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1. r que cette premi re tude ne permettait pas de conclure quant la r alit du risque et devait tre compl t e par une tude de sensibilit et d incertitude entreprendre Notons deux arguments typiques mis en avant par le repr sentant de l ACRO pour justifier ses propositions de m thode Rien cependant ne permet d carter l hypoth se que l on passe c t d autres radionu cl ides non identifi s qui pourraient contribuer la dose p 347 La difficult qui existe tablir une relation de cause effet ne constitue pas pour autant la preuve de l absence de cette relation causale p 349 De port e g n rale ces deux arguments m ritent r flexion Ils invitent juste titre une attitude d interrogation syst matique des donn es et des connaissances existantes afin d en discerner les lacunes ventuelles Cela tant dans un travail visant estimer scientifique ment un risque ils ne sauraient justifier d aller au del sauf biaiser l valuation elle m me en lui faisant perdre son caract re scienti fique pourtant exig Du constat qu il n est jamais possible d carter l intervention de facteurs non encore identifi s par la science on ne peut tirer l assertion que ces facteurs existent et qu il convient d valuer la situation en postulant leur existence La seconde tude du GRNC Faisant suite aux demandes formul es une tude de sensibilit et2. venot 1991 De la justification Les conomies de la grandeur op cit 22 Voir les analyses des deux auteurs sur le mod le de la gestion contestable gestion strat gique d entreprises plac es sous la menace puis la r alisation d une contes tation sociale s appuyant sur des motifs sanitaires et environnementaux Olivier Godard et Thierry Hommel 2002 Trajectoire de constestabilit sociale et produc tion d OGM usage agricole conomie rurale n 270 juillet ao t p 36 49 et Thierry Hommel 2004 Strat gies des firmes industrielles et contestation sociale Paris INRA ditions 354 p 23 James Flynn Paul Slovic et Howard Kunreuther dir 2001 Risk Media and Stigma Understanding Public Challenges to Modern Science and Technology Londres Earthscan 24 Voir Alan Irwin et Brian Wynne dir 1996 Misunderstanding Science The Public Reconstruction of Science and Technology Cambridge Cambridge University Press 38 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL sur deux points Le premier touche aux conditions de possibilit du ph nom ne d autonomisation des repr sentations sociales Le second souligne la dimension strat gique de ce ph nom ne ce dernier peut tre amorc sous l effet des strat gies des parties prenantes l expertise et la contestation La possibilit d autonomisation s enracine dans les circonstances o la science ne parvient pas tre d cisive n apporte pas de fa
3. voire de l opinion publique puisse s accorder De l autre c t le manque de prise de l id ologie positiviste sur les risques consid r s et le d veloppement de controverses sociales au sujet de leur gestion ont conduit diff rents auteurs sous diff rentes appellations pr coniser le recours des dispositifs d expertise largie misant sur la partici pation de repr sentants des acteurs concern s ou de citoyens ordinaires affect s La vari t des r les propos s pour ces repr sentants d int r ts ou ces profanes de la science et celle des solutions d ouverture avanc es t moignent d un t tonnement o se recherchent de nouvelles formes d institutionnalisation de la d mocratie des choix collectifs Cela ne va pas sans un certain d senchantement UN CAS D COLE L EXPERTISE RENDUE PAR LE GROUPE RADIOECOLOGIE NORD COTENTIN EN FRANCE En 1997 une publication de deux chercheurs fran ais Jean Francois Viel et Dominique Pobel dans le British Medical Journal fait tat de la tendance un exc s de leuc mies de 1978 1992 chez les individus g s de moins de 25 ans dans le canton de Beaumont Hague et sugg re que ces exc s sont attribuables une contamination environnementale r sultant de la consommation de produits de la mer et de la fr quentation des plages avoisinant les installations nucl aires du Nord Cotentin la suite de l motion suscit e localement et dans le pays l
4. 2 Corinne Gendron et Jean Guy Vaillancourt 2003 D veloppement durable et participation publique De la contestation cologiste aux d fis de la gouvernance Montr al Presses de l Universit de Montr al 406 p 3 Michel Callon Pierre Lascoumes et Yannick Barthe 2001 Agir dans un monde incertain Essai sur la d mocratie technique Paris Seuil collection La couleur des id es 368 p Politique et Soci t s vol 26 n 2 3 2007 27 43 28 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL int r ts qu elle doit servir Nous proposons d analyser les rapports entre expertise scientifique et contestation sociale en supposant que certains acteurs au moins ont des vis es strat giques dans la gestion de leur participation un dispositif d expertise largie D s lors sous l effet de ces strat gies la dynamique de la contestation sociale peut conduire cette derni re sur une trajectoire d autonomisation par rapport la dynamique propre du d veloppement des connaissances scientifiques jusqu installer durablement certaines repr sentations dans l espace public avec pour effet la stigmatisation de telle technologie ou de telle activit D EXPERTISE EN UNIVERS SCIENTIFIQUEMENT INCERTAIN ET CONTROVERSE Dans une organisation politique o domine la l gitimit rationnelle l gale weberienne ou le positivisme saint simonien que Luc Boltanski et Laurent Th venot placent au centre de la construction de la cit ind
