Le montage, l`espace et le temps du film
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1. li s d avoir commis une erreur de montage aussi injuste que de reprocher Giotto son manque de perspective 7 Premi res atteintes l int grit des tableaux Dans Le vol du rapide de Porter aux 14 tableaux le r alisateur avait rajout un plan pr sentant un gangster tirant de face sur les spectateurs Une image qui avait fortement choqu e l poque ce qui assura une bonne part du succ s du film Par contre on ne savait pas vraiment o le mettre dans la succession des tableaux Soit au d but soit la fin Les exploitants choisirent de la mettre la fin pour faire sortir les spectateurs de la salle plus rapidement C est avec un sous genre la course poursuite qui donne le pr texte de multiples accidents de parcours L accumulation des personnages leurs d placements entra naient invariablement une succession plus rapide des tableaux sugg rent l id e d un rythme Une succession qui tend faire clater le principe d tanch it de chaque tableau On s est rendu compte par exemple qu il tait n cessaire de faire entrer les personnages par le c t cour et les faire sortir c t jardin sous peine de donner l impression qu ils revenaient sur leurs pas L id e du raccord de direction merge une id e qui est l un des fondements du d coupage en plans et du montage II Les intuitions de D W Griffith 1 Au commencement tait Griffith Exp rimenteur de la narration cin ma2. Dreyer et sa passion de Jeanne d Arc des ouvriers sans initiative Le gros du travail est effectu par le r alisateur soit le cas le plus fr quent part l op rateur ou l assistant r alisateur Leur travail comportait la responsabilit de la r daction et des la mise en place des cartons En Grande bretagne Hitchcock entra dans la carri re avec cette activit I Hollywood fixe les r gles Etats Unis 1916 1928 1 Le pouvoir au bout des ciseaux Pour les studios na issants le succ s d un Griffith pose probl me les r alisateurs jug s encombr s impr visibles et d pensiers sont pr f r s les acteurs qu ils pensaient pouvoir plus facilement contr l s Le travail de fabrication est divis pr paration r alisation finition chaque tape est contr l e Le metteur en sc ne a des pouvoirs limit s la mise en sc ne parfois m me la seule direction des acteurs Le pose de monteur fut cr pour assurer le contr le de la production sur l tape finale de la fabrication le final cut Les terribles preuves des films d Erich Von Stroheim tout au long des ann es 20 sont r v latrices de ces pratiques sous la coupe d Anastasie g rie des censeurs au pouvoir consid rable 2 Le montage comme accomplissement du d coupage 11 ans seulement s parent ntol rance du Chanteur de Jazz Les cin astes ne s abandonnent pas des formules paresseuses de mise en film effectu rent un
3. Le m tier de monteur L abondance et la complexit des ces questions et du mat riel impose la pr sence d un collaborateur sp cialis dans ces questions Ma tre d uvre de la finition du film sous la supervision du studio sauf dans le cas o le r alisateur est lui m me le producteur de son film En Europe le chef monteur est un collaborateur du r alisateur charg de respecter ses intentions et plac sous son autorit 3 La transparence du montage classique hollywoodien D s le milieu des ann es 30 le montage classique atteint son apog e Domin par le d coupage il repose sur des principes simples yY Forme narrative s efforce la simplicit Respect de la continuit de la lin arit et des 3 unit s yY D veloppement narratif dicte la forme du film Y Les points de vue du d coupage permettent au spectateur de b n ficier de la meilleure vision possible du film v Ponctuation simple fondus encha n s volets pour le passage du temps y L ambiance sonore les raccords les champs contrechamps donnent le sentiment de la continuit de l action vY Le montage s efforce d tre invisible L ensemble contribue la transparence du montage Une exception ce principe est justement le montage dans le vocabulaire technique am ricain un bref assemblage de plans tr s courts utilis s entre 2 s quences pour exprimer le passage du temps les d buts lyriques de Susan dans Citizen Kane
