genèse de texte : actions
Contents
1. ments en amont du texte mais surtout elle montre comment le texte m me modeste comme celui ci se constitue dans la prise en compte dialogique du statut de l interlocuteur qui p se ici d un poids d cisif sur les ressources du projet Cette prise en compte se fait sentir progressivement dans le processus d criture ou bien plut t de r criture du texte dans sa globalit Il est vrai que le maire adjoint ne re tiendra probablement de cette lettre que ce qui tait d j pos dans la premi re criture Nous avons besoin d argent mais il l aurait n anmoins trouv e irrecevable comme telle C est dans l espace de ce d tour que se joue le texte comme tel B Usage de Gen se comme outil d analyse r flexive sur les strat gies d criture des l ves cole Pablo Picasso Nanterre l ves de la classe de Jacques Hamann Contexte p dagogique les l ves de CM2 qui acc dent librement au traitement de texte et Gen se en particulier dans une classe jointe au Centre de Classes Lecture sont ici en situation contrainte Il s agit d ob ir la consigne de trois phrases impos es C est l apr s midi Ca risque d arriver aujourd hui Ca arrive souvent les apr s midi quand il fait tr s chaud et d une conclusion Devinez la suite Avec un groupe de 4 l ves nous comparons les gen ses de Sonia et Emmanuel Maria refuse de montrer son texte qu elle trouve nul et donc sa gen se Julien pr f rera r2. bizarre de ne pas bien savoir lire tant adulte dites vous que ce sont des personnes comme les autres qui ont eu des probl mes pandant leur vie et que vous pourriez tr s bien tre illetr e 2 session dur e 38mn 56 sec L l ve ob it l injonction de r criture et outre le toilettage surcharge son texte en noyant les l ments du pr c dent On peut se demander s il a eu conscience du caract re achev du texte pr c dent ce qui est possible car il passe beaucoup de temps parcourir le texte en lecture sans agir L l ve a proc d par amplification abusive de son texte initial peut tre parce que d j celui ci consistait dans la formulation sous trois angles diff rents de la m me id e la g ne et la honte g n ra lis e dans la 2 phrase en un principe le droit de se moquer et retourn e sous forme d adresse au lecteur dans la derni re phrase Les l ments que nous venons d analyser ici constituent seulement une bauche du travail possible Les pistes sont nombreuses et le mat riau encore insuffisant pour que nous puissions g n raliser beau coup de sorte que notre d marche se situe encore dans une dimension qualitative ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 Remarquons n anmoins pour l instant que cette approche g n tique de l crit pr sente l cole un ca ract re nouveau C est ici que l tude des possibilit s du logiciel r v le
3. id es et crire vraiment du texte par diff rence avec crire comme l oral Paradoxalement l criture est pr sent e comme reflet d une id e d abord m moris e dans la t te En m me temps la relecture est per ue comme servant essentiellement corriger toiletter Julien commente en comparant avec ses propres strat gies Moi je me relis pas phrase par phrase mais je relis tout le texte la fin Gen se de Emmanuel Texte final de la 1 session C est l apr s midi a risque d arriv aujourd hui Ca arrive souvent les apr s midi quand il fait chaut Les espris d moniaque un jour de printemps j tais tranquillement assis au soleil quand tout d un coup la terre se mis trembl les nuages devenait noir les abres trembl et tout redeveunit normal Mais le seul probl me c est que tous les apr s midi quand il fait chaut les esprits revi ne et il enl ve des enfants un jour un groupes d enfant d cide d allais au bout du mist re Mais comment faire un autre dit ont na qua allait la montagne de feu pour allait r soudre l nime Dacort di sent les enfant mais quelle direction prendre le nord la montagne de feu l est On s interroge sur les esprits d moniaques qu il claire comme suit 6 C est comme une note 7 J ai pas pens ce que j ai crit 8 Je veux rajouter des choses Le passage de la note au texte indique que le souci de la coh rence est pr sen