5. d incertitude a t entreprise en janvier 2000 sur l initiative de l Institut de protection et de s ret nucl aire IPSN d ailleurs relay e en juillet par une lettre de mission du gouvernement Comme pour la premi re tude experts trangers en particulier des experts britanniques du National Radiological Protection Board et experts associatifs ont particip aux travaux Publi en juillet 200215 le calcul d incertitude avait vis le risque ex utero associ aux rejets de routine des installations soit 0 0009 Ce calcul consistait mesurer l impact sur l estimation du risque de l adop tion d un spectre de valeurs pour les diff rents param tres pertinents sans remettre en cause les mod les de dispersion et d exposition employ s conformes l tat de l art Il a port sur 214 param tres Deux types de m thodes ont t utilis s probabiliste et possibiliste f La premi re m thode a d bouch sur une fourchette d estimations se situant dans un 14 Pierre Barbey 1999 Annexe 4 Travaux du Comit Radio cologie Nord Cotentin R serves et remarques de l ACRO dans Estimation des niveaux d exposition p 346 349 15 Groupe Radio cologie du Nord Cotentin 2002 Analyse de sensibilit et d incertitude sur le risque de leuc mie attribuable aux installations nucl aires du Nord Cotentin Rapport principal juillet 95 p 16 La premi re d terminait pour chaque param tre une
6. distribution de probabilit s obtenues par une simulation de Monte Carlo la combinaison des valeurs de chaque param tre pond r es par la probabilit donnait une distribution probabilis e du Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 35 rapport de 1 3 autour de la valeur centrale pr c demment estim e Le risque maximum encouru selon cette m thode tait de 0 0024 cas de leuc mie La seconde m thode d bouchait sur une valeur comprise entre 0 4 et 5 fois la valeur de r f rence soit un maximum de 0 0045 cas de leuc mie Un calcul maximaliste irr aliste ne consid rant que les valeurs extr mes de l intervalle pour tous les param tres donnait un intervalle compris entre 0 1 et 30 fois la valeur de r f rence et une valeur maximale possible du risque de 0 027 cas Face cette seconde tude qui confirmait les conclusions de la premi re l ACRO a d cid de ne pas signer le rapport Pour justifier ce retrait elle a mis en avant le fait qu elle n avait pas t associ e d s le d but des travaux mais seulement partir du moment o le groupe avait agi sur mission du gouvernement Surtout a t elle d plor aucune de ses demandes m thodologiques n avait t retenue Soucieux de ne pas tomber dans le pi ge de la caution par le mouvement asso ciatif son repr sentant concluait ainsi ses r serves Le travail fait par le groupe de travail Incertitudes ne permet pas de conclu
7. donner consistance des hypoth ses plus inqui tantes La situation est alors m re pour que les m dias friands de d voilement et de d nonciation se saisissent de la controverse Cette m diatisation a pour effet de sensibiliser une plus grande vari t de personnes qui jusqu alors taient l cart Or la diversit des hypoth ses en d bat sur des sch mas de causalit a pour effet de multiplier les acteurs se sentant vis s soit titre de victimes poten tielles primaires les victimes du risque environnemental et sanitaire soit titre de victimes potentielles secondaires celles qui auraient p tir dans leur activit des mesures de protection qui pourraient tre d cid es De nouvelles formes de connaissances et d int r ts s identi fient et se mobilisent ce qui contribue un largissement th matique de la controverse y compris partir de savoirs profanes Pratiques locales et observations empiriques sont ainsi r guli rement oppos es aux hypoth ses retenues par les d marches scientifiques ce stade les diff rentes parties prenantes s opposent non seulement sur l exis tence la nature et l ampleur des risques mais aussi sur les approches et les m thodes retenir pour les expertiser et sur la mani re m me d organiser l expertise 25 Voir sur ce point Brian Wynne 1999 L incompr hension entre scientifiques et profanes et la d fiance vis vis des experts dan
8. la mise en place du programme nucl aire fran ais d cid par le gouvernement Messmer en mars 1974 cette cr ation r pondait au souci de ces scien tifiques d apporter une information sinc re et une capacit ind pendante d valuation des enjeux de la fili re nucl aire Le groupe r dige des dossiers scientifiques qu il publie dans sa revue La Gazette Nucl aire Livres conf rences articles de presse et participation des instances d expertise compl tent son mode d action La CRIIRAD La Commission de Recherche et d Information Ind pendantes sur la Radioactivit CRIIRAD a t cr e en 1986 la suite de l accident de Tchernobyl Elle d fend le droit l information des citoyens et leur droit la protection contre les rayonnements ionisants Son dispositif comprend une association et un laboratoire d analyses agr par les autorit s publi ques pour ses activit s de m trologie Elle vise r aliser des mesures ind pendantes de la radioactivit dans les milieux naturels tablir des bilans radio cologiques des contre expertises et d autres tudes Elle intervient dans l ensemble du territoire fran ais et ponctuellement l tranger Ses commanditaires sont des collectivit s territoriales des associations des entreprises ou certains services de l tat Son activit militante la conduit constituer des dossiers publier des avis et des bulletins d alerte lancer des ap
9. on incontestable le fin mot de l histoire Cela peut r sulter du maintien d une importante incertitude empirique r siduelle en d pit du progr s des connaissances Cela peut venir de ce que les connaissances en jeu d pendent trop manifestement de th ories et de m thodes jug es discutables Cela peut encore se produire lorsque les acteurs sociaux adressent l expertise scientifique des questions qui ne sont pas de nature scientifique et auxquelles cette expertise n a pas la capacit de r pondre de fa on cr dible Une fois tablie cette possibilit encore faut il qu un principe dynamique se charge de l actualiser Nous propo sons de rechercher ce principe dynamique dans les strat gies d action d au moins certaines parties prenantes ce qui fait de la stigmatisation l aboutissement voulu d une strat gie r ussie d autonomisation de la controverse sociale par rapport ses bases scientifiques Il est en effet manifeste dans nombre de cas que les comportements des diff rentes parties prenantes vis vis de l expertise scientifique et des m dias ne peuvent pas tre compris en attribuant ces acteurs un simple but de manifestation de la v rit Selon les cas et ses stades de d veloppement les cibles que vise la contestation sont les connaissances mobilis es par l expertise donn es incompl tes choix non pertinent ou d s quilibr de contributions disciplinaires ignorance de certaines formes de conn
