Annexe 2
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1. a leur prend ou reprend sans tre pour autant stigmatis s ou ramen s l ordre par un Sois raisonnable qui enferme chacun dans sa solitude Pour aller dans ce sens peut tre serait il favorable que leur formation pr pare les enseignants ne pas s identifier totalement aux activit s qu ils proposent Ne pas aimer les math matiques conduit ne pas aimer le professeur de math matique que si ce dernier ne laisse aucune alternative et se trouve bless par la moindre mise en doute de l int r t et de l importance d une discipline ou de la fa on dont il la pr sente Il est lib rateur de cesser de superposer les personnes les activit s et les savoirs et de donner le droit de ne pas tout aimer ou rejeter en bloc Les professeurs n aiment pas galement tous les chapitres du programme ou tous les types d activit les l ves le devinent d ailleurs Pourquoi ne pas le reconna tre craindre que cela affaiblisse le rapport p dagogique alors que cela ne peut que l humaniser laisser un espace o s expriment les diff rences Discuter souvent librement des go ts et des d go ts par exemple en conseil de classe c est autoriser prendre et laisser sans entrer dans le jeu syst matique de la contestation ou de la d viance 8 Le droit de choisir avec qui l on veut travailler Quand un l ve veut changer de ma tre parce qu il ne l aime pas il est tr s rare que l cole entre en mati2. la machine sous le regard de quelqu un Pourquoi serait il plus commode d apprendre conjuguer chanter ou tracer des angles droits en s exposant au regard des camarades et de l enseignant cette absence d intimit s ajoute le pouvoir inquisitorial du professeur qui a non seulement le droit de s approcher de regarder par dessus l paule de feuilleter les cahiers voire d ouvrir les pupitres et d en inventorier le contenu mais qui peut encore interroger traquer les doutes et les erreurs faire expliciter les d marches voire s il soup onne une tricherie un manque de travail ou de rigueur reconstituer le d lit la mani re d un juge d instruction en accumulant les indices et les contre interrogatoires La diff renciation de l enseignement et l valuation formative peuvent accro tre cette glasnost p dagogique parce qu elles poussent saisir les processus de pens e les plus intimes les attitudes les motivations les rapports au savoir 2 et aux personnes qui conditionnent les apprentissages La vogue de la m tacognition peut faire tourner l explicitation au rituel aussi d nu de sens que les exercices traditionnels Bien entendu un enseignant a besoin de savoir un certain nombre de choses sur les apprenants pour faire son travail et les aider faire le leur C est vrai aussi dans un rapport th rapeutique Mais au contraire d un rapport th rapeutique un rapport p dagogique ou didac
3. et al 1992 Le projet personnel de l l ve Paris Hachette Filloux J 1974 Du contrat p dagogique Paris Dunod Gentzbittel M 1991 La cause des l ves Paris Le Seuil Meirieu Ph 1990 L cole mode d emploi Des m thodes actives la p dagogie diff renci e Se d Paris ESF Mollo S 1975 Les muets parlent aux sourds Les discours de l enfant sur l cole Paris Casterman Oury F et Pain J 1972 Chronique de l cole caserne Paris Masp ro Pennac D 1991 Comme un roman Paris Gallimard Perrenoud Ph 1995 a La fabrication de l excellence scolaire du curriculum aux pratiques d valuation Gen ve Droz 2 d augment e Perrenoud Ph 1995 b M tier d l ve et sens du travail scolaire Paris ESF 2e dition Perrenoud Ph 1995 c La p dagogie l cole des diff rences Paris ESF Rochex J Y 1995 Le sens de l exp rience scolaire Paris PUF
