SEMEPLASMES (SURREALISTES), OU AUTRES
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1. Pascal Durand SEMEPLASMES SURREALISTES OU AUTRES Paul Henderickx Il y a aussi les id es en forme de bo tes sardines L aventure surr aliste de Raymond Queneau au sens o l on a une aventure une relation h tive mais il en est qui marquent un parcours ne serait ce qu en creux est ce jour encore trop mal con nue et du reste un tel sujet trop vaste en cette circonstance de col loque abond pour que je me risque la d tailler encore moins Panalyser sous plusieurs aspects De fa on plus restreinte je me pro pose d interroger les rapports de Queneau po te publi en particu lier celui des Ziaux et de Marine avec le r gime rh torique du sur r alisme pour ce qu il a parfois peu parfois prou particip aux activi t s du mouvement entre 1924 et 1929 et surtout pour ce qu un po te crivant dans ces ann es l ne pouvait pas ne pas se situer par rapport lui Dans l adh sion l indiff rence ou le refus Ou la rupture Qu entendre par r gime rh torique Depuis quelques temps en somme depuis qu entre histoire et formes litt raires tendent se jeter des ponts plus ou moins solides on s avise de ce qu un moyen efficace d op rer un classement parmi les mouvements po tiques qui se succ dent et se chevauchent consiste dans le rep rage travers leur production de constantes formelles qui peuvent concerner tant 126 le dispositif pro2. feuillet d analogies la m taphore fil e est Pexact mi roir le refl tant au sein de po mes de facture parfois purement lita nique Cf entre cent exemples l Union libre de Breton et Allo de P ret Aussi les discours th oriques et autoex g tiques du surr alisme font ils de la m taphore le parangon d une rh torique naturelle 8 Sous le r gime du hasard objectif elle atteste une n cessit au re bours de l effet d absurdit produit superficiellement par de nom breux textes De ceci d coulent deux comportements apparemment inconciliables Pun consiste d busquer sous le r seau des m tapho 128 res Un message proph tique dans Odile Queneau parodie une s an ce d interpr tation de ce type laquelle se livrent devant Travy An glar s et Vachol lors d une premi re rencontre avec le groupe d An glar s Travy avait d j assist un tour de passe passe interpr tatif propos d un caillou crocodile l autre tend jeter un interdit sur toute tentative d lucidation s mantique C herm neute fid le du monde la m taphore se passe explication elle s explique d elle m me L isthme se croisa les jambes et chavirant par dessus la balustrade de Palphabet tomba dans le pr cipice des significations chute ternelle sans plus de fin qu un r ve lorsque la nuit d lire 1 Raymond Queneau nous semble bien loign de ces r veries id alistes Du res
3. 27 2 No l Arnaud s en plaint juste titre dans Un Queneau honteux in Europe 650 651 juin juillet 1983 pp 122 130 3 Premier recueil po tique publi en 1943 Pex ception de Ch ne et Chien roman en vers paru en 1937 les Ziaux rassemblent des textes compos s entre 1920 et 1943 Marine section ouvrant l Instant fatal 1946 groupe des po mes crits de 1920 1930 J insiste sur mon propos il ne s agira pas ici de cerner le surr alisme de Queneau ni de discuter son appartenance au groupe et aux codes de Breton mais plus sp cifiquement de confronter deux r gimes rh toriques deux vi sions du monde Aux marges de cette br ve analyse il sera possible de discerner quel ques implications id ologiques qui pourraient contribuer comprendre en partie la rupture de Queneau vis vis du surr alisme Au del des raisons strictement person nelles Tel est mon projet sans plus 4 Pour une taxinomie moderne des tropes et figu res voir Groupe Mu Rh torique g n rale Paris Seuil r d Points 1982 5 R Q Odile Paris Gallimard 1937 p 19 6 Andr BRETON Signe ascendant Paris Galli mard Po sie 1975 p 10 7 Ibid p 12 Ce brocard venimeux vise Jean Cocteau la grande b te noire qui monte qui monte jusqu l Acad mie des surr alistes 8 Il convient de relire sous cet angle tout Signe ascendant op cit 9 Op cit respectivement pp 59 62 et pp 45 47 10 Les col