4. l criture passe de la consignation au texte o le scrip teur anticipe la coh rence de son propos en analysant ce qu il a d j crit en somme le moment o la mise en texte proprement dite se d clenche Le d clencheur se lit au moment o l auteur pr figure la cl ture du texte sa coh rence globale o il pressent comment tous les fils vont tenir ensemble pour former un ensemble organique et non une simple accumulation f t elle bien rang e C est pourquoi la r criture appara t comme l acte constitutif de l criture elle m me l acte d crire est un labeur qui exige du temps et de multiples reprises La r criture travail de la honte ou travail du texte La pens e expos e L criture n est jamais le fruit d un geste spontan elle est toujours le r sultat d un travail l exception de l criture automatique des surr alistes et il s agit de la manifestation savante d un projet bien d fini le texte est toujours le r sultat d un processus laborieux sinon douloureux et ceci de l aveu m me de tous les crivains et pas seulement par coquetterie La mise en texte est l occasion d une double rencontre pour le scripteur qui met en route son travail D une part la rencontre de la langue comme mat riau travailler et ou qui fait travailler l id e Du point de vue du scripteur la pens e ne s invente pas toute sur le coup elle fonctionne avec des sur apprentissages des donn es imm diates des redit
5. probl mes de forme et abandonnent au bout quinze minutes Peut tre serait il pr f rable de leur proposer directe ment une r criture avec un expert ou une r flexion plus compl te plusieurs sur un seul texte ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 C Comment Gen se du texte r v le sur un texte non r ussi qu il y a un seuil o la r criture doit tre stopp e Travail produit par Gilbert Saby cole Pallu Le V sinet Contexte p dagogique la classe a visionn un document vid o qui reprend une mission t l vis e portant sur l illettrisme Dans la perspective de l article de journal elle a travaill sur les composantes de ce type d crit L l ve crit sur Gen se un texte dans lequel il donne son point de vue sur l mission cens e tre connue du lecteur Texte final dur e totale de l criture 1 heure 15mn 56 sec Cette mission m a plu par certains c t s car elle permettait aux illettr s de s exprimer mais par contre je pense que les personnes interrog es devaient se sentir extr mement g n es de r v ler leurs sentiments tous les t l spectateurs qui regardaient l mission Je trouve injuste que les illet tr s aient ressentir de la honte L illettrisme est un probl me dont on a pas le droit de se moquer ni de rejeter les personnes qui en suoffrent et qui subissent les cons quences dans leur vie quoti dienne Si vous rencontrez une de ces
6. que la mise en texte travaille m tamorphose et ventuellement transcende Il ne s agit pas du tout ici d ateliers d criture du type d blocage parce que le point de d part n est pas dans la contrainte formelle mais dans le souci de d brouiller par l cri ture une exp rience premi re de mieux la comprendre ou de mieux se comprendre soi m me de tra vailler l expression de soi parce que celle ci n est jamais donn e d embl e Cette litt rature de l imm diatet ou litt rature naturelle ne vise pas la production d une beau texte dont les canons reste raient sans doute interroger du c t d un certain acad misme scolaire mais celle d un texte vrai c est dire capable d un v ritable processus de production ici de transformer l auteur et sa vision du monde au cours de son laboration deuxi mement l criture en circuit court d finie par l AFL paradoxalement les articles du journal en circuit court sont relativement brefs et crits chaud dans une intention pol mique cette cri ture de point de vue si elle int gre les r critures par les animateurs du journal les discussions provo qu es par la lecture du journal les articles r ponses peut devenir une criture longue pour un scripteur donn On entrevoit cette possibilit la lecture synth tique des articles d un m me auteur durant le temps d une classe lecture ou d une ann e pour les groupes qui pratiquent r guli rement l