10. participants au dispositif d expertise et contre tout acteur qui reconna trait une l gitimit au dispositif contest La contestation peut alors se maintenir durablement en mobilisant diff rents questionnements comme celui touchant aux impacts long terme qui ont pour trait commun de ne pas pouvoir relever d une valuation scientifique 42 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL Le contexte doit n anmoins satisfaire deux conditions pour que l volution susmentionn e soit possible e les arguments utilis s par les contestataires parviennent impr gner le d bat collectif et discr diter leurs cibles aux yeux d autres parties prenantes et d un segment important de l opinion publique le r le des m dias est ici important pour d senclaver la controverse de son contexte local e un front de la contestation parvient se former et se stabiliser avant que les d saccords sur le tableau scientifique des risques et sur les proc dures d expertise aient pu tre r sorb s CONCLUSION Une analyse fine des rapports entre contestation et expertise scien tifique montre leur inscription dans une histoire qui peut conduire des trajectoires assez diff rentes Des bifurcations successives peuvent conduire une autonomisation de la contestation sociale par rapport l volution des connaissances scientifiques et une stigmatisation durable de certaines activit s ou techniques Cette volution s c
11. Article Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique des risques environnementaux et sanitaires Olivier Godard et Thierry Hommel Politique et Soci t s vol 26 n 2 3 2007 p 27 48 Pour citer cet article utiliser l information suivante URI http id erudit org iderudit 017662ar DOI 10 7202 017662ar Note les r gles d criture des r f rences bibliographiques peuvent varier selon les diff rents domaines du savoir Ce document est prot g par la loi sur le droit d auteur L utilisation des services d rudit y compris la reproduction est assujettie sa politique d utilisation que vous pouvez consulter l URI https apropos erudit org fr usagers politique dutilisation rudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif compos de l Universit de Montr al l Universit Laval et l Universit du Qu bec Montr al II a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche rudit offre des services d dition num rique de documents scientifiques depuis 1998 Pour communiquer avec les responsables d rudit info erudit org Document t l charg le 16 novembre 2015 09 05 CONTESTATION SOCIALE ET ORGANISATION DE L EXPERTISE SCIENTIFIQUE DES RISQUES ENVIRONNEMENTAUX ET SANITAIRES Olivier Godard Centre national de la recherche scientifique D partement Humanit s et Sciences sociales cole polytechnique olivier godard shs polytechnique fr Thierry H
12. L r side d ailleurs la source principale d hostilit au principe de pr caution 7 Sur le concept de d cision en univers controvers voir Olivier Godard 1997 Social Decision making under Scientific Controversy Expertise and the Precautionary Principle dans Integrating Scientific Expertise into Regulatory Decision making National Experiences and European Innovations sous la dir de Christian Joerges Karl Heinz Ladeur et Ellen Vos Baden Baden Nomos Verlagsgesellschaft 344 p p 39 73 8 Les prises de position sont nombreuses Pour un exemple d hostilit sans nuance provenant des milieux industriels nord am ricains voir Lawrence A Kogan 2005 Exporting Precaution How Europe s Risk free Regulatory Agenda Threatens American Free Enterprise Washington DC Institute for Trade Standards and Sustainable Development Inc and Washington Legal Foundation 188 p 30 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL Comment appr hender l expertise dans ce contexte D un c t on attend de l expertise qu elle identifie les possibles jauge les hypoth ses du point de vue de leur consistance scientifique brosse l tendue des incertitudes pointe les diff rentes directions compatibles avec l tat des savoirs disponibles appr cie les niveaux possibles de gravit des dommages encourus mais aussi de fa on id ale qu elle puisse d gager une repr sentation des probl mes sur lesquels une majorit des acteurs
13. action mener ou refuser Tout en s en d fendant ils pratiquent en fait ce qu ils reprochent souvent aux autorit s publiques savoir de rabattre les d bats de soci t sur le terrain scientifique et technique Leur positionnement ne transforme t il pas un d saccord sur l orientation collective le d veloppement du retraitement des d chets nucl aires en controverse d experts entre tenue sur l estimation d un risque Cette situation confirme l influence persistante dans les jeux de risques de la soci t contemporaine de la l gitimit rationnelle l gale chaque partie prouve encore le besoin de s adosser l objectivit scientifique pour faire valoir des orientations de nature id ologique politique ou conomique Pris dans ce jeu dans lequel ils ont peine se retrouver mais dont ils veulent devenir des acteurs les associatifs locaux veulent des assurances concernant leurs conditions de vie et acceptent difficilement que des tudes approfondies ne permettent pas de lever toutes les incertitudes L tude scientifique est encore dans leurs attentes un possible juge de paix EXPERTISE ET TRAJECTOIRES DE CONTESTATION SOCIALE D une fa on g n rale le type de contestation sociale consid r dans cet article na t d un processus d alerte qui verse dans le champ m diatique diff rentes hypoth ses formul es par des scientifiques quant des risques pour la sant humaine et po
