v l e par le 11 septembre a boulevers tous les paradigmes existants Bien s r l infiltration et le sabotage ne sont pas nouveaux mais l ventualit que des armes nucl aires tombent dans les mains de groupes terroristes anti am ricains a pulv ris les deux cadres l gaux h rit s celui du droit criminel et celui du droit de guerre avec lesquels le syst me politique moderne a appris traiter les violences domestiques et internationales La nature in dite du terrorisme jihadiste implique que nous devons l affronter hors la loi dans une zone o les lois sont muettes dans les chambres de torture dans les camps comme Guantanamo o les prisonniers peuvent tre d tenus ind finiment sans aucune possibilit d tre disculp et dans les guerres pr ventives comme l invasion de l Irak un pays qui n a pas attaqu l Am rique En gardant tout cela l esprit on peut reposer notre question initiale le r le crucial des r gles dans les situations d urgence ordinaires n a t il rien de substantiel nous apprendre sur la contribution potentielle du jugement en bonne et due forme du constitutionalisme et du droit international la gestion prudente des urgences nationales REGLES EN CAS D URGENCE L argument sans cesse invoqu en faveur d un pouvoir discr tionnaire de l ex cutif en temps de crise est habituellement
18. nniers de leur propre raideur psychologique et motionnelle de leur r ticence s adapter aux situations nouvelles de la lenteur de leurs r flexes ou de leur ma trise incompl te de la situation seraient incapables de s en sortir Dans le domaine de la science pour prendre un exemple diff rent mais proche les tests en double aveugle peuvent tre vus comme des limites pos es la libert des scientifiques pris individuellement mais ils aident le syst me scientifique s adapter la r alit des ph nom nes naturels qui ne sont jamais compris que partiellement Comme dans les urgences hospitali res les crises de s curit nationale doivent tre g r es par un personnel qualifi Pour aiguiser la capacit des quipes d urgence faire face efficacement des crises inattendues ce personnel doit s entra ner l avance appliquer des r gles d taill es et ex cuter des protocoles explicites En d autres mots dans des situations d urgence les r gles sont sup rieures aux d cisions discr tionnaires parce que contrairement ces derni res les r gles peuvent tre r p t es l avance par des unit s op rationnelles De plus le personnel actuel peut transmettre les ficelles du m tier aux nouvelles recrues en les introduisant leurs proc dures de routine liminant ainsi le besoin d une instruction de derni re minute et lib rant leurs sup rieurs pour qu ils se concentrent sur les d fis stra
19. opres compulsions psychologiques et r flexes comportementaux Dans un chapitre intitul Organisation de la prise en charge des urgences j ai trouv cette phrase clairante Le patient qui n cessite la prise en charge la plus rapide n est pas forcement rep r facilement alors que dans le m me temps certains cas peuvent focaliser l attention et parasiter le fonctionnement du service tats d agressivit ou d agitation famille revendicative Ch Prudhomme Ch Jeanmougin B Kessler Urgences et r animation Maloine 2008 p 3 Pour identifier les urgences r elles et les s parer des fausses alertes les urgentistes doivent apprendre ignorer leur tendance motionnelle donner plus d attention aux patients agressifs La le on implicite ici pour les responsables de contreterrorisme n est pas triviale Une raison importante de garder au moins certaines des r gles pour les urgences de courte dur e aussi bien que pendant les crises plus longues est que ces r gles ont t travaill es et retravaill es elles ont volu avec le temps pour aider le personnel d urgence contrebalancer les risques de l attente et de la pr cipitation Les ambulanciers par exemple n ont pas toujours le temps d estimer les co ts et les b n fices de toutes les proc dures possibles Mais la situation n est pas d sesp r e parce que les r gles re ues raffin s par approximations successives travers le temps on
20. our leur rappeler la complexit de l environnement de la menace qui leur vitent d tre trop concentr s sur le seul danger visible qui les alertent de complications involontaires engendr es par leur propre intervention improvis e et qui r v lent les erreurs potentiellement mortelles avant qu il soit trop tard pour les corriger Les r gles suivre en cas d urgence sont sous tendues par la reconnaissance du fait qu un groupe d hommes confront s une menace et d pourvus de marche suivre ne r ussit pas toujours s adapter avec la rapidit et la coordination d sir es une situation dangereuse et d routante En p riode de crise l absence d instructions claires crites l avance a g n ralement pour cons quence la paralysie stup faite et non l action efficace Les protocoles d urgence r v lent que les r gles ne sont ni le seul ni m me le principal facteur d inaction dans le comportement humain On conna t tous l emprise du r flexe de l habitude qui brouille la prise de conscience des options possibles Les racines psychologiques de l obsession de l id e fixe de la capacit cognitive limit e d interpr ter les signaux de danger et du dogmatisme sont galement profondes On peut soutenir qu avec le temps une s rie de r gles a volu pour augmenter la capacit des tres humains agissant de concert s adapter avec souplesse un environnement mena ant complexe dans lequel les individus priso