4. donnant l illusion par le montage que nous nous trouvons face une femme unique Le th me n est pas futile il permet de comprendre que l on peut reconstituer un sujet partir de plans de celui ci clat s on peut galement cr er un sujet en assemblant des plans h t roclites la condition que des indices permettent de faire le rapprochement Depuis le cin ma a longuement puis cette possibilit si un acteur joue du piano les mains que l on voit sont celles d un pianiste professionnel Bresson pourtant auteur scrupuleux a de la m me fa on pr t ses mains et son criture au cur d Ambricourt Journal d un cur de campagne 1951 4 Eisenstein et le montage des attractions Dans ses premiers long m trages il entendait fa onner le public l aide ce qu il appelait le cin poing Il adapta pour ce faire le proc d du montage des attractions de son ma tre Meyerhold Il voulait provoquer chez le spectateur une motion violente en accolant des images fortes priori sans lien contextuel sans relation narrative Dans La gr ve 1925 les images de la r pression tsariste contre les gr vistes d une usine m tallurgique taient juxtapos es celle d animaux gorg s dans un abattoir aucun lien ne reliant les deux actions Dans Octobre les discours verbeux des mencheviks taient entrecoup s de gros plan sur des mains de harpistes soulignant ainsi la vanit et le car
5. es et vaincre une r ticence psychologique pour imposer les prises rapproch es dans le domaine de la fiction Il faudra pour cela remettre en cause le principe m me du tableau en introduisant une notion nouvelle et r volutionnaire celle du plan notion troitement li e au montage 4 Les tableaux en s rie Les appareils se perfectionnent on rallonge la longueur de la pellicule projet e On colle sans distinction les vues et les tableaux sans que l on puisse encore parler de montage Les films de fiction sont con us comme une suite de tableaux un d cor naturel rempla ant parfois la toile peinte Ces tableaux se succ dent sans solution de continuit chacun d eux repr sentant un moment du r cit une unit autonome d espace et de temps destin e faire avancer la fiction par coups Vies de J sus et autres passions sont significatifs de ces premiers temps du cin ma Chaque tableaux se r f rant des pisodes connus du public fuite en Egypte naissance du Christ la C ne 5 Un univers d sordonn les poules et le Christ en croix Le tableau est par d finition centrip te tout doit figurer dans l image et souvent c tait d j trop Beaucoup d l ments de personnages une lumi re parfois insuffisante l il en est r duit errer au risque de la confusion On peut ainsi citer l exemple d un missionnaire en Afrique qui montre ses ouailles une Vie et passion du christ Lors de la
6. pouss s par l engouement r volutionnaire la raret m me de la pellicule qui encourageait tourner et retourner les id es avant de tourner la manivelle Tous leurs textes th oriques malgr les divergences entendent c l brer ce qu ils consid raient comme le nerf de la guerre du langage cin matographique le montage 2 La d multiplication du point de vue Dziga Vertov dans son manifeste la r volution des kinoks 1923 critique la pr sentation th trale A l unicit du tableau il substitue le cin il la d multiplication du point de vue L il se soumet la volont de la cam ra il est dirig par elle Le tournage consiste accumuler les plans photographi s sous diff rents angles Le montage orchestre ensuite ce mat riel en recherchant un ordre des assemblages et des points de coupe La succession des plans donne le sens du film et impose au spectateur le discours du r alisateur 3 l unification des points de vue Lev Koulechov se livre un certain nombre d exp rimentations sur le montage qui ont laiss des traces dans les esprits L effet K la plus c l bre mais celle qu il estimait le plus c est la cr ation d une femme qui n a jamais exist R alis pour ses l ves il filme une femme sa toilette elle se coiffe se maquille il filme le visage la t te la chevelure les mains les jambes tous ces l ments appartenant des femmes diff rentes mais
7. 23 il r alise un norme travail sur les gros plans Le cin aste observe librement les tres sous les angles les plus vari s Il tourne autour des objets il recherche l expressivit la surprise de l angle de vision L int r t de cette d marche c est qu elle absente de gratuit La cam ra dans c ur fid le participe l action et exprime les tats d me des personnages Sc ne c l bre de la f te foraine trait e sous l angle du montage rapide exprime avec force le vertige de la jeune h ro ne 4 D coupage et montage dans la production courante A l poque les cin astes ne se pr occupent pas de telles subtilit s le d coupage reste l mentaire le montage r duit une fonction narrative l mentaire Chaque sc ne est d abord film e dans son int gralit en pla ant l appareil face au d cor telle distance que l on ait tous les acteurs dans le champ Dans un deuxi me temps on tourne les premiers plans on s approche des principaux personnages pour les prendre buste L angle de prise de vue est identique ou parall le l axe principal Le montage consiste choisir les l ments proches ou loign s les plus aptes exprimer les diff rents moments de la sc ne 5 Qui fait quoi Le m tier de monteur est n assez tard au moment du passage au sonore Au temps du muet presque toujours des monteuses Marguerite Beaug pour Gance Madame Oswald pour