14. aissances non scientifiques les modalit s pratiques et sociales de mise en uvre de l expertise manque d ind pendance des experts biais dans l organi sation absence de repr sentants de certaines parties inad quation du cadrage d finissant le mandat des experts ou bien stade ultime le r f rent scientifique lui m me l expertise scientifique n est pas pertinente pour trancher un choix de soci t Ces possibilit s sont a priori ouvertes tous aux contestataires comme aux industriels et aux autorit s publiques De cela il est possible de d gager trois grands types de trajectoires d volution d une contestation sociale sur un enjeu ayant un important arri re plan scientifique et technique Ces trajectoires sont repr sent es la figure 1 Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 39 Figure 1 Trajectoires d volution des rapports entre contestation sociale et expertise scientifique La science ne Trajectoire 3 permet pas une La contestation bonne gestion s autonomise discr dite des risques le fondement scientifique de la gestion des risques met en avant d autres fondements et d bouche sur la stigmatisation Trajectoire 2 La contestation vise On veut une l organisation de l expertise autre expertise L horizon reste celui d une bonne expertise scientifique mobilisant les diff rents types de savoirs Trajectoire 1 Main
15. alth hazards are nowadays tightly linked with social contestation targeting public action and scientific expertise A strong demand by non governmental organizations NGOs is in the name of demo cracy to allow citizens to take over both of them Opening scientific expertise to stakeholder representatives is a serious issue to look at The experience made by the North Cotentin Radioecological Group in France is one of the most advanced in this country but social outcomes did not completely match expectations This case allows raises the issue of various co evolutionary trajectories between open expertise and contestation whenever at least some stakeholders are using expertise for strategic purposes bien m me ce changement demeure le plus souvent voil aux yeux des experts eux m mes Un contexte scientifique non stabilis offre en effet de consid rables occasions pour le d ploiement de strat gies qui ont d autres enjeux que la simple manifestation de la v rit En univers controvers enjeux de connaissance et enjeux d action deviennent imbriqu s au point que les diff rents acteurs conomiques sociaux ou politiques en viennent s engager sur le terrain scientifique afin d influer sur le cours du d veloppement des connaissances et sur les repr sentations publiques de questions scientifiques Il en r sulte des soup ons form s de toutes parts quant la manipulation de la science et de l expertise par des int r ts
16. blique quelques mois plus tard des premi res indications obtenues ayant donn lieu vive controverse de la part de membres de la commis sion le professeur Souleau d missionne et la commission est remplac e par deux nouveaux groupes d experts l un pour un approfondissement pid miologique et l autre pour une investigation de la diffusion des l ments radioactifs dans l environnement La premi re tude du Groupe Radio cologie Nord Cotentin GRNC Le GRNC avait pour mandat de dresser l inventaire des rejets radioactifs des installations nucl aires dans le Nord Cotentin de tracer la dispersion des l ments radioactifs dans les diff rents milieux physiques et dans les produits de la cha ne alimentaire de faire un bilan des doses subies par les populations les plus expos es et d estimer le risque associ aux doses re ues Il lui fallait pour cela reprendre toutes les donn es disponibles pour la p riode 1966 1997 Les r sultats devaient tre compar s aux observations tir es de l tude pid miolo gique de Pobel et Viel de fa on sortir de la controverse entourant le risque sanitaire nucl aire dans la r gion Ce nouveau groupe d experts avait une composition pluraliste inha bituelle il r unissait des chercheurs universitaires des repr sentants des op rateurs des installations et des instances de contr le des experts trangers de quatre pays d Europe ainsi que des experts de trois asso ciat
17. e partir du jugement clair des experts ni de s lectionner les plus pertinentes parmi les hypoth ses en confrontation L expertise scientifique ne permet alors pas de clore le d bat et laisse le champ libre des mises en sc ne vari es du tableau des risques Les acteurs peuvent n anmoins rester attach s aux rep res de l objectivit scientifique et combiner 40 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL alors la patience dans l attente des d veloppements scientifiques venir et l adoption sous l gide du principe de pr caution de mesures provisoires et proportionn es de pr vention des risques suspect s Cependant la situation se pr te particuli rement une exploitation strat gique de la part de diff rents acteurs sociaux au service des objectifs propres qu ils poursuivent La trajectoire 2 une possible bifurcation de la controverse La d ception provoqu e par l incapacit de la science r pondre aux attentes de clarification du tableau des risques et la vuln rabilit qui en r sulte pour l expertise peuvent conduire une premi re bifur cation de la contestation qui se porte d sormais sur la mani re dont l expertise est organis e et sur les insuffisances institutionnelles dans le domaine de la collecte des donn es Derri re l absence de r sultats probants certains soup onnent la volont de cacher la r alit du risque et mobilisent les bribes d information glan es ici ou l pour