21. ous pouvons tous manquer de voir un autre danger mortel qui survient dans notre angle mort la nature faillible de l homme aggrav e par l urgence on peut ajouter la r ticence bien humaine elle aussi admettre ses erreurs et faire les ajustements n cessaires au bon moment Ces consid rations nous fournissent une raison de penser que les pratiques d urgences hospitali res peuvent contenir d importantes le ons pour la gestion d urgences d chelle nationale Les tenants du pouvoir discr tionnaire de l ex cutif dans la lutte contre le terrorisme demandent souvent comment les r gles appliqu es dans des situations connues peuvent guider notre r action face une menace inconnue et sans pr c dents Une des r ponses cette question est que la situation des Etats Unis apr s le 11 Septembre bien qu in dite n est pas totalement sans pr c dent Un des facteurs qui a affaibli plusieurs reprises l efficacit du gouvernement dans le pass et lors de situations d urgence reste le m me nos imperfections motionnelles et cognitives une faiblesse bien trop humaine Confront s une menace nouvelle ceux qui y r pondent doivent abandonner les r gles qui les emp chent de r agir de la mani re la plus ad quate et la plus efficace D un autre c t il ne faut pas n cessairement passer outre les pr cautions auxiliaires r gles protocoles pratiques et institutions qui ont surv cu l exp rience p
22. proc s La prime g n reuse offerte aux forces de l Alliance du Nord et aux gardiens de la fronti re pakistanaise pour la capture de terroristes a visiblement cr un effet pervers d incitation La probabilit que de tels paiements encourage les chasseurs de primes duper les Am ricains sans exp rience en pr tendant que les captifs qu on leur livrait taient des membres d Al Qaeda ou des Talibans a sans doute t n glig e par les d cisionnaires au moment o le gouvernement a durci sa position Ce malheureux pisode attire notre attention sur les r gles et les pratiques comme par exemple le droit de confrontation accord dans les proc s criminels et civils pour d courager les t moignages et les preuves d termin es par des intentions cach es Loin d entraver le gouvernement des proc dures comme celle ci ont r sist l preuve du temps parce qu elles aident tablir les faits de l accusation Les r gles con ues pour prot ger la proc dure judiciaire de la malveillance de certains t moins r v lent aussi que des lois qui gouverneraient le comportement des responsables officiels loin de paralyser le gouvernement pourraient en fait le renforcer Habilitantes et non affaiblissantes ces r gles lib rent le gouvernement des tentatives de manipulation par des individus rancuniers et sournois voisins courrouc s amants d laiss s employ s vindicatifs ou encore informateurs avec un dossier criminel c
23. productif Comme l illustrent de mani re exemplaire les personnages d Othello et d Tago les d tenteurs d un pouvoir pr constitutionnel et de ce fait l galement illimit sont particuli rement vuln rables la manipulation et la d sinformation Dans le contexte actuel les tenants d un largissement quasi monarchique du pouvoir discr tionnaire du pr sident ont tendance sous estimer ce co t particulier de l action exp ditive et secr te Non seulement cela va l encontre des droits individuels mais un abaissement des crit res de la preuve peut la fois endommager la s curit nationale en encourageant les menteurs saturer le syst me de fausses pistes et d courager les honn tes gens de rendre compte de ce qu ils ont observ Si les autorit s commencent envoyer les suspects dans des camps de prisonniers o ils sont gard s incommunicado sans v rifier les pr tendues preuves les autorit s incitent involontairement des t moins malveillants ou int ress s pulluler pour porter de faux t moignages On peut appeler a l lasticit des r serves d informateurs ou de d lateurs ayant des intentions cach es des arri res pens s Bien au contraire les gens bien intentionn s ont tendance h siter faire part de leurs observations d une activit suspecte pr s de chez eux de peur qu un voisin innocent soit incarc r pendant des ann es suite un malentendu qui aurait pu tre dissip au