4. on appelle la m taphore in praesentia qui est tr s proche de la com paraison qu on appelle m taphorique Et je crois que conserver ces distinc 135 tions est tout fait utile Et a permet aussi de se distancier vis vis du flou que les surr alistes ont pu jeter sur la rh torique La deuxi me remarque qui concernait la question de la rh torique des r ves Pai not effectivement qu il s agissait d une remarque propos des R ves foison repris plus tard dans Contes et Propos mais il n a pas t dans mon in tention de dire que Queneau avait dit cela l poque surr aliste Mais je crois que c est quand m me signifier que Queneau vis vis du r ve du r cit de r ve qui est la pratique surr aliste par excellence qu il a lui m me pratiqu e lors du surr alisme a bien montr que le r cit de r ve l est quand m me un construit Troisi me chose dont je dois me justifier Queneau surr aliste Je n intitule pas et mon propos n est pas de parler de Queneau surr aliste Mon propos est de parler de Queneau par rapport un r gime rh torique surr aliste C est dire que je sais effectivement que les Ziaux par exemple d ailleurs c est dat c est de 43 plus de treize ans apr s la rupture je sais que Explication des m taphores c est de 1940 mais a ne m emp che pas de dire qu effectivement il y a l un rapport vis vis du syst me rh torique surr aliste
5. C est montrer que Queneau a une sp cificit par rapport au mouvement qui se d ploie encore ce moment l Je ne nie pas du tout qu il y ait eu un Queneau surr aliste mais ce n est pas mon propos BLAVIER Oui ben je voudrais surench rir sur ce qu a dit Claude Je ne vois pas pourquoi on se voilerait la face sur la participation r ticente criti que sarcastique m me parfois de Queneau l activit surr aliste mais r el le et beaucoup plus r elle du point de vue par exemple du boulot de secr tariat parce que au fond disons Queneau tait peut tre le seul le prendre au s rieux le surr alisme Faut pas oublier que c est lui qui a t la bo te aux lettres de la fameuse enqu te de 1929 qui a abouti la s paration d avec Grand Jeu avec quelques exclusions dans le style Breton C est Queneau qui a docu ment Nadeau pour la premi re tentative d une histoire du surr alisme en France On ne peut plus nier la participation mais sinc re de Queneau au surr alisme Et d abord il a crit Odile Odile c est partiellement un renie ment du surr alisme et on ne renie pas quelque chose qu on n a pas aim au quel on n a pas cru Je crois que tout ce qu on peut dire c est que Queneau n tait pas fait pour rester surr aliste pour continuer crire surr aliste On ne peut nier que jusqu 29 il s en est expliqu tr s clairement Cerisy en 60 d ail
6. id ologie qu elle s accompagne d un d dain et d une proscription des autres figures D dain ll est bien entendu qu au pr s de celles ci comparaison m taphore les autres figures que persiste num rer la rh torique sont absolument d pourvues d in t r t 6 Proscription L image a pour ennemis mortels le d pr ciatif et le d pressif S il wexiste plus de mots nobles en revanche les faux po tes n vitent pas de se signaler par des rapprochements igno bles dont le type accompli est ce Guitare bidet qui chante d un au teur abondant du reste en ces sortes de trouvailles Car sauf conspuer d aussi r jouissantes institutions que Par m e ou la religion chez P ret notamment la m taphore surr aliste est non moins c l brative que c l br e C l br e parce que c l brati ve elle est l embl me et l outil d investigation d un monde plein ho mog ne organis autour d un point central o s abolissent les antino mies d un monde parcouru en tous sens de r seaux analogiques de correspondances dont l imaginaire inconscient per oit la coh rence et qu il retraduit en textes qui sont autant de lectures euphoriques et n cessaires d un d cor tr s existant L homme surr aliste parcourt un univers o tout fait signe lui fait signe en lequel il se reconna t o il ne saurait s garer pourvu qu il chappe l emprise de la raison De ce monde stri
