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1. Quelqu en soit le contenu pr cis la prise de conscience d une repr sentation semble tre une op ration tardive de l ordre de 300 millisecondes qui prend la forme d une sorte de conversation c r brale coh rente l chelle du cerveau tandis que les nombreuses et riches repr sentations mentales qui chappent la conscience du sujet semblent correspondre des modes de fonctionnement moins coh rents qui op rent en parall le Les uns des autres et qui peuvent tre distribu s dans quasiment toutes les r gions c r brales Cette esquisse de th orie neuroscientifique de la prise de conscience pourra tre r vis e corrig e et enrichie en continuant la soumettre l preuve de l exp rimentation Pourtant ce n est pas de cela que je voudrais vous entretenir mais plut t d une autre propri t de ces repr sentations mentales conscientes leur statut Irr pressiblement interpr t et support de croyance subjective Le contenu de notre conscience fait toujours sens pour nous Et cette dimension signifiante ne requiert pas de notre part une intention pas m me souvent une agentivit conscience nous ne sommes que rarement les auteurs explicites de ces interpr tations un effort ou un jugement Le sens s offre nous dans la prise de conscience S en suit alors une dynamique de ces interpr tations et de ces croyances C est de cette dimension interpr tative et de sa dynamique que j aimerais vous parler Tout comme pou2. des acteurs des disciplines voqu es de nous livrer leur version du probl me ainsi que leur s r ponse s cette question Que signifie pour vous acc der la r alit Philosophie Que voulons nous v ritablement dire lorsque nous affirmons que notre esprit repr sente le r el Comment nous situer face aux tendances contraires qui traversent cette question Repr sentations ancr es dans le r el versus repr sentations qui op reraient comme une barri re tanche avec notre acc s au r el Repr sentations originaires du r el et donc porteuses de traces du r el versus repr sentations qui nous permettraient de nous affranchir du r el de le tenir bonne distance voire de douter de lui de nous dispenser de lui Autrement dit l id e d une chose nous parle t elle toujours d une fa on ou d une autre de la r alit de cette chose C est parce qu il y a d abord les choses qu il peut y avoir des repr sentations et non l inverse crit Jocelyn Benoist 1 C est pr cis ment de cette mani re complexe dont la r alit pourrait nous parler d elle ou plut t dont nous faisons parler la r alit en la repr sentant que nous lui demanderons de nous entretenir 3 Histoire J ai assez r cemment r alis quel point cette question qui est br lante d s lors que l on explore la subjectivit d un individu se pose avec une acuit comparable dans le champ de l histoire et plus pr cis ment
3. or vrai Dans sa plus grande g n ralit cependant le concept de r alit de cette r alit par rapport laquelle une certaine philosophie pose le probl me de l acc s n inclut pas n cessairement dans sa d finition une telle dimension pist mique il ne renvoie en effet essentiellement rien d autre qu cette propri t qu ont les choses d tre ce qu elles sont 9 Apr s cette mise au point il faut s interroger sur le rapport entretenu par ces deux termes r alit et v rit Or poser la question de la r alit dans les termes de celle de la v rit comme si la premi re d pendait de la seconde comme semble le faire l nonc soumis notre r flexion soul ve une difficult vidente Cette difficult est plus ou moins de m me type que celle que nous avons soulign e regardant la notion d acc s C est que si v rit IL y a comment celle ci serait elle possible si ce n est dans la r alit Il n est pas dit que toute v rit ait des r alit s pour objet sur ce point qui a trait l univers de notre discours et de notre pens e on peut discuter En revanche en tant que la v rit est une certaine valeur que nous attribuons des attitudes effectives que nous adoptons dans le cadre de notre rapport g n ral la r alit ou certains produits de ces attitudes il n y a de v rit que dans la r alit La r alit semble au minimum pr suppos e par la v rit cela
4. cin ma cr ation contemporaine id es dont certaines taient videmment d j d finies depuis des si cles mais qui demeuraient confin es dans des univers d rudition Cette remise en cause puissante d un acc s imm diat la r alit du r el conduit un certain nombre d entre nous s arr ter cette tape du processus deuil de la possibilit d un acc s la r alit biographique de ma m moire de celle des autres de celle des soci t s et des faits historiques pass s voire contemporains Deuil d une historiographie d finitive et estampill e comme valide D une r alit cach e et laquelle il serait Impossible d acc der une r alit inexistante c est notre rapport g n ral ce concept de r alit qui est chamboul Le courant contemporain qui a fait de ce travail de deuil un choix d finitif et qui a condamn de mani re d finitive la reformulation des modalit s de cet nigmatique acc s au r el est souvent qualifi de relativisme post moderne Nous nous proposons ici d explorer une alternative ce courant et plus pr cis ment de sonder les discours d une possible reformulation de cette question est il possible aujourd hui pour des esprits lucides des cueils inh rents cette question de ne pas jeter le b b avec l eau du bain et de continuer penser les conditions de la r alit et des modalit s d acc s ce qui la constitue cette fin nous avons demand
5. effritement gt L Entretemps Conversations sur l histoire Verdier 2012 Elizabeth Loftus docteure en psychologie professeure l Universit de Californie Irvine et ancienne pr sidente de l Association for Psychological Science est experte de la m moire Dans Le Syndrome des faux souvenirs elle analyse ce ph nom ne m connu et controvers l origine de nombreux d bats et proc s et la mani re dont la m moire fait surgir ces souvenirs suppos ment refoul s gt Le Syndrome des faux souvenirs avec K Ketcham ditions Exerque 2001 Lionel Naccache neurologue et chercheur en neurosciences cognitives est prati cien hospitalier l h pital de la Piti Salp tri re Il a notamment propos un mo d le neuronal de la conscience qui permet de revisiter la notion m me d incons cient Ila expos ses travaux ainsi qu une interpr tation originale de l inconscient freudien dans son ouvrage Le Nouvel Inconscient Le Nouvel Inconscient Freud Christophe Colomb des neurosciences Odile Jacob 2006 M decin et philosophe Israel Rosenfield enseigne les neurosciences et l histoire des id es la City University de New York Dans L Invention de la m moire il revient sur les th ories commun ment admises de la m moire et propose que le cerveau plut t que de stocker les souvenirs les r invente de mani re diff rente et unique pour chaque individu gt L Invention de la m moire le cerveau nouvell
6. tre r cus es en bloc au risque de passer c t du sujet ni tre re ues comme une transcription directe du r el C est ici que mon int r t pour l histoire contemporaine et plus pr cis ment pour ses pr occupations autour du statut de l historiographie au regard de la r alit historique trouve son origine Patrick Boucheron nous clairera bient t ce sujet J aimerais illustrer ces propos g n raux par l analyse de l histoire d un malade que j ai examin en 2006 et dont j ai rapport l observation dans un essai 7 Monsieur G est un homme intelligent un entrepreneur de haut niveau socioculturel Il dirige une compagnie commerciale l tranger Sa vie est pleine de voyages et d exp riences commerciales pittoresques Dans l un de ces pisodes qui nous sera racont par son pouse monsieur G voyageait dans un train d Am rique du Sud avec un coll gue de travail Le train s arr te Monsieur G et son partenaire n ont que peu de temps pour sortir de leur wagon Soudain d un geste brusque et violent son ami se bloque l annulaire gauche dans l extr mit d un clou qui d passait du wagon et qui retenait son alliance Trop tard la chair de l annulaire de son ami se retourne enti rement en un Instant Elle flotte suspendue au vieux clou rouill Souvenir horrible Monsieur G en a le c ur retourn Depuis il a souvent racont ce r cit ses proches Les ann es ont pass Quelques mois avant ma rencontre av
7. vous le dire Je sais que vous allez trouver a totalement fou mais c est vrai Monsieur G lit bien calcule correctement comprend et utilise le langage presque normalement Monsieur G a un excellent sens critique Il r pond facilement et en souriant aux histoires absurdes que nous utilisons habituellement comme par exemple celle des Voyages de Charcot vous racontez au patient qu un navigateur c l bre de la premi re moiti du XX si cle le commandant Charcot a conduit trois exp ditions polaires sur son navire la fameux Pourquoi pas Trois exp ditions r p tez vous au malade sans h siter vous aider d un geste de la main en lui indiquant le chiffre trois de la main Malheureusement son navire a sombr lors de l une de ses trois exp ditions Laquelle Pris sur le vif de votre question le patient qui commence douter h siter se perdre dans des d tails non pertinents ou se r fugier derri re son ignorance historique saura retenir votre attention Cette histoire de Charcot qui tait en r alit le fils du grand neurologue Jean Martin Charcot et lui m me neurologue fait ainsi office de petite sonde du sens logique des patients ce genre d historiettes de d brouillage monsieur G vous r pond rapidement Au troisi me et dernier voyage videmment en vous gratifiant d un petit sourire complice Monsieur G est un homme rationnel on ne lui raconte pas d histoires Po