18. es pouvoirs 9 Philippe Roqueplo 1997 Entre savoir et d cision l expertise scientifique Paris Institut national de la recherche agronomique INRA ditions collection Science en questions 112 p Michel Callon 1999 Des diff rentes formes de d mocratie technique Les Cahiers de la S curit Int rieure Risque et D mocratie n 38 p 37 54 Callon ef al 2001 Agir dans un monde incertain Dominique Bourg et Daniel Boy 2005 Conf rences de citoyens mode d emploi Paris ditions Charles L opold Mayer et Descartes amp Cie 110 p 10 Dominique Pobel et Jean Fran ois Viel 1997 Case control Study of Leukaemia among Young People near La Hague Reprocessing Plant The Environmental Hypothesis Revisited British Medical Journal vol 314 p 101 106 11 Sur la p riode 1978 1996 il s agissait de quatre cas observ s pour deux attendus 12 Elle s est notamment traduite par la formation du Collectif des M res en col re qui a depuis lors constamment interpell les autorit s les exploitants d installa tions et les scientifiques avec une double demande tablir les faits en rendant transparente l information et en levant les incertitudes scientifiques assurer un environnement sain Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 31 publics fran ais mettent alors en place une premi re commission d experts sous la pr sidence du professeur Souleau La pr sentation pu
19. ions l Association pour le Contr le de la Radioactivit de l Ouest ACRO la Commission de Recherche et d Information Ind pendantes sur la Radioactivit CRIHRAD et le Groupement des Scientifiques pour l Information sur l nergie Nucl aire GSIEN voir encadr Il a galement entretenu des relations ouvertes avec les interlocuteurs locaux qu ils soient lus associatifs ou journalistes Les r sultats des travaux du GRNC rendus publics en juillet 19991 d gageaient une estimation du risque de leuc mie dont la valeur centrale tait de 0 0017 cas pour la p riode 1978 1996 soit une valeur mille fois inf rieure l exc dent statistique obtenu deux cas par l tude pid miologique de Pobel et Viel La robustesse de cette valeur de r f rence a t prouv e en faisant varier un chantillon de param tres sans que cela remette en cause l ordre de grandeur du risque 13 Groupe Radio cologie Nord Cotentin 1999 Estimation des niveaux d exposition aux rayonnements ionisants et des risques de leuc mie associ s de populations du Nord Cotentin Rapport de synth se juillet 355 p 32 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL ASSOCIATIONS AYANT PARTICIP L EXPERTISE GRNC Le GSIEN Fond en 1976 le Groupement de Scientifiques pour l Information sur l nergie Nucl aire diffuse de l information sur les questions que soul ve le d veloppement de l industrie nucl aire en France la suite de
20. laire si l on admet que certains acteurs au moins abordent l expertise dans une vis e strat gique autre que la simple manifestation de la v rit Dans ce jeu de l expertise on trouve tout la fois des acteurs qui visent la cl ture la plus pr coce de l expertise scientifique dans le but de mettre un terme au d bat public et des acteurs qui mobilisent les incertitudes voire les entretiennent de fa on conforter leur position d acteurs dans les jeux conomiques et sociaux auxquels ils participent Selon les cas il s agira d un groupe industriel qui financera des travaux scientifiques visant montrer que tel risque est une invention de la junk science ou bien d une ONG qui jamais satisfaite des travaux d expertise effectu s demandera sans fin de nouvelles tudes et dans l attente de r ponses convaincantes ses questions exigera un moratoire sur la technologie prise pour cible Son argument central et imparable sera que l innocuit long terme de ladite technologie n a pas t prouv e ce qu aucune valuation scientifique ne peut videmment faire La repr sentation du d roulement possible en trois phases des rapports entre contestation et expertise attire l attention sur le diagnostic porter sur une situation empirique donn e Il importe en effet d apporter des r ponses qui ne soient pas d cal es comme celle qui se contenterait de financer de nouvelles tudes et d accumuler de
21. nce scientifique fournir temps les l ments suffisants pour fonder une d cision clair e en mati re de pr vention de risques potentiellement graves et irr versibles qui se trouve d ni e Prenons l exemple de la controverse sur les plantes g n tiquement modifi es Un des arguments prend la tournure suivante certains effets de ces OGM ne peuvent tre connus qu travers l ob servation des impacts de leur diffusion grande chelle cela cause d effets de seuil et de synergie vraisemblables mais inconnus ex ante Dans ces conditions les promoteurs de ces plantes ne peuvent pas garantir ex ante l innocuit de leur introduction dans les agrosyst mes Une culture transg nique massive reviendrait embarquer la collectivit dans une aventure grande chelle dont l issue peut tre la r alisation de dommages massifs et irr versibles L expertise scientifique tant radicalement incapable de donner ex ante des garanties suffisantes pour les d cisions prendre d autres types de r f rents de nature thique et politique devraient tre mobilis s et seraient les seuls la hauteur des enjeux Le temps T3 sur la figure 1 repr sente le moment o la contestation bifurque sur le chemin de l autonomisation Lors de cette troisi me tape des acteurs aux int r ts divergents se coalisent n anmoins contre toutes les composantes du dispositif en place contre les garants des proc dures contre les