7. de leur travail il touche en premier lieu ce que la forme en elle m me constitue pour eux un enjeu fondamental ce qu attestent as sez les pol miques qui les opposent quant au privil ge ou l anath me donner l une ou l autre qu on songe par exemple au diff rend Parnasse romantisme L examen du r gime rh torique permettrait donc d approcher l une des modalit s des luttes concurrentielles Cet aspect ne retiendra pas davantage mon attention ni la v tre au jourd hui 2 D autre part et ceci tracera l horizon rh torique de mon pro pos l enjeu de la d marche s inscrit au c ur m me de la question probl matique du sens de la forme et en particulier de la trame id ologique au sens large qui sous tend le tissu rh torique Par rap port au code langagier dont on a soulign plus d une fois Greimas Barthes Baudrillard et d autres qu il transmet une vision du monde en instituant notamment une d construction paradigmatique de ce lui ci l usage rh torique peut appara tre comme une parole d em bl e oblique disant et d voilant dans son travail sur la langue une certaine relation au r el d j r gl par et inscrit dans le syst me de la langue Dominant un r gime rh torique tel type de figure recouvri rait donc outre un sens obtus un contenu id ologique latent Sous cet angle les pol miques quant aux modes d criture emporteraient d autres enjeux que purement forme
8. des deux signifiants anticipant sur leur union finale tandis que le miroir souligne qu ils vont se refl ter Pun dans l autre jusqu se confondre Deuxi me remarque ce mot valise para t d un type tr s particu lier et assez rare dans la mesure o la fusion m taplasmique qu il r a lise s est substitu e une fusion m tas m mique st r otyp e sa voir la m taphore yeux eau ressass e notamment par les surr alis tes Breton en proue Ainsi en place de la substitution de leur conte nu que r alisait la m taphore s op re une imbrication des deux signi fiants C est ce transfert d un hypogramme le clich yeux eau d une cat gorie rh torique dans une autre yeux eau ziaux avec conservation du processus fondamental fusion substitutive imbrication que je propose de nommer s m plasme Il s agirait donc d un trope parodique minimal subvertissant un st r otype Un st r otype c est dire l Autre Comme le notait Barthes Autre est toujours conforme Si nous imaginons que la f e Automatisme tou che de sa baguette magique le sujet parlant ou crivant les crapauds et les vip res qui jailliront de sa bouche seront tout simplement des st r otypes Qu en conclure Si s m plasme a pu me servir de titre c est qu au del d un fait rh torique pr cis il m a paru rendre compte de fa on un peu ludique tant de la distance parodique prise par Que nea
9. e Mais je vois que Caradec est furieux Rires F CARADEC Je ne suis pas tout fait d accord avec toi L Explication des m taphores ce po me qui pour moi a toujours t un tr s beau po me qui est l explication non pas des propres m taphores que contient le po me avec le comme c est une explication des m taphores des Chants de Maldo ror Qui l sont m taphoriques Le cheveu et le nom de Maldoror sont des m taphores Et le po me consiste expliquer les m taphores d un nomm Isidore Ducasse Et alors l il emploie le comme J M KLINKENBERG Il n en reste pas moins qu une lecture au niveau du texte permet de lire m taphore comme P Gayor Plus personne Alors r cr ation jusqu 12 heures la pendule 137
10. e par del le r veil 15 Campagne in les Ziaux op cit p 30 16 H JUIN Que neau le m taphorique in Magazine litt raire n 94 pp 11 13 Sur cette question voir no tamment G rald ANTOINE Une inconnue l image chez Queneau in Stanford French Review 1 2 1977 pp 153 165 17 Parmi les plus remarquables celle de Wladimir Keysinsky la Voix des m taphores la Mise en sc ne du monde in L Herne Cahier Ray mond Queneau 1975 pp 200 209 18 Jis in les Ziaux op cit p 28 19 R BARTHES les Surr alistes ont manqu le corps in le Grain de la voix Paris Seuil 1981 p 231 20 Unit po tique et m thodique de l uvre de Raymond Queneau in L Herne op cit p 102 21 Ibid p 104 22 In les Ziaux op cit p 67 134 DISCUSSION P GAYoT Je vous remercie d un expos tenu dans les temps vous n avez pas trop coup tout de m me Je pense qu il y a des questions po ser d rudition ou des claircissements C DEBON Pai norm ment de choses dire je vais essayer de me limi ter D abord une question de vocabulaire que je signale en passant Le mot m taphore me g ne terriblement mais a entra nerait une trop longue dis cussion Pour ma part je pr f re parler d images Deuxi me point un petit d tail Sauf erreur lorsqu il parle du minime effort de rh torique il ne s agit pas de ses r ves de l poque surr aliste on est bien d accord ma