4. re Elle traite ce d sir comme un caprice parce qu y c der ouvrirait la porte tous les abus et confirmerait l enfant dans l illusion de sa toute puissance Entre ce refus cat gorique et le libre choix des enseignants par les l ves peut tre y a t il une voie m diane Il est vrai que la socialisation consiste aussi apprendre communiquer et coop rer avec des gens qu on n a pas choisis Pourquoi ne pas admettre que parfois l antipathie qu elle soit sens unique ou mutuelle est trop forte pour permettre un v ritable travail commun Sans doute certains parents sont ils des consommateurs d cole inconstants et abusifs pr ts changer leur enfant de classe la moindre d convenue voire contre son gr Mais il y a aussi des situations o la relation est r ellement probl matique Le probl me se pose galement entre l ves On sait que parfois il faut d faire des classes et les recomposer pour trouver une dynamique du groupe favorable aux apprentissages Pour en arriver l il faut vraiment que le climat soit tr s d t rior et emp che d enseigner On peut imaginer que beaucoup de situations sans tre aussi dramatiques ne sont pas confortables parce qu on fait coexister dans un groupe des enfants ou des adolescents qui ont du mal s accepter et se comprendre Certes c est l occasion r v e d apprendre la tol rance et le droit la diff rence Mieux vaudrait alors s
5. dans ses valuateurs si elle reconna t en m me temps ces derniers le droit de se servir de tout ce qu ils ont appris pour faire un bilan et d cider d une s lection Les enseignants sont souvent bless s parce que les l ves contestent leurs corrections ou mettent en doute l quit d un bar me ou le bien fond d une preuve Pourquoi en attendre une confiance aveugle alors que les professeurs savent la part d arbitraire et d erreur que contient m me l valuation la plus consciencieuse Ici encore le risque est de s identifier au syst me et de se sentir personnellement attaqu d s que l apprenant d fend ses droits avec une certaine vigueur 10 Le droit d exister comme personne Sans doute est ce sur ce point que l cole a le plus chang depuis cinquante ou cent ans Parce que le sentiment de l enfance s est renforc parce que le respect des personnes n est plus un luxe dans notre soci t mais une valeur fondamentale Il reste que traiter les individus comme des personnes autonomes diff renci es complexes fluctuantes sensibles ne facilite pas la gestion des populations et des organi sations Ignorer les diff rences et les tats d me traiter chacun comme un num ro n ayant qu remplir son r le telle est la cl de la gestion efficace de vastes populations partir du moment o le professeur se demande avec Filloux 1974 comment faire aimer les math matiques une jeu
6. gralement les droits de l apprenant sans compromettre sa mission Est ce bien s r Nul n apprend vraiment durablement sous la contrainte dans la peur ou le stress l ennui ou le non sens La v ritable difficult c est d aller seul contre courant On h rite alors d l ves que leur culture produit de leur exp rience scolaire rend incapables de revenir un rapport ludique et d tendu au savoir Le temps d une ann e scolaire est trop court pour d faire la passivit la r signation le cynisme ou les strat gies de fuite qu ont engendr s des ann es de scolarit D o l importance d aller vers les p dagogies actives et les didactiques nouvelles dans le cadre d une quipe et d un projet d tablissement avec une coh rence sur l ensemble du cursus et l accord de l institution Quelques ouvrages pour prolonger la r flexion Astolfi J P 1992 L cole pour apprendre Paris ESF Benavente A et al 1993 De l autre c t de l cole Berne Lang Berthelot J M 1983 Le pi ge scolaire Paris PUF Charlot B Bautier et Rochex J Y 1992 cole et savoir dans les banlieues et ailleurs Paris Armand Colin Collectif 1980 La t te pleine d l ves Exp riences d enseignants Lausanne Pierre Marcel Favre CRESAS 1987 On n apprend pas tout seul Interactions sociales et construction des connaissances Paris ESF Dubet F 1991 Les lyc ens Paris Le Seuil Etienne R