22. ns la conduite des affaires humaines Paris ditions de la Maison des Sciences de l Homme Institut national de la recherche agronomique INRA ditions 352 p Philippe Kourilsky et Genevi ve Viney 2000 Le principe de pr caution Rapport au Premier ministre Paris ditions Odile Jacob 406 p et Godard et al Trait des nouveaux risques Pr caution crise assurance op cit 6 Voir Commission des Communaut s europ ennes 2000 Communication de la Commission sur le principe de pr caution Bruxelles f vrier COM 2000 1 final 29 p Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 29 R sum Risques collectifs environnementaux et sanitaires et contestation sociale de l action publique et de l expertise vont d sormais de pair Une demande de r appropriation citoyenne de l une et de l autre est formul e de fa on r currente par des organisations non gouvernementales ONG L ouver ture de l expertise scientifique sur les acteurs concern s devient un enjeu lucider L exp rience du Groupe Radio cologie Nord Cotentin en France est l une des plus avanc es dans ce pays mais ses r sultats sociaux demeurent en retrait sur les attentes Ce cas soul ve la question des diff rentes trajectoires possibles de co volution de l expertise et de la contestation sociale lorsque certains acteurs au moins abordent l expertise avec des vis es strat giques Abstract Environmental and he
23. ommel Chaire D veloppement durable de Sciences Po thierry hommel sciences po org L une des donn es de base de l entr e en politique des nouveaux risques environnementaux et sanitaires est le lien nou entre la gestion de ces risques et l mergence de ph nom nes de contesta tion sociale La contestation prend pour cibles le contenu de l action publique ou de l inaction publique l expertise scientifique convo qu e par les institutions publiques pour guider leur gestion aussi bien que les activit s conomiques auxquelles la responsabilit est imput e Cela donne lieu au croisement de deux attentes au del des pisodes judiciaires D un c t se manifeste une forte revendication par les ONG ou les groupes concern s d une d mocratie participative devant permettre aux citoyens de se r approprier tant l expertise que la d cision publique De l autre les autorit s publiques attendent de l expertise qu elle contribue teindre ou confiner les mouvements de contes tation en ramenant les d bats sur le terrain de l objectivit construite par la connaissance scientifique L expertise est ainsi expos e des demandes contradictoires quant aux r les qu elle doit remplir et aux 1 Olivier Godard Claude Henry Patrick Lagadec et Erwann Michel Kerjan 2002 Trait des nouveaux risques Pr caution crise assurance Paris Gallimard collection Folio Actuel n 100 602 p
24. pels publics par exemple au boycott et des p titions mais aussi d noncer les comportements d autres associations accus es de collaboration ou de compromission avec les pouvoirs L ACRO L Association pour le Contr le de la Radioactivit de l Ouest ACRO a elle aussi t cr e en 1986 la suite de la catastrophe de Tchernobyl dans le but de permettre aux citoyens de disposer d informations ind pen dantes des sources publiques sur la pr sence d l ments radioactifs dans l environnement Sa r gion d intervention est le Nord Cotentin concern par les installations nucl aires de La Hague et la centrale nucl aire de Flamanville Le dispositif comprend un laboratoire d analyses qui r alise Voir Sezin Top u 2006 Dossier engagement public des chercheurs nucl aires de l engagement savant aux contre expertises associatives Natures Sciences Soci t s vol 14 n 3 p 249 256 et Sezin Top u 2006 ACRO Vingt ans de combat pour une expertise citoyenne L ACROnique du Nucl aire n 75 d cembre p 30 40 Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 33 des prestations analyses tudes collectes d informations pour des collec tivit s locales des groupes cologistes comme Greenpeace ou des particu liers Ce laboratoire est quip pour d tecter des radionucl ides tester la teneur en tritium des eaux ou celle du strontium 90 dans le lait L a
25. r sultant pour chaque classe d ge d une combinaison d une voie d acc s et d un produit alimentaire Le risque total tait obtenu par addition des risques l mentaires 17 GSIEN 2002 Commentaire GSIEN sur les travaux du GRNC dans Annexe 10 du rapport Analyse de sensibilit et d incertitude sur le risque de leuc mie attri buable aux installations nucl aires du Nord Cotentin Rapport principal Groupe Radio cologie Nord Cotentin juillet p 1 2 de l annexe 36 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL locaux associations nationales r gionales et locales Pour ce qui est de questions de sant et d environnement et d une fa on toute sch matique les premiers administrations d tat industriels consid rent vite qu on en sait assez pour clore le d bat et ont tendance solliciter les donn es existantes pour minimiser les incertitudes Les associatifs r gionaux et nationaux mobilisent au contraire les incertitudes pour r cuser toute cl ture du d bat scientifique sur le risque et refuser de valider les r sultats qui ne correspondent pas aux buts de leur action militante le combat antinucl aire dans le cas d esp ce Ils choisissent en fait comme collectifs la coh sion fragile voulant s imposer comme interlocuteurs sans se lier aux autres parties de ne pas reconna tre la s paration entre la recherche de l objectivit des faits et le d bat normatif emportant des jugements de valeur sur l
26. re quant l innocuit des rejets radioactifs Pour sa part Le GSIEN a fait tat de fortes r serves jugeant finalement vains les efforts d valuation des incertitudes En d pit de son ampleur et de ses apports il n en reste pas moins que l tude d incertitude ne contribue pas expliquer l exc s de leuc mie des jeunes de 0 24 ans constat dans le Nord Cotentin m me si ses r sultats semblent conforter les conclusions de 1999 C est d ailleurs la raison pour laquelle nous pensons que les efforts r alis s pour valuer les incertitudes s av rent finalement vains En effet la m connaissance des ph nom nes est telle que l on teste non pas les incertitudes de l effet sur la sant mais celle du mod le Il n est donc pas tonnant de trouver de faibles variations Ainsi cette importante tude d incertitude a t r alis e la demande d acteurs qui in fine ont jug l exercice vain par principe En d pit de cela le GSIEN a continu demander l approfondissement des tudes et de la collecte de donn es Ce cas d cole d expertise participative touchant une question socialement tr s controvers e l incidence sanitaire d activit s indus trielles nucl aires souligne l ambigu t de la participation d experts li s diff rents int r ts tat exploitants industriels nationaux et risque final La seconde d composait le risque en risques l mentaires