11. ensait de toute explication si non proph tique tant par nature et originellement sens e A l inver se absurde ind chiffrable l univers quenien ne saurait tre enaucun cas le r ceptacle fertile d un sens d j l d j donn il est un simple d cor et d ailleurs inexistant Que P garement aveugle de l homme parmi une for t sans symboles d termine la question du sens m ta phorique est d vidence attest par la construction formelle du po me qui subordonne l interrogation quant la signification de la m ta phore au syntagme D ailleurs inexistant mis fortement en exergue par un tiret et surtout par le rejet de strophe strophe qui est comme iconique d un mouvement de d ceptivit redoublant linanit du d cor Loin du temps de Pespace un homme est gar Mince comme un cheveu ample comme l aurore Les naseaux cumants les deux yeux r vuls s Et les mains en avant pour t ter le d cor D ailleurs inexistant Mais quelle est dira t on La signification de cette m taphore Cr 131 Dans cet univers absent ce Th tre du Monde illustr par Phor reur 5 autant plus en d r liction qu il tourne vide sur son pro pre vide toute m taphore est au pr alable incompr hensible rappro chant d illisibles concepts Au rebours de l homme surr aliste l homme quenien ne rencontre dans sa d route aucun signe sinon trompeurs sinon factices Si les feux dans la n
12. est par les po mes queniens 2 le dispositifrh torique particulier mis en sc ne dans Pul time po me du premier recueil Les Ziaux 1 Soit ce po me superbement c l bre ou c l brement superbe ad libitum Explication des m taphores De nombreuses analyses et interpr tations en ont t propos es mon ambition n est pas d en ajouter une nouvelle mais de montrer en quoi ce texte fondamental me semble exemplaire du statut sp cifique de la m taphore quenien ne puisque d un m me mouvement il marque entre mille autres choses une nette distanciation quant la mystique surr aliste sou cieuse la fois de pr server toute m taphore son myst re et d en d crypter les vertus herm neutiques et un d voiement de l id ologie v hicul e par cette mystique En surface le probl me pos est comme on sait celui de la si gnification d une m taphore en fait de deux comparaisons explici tantes qui prises individuellement n offrent l ex g se aucune r sistance mais dont accouplement entra ne une antith se effective ment insoluble un homme est gar Mince comme un cheveu ample comme l aurore Consid ration m tarh torique absente du po me surr aliste et qui pose d embl e la confrontation de l homme gar face la question cruciale du langage Lecture imm diate d un monde articul d analogies la m ta phore la bretonne on l a vu se disp
13. hore non pour expliquer que je ne peux pas souscrire ce qui vient d tre dit ce serait nier une bonne partie des travaux que j ai d j faits et on ne peut faire a n est ce pas non plus pour apporter une contribution l tude de la conception surr aliste de la m taphore a je men explique avec le groupe mu dans une tude sur la rh torique des avant gardes qui doit para tre normalement au cours de cette ann e Mais pour revenir au po me l Explica tion des m taphores il y a quand m me une vidence qu on n a gu re souli gn e d une part la doctrine surr aliste avait banni le comme et d autre part on voit dans ce po me utiliser le mot m taphore pour d signer une comparaison avec comme Il s agit l d une esp ce d incongruit norme dont il devait tre conscient car en effet c est depuis la fin du 17 si cle que Pon d finit bien erron ment la m taphore comme une comparaison o le comme a disparu Cette d finition pr vaut jusque dans les ann es 60 o la s mantique en fait justice Donc il y a une incongruit dont Queneau devait tre conscient utiliser m taphore pour d signer une comparaison avec comme Il devient vident que cette incongruit signifie une sorte de mise en cause de la description du ph nom ne linguistique dans la mesure o ce ph nom ne est ritualis par une sorte de mode d emploi oblig savoir sup primer le comm