8. 4 Le montage classique en question Tous les films am ricains n assum rent pas une telle transparence Citizen Kane film en 1939 et sorti en 1941 appara t comme une v ritable provocation Le montage est parsem d effets voyants et la bande son est blouissante il introduit des plans extr mement longs mais il bouleverse la lin arit de la narration en proc dant une s rie de retours en arri re A l effacement du r alisateur Welles impose la pr sence de l auteur Un film rare qui en fit na tre d autres sur son mod le Les plans de Citizen Kane jouent sur la profondeur de champ pour en tirer des effets dramatiques on les appelait plans s quence Un travail sur l espace et la lumi re les distingue de la platitude du plateau Autre forme de plan s quence le long plan en mouvement Effectu la grue ou la dolly pour mieux explorer le d cor Ce plan permet d viter le montage sans renoncer tout autant au d coupage Succ s de ce type de plan dans les ann es 40 et 50 qui s explique pour des raisons artistiques glissement fluide quasi onirique et pragmatique galement permet d viter les ciseaux du monteur Ce jeu sur la dur e ne pouvait manquer de susciter le r ve d un cin aste pour un film tourn en un seul plan unique Hitchcock rel ve le d fi avec La corde 1948 Mais l norme cam ra Technicolor ne supporte pas plus de 300 m tres de pellicule soit 11 minutes d autonomie Le
9. La figure de style la plus controvers e est sans conteste le champ contrechamp tr s utilis dans le cin ma classique pour filmer une conversation 2 personnages On lui reproche une facilit paresseuse de mise en sc ne m me si encore aujourd hui la r gle des directions de regard est toujours respect e On essaie de trouver des solutions plus ou moins inventives pour viter la figure simple plan de profil des deux personnages mouvement d appareil mise en place sophistiqu e 3 Les figures valoris es D autres figures peu go t s du montage classique furent au contraire valoris es le plans s quence le montage clat les effets de montage choc utilisant souvent le son le cri du cacato s plac en t te de la s quence du d part de Susan et de la col re de son mari dans Citizen Kane le jump cut saut cons cutif une coupe l int rieur d un plan dans les Quatre cent coups de Truffaut Fran ois Doinel interrog par l assistante sociale et A bout de souffle s rie de plans sur la nuque de Patricia dans une voiture 4 Montage mon beau souci Une l gende veut que Godard en regardant le premier montage d A bout de souffle ait constat que le film d passait d 1 2 heure la dur e souhait e Il aurait coup syst matiquement quelques images en t te et en queue de chaque plan au lieu de sacrifier des sc nes enti res selon la pratique habituelle Cette l gende qui accr dite la
10. Vincent Pinel Le montage l espace et le temps du film Cahiers du Cin ma Sc r n CRDP 2001 l espace et le temps du film LE MONTAGE j l invention d un langage du d coupage au montage l volution des pratiques VINCENT PINEL Ouverture Qu est ce que le montage Le mot entre dans le vocabulaire dans les ann es 10 en concurrence avec assemblage Il d finissait le simple aboutage de fragments divers ou d une suite de tableaux A la fin des ann es 10 la signification du mot s largit Le montage s applique alors la derni re tape dans l laboration d un film qui assure la synth se des l ments recueillis lors du tournage Cette synth se recouvre 3 op rations v Cutting op ration mat rielle couper coller y Editing ordonner les l ments visuels aux l ments sonores y Montage relations entre les plans dans une perspective esth tique et s miologique D coupage et montage Il convient de distinguer d coupage et montage le premier exercice d analyse qui pr c de le tournage ou qui l accompagne est de l ordre du projet ou de l improvisation Le second op ration de synth se effectu e lors de la finition du film Le d coupage pr voit l organisation du film en le fragmentant en unit s de temps et d espace les plans Cette fragmentation pr pare le terrain au montage D couper c est concevoir plan par plan cadre par cadre ce qui sera mo