7. re en former un texte la fonction de l criture n est plus ici de consigner un donn mais d ai der organiser ce donn pour le scripteur comme pour ses futurs lecteurs afin de mieux le compren dre Or cet acte de compr hension prendre ensemble n est pas innocent il aboutit une transforma tion du donn de pens e initial transformation qui se fait partir du mat riau m me de l crit Du point de vue de la fonction de l criture nous nous situons donc avec la Gen se du texte au del de la simple fonction d expression d un soi toujours plus ou moins mythique et de la fonction de communication qui l accompagne dans les m mes termes psychologiques l criture n est pas trait e seulement comme un moyen d exprimer ce qu on veut dire c est dire ce qu on veut faire passer d autres mais comme un outil pour y voir clair dans sa propre pens e c est dire en r alit fabri quer celle ci On peut ainsi d crire d un point de vue ph nom nologique les tapes du processus de mise en texte comme suit Premi rement on part d une pens e premi re dans laquelle tout est d j virtuellement pr sent soit une exp rience pr texte l criture quelque outils pour la lire la conscience globale d un lecteur mo d le le type d crit et le ou les types de texte dans lesquels on se situe La transcription de ce donn premier assure simplement le scripteur de la permanence des signifiants Elle perm
8. ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 1 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 DOSSIER RECHERCHES ACTIONS 2 GEN SE DE TEXTE ACTIONS Fran oise KALTEMBACK L criture est plus qu une activit d expression et de communication elle tient de la fabrication d un objet ou d une oeuvre comme le tissage le ciselage le maquillage ou la coiffure Nous partons d une d finition de l criture qui fait corps avec les possibilit s du logiciel nous distinguons les processus d criture en g n ral et l acte de production du texte comme tel Dans les processus d criture en g n ral le scripteur marque inscrit d pose sur un support des objets qui y acqui rent un caract re de permanence ceci produit des types d crit aussi divers que la liste les notes de lecture la r union des id es en vue d une r daction ou d un mode d emploi ou de tout autre chose Nous qualifions ces critures comme transcriptives au sens o elles consignent sur un support fixe des id es pr alablement tablies l acte d criture se borne ici la traduction dans un autre code de ce qu on a pr alablement saisi dans une pens e voire une parole ant rieure Cette criture porte voix sa transcription neutre reflet d un objet pr alablement existant repr sentation d une id e ant rieure se rait en quelque sorte inoffensive Dans l acte de production du texte sp cifiquement le scripteur doit laborer ces l ments d criture de mani
9. SOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 Texte final dur e 47mn 20sec cole Jacques Pr vert rue Pr v t 59650 villeneuve d ascq tel 20 91 20 52 vendredi 5 f vrier Monsieur Madame Nous partons en classe verte avec notre cole dans les Ardennes en juin Nous avons besoin d argent On va faire un loto l cole le 19 mars Nous avons besoin de lots Pourriez vous nous donner quelques lots Merci infiniment de nous aider r aliser notre projet Pour le groupe Fanny 1 session dur e 16 mn a criture C est dire premi re ligne de l criture Nous avons besoin d argen b criture ajout la suite de Nous avons besoin de los On va faire un loto dans l cole criture plac e au d but du texte Nous partons en classe verte avec notre cole dans les Ardennes d criture plac e la fin du texte Pourriez vous nous aider en nous donnant quelques lots Merci infiniment de nous aider r aliser notre projet Pour le groupe Fanny O 2 session dur e 31mn Apr s consultation de la fiche de travail autonome Lettre de demande r daction de l en t te dur e 5 mn Toilettage du texte au plan orthographique et ajout des pr cisions sur les dates en juin et 19 mars On peut pointer l ordre des deux sessions qui n est pas sans attirer l attention sur l int r t et les vices des guides techniques ou des co