14. is des r cits de R ves foison Bon Pour moi le probl me le plus important est le probl me historique chronolo gique C est dire que j admets tr s volontiers et je vous suivrais enti re ment sur ce point que les rh toriques fondamentales du surr alisme et de Queneau en g n ral opposent Mais il y a une p riode d criture surr alis te de Queneau tr s limit e dans le temps tr s pr cise et j avoue que l vous m avez un peu gar e Vous avez parl de Explication des m taphores qui da te de 40 des Ziaux qui datent de 43 moi j attendais que vous parliez de Ther mopyle de Catalogue analogue de ces quelques po mes qui utilisent me sem ble t il la rh torique surr aliste peut tre avec justement des diff rences sen sibles qu il faudrait cerner de plus pr s mais o coup s r l image est ab solument pr pond rante Est ce que je peux je crois qu on peut se faire ce plaisir tous vous donner en esp ce de primeur un des tr s nombreux textes franchement surr alistes de Queneau qui vont para tre dans la Pl iade sim plement pour montrer tous parce que je crois que c est trop ignor que Queneau a eu une p riode franchement surr aliste o il a crit comme Bre ton comme Desnos dans leur p riode en tout cas pour Desnos leur p riode la plus surr aliste Afin que vous vous fassiez une id e de cette po sie qui effectivement est un peu perdue et noy e dans les
15. jec tivit quenienne manquera toujours de hasard Ceci illustre bien mon sens que les pr occupations formelles et en particulier rh tori ques ne rel vent pas simplement d un souci d ornementation ou de complexification mais traduisent travers la mati re m me de la langue la sp cificit d un rapport au monde 2 Je terminerai en touchant enfin au pourquoi de mon intitul et de son n ologisme sous ast risque s m plasme Cette d nomi nation fruit monstrueux de l accouplement entre les noms g n ri ques de deux cat gories de figures m tas m mes et m taplasmes entend d signer un proc s rh torique particulier illustr par les Ziaux Proc s rh torique exemplaire du traitement r serv par Que neau la m taphore 132 Concr tement il s agit de la figure construite par le texte au fil de son d roulement Syntagmatique ziaux en quoi l on reconna t bien entendu un mot valise assorti du z d motique et zazien Au pre mier abord rien de bien exceptionnel Deux remarques me semblent toutefois s imposer d une part le texte se construit quasiment selon un processus m tarh torique implicite puisque sous nos yeux les deux mots qu il va fondre sont d ploy s sur le mode de Pexpansion dans l une et l autre des deux premi res strophes puis articul s dans la strophe ultime Dont le premier vers eau de ces yeux pench sur tout miroir pr sente une collocation troite
16. leurs disant que le surr alisme avait norm ment compt pour lui F CARADEC Deux mots aussi pour compl ter autre chose Vous dites que le groupisme n tait pas sa tasse de th En r alit il y a un groupe qu on vacue toujours je ne vois pas pourquoi on n en parle pas c est quand m me PAcad mie Goncourt Il ne faut pas oublier que Queneau a appartenu un certain nombre de groupes de ce genre m me si l Acad mie Goncourt pour lui est devenue un moment un groupe auquel il ne participait que par cor respondance Il y a d autres raisons mais je crois qu il sentait par moments la n cessit d appartenir des groupes malgr tout P DURAND On peut rappeler le jeu de mots r cemment rapport que Queneau se disait in secte J BIRNBERG Un mot ajouter la discussion entre Monsieur Durand et Claude Debon Je crois Monsieur Durand que le statut de l image se trou ve extr mement renforc par les travaux et en particulier l ouvrage que Bur gos a consacr la Po tique de l imaginaire et je voudrais vous y renvoyer par ce que je ne crois pas que nous puissions aujourd hui nous passer de l image dans le genre de recherches auquel nous nous livrons et que ce que vous avez 136 dit Pemploi d autres termes qui vous semblent plus pr cis ne se justifie plus une fois que Pon a lu l ouvrage de Burgos J M KLINKENBERG Je voudrais encore revenir au probl me de la m tap