11. act re l nifiant de leurs propos On a beaucoup glos sur ces coups de force mais les figures de style font parfois des retours inattendus le montage contemporain peut ainsi puiser dans des formes jug es maladroites ou p rim es Shining et les images mentales 5 Potemkine apog e du montage eisensteinien Il affine la forme du montage des attractions avec ce film L association de deux plans est per ue sous l angle du choc L id e na t de la collision Comme une s rie d explosions dans un moteur d automobile Le dynamisme du montage donne l impulsion au film Eisenstein maniait avec loquence un principe le d tail pour le tout et un proc d le gros plan La c l bre sc ne des escaliers d Odessa constitue un manifeste du montage eisensteinien coordonnant tous les m canismes de l motion jusqu faire na tre I id e la n cessit de la r volte L autre apport r side dans la libert qu il apportait ses raccords le soldat l ve son sabre amorce le geste d une femme d chir par une balafre r sultat un marin fou de rage brandissant une assiette pour la casser r p tition du geste qui donne une force tonnante la sc ne Chez Eisenstein le montage n a pas de justification r aliste il r side dans une puissance et s che volont d expression comme un cri pour Eisenstein comme un chant chez Poudovkine L on Moussinac 6 Le montage des films so
12. crucifixion les spectateurs s interpellent et s esclaffent de rire il fallut plusieurs s ances au missionnaire pour comprendre l hilarit de son auditoire au pied de la croix se trouvaient des poules et leurs poussins D tail minuscule mais pas pour ces africains pour lesquels les gallinac s pr sentaient un caract re familier li leur vie quotidienne 6 Les tableaux et le r cit D velopper une histoire l aide de tableaux pose des probl mes sur le plan narratif dans La vie d un pompier de Porter 1903 le sauvetage du feu en deux tableaux Une chambre est cern e par le feu l ext rieur d un immeuble avec une chelle qui acc de la fen tre Les pompiers sauvent une femme son enfant puis reviennent dans la chambre teindre le feu Les spectateurs taient amen s regarder deux fois la m me action L id e de m ler les deux visions comme le ferait un montage aujourd hui tait compl tement impossible l poque incomprise par le public pour qui le tableau est une figure indivisible Un autre exemple Le voyage dans la lune de M li s 1902 dans le 9 tableau l obus se fiche dans l il de la lune Ensuite nous sommes sur le sol du satellite avant que l obus n alunisse brutalement Redoublement de l action La notion de continuit n existe pas encore alors qu aujourd hui un raccord dans le mouvement aurait suffi donner l action sa continuit Ne pas reprocher M
13. d ensemble jusqu au plan rapproch cr ation d un espace spatio temporel montage altern montage parall le Intol rance ensuite qui d veloppe 4 intrigues parall les travers les ges les entrem le et les met en parall le Griffith am ne une autre technique le raccord regard Un type de raccord qui contredit sa fid lit au tableau figure centrale de son art comme le soulignent les commentaires de Rohmer Si Griffith invente le montage comme criture narrative le montage ne pr side pas encore l laboration des plans c est dire au d coupage En ce sens on trouve nombre de faux raccords car les plans n avaient pas t film s par rapport leur invisible raccord L influence de Griffith est consid rable chez Dreyer Gance les jeunes cin astes de l re sovi tique Les images entre elles L Les sovi tiques et l arme du montage Russie ann es 20 1 Le primat du montage Les cin astes sovi tiques demandent une r volution dans l art en parall le avec la r volution politique Des mouvements d avant garde s op rent autour de Ma akovski chef de file du mouvement futuriste Pour ces hommes le summum de la modernit tait l Am rique avec son culte de la machine de la vitesse ses rythmes fr n tiques ses serials et surtout ce moyen d expression neuf le montage Griffith avait le souci de raconter des histoires les nouveaux cin astes russes sont des th oriciens
14. e commence devenir un plan 4 La structuration du r cit Griffith pressent galement le principe du montage altern dans La t l graphiste de Lonedale 1911 la jeune femme victime de gangster utilise son instrument pour appeler l aide Succession de tableaux qui montrent tour tour la jeune fille et la locomotive qui fonce son secours M me id e pour le montage parall le dans Les sp culateurs Griffith oppose deux tableaux de fa on contrast e Le luxe d une r ception donn e par le sp culateur la mis re de malheureux affam s par la hausse du prix du bl Ce qui oppose ces deux tableaux participe autant l expression que leur contenu individuel 5 La beaut de l actrice La l gende selon Malraux Esquisse d une psychologie du cin ma veut que Griffith ait t bloui par la beaut d une actrice et ait d cid de la filmer en gros plan Dans un premier temps ces gros plans furent des pi ces rajout es qui redoublaient l action Leur int gration dans la continuit du film n cessite des nouvelles habitudes une modification du regard du spectateur 6 Deux films phares Le fruit de ses recherches Griffith les met profit dans 2 superproductions qu il produisit lui m me Naissance d une nation le film qui fait surgir le cin ma moderne selon les propos d Henri Langlois On y retrouve les mat riaux d une nouvelle criture cin matographique chelonnage des plans plans