10. armacie de Platon revue Tel Quel n 32 et 33 p 3 4 Un texte n est un texte que s il cache au premier regard au premier venu la loi de sa composition et la r gle de son jeu La dissimulation de la texture peut en tout cas mettre des si cles d faire sa toile La toile enveloppant la toile Des si cles d faire la toile La reconstituant aussi comme un organisme R g n rant ind finiment son propre tissu derri re la trace coupante la d cision de chaque lecture R servant toujours une surprise l anatomie ou la physiologie d un critique qui croirait en ma triser le jeu en surveiller la fois tous les fils se leurrant aussi vouloir regarder le texte sans y toucher sans mettre la main l objet sans se risquer y ajouter unique chance d entrer dans le jeu en s y prenant les doigts quelque nouveau fil Ajouter n est pas ici autre chose que donner lire Il faut s arranger pour penser cela qu il ne s agit pas de broder sauf consid rer que savoir broder c est encore s entendre suivre le fil donn C est dire si l on veut bien nous suivre cach S il y a une unit de la lecture et de l criture cette unit ne d signe ni la confusion indiff renci e ni l identit de tout repos le est qui accouple la lecture l criture doit en d coudre Mikhail Bakhtine Esth tique de la cr ation verbale Gallimard p 335 Le rapport dialogique est d une amplitude plus grande que la pa role dialogique dan
11. crire tout de suite apr s le commentaire des deux premi res gen ses Gen se de Sonia 1 554 signes Texte final de la 1 session dur e 55mn 48 sec C est l apr s midi a risque d arriver aujourd hui a arrive souvent les apr s midi quand il fait chaud C est l histoire d une l gende qui dit que quand il fait chaud des esprits mal faisant se main feste et attaque tous les gens de la ville Un jour pr s de ma demeure il y avait un bruit qui disait que quiconque p n trer dans l glise serait an anti mais moi bien s r je n avais pas peur de d fi e cette fameuse glise Alors je d cida d installer une affiche qui disait Avait vous envie de vous d barrassez de ces esprits mal faisant alors venez avec moi les combattre Le lendemain matin persones ne s est manifester Alors je fus oblig e de les combattre seul Je suis all e dans cette fameuse glise et je dis y a t il quelqu un dans cette pi ce personne ne me r pondit J tait en train de parcourir cette quand soudain j entendis un bruit qui vener de la chambre du pr tre devi nez se que j ai fait je suis all e voir ce qui se passe dans cette pi ce D s que je suis entr e dans cette pi ce je vis le pr tre alloger par terre je lui demanda se qui s tait pass il me r pondit qu il avait vu une esp ce de pourbillon J ai tout de suite pans e aux esprits mal faisant Je demandit au pr tre s il connaissait une pri re contre les esprits mal faisant alors il
12. e circuit court on voit comment un auteur donn poursuit les m mes th matiques dans plusieurs num ros Sans doute peut on indiquer de multiples autres situations pourvu qu elles portent le projet de l l ve elles doivent chaque fois d velopper la possibilit pour lui de forger dans le texte un style propre m me et surtout avec l aide des autres experts ou non Quelques exemples A Comment Gen se du texte r v le sur un texte r ussi des strat gies inhabituelles tout fait productives cole Jacques Pr vert Villeneuve d Asq Travail produit sous la direction d Andr Virengue L l ve E niveau CE1 crit une lettre de demande la mairie Elle est dans une situation p dagogi que de projet elle a pris en charge cette t che pour le compte de son groupe Elle fait usage du traitement de texte en acc s libre 3 Cette exp rience a t entreprise avec succ s dans le Val d Oise dans une classe de CP sans l aide de Gen se du texte La m me aventure a t propos e des CE1 avec un logiciel d aide formelle la cr ation de contes les l ves en ont tr s faiblement tir parti au niveau du texte probablement parce qu ils ont t brid s au niveau imaginaire ou affectif par la contrainte formelle Ces m mes l ves pourraient repartir sur les nouvelles bases indiqu es ici Cf Fran oise Kaltemback De Pasteur cartonne comme crit en circuit court A L n 32 d c 90 p 38 44 AS
13. e les id es sont d j r unies ainsi que les mots pour les dire il faut reconna tre qu il reste encore l l ve une part de travail pour mettre tout ceci en coh rence pour faire un beau travail rh torique d autre part le mod le tant donn d avance on voit mal comment le brouillon aurait n anmoins droit de cit dans la mesure o ce que l on vise est un beau discours conforme aux canons et non pas l ef fort voire les errances d une pens e cr ative Ce mod le ancien de l criture avait n anmoins le m rite de faire appara tre qu crire c est travailler la langue et en cela il risque d tre moins pernicieux que celui plus r cent de la spontan it cr atrice Si le scripteur crivain ou apprenti crivain esp re en la muse capable de lui souffler les tapes succes sives d un texte achev alors les souffrances du brouillon le d sesp rent comme autant de rat s inuti les C est ce qu ont bien reconnu les pratiques des ateliers d criture dans lesquels l imposition d une contrainte formelle est souvent reconnue paradoxalement comme un moyen de d blocage On voit donc se dessiner ici le statut de la r criture comme l ment intrins que de l acte d crire tout ajout suppression remplacement d placement d une virgule d un mot d un paragraphe d un chapi tre selon les cas est porteur de cons quences pour l ensemble Qu on pratique cette op ration seul ou avec l aide d autres experts ou no