17. ls il n est pas de forme innocen te Cela dit tout le probl me est de cerner la validit in abstracto de cette hypoth se y a t il un thos id ologique de la figure ou d pend il uniquement de l occurrence contextuelle de celle ci Ques tion ouverte que je laisse en suspens pour serrer au plus pr s notre su jet et tenter de largumenter la lumi re de la pratique quenienne 127 Mais vrai dire mes compagnons incer tains et na fs vivaient peu et leur affran chissement ne se manifestait gu re que dans le domaine de la m taphore ou de Pantonomase Le surr alisme on le sait s annonce en fanfares sous le r gne de la m taphore reine tout au moins de P image analogique abstrac tion faite de pr f rence du comme Du Manifeste de 1924 Signe ascendant les discours th oriques foisonnent qui c l brent la d es se Analogie comme pr sidant aux constantes r ussites de l criture surr aliste lesquelles proviennent de ce qu en d pit de l arbitraire de leur production ses m taphores rec lent en sous main une justesse une pertinence jamais d menties Entendez ici la voix proph tique de Breton qui n h sita souvent pas s instituer Pex g te de ses pro pres textes dans Amour fou ou les Vases communicants par exem ple afin de d crypter imparable n cessit de leur progression rh to rique Cette c l bration de la m taphore est d autant plus significati ve en fait d
18. ossible de d terminer chez lui une quelcon que dominance rh torique ce qui traduit d j une transgression du primat de la m taphore moins qu on ne la situe cette dominance du c t des m taplasmes ou figures d expression nombreuses ici mais souvent assez discr tes Deux trois exemples la grue tr s oblique les porcs les barriques sont rien moins que vus Port les toits r verb rent la nuit Sous les toits quel levain fera de cette cendre thique le pain qui nourrira tout l espoir du mourant la Meule Le repas ridicule en fran ais d motique parapluie parapluie paraverse paragouttes d eau paragouttes d eau de pluie II pleut Les anagrammes de Don Evan Marquy Nous l zards aimons les Muses Muses et L zards Les Ziaux bien entendu Ets tra Est ce dire que la m taphore ne s y rencontre gu re En d pit d un titre d Hubert Juin Queneau le m taphorique on s accorde g n ralement pour dire que Queneau m taphorise peu Toutefois nos recueils apportent un l ger d menti tout au moins un correctif cette affirmation les figures analogiques en effet s y lisent d abon dance mais il me para t que leur contenu id ologique les situe aux 130 antipodes des surr alistes cette hypoth se reposant sur deux ordres de faits que je me propose d examiner rapidement la lumi re de deux textes ci s 1 le contenu th matique manif
19. recueils des Ziaux et de l Instant fatal Vifs encouragements Alors a s appelle Nulle aum ne Reproduction interdite Il me semble et il y a beaucoup d autres textes de ce calibre qu il y a vraiment eu une criture tout fait surr aliste de Queneau P DURAND Je r pondrai dans l ordre D abord la question de l image Je ne partage pas pour ma part votre d votion ce terme et je continue lui pr f rer m taphore comparaison m tonymie et synecdoque qui me pa raissent permettre de d signer de fa on plus rigoureuse et pr cise des ph no m nes extr mement h t rog nes C DEBON Pour moi la m taphore ce n est pas le type d images em ploy par les surr alistes Ils utilisent l identification or la m taphore au sens strict fait dispara tre le deuxi me terme de la comparaison c est pour a d ail leurs que le plus souvent elle est us e sinon on ne la comprend pas Les sur r alistes utilisent l identification c est dire la juxtaposition de deux termes P DURAND Je crois qu il y a ici une distinction rh torique apporter Il y a effectivement dans la m taphore un processus qui tend substituer un mot un autre c est s r c est la m taphore la plus canonique mais il y a d au tres types de m taphores celle dont on vient de parler c est la m taphore que Pon appelle en rh torique m taphore in absentia Il existe chez les surr alis tes ce qu