27. s cautionner l inacceptable Le risque de l ouverture de l expertise peut tre pris Mieux vaut pour ceux qui le prennent savoir quoi ce risque les expose
28. s L opinion publique face aux plantes transg niques Entre incertitude et prise de conscience Colloque de la Villette du 24 novembre 1998 Paris Albin Michel et Cit des sciences et de l industrie 224 p p 102 109 Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 41 Une seconde bifurcation l autonomisation de la contestation Si une red finition du dispositif d expertise en particulier son largissement aux repr sentants des contestataires ne permet finale ment pas de donner les r sultats attendus de diff rentes parts pour les autorit s publiques et les acteurs industriels la neutralisation ou l pui sement de la contestation pour les contestataires la confirmation ou la non r futation de leurs all gations et le renforcement de leur position comme interlocuteurs incontournables le processus peut conna tre une nouvelle bifurcation conduisant l mergence d une contestation plus fondamentale qui prend son autonomie par rapport au tableau scientifique La dynamique de contestation sociale sur l incidence sani taire des rejets radioactifs r siduels dans le Nord Cotentin n avait pas en 2006 connu cette bifurcation en d pit des pr misses d argumenta tion qui la rendaient possible Dans ce sc nario d autonomisation la base de connaissances mobi lis e par le dispositif d expertise est d sormais radicalement contest e C est la capacit de la connaissa
29. s donn es lorsque la contestation porte d j sur la mani re dont l expertise est organis e voire sur la pertinence de toute valuation scientifique 26 Voir David Michaels and Celeste Monforton 2005 Manufacturing Uncertainty Contested Sciences and the Protection of the Public s Health and Environment American Journal of Public Health vol 95 suppl 1 p S39 48 Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 43 Les dispositifs largis d expertise dans lesquels certains auteurs voient un progr s de la d mocratie technique offrent aussi des possibilit s nouvelles au d ploiement de strat gies d acteurs visant entretenir les controverses et la d fiance vis vis de la gestion publique Bien que r clam au nom des grands principes de la d mocratie l exercice de la participation peut d boucher sur deux r sultats non d sir s Le premier est la perversion de l expertise scientifique en un exercice domin par les croyances et les projets militants ou par les int r ts professionnels ou conomiques au nom d adaptations jug es n cessaires pour rapprocher les points des vue des experts des pr occupations des acteurs Le second s observe lorsque l ouverture et la participation une fois obtenues et pratiqu es sont retourn es contre les commanditaires de l expertise en tant pr sent es par les contestataires comme un pi ge con u par le pouvoir pour amener les participant
30. s technologies prises en elles m mes ind pendamment de l volution du tableau pr cis des inconv nients des risques ou des dangers qui peuvent tre imput s ces activit s et ces technologies sur une base scientifique Le progr s ult rieur des connaissances n affecte plus dans les cas consid r s les repr sentations sociales stabilis es Les technologies OGM organismes g n tiquement modifi s et nucl aire ont t prises dans cette logique Comment comprendre ce ph nom ne Les recherches sur l am plification sociale des risques ont mis en avant le mode de communi cation des m dias modernes et le caract re motif des positionnements des personnes vis vis de certains risques Cette approche postule cependant un risque d j bien connu de l expertise scientifique ce qui ne correspond pas au contexte des risques ni av r s ni invalid s D autres ont soulign l importance des enjeux identitaires par exemple pour des communaut s locales Nous voulons ici attirer l attention 20 Dans le contexte des controverses technologiques l expression a t introduite par Robin Gregory James Flynn et Paul Slovic 1995 Technological Stigma American Scientist Vol 83 mai juin p 220 223 21 Il y a l il faut le noter un processus diff rent d une mont e en g n ralit situant un enjeu ou un conflit local dans le contexte d un bien sup rieur commun comme chez Boltanski et Th
31. ssociation proprement dite publie une revue trimestrielle ACROnique du nucl aire organise des conf rences et r pond aux demandes d information du public Bien que l association revendique sa neutralit vis vis du nucl aire ses principaux fondateurs et animateurs dont Pierre Barbey taient des mili tants antinucl aires ou syndicaux Toutefois l ACRO a choisi de se situer sur le terrain scientifique dans sa confrontation avec les autorit s et avec les exploitants des installations de retraitement la Compagnie g n rale des mati res nucl aires COGEMA int gr e depuis au Groupe AREVA Elle revendique son appartenance au tiers secteur scientifique dont le projet est de remettre en question la division du travail entre experts et profanes au profit d une relation de coproduction des donn es et des connaissances Aussi les habitants de la r gion sont ils sollicit s pour collecter les donn es Dans cette perspective l ACRO participe fr quemment aux instances de concertation Cette d marche lui a valu des critiques parfois vives de la part d autres associations Elle a par exemple t d nonc e en 2004 par la CRIIRAD comme collabo et r visionniste En d pit d un r sultat la signification assez nette la r daction du rapport n a pas adopt une pr sentation consensuelle Les r serves finales mises par les experts de l ACRO et du GSIEN sur les r sultats eux m mes et sur cer
