PARANOFICTIONS – TRAITÉ DE SAVOIR VIVRE DANS UNE
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1. en slogans publicitaires Debord et Vaneigem ont stigmatis notre gu guerre de r les pour un fauteuil de dupe au banquet de la consommation Ils Pont crit l aube de mai 68 puis Debord l a r crit dans ses Commentaires en 1988 tort ou raison il nous l a dit redit et r p t tous nous ne sommes plus que des coquilles vides des m caniques de pure repr sentation sociale sans mati re vive ni authenticit d tre incapables de diff rencier l inestimable mill sime de la piquette pour hypermarch Guy Debord a lu le devenir fiction de notre quotidien de ce monde r ellement renvers o le vrai est un moment du faux Car comme il l ass ne dans ses Commentaires le sens final du spectaculaire int gr c est qu il s est int gr dans la r alit m me mesure qu il en parlait et qu il la reconstruisait comme il en parlait Sauf que le penseur radical si lucide et vision naire soit il a toujours cru en sa mission historique d instaurer la v rit dans le monde telle qu il la revendiquait en cl ture de La Soci t du spectacle Comme si nous pouvions encore sauver la V rit avec un grand V des flots irr pressibles de fan tasmes m diatiques se nourrissant de tsunamis d images qui s alimentent les uns les autres fa onnant et refa onnant nos souvenirs eux m mes d ores et d j artificiels Debord parle encore d une domination sous le sceau du secret Il s ac c2. me insoutenable com die grand spectacle l chelle de l Occident chacun dans sa fonction avec ou sans costard et pavillon de banlieue les uns chang s en nes poulets ou moutons ob is sants les autres s lectionn s pour leur capacit mordre mut s en loups et chiens sauvages Qu importe le poids de l histoire ou plus prosa quement les cons quences de la d cision politique La probit Le sens des responsabilit s Non la politique P re de l audience n est plus qu une immense mission de vari t s Qu importe que le petit nom du candidat de t l r alit pr sidentielle soit Arnold George ou Hillary Segol ne Fran ois ou Nicolas tant que chacun reste hypnotis par le canon photons O est l acteur O est le d cideur Et comment diff rencier l individu r el de son image Car c est l image qui sert de mod le et veille sur le cheptel Culturiste devenu milliardaire gr ce l immobilier acteur puis prince politique Schwarzy ne s est il pas construit selon le fantasme qu il avait de lui m me hallucinant miroir de la r ussite l am ricaine moins que ce ne soit son tre hollywoodien qui l ait ainsi fa onn robot m diatique tout de souriante m canique en fer blanc Total Recall s est il seulement termin un jour Peut tre le film est il devenu r alit notre insu en pleine salle obscure le mensonge de pellicule se substituant discr tement ce q
3. des J ai l trange sentiment que le meurtre dont il est le symbole a d j eu lieu Meurtre de la politique Meurtre de la pens e Meurtre de la r alit Mais aussi meurtre de notre m moire d ores et d j d figur e par ses mimiques de super h ros de comics am ri cains Non d cemment je ne peux croire que cette caricature m cano de du Monsieur Propre que j utilise pour nettoyer mes carrelages puisse pr sider aux destin es de l tat le plus peupl des tats Unis moins qu il ne s agisse du stade PARANOFICTIONS ultime de cette soci t du spectacle que vilipendaient les situa tionnistes dans les ann es 1960 Le culturiste l acteur Pentre preneur immobilier le gouverneur Schwarzenegger signifie lui seul l int gralit du fantasme dominant Il est ce capitalisme d aimable carnassier qu un obscur d miurge semble avoir tra vesti en gigantesque surboum avec piquouses de couleurs hyp notiques rire gras obligatoire et sexe virtuel tous les tages Il est ce biberon m diatique qui atrophie nos affects Il est cette s duisante t tine que nous su ons depuis notre plus jeune ge pour que tourne la Machine d cerveler Plus sournoisement ce cador de la t l cratie plan taire semble la fois notre bonne et notre mauvaise conscience d cideur colo agissant contre l aggravation de l effet de serre er supp t de la peine de mort en phase avec l opinion de ses administr s Bref la