20. res de Breton sont cet gard rest es c l bres ll s est trouv quelqu un d assez malhonn te pour dresser un jour la table de quel ques unes des images que nous pr sente l uvre d un des plus grands po tes vivants on y lisait Lendemain de chenille en tenue de bal veut dire papillon Mamelle de cristal veut dire une carafe Etc Non monsieur ne veut pas dire Rentrez votre papillon dans votre carafe Ce que Saint Pol Roux a voulu dire soyez certain qu il Pa dit In Point du jour Paris Gallimard Id es 1970 p 23 11 R Q Texte surr aliste in La R volution surr aliste n 11 mars 1928 p 16 fac simile aux Editions Jean Michel Place 1975 12 Dans Instant fatal Paris Gallimard Po sie 1966 p 111 13 Aspects r cents du Moyen Age dans les Ziaux in PInstant fatal op cit p 22 14 Mais Naturellement aucun de ces r ves n est vrai non plus qu invent Ii s agit simplement de menus incidents de la vie veill e Un minime effort de rh torique m a sembl suffire pour leur donner un aspect onirique Je souligne R Q in Contes et Propos op cit p 241 Cette remarque concerne les R cits de r ves foison et non directement les r ves surr alistes Toute fois il s y distingue une juste appr hension du caract re construit de l effet d onirisme du r cit de r ve genre litt raire part enti re et non pas fruit automatique d une dic t e fid l
21. s surr alistes portaient Jean Cocktail pardon Cocteau cette Grande T te Moile r acad micienne on ne peut y d celer qu un sarcasme de plus et une subtile provocation Dans le d bat autour des Recherches sur la sexualit RS n 11 pp 32 40 Queneau est celui qui pose les questions ne pas poser et d voile sans l air d y toucher le caract re coercitif et moralisateur de certains orthodoxes Sur un plan th matique un examen rapide des Ziaux et de Mari ne r v le qu y affleurent nombre de traits dont le surr alisme est pa v la d rive citadine le tarot le r ve bien s r des expressions comme ordre mystagogique ou rangs hypnagogiques 5 bien 129 Hs 227 d autres encore mais qui me paraissent peu contrebalancer le travail formel sp cifiquement quenien lequel le met nettement en marge du surr alisme bretonnant Anticipant sur la conclusion de mon expos je soutiendrais m me que ce travail entre autres signifie d signe cette distance prise En effet au plan formel qui nous occupe il appara t que Ray mond Queneau r v le d embl e ce qu il faut bien appeler sa vive conscience rh torique rappelons que le Groupe a constell d exemples queniens sa Rh torique g n rale laquelle conscience ne pouvait videmment que se sentir l troit dans le corset m taphori que dogmatiquement nou par Breton Tout y passe tel point qu il serait malais voire imp
22. sodique que l appareil rh torique Pratiquement il s agit de d terminer sur base la fois des textes et des ventuels dis cours programmatiques selon quelle dominance rh torique se d ploie un courant litt raire sans que la d marche bien s r ne tende oblit rer la diversit des formes et techniques qui lui sont propres De la sorte si l on creuse au del de l image concept flou qui a con damn nombre d tudes stylistiques approximation en frappant dindistinction des faits textuels souvent multiformes et irr ducti bles on observe par exemple et pour s en tenir au registre des m tas m nes que le romantisme gravite autour d un puissant m taphorocentrisme que Baudelaire par ailleurs divise et rassemble la fois son uvre sous le signe minemment dialectique de l oxymo ron ou que les symbolistes Mallarm en t te se focalisent sur la sy necdoque et se d placent surtout par subtiles m tonymies Soit M zalors Certes l int r t d une telle approche serait bien mince s il ne r sidait qu en un classement si rigoureux soit il et la m thode bien co teuse si elle ne devait aboutir qu ent riner quelques d coupages historiques Essentiellement double l enjeu se situe au del de ces travaux d arpenteur 1 Outre au fait que l analyse de l usage rh torique d un crivain d un groupe ouvre une voie royale la compr hension de la sp cifici t