7. jour commencer expliquer n gocier donner un sens au contenu de mon enseignement et des t ches je n en finirais pas on perdrait du temps on ne ferait jamais le programme et les l ves en profiteraient pour abuser de la situation Dans la mesure o tout le monde adh re cette sorte de r alisme la plupart des l ves du monde se retrouvent tous les jours devant des t ches qui leur paraissent sans queue ni t te des explications et des exercices dont ils ne voient pas la raison d tre On s habitue tout m me au non sens Il n emp che donc pas les coles de fonctionner les l ves de faire leurs exercices et d couter les le ons En revanche il emp che d apprendre v ritablement On s tonne souvent du peu de transfert des connaissances scolaires des situations qui s cartent des situations d enseignement d exercice et d valua tion Pourquoi y aurait il transfert si les performances scolaires sont des concessions consenties au syst me didactique et aux attentes du ma tre des choses qu on fait pour s en d barrasser pour avoir la paix pour tre conforme sans plaisir et sans comprendre le sens de ce que l on fait Pour qu il y ait transfert il ne suffit pas de s approprier des savoirs ou des savoir faire il faut qu ils s int grent l identit de l apprenant et son syst me de ressources cognitives Apprendre durant des ann es des choses qui n ont
8. lorsque cet apprentissage est fait on aurait tort de croire que tenir en place ne co te plus aucune nergie Qu il suffise d observer le d ferlement des l ves au sortir de la classe au moment de la r cr ation ou la fin des cours on mesure alors l nergie contenue pendant des heures Il existe certes des enfants des adolescents ou des adultes capables de se concentrer sur une t che intellectuelle tr s longtemps en oubliant pratiquement qu ils ont un corps en n ayant envie ni de bouger ni de boire ni de s tirer ni de se balancer Pourquoi l cole n est elle faite que pour ce genre de personne Apprendre est une t che intellectuelle d abord mais pourquoi tant d indiff rence au corps de l l ve son confort son quilibre ses besoins physiologiques l mentaires Pense t on vraiment que quelques chiches r cr ations et deux ou trois p riodes d ducation physique par semaine peuvent quilibrer toutes ces heures d immobilit Sans bouleverser la grille horaire on pourrait simplement accepter que comme les adultes les enfants aient besoin pour se concentrer de jouer avec des objets lunettes stylo etc de griffonner de se balancer ou se s tirer Pourquoi faut il assimiler l attention l immobilit La circulation des nergies mentales et physiques est un syst me complexe auquel chacun est intuitivement sensible mais que les convenances sociales briment volont
9. pas beaucoup de sens simplement pour avoir la paix ou pour r ussir voil qui ne forge pas un rapport au savoir tr s constructif Les l ves l cole secondaire encore plus qu au primaire deviennent utilitaristes voire cyniques Certains n arrivent jamais m me lorsqu ils suivent par la suite une formation professionnelle pointue ou des tudes universitaires retrouver un rapport ludique cr atif et personnel au savoir Ils n en r vent m me plus finissant par int rioriser l esprit de s rieux l utilitarisme et l obsession de r ussir que les adultes mettent tant d acharnement leur inculquer 4 Le droit de ne pas ob ir six huit heures par jour Un tablissement scolaire doit faire coexister des centaines voire des milliers d l ves des dizaines voire des centaines d enseignants On comprend donc l insistance des gens d cole sur les horaires les espaces les circulations les r gles de conduite de tout genre On comprend aussi la division du travail le fractionnement des espaces et des temps de travail Sans dire que l cole est une caserne Oury amp Pain 1972 on peut dire qu elle en partage certains traits aujourd hui encore Certes les coles ont chang mais les casernes aussi On y respecte un peu mieux les droits des uns des autres on n gocie un peu plus souvent certaines d cisions l autorit met les formes on m nage des espaces de libert et de convivialit La p