14. es inanalys es inscrites d j dans la langue travers laquelle elle s est form e 1l reste les carder discriminer ce qui sera susceptible de tenir en semble D autre part la rencontre pour l crivain de son propre double le lecteur mod le toujours n cessaire ment pr sent de par la structure dialogique de l crit Dans ce travail l auteur dialogue en tant que lec teur avec son propre crit non pas comme on le dit souvent propos de la lecture pour se l approprier mais au contraire pour le tirer hors de l nonciation subjective ou solipsiste pour le mettre en r so nance avec l l ment h t rog ne que constitue l existence virtuelle toujours pr sente d un lecteur autre que lui m me C est ce travail d objectivation qui constitue la mati re du d ploiement du texte La comparaison avec le tissage indique qu il y a du plein et du vide le lecteur suit les pleins et invente plus ou moins librement dans les vides selon la nature ouverte ou ferm e du texte en cons quence le fil conducteur n est pas unique Ceci ne signifie pas que tout est permis dans l interpr tation mais indique seulement que toute lecture est une construction balis e par l auteur en fonction d un lecteur mod le et donc que tout scripteur doit organiser ce balisage guide minimal de l aventure du texte dans les lectures diverses dont il est susceptible de faire l objet C est ce qui permet ensuite au texte de 1y acques Derrida La ph
15. et de ne pas les oublier La production du texte va commencer partir du moment o le scripteur reprend ces l ments pour les organiser et les d velopper car l organisation n est pas un simple classement ni le d veloppement une expansion lin aire qui va de soi qui d coule de fa on naturelle comme s il s agissait simplement de choisir entre les bons signifiants ceux qui rendent le mieux compte de l id e Au contraire la coh rence de l organisation et du d veloppement s acquiert par un travail sur les signifiants eux m mes de reflets de l id e ils deviennent instruments de production de celle ci c est le mat riau de la langue crite qui devient objet du travail parce que la langue n est pas le v hicule neutre des op rations mais au contraire elle r siste dans la mesure o elle produit des effets de sens seconds dans l intention mais visibles et efficaces dans le texte ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 D s lors l acte de production du texte pourrait se comparer d abord avant l activit du tissage ch re l analyse derridienne celle du cardage il s agit pour celui qui crit de s parer des l ments de pei gner le mat riau de d part selon ses deux modalit s linguistique et id elle indissociables pour fa briquer les bons fils apr s quoi il s agira de tisser ceux ci de tramer le complot du texte On peut rep rer dans la gen se les moments o
16. matisation trop rapide inh rents sans doute l usage de beaucoup de logiciels si on en fait un usage fig ou acad mique des n cessit s dans l environnement p dagogique qui nous paraissent pour le coup incontournables 1 Les risques Les risques r sident dans la mod lisation des strat gies S ils existent peu dans la lecture de la Gen se film de l criture en temps r el ou acc l r parce que d une certaine fa on chaque processus pris dans son ensemble appara t comme singulier ils sont pr sents dans la lecture des graphiques Ainsi on peut croire que puisque la r criture est de mise le formateur devra privil gier des graphi ques du Fil de la plume aussi accident s que possible exhibant de nombreux retours en arri re or la seule lecture de ce graphique on peut tre orient vers des textes qui sont beaucoup retouch s en appa rence mais seulement au niveau de la micro structure De m me pour l indice de Productivit ou l in dice de Lisibilit un indice tr s lev ou tr s faible ne signifie rien c est dans la dynamique du gra phique qu il prend sens lorsqu on pointe les moments de l criture auxquels cela correspond De leur c t les l ves appr cient ces comparaisons Le simple fait de leur en proposer la lecture ou tre l attrait narcissique les incite s interroger sur leurs processus personnels 2 L environnement p dagogique Le logiciel comme tous les autres n est pa