8. au sujet du statut exact de l historiographie Tr s souvent dans des termes comparables Au nom du fait que le discours de l historien demeure un discours perd il toute pr tention la vis e de la r alit historique ou peut il tre le d positaire de ces traces ch res Carlo Ginzburg traces pr cieuses mais consid rer avec lucidit et rigueur 2 Patrick Boucheron qui consacre depuis longtemps une part importante de son uvre et de son activit ces questions nous dira s il consid re cette analogie conceptuelle entre mon domaine et le sien comme simplement m taphorique ou s il y voit la possibilit de rencontres f condes Et surtout il nous livrera sa lecture de cette question de l acc s au r el Psychologie de la m moire Nous avons la chance et l honneur de compter parmi nous Elizabeth Loftus qui est origine de d couvertes majeures qui ont trait la psychologie des faux souvenirs que lon peut tudier en situation cologique chez homme sain et homme amn sique mais galement in labo 3 Ces d couvertes que je la laisserai vous pr senter sont majeures plus d un titre Premi rement elles ont r volutionn notre compr hension de la m moire D autre part ces recherches sensibles sur la m moire des individus que nous sommes ont n cessit un authentique courage intellectuel mais galement physique Si vous me permettez le qualificatif Yiddish Elizabeth Loftus est une sacr e mentsh Nou
9. ce Moyen ge que je fais personnellement profession d tudier avaient des ambitions et des esp rances la fois bien plus modestes et bien plus lev es Car avec leur science des faits et des relations de causalit ce n tait pas la r alit qu ils pr tendaient acc der mais la v rit Sans doute est ce le dernier d fi que Michel Foucault lance aux historiens auront ils eux aussi le courage de la v rit Elizabeth Loftus Lorsque nous tentons d acc der la r alit il semble naturel de se fier la m moire humaine Vices et vertus Apr s tout elle est le socle de notre personnalit o Sans la m moire nous n aurions pas le sentiment de la m moire de la continuit de la vie Nous ne pourrions nous rappeler ce que nous voulons dire Nous n aurions pas le sentiment de continuit qui nous permet de savoir qui nous sommes Cependant comme par Jo lle Marelli l ont montr mes recherches des trente derni res ann es la m moire est mall able La mall abilit de la m moire importe peu quand les variations sont petites et Insignifiantes par exemple si je dis une coll gue que Martha a fait deux remarques fut es hier la r union du d partement alors qu en fait elle en a fait trois Mais parfois il s agit de variations si importantes qu elles peuvent conduire une situation tr s g nante voire d truire des vies La m moire est une chose trange surtout quand
10. dans le principe nous pouvons faire ILn est donc pas s r du tout que cela ait un sens de dire que nous nous trompons globalement eu gard au monde En revanche on voit bien ce qui dans l volution de la connaissance de l tre humain et des fondements de son rapport y compris intentionnel son environnement peut conduire dans cette direction Tout d abord la d couverte que ce qui ph nom nologiquement se pr sente nous comme simple et imm diat pourvu d une forme d vidence peut en r alit mettre en jeu des processus extr mement complexes et indirects Ainsi plus on avance plus on sait que la perception cette perception qui selon un certain r alisme philosophique est cens e jouir d une forme de transparence et nous d livrer limm diatet du monde c est extr mement compliqu Ensuite on ne peut n gliger un fait fondamental l importance des processus inhibitoires dans la relation qu entretient l organisme complexe avec son monde ambiant Cetorganisme comme tel est bombard de stimulations stimulations qui en tant qu elles sont encod es et transmises par certains canaux sont assimilables de l information Or il est tout aussi fondamental qu une part de cette information ne passe pas soit retenue et bloqu e par des processus sp cifiques qu il ne l est qu une part passe effectivement et atteigne le syst me central Ainsi par exemple si des processus biochimiques sp cifiques n intervenaient pas to
11. le textualisme radical qui consiste d nier l histoire la capacit d atteindre autre chose que des constructions discursives et lui refuse l acc s toute forme de r alit sociale est tr s faible sous ses atours de pens e forte Car l on sait bien aujourd hui que d finir la nature rh torique du discours historique n emp che en rien th oriquement de le fonder comme discours de v rit Surtout ce relativisme est m thodologiquement inop rant il ne permet aucun gain sensible de connaissances On pourrait galement ajouter qu il est politiquement dangereux car l on mesure le p ril civique qu il y a d nier toute r alit tangible aux faits historiques Entre positivisme na f et relativisme impuissant mais pernicieux le sens pratique des historiens se fraye aujourd hui un chemin avec plus d aisance et de nettet que leurs embarras th oriques le laisseraient entendre A quel r el pr tendent ils atteindre par leur travail sur les traces documentaires Certainement pas au pass tel qu il fut des certitudes tenaces de l historicisme triomphant On peine qualifier ce r el incertain impur imparfait Ne faut il pas dans ce cas renoncer la r f rence naturaliste si fondamentalement Inad quate d s lors qu on pr tend parler des sciences historiques ou de toute science humaine en tant qu elle est in vitablement travaill e aujourd hui par lhistoricisation Les historiens anciens ceux par exemple de
12. nous est soumis semble devoir cristalliser la difficult dudit acc s au r el savoir v rit La question de l acc s en ce sens sp cial qui serait celui de l acc s au r el semble en effet identifi e ici celle de la v rit Philosophiquement une telle assimilation me para t rencontrer des difficult s qui certainement nous installent d ores et d j au c ur de notre probl me En effet pour obtenir quelque clart que ce soit sur la notion de r el il para t Important de la distinguer fermement de celle de v rit Tout d abord parce que les deux termes ne s utilisent pas de la m me fa on La r alit est une d termination m taphysique de ce qui est o de certaines choses qui sont des choses auxquelles nous avons affaire La v rit est une d termination pist mique d un certain type d attitude que nous avons par rapport ces choses l o pr cis ment cette attitude est couronn e de succ s De fa on d riv e la notion peut aussi qualifier les produits de cette attitude ou ce dans quoi elle se fixe comme les nonc s on peut dire d une pens e ou d un nonc qu ils sont vrais On ne dira pas a priori cela d une r alit sauf dans un emploi bien particulier qui inclut la r f rence un certain type d attente cognitive que l on pouvait avoir par rapport elle et donc une composante pist mique comme lorsqu on parle d une fausse dent ou d
13. pas une reproduction m canique Et pourtant nous sommes d une tout autre opinion S il est un mythe qui a probablement domin la pens e depuis le premier moment o les tres humains ont commenc crire des choses sur eux m mes c est bien le fait que si nous pouvons nous rappeler avec pr cision des gens des endroits et des choses c est parce que des images en ont t imprim es dans notre cerveau o elles sont stock es en permanence ei que sans que nous en soyons forc ment conscients ces images forment la base de la reconnaissance de la pens e et de l action Sans elles poursuit le mythe nous ne pourrions pas reconna tre notre famille et nos amis les mots ni notre manteau dans le vestiaire ni nous souvenir des num ros de t l phone ni des titres des livres ou des films Si nous reconnaissons les gens et les choses c est selon ce mythe parce que nous associons ce que nous voyons entendons et sentons avec ce qui est stock dans notre cerveau et nous nous les rappelons en activant les images permanentes de notre cerveau Mais si nous avions des images stock es il ne serait pas possible de percevoir et de nous rem morer Les gens les objets et les endroits que nous connaissons sont en changement constant Quand je rencontre une femme pour la premi re fois avec ses cheveux tir s en arri re et que je la retrouve une heure plus tard les cheveux d nou s je n ai aucun mal La reconnaitre Nous croyons cela
14. priorit incitait beaucoup de gens croire avoir vu un Stop Dans une autre tude encore on a cr le faux souvenir de quelque chose d aussi grand et manifeste qu une grange on a pos aux t moins d un accident simul une premi re question mentionnant une grange Une partie de ces t moins ont affirm avoir vu une grange dans un paysage de campagne d pourvu de toute construction Depuis mes premiers travaux des centaines d tudes ont document comment l exposition une Information erron e peut ajouter nos souvenirs les contaminer ou les d former Nous recueillons de fausses informations non seulement partir de questions biais es et suggestives mais aussi en discutant avec des personnes qui consciemment ou par inadvertance donnent une version inexacte d un v nement pass En psychologie on appelle effet de m sinformation cette inad quation du souvenir due la transmission d une information erron e apr s un v nement Richesse des faux souvenirs Au d but des ann es 1990 particuli rement en Am rique du nord et en Europe on a commenc observer un ph nom ne beaucoup plus extr me Des individus entamaient une th rapie pour un certain type de probl me d pression ou anxi t et en mergeaient avec un autre des souvenirs de violences pouvantables inflig es par des personnes aim es impliquant souvent des rituels sataniques pleins d l ments bizarres et parfois improb