10. In Educations n 1 d c 94 janv 95 pp 56 62 repris dans Les Sciences de l Education face aux interrogations du public Gen ve Cahiers de la Section des sciences de l ducation Num ro sp cial 1995 pp 123 135 Les droits imprescriptibles de l apprenant ou comment rendre le m tier d l ve plus vivable Philippe Perrenoud Facult de psychologie et des sciences de l ducation Universit de Gen ve 1995 Comme un roman de Daniel Pennac vous connaissez Si vous voulez comprendre pourquoi l cole a failli vous d go ter de la lecture jetez vous sur ce petit livre Pennac 1991 qui nonce les droits imprescriptibles du lecteur Les droits imprescriptibles du lecteur 1 Le droit de ne pas lire 2 Le droit de sauter des pages 3 Le droit de ne pas finir un livre 4 Le droit de relire 5 Le droit de lire n importe quoi 6 Le droit au bovarysme maladie textuellement transmissible 7 Le droit de lire n importe o 8 Le droit de grappiller 9 Le droit de lire haute voix 10 Le droit de nous taire Et si ces droits taient valables mutatis mutandis pour l ensemble des savoirs Pourquoi ne pas afficher dans chaque salle de classe les droits imprescriptibles de l apprenant Je ne parle pas ici des droits de l enfant ou de l adolescent par exemple le droit de ne pas subir de pressions morales ou de violences physiques Je parle des droits sp cifiques de l l ve qui s ajouten
11. e l gitime pas n cessairement la tricherie m me si on peut consid rer qu elle est souvent dans ses formes mineures une r ponse une mission impossible plut t qu une perversit morale Le droit de ne pas coop rer sa propre valuation c est au moins le droit de ne pas tendre les verges pour se faire battre le droit de faire tout son possible pour para tre son avantage masquer ses lacunes mettre en vidence ses points forts et n gocier habilement tout ce qui peut faire gagner quelques points ou quelque cr dit aux yeux du ma tre Un juge d instruction sait qu il travaille contre les int r ts du pr venu et ne s tonne pas lorsque ce dernier et son avocat se d fendent par tous les moyens l gaux disponibles Un enseignant est en g n ral beaucoup plus na f il n a pas conscience de faire en partie le m me travail qu un juge d instruction autrement dit d utiliser diff rents moyens d investigation pour arriver la v rit des comp tences scolaires d un l ve Dans les proc s en ignorance il n y a pas d avocat et les droits de la d fense sont r duits la portion congrue Bien s r on pourrait souhaiter dans l esprit d une observation formative que l l ve contribue son propre apprentissage en explicitant volontiers ses doutes et ses erreurs pour pouvoir y travailler Dans ce cas que l cole soit cons quente et qu elle ne demande pas l l ve une confiance totale
12. en donner r ellement les moyens quelques bonnes paroles humanistes ne suffisent pas combler des distances culturelles et personnelles consid rables Peut tre pourrait on aussi l int rieur de la classe donner davantage de libert aux l ves Dans certaines classes on choisit librement ceux aux c t s desquels on s assied le plus souvent ou avec lesquels on travaille en quipe Il n en va pas toujours de la sorte sous pr texte d quit ou de simplicit la plupart des l ves sont invit s travailler sans faire d histoire avec des condisciples qu ils n ont pas choisis Et pourtant on leur demande de coop rer dans un registre extr mement intime et personnel la compr hension de notions la formation de projets l lucidation d erreurs On n apprend pas tout seul affirme le CRESAS 1987 Mais apprendre ensemble est extr mement difficile Sans doute la libre association de chacun avec chacun se heurte t elle d videntes limites dans une organisation de masse Peut tre pourrait on n anmoins faire quelques pas dans ce sens 9 Le droit de ne pas coop rer son propre proc s l cole obligatoire l enfant ou l adolescent sont projet s dans une comp tition qu ils n ont pas choisie et dont d pend en partie leur destin La moindre des choses serait qu on leur reconnaisse le droit d utiliser toutes sortes de moyens pour se tirer le mieux possible de ce gu pier Cela n
