Pensez-vous que « c`est l`illusion et non le savoir qui rend heureux
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1. la vertu souverain bien but de la vie La vertu est le seul bien gt Le seul bien est ce qui est en accord avec la Raison Le seul mal est ce qui est en d saccord avec la nature avec la raison autrement dit le seul mal est le vice La vertu n admet ni le plus ni le moins La cons quence est qu entre la vertu et son contraire le vice il n y a ni interm diaire ni degr s On est vertueux enti rement ou pas du tout gt Les choses indiff rentes Entre le bien et le mal il existe un immense domaine constitu de choses qu on peut appeler moyennes m dia ou indiff rentes Les choses indiff rentes sont les choses qui ne touchent pas l unique n cessit ie la vertu et qui ne sont proprement ni des biens ni des maux par exemple la vie la sant la beaut la force la richesse la r putation la noblesse ainsi que leurs contraires Parmi ces choses indiff rentes il y a des choses pr f rer et des choses rejeter Mais les raisons que nous avons de pr f rer ou de rejeter sont des raisons de convenance ou d utilit gt Un exemple particuli rement suggestif est celui du suicide La vie est une chose indiff rente Nous devons l accepter telle qu elle nous est donn e brillante ou modeste longue ou br ve Le sage ne se soucie pas de la dur e de sa vie Mais sans h siter il mettra fin ses jours s il vient constater que les inconv nients l emportent sur les av2. soif avec de l eau Il est sage de les satisfaire V Les besoins naturels mais non n cessaires aliments savoureux d sir sexuel Il est sage de les restreindre Le sage peut se le permettre quelquefois Y Les besoins ni naturels ni n cessaires comme le luxe les richesses la gloire qu il faut proscrire absolument gt Le bonheur est un bien tre permanent Pour y acc der il faut avoir une juste connaissance de soi C est sur cette connaissance que se fonde pour Epicure la qu te du plaisir lequel est le seul moyen d atteindre le bonheur gt Qu est ce qui rend l homme malheureux Ses exc s son ambition son go t d mesur pour l argent la possession ou le luxe L homme qui manque de sagesse ne cesse de convoiter des choses qui ne lui sont pas n cessaires Il cr e donc artificiellement des besoins et d sirs qu il a de plus en plus de mal satisfaire Voil la cause fondamentale de son malheur La limite de la grandeur des plaisirs est la suppression de tout l ment de douleur Epicure ibidem Le sage picurien gt Pour Epicure le bonheur est dans l art des jouissances mais avec cette hi rarchie des besoins et des plaisirs qui en fait donc tout le contraire de la morale grossi re que la tradition a trop volontiers retenue Qui dit picurien aujourd hui dit collectionneur de plaisirs Nous sommes loin de l picurisme originel La doctrine a subi Rome les plus graves d formati
3. Le ponheuf Quelques probl matiques Pensez vous que c est l illusion et non le savoir qui rend heureux Y a t il un devoir d tre heureux Le bonheur est il la fin de toute action humaine Y a t il des tyrans heureux Pour tre heureux il faut penser au bonheur d un autre Bachelard Comment faire pour tre heureux Toute philosophie d bute en cette demande d finir Phomme pour d terminer ce qu il peut et doit donc vouloir La question devient alors morale il faut choisir en l homme ce qui est le meilleur Car le bonheur aura pour condition un accord minimal avec soi m me La philosophie appellera cela le Bien Il n est pas certain que je trouve le bonheur et m me le trouverai je il n est pas certain non plus que je sache le reconna tre Le bonheur est il quelque chose de pensable de simplement saisissable I La recherche du bonheur Il est d usage d appeler h donisme plaisir toute doctrine morale qui donne le plaisir pour fin de l activit humaine Il existe plusieurs formes d h donisme A Le sensualisme gt C est le plaisir personnel et actuel qui est la fin de notre activit Le pr sent seul est certain Il faut prendre tout plaisir qui se pr sente jouir de l instant qui passe et que le temps abolit aussit t et cela sans r flexion sans calcul sans pr vision quelles que soient les cons quences du plaisir pr sent car l avenir ne nou