15. film fut divis en 11 plans aujourd hui avec la cam ra num rique le r ve du plan unique est enfin possible Time Code de Mike Figgis 2000 qui montre en Split screen 4 plans synchrones d 1 heure 30 Hitchcock pour les raccords s appuie sur le dos d un personnage qui vient obturer le champ Aujourd hui nous nous apercevons que les raccords ne passent pas inaper us alors que les habituels champs contrechamps sont quasiment invisibles parce que nous sommes habitu s ce type de jeu Hitchcock en tirera les le ons en revenant au d coupage montage traditionnel IHI Le cin ma d auteur et le montage 1 Le mod le remis en cause Le montage troitement li au d coupage rouage d une criture lisse et transparente laisse croire que le mod le est achev Sans exclure ni l invention ni le brio de la mise en sc ne qui impose la discr tion Ce montage servit de mod le toutes les cin matographies du monde y compris au cin ma sovi tique des ann es 30 60 Quelques auteurs y firent de s rieuses entorses 2 Quelques figures de style contest es En particulier les effets concernant la lin arit du r cit le caract re d suet du fondu encha n qui annonce un retour en arri re Une coupe franche bien plac e et une bande sonore bien plac e un mouvement d appareil envo tant la fa on de Kenji Mizoguchi dans les contes de la lune vague apr s la pluie sugg re tout aussi bien le passage
16. grogne des r alisateurs contre Godard accus de porter atteinte une des r gles fondamentales du montage classique le raccord qui devait tre juste et invisible L examen du film montre que le montage ne rel ve aucunement du hasard Godard tr s impressionn par le documentaire de Jean Rouch Moi un noir tourn e en dehors des normes traditionnelles de la continuit filmique Par ailleurs le tournage du film largement improvis sans d coupage initial affranchissait le montage de toute contrainte pr alable Godard joue d audace cultive l ellipse et donne au film son style inimitable rapide et syncop La rupture avec le raccord classique ne signifie pas pour autant l assemblage arbitraire des plans Godard utilise le raccord de mouvement pour relier 2 sc nes mais distinctes Michel Poicard amorce dans une sc ne un geste qu il ach ve dans un espace diff rent et un autre moment Mani re pour Godard de montrer qu il n y a pas des r gles seulement des habitudes et que tout devait tre r invent pour les besoins de chaque film 5 Le collage la collure rapide Dans Hiroshima mon amour Resnais joue la carte d une structuration complexe Inspir par Citizen Kane il abandonne les rivages du r cit classique pour orchestrer la fa on d une partition musicale une s rie de motifs h t rog nes jusqu les brasser troitement dans la derni re partie du film L apport principal de l au
17. in ma sonore Accueill avec enthousiasme par les spectateurs beaucoup moins par les cin astes le passage au sonore faisait craindre un an antissement des recherches effectu es dans le d coupage montage Des inqui tudes parfois fond es des films m diocres s abandonn rent une sorte de retour au th tre film Le seul dialogue devint pendant 20 ans le support de la structure filmique autour duquel s articule le d coupage 2 films se d tachent Hallelujah de King Vidor 1929 le spectateur est immerg dans un sublime bain sonore spiritual Exploit d autant plus fort que les ext rieurs avaient t enregistr s sans son direct et que le montage se fit sans mat riel adapt la Moviola est invent e l ann e suivante L Ange bleu de Sternberg 1930 Le jeu des ouvertures et fermetures de portes dans la loge de Lola laisse entendre la musique de la sc ne et l ambiance de la salle sans que l image elle m me s attache ce d tail Avec Sternberg on d couvre que le son ne se limite pas qu au dialogue il peut tre un moyen d expression sans nuire pour autant au pouvoir des images Le mode de repr sentation institutionnel selon les mots de No l Burch ne connurent que des variations mineures jusqu nos jours Le principe du montage sonore volua peu m me avec le passage au son magn tique dans les ann es 50 Le passage au montage virtuel depuis la fin des ann es 90 change par contre la donne 2