13. iers Si le pouvoir magistral s y ajoute 6 Le droit de ne pas tenir toutes ses promesses Promets moi de ne pas rentrer trop tard de faire attention en traversant de prendre soin de tes chaussures d tre sage de bien travailler l cole Les adultes ne cessent d extorquer aux enfants et aux adolescents des promesses qui les rassurent m me lorsqu ils n y croient qu moiti Qui aurait face de telles attentes l inconscience l imprudence de dire Non je ne rentrerai s rement pas avant minuit Non je ne ferai pas attention ou Non je ne travaillerai pas Enfants et adolescents ach tent leur autonomie en faisant des promesses qu il leur est impossible de tenir toutes Plut t que de s indigner du manque de coh rence de s rieux de rigueur des enfants et des adolescents les adultes feraient bien de se demander si leurs attentes ne sont pas exorbitantes si force de vouloir bien faire ils n enserrent pas les 4 enfants et les adolescents dans un corset d obligations et d espoirs dont ils ne peuvent s accommoder qu en trichant un peu L cole cultive l art de faire accroire qu il faut fout faire et tout faire bien pour tre un bon l ve Pourtant les professeurs comme les parents instruits savent tr s bien qu ils ont r ussi leurs tudes en ne prenant pas tout fait au s rieux les attentes de leurs ma tres et de leurs parents Ils save
14. lant d s la formation initiale 5 Le droit de bouger Lorsqu on r unit des enseignants en formation continue pour leur faire entendre par exemple une ou deux conf rences au bout d une demi journ e ils ne tiennent plus en place et trouvent insupportable d tre l passifs et immobiles couter quelqu un qui n en finit pas de causer et n a pas l air de se douter qu au fil des minutes ses auditeurs ont une envie croissante d aller se d gourdir les jambes prendre l air bavarder grignoter quelque chose ou boire un caf Les plus lucides des professeurs se disent ce moment l Voil ce que j inflige tous les jours mes l ves Mais cette prise de conscience reste en g n ral sans lendemain car ils ont l impression de ne pas pouvoir faire autrement Dans la classe un professeur peut se lever s asseoir sur le coin d une table ou le rebord d une fen tre se d placer entre les bancs s installer au fond de la classe sur le c t Dans le m me temps il exige de ses l ves qu ils se tiennent correctement ne se balancent pas ne se l vent pas ne se retournent pas ne se d placent pas sans permission On retrouve l bien entendu le souci de maintien de l ordre de surveillance des faits et gestes de peur du d sordre Apprendre le m tier d l ve l cole l mentaire c est d abord apprendre se tenir tranquille ne pas bouger ma triser ses pulsions M me
15. ne implication d un autre ordre Le risque demeure de transposer ces activit s les formes les plus contraignantes du contrat didactique renforc es par l absence de notation s lective Peut tre suffirait il de donner le droit de d clarer par moments qu on a besoin de d crocher d aller faire un tour de piquer un fou rire d interrompre son travail pour bavarder bricoler peindre courir changer d air Le droit de ne pas tre constamment attentif n est pas simplement un tribut pay la paresse ou la nature humaine c est l une des conditions d un v ritable travail intellectuel qui passe par des moments de pens e divergente de r verie ou d absence En outre tre concentr sur sa t che ne signifie pas tre disponible l interaction encore moins tre pr t couter constamment le professeur 2 Le droit son for int rieur L cole est un lieu tr s peu intime Dans notre culture lorsque des gens qui vivent ensemble sont libres de s organiser ils reconstituent des territoires avec certaines barri res et certaines protections m me en plein air ou dans un camping Dans une classe rien de tel chacun se voit assigner une place de travail tr s exigu et un petit espace de rangement souvent accessible chacun Ce manque de sph re priv e n est pas favorable aux apprentissages qui exigent des t tonnements des erreurs Il est tr s difficile d apprendre jongler ou taper