4. antages souffrances trop p nibles maladies incurables etc gt Le suicide de Caton d Utique moyen sto cisme 95 46 av J C figure en bonne place au hit parade du sto cisme fervent r publicain adversaire de C sar Caton se donna la mort par l p e pour ne pas survivre la r publique et pour ne pas devoir supporter la cl mence de C sar La vertu doit tre recherch e pour elle m me Marc Aur le la fin du Livre IX des Pens es prend partie celui qui ayant agi suivant sa nature ie ayant fait le bien ayant pratiqu la vertu se plaint de n tre pas r compens Ne suffit 1l pas lui dit il d avoir fait le bien La vertu est elle m me sa propre r compense La vertu d pend de nous gt Une seule chose t appartient dit Epict te dans ses Entretiens et t appartient absolument l usage de tes repr sentations Ta libert est enti re tes pens es sont enti rement en ton pouvoir Le premier usage faire de nos id es de nos repr sentations est de distinguer avec soin les choses qui d pendent de nous et celles qui ne d pendent pas de nous Les choses qui d pendent de nous sont par nature libres sans emp chement sans entraves celles qui n en d pendent pas inconsistantes serviles incapables d tre emp ch es trang res Epict te Manuel gt Seules notre raison et notre volont d pendent de nous La raison m indique que l ordre du monde d pend
5. as renoncer aux plaisirs terrestres mais ne pas en d pendre Non pas m priser les biens mat riels mais les consid rer pour ce qu ils sont de simples moyens d am liorer notre condition physique Enfin ne pas oublier que la destination de l homme n est pas de produire toujours plus afin de consommer toujours plus mais de penser cr er go ter aux joies du corps tout autant qu aux joies de l esprit V Le bonheur d autrui A Aimer c est faire le bonheur d autrui gt L homme est un tre social dont le bonheur d pend autant de lui m me que des autres il semble que chacun puisse en effet par un sentiment ou une connaissance de l autre contribuer son bien tre Le v ritable amour de l autre tel que le d finit Hegel consiste savoir discerner ce qui dans un homme est le mal ce qui est le bien appropri ce mal ce en quoi consiste en g n ral sa prosp rit gt La connaissance de l autre donn e par ce rapport privil gi qu est l amour nous permet de savoir en quoi consiste son bonheur nous pouvons alors tenter de le lui apporter dans la mesure de nos possibilit s L amour se propose d loigner le mal d un homme et de lui apporter le bien B Le bonheur commun est le but de la soci t gt Pour Platon le philosophe est le seul savoir ce qu est le bien d apr s lequel il faut vivre pour atteindre le bonheur Il doit donc tre le seul gouvernant ce qui lui permet d instituer en
6. d une Providence M me si je n en saisis pas le sens la maladie la souffrance l injustice font partie de ses desseins Je dois accepter avec indiff rence ces maux gt C est ainsi que le sage m me dans la servitude est libre car il n y a de v ritable servitude que dans la soumission aux passions En d sirant ce qui ne d pend pas de moi je fais mon malheur Ainsi l homme qui veut le pouvoir d sire quelque chose qui ne d pend pas de lui En effet c est toujours autrui qui me conf re un certain pouvoir gt La passion cet tat d me dans lequel nous nous asservissons ce qui ne d pend pas de nous est le pire des maux Aristote conseillait de mod rer l lan de nos passions Epict te beaucoup plus radical dit qu il faut les extirper En effet les passions troublent le jugement de ma raison emportent ma volont Je perds d s lors toute libert et deviens leur esclave c est la pire des servitudes puisqu elle vient de moi m me La vertu est la vraie sagesse gt Pour les sto ciens la vraie sagesse consiste accepter l in vitable ne pas d sirer les choses qui ne d pendent pas de nous et par cons quent n en pleurer leur perte et d autre part t cher d acqu rir celles qui d pendent de nous gt L id al sto cien est l ataraxie ie la s r nit l absence de trouble li e une physique et une logique qui nous montrent comment les choses les tres et les v nemen