15. yeux quelque sens ce concept et en faire ce qu il n est pas au d part un probl me th orique Y a t il une r alit nous demandons nous alors Et 10 pouvons nous y avoir acc s Ce constat semble ouvrir la possibilit d une g n ralisation et d une v ritable question m taphysique telle que les affectionne une certaine philosophie et que le d veloppement des neurosciences peut parfois sembler justifier aux yeux de cette m me philosophie Et si nous tions faits d une telle fa on que le monde soit toujours une galerie de miroirs d formants pour nous que nous nous trompions toujours sur la r alit que nous n y ayons jamais acc s Une telle question en elle m me soul ve des difficult s conceptuelles videntes Tout d abord pour avoir un sens elle fait fond sur le concept m me de cette r alit laquelle elle suppose d un autre c t que nous n avons jamais acc s Or un tel concept semble pr supposer un tel acc s ou pour tre plus exact l preuve de ladite r alit D autre part la m me chose vaut en un certain sens du concept d erreur qui quant lui renvoie n cessairement l horizon d une v rit et d une v rit qui a un certain sens pour nous donc dont nous avons une certaine exp rience Si nous n tions jamais dans le vrai eu gard ce qu il y a nous ne pourrions jamais nous tromper non plus L erreur n a de sens qu en tant qu chec de quelque chose que
16. Rh nali s VillaGallet Recherches contemporaines Lyon Rh ne Alpes 20 nov gt 2 d c 2012 Mode dx emploi UN FESTIVAL DES ID ES X Les neurosciences ont elles quelque chose nous apprendre sur le r el Dimanche 2 d cembre 11h 13h H tel de R gion Lyon Jocelyn Benoist France Patrick Boucheron France Con uetanim par Elizabeth Loftus Etats Unis Lionel Naccache Lionel Naccache France a Israel Rosenfield Etats Unis GRANDLYON communa ut urbaine H tel de R gion 1 esplanade Fran ois Mitterand 69002 Lyon R servations aupr s de la Villa Gillet 04 78 27 02 48 www festival modedemploi net Jocelyn Benoist philosophe enseigne l Universit Paris Panth on Sorbonne est membre de l Institut universitaire de France et dirige l ENS Paris les archives Husserl Travaillant essentiellement sur la philosophie du langage et de la connais sance il analyse dans l ments de philosophie r aliste le concept de r alit indis pensable aux hommes gt l ments de philosophie r aliste R flexions sur ce que l on a Vrin 2011 Patrick Boucheron historien enseigne l histoire du Moyen Age l Universit Pa ris Panth on Sorbonne Son domaine de recherche est l Italie m di vale ses villes ses princes ses artistes mais aussi l criture de l histoire aujourd hui Dans L Entretemps il pose un regard d historien sur le temps ses d coupages et son
17. ables Une femme se rappelait avoir t mise enceinte par son p re bien qu il f t d montr par la suite qu elle tait vierge et lui st rile D o venaient ces tranges souvenirs On suspecta des proc dures th rapeutiques fortement suggestives comme l imagination guid e l interpr tation des r ves l hypnose et l exposition de fausses Informations Pour d terminer si de telles techniques pouvaient r ellement conduire des souvenirs la fois faux et riches les chercheurs ont labor des proc dures inspir es par certaines de ces th rapies probl matiques Utilisant la suggestion mes coll gues et moi avons d abord fait croire des gens qu enfants ils s taient perdus pendant une dur e assez longue dans un centre commercial La technique dite perdu au centre commercial utilisait des informations obtenues aupr s des parents afin de cr er des sc narios associant des v nements exacts aux faux v nements associ s l exp rience Les sc narios taient 16 restitu s aux sujets comme s ils taient enti rement vrais Dans ce travail initial environ un quart des participants se laiss rent prendre au pi ge des fausses informations et affirmerent avoir te perdus comme on le leur sugg rait Plus tard d autres recherches qui recouraient la technique perdu au centre commercial montr rent que les gens se laissaient aussi influencer par la suggestion d v nements plus bizarres et bo
18. ad et directrice de programme au Coll ge international de philosophie Israel Rosenfield Selon une croyance largement partag e le monde notre cadre de vie et nos pens es sont A repr sent s dans notre cerveau l id e est Acc der la que dans un certain sens il y a dans notre r alit cerveau des images qui sont essentielles nos pens es et nos actions la reconnaissance de nos amis et de nos relations ainsi qu notre traduit de l anglais capacit nous souvenir des lieux que nous par Sylvie Taussig avons visit s de la rue o nous vivons et de notre domicile Il ne sagit pourtant pas de penser que notre cerveau recoit des messages cod s nous ne sommes pas n s avec la connaissance du monde Au contraire le probl me de notre cerveau est que nos sens sont confront s un monde chaotique en proie un perp tuel changement et que le cerveau doit donner du sens ce chaos Ce que nous voyons entendons sentons et go tons tout ce qui constitue la r alit ext rieure est une construction du cerveau Les couleurs que nous voyons n existent pas en tant que telles les mots et les phrases que nous sommes certains d entendre sont en r alit un m li m lo de sons de sifflements de grognements et de silences et les vins que nous buvons ainsi que les filets mignons que nous d gustons sont insipides et inodores Les cerveaux cr ent quelque chose qui n est pas l C est la cor
19. alit dans lequel il y a des choses visuelles et beaucoup d autres du m me genre marqu es par une r f rence constitutive la possibilit de l exercice de tel ou tel de nos sens que nous pouvons poser en g n ral la question de notre capacit d acc der ou non la r alit et que celle ci peut avoir un sens Ainsi la r alit laquelle on se demande si nous pouvons ou non avoir acc s constitue t elle l arri re plan m me de cette question Cela ne signifie pas bien s r que l explication des relations que nous entretenons avec cette r alit ne requiert pas l introduction d un autre mat riel que les choses visuelles ou autres r alit s de ce genre Par exemple pour expliquer le fait de la vision il faudra introduire au minimum des excitations nerveuses Mais la notion d excitation nerveuse ne se met avoir un sens pour nous que sur fond d un univers de choses visuelles et autres choses du m me type et comme principe d explication de la sensibilit que nous y avons de leur exp rience Je crois donc qu il faut surmonter une fois pour toutes ce paradoxe que pointait Frege la fin de son grand texte testamentaire de 1918 La pens e celui de l id alisme achet avec la monnaie du r alisme Un certain type d analyse nous conduit penser que l activit que nous devons d ployer pour construire une prise sur le r el et devenir capables de lui accorder le sens de r el constitue pou
20. an f Sup rieure des Mines LYON D E Monnet SAINT ETIENNE _ SAINT ETIENNE SAINT ETIENNE 3 R Gyak ene M Prt E m E M Saint Joseph Saint Luc en couts rt Jal RE dede Les partenaires des Subsistances decitre fr EX M KIBLIND MH reout MA Elias 25
21. c s au r el pouvons nous extraire La distance astronomique entre son discours et la r alit neurologique de sa condition permet de disqualifier d embl e nombre de ses FICs ILn a pas achet de bras personne ne lui a greff ce membre durant son sommeil il n est pas Montr al mais Paris Au nom de ce simple constat on pourrait simplement r cuser toute possibilit de trouver ici des l ments de r alit des Informations qui nous r v leraient la r alit subjective et neurologique de ce patient Telle pourrait tre ici transcrite la voie d une conception na ve de notre acc s au r el qui prendrait conscience de sa magistrale erreur si nous sommes les Interpr tes du r el et non ses porte voix alors faisons le deuil d finitif de notre acc s la r alit Poussant plus loin l analogie on pourrait alors d cider que la r alit ne nous importe plus du tout en r alit et que seul compte pour nous le discours de ce monsieur tout comme tous les autres discours disponibles sans chercher d gager rechercher et reconna tre la moindre valeur de r alit autre que subjective toutes ces histoires Telle pourrait ici tre la voie du relativisme post moderne La troisi me voie celle que je d fends est celle d une recherche du r el qui serait lucide des contraintes de son propre fonctionnement sans pour autant renoncer l exercice Ainsi une fois disqualifi es dans leur contenu propos
22. ce une Influence qui se prolonge parfois pendant assez longtemps comme indiquent une tude canadienne utilisant du yaourt la p che ou une tude n erlandaise utilisant de la salade d ufs En outre les faux souvenirs positifs portant sur une nourriture saine asperges avaient aussi des r percussions sur les conduites alimentaires des gens Les plus sensibles la suggestion diront qu ils aiment les asperges davantage que ce que montrent les contr les qu ils voudraient en manger davantage Pris ensemble ces r sultats d passent la simple d monstration de la mall abilit de la m moire et de sa capacit s enrichir ou se laisser modifier par de nouvelles informations Ils montrent que les distorsions de la m moire peuvent avoir des r percussions et affecter les comportements 17 longtemps apr s que les pseudo souvenirs se sont enracin s Bien s r cette capacit contaminer la m moire et contr ler le comportement donne lieu des consid rations thiques Quand peut on recourir ce type de technologie mentale Faut il en interdire l usage Faux souvenirs et societ Des milliers de chercheurs ont contribu la science de la distorsion m morielle mais malgr ces efforts soutenus les faux souvenirs restent un probl me pour la soci t Des centaines de personnes dont la plupart doivent leurs probl mes la m moire fautive d un tiers se sont retrouv es accus es de crimes qu elles n avaient pas com