17. me r pondit oui Je lui de mandit s il savait vers quelle heure ils allaient se manifester il me dit qu il fallait deux minutes pour qu ils apparaissent Heureusement les deux minutes allaient s couler Je demandit au pr tre de prier le plus longtemps possible il commen a pri Dvinez la suite la relecture de la gen se l l ve manifeste d abord sa honte propos des fautes d orthographe ou des h sitations sur celles ci qu elle remarque On s interroge d abord sur le lien de la quatri me phrase la premi re qui lui appartienne en propre avec les pr c dentes On sugg re des hypoth ses qu elle exprime son tour 1 Peut tre j ai oubli de le mettre 2 Peut tre je le dis pas dans mon texte ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 Par rapport la fin de son texte elle commente 3 A la fin j avais moins d id es j crivais a comme l oral On s interroge sur les liens entre les phrases l emploi de alors Cela lui sert de coupure entre les phrases car la phrase est l unit partie de laquelle elle dit travail ler on est donc dans la micro structure Elle en profite pour noncer le principe qui anime l criture phrase phrase 4 Chaque fois que j ai crit une phrase je la relis pour voir si elle est correcte 5 Je l ai m moris e dans ma t te puis je l cris On peut noter la collusion entre avoir des
18. n ce ne sont que des variantes de la m me activit sans laquelle ce qui se donne comme crit n est pas un texte La possibilit inscrite dans le logiciel Gen se du texte de prendre distance avec ce geste de partager ventuellement avec d autres cette exp rience et son analyse devrait fournir des armes nouvelles cette activit Platon Ph dre 275 d e Pl iade trad L on Robin Une fois crit chaque discours s en va rouler de tous c t s pareillement aupr s de gens qui s y connaissent comme aussi bien aupr s de ceux auxquels il ne convient nullement il ignore quelles gens il doit ou ne doit pas s adresser Mais quand il est aigrement critiqu injustement vilipend il a toujours besoin du secours de son p re car il est incapable tout seul et de se d fendre et de se porter secours lui m me 5 Lev S Vygotski Pens e et langage d Sociales Jean Foucambert introduction L criture pr alable sa p dagogie d AFL p 12 crire c est travailler du langage crit pour d couvrir ce qu on avait dire 7 Andr Chervel Observations sur l histoire de l enseignement de la composition fran aise De Boeck p 109 121 ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 Contextes p dagogiques d utilisation Les mod les pragmatiques sugg r s travers les s ances de r flexion avec les ma tres formateurs nous ont amen pointer des risques de syst
19. ntraintes formelles fournis l l ve selon l usage qu il en a En effet au lieu de commencer par consulter formellement la fiche technique qui lui indique comment on r dige le type d crit qu est la lettre de demande elle commence par traiter scripturalement la raison d crire Ce n est que dans un deuxi me temps qu elle va se pr occuper de l aspect formel de la pr sen tation comme si et c est souvent vrai dans l exp rience le souci de respecter les r gles vacuait la vraie pr occupation que dire l interlocuteur Cette strat gie efficace est souvent paralys e par l uti lisation d un cadre formel pr t l emploi qu il faudrait seulement remplir Dans le m me sens on remarquera galement comment le toilettage orthographique est repouss la fin du travail ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 On peut pointer aussi l ordre des trois tapes de la mise en texte elle part de la n cessit impos e par l exp rience m me de son projet qu elle formule de fa on brute elle consigne l essentiel de la n cessi t Apr s quoi elle prend en charge la dimension dialogique et justifie par tapes la demande aux yeux de l interlocuteur On notera le passage du nous l cole comme affinement dans le sens de la pr cision et de la validit d une r gle g n rale Bien videmment elle profite des facilit s offertes par tout traitement de texte d ajouter des l