32. tains aspects de la m thodologie ont t int gr es au rapport ces experts assumant cependant leur participation aux travaux et la m thodologie d ensemble En revanche la CRIIRAD s est d solidaris e du rapport au vu des r sultats tout en ayant pris part aux travaux et initialement approuv la m thodologie Les principales r serves mises par les experts associatifs ont t de deux ordres Les premi res portaient sur la proc dure retenue un cadrage trop troit d laissant l incidence sur la population totale et ignorant l impact des produits chimiques le d s quilibre entre les moyens humains et financiers dont les associatifs disposaient par compa raison avec les repr sentants institutionnels Les secondes concernaient le fond en d pit des tests de sensibilit r alis s la m thode adopt e n avait pas permis de r aliser une tude compl te de l incertitude attach e aux r sultats obtenus de plus pour caract riser les valeurs de nombreux param tres le groupe avait choisi de se caler sur des hypoth ses r alistes touchant par exemple aux comportements alimentaires ou aux loisirs alors que l ACRO demandait de retenir des valeurs extr mes qui auraient inclus avec certitude les valeurs r elles notion d hypoth se enveloppe Tout en appr ciant l ouverture manifest e leur endroit et l utilit du travail accompli les associations 34 OLIVIER GODARD et THIERRY HOMMEL ont consid
33. tien du d bat sur le terrain scientifique La contestation porte sur On veut savoir l insuffisance des donn es et des recherches L attente s accompagne de mesures de pr caution La trajectoire 1 une contestation demeurant arrim e au champ scientifique Dans une premi re phase T1 sur la figure 1 la contestation fait corps avec les d bats scientifiques avec leurs incertitudes et leurs controverses conduisant des conclusions vari es voire contradictoires quant aux risques environnementaux et sanitaires ou aux causes incriminer L appr hension des enjeux li s la d cision reste d l gu e aux experts scientifiques Les attentes des acteurs sociaux se canalisent sur une demande de nouvelles tudes et recherches et sur la poursuite de la collecte des donn es Sur cette sc ne les modes de validation et de r futation des arguments chang s sont d riv s des r gles du travail scientifique Selon le sch ma standard de l analyse des risques il est attendu de l expertise qu elle produise une valuation quantitative du risque pour les groupes expos s et que s en d duisent les actions rationnelles engager Toutefois lorsque les incertitudes scientifiques mises au jour dans les connaissances disponibles sont amples sans para tre susceptibles d tre lev es rapidement par la recherche l expertise scientifique n est plus capable de r gir la situation de fa on consensuell
34. ur l environnement Si celles ci 18 La contestation sociale peut naturellement avoir d autres fondements par exemple la d nonciation de restrictions jug es abusives des libert s fondamentales Sont alors en jeu des valeurs collectives tenues pour essentielles par les groupes qui animent la contestation sans que des incertitudes scientifiques soient au c ur du probl me 19 Voir Francis Chateauraynaud et Didier Torny 2000 Les sombres pr curseurs une sociologie pragmatique de l alerte et du risque Paris ditions de l EHESS cole des hautes tudes en sciences sociales 476 p Contestation sociale et organisation de l expertise scientifique 37 trouvent des relais qui assurent leur raccordement des enjeux et des d bats collectifs plus larges incertitudes et controverses scientifiques deviennent dans le champ public le noyau de controverses sociales On a alors affaire des controverses hybrides qui d ploient leurs effets concomitamment dans l espace public et dans le champ scientifique Cela provoque diff rents d placements par rapport aux questions initialement soulev es Bien qu il n y ait rien l de m canique on voit dans certaines situations ces controverses hybrides donner essor des controverses sociales qui s autonomisent par rapport la dynamique des connaissances scientifiques Elles tendent d boucher sur une fixation de repr senta tions sociales stigmatisant des activit s ou de
35. ustrielle la d termination objective des int r ts collectifs d pend d une mobilisation de l expertise scientifique et technique suppos e pouvoir aboutir une identification univoque des objectifs atteindre et des politiques mener La forme moderne de cet imaginaire est l institu tionnalisation des proc dures d valuation des risques risk assessment comme seule base l gitime des politiques du risque Lorsque les acteurs sociaux ont affaire des hypoth ses de risques qu il n a pas encore t possible de confirmer ou des risques poten tiels dont l existence m me n est pas av r e sans pouvoir tre exclue en l tat des connaissances l imaginaire positiviste voit son inad qua tion clater au grand jour C est dans un tel contexte que le principe de pr caution est sollicit Sous l gide de ce principe les dispositifs d expertise continuent certes tre une pi ce centrale qui guide l action publique mais leur signification ne peut viter de changer quand 4 Luc Boltanski et Laurent Th venot 1991 De la Justification Les conomies de la grandeur Paris Gallimard collection NRF Essais 485 p p 150 157 5 Les ouvrages et articles sur le principe de pr caution abondent mais l ensemble demeure encore assez confus diff rents concepts tant vis s par la m me expression En langue fran aise voir Olivier Godard dir 1997 Le principe de pr caution da
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