23. te au cours de sa p riode surr aliste il courut plus volontiers les rues du Ch teau que les Fontaines 42 o l on devait trop se pr occuper ses yeux d inconscient cosmique et de me diumnit attach e l humour gris la compagnie de Pr vert Duha mel Leiris avec lequel il pr sente de fortes affinit s lui convenait mieux semble t il ou moins mal que celle des Vachol et autres Ch nevis dont Odile a laiss de tr s vitriol s portraits Nonobstant POulipo le groupisme n est pas son fort Sa participation a R volu tion surr aliste para t bien discr te un R cit de r ve n 3 p 5 deux Textes surr alistes n 5 p 3 n 11 p 13 un compte rendu d une ex position de Chirico n 11 p 42 et un seul po me e Tour de l Ivoire n 9 10 p 20 repris plus tard dans Marine Les Ziaux paraissent d ailleurs pr s de treize ans apr s sa rupture avec le groupe suivant de quelques ann es un roman en vers dont le sous titre d cha n a d fai re aboyer maint surr aliste la doxa bretonneuse tient la po sie pour le contraire du roman et de la litt rature accoupler les deux c est je ter un chien de plus dans le jeu de quilles surr aliste Soit dit en passant Ch ne et Chien n en est pas le seul exemple comme le notait Paul Gayot dans son Queneau Odile ne comporte chose rare qu un seul calembour emprunt Cocteau e crocodile croque Odile quand on sait la haine que le
24. u vis vis du syst me rh torique une seule entr e du surr alis me que du d placement de son travail vers une exploitation syst ma tique des potentialit s significatives du signifiant m me Le s m plasme implique une d construction de limage un d voiement puis une reconstruction cette d marche quenienne fonda mentale entra ne avec elle un acte de sabotage un subtil travail de sa pe du c r monial po tique tel qu il pouvait tre ritualis et c l br par les surr alistes La litt rature selon Queneau est un faire et un d faire Dans L Herne Georges Emmanuel Clancier citait de lui cette remarque L image est pour ainsi dire un bris de vocable 9 Ren versant la proposition j incline penser que chez Queneau le voca ble po tique est pour ainsi dire un bris d image Ce travail de sape cette d sacralisation du langage et des m ta phores il e t t possible de les d busquer dans les registres th 133 matiques dans les nombreuses techniques de la d ceptivit mises en uvre dans les Ziaux par exemple l intrusion barbare du prosa s me la transformation de la litanie c l brative surr aliste en ressasse ment circulaire Mis re de ma vie et vie ma mis re mis re mis re de vie etc mais d autres queneaul tres se pressent Je leur c de ma place NOTES 1 Raymond QUENEAU Lorsque l esprit in Contes et Propos Paris Gallimard 1981 p
25. uit faisaient des signes certes la peur serait un rire et l angoisse un pardon mais les feux dans la nuit sans cesse d concertent le guetteur affin par la veille et le froid Veille Le sens ne saurait na tre par nature du SANS le sans avec tous ses d riv s la mort le malheur l incompr hension etec sera l embl me cardinal de la th matique de Que Monde n y aura puisque son pro pre nom en produit la cl anagrammatique Et sans un plan sous les yeux on ne nous comprendra plus car tout ceci n est que jeu et l oubli d un temps perdu l Amphion Tout ceci n est que jeu En somme la le on tirer pourrait se r su mer dans la d claration fameuse Si ce monde nous inqui te fei gnons d en tre l organisateur Une telle pr occupation va r gir on le sait tout le comportement d criture de Queneau l univers est un ind chiffrable palimpseste il faut donc le chiffrer l aigresistence est absurde insens e il faut donc r gler son discours savoir ce qur quoi le po te a prise et ma trise l organiser selon des formes impeccables d ployer en tous sens les virtualit s rh toriques et ludiques du langa ge Entre Raymond Queneau et le surr alisme ce sont deux strat gies scripturales qui s opposent recouvrant l une et l autre deux vi sions du monde radicalement antagonistes Pour Queneau le hasard surr aliste ne sera jamais assez objectif pour les surr alistes l ob
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