23. de m me pour la m moire La c cit crit Hull est comme un aspirateur qui a aval les souvenirs les centres d int r ts la perception du temps et de l espace etc La c cit n est pas seulement la perte d une des modalit s sensorielles la vision mais la cause d une restructuration profonde du soi tout entier et de la connaissance et de la compr hension du pass du pr sent et du futur chez l individu qui en est atteint A partir du moment o le cerveau cr e ou invente nos mondes sensoriel m moriel intellectuel et artistique en comparant les diverses contributions sensorielles l limination de l une des modalit s sensorielles n est pas la simple soustraction de la structure mentale d un type de sensation mais exige une r vision compl te de la structure fondamentale des pens es et des actions La c cit transforme la structure de la connaissance et la nature profonde des modalit s sensorielles toucher ou e etc que le cerveau utilise pour cr er ou construire nos mondes sensoriel artistique et intellectuel Sylvie Taussig n e en 1969 est romanci re Dans les plis sinueux des vieilles capitales 2012 Galaade traductrice chercheuse en philosophie et pr sidente du groupe IRENE Identit s et religions tudes des nouveaux enjeux 22 Ne manquez pas les prochains v nements de la VillaGillet Recherches contemporaines Lyon Rh ne Alpes X Justice Injustice les causes communes En partenar
24. des mises en pr sences du pass Mais il est certain que si l historien d fend toujours et de mon point de vue avec raison les m mes pratiques il est comme l incr dule de Pascal il continue faire les gestes car il est en train de perdre la foi La foi en quoi Pr cis ment dans le fait que les traces archivistiques sont des fen tres ouvertes sur la r alit historique et qu il suffirait d ouvrir en grand ces fen tres en fouillant les archives en ditant des sources pour que la lumi re de ce r el brutalement r v l e nous clabousse C est une croyance sociale r guli rement raviv e voyez comment on fait croire r guli rement que l ouverture des archives de la police pendant la guerre d Alg rie de l ex Union sovi tique apr s la chute du Mur du Vatican en toutes occasions va produire son lot de r v lations Et coutez m me ce mot faussement banal de sources il donne l illusion qu on va aux archives comme au puits que le r el justement y coule de source Or l on sait bien aujourd hui que les archives ne sont pas pour les historiens des aubaines mais en soi des objets d histoire Cette mise en doute des certitudes anciennes a pu alimenter ce que Carlo Ginzburg a appel pour la d noncer l attaque sceptique en la mettant en rapport avec la 13 th orie postmoderne des narrativistes am ricains ramenant le r el historique un effet de discours Philosophiquement
25. des sensations dans le membre manquant Ce fait incite fortement penser que nous naissons avec un cerveau qui a une image corporelle int rioris e normale qui ne correspond pas n cessairement avec l tat r el de notre corps Il existe un trouble neurologique qui contraste fortement avec le ph nom ne du membre fant me le ph nom ne du membre tranger Dans ces situations le patient dont le cerveau pr sente une l sion mais dont Le corps est parfaitement intact va nier qu un bras ou une jambe est sien Il d clarera que c est un tranger un objet ext rieur trange Et IL poussera le bras ou la jambe en question hors de son lit disant une personne pr sente prends le il est toi Sa m moire est profond ment alt r e ila oubli qu ila march un jour et dans sa nouvelle compr hension du monde des gens avec trois jambes sont parfaitement normaux Il est paradoxal que le fonctionnement normal du cerveau exige une image corporelle int rioris e intacte cr ant le ph nom ne du membre fant me tandis qu une d gradation du fonctionnement du cerveau dans un corps parfaitement normal provoque chez le patient une distorsion de la perception quil a de son corps et du monde autour de lul l importance de l image corporelle dans la perception et la m moire donne penser que le mouvement est lui aussi un l ment essentiel du fonctionnement de notre m moire et de notre perception La re
26. e Impossible pour nous d entretenir une telle id e Cela ne veut pas dire encore une fois que le sens d une telle notion soit d abord ni purement th orique que le sens que nous pouvons avoir de la r alit comme r alit d pende directement o principalement de notre capacit formuler des jugements vrais sur elle Il se pourrait que de ce point de vue la v rit et son chec l erreur ne soit qu un ph nom ne de surface ou relativement d riv dans notre rapport notre monde ambiant D abord parce que le rapport que le vivant entretient avec son environnement et qui notre insu m me structure encore profond ment notre relation suppos e intentionnelle ce contexte ne se d ploie pas en premier lieu suivant des modalit s telles que cela ait un sens de leur appliquer les notions d erreur et de v rit mais plut t celles de stimulation r action et partir d un certain niveau d autonomie action Cela n aurait pas de sens de parler de l intentionalit ou de la repr sentation d une amibe Et il reste beaucoup de l amibe en nous En revanche n gativement pour des tres qui entretiennent aussi une relation de type intentionnel au monde comme nous il est certain que l erreur syst matique comme nous pouvons l prouver dans certaines circonstances particuli res galerie de miroirs d formants a quelque chose de d stabilisant Elle branle notre foi naturelle en La r alit au point de faire perdre nos
27. ec lui Monsieur G est malheureusement victime d une h morragie c r brale Il tombe dans le coma Pris en charge en urgence sur le lieu de son accident c r bral les complications se succ dent et monsieur G doit subir plusieurs interventions neurochirurgicales La portion ant rieure du corps calleux de monsieur G sera s v rement endommag e lors de l une de ces Interventions D sormais ses deux h misph res c r braux communiqueront mal Son bras droit sera galement totalement paralys du fait de la pose d un cath ter veineux qui d truira un centre de passage nerveux majeur du membre sup rieur situ donc en dehors de son cerveau le plexus brachial Au terme de plusieurs semaines monsieur G sort de son coma Il s journe en r ducation puis est transf r plusieurs mois plus tard la Salp tri re afin qu y soient valu s ses divers probl mes neurologiques Les choses suivent leurs cours les examens de routine et l valuation neurologique de monsieur G se d roulent sans emb ches Sauf que Sauf que monsieur G n accorde pas sa confiance au premier venu Apr s plusieurs jours mes coll gues Laurent Cohen et Caroline Papeix et moi entrons dans le cercle de ses confidents Vous savez docteur ce bras droit qui ne bouge pas du tout ce bras paralys silence en fait ce n est pas vraiment mon bras je dois 2 Ces citations sont copi es partir de l enregistrement vid o de notre entretien ce jour l 6
28. elle d raille Un bon exemple en est ce qui s est pass d but 2008 quand Hillary Clinton tait candidate aux lections pr sidentielles Pendant sa campagne elle voqua un voyage prouvant qu elle avait fait environ douze ans plus t t en Bosnie d barquant sous des tirs de snipers Ses souvenirs taient relativement vifs et en tous cas assez d taill s Je me souviens avoir atterri sous des tirs de snipers Une sorte de c r monie d accueil tait pr vue l a roport au lieu de quoi nous avons couru t te baiss e vers Les v hicules qui nous ont emmen s notre base Son souvenir fut remis en question quand les m dias montr rent des photographies de son arriv e effective en Bosnie Ces photos ne montraient pas un atterrissage en milieu hostile mais un d barquement paisible quittant l h licopt re en compagnie de sa fille elle avait t gentiment salu e par des enfants des coles Se saisissant de cet instant un commentateur d cerna quatre Pinocchios la m moire de Hillary Elle s tait tromp e sur au moins quatre points pas d atterrissage en tire bouchon pas de tirs de snipers pas de r ception annul e l a roport seulement l accueil de ces enfants et enfin elle n tait pas la premi re pouse de pr sident am ricain se rendre dans une zone de guerre invoquer Pinocchio c est sugg rer que Hillary Clinton mentait peut tre d lib r ment en racontant sa premi re ver
29. es donnes traduit par A S Cismaresco Flammarion 1994 Lionel Naccache La question de l acc s la r alit quoi que o opo ce terme puisse bien signifier pr occupe nos Que signifie esprits depuis des mill naires Selon la nature acc der au r el W des r ponses philosophiques apport es cette en 2012 interrogation existentielle id alismes nihilisme scepticisme philosophies de la repr sentation relativisme post moderne n o kantisme ce sont des pans entiers de nos activit s et de nos pr occupations qui sont Imm diatement concern es pr occupations thiques personnelles question de l acc s qui je suis et collectives responsabilit inter individuelle pr occupations mn siques identitaires individuelles acc s qui j ai t et collectives historiographie pr occupations judiciaires question de la justice et surtout question de la justice de la justice pr occupations th ologiques etc Un riche jeu de la pens e a permis depuis environ un si cle de d niaiser la na vet de notre intuition premi re relative cette question du r el et des conditions de son acc s Les contributions majeures de ce mouvement des id es proviennent de disciplines distinctes psychologie de la m moire neurosciences de l esprit historiographie contemporaine philosophie occidentale La force de ces vidences peut se mesurer dans la diffusion de ces id es litt rature