4. des films qu il avait tourn s dans sa jeunesse je me demande si Schwarzenegger n a jamais t autre chose qu un personnage de film Son bus de campagne se nommait Predator Un balai la main pour signifier son message aux tres les plus sim plistes il y promettait de terminater les imp ts et d radi quer la bureaucratie Cent jours apr s son sacre il avait respect ses deux premi res promesses de beauf supprimer la nou velle taxe sur les cartes grises et interdire aux immigr s clandes tins de passer leur permis de conduire Et puis incidemment en avril six mois apr s son rappel le nouveau gouverneur sauve de la noyade un homme saisi d une crampe au large de l le de Maui Hawa o il passe les vacances de P ques H ros hollywoodien pour toujours le d fenseur des familles et des automobilistes californiens plonge dans l oc an se porte au secours d un in fortun vacancier et le ram ne au rivage The show must go on Un show a ses stars ou sa star mais plusieurs 1 Lib ration Schwarzy d croche son plus grand r le en Californie 9 octobre 2003 2 Ouest France 11 avril 2004 18 INTRODUCTION figurants Voil bien le hic l instar du vacancier second r le le temps d un sauvetage ne sommes nous pas tous en train de devenir les figurants de ce show selon les v ux d un introu vable metteur en sc ne Ne vivons nous pas tous dans la m
5. retrouver quelque ersatz de ses neu rones perdus D o un m li m lo de vrais et faux v nements qui se renversent en permanence Confusion de r alit s qui se cl t dans le sc nario hollywoodien par de la vraie bagarre au c ur du d me martien et dans la nouvelle d origine par un retournement plus m taphysique ouvert sur une multitude d interpr tations 1 Philip K Dick Souvenirs vendre nouvelle tir e du recueil Nouvelles 1963 1981 Deno l Pr sence du futur 1998 p 353 PARANOFICTIONS Cette nouvelle n est pas qu une fiction C est une fable du temps pr sent Rien que ce titre fran ais Souvenirs vendre il semble une impossibilit et pourtant Vous recevrez des preuves tangibles de votre voyage clame le vendeur de M moiRe SA Douglas Quail le talon du bil let quatre cartes postales affranchies en couleur et en trois dimensions Un film des vues de sites touristiques locaux que vous aurez prises avec une cam ra lou e sur place Plus le nom des gens que vous aurez rencontr s des souvenirs pour une valeur de deux cents poscreds qui arriveront de Mars dans le courant du mois suivant Et cette conclusion Vous ne vous souviendrez ni de nous ni de cette entrevue ni de votre passage ici Dans votre m moire ce sera un vrai voyage nous vous le garantissons L crivain ne raconte pas une manipulation intellectuelle mais une chirur
6. tout en biceps minable petit salari qui s ennuie et r ve de fouler le sol de la plan te rouge Simple fonctionnaire mari une blonde qui lui rappelle sans cesse son manque d avenir le personnage imagin par l auteur de science fiction et repris tel quel dans le long m trage cultive des projets moins m galo maniaques que le jeune Schwarzy Quail se dit juste Un jour j irai Je verrai Mars avant de mourir Mais il n a pas les moyens de s offrir la travers e Alors sans en souffler mot sa femme il d cide de se payer une simulation grandeur nature du voyage sur la plan te rouge Un matin en douce comme s il allait voir un porno au lieu de s asseoir son bureau il se rend M moiRe SA Le personnage de fiction d sire se faire implanter le souvenir d une aventure o il aurait t agent secret d Interplan en mission sur Mars Cet homme moyen se pose sur un fauteuil de dentiste high tech lectrodes sur la t te Et l l op ration plante Car Douglas Quail veut qu on lui implante un faux souvenir qui corresponde un voyage qu il a effectivement accompli Avec un faux motif qui est en r alit le vrai Il a v ritablement t sur Mars par le pass Il y 8 canard de m chants ennemis Puis selon les termes de leur contrat secret d fense son employeur Interplan lui a effac de la m moire l pisode sanglant Sauf que le passage par M moikRe SA permet l imp trant de