18. ment de la variation des grosseurs de plans il ne s loigne qu avec r ticence de la vis e hauteur d homme et de la perpendiculaire par rapport au d cor 2 Le montage court Gance renouvelle une autre technique de Griffith le montage acc l r Une s rie de plans plusieurs fois r p t s Apr s un premier en plans longs et vari s l encha nement de plans rapides entra ne une sensation d acc l ration du mouvement Un type de montage que l on retrouve notamment dans La roue La s quence du train qui s emballe fit une grande impression sur le public et enthousiasme les jeunes cin astes comme Germaine Dulac mouvements d yeux de roues de paysages noires blanches croches combinaison d orchestration visuelle le cin ma Drame peut tre mais drame con u dans une forme absolument originale loin des lois qui r gissent la sc ne et la litt rature La s quence du montage rapide fut d s lors l exercice impos de tout jeune cin aste un peu ambitieux 75 ans avant qu elle ne devienne une des figures favorites du clip et du film d action Gance l applique son paroxysme avec la s quence du chant La marseillaise dans son Napol on en 1927 o chaque plan est r duit un photogramme 3 Jean Epstein et le montage en libert Disciple d Abel Gance il est le cin aste qui impose les notions nouvelles de d coupage et de montage Dans Auberge rouge 1923 et c ur fid le 19
19. n la prise de vues correspondant au quatri me mur du th tre Tout contrechamp est donc impossible La cam ra ne joue aucun r le cr ateur elle est l instrument du simple enregistrement d un spectacle pr par sur le plateau qui lui fait face 3 La libert de la vue et la rigidit du tableau Leurs diff rences sont tangibles libert de la vue propre l exp rience photographique face la rigidit du dispositif sc nique du tableau La vue pr sente le monde r el le tableau pr sente un d cor illustrant des sc nes de fiction vues historiques sc nes reconstitu es La cam ra prend la place du spectateur cens occuper la premi re place des fauteuils d orchestre Une r gle tacite voulait que les acteurs soient vus en pieds avec de l air au dessus de la t te Le regard du public habit au th tre acceptait mal qu un acteur ne soit pas repr sent en entier mi corps il devient un cul de jatte un homme tronc Tout ce qui rel ve du jeu dramatique tait n cessairement li au dispositif th tral Curieusement les spectateurs refusaient dans la repr sentation du monde fictif ce qu ils acceptaient dans les vues documentaires L arriv e d un train en gare de La Ciotat nous pr sente toute la gamme de plans des plus loign s au tr s gros plan Jeu sur la profondeur de champ n tait pas accept dans le cadre du tableau Il faudra des ann
20. nore Le travail du monteur se fait troitement avec le r alisateur il d pend de ses yeux de ses oreilles et bien entendu du mat riel dont il dispose Hitchcock et Georges Tomasini Rossellini Michelangelo Antonioni et Eraldo Da Roma Godard et Truffaut et Agn s Guillemot Incessant d placement du gn ral vers le particulier du particulier vers le g n ral Tout ceci entra ne des recherches des essais d autant plus compliqu si un story board ou d coupage de fer ne vienne contraindre la libert du montage Conclusion Les libert s du montage virtuel En 1981 l invention de la cam ra A ton pose les nouveaux principes du montage virtuel les images directement plac es sur disque dur pourront tre travaill es directement aucun moment le montage ne sera report sur un support physique Le montage virtuel s impose en France partir de 1990 participant au vaste mouvement de num risation de toutes les techniques du cin ma de la prise de vues la diffusion sonore Changement de travail radical A la lente et minutieuse patience se substitue le vertige d un choix illimit simple et imm diat Le montage d passe m me l assemblage des images pour s insinuer l int rieur des plans recadrage d formations modifications de la lumi re encha nement des plans trucages num riques Il convient de positiver face ces perspectives nouvelles tout en mettant l accent sur le danger de la facili
21. ntr et non montr vu et non vu entendu et non entendu Le d coupage d finit la strat gie globale du film Le partage des deux activit s est toujours in gal dans le cas du reportage l op rateur improvise accumule les prises de vue et le montage les met en ordre Dans le cadre de films qui privil gient les longs plans s quence le d coupage est privil gi au d triment du montage Le temps du tableau I Le cin ma sans le montage 1 La vue Les deux principaux modes de repr sentation du cin ma la vue et le tableau qui excluent d embl e l id e de montage La vue Lumi re n est en somme qu une photographie en mouvement permettant de saisir la vie sur le vif La vue forme un tout qui ne sollicite ni avant ni apr s ni contrechamp Prise unique de moins d une minute dict e par la n cessit de recharger l appareil de prise de vues La vue reste le premier mode de repr sentation de ce qu on n appelait pas encore le cin ma du r el 2 Le tableau Le mot renvoie au vocabulaire des spectacles de vari t des revues et des op rettes Le cin ma filme une sc ne pris dans le sens d une unit du r cit dramatique trait e sous la forme d un tableau prise de vues d un seul jet embrassant frontalement la totalit d un d cor peint Le th tre de pose de M li s Montreuil sous Bois d s 1897 pr voyait un c t sc ne et l oppos un appentis desti