20. personnes ne vous moquez pas d eux m me si a vous para t bizarre de ne pas bien savoir lire tant adulte dites vous que ce sont des personnes comme les autres qui ont eu des probl mes pandant leur vie et ce n est pas de leur faute et que vous pour riez tr s bien tre illetr e 1 session dur e 36mn 59 sec On notera le moment o appara t un d clencheur et qui se marque par une r criture dans la r orga nisation de la premi re phrase de Cette mission m a plu moyennement car je trouve que les personnes interrog es devaient se sentir extr mement g n es mais d un autre c t cette mission permettait de s exprimer en Cette mission m a plu moyennement car cette mission permettait de s exprimer mais d un autre c t je trouve que les personnes interrog es devaient se sentir extr mement g n es 29 minutes d criture le texte est presque constitu sous cette forme Cette mission m a plu moyennement car elle permettait aux illettr s de s exprimer mais d un autre c t je trouve que les personnes interrog es devaient se sentir extr mement g n es de r v ler leurs sentiments tous les t l spectateurs qui regardaient l mission L illettrisme est un probl me dont on a pas le droit de se moquer ni de rejeter les personnes qui en souffrent et qui en subissent les cons quences dans leur vie quotidienne Si vous rencontrez une de ces personnes ne vous moquez pas d eux m me si a vous para t
21. qu il ne s agit pas d une lucida tion purement technique mais que celle ci d bouche sur un travail de formation et de transformation des pratiques d criture en g n ral Fran oise KALTEMBACK 10
22. s neutre il ne peut porter ses fruits que dans un contexte qui prend au s rieux la question de l criture comme activit de production autonome motiv e et prise en charge par l l ve lui m me Deux l ments nous ont sembl devoir tre d terminants ce sont d une part le temps consacr aux activit s d crit dans les pratiques quotidiennes et d autre part les lieux d criture soit les situations p dagogiques dans lesquelles les l ves sont amen s crire a Le temps consacr l criture dans les pratiques quotidiennes l cole se r v le g n ralement trop bref aussi bien en ce qui concerne la dur e de chaque session d criture pour l l ve que leur fr quence Le r sultat est qu on se trouve la lecture de Gen se en pr sence d exercices plut t que de v ritables processus de mise en texte Le temps moyen des sessions se situe autour de 30 minutes l cole primaire pour des textes qui n exc dent pas en moyenne une page cran Ceci pr sente deux inconv nients le premier de nature technique est que le logiciel ne peut saisir les relectures que s il y a d place ment du curseur ce qui n a videmment pas lieu lorsque le scripteur a tout son crit sous les yeux le second plus fondamental est que tant donn le faible entra nement des scripteurs concern s ils n ont pas le temps suffisant pour une r criture les crits propos s ne sont donc jamais r ellement fi nis on reste es
23. s une acception troite M me entre productions verbales profond ment monologiques on observe toujours un rapport dialogique Cf le commentaire de Jacques Berchadsky Le dialogisme AL n 38 et 39 Umberto ECO Lector in Fabula Grasset Un texte attend qu un lecteur l aide fonctionner p 67 Donc pr voir son Lecteur Mod le ne signifie pas uniquement esp rer qu il existe cela signifie agir sur le texte de fa on le construire p 12 Cf pages 73 sqq sur les textes ouverts ou ferm s ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 pouvoir rouler de tous c t s priv de l assistance de son p re de son auteur sans encourir les ris Dee 4 10 4 ques pr dits par le phonocentrisme platonicien On voit donc que l crit ne peut tre en aucun cas la repr sentation d une parole pr alable f t elle si lencieuse Il est d une autre nature alg bre du langage il pr sente ce paradoxe de requ rir beau coup de temps pour sa production et de se livrer d un seul coup synth tiquement au lecteur L cri ture par son caract re synth tique poss de un privil ge sur l oral celui d chapper au d roulement li n aire du temps Ce qui r git l crit c est l espace propre du texte donn imm diatement en une fois et dans lequel doivent tre int gr s les l ments de sa r gulation que l oral permet au contraire de rajou ter au fur et mesure Dans l espace du texte l a