7. une nouvelle paix L ali nation est une nouvelle forme de communion Rien n est vrai Rien n est faux Jamais Schwarzenegger riant symbole du lib ralisme en cin mascope n oublie de sourire aux cam ras tel un gamin pour l ternit Ce m me adulte est gonfl PEPO ou autres sub stances rendre le physique lisse et efficace comme une loco motive de TGV Il est le fr re du ressuscit amerloque ayant pill sept fois le Tour de France et qui lui aussi cet ami de Bush cultive des ambitions politiques Il est le super h ros du quotidien le magicien muscl qui transforme les lessives les paquets de cacahu tes et les contr leuses de bus en d cor de Cendrillon Il est Phomme n ud ignare et sans un radis en poche qui a pourtant r ussi Mais il est aussi l incorruptible bouledogue humano de qui l che les fesses des lecteurs obs d s par la s curit En 1976 sur une plage alors qu il n tait qu un jeune acteur muscl il s tait extasi sur les biceps d un d nomm Tookie et avait rigol avec lui Trente ans plus tard une fois gouverneur de Californie il refuse la gr ce ce chef de gang repenti Bref cette vivante incarnation de la fiction dominante tient la seringue de chlorure de potassium qui arr te le c ur du condamn La pure fiction dont il est le soldat id al est une fiction tueuse Ni vraie ni fausse elle est terrible ment r elle Sacr Monsieur Univers d s ses v
8. CLIMATS ARIEL KYROU PARANOEICLIONS TRAIT DE SAVOIR VIVRE POUR UNE EPOQUE DE SCIENCE FICTION Extrait de la publication Extrait de la publication PARANOFICTIONS TRAI T DE SAVOIR VIVRE DANS UNE REALITE DE SCIENCE FICTION DU M ME AUTEUR Techno Rebelle Un si cle de musiques lectroniques Deno l 2002 Ariel Kyrou PARANOFICTIONS TRAIT DE SAVOIR VIVRE DANS UNE R ALIT DE SCIENCE FICTION CLIMATS Copyright Climats un d partement des ditions Flammarion 2007 CLIMATS 87 quai Panhard et Levassor 75647 Paris cedex 13 ISBN 2 08 213135 1 Introduction Total recall Le mardi 7 octobre 2003 le h ros du film Total Recall a t lu gouverneur de Californie Les lecteurs ont vot pour le recall traduisez la destitution du pr c dent gouverneur d mocrate c l brant ainsi la gloire du stentor r publicain Arnold Schwarzenegger Total recall le retour Treize ans apr s son premier acte de pure fiction cin matographique le second pisode du long m trage se jouerait il notre insu au c ur de notre monde dit r el ici et maintenant Ce rappel de 2003 puis la r lection en novembre 2006 de Schwarzy sonnent ils la destitution finale de toute v rit Par un trange clin d il de l poque les multiples sens du mot recall se croisent en une figure de roman de gare acteur c l bre au corps comme au langage dop s aux st ro
9. e R duite l tat de souvenirs vendre M moiRe SA pourrait se nommer Microsoft Time Warner Vivendi Universal LVMH ou Bouygues en tutu TF1 Car notre capitalisme devenu spectacle culturel se donne d sormais comme premi re mission de nous fabriquer puis de nous vendre des souvenirs de pacotille Qu elle passe par la t l vision 11 PARANOFICTIONS l ordinateur la console de jeu vid o ou le t l phone mobile l image ins re ses st r otypes creux mais efficaces dans des t tes d ores et d j gouvern es par l apparence En une logique infi niment circulaire le cr tinisme consommable se nourrit d en core plus de cr tinisme consommable et le voyeurisme d encore plus de voyeurisme Croyant regarder le monde je m admire dans le