30. galement le fonctionnement mental du sujet sain Une br ve digression C est d ailleurs l un point souvent m connu du fait d une heuristique que je qualifierai de romantique les d lires surprennent souvent par leur coloration tr s singuli re par la conviction in branlable qui habite leurs h tes et par leur cart surprenant avec la r alit ext rieure telle qu elle nous appara t Ils apparaissent ainsi souvent comme autrement plus complexes et riches que la vie mentale tristement ordinaire A tort pourtant car les repr sentations du r el labor es en dehors du registre pathologique sont bien plus riches subtiles et complexes ce qui nous rend d ailleurs si difficile de d busquer la nature des m canismes fictionnels qui pr sident Sa construction On ne voit plus la main de l auteur Comme dans les bons romans Fin de la digression la lumi re de ces r sultats la question de l acc s au r el requiert un traitement complexe du discours subjectif un discours qu il est possible de consid rer comme une source de traces qui nous parlent du rapport du sujet en question avec le r el ses croyances ses fantasmes ses souvenirs sans n cessairement nous parler avec exactitude du r el et m me bien entendu de la r alit de son propre fonctionnement mental Autrement dit un support de traces dimension autobiographique plus que biographique traces qui ne doivent je pense ni
31. h re droit qui ma trise chez lui le langage Son corps calleux est tr s endommag autrement dit son h misph re droit n a pas acc s aux Informations relatives son bras droit qui sont cod es dans son h misph re gauche L h misph re droit de monsieur G re oit bien limage visuelle de ce bras droit paralys mais la repr sentation mentale de son sch ma corporel est perturb e par l absence de communication entre ses deux h misph res Probablement en proie l une de ces anomalies de communication c r brale que nous avons d j rencontr es dans de nombreux autres syndromes tels que les disconnections calleuses compl tes des patients split brain tudi s par Sperry et Gazzaniga ou par exemple le syndrome de Capgras le d j vu l esprit de monsieur G doit broder sa repr sentation de lui m me avec ces pi ces incompl tes et brouill es Quel usage en fait il Sa machine produire du sens fait ce qu elle peut Le bras droit qui est reli son torse n est pas le sien Il s agit du sc nario explicatif le moins absurde un certain niveau d int gration non conscient et restreint des informations disponibles L histoire de monsieur G ne nous r v la pas tous ses secrets neurologiques Nous ne nous efforc mes d ailleurs pas de les lui arracher Simplement son histoire et surtout l analyse de ses FICs illustrent la mani re de faire parler ces traces du r el articul es dans un r cit subject
32. iat avec le Th tre de la Croix Rousse et l Op ra de Lyon programmation en cours La solidarit une valeur red finir Lundi 21 janvier 20H Th tre de la Croix Rousse avec Martin Hirsch Nicolas Duvoux et Jean Fabien Spitz Anim par Guillaume Allary La justice vue par Victor Hugo Lundi 28 janvier 18H Op ra de Lyon avec Robert Badinter L Europe une cause r inventer Vendredi 15 f vrier 20H Th tre de la Croix Rousse avec Bernard Guetta Eva Joly et Sylvie Goulard Anim par Lucile Schmid Ing rence et intervention qu est ce qu une guerre juste Mardi 19 mars 20H Th tre de la Croix Rousse avec David Rieff et Bernard Henri L vy Animation Nathalie Nougayr de Le Monde et Marc Semo Lib ration La Villa Gillet en partenariat avec artpress Gary Hill en dialogue avec St phane Malfettes Vendredi 5 avril 19H30 Villa Gillet P nalisation et incarc ration Lundi15 avril 20H Th tre de la Croix Rousse avec Fr dric Gros Serge Portelli et Bernard Bolze Les 7 Assises Internationales du Roman Lundi 27 Mai Dimanche 02 Juin 2013 aux Subsistances Pour plus d informations rendez vous sur le site de la Villa Gillet www villagillet net 29 Espace librairie Librairie Chapitre versions fran aises Librairie Decitre langues originales 19 rue de Marseille Lyon 7 me 29 6 Place Bellecour Lyon 2 me T l 0478 727245 T l 0426 68 00 01 12 rivegauchelibrairiepapeterie hau
33. if que nous ne croyons pas au sens litt ral mais que nous ne disqualifions pour autant pas et que nous pouvons tudier en la confrontant d autres donn es Tout en sachant et c est l l l ment le plus vertigneux de cette affaire que la r alit dont nous nous pr occupons aujourd hui inclut bien videmment Les fictions que nous produisons qui au del de leur exactitude ou de leur inexactitude font bel et bien partie int grante de ce qui existe et que ces derni res agissent en retour sur le r el Raison de plus pour s en occuper en gardant les yeux grands ouverts et l esprit alerte R f rences 1 Benoist J 2011 El ments de philosophie r aliste Vrin Paris 2 Boucheron P amp Nikel S 2011 L Histoire 8 15 3 Loftus E F Ketcham K amp Champollion Y trad 2012 Le syndr me des faux souvenirs Et le mythe des souvenirs refoul s Exergue Paris 4 Rosenfield 2000 La m galomanie de Freud Seuil Paris 5 Naccache L 2006 Le Nouvel Inconscient Freud Christophe Colomb des neurosciences Odile Jacob Paris 6 Dehaene S amp Naccache L 2001 Cognition 79 1 37 7 Naccache L 2010 Perdons nous connaissance De la Mythologie la Neurologie Odile Jacob Paris Jocelyn Benoist Ma premi re remarque portera sur la m taphore de l acc s dans son usage eu gard au r el qui est d cid ment paradoxal D o pourrait donc se poser nous la question de
34. it corticale leurs aires de vision primaire ont t d truites perdent non seulement la capacit voir mais galement leur compr hension de ce que signifie voir Les patients qui ont une l sion dans une aire du cerveau baptis e V 4 ne perdent pas seulement la capacit voir les couleurs ils ne peuvent pas non plus se rappeler ce que sont les couleurs et ce que cela fut que d avoir vu un monde en couleurs Aussi la structure de la connaissance du patient est elle alt r e apr s une l sion au cerveau Les patients ne perdent pas de souvenirs sp cifiques les patients dont le cerveau a t endommag font l preuve d une perte tr s diff rente du processus ordinaire de l oubli Ce qui est essentiel la formation de nos perceptions de nos souvenirs de notre conscience de notre pass et de notre pr sent c est une image corporelle interne qui sert de cadre de r f rence nos mondes perceptuels et mentaux Par exemple des gens qui ont perdu 19 une partie de leur bras ou de leur jambe cause d un traumatisme physique ou d un acte chirurgical continuent avoir des sensations dans leur membre manquant qu on appelle un membre fant me Les patients dot s d un membre fant me ont des perceptions et des souvenirs normaux en dehors des sensations dans leur membre fant me qui est une cr ation mentale Curieusement des enfants n s avec des membres incomplets ou manquants bras ou jambe ont galement
35. itionnel imm diat il saute aux yeux 7 que les FICs de monsieur G constituent l un des modes d acc s privil gi s certains pans de r alit de sa r alit son t l scopage entre la sc ne traumatique d versement de l annulaire au bout d un clou de nombreuses ann es auparavant en Am rique du Sud et la construction imaginaire du bras qui pendait un clou de boucher ne nous parle t il pas de l intensit de la force motionnelle de ce souvenir pisodique De sa p rennit psychique et de sa reconsolidation qui ont sans doute jou un r le dans la naissance bien r elle de cette confabulation Comme Elizabeth Loftus nous l enseignera bient t les vrais faux souvenirs sont souvent toujours compos s de fragments de vrais souvenirs et ils nous renseignent ainsi indirectement sur la r alit du sujet et sur la retranscription subjective de cette r alit son incapacit int grer ce membre comme tant sien nous parle galement de la r alit de sa condition neurologique Comment une pareille histoire est elle simplement possible A l aide d un examen en IRM fonctionnelle nous avons pu observer que Monsieur G semble avoir une lat ralisation droite du langage c est dire que lorsqu il produit ou comprend du langage il utilise pour cela son h misph re droit contrairement la majorit des humains Lorsque monsieur G nous raconte ses sc narios fictifs il le fait probablement avec cet h misp
36. jet de ses recherches sans la confondre avec un nonc n cessairement vrai Un peu comme un ethnologue qui consacrerait son existence explorer la richesse d une culture amazonienne des mythes ses rites sa soci t et qui finirait par croire litt ralement les mythes tudi s Une question de distance correcte Une fois identifi es pour ce qu elles sont et pour ce qu elles ne sont pas n cessairement la question de la gen se tr s probablement inconsciente de ces FICs de leur acc s la conscience du sujet et de la dynamique consciente ou inconscient de leurs r visions de leurs corrections peut faire l objet de nos recherches Les neurosciences de la cognition offrent un point de vue pr cieux sur la nature de notre acc s la r alit de la mani re dont nous nous la repr sentons avec toutes ces situations limites observ es en particulier chez les malades de neurologie et de psychiatrie convictions d lirantes d lires de toutes sortes hallucinations faux souvenirs confabulations Tr s souvent d ailleurs l exploration de ces cas limites permet de d gager des principes subliminale le clignement attentionnel ou la c cit au changement chez des sujets sains et la n gligence visuelle la vision aveugle ou encore les agnosies visuelles chez Les patients neurologiques 5 Naccache L 2006 Le Nouvel Inconscient Freud Christophe Colomb des neurosciences Odile Jacob Paris D g n raux qui gouvernent