7. d y acc der totalement La civilisation dans laquelle nous vivons nous impose des r gles r gissant notre rapport autrui Nos pulsions tant en contradiction avec ces r gles nous sommes contraints de les refouler et elles demeurent inassouvies Autrui appara t alors comme la cause de cette frustration pourtant n cessaire la vie en soci t D Le respect du bonheur d autrui gt La vie en soci t suppose que nous renoncions la satisfaction de nos instincts Par cet acte de la raison nous contribuons d j rendre possible le bonheur d autrui puisque nous renon ons un plaisir qui ne respecterait pas le droit d autrui acc der au bonheur x gt Mais notre contribution ce bonheur reste toujours limit e car nous ne savons pas ce qu est le bonheur d autrui Si on ne voulait qu tre heureux cela serait bient t fait Mais on veut tre plus heureux que les autres et cela est presque toujours difficile parce que nous croyons les autres plus heureux qu ils ne sont Montesquieu gt Reste savoir si le bonheur est un bien rechercher pour lui m me ou s il n est pas plut t le r sultat des efforts consentis par l homme pour acqu rir des biens tels que la libert la justice ou la v rit Si tu veux comprendre le mot bonheur il faut l entendre comme r compense et non comme but Saint Exup ry
8. de transformer le monde de soumettre la nature C est ainsi que l esprit en se confrontant la r sistance que lui oppose le r el s l ve Cette l vation est la condition m me du bonheur En effet il n y a aucun bonheur possible dans la soumission aux n cessit s naturelles La construction de la cit gt De m me on ne peut pas rester tranger la Cit Comme le dit Aristote tout Etat est une soci t qui se fonde sur l espoir d un bien Les hommes sont responsables de la soci t dans laquelle ils vivent Leur bonheur d pend du bonheur collectif L int r t pour la vie politique les conduit renverser les tyrans am liorer les lois et les gouvernements t cher de vivre mieux Une fois les besoins vitaux satisfaits le bonheur profond d pend pour la plupart des hommes de deux choses de leur travail et de leurs relations avec les autres Bertrand Russell Le Monde qui pourrait tre Une discipline difficile gt Ainsi la philosophie d Epict te on l a remarqu poursuit une asc se difficile qui finalement aboutit une sorte d apathie une compl te indiff rence l gard du sort des hommes et de la soci t Nietzsche dira m me qu il s agit d une fransfiguration morale de l esclavage En effet suivre Epict te je dois tout accepter l humiliation l injustice la violence d s lors que je me sais int rieurement libre puisque je me suis affranchi de mes passions et qu
9. e C est un moyen dont la nature se sert pour nous aider r aliser le bien Mais nous ne devons pas rechercher le plaisir comme une fin gt Un minimum de r flexion et d exp rience suffit pour nous apprendre que la recherche du plaisir sans choix entra ne s rement et rapidement la douleur De plus la recherche du plaisir pour lui m me est immorale Libre chacun de partir en qu te de son propre plaisir m me si les moyens qu il emploie sont parfaitement immoraux et nuisent autrui gt Toute recherche de plaisir pour lui m me se solde par une d sertion devant la vie affaiblissement de la volont refus du don de soi du sacrifice du d vouement pour une satisfaction go ste gt On ne peut concevoir que la vertu disparaisse devant le plaisir car alors tout serait mais aussi et surtout autoris y compris les actes les plus r pr hensibles Les d formations de la morale picurienne et le sens actuel du mot picurien peuvent tre consid r es comme les punitions historiques d une erreur de principe Le plaisir n est pas une valeur morale Nous refusons de faire du plaisir une fin l objectif premier capable de soutenir et de grandir notre vie La vertu conduit au bonheur gt S il ne faut pas nier l existence du corps il ne faut pas non plus oublier les aspirations de l me Le bonheur n est pas concevable sans la connaissance du bien et la pratique de la vertu Ainsi Cic ron proche en cela d A