miroir cathodique qui lui m me me renvoie mon image debout devant le miroir et ainsi de suite l infini la r p tition du m me vide Dans un autre genre je me noie l esprit dans l uniforme du soldat exterminateur joystick la main Ou je me r ve en repr sentation show biz diabolique ment mode dans la peau de la star d un jour Et je m imagine d autant mieux de l autre c t de l cran que les objets les codes et les remarques insignifiantes du quidam dont je jalouse la pr sence sous les cam ras sont les miens ou ceux que je crois miens L int rieur et l ext rieur de l cran ont fusionn Mon esprit cafouille Un instant je crois redessiner les cont
10. gie bien r elle tangible sur la mati re m me de notre cerveau juste agr ment e de quelques preuves de papier a posteriori Le touriste virtuel pose ses fesses au c ur de la salle d op ration Les infirmi res l endorment puis les chirurgiens se mettent tripoter ses neurones et lui implantent des souvenirs fictifs qu il prendra pour sa r alit Et ce faux tout fait r el de devenir vrai Ce tour de passe passe cette exag ration abracadabrante nous d voile le visage du tourisme de masse vendant du clich pour mieux plonger des tres d poss d s de leur singularit au fin fond de r alit s de cartes postales mornes plages pour h tels de caricature steaks de soleil et marchands de lune drague grossi re et frime de carnaval Tout droit sorti d un mauvais roman de Houellebecq le touriste pense qu il s agit d un voyage qu il explore de nouveaux horizons ou du moins se repose la t te dans des espaces d gag s de toutes contraintes enfin respirables Mais ce n est qu un masque Les souvenirs 1 Philip K Dick Souvenirs vendre op cit 356 10 INTRODUCTION sont des clones de souvenirs Implant s faux comme les tickets et les films amateurs ne sont que preuves factices Le client pense tre dans une station baln aire grecque loin de son labeur Mais la Gr ce n y est plus Elle se cache dans les terres montagneuses loin de l oc an colonis inaccessible nos corp
11. ingt printemps Arnold r vait d tre le ma tre du monde Ou de le sauver ce monde ce qui revient au m me Quand on est le meilleur dans le cin ma avait il avou au magazine Stern qu est ce qui peut tre le plus int ressant Peut tre le pouvoir Alors on se met faire de 1 Chronicart n 11 septembre octobre 2003 Ph nom ne de foire interview de J G Ballard par Thomas Cazals et Cyril de Graeve 17 PARANOFICTIONS la politique on devient gouverneur ou pr sident Il est devenu gouverneur de Californie Mais dans notre soci t de souvenirs vendre Schwarzy n est il pas d j depuis fort longtemps notre pr sident virtuel Car il est l incarnation de la mis re symbo lique dont parle le philosophe Bernard Stiegler un tre de fiction qui depuis des ann es envahit notre esprit de sa morale de boy scout opportuniste Un clich vivant prenant ses aises au c ur de notre m moire tel un parasite virtuel qui se ferait passer pour le sourire de notre maman ou la premi re engueu lade de notre papa Terminator ou Pr dator l image de Schwarzy est profond ment en nous Ce souvenir nous a t impos par les industries culturelles r duisant feu doux le peu de singularit qui nous reste mais avec notre consente ment ce qui rend cette cuisson diablement efficace Tout comme le pr sident Ronald Reagan qui confondait selon Ballard la r alit et le souvenir plus ou moins pr cis