37. l m me o elle n est pas n cessairement constitu e en son objet th matique ILy a donc quelque chose d trange faire de ce qui en un certain sens en d pend savoir la v rit la condition de la r alit Evidemment un tel geste n est rendu possible que par cette repr sentation typiquement moderne d un esprit coup du monde et qui aurait pour ainsi dire le conna tre et l tablir dans sa r alit de l ext rieur La r alit devenant comme telle objet de connaissance elle semble d pendre dans son tre de la v rit et de notre capacit d tablir de telles v rit s Lfaut rejeter en premier lieu le th oricisme sous jacent une telle repr sentation La r alit est v cue avant d tre connue ou plut t nous y sommes nous en faisons partie et sommes cern s par elle avant de la conna tre C est seulement sur la base de cette inh rence premi re et en son sein qu un projet de connaissance quelconque y compris au sens le plus ordinaire du terme peut merger par rapport la r alit N anmoins si ce qui d finit la r alit est d tre ce qu elle est quoi que nous en pensions et qu en pense quelque tre pensant que ce soit il semble difficile en revanche d accorder notre sens de la r alit une immunit totale par rapport l erreur Si nous nous trompions tout le temps notre sens m me de la r alit n en serait il pas affect au point qu il deviendrait difficile peut tr
38. l acc s au r el que nous n y soyons pas d j Mais o ai je donc mis mon r el Assur ment l id e d acc s a dans la vie r elle pr cis ment un sens obvie Il arrive qu une chose ne soit pas imm diatement disponible ventuellement qu elle soit cach e Alors le probl me est pos de se m nager un acc s elle Ainsi on parle de l acc s une ressource par exemple La notion d acc s essentiellement suppose donc qu on puisse au moins th oriquement ne pas avoir acc s L acc s intervient en rem de et d passement d une telle situation comme une capacit que nous avons Mais au fait qu est ce que cela serait ne pas avoir acc s au r el Le probl me est que la notion d acc s habituellement n a de sens que sur ce terrain m me par rapport auquel la question est alors pos e de savoir si on y a acc s savoir celui du r el Qu est ce que cela serait un acc s qui ne serait pas m nag et qui en cons quence r ussirait ou chouerait dans le r el La philosophie moderne dont les neurosciences sont largement les filles a ainsi transpos un probl me au del des limites o il semblait trouver son sens de facon obvie comme si la question devenait celle de principe de la possibilit d avoir acc s ce qui est n cessaire pour que la notion d acc s ait un sens En second lieu je pense qu il y a galement des questions se poser eu gard au terme qui dans le probl me qui
39. lation aux activit s motrices aide expliquer pourquoi les perceptions et la conscience en g n ral font partie d un flux de conscience c est dire d une continuit d exp rience Le cerveau tablit cette continuit par le biais de l activit motrice du corps C est travers le mouvement que le cerveau tablit un flux de perceptions reli es entre elles d o la conclusion que la connaissance consciente ou la perception humaine est compl tement diff rente de l information stock e dans des livres et des ordinateurs La perception consciente est temporelle la continuit r sulte des correspondances que le cerveau tablit chaque instant S il en tait autrement nous percevrions une accumulation de moments sans relation entre eux et impossibles relier et nous serions ainsi incapables d acqu rir une connaissance et une compr hension du monde Telle est la raison pour laquelle la connaissance consciente diff re autant de l information stock e Mais la conscience comme la perception ne serait pas possible si le cerveau ne se servait pas du mouvement comme base de son int gration de l exp rience sensorielle Car une des fonctions importantes de la m moire dans les formes de vie avanc es et une des raisons pour lesquelles des syst mes sophistiqu s de m moire ont volu allant bien au del des m canismes simples que l on trouve chez les escargots les vers et les ponges est d liminer la fugacit du pr
40. lent 15 des choses qui ne sont jamais arriv es Ce que nous apprennent les r cits enjoliv s de Hillary Clinton et de Paul Ryan c est que des souvenirs d form s peuvent tre tres vifs et d taill s m me chez des gens tr s intelligents et tr s dipl m s une presque pr sidente et un presque vice pr sident des Etats Unis Si cela peut leur arriver sur des sujets aussi faciles r futer cela peut nous arriver tous tudier les d formations de la m moire Dans les premi res tudes men es dans les ann es 1970 j ai montr ce qui peut arriver quand une personne qui a assist un crime ou un accident est ensuite Interrog e de mani re biais e sur cet v nement Dans une de ces tudes on demandait des gens qui avaient assist des accidents de voiture simul s A quelle vitesse roulaient ces voitures quand elles se sont cras es l une contre l autre La formulation suggestive de cette question les conduisait des estimations de vitesse plus lev es que lorsque la question tait plus neutre quelle vitesse roulaient ces voitures quand elles se sont heurt es De plus la question la plus suggestive cras es amenait plus souvent les t moins se rappeler avoir vu du verre bris sur la sc ne de l accident alors qu il n y en avait pas Dans une autre tude une question simple mentionnant un panneau Stop alors qu il s agissait en r alit d une panneau de cession de
41. mis Alors qu elles taient en prison les vrais coupables taient libres et souvent commettaient de nouveaux crimes Des centaines sinon des milliers de p res de m res d oncles de grands parents et de voisins ont t accus s de crimes qui n ont peut tre jamais exist Certains de ces accus s sont toujours en prison Un faux souvenir en est la cause Mais la science du faux souvenir nous en apprend tout autant sur les innovations qui peuvent r duire le nombre de ces trag dies et certains de ces changements sont d j appliqu s par la police et les professionnels de la sant mentale Le fait de communiquer ce que nous avons appris un plus vaste public contribuera consid rablement r duire les d g ts que peuvent causer les faux souvenirs S il y a une le on retenir de nos d couvertes c est celle ci Le fait qu un souvenir soit exprim avec assurance avec motion le fait qu il soit d taill ne signifie pas qu il est r el On ne peut encore tablir de distinctions fiables entre vrais et faux souvenirs on a encore besoin de confirmations ind pendantes Les avanc es dans le domaine de la neuro imagerie et d autres techniques nous y aideront peut tre dans l avenir Mais entre temps nous en tant que soci t ferions bien de garder constamment l esprit le fait que la m moire comme la libert est fragile Jo lle Marelli est traductrice Amira Hass Judith Butler Rashid Khalidi Joseph Mass
42. parce que l auto tromperie est tout fait au c ur de nos fonctions mentales Si nous ne pouvions pas tromper autrui et nous m me nous n aurions pas d imagination pas de pens es ni plaisirs ni chagrins La tromperie et lauto tromperie sont aux racines de la soci t elles sont le ciment qui rend possible la vie sociale sans auto tromperie nous n aurions pas d imagination et nos relations sociales seraient encore plus fragiles qu elles ne le sont Mais si comme nous l avons d j dit nos mondes sensoriels sont cr s par des combinaisons de certaines caract ristiques physiques de nos environnements qui stimulent nos r cepteurs sensoriels des combinaisons qui simplifient et stabilisent nos mondes sensoriels que se passe t il si nous perdons une modalit sensorielle non pas la suite d une l sion au cerveau mais cause d une atteinte un r cepteur sensoriel sp cifique Par exemple que se passe t il si un individu devient aveugle au cours de sa vie John Hull qui fut atteint d une c cit compl te quarante cinq ans crivit dans son livre Touching the Rock Nous n apprenons pas de nos propres images pas plus que de nos souvenirs mais seulement de nos perceptions Dans une certaine mesure il appara t sans importance de savoir quoi ressemble les gens ou les villes On ne peut pas v rifier de premi re main l exactitude de ces rapports ils perdent toute signification personnelle et sont rel gu s a
43. r ces repr sentations puis de les manipuler plus ou moins notre guise La philosophie nous a habitu s prendre en compte la singularit de ces objet si particuliers objets intentionnels indissociables de la vis e consciente qui Les saisit fondement apodictique de notre subjectivit r cursivit des jeux de langage int rieur De leur c t Les neurosciences cognitives cherchent depuis quelques ann es caract riser les propri t s psychologiques et les m canismes c r braux de ces repr sentations mentales conscientes A travers la comparaison minutieuse de situations exp rimentales ou m dicales entre d une part des tats ou des contenus conscients et d autre part leurs quivalents non conscients ce champ 1 Les tats intransitivement non conscients sont par exemple le coma l tat v g tatif l anesth sie g n rale ou le sommeil profond Parmi les contenus mentaux inconscients l oeuvre chez des sujets conscients on peut citer de mani re non exhaustive la perception 4 de recherche permet de formuler des hypoth ses th oriques g n rales qui font l objet de nombreux travaux Parmi ces mod les je citerai notamment celui de l espace de travail global qui tablit que les op rations mentales conscientes requi rent le fonctionnement int gr et coh rent d un r seau c r bral distribu dont les picentres se concentrent dans les r gions corticales associatives pr frontales et pari tales notamment