16. ne fille qui aime l ail et accepte qu aimer l ail soit tout compte fait aussi l gitime et savoureux qu aimer les math matiques il lui est plus difficile d avoir la conscience tranquille lorsqu il commence un cours et qu il invite chacun se passionner pour la m me notion sachant qu elle parle in galement aux uns et aux autres en raison de leur h ritage culturel de leur caract re de leur niveau en math matique de leur relation au professeur et aussi 6 que les attitudes des uns et des autres fluctuent au gr de l humeur de la fatigue des incidents de la journ e Tout professionnel qui traite des personnes ne peut s en tirer sans fixer des limites la relation interpersonnelle pour se prot ger et prot ger l autre il doit s appliquer ne pas savoir un certain nombre de choses ou feindre de les ignorer pour poursuivre sa route sans tre constamment arr t par des scrupules des n gociations des arrangements tenant trop largement compte de la singularit des personnes en pr sence On ne peut pas imaginer une scolarit de masse qui chaque seconde traite chaque enfant chaque adolescent comme une personne M me en famille les parents les mieux dispos s n y arrivent pas constamment Est ce une raison d en faire son deuil O le droit rejoint la p dagogie On peut avoir l impression que m me s il y adh re intellectuellement un enseignant ne saurait respecter int
17. nt qu un l ve qui ira loin est en r alit un l ve assez ind pendant pour ne pas s puiser en performances inutiles et en d monstrations perfectionnistes qui prennent de l nergie sans accro tre la ma trise Pourtant dans leur discours il arrive souvent ces adultes d oublier leur propre exp rience et de tenir des propos maximalistes Ils se retrouvent dans le cercle infernal des marchandages les plus classiques chacun demande le double de ce dont il a besoin pour tre s r d en obtenir les trois quarts R sultat fout le monde triche donc personne ne fait confiance personne et il est impossible de discuter sereinement du temps de travail et des exigences puisque les l ves sont constamment suspects d en faire le moins possible et les professeurs d en demander beaucoup plus que n cessaire 7 Le droit de ne pas aimer l cole et de le dire On ne demande pas aux prisonniers d aimer leur prison Pourquoi demanderait on aux l ves d aimer une cole o ils n ont pas choisi d aller Les adultes ont raison de tenter de faire aimer l cole ils ont tort d exiger des gages d adh sion et de stigmatiser les l ves ascolaires absent istes distraits ou paresseux comme de mauvais sujets Sans doute est il difficile de demander un gardien de prison d encourager les d tenus s vader du moins peut il comprendre qu ils en aient envie car il sait qu ils sont en prison c
18. oirs et la r ussite 1 Le droit de ne pas tre constamment attentif Aucun adulte n est capable d apprendre sans discontinuer 30 40 heures par semaine sans temps mort sans rel chement C est pourtant ce que semblent exiger des l ves les enseignants qui ont un programme charg ou pensent qu il l est ce qui revient au m me Ils ont l impression de n avoir pas une seconde perdre ils attendent des l ves une concentration sur la t che une coute attentive un engagement imm diat et sans faille dans les exercices etc Demander le silence rappeler l ordre ramener la t che interrompre les l ves qui r vent ou qui bavardent est une partie importante du travail des enseignants Ils jouent souvent aux chiens de berger qui n ont de cesse de ramener dans le troupeau des moutons qui veulent s gayer Avec la fatigue ou le stress cela peut devenir obsessionnel Un enseignant raconte Mon signal d alarme qui m annonce que rien ne va plus et que je ferai bien de dormir pour r cup rer un peu c est que je fais chut m me la maison au moindre clat de voix de mes enfants Collectif 1980 Il est s r qu un chien de berger qui ne cesse d aboyer n impressionne plus gu re les moutons La tendance au rappel incessant l ordre est encore plus forte dans l enseignement secondaire parce que chaque professeur ne dispose que de quelques heures par semaine pour couvrir un