24. sentiellement devant un premier jet Enfin les sessions entre elles ne sont pas suffisamment li es les l ves sautent d une exercice l autre sans analyse suffisante de leur gen se On sait que dans les gen ses expertes on trouve ais ment le moment d clencheur parce que le texte existe comme tel mais aussi parce qu il a eu le temps de se constituer On pourrait imaginer des situations qui permettent de m me aux l ves de produire des critures longues avec r ajustements collectifs ou non sur plusieurs sessions pendant une dur e de plusieurs semaines Ici le logiciel devrait aller de pair avec une transformation des habitudes p dago giques b Les lieux p dagogiques d criture qui sont propos s devraient tre une aide cet accroissement du temps d criture On peut s engager sur le fait que si le scripteur est accroch une activit qu il tient ASSOCIATION FRAN AISE POUR LA LECTURE 4 ACTES DE LECTURE n 46 juin 1994 pour la sienne propre avec des enjeux personnels des ch ances vraies il ne consid rera pas cette du r e comme fastidieuse m me si le travail exige de l effort On peut citer titre d exemple deux situations p dagogiques correspondant deux types d crits diff rents qui sont g n ratrices d critures longues premi rement la production de textes libres en p dagogie Freinet dans laquelle l l ve forge un r cit plus ou moins fictif mais fond sur des affects
25. t et que le texte doit s laborer en y pensant une strat gie est form e et il y a l envie de la mettre l oeuvre Question de Sonia sur les strat gies 9 Tu faisais de l oral ou de l crit Emmanuel 10 J ai pens directement l oral et trans form l crit mais pas beaucoup parce que je suis pas tr s bon Ces remarques lui permettent d laborer un commentaire de son texte final en remarquant que le d but est trop court il sugg re d allonger la description du d but et de transformer la suite en enqu te Ses premiers commentaires sont repris comme une conclusion 11 Ce que j ai crit c est que des notes On peut noter chez les deux l ves la persistance de deux strat gies l id e d un blanc combler dans le texte 1 2 6 7 8 11 en vue d une coh rence plus forte qui le r or ganise l id e du texte comme l ment h t rog ne par rapport l oral 3 9 10 quelque chose de plus que l oral mais dont ils ne savent pas bien ce que c est 4 5 10 Il resterait poursuivre par une r flexion sur des gen ses plus abouties par exemple la r criture de ces textes par un expert dans lesquelles on pourrait pointer le moment d clencheur les choix d cri ture etc la fin de cette intervention commentaire d une heure trente les l ves insistent pour commencer tout de suite la r criture de leurs textes Comme ils le font seuls ils s accrochent des
26. uteur a la place de d finir ce qui r siste tre dit Du m me coup alors que le brouillon tait demeur jusque l la face cach e honteuse du discours crit ou la rigueur le soubassement susceptible d clairer le texte fini pour en fonder l interpr tation le voici devenu le lieu d un processus de production o se lit l acte de cr ation dans sa complexit En p dagogie on peut faire la g n alogie de ce changement en effet l preuve de dissertation a t depuis les coll ges j suites jusqu la fin du 19 me si cle con ue essentiellement comme une preuve formelle de langue qui s est r dig e successivement dans l histoire en grec puis en latin C est le faible niveau de traduction des l ves qui a fait voluer peu peu les pratiques vers la dissertation en fran ais et c est l appui que constituait la langue fran aise pour l dification dans les couches populai res du sentiment national qui a promu la composition fran aise l cole primaire partir de 1880 La dissertation en langue morte qui proc dait par emprunts de termes et expressions pr constitu s s est vue relay e par un mod le de discours en fran ais dans lequel tout en sollicitant l esprit de cr ativit des l ves les l ments de l argumentation et la terminologie termes et association de termes sont donn s d avance au scripteur Cette approche r v le deux principes concernant l criture d une part lorsqu
Download Pdf Manuals
Related Search