10. e j ai la certitude de ne vouloir que ce qui d pend de moi gt Cela dit un autre aspect de l enseignement d Epict te demeure Sans tre indiff rent au monde on peut appliquer avec profit son conseil selon lequel il ne faut pas tre affect par ce qui ne d pend pas de nous Cesser de pester contre le mauvais temps qu il fait contre un feu qui passe au rouge au moment o j arrive ce n est peut tre pas acc der au bonheur mais c est viter bien des d sagr ments B La morale kantienne Kant analyse la conscience morale dans Les Fondements de la m taphysique des m urs e L id e de bonne volont ie d intention bonne Pour la conscience un acte n est bon que s il a t accompli avec l intention ferme de faire le bien quels que soient les r sultats pratiques e L id e de devoir L intention ou la volont n est bonne que si on agit par devoir et pas seulement conform ment au devoir En effet il est possible d tre honn te par int r t ou par sentiment l acte est alors conforme au devoir il n est cependant pas accompli par devoir Le devoir est un imp ratif cat gorique un imp ratif entendre comme un commandement sans condition sans autre but que lui m me e L id e de r gle universelle on reconna t qu on agit par devoir quand on peut souhaiter que l humanit enti re suive la m me r gle ou comme dit Kant la m me maxime e L id e de la personne
11. e s oppose vivement un sophiste nomm Callicl s en affirmant qu il vaut mieux subir l injustice que de la commettre C est donc r solument le sacrifice de son bonheur personnel que r clame Socrate au nom de la justice l essentiel tant de maintenir notre me dans la meilleure disposition gt Si l homme sait renoncer au bonheur pour des valeurs qu il consid re sup rieures il serait n anmoins injuste et incompr hensible que la moralit soit compl tement s par e du bonheur Dans la Critique de la raison pratique Kant nous l avons vu pose comme postulat la morale l existence de Dieu l immortalit de l me et la libert Ainsi pourra se r aliser le Souverain Bien c est dire la r conciliation entre le bonheur et la vertu au del de la vie terrestre C Le choix de l asc tisme gt L asc tisme propose de renoncer aux plaisirs terrestres Mais en ce cas ne vaut il pas mieux opter pour une solution plus radicale le suicide D un autre c t celui qui est la proie de ses propres d sirs est vou supporter de terribles souffrances Renoncer ses d sirs c est en effet ne plus tre le jouet de l ambition de la jalousie de la convoitise Ces passions loin de servir ont t la cause de mille drames d incessants conflits opposant les hommes et les conduisant s entre tuer gt Entre ces deux extr mes il existe un juste quilibre que l on pourrait qualifier d asc tisme mod r Non p
12. et fuient la douleur gt C est galement le sens du carpe diem cueille le jour d Horace et du culte gidien de l instant Ne distingue pas Dieu du bonheur et place tout ton bonheur dans l instant Aimer sans s inqui ter si c est le bien ou le mal Alors cessant d appeler tentations mes d sirs cessant d y r sister je m efjor ai au contraire de les suivre Gide Nourritures terrestres C Morale picurienne Le plaisir est la fin de l activit humaine gt Pour savoir dit Epicure 341 270 vers quelle fin nous devons tendre il suffit d examiner quelle fin nous poursuivons Or l exp rience nous montre que nous tendons spontan ment vers le plaisir Donc le plaisir est la finalit de l activit humaine Le bien c est le plaisir le mal c est la douleur gt Les morales du renoncement sont fond es sur la crainte de Dieu et de la mort Epicure rejette ces morales rigoristes qui cultivent le malheur et pour lesquelles les hommes doivent renoncer au plaisir Une telle attitude fond e sur la superstition nous maintient dans l ignorance et la crainte et nous emp che de vivre heureux gt Nous n avons pas d me immortelle mais seulement un corps qui se d compose en atomes lors de la mort Epicure est un atomiste Toute connaissance tout bien et tout mal manent de nos sensations Le sage ne craint pas la mort car celle ci tant la suppression de toute sensation ne saurait n
13. humaine fin en soi La seule fa on d agir qui puisse tre ainsi universellement souhaitable c est celle qui traite toujours la personne humaine non comme un moyen mais comme un fin e L id e d autonomie Celui qui agit est autonome ie la fois l gislateur et sujet l gislateur puisqu il comprend que sa r gle doit tre celle de tous les hommes et qu il la proclame universelle sujet puisqu il commence par ob ir lui m me cette r gle e L id e d un r gne des fins ie l id e d un tat id al de l humanit o chacun respecterait les autres et serait respect par eux ce qui cr erait une harmonie merveilleuse entre les hommes C Discussion La raison est n cessaire o Elle