19. ontre leur gr Les ma tres d cole ont beaucoup plus de mal se mettre la place de l l ve parce qu ils ne voient plus la formidable pression qu exerce l appareil scolaire sur les individus ou pensent qu elle est excus e d avance parce que c est pour leur bien Si des adultes d un ge avanc n aiment pas les pinards ou le poisson c est parfois parce qu on les a forc s d s leur tendre enfance en manger Il arrive qu on aime spontan ment quelque chose ce qui n oblige pas l aimer toute sa vie Il arrive aussi que l on commence spontan ment par ne pas aimer quelque chose par exemple d aller l cole Il est tr s important de pouvoir le dire d essayer de comprendre pourquoi sans tre imm diatement culpabilis On sait que face la naissance d un cadet les enfants prouvent des sentiments de jalousie des pulsions agressives Aussi longtemps que les adultes les censurent ne veulent pas strictement parler les entendre n envisagent pas que ces r actions puissent tre normales non perverses ils leur refusent tout droit de cit Si bien qu on ne peut en parler donc les faire voluer elles restent l non dites mais inchang es On peut faire le parall le il devrait tre admis qu une partie des enfants scolaris s n aiment pas spontan ment l cole qu ils puissent le dire non seulement tout au d but de leur scolarit mais chaque fois que
20. programme et pense qu une heure de perdue va le mettre en retard L interaction didactique se fonde donc en g n ral sur une double fiction d abord que les enfants ou les adolescents sont davantage que les adultes capables d apprendre de fa on continue sans d faillance ni temps morts en second lieu qu il suffit de faire sans rel che pression sur eux de les tenir pour que leur implication dans la t che soit garantie Cette double fiction se paye assez cher elle d veloppe m me chez les l ves les plus acquis aux apprentissages scolaires des strat gies de fa ade qui consistent faire croire qu ils sont impliqu s tout en tant mentalement voire physiquement ailleurs Selon l adage tout ce qui est excessif devient insignifiant lorsque les l ves ont compris qu ils ne pourront satisfaire constamment aux attentes de l cole mais qu on ne leur en laissera pas ouvertement le droit ils s arrangent pour para tre attentifs d veloppant cette sorte de vigilance qui permet de se remobiliser rapidement et d avoir l air dans le coup d s que le professeur s ap proche ou vous interpelle Seules les coles nouvelles et certaines coles alternatives ont tir clairement les cons quences de l incapacit d apprendre aussi intensivement elles pratiquent la mi temps ou le tiers temps p dagogique alternant les activit s intellectuelles et des activit s cr atrices ou sportives qui exigent u
21. r occupation d ensemble reste la m me instruire et mobiliser dans l ordre et la discipline d importantes populations d individus Les responsables de telles populations n ont pas pour enjeu principal le bonheur des uns et des autres ni m me le d veloppement de leurs comp tences mais le souci qu il n y ait pas de d sordres de violence d infractions aux r gles et qu on ne puisse pas leur reprocher de mal g rer leur tablissement ou le sous syst me dont ils sont responsables On pourrait dire que l cole cr e souvent les probl mes qu elle doit ensuite mettre beaucoup d acharnement r soudre par exemple en concentrant des nombres trop importants d l ves et d enseignants dans des locaux mal con us et qui deviennent invivables inconfortables ou dangereux si chacun ne se plie pas scrupuleusement aux r gles communes Dans une cole primaire de trois classes on peut se permettre de vivre autrement que dans un coll ge de mille l ves situ en ville dans des locaux exigus et un environnement hostile Les choses tant ce qu elles sont il ne faut pas s tonner qu une partie des l ves se rebellent et ne s inscrivent pas constamment dans cet ordre plus gestionnaire qu ducatif En affirmant le droit de ne pas ob ir six huit heures par jour je ne justifie pas toutes les d viances toutes les violences tous les d sordres L institution est elle aussi en droit de se prot ger et de sanctionne