22. ont organis s leur relation de m me continuit temporelle ou discontinuit ellipses br ves ou sautes importantes jeu sur la chronologie retour en arri re morcellement des plans plan fixe ou mobile coupe franche ou effets de liaison La temporalit est d finie par des continuit s et des ruptures Dans les segments continus les plans successifs correspondant bien aux mouvements d attention successifs de la perception courante Ils sont reli s par des coupes franches et mettent en uvre des raccords de regard ou de mouvements Les ruptures sont sugg r es par la simple ellipse jusqu des dur es plus importantes sugg r es par des moyens sp cifiques fondu au noir rotation du mouvement des aiguilles effeuillage du calendrier bref montage rapide La question du rythme ne peut se limiter une simple m trique La longueur du plan est une donn e complexe relative autant v cue que ressentie en vue de cr er d lib r ment frustration ou lassitude 4 Le jeu avec l espace Au cin ma l espace est un concept aussi ambigu que le temps On distingue l espace filmer celui du d cor o volue l acteur l espace enregistr celui du cadre film par l appareil l espace du film suscit par le d coupage montage des plans L espace du film est n quand les prises de vues ont commenc tre multidirectionnelles Plus tard en s approchant des personnages en prenant un angle par rappo
23. rt une ligne imaginaire recouvrant leur change de regards la eye line pour mieux valoriser les yeux d un personnage puis ceux de l autre L angle 180 ne permettait pas d assurer le croisement de ces regards les personnages semblant regarder dans la m me direction D o l apparition du champ contrechamp rare r gle institu e dans la mise en sc ne cin matographique Dans ce principe on d finit les raccords de direction Il convient d s lors de ne pas franchir la ligne de yeux Si un personnage marche de la droite vers la gauche un contrechamp 180 inverse le sens du d placement et donne le sentiment que le personnage revient sur ses pas En prenant soin de ne pas franchir la ligne cr e par le d placement la direction est respect e Une autre r gle est celle d viter les changements d angles trop faibles moins de 30 lorsque l on passe d un plan un autre Sinon on donne le sentiment d une saute Ces r gles labor es durant les ann es 20 ne furent pas re ues comme des commandements Lubitsch attentif toutes les formes de relation entre les personnages y porte une certaine attention Borzage champion de la diversit des angles y consacre peu d importance ses films muets abondent en faux raccords Ces r gles ne s appliqu rent qu avec le d veloppement du sonore L alliance du son et de l image L Le montage classique 1929 1958 1 Le montage et l arriv e du c
24. t un abus de ralenti montage rapide encha n s qui d bouchent sur une bouillie visuelle La question se pose par rapport la p riode pr c dente marqu e par un montage qui se fondait sur la difficile contrainte de repr senter l identique l apparence du r el Le spectateur aujourd hui est habitu aux effets du montage classique Pour paraphraser Bazin parlant du cin ma il convient que le montage poursuive son volution et invente d autres formes nous obligeons rester vigilants et actif
25. teur tient dans ses collages au sens pictural du terme Resnais que l on retrouve notamment dans Nuit et brouillard m le les images documentaires une histoire d amour contemporaine et aux souvenirs mal teins de Nevers qui surgissait du pass de l h ro ne A l inverse du cin ma d auteur l autre tape marquante du montage apparut avec les deux films de Sam Peckinpah La horde sauvage et chiens de paille Violence paroxystique qui utilise tous les artifices du montage court fast cut surd coupage d un simple mouvements en une s rie de plans tr s brefs L usage paradoxal du ralenti permettait de mettre en relief la fr quence fr n tique de ces effets 6 Mettre au jour le film On aurait tort de consid rer le montage comme un simple assemblage de pi ces l aide de quelques effets et proc d s De m me c est une erreur de croire que des r gles fixes un mode d emploi respecter scrupuleusement les conseils qui se sont ainsi transmis n taient que des recettes plus ou moins suivies par ailleurs raccord de mouvement suppose un franchissement d espace il ne donne pas le sentiment d un raccord juste et il est n cessaire de supprimer quelques images dans une conversation champ contrechamp il est conseill de couper l image de celui qui parle juste avant qu il ne prononce sa derni re syllabe pour passer une nouvelle s quence il est bien vu d amorcer en amont son ambiance so