suppl e aux insuffisances de l activit Elle assure la vie constance et s curit Dans un mythe du Ph dre Platon parle du c ur cheval beau et g n reux que la raison le cocher doit conduire et diriger o Elle apporte la lumi re Il lui revient d tre le cocher lucide capable de conduire de diriger le char C est elle qui est capable de juger avec objectivit et impartialit de la valeur des sentiments et des conduites qu ils inspirent Mais la raison est insuffisante o Sans les bases affectives la raison serait impuissante Elle est une lumi re mais pour bien agir il ne suffit pas de bien juger et de bien raisonner Les sentiments et la volont sont n cessaires o Elle peut m
14. i choisit D s qu il est question de morale il n est gu re concevable d chapper la raison O Ils peuvent arr ter l homme dans une satisfaction b ate de lui m me Ainsi une sensibilit g n reuse est une condition de la vie morale mais elle ne peut suffire La raison joue un r le absolument n cessaire dans toute vie morale II Les morales traditionnelles A La morale sto cienne amp Le sto cisme est une morale de la vertu gt La physique est le point de d part non seulement de la logique mais aussi de la morale Comme l ont r p t bien souvent les sto ciens ces trois parties sont ins parables Elles sont unies par le lien d une m me Raison d un m me logos La m me raison qui gouverne le monde physique et qui assure la coh rence de nos pens es logique doit aussi r gler nos actions morale La morale est l tude des r gles de la conduite humaine gt La formule qui ouvre la voie de la morale tout en gardant la liaison avec la logique et la physique c est la formule c l bre de Cl anthe vivre conform ment la nature Vivre moralement signifie vivre conform ment la raison universelle ou logos divin qui est l me du monde l intelligence qui ordonne organise et gouverne le monde et dont notre raison personnelle n est qu une tincelle une participation C est dans cette conformit la raison la morale sto cienne est une morale rationnelle que r side
15. loi sa connaissance du bien Il d termine en quoi consiste le bien de ses concitoyens dont le bonheur sera assur par leur soumission la loi gt Il peut sembler que les int r ts de chacun sont inconciliables avec ceux d autrui Rousseau a r solu cette apparente contradiction en montrant que si l opposition des int r ts particuliers a rendu n cessaire l tablissement des soci t s c est l accord de ces int r ts qui l a rendu possible Chacun contribue dans sa soci t au bonheur de tous en renon ant en partie ses propres int r ts pour les concilier au bien tre g n ral C Le bonheur est cependant diff rent pour chacun gt Il ne suffit pas que je sois heureux il faut encore que je sois capable d en avoir conscience et je ne peux pas me mettre la place de l autre pour savoir s il est heureux On peut contribuer ce qu autrui atteigne cette satisfaction Mais la prise de conscience du bonheur ne d pend que de lui gt Pour Kant la connaissance du bonheur repose sur des donn es de l exp rience tout jugement de chacun sur ce sujet d pend de son opinion Chacun d termine sa propre conception du bonheur d apr s ses exp riences et ses aspirations Il appara t alors impossible de contribuer au bonheur d autrui car nous ne savons pas quelles sont ces exp riences et ces aspirations gt En d finissant le bonheur comme l assouvissement des pulsions Freud montre qu il est impossible
16. me tre un dissolvant Bergson a beaucoup insist sur son action d primante De fait il y a un type de r flexion qui paralyse l action le sujet ne cesse d examiner le pour et le contre il a le sens critique tr s d velopp son attention est sensible toutes les difficult s celles ci ainsi analys es apparaissent redoutables alors que dans l action elles seraient bien r duites Sans doute aux divers ges de la vie le sentiment ou la raison pourront l emporter tour tour et selon les divers caract res l un ou l autre sera privil gi Cependant dans une vie morale qui se veut g n reuse et quilibr e les deux conditions parviendront s harmoniser la volont y sera clair e par la raison et forte de l ardeur des sentiments IV Un mode d emploi du bonheur A Tous les hommes aspirent au bonheur gt C est une vidence les hommes veulent tre heureux et le rester Pour atteindre ce but comme le montre Freud dans Malaise dans la civilisation ils cherchent essentiellement viter la souffrance et se procurer du plaisir Les moyens pour y parvenir sont nombreux et les actions humaines expriment bien en d finitive que la v ritable finalit de la vie est le bonheur gt Le bonheur explique toutes nos conduites Cependant nous le laissons souvent chapper trop pr occup s par les exigences de la vie quotidienne Il faut donc s interroger sur la voie suivre pour trouve