12. ive au bord du pr cipice J oppose ses singeries m diatiques et bour si res ma po sie violente et mes romans d crivains parano aques L irruption des films amateurs et des blogs sur Internet aussi soudaine insignifiante et d sordonn e que les boutons d acn sur la peau d une innocente victime adolescente d montre ce terrible besoin de fictionner sa vie Afin de survivre cette nouvelle r alit elle m me constitu e d une myriade d histoires de fant mes il ny a gu re d autre solution que d exercer ce droit l gender dont parlait Gilles Deleuze Que de cr er son propre faux avec son t l phone mobile et les logiciels de son ordinateur Le quidam en qu te de substance ne cherche plus une v rit absolue Non il fabrique vaille que vaille son propre roman de mots et d images Il bricole ses fragments de vie et de fictions personnelles et en extirpe sa fragile v rit lui artifice fam lique pour r sister une soci t elle m me enti rement artificielle Car ainsi va notre nouveau monde au del du mensonge un mur g ant d images repr sentant une starlette des m dias tendue sur un lit d fait est un paysage beaucoup plus r el que 16 INTRODUCTION celui du d sert du Sahara explique J G Ballard Les men songes des politiciens sont la nouvelle r alit La maladie mentale est une nouvelle forme de bonne sant Les guerres la t l vision sont
13. ns merci faute d avoir pr serv quelque mod le de la r alit tangible d hier La Machine que je traque dans ce livre et dont Debord n a jamais anticip la nature profonde est l exact pendant du pouvoir et de l imaginaire religieux qui gangr nent encore les deux tiers d humains de la plan te cette population qui ne peut oublier ce qu est la r alit Ces gens ont les pieds dans la boue cr vent de faim ou meurent au nom de Dieu sans capote l appendice mais avec des grenades la main Les autres les riches de tous pays et de toutes ob diences subissent quant eux une nouvelle Machine fantomatique n e de l Occident industriel et t l communicationnel Elle est l essence de notre fiction dominante nous autres couv s que nous sommes sous la Grande Serre de prosp rit que Peter Sloterdijk d crit comme un Palais de cristal Les exclus de cette sph re virtuelle qui n a nulle g ographie pr cise la voient comme un Eldorado de r ve ou comme un enfer cauchemardesque contre lequel se l vent d sormais les l gions d Allah D un c t donc il y a l ancestrale pauvret la survie vaille que vaille et les bons vieux ressorts de la domination physique et m taphysique avec barbes de proph te et autres vierges dodues qui attendent sur les divans du paradis De l autre c t le n tre en Occident mais aussi celui de privil gi s de Chine d Inde du Br sil et d ailleurs dans les cont
14. ours flous de mon identit Je renais ma propre fiction Puis je replonge dans le bain aux glaces r fl chissantes Je redeviens ce niais de la t l r alit habill et maquill pour l animation voire la r animation 3D Je suis cette cohorte d individus lamb das aux souvenirs de pixel Je suis en tat de coma spirituel Oh bien s r les esprits chagrins auront raison d affirmer que Guy Debord 8 d j d crit il y 8 quarante ans ce spectacle perma nent comme un rapport social entre des personnes m diatis par des images 1 a mis nu ce monde gouvern par l apparence Il a d cortiqu la pantomime de notre vie s par e De fa on plus analytique que l enflamm Trait de savoir vivre l usage des jeunes g n rations de Raoul Vaneigem lui aussi membre de l In ternationale situationniste en cette ann e 1967 ce chirurgien des mots et des choses 2 d voil une soci t d sincarn e o tout 1 Guy Debord La Soci t du spectacle ditions G rard Lebovici 1967 1987 p 10 12 INTRODUCTION devient illusion paradis d sesp rant qui nous engage vivre par procuration au travers de simulacres d images morales id ales et ridicules de st r otypes que des clowns tristes fabriquent pour nous et nos lucarnes lectroniques Les moindres moments du quotidien se muent en shows mesquins ou pire ali nants abru tissants L amour les corps la vie se transforment en marchan dises