44. r lation par le cerveau d informations sensorielles qui cr e la connaissance que nous avons de ce qui nous entoure et qui ce faisant nous aide comprendre et manipuler nos environnements C est partir du milieu sensoriel chaotique que notre cerveau doit cr er quelque chose de stable coh rent et dynamique Notre vie consciente est un flux ou une Int gration constante d un pass imm diat et du pr sent ce qu Henri Bergson appelait le souvenir du pr sent 1908 et Edelman plus r cemment the remembered present le pass rem mor 1989 De ce point de vue la conscience n est ni une repr sentation rem mor e ni Le pr sent Imm diat mais quelque chose d un genre diff rent Ainsi donc nos mondes perceptuels vue ouie et toucher sont cr s par des combinaisons de certaines caract ristiques physiques de nos environnements qui stimulent nos r cepteurs sensoriels Si nous tions directement conscients de la lumi re qui frappe notre r tine nous serions tr s perturb s par l instabilit de nos images visuelles Nos mondes visuels sont stabilis s parce que le cerveau simplifie l environnement visuel en int grant chaque instant les diff rentes quantit s de lumi re et d obscurit donnant naissance par exemple ce que nous percevons comme une couleur Une l sion au cerveau peut provoquer une perte s lective de diff rentes fonctions et diff rentes sortes de m moire Des patients atteints de c c
45. r ainsi dire un voile entre lui et nous et nous emp che d y acc der tel qu il est Cependant une telle analyse n a de sens que parce qu elle tient cette activit pour une r alit et suppose donc l arri re plan ce type m me de connexion avec le r el que seule son interpr tation incorrecte trop rapide une interpr tation qui nous placerait la fois dans et en dehors du cadre de cette analyse finit par nous faire uger probl matique Patrick Boucheron Intervenir dans ce d bat en tant qu historien cest n cessairement se retrouver en porte faux D abord parce que l histoire en tant qu elle est comme la m decine d ailleurs un savoir du singulier se d finit comme une science indiciaire De la r alit pass e qui est le garant de la LU 7 Les neurosciences ont elles quelque chose nous apprendre sur le r el que de traces et c est en rassemblant ces traces quelle peut remonter aux contextes historiques qui les ont vues na tre D o la d finition donn e par Paul Veyne de l op ration historique le r cit vrai qui consiste ordonner des traces laiss es par des intrigues Un r cit rien qu un r cit si l histoire n est pas de la litt rature elle ne dispose d aucun autre moyen que litt raire pour en convaincre ses lecteurs Mais cette r alit pass e que traque l historien est ce le r el Par d finition le pass n existe plus il n a donc pas de r alit Pour se ras
46. r l tude de la prise de conscience avec laquelle il nous sera possible d tablir plusieurs liens l observation des malades joue ici un r le central m me s il ne s agit pas n cessairement des m mes tableaux cliniques Ces fictions interpr tations croyances FICs ne sont pas fictionnelles parce qu elles sont fausses Il est possible de les qualifier de fictionnelles pour souligner leur qualit le produit de processus Interpr tatifs et l objet de croyance du sujet Pas n cessairement inexactes ou fausses donc mais Il est simplement plus facile de prendre conscience de ces FICs lorsqu elles sont en opposition flagrante avec la r alit objective Il faut d ailleurs garder l esprit que la plupart du temps ces FICSs sont fid lement adapt es cette r alit Ce qui ne retire rien leur statut de FICSs mais qui rend leur identification plus d licate La posture du chercheur qui me semble ici la plus ad quate correspond ce que Dennett appelle l h t ro ph nom nologie le recueil attentif et le plus fid le possible de ce qui s offre la conscience du sujet sans pour autant accorder ce discours subjectif un statut de v rit Autrement dit l tude de la conscience expose souvent deux cueils soit l ignorance d lib r e de son contenu au nom d un r ductionnisme aveugle soit la prise en compte de ces discours conscients au sens litt ral Il s agit d une question de distance faire de la conscience l ob
47. rs tudes ont ainsi consist faire croire des sujets qu ils avaient crois le personnage de Bugs Bunny dans un parc Disney en les exposant une seule fausse publicit pour Disney montrant ce personnage Les participants devaient regarder cette publicit et l valuer selon une s rie de crit res Nombreux furent ceux qui affirm rent par la suite avoir vu Bugs Bunny Disney ce qui est impossible tant donn que Bugs Bunny est un personnage de la Warner Brothers et n apparait pas sur les sites Disney Les faux souvenirs importent Apr s avoir pass des ann es implanter de faux souvenirs dans les esprits de cobayes mes collaborateurs et moi nous sommes int ress s aux cons quences que cela pouvait avoir Les fausses croyances et les faux souvenirs ont ils des ramifications pour les gens au sens o cela affecterait plus tard leurs intentions leurs pens es ou leurs conduites Nos premiers efforts dans ce sens ont consist implanter le faux souvenir d avoir t malade enfant pour avoir mang des ufs durs ou des cornichons l aneth Une fois cette croyance enracin e les participants convi s un buffet champ tre avaient tendance moins vouloir consommer de ces mets On a pu observer la m me chose avec le faux souvenir d tre tomb malade apr s avoir mang des aliments tr s caloriques en l occurrence de la glace la fraise On a montr que ce genre de faux souvenirs peut avoir sur le comportement
48. s lui demanderons si une fois que l on prend en compte toute la dimension reconstructive de la m moire humaine il demeure toutefois possible de sonder ce que ces souvenirs vrais o inexacts mais toujours construits v hiculent de l nigme de la subjectivit de cet individu quelle r alit de l individu acc de t on travers eux Neurosciences de soi La psychologie et Les neurosciences occupent trois de ces cinq Interventions La troisi me d entre elles last but not least donnera entendre la voix d Isra l Rosenfield qui depuis longtemps explore les racines neurologiques de la subjectivit de la m moire de soi de la perception du monde et in fine de la construction de soi Ses r flexions ses essais et ses excursions litt raires je pense ici en particulier la profonde et fac tieuse M galomanie de Freud 4 font de Lui un interlocuteur de choix pour livrer sa version du probl me Avant de donner la parole mes coll gues je voudrais vous pr senter certains r sultats et id es issus des neurosciences de la cognition Neurosciences Notre discours conscient ne cesse de manipuler des contenus que l on peut d signer sous le terme g n rique de repr sentations mentales Repr sentations perceptives mn siques motionnelles motrices imaginaires chaque fois nous prenons conscience d un contenu qui s offre sur la sc ne de notre conscience nous sommes capables de nous rapporte
49. sent de cr er un monde perceptuel continu stable Les objets et les gens existent par del le temps Sans la m moire sans une continuit chaque instant tout ce que nous voyons indiff remment anim o inanim para trait constamment nouveau et sans aucun lien Sans la capacit relier les instants entre eux un chien tournant le museau nous donnerait l impression de n tre pas le m me animal C est travers la m moire que le pr sent est continu la m moire cr e un pass un pr sent et un futur elle cr e des relations et un flux de temps Le pr sent n est plus un pr sent fugace mais un pr sent tendu Le cerveau cr e une perception du temps Aussi les souvenirs et les perceptions sont ils subjectifs Il ny a pas de perceptions et de souvenirs sans un sentiment de sol Sans la connaissance de son existence un individu ne peut pas se rem morer des choses sans une image corporelle nos mondes perceptuels perdent toute forme Comment puis je me rappeler mes parents ma maison moins d tre moi m me s r de ce que Jexiste Nous ne devons pas ignorer la nature essentielle 20 de toute perception o souvenir chez tout tre humain et peut tre chez certains animaux toute perception ou souvenir renvoie non seulement l v nement personne ou objet per u ou rem mor mais aussi la personne qui per oit et se rem more La v ritable essence de la perception et de la m moire est subjective et non
50. sion de cette arriv e Mais son explication fut diff rente Je me suis tromp e Mon souvenir tait diff rent Je me suis tromp e cela arrive et cela prouve que je suis un tre humain ce qui est une r v lation pour certains Une g ne comparable s est abattue en 2012 sur le candidat r publicain la vice pr sidence des tats Unis Paul Ryan qui raconta sur une radio nationale que son meilleur temps au marathon tait Inf rieur trois heures J ai fait deux heures cinquante et des poussi res a t il dit Mais une enqu te r alis e par le magazine Runner s World r v la que le meilleur temps de Ryan tait consid rablement moins bon 4h01 Sachant qu il tait d j sous l il des m dias internationaux il semble peu probable qu il ait voulu faire son Pinocchio Il me semble plus probable que Ryan ait cru sinc rement cette version de son souvenir dont la d formation tait son avantage En trois d cennies d tudes de la m moire humaine j ai r pertori de nombreuses d formations du souvenir d importances variables Mes recherches et celles de nombreux autres psychologues scientifiques nous ont enseign la mall abilit de la m moire humaine Des milliers d exp riences men es au cours du si cle pass r v lent cette v rit quelle que soit la valeur de la m moire humaine en ce qu elle nous permet d organiser nos vies il n est pas tr s difficile de faire en sorte que des gens se rappel