17. mentaires sera m me de promettre pourvu que leurs exigences s inscrivent dans le cadre de la plus grande sobri t gt Ce ne sont pas en cons quence les d sirs les passions qui sont en eux m mes nuisibles mais leur exag ration S il est bon de manger et de boire il n est pas bon de se laisser aller aux exc s de table et de boisson Parvenir au bonheur c est savoir profiter d une fa on pleine et mesur e de tout ce qui est bon pour le corps comme pour l esprit dans l existence de l homme Ce savoir est une sagesse en m me temps qu un art de vivre gt C est au fond un id al de calme obtenu par la suppression des d sirs quelque chose qui n est pas tr s loin du bouddhisme oriental Dans notre soci t go ste et mat rialiste on se d clare un peu trop facilement disciple d Epicure On oublie que pour ce dernier le plaisir tait l aboutissement d une qu te philosophique et exigeait que l on cultive certaines valeurs Critique de l h donisme Le plaisir accompagne et stimule notre activit gt Nos tendances fonci res cr ent en nous des besoins qu il faut satisfaire sous peine de dispara tre boire manger dormir se reproduire etc Or la satisfaction des tendances alimentaires et sexuelles qui assurent la conservation de l individu et de l esp ce procure du plaisir acte fait avec plaisir Le plaisir s inscrit dans nos tendances dans notre me Nous ne condamnons pas le plaisir lui m m
18. mme n est pas une vue de l intelligence mais une affaire d intuition mode de connaissance sup rieur l intelligence Cette intuition a pour base les motions Discussion Les sentiments sont n cessaires o Ils sont des dynamismes des ressorts puissants qui poussent bien agir la joie de la bonne action le malaise et la souffrance du remords et du repentir l admiration devant l h ro sme et la saintet la r pulsion pour les l chet s et les crimes la piti la sympathie constituent des stimulants pour une belle vie morale Il s agit bien pour la volont de s en faire des alli s O Ils sont la base de tous les sursauts les grands progr s de l humanit se sont produits sous la pouss e des sentiments A la base de tous les sursauts de tous les progr s de la vie morale personnelle ou collective l on trouve ce choc de l affectivit Le contact avec la mis re suscite la piti qui provoque le d vouement au malheureux L insuffisance affective les troubles de l affectivit constituent des handicaps pour la vie morale v Mais les sentiments sont insuffisants O Ils sont fugitifs ils s puisent vite O Ils peuvent entra ner des exc s des actions peu r fl chies et mal organis es Ils peuvent pousser commettre des actes contraires aux exigences de la morale et risquent toujours de verser dans la partialit et l injustice Or c est la raison qui contr le et qu
19. ons gt Le sage picurien vit frugalement Epicure a laiss le souvenir d un v ritable asc te d un homme qui v cut simplement sans ambition qui mourut avec s r nit apr s avoir support patiemment les souffrances d une cruelle maladie gt Pour Epicure donc la plupart de nos d sirs sont g n rateurs de troubles parce qu ils soumettent l individu au vertige du changement l instabilit du devenir des fuites incessantes dans le renouvellement de leurs objets Epicure conf re l imagination un r le extr me c est elle qui mal gouvern e fait la malheur des hommes Bien conduite elle peut faire leur bonheur Il s agit par un empire sur soi de chasser toutes les images ind sirables et de s enfermer dans les images et souvenirs heureux gt La science ie la physique atomiste s av re tre cet effet un auxiliaire indispensable c est elle qui d livre des maux imaginaires qui empoisonnent la vie de la plupart des hommes elle lib re de la crainte des dieux de la crainte de la mort et de la crainte de la fatalit Une qu te philosophique gt La philosophie d Epicure est donc une qu te du plaisir lequel favorise et amplifie le bien tre Mais il ne s agit pas d un plaisir d brid qui contient en lui m me son contraire la souffrance et le malheur S il y a plaisir il consistera dans l absence de douleur que seule la satisfaction de nos besoins les plus l