24. r y r pondre Devrions nous g rer cette menace selon les r gles d j en place et si oui lesquelles ou avec une combinaison de r gles et de d cisions discr tionnaires Et comment devons nous organiser le processus de prise de d cision pour augmenter nos chances de trouver une r ponse ad quate ces questions Gr ce sa remarquable capacit de faire les choses de mani re exp ditive et en secret le pouvoir ex cutif est habituellement vu comme le plus m me d agir en cas d urgence Mais faire les choses de mani re exp ditive et en secret nest peut tre pas l atout majeur pour valuer la gravit d une menace nouvelle ou pour analyser ses caract ristiques encore impr cises avec un esprit critique Les menaces la s curit nationale dont le gouvernement Obama a h rit es restent immens ment complexes et en constante volution Agir de mani re efficace dans un environnement de menace comme celui l pr suppose d analyser strat giquement les priorit s et les alternatives M me si les avantages d une action secr te et exp ditive l emportent sur les inconv nients quand les mesures de s curit nationale sont mises en vigueur les inconv nients d une m me action secr te et exp ditive d passent probablement ses b n fices quand ces mesures de s curit nationale sont d cid es Il est bien possible que ceux qui aiment g n raliser dans un style flamboyant dans la guerre contre le terrori
25. sme les lois sont et doivent tres muettes soient juste en train de m langer les lois et les proc dures en g n ral avec ces quelques d tails techniques qui selon eux permettent des escrocs patent s d chapper une punition m rit e De mani re plus dramatique encore les tenants d un pouvoir ex cutif discr tionnaire sans limites s expriment parfois comme si les lois faisaient partie d un complot labor pendant l apr s Watergate destin paralyser les patriotes am ricains qui sont pour une d fense nationale forte Lorsqu ils tentent d lever le d bat sur le plan philosophique les d fenseurs de l action discr tionnaire de l ex cutif ont tendance parler de la loi comme Nietzsche parle du christianisme comme si c tait un bon tour que les faibles avaient jou aux forts Ils vont jusqu sugg rer dans le m me esprit qu ob ir aux lois restrictives comme celles qui interdisent le gouvernement de se reposer sur des preuves circonstancielles ou des rumeurs manifeste une tendance la soumission et la faiblesse et encourage l ennemi Par contraste un pouvoir ex cutif qui dans un geste ostentatoire brise les cha nes qui le retenaient va selon eux inspirer une peur salutaire chez les alli s comme chez les ennemis L analogie de la salle d urgences nous offre un antidote utile une telle image de l apoth ose de la tendance discr tionnaire extral gale Sans nier les avantages potentiels de l
26. t giques Ainsi il serait peu judicieux pour un commandant sur le terrain de dire ses troupes qu aucune r gle ne s applique au traitement des prisonniers de guerre ennemis S il transmettait le message tout est permis il perdrait rapidement le contr le de son arm e L importance qu il y a entra ner discipliner et coordonner le comportement de ceux qui r pondent aux urgences de premi res lignes renforce le soup on que les r gles peuvent tres tout aussi cruciales pour g rer les crises de s curit nationale que pour traiter les situations de vie ou de mort dans les h pitaux Les crises m dicales peuvent aussi nous aider surmonter le pr jug que les r gles absolues parce qu elles r duisent la flexibilit tactique sont forc ment nuisibles en cas d urgence Pour comprendre ce qui est occult par cette demi v rit il suffit de songer la r gle d or que nos deux infirmi res ont appliqu e avant d entrer d urgence dans la chambre toujours se laver les mains Cet imp ratif est cat gorique Il n admet aucune exception Pour la question de se laver les mains aucune discr tion aucune d cision personnelle n est permise aucune excuse n est accept e ignorer la r gle manquer de la suivre serait suicidaire Fond sur des constantes observ es dans la nature l imp ratif de se laver les mains avant une intervention m dicale r duit le co t des erreurs aussi bien que le co t des d cis
27. t d j pris en consid ration une telle balance Dans la salle d urgences la survie du patient peut tre compromise de plusieurs mani res agir trop vite est tout aussi risqu qu agir trop lentement Les protocoles des urgences codifient et transmettent des le ons distill es par des successions d exp riences multiples face des ventualit s diverses aidant les personnels d urgence de premi re ligne peser les risques en jeu m me quand la contrainte temporelle leur laisse peu de temps pour se consulter et r fl chir Bien s r toutes les urgences ne sont pas les m mes M me si les d cisions discr tionnaires sont abominables dans certaines situations d urgence d autres sont sans doute g r es au mieux par une combinaison de r gles et de d cisions individuelles M me si l on accepte la classification fausse mais commune du terrorisme nucl aire comme urgence il nous reste d cider de quel type d urgence il s agit Est ce le type d urgence qui permet au gouvernement de r crire radicalement ou de m priser totalement des r gles contraignantes Ceci devrait tre une question importante surtout pour ceux qui insistent sur le fait que cette menace est sans pr c dent C est justement parce qu elle est sans pr c dent et que ses contours sont obscurs que nous ne savons pas quelles r ponses seront les plus efficaces pour la contrer et que nous ne sommes pas s rs de combien de temps il nous faudra pou