15. pen s es Et donc mes actes Je reconnais d sormais ce tyran int rieur qui engourdit mon d sir et enduit mes capacit s de d cision d une fi vre d inconstance passive Sauf que je me sens tels ces clercs du Moyen ge qui ayant d crypt la mainmise de la religion sur la soci t sur l esprit de chaque individu devaient pourtant se taire de crainte des b chers de l Inquisi tion Ou qui pas pas calmant l expression de leur col re tentaient malgr les risques de titiller le monstre religieux de l int rieur de ses saintes entrailles Je fouille les actes de ma d sesp rance philosophique sans contrainte avec aussi peu d gards pour la langue officielle des philosophes que peu d es time pour le grand d voreur capitaliste Mais peut tre logre m a t il d j mang Car qui me dit que mes piques et mes ambigu t s ne nourrissent pas ce L viathan spectral qui ne conna t nulle fronti re entre mon tre int rieur et mon envi ronnement ext rieur Cette Chose m taphysique qui nous happe et sape notre singularit prend plusieurs patronymes selon les plumes qui tentent aujourd hui d en percer l inaccessible identit Jean 14 INTRODUCTION Baudrillard la d signe comme une r alit int grale puissance de calcul de tout et n importe quoi qui s vit au del m me de l id e de simulation Simulation qui par un curieux paradoxe dispara t en tant que telle l heure de sa victoire sa
16. r es de l ex tiers monde s bat un extraordinaire Kraken capitaliste cool et m diatique dont les tentacules plongent dans les tr fonds de notre tre garant de nos richesses mat rielles et gardien de notre mis re spirituelle C est ce Kraken immat riel et t l pathe qui an antit la vieille notion de V rit dont Debord ne veut se d barrasser inconscient 1 Peter Sloterdijk Le Palais de cristal l int rieur du capitalisme plan taire Maren Sell Editeurs 2006 15 PARANOFICTIONS de l impuret comme du caract re fictionnel de sa propre posture Mais cet animal m taphysique n annihile pas toute possibilit de r bellion Il pose juste la question d une quelconque r sistance en termes de lutte entre des imaginaires d origines de formes et de motivations diff rentes ma fiction contre les leurs Ou les fic tions de mon choix contre celles qui m touffent Je ne joue pas la V rit contre le mensonge car je ne connais plus ni lune ni l autre J essaie en revanche de creuser des chemins vers l horizon qui me semble le plus d sirable le plus juste pour moi dans ou en dehors de notre Grande Serre Alors je pioche je trie dans une danse infinie d inventions contradictoires faites de mots ou d images de mati res solides ou de r ves virtuels Contre les fic tions d l t res du monstre aimable mais sans visage j extirpe des limbes un tableau surr aliste ou une installation interact
17. roche l id e d une r alit cach e d un jeu machiav lique de quelque autorit spectaculaire tenant les ficelles de nos chairs de marionnettes De sa posture d exil volontaire depuis son oasis de rationalit il ne peut envisager l id e d une soci t 1 Guy Debord Commentaires sur la soci t du spectacle ditions G rard Lebovici 1988 p 19 2 Guy Debord La Soci t du spectacle op cit p 170 13 PARANOFICTIONS sans le moindre pilote humano de Il ne peut admettre que le pouvoir n ait plus de t te se jouant de nos carcasses selon une logique anonyme sinon inhumaine Arnold Schwarzenegger ne gouverne rien Il est gouvern par cette force abstraite constitu e de la somme de nos d missions de nos pulsions go stes et de nos absences de volont Les patrons qui ont financ la campagne de l acteur r publicain ou les actionnaires qui suivent leur int r t court terme en se contrefoutant du chemin virtuel de leurs capitaux ne sont eux aussi que des gouvern s qui se croient gouvernants Ils semblent les rouages vivants d un L viathan qui pourtant n existe pas Ils sont les pi ces interchangeables d une Machine impalpable litt ralement introuvable qui les guide sans m me qu ils le r a lisent Comme d autres homoncules humains peut tre moins endormis plus sceptiques ou ironiques que leurs cong n res j ai certes conscience de cette emprise intangible sur mes