20. ous toucher Habitue toi penser que la mort n est rien par rapport nous Epicure Doctrines et maximes L ataraxie Le plus haut degr de plaisir sera l absence de trouble la tranquillit la s r nit absolue l ataraxie le corps tant sans souffrance aponie et l me sans trouble L id al du sage est d atteindre cette paix de l me qui est le bonheur Pas n importe quel bonheur gt Est ce dire que nous devons c der inconsid r ment tout plaisir qui se pr sente En aucune fa on Il faut se d tourner des faux plaisirs Il n est pas vrai que l picurisme conduit la d bauche Pour Epicure le plaisir doit tre temp r Il consiste mener une vie quilibr e loin des faux plaisirs que sont les honneurs la richesse le pouvoir les passions L picurien cherche atteindre cette paix de l me le d tachement la connaissance de cet essentiel qui seul est n cessaire au bonheur Le vrai sage se contente donc de peu gt Il existe deux sortes de plaisirs les uns toujours accompagn s de tristesse et de mal les autres stables sans m lange de douleur Epicure pratique d j ce que Bentham appellera plus tard l arithm tique des plaisirs La prudence le calcul sont indispensables pour acqu rir la paix du c ur la s r nit but supr me du sage Division des d sirs V Les besoins naturels et n cessaires comme la satisfaction de sa faim avec du pain et de sa
21. qui ne d pende que de nous qui soit ind pendant des circonstances mat rielles ou politiques La sagesse ie la vie selon la nature ou la raison ne fait qu un avec la vie heureuse Ne demande pas que les choses arrivent comme tu le d sires mais d sire que les choses arrivent comme elles arrivent et tu couleras des jours heureux Epict te Monde je ne veux que ce que tu veux disait Marc Aur le Le sage est heureux m me quand il assiste la ruine de sa patrie la mort de ses fils et au d shonneur de ses filles Critique de la morale sto cienne Le n cessaire progr s gt Certes la condition de l homme est mis rable et fragile Mais parce qu il a une conscience l homme n a pas accepter l ordre des choses Son destin est au contraire de transformer le monde pour am liorer son sort non de se r signer au malheur gt Le travail est aussi une mani re de refuser sa condition En travaillant l homme agit sur le monde et cherche am liorer son sort Le progr s montre que les hommes ne sont pas indiff rents aux maux qui les touchent et qu ils refusent de les accepter Le bonheur est l tat dans le monde d un tre raisonnable qui dans tout le cours de son existence tout arrive selon son souhait et sa volont Kant Critique de la raison pratique gt Pour la philosophie classique et moderne celle de Descartes mais aussi celle de Hegel et de Marx le destin de l homme est
22. r le bonheur Voil ce que veut nous enseigner Epicure dans la Lettre M n c e C est la philosophie qui peut nous procurer une vie heureuse Il y a donc urgence philosopher Il faut donc m diter sur ce qui procure le bonheur puisque lui pr sent nous avons tout et lui absent nous faisons tout pour l avoir Epicure gt Pour tre heureux nous rappelle Epicure il faut devenir son propre m decin Appliquer des principes qui nous permettent de ne plus craindre les dieux de ne plus avoir peur de la mort de savoir g rer ses d sirs en distinguant les n cessaires des superflus et de savoir endurer la douleur gt Ainsi le plaisir devient la finalit de la vie Un plaisir bien compris non pas la d bauche mais un plaisir mod r par la prudence et la r flexion Dimension fondamentale de la vie humaine le bonheur semble accessible condition d appliquer quelques r gles simples de vie B Le bonheur est malheureusement trop capricieux gt S il est vrai que nous aspirons tous au bonheur il faut reconna tre galement son caract re tr s al atoire Malgr les conseils d Epicure nous n avons jamais aucune garantie d tre heureux Le bonheur se r v le hasardeux et m me parfois injuste Comment d s lors pourrait il tre la finalit de la vie gt La finalit de la vie c est parfois sacrifier notre bonheur imm diat pour quelque chose de plus lev Dans le Gorgias de Platon Socrat