26. tographique travers tous ses petits films qu il tourne pour la Biograph de 1908 1913 Il reste fid le au tableau respectant le quatri me mur mais 1l rompit avec un cadrage tr s large en se rapprochant des interpr tes cadr mi cuisse le plan am ricain selon l expression fran aise Son effort consiste rendre le tableau plus familier plus r aliste briser l tanch it en jouant sur la circulation avec d autres 2 Le passage de la porte Un personnage ouvre une porte et amorce une sortie L appareil saute et pr sente un nouveau d cor tandis que nous voyons le m me personnage entrer et fermer la porte derri re lui Le passage de la porte fut la vraie transition la faveur de ce raccord l ouverture de la porte tablit une continuit temporelle action en continue qui suppose un temps continu et une continuit spatiale les deux espaces sont joint seulement s par s par une porte 3 La structuration de l espace et du temps Dans La villa solitaire 1909 une m re et ses filles sont victimes de cambrioleurs En attendant l arriv e du ma tre de maison elles passent d une pi ce l autre pour gagner du temps Ce passage dessine les contours d un lieu imaginaire compos d cor par d cor L assemblage des images n tablit pas qu une continuit entre elles il devient cr ateur d un espace temps arbitraire l espace du film Le tableau en perdant son autonomi
27. travail subtil qui privil gie le d coupage dont le montage assure l accomplissement En t moignent des films comme Les rapaces de Stroheim l Aurore de Murnau Le vent de Sj str m les films burlesques de Mack Sennett Harry Langdon Buster Keaton et Charlie Chaplin L influence des recherches sovi tiques furent d cisives mais canalis es dans un sens contraire pas d effets provocateurs les am ricains ne d velopp rent pas de culte du montage C est un simple instrument de narration et ils conserv rent une grande r ticence quant l utilisation du montage court et du gros plan la dur e du plan tourne autour de 6 sec aux Etats Unis entre 1918 et 1923 6 5 sec en Europe contre 3 pour le cuirass Potemkine Par contre ils vont tr s loin pour camoufler l criture derri re le rideau du naturel tout en allant tr s loin dans les subtilit s de l expression visuelle s labore le style classique du montage hollywoodien mis en place entre 1920 et 1926 3 Le jeu avec le temps D coupages et montage d finissent les plans qui s unissent entre eux pour constituer des ensembles d finis par une action unitaire la sc ne marqu e par la continuit spatio temporelle et la s quence qui comporte des ellipses Monter un film consiste organiser le temps celui r el du tournage celui du film celui ressenti par le spectateur Le temps est pens par le d coupage et d termin par le montage Les plans s
28. vi tiques au temps du muet Poudovkine auteur de La technique du film en 1926 Il fait le point des recherches de ses compatriotes qui reprenant l h ritage de Griffith radicalis rent et adapt rent ces concepts leurs pr occupations Poudovkine place quelques principes de base sur le montage tel qu il fut pratiqu par les cin astes russes au temps du muet fragmentation de la sc ne libert des angles et des distances cr ation d un espace et d une temporalit du film prise en main du spectateur Le texte fut traduit en anglais et gagna sa post rit aupr s des r alisateurs anglo saxons Des recherches qui contribu rent fa onner les grands principes du d coupage et du montage classique IL Moyen d expression ou instrument narratif France 1918 1928 1 Gance et la musique des images Le premier en France avoir tirer parti des le ons de Griffith fut Abel Gance Il d couvre Naissance d une nation lors d un voyage Londres en 1915 le film tait interdit en France La dixi me symphonie qui sort en 1918 quelques jours apr s l armistice marque une rupture Sombre drame bourgeois avec un d coupage subtil Le film joue sur une large gamme de plans Le montage subtil rompt avec la morne criture des films fran ais Cependant comme chez Griffith l emprise du tableau marque son film de fa on r manente et laisse m me des marques dans ses uvres sonores Si le cin aste use all gre
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