18. s et nos esprits putr fi s Ne subsistent gu re sur l ersatz c tier que de vieux Hell nes en repr sentation th trale Et les plages insipides au parfum de cellulite les bars bulbeux les fast foods graisseux les pauvres magasins aux n ons racoleurs les pan neaux clignotant d invitations perdre le go t des couleurs Une bulle de simulations bas de gamme pour andro des en goguette Empathie z ro Plaisir minute pour aveugles des sens Une usine touristes sans raison ni d raison comme il en existe des milliers d sormais sur les c tes de la M diterran e Un mod le de vomi capitaliste perdre son fric et son me Le village de p cheurs cens donner son caract re au lieu a t enterr il y a tr s tr s tr s longtemps Il ne vous en reste que le souvenir pay fort cher L id e de l exotisme Et encore une id e vulgaire et de seconde main inspir e d une photo de catalogue pour caricature de bronz Au del du voyage dont il ne subsiste que l image et le bruit de tiroir caisse ce vrai faux souvenir de Douglas Quail devient le miroir de ces vrais faux divertissements de l industrie cultu relle travestissant des airs de rien en m moire de musiques ou des images infiniment consensuelles en tableaux d histoire personnelle Le tout payant bien s r Plus d effort Plus d inat tendu La culture ne se pratique ne se d couvre plus Elle se gobe en pilules chimiques au go t de soup
19. star tous azimuts est la d monstration vivante du d c s de cette bonne vieille v rit laquelle nous aimerions tant nous accro cher V rit dont la disparition nous oblige choisir faute de mieux entre les multiples fictions qui nous habitent nous les urbains gav s d images d tach es de toute r f rence quelque r alit solide Sommes nous les acteurs d un sympathique navet hollywoodien ou les victimes du roman parano d un crivain de science fiction Vivons nous dans un paradis de bonne humeur muscl e tel un troupeau de Bambis prot g s par des bergers et des chiens de garde aux airs de Terminator Ou devons nous fouiller dans les tr fonds de notre imaginaire de quoi survivre cet enfer souriant que d crit J G Ballard la soci t de consommation ayant transform nos villes en salles de jeux vid o largies o les niveaux concurrents d irr alit se super posent comme les strates d une Troie lectrographique 1 Selon l expression de Bernard Stiegler dans La T l cratie contre la d mo cratie Paris Flammarion 2006 2 James Graham Ballard Mill naire mode d emploi Tristram 1996 2006 pour l dition fran aise p 105 INTRODUCTION Le sc nario de Total Recall j entends le film de Paul Verhoeven sorti en 1990 pas son remix politique depuis 2003 vient d une nouvelle de Philip K Dick Souvenirs vendre en fran ais Sa figure centrale y est Douglas Quail grand dadais
20. u il nous restait de v rit solide Le mot fin ne signait donc pas la conclusion du divertissement hollywoodien Il ne signifiait pas la cl ture d un film mais symbolisait la mort de notre r alit nous assis dans la salle obscure Il nous disait Atten tion le film sort de l cran il continue dans votre monde que vous croyez tort encore tangible et qui n est plus qu un uni vers de fictions 19 Table Introduction Total Recall p 7 PARTIE 1 SOCI T DE FICTIONS Chapitre 1 Capitalisme publicitaire p 27 Chapitre 2 Contr le p 50 Chapitre 3 Simulacres p 71 Premier interm de personnel Chapitre 4 Qu est ce que la r alit p 92 PARTIE 11 FUTURS AU PR SENT Chapitre 5 Apocalypses mentales p 103 Chapitre 6 Machines vivantes p 129 Second interm de personnel Chapitre 7 Qu est ce que l humain p 156 PARTIE 111 IRR ALIT S HUMAINES Chapitre 8 Hommes et femmes machines p 165 Chapitre 9 Inventions de r alit s p 193 Conclusion Th ologies exp rimentales p 225 Remerciements p 251 Composition et mise en page SE 2 Ae NORD COMPO 0 1 7 dm 3 1 8 N d dition L 0IEHBNFU3135N001 D p t l gal janvier 2007
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