51. surer l historien use fr quemment de la m taphore arch ologique il exhumerait des objets de savoir de la documentation qu elle soit crite orale ou figur e de la m me mani re que le fouilleur extrait des objets tout court des archives du sol L encore la m taphore est trompeuse D abord parce qu en arrachant un objet de son niveau arch ologique de s dimentation on ne met pas jour un bout de pass L objet se voit toujours au pr sent il se pr sente nous tel que le temps l a transform Ensuite parce que l historien n a contrairement l arch ologue rien de tangible de concret de mat riel se mettre sous la dent Son mat riau n est pas le pass mais la m moire c est dire comme la d finit le philosophe et historien de l art Georges Didi Hubermann le temps d cant de son exactitude D s lors tombent les premi res illusions On peut les appeler positivistes condition de rappeler que l cole m thodique a fix je dirais presque une fois pour toute les r gles du m tier d historien en m me temps que celui ci se professionnalisait la fin du XIX si cle Peu d historiens aujourd hui se r clament explicitement du positivisme du moins du point de vue de l id e qu ils se font d eux m mes mais aucun ne s affranchit des r gles l mentaires de critique positive des sources sauf pr cis ment refuser le r gime de v rit propre l histoire qui n est faut il le rappeler qu une
52. tape primordiale de la stimulation comme le lieu th orique d une possible vraie vision et de tenir chaque tape ult rieure comme une sorte d adult ration du message primitif C est tout simplement comparer un voir et quelque chose qui n est pas un voir Cela n a donc pas de sens de dire par exemple que notre vision serait fausse par principe Fausse par rapport quoi Bien s r quand nous disons que nous voyons les choses m mes nous parlons des choses en tant que vues des choses telles que la vision a t incorpor e leur concept Mais en quoi cela nous loignerait il du r el Cette dimension ph nom nologique c est dire intrins quement d termin e par la r f rence l exp rience que nous pouvons en faire par un certain sens n est elle pas une partie constitutive de son concept de ce que nous appelons r el En fait et c est l le point important les propri t s visuelles par exemple dans notre langage ordinaire qui est celui sur le sol duquel s labore notre concept de r alit ne constituent pas une simple fa on de se repr senter la chose une image th orique de cette chose Elles en sont bien plut t une partie r elle et une dimension logique un l ment de ce que c est qu tre une chose pour un certain genre de ce que nous nommons choses Ily a l un aspect tr s Important de ce que nous appelons r alit Or c est en partant de ce sens de la r
53. tetfort com www decitre fr D dicaces gt Apr s chaque rencontre les crivains vous attendent la librairie de Mode d emploi Le suppl ment des Inrockuptibles consacr Mode d emploi Disponible en kiosque et sur les diff rents lieux du festival UN FESTIVAL DES ID ES CON U ET R ALIS PAR LA VILLA GILLET gt az R GION RH NE ALPES LYON SAINTE LE Cr dits photos D R Ghila Krajzman D R D R C Rosenfield 24 Prolongez le d bat postez vos commentaires sur www uillavoice fr de la Villa Gillet en parteneriat avec Rue89Lyon et le master journalisme de l IEP Retrouvez y aussi les articles des lyc ens de l Acad mie de Lyon les r ponses des invit s du festival des chroniques reportages et interviews des tudiants rh ne alpins Les partenaires de Mode d emploi Rh neil s GRANDLYON communaut urbaine Ce festival est soutenu par la D l gation G n rale la Langue Fran aise et aux Langues de France R PUBLIQUE FRAN AISE CE XD theatre CREATIVE he M 4i traces france tas le TLG xx philosophie finier Acteurs de INVEST IN HAL ni l conomie zE ONLYLYON A JCDecaux r O M Z UNIVERSIT UNIVERSIT acad ee NE Re UNIVERSIT D LYON Universit Claude Bernard LUMI RE JEAN MOULIN LU GOETHE INSTITUT M UNIVERSIT DE LYON COMPRENDRE LE MONDE gt Ste Ecole National lA SCIENCES PO Eve Je
54. uleversants encore Dans une tude men e dans le Tennessee environ un tiers des personnes furent persuad es d avoir failli se noyer et d avoir t sauv es par un ma tre nageur Dans une tude canadienne les chercheurs parvinrent convaincre la moiti des participants qu ils avaient t attaqu s dans leur enfance par un animal m chant Dire quelqu un qu on tient l information biographique de ses parents est sans aucun doute une forme de suggestion tr s forte Mais des travaux ult rieurs ont montr que des formes de suggestion plus subtiles peuvent galement conduire d velopper de fausses croyances et de faux souvenirs Une technique de ce genre commune dans certains cabinets de psychoth rapie consiste guider l imagination le th rapeute disant quelque chose comme Vous ne vous rappelez pas avoir subi des violences mais vous en avez tous les sympt mes Fermez donc les yeux et essayez d imaginer qui pourrait vous avoir fait a La technique de l imagination guid e persiste malgr de solides preuves que le fait d imaginer un v nement qui n est pas arriv par exemple avoir bris une fen tre main nue peut amener croire qu il a vraiment eu lieu Les chercheurs appellent cela inflation de l imagination Au moyen de proc dures de suggestion les chercheurs ont invit des gens se rappeler toutes sortes de choses qui n taient pas arriv es y compris des choses improbables ou impossibles Plusieu
55. urtant lui si Il nous en raconte m me une assez Incroyable d histoire Ce bras droit ce n est pas mon bras Mais alors quoi qu est ce que c est C est un bras bien s r mais pas le mien D o vient il Monsieur G vous confie alors en vous regardant pos ment Je me promenais Montr al oui Montr al car je ne vous l avais pas encore r v l mais Monsieur G nous raconte deux histoires incroyables celles de son bras mais aussi celle du lieu o il r side Nous sommes Montr al J ai bien not que sur les draps de ma chambre il y avait crit Assistance publique H pitaux de Paris mais c est celle de Montreal l Assistance publique des H pitaux de Paris de Montr al Bref nous sommes Montr al et ily a quelques jours je me promenais en ville tout seul et je suis tomb sur une boucherie L il y avait un bras droit qui pendait un crochet de boucherie Ca m a tonn alors je l ai achet et je l ai emmen Depuis je ne le retrouve pas En fait je sais qu on me l a greff la place de mon bras droit C est fou mais c est vrai La seule chose qui m tonne un peu c est que Je ne vois pas de traces de la couture qu ils ont bien d faire pour le fixer sur moi Aucune trace de suture c est bizarre Voil monsieur G nous a fait confiance et nous a racont certaines des r alit s mentales qui peuplent le flux de sa conscience travers le discours de ce malade quel ac
56. ute stimulation pourrait elle tre assimilable de la douleur On ne peut ignorer l importance du filtrage ou de la r gulation sans parler de la compl te r laboration de l information effectu e par le syst me central Notre relation au monde ambiant cette relation qui sans nul doute constitue le socle de notre sens de la r alit n est donc certainement pas une relation de prise directe comme s il suffisait de nous brancher dessus pour que le r el se manifeste tel qu il est Pour rendre compte de ce que nous voyons sentons etc Il faut rentrer dans l analyse de processus minemment complexes et indirects Cette r alit carils agit bien une fois encore de r alit que la philosophie doit prendre en compte ne me semble cependant pas remettre en question la th se philosophique de r alisme direct suivant laquelle nous serions bien entour s par la r alit et nous serions directement en contact avec elle C est ce dont je voudrais m expliquer pour terminer 11 Tout d abord l argument qui inf re par exemple de la complexit et ou du caract re indirect ou n gatif des processus de notre vision le fait que nous ne voyons pas vraiment les choses confond certainement deux niveaux d analyse Car voir c est pr cis ment le r sultat de tous ces processus Donc cela n a pas de sens d arr ter artificiellement le processus par l analyse et de consid rer telle ou telle de ses tapes f t ce l
57. ux limites de la conscience On ne leur reconna t plus la moindre Importance dans la conduite de sa propre vie On commence vivre sur la base d autres centres d int r t d autres valeurs On s installe progressivement dans un autre monde l exp rience de la c cit sugg re une des raisons pour lesquelles celle ci modifie profond ment la nature de la m moire la cr ation par le cerveau de couleurs go ts etc est la cons quence de la synth se ou de la comparaison d au moins deux stimuli sensoriels comme nous l avons d j vu La c cit d truit la capacit du cerveau faire ces comparaisons mais ce faisant elle d truit plus qu une sorte de stimulus sensoriel En d truisant la capacit appr cier la distance exemple ou se faire une id e de l espace la c cit d truit le sens de l image corporelle et Le soi de l individu Le r duisant des sensations qui ne sont ressenties que lorsqu il bouge Le temps est dilat Les 21 t ches sont toujours ex cut es avec le m me tempo jamais plus vite ou plus lentement l espace et le temps les caract ristiques essentielles de la m moire et de la perception sont profond ment alt r s lorsque l on est aveugle comme l est La nature fondamentale de la m moire L espace n a pas d autre extension que la port e d une canne o d un bras qui en fixent les limites C est ainsi que quand on devient aveugle la connaissance est restructur e et il en est
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