22. r les d viances On pourrait souhaiter qu elle ne perde jamais de vue qu elle est la premi re exercer une violence sur les individus notamment durant la scolarit obligatoire M me si on a renonc aux ch timents corporels et aux s vices les plus cruels l cole reste une machine canaliser et contr ler les comportements donc brimer les individus Les sanctions douces sont elles moins cruelles que les col res et les coups D chirer calmement la page d un cahier ou rectifier un dessin est ce moins violent qu une gifle L exigence d ob issance n est sans doute pas moins forte qu au d but du si cle m me si elle s exprime avec le sourire dans une sorte de chantage affectif Fais le pour moi montre moi que tu es digne d estime Au del des imp ratifs du maintien de l ordre il serait souhaitable que l cole et les enseignants aient davantage conscience que la violence faite aux apprenants f t ce pour leur bien est en g n ral d favorable aux apprentissages On ne gagne rien enfermer dans un univers bureaucratique et autoritaire des processus sociocognitifs extr mement divers fragiles et capricieux c est une des fa ons de fabriquer de l chec scolaire Perrenoud 1995 a et c Mais on ne peut att nuer l exigence d ob issance qu en comprenant mieux d o vient le besoin des adultes de ne rencontrer aucune r sistance quand ils s adressent des enfants en y travail
23. t aux droits de la personne tels qu ils devraient tre reconnus dans n importe quel cadre institutionnel Cela donnerait par exemple Les droits imprescriptibles de l apprenant 1 Le droit de ne pas tre constamment attentif 2 Le droit son for intZrieur 3 Le droit de n apprendre que ce qui a du sens 4 Le droit de ne pas ob ir six huit heures par jour 5 Le droit de bouger 6 Le droit de ne pas tenir toutes ses promesses 7 Le droit de ne pas aimer l cole et de le dire 8 Le droit de choisir avec qui l on veut travailler 9 Le droit de ne pas coop rer son propre proc s 10 Le droit d exister comme personne Facile direz vous L cole est obligatoire les enfants ont la t te en l air les adolescents sont rebelles respecter int gralement de tels droits l effet est garanti vous fabriquez des cancres Vraiment Serait ce pire que maintenant Notre cole est elle si efficace qu on puisse se permettre de ne pas envisager qu il y ait un probl me de sens du travail scolaire et de rapport au savoir Et si le m tier d l ve Perrenoud 1995 b 1 emp chait d apprendre Examinons chacun de ces droits de plus pr s Non pas pour sugg rer qu ils ne sont nullement respect s Ils le sont mais in galement Il reste donc beaucoup faire pour qu apprendre ait du sens aux yeux des l ves qui n ont pas t berc s dans leur famille d s leur naissance par l hymne aux sav
24. tique est fort peu n goci on ne donne pas l l ve le droit de fixer des limites on attend de lui une transparence de chaque instant pour son bien pense t on mais aussi souvent pour renforcer le contr le social et faciliter l valuation Ici encore le droit au for int rieur l intimit n est pas seulement un droit de la personne qu il faut respecter quoi qu il en co te C est d abord une condition de l apprentissage L cole a certes le droit de demander aux l ves des comptes sur leur travail et leurs apprentissages elle l exercera d autant mieux qu elle ne pr tendra pas constamment acc der aux coulisses aux motions et aux pens es des apprenants 3 Le droit de n apprendre que ce qui a du sens On dit volontiers que les soldats n ont pas besoin de comprendre qu il leur suffit d ob ir Peut tre l efficacit des arm es d pend elle de leur discipline peut tre est il inconcevable de mobiliser des troupes si chacun attend pour faire ce qu on lui demande d tre convaincu que c est une bonne id e On a h las un peu trop tendance organiser l cole sur ce mod le comme s il fallait d finitivement faire son deuil de l id e d expliquer aux l ves pourquoi ils apprennent quel est le sens des savoirs et des t ches qu on leur propose ou qu on leur impose Les enseignants ne sont pas insensibles au probl me mais ils se disent Si je devais chaque
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