28. tre d nigr unilat ralement comme le seul obstacle un contre terrorisme efficace Somme toute une visite aux urgences nous aide remettre en question les suppositions fausses qui d forment malheureusement les d bats actuels sur le contreterrorisme Les infirmi res qui travaillent dans le service d accueil des salles d urgences par exemple sont entra n es s parer rapidement les urgences r elles des urgences ressenties ou m mes simul es Personne ne songerait laisser cette t che distinguer les urgences r elles des urgences simul es au libre choix des infirmi res sans leur donner des protocoles formalis s suivre De plus l exp rience des urgences m dicales permet de clarifier le paradoxe de l urgence L extr me urgence d une menace exige l adh sion des r gles pr existantes ne serait ce que pour permettre aux urgentistes qui ne disposent pas du temps de r fl chir de coordonner leurs actions rapidement et efficacement De plus quand elles ont t prouv es par le temps et des g n rations d urgentistes qui ont eux m mes appris de leurs erreurs les r gles non n gociables peuvent parfois se r v ler plus efficaces plus pragmatiques et adaptatives que des d cisions discr tionnaires et non surveill es Enfin les r gles appliquer en cas d urgence peuvent accro tre de mani re significative la flexibilit du personnel op rationnel en situation de crise en les lib rant de leurs pr
29. vidente Le principe selon lequel les r gles ne jouent pas toujours un r le de contraintes g nantes se laisse facilement appliquer la lutte contre le terrorisme Du moins c est la le on fortement sugg r e par le comportement du pouvoir ex cutif entre 2001 et 2008 alors qu il n tait pas contr l par la constitution Quelques unes des erreurs les plus flagrantes qui ont t faites cette p riode nous m nent directement cette pr sidence incontr l e ce syst me d cisionnaire monarchique et donc potentiellement arbitraire qu aucun pays ne peut se permettre d avoir surtout quand il est confront des menaces graves obscures et voluant rapidement Que diraient ceux qui d fendent un gonflement excessif des pouvoirs d urgence du pr sident apr s le 11 Septembre propos de l exemple des urgences o le jugement personnel est condamn et l urgence elle m me rend pr f rable qu on op re selon les r gles prescrites D abord sans doute ils en rejetteraient la pertinence Nous sommes en pr sence de deux types d urgence diraient ils et nous n avons rien apprendre sur la mani re dont les responsables de la s curit nationale doivent traiter les urgences de s curit nationale en observant comment des responsables de s curit m dicale traitent des urgences m dicales Dans le cas des urgences m dicales qui surviennent de fa on brutale et inattendue diraient ils il n y a qu une r ponse ad
30. xibilit exige le sacrifice des r gles pas celles que le pouvoir ex cutif peut r viser ignorer et appliquer selon son bon plaisir mais les r gles qui contraignent de fait le pouvoir ex cutif La responsabilit constitutionnelle qu a le Pr sident d agir selon la loi dit on parfois vient apr s son devoir de d fendre et prot ger le pays Apparemment minimiser la menace du jihad Salafi international reviendrait sugg rer que nous combattions Al Qaeda les mains attach es dans le dos Ce qui est surprenant dans l exemple de la salle d urgences du moins pour quiconque est plong dans le d bat sur le contreterrorisme sous la pr sidence Bush c est qu il met en question comme je l ai dit l analogie ou la m taphore selon laquelle les r gles ou les lois lient les mains Il transmet une le on diam tralement oppos e le personnel d urgence suit la proc dure indiqu e pr cis ment parce qu il comprend les dangers auxquels il est confront C est plut t ceux qui ne se rendent pas compte de la gravit de la menace imminente qui recommandent d abandonner des r gles que des professionnels ont pass des ann es d velopper pour r duire le risque d erreurs lorsqu ils doivent rapidement prendre une d cision face une crise Il est vrai que si on les suivait toujours la lettre certaines r gles diminueraient les chances d une r ponse appropri e au danger Mais videmment la nature inappropri e ou in
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