23. ristote ne nie pas la mani re des sto ciens les biens corporels les passions et les d sirs Mais il pense qu c t de ces biens on ne doit pas ignorer ceux de l me gt Le plus grand bonheur r side dans le bien tre de l me lequel contrairement au bien tre mat riel est pleinement satisfaisant Ainsi le bonheur passe galement par la connaissance Celui qui acc de au savoir vrai prouve un plaisir immense Ce savoir est intellectuel moral Il n est point de bonheur sans vertu I Les morales du sentiment La morale de la sympathie C est la doctrine d apr s laquelle un acte est bon non plus s il a des cons quences heureuses mais s il est dict par un sentiment g n reux bienveillance sympathie amour de l humanit piti Pour Smith 1723 1790 la valeur morale d un acte se mesure la sympathie que cet acte soul ve chez autrui La morale de la piti Pour Schopenhauer 1788 1860 c est la piti qui fait la valeur morale de nos actes La piti c est le fait de ressentir la douleur d autrui comme tant la mienne En dehors de la piti il n y a qu go sme et m chancet De la piti d coulent la justice la charit et m me la saintet car un certain degr d intensit la piti nous fait oublier notre propre int r t nous conduit au d tachement et au sacrifice absolus La morale ouverte L id al que la morale bergsonienne propose l ho
24. s appartient pas Aristippe de Cyr ne gt Cette morale se relie une psychologie sensualiste La sensation seule est r elle et seule la sensation pr sente Par suite le seul bien est la sensation ie le plaisir pr sent La douleur pr sente est le seul mal gt Le plaisir des sens est le bien supr me La jouissance du corps est une sorte d absolu qui se suffit lui m me Quand je mange un plat d licieux quand je bois une Kro bien fra che je ne d sire rien d autre Certes il existe aussi des plaisirs intellectuels tels que lire un bon livre discuter avec un interlocuteur intelligent d couvrir une v rit participer un cours de philo Mais les plaisirs du corps sont incomparablement sup rieurs ceux de l esprit B Le carpe diem gt Aux XVII et XVIII si cles les libertins rejettent les interdits et la culpabilit que la religion fait peser sur les plaisirs du corps Pour eux la volupt est la seule fin digne d tre recherch e gt Contre la philosophie raisonneuse et la religion rigoriste Nietzsche affirme la sup riorit du corps et du plaisir sensuel Pas de vie sans plaisir la lutte pour le plaisir est la lutte pour la vie Nietzsche Humain trop humain Dans sa lign e Freud dit que les hommes sont gouvern s par le principe de plaisir Ils n ob issent pas des motivations sup rieures aux pr ceptes de la morale ou de la religion Ils recherchent simplement la jouissance
25. ts sont li s entre eux par un n ud de causes qui d pend de Dieu Le sage est libre car il sait avec Epict te que chaque chose a deux anses l une par o on peut la porter l autre par o on ne le peut pas et nombreuses sont les anecdotes nous pr sentant des sages morts en martyrs mais en hommes libres gt Cette sagesse sto cienne est r sum e dans la devise sustine et abstine supporte ce qui ne d pend pas de toi et abstiens toi de toute passion La sagesse sto cienne est la pratique de la r signation qui l ve le sage l impassibilit Conduit par la raison acquies ant aux v nements de lunivers vivant en harmonie avec la nature le sage sto cien est celui qui fait sienne la devise nihil ninari ne s tonner de rien Jean Brun Le Sto cisme gt Le sage n est jamais surpris par ce qui arrive m me par la mort Ce qui trouble les hommes ce ne sont pas les choses mais les opinions qu ils en ont Par exemple la mort n est point un mal si elle en tait un elle aurait paru telle Socrate mais l opinion qu on a que la mort est un mal voil un mal Lors donc que nous sommes contrari s troubl s ou tristes n en accusons point d autres que nous m mes ie nos opinions Epict te La vertu ne fait qu un avec le bonheur gt Le sage ie l homme qui accepte int rieurement le destin le logos est heureux Ainsi les sto ciens veulent trouver un bonheur
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