11. - ORBi
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1. f Hz bu 5 11 L INFRASTRUCTURE DITORIALE par Pascal Duranp amp Yves WINKIN Pas de texte dans nos soci t s sans livre ou num ro de revue pour le faire exister c est chose vidente et toutefois peu entendue tant demeurent pr gnantes parce qu les font corps avec le fonctionnement imaginaire de l espace iitt raire moderne les repr sentations id alistes de l critur comme parole pure et de l crivain comme cr ateur incr Pas non plus de livre ni de revue symboliquement efficaces si ces v hicules mat riels ne sont pas leur tour relay s par des instances de r ception recension cons cration elles m mes inscrites dans le r seau immat riel qu am nage au sein du microcosme culturel le jeu des places et des positisns qu y occupent en connivence autant qu en concurrence Les diff rents acteurs lieux et milieux de sociabilit lettr e cui en sont constitutifs L histoire de l dition litt raire en Belgique francophone par ses d buts tardifs et la faible force d attraction qu elle exerce sur les crivains aspirant une large notori t con firme en creux ces deux propositions frapp es au oin d un bon sens assez peu partag D une part en effet s il est vrai que la parution de La L gende d Ulenspiegel signe en 1867 lacte de naissance des lettres belges bient t prolong e par l essor de la g n ration des symbolistes co2. champ fran ais qui ne laisserait en quelque sorte son voisin septentrional que les genres d valu s mineurs ou instrumen talisables On ne s tonnera donc pas qu l ombre de ces grandes entreprises foisonnent dans une relative obscurit une multitude de maisons vocation litt raire dont la renom m e ne passe gu re les fronti res de la Communaut fran aise de Belgique Ayant fait l option d un secteur ditorial plac Sous tutelle parisienne ces diteurs sont condamn s une sorte de croisade culturelle permanente qui peut s exprimer soit par le choix de niches th matiques pointues telles que le surr alisme et ses filiations aux Mar es de la Nuit 1986 ou encore chez Didier Devillez 1991 soit par la prise de position dans un cr neau g n rique tr s circonscrit Lansman 1988 pour le th tre L Arbre paroles 1964 pour la po sie Yellow Now 1973 pour l essai en mati re de cin ma soit encore aux ditions du Cormier 1949 comme nagu re chez De Rache 1954 ou aujourd hui encore chez Quorum 1992 par une attitude globale d ouverture m lant genres et styles au risque d une perte d identit qui ne permet gu re d affronter armes gales la concurrence fran aise Rien de surprenant en pareil contexte si les diteurs litt rai res de Belgique accompagnent pour la plupart les premiers pas d crivains qui apr s reconnaissance locale tenteront
3. Plissatt La couverture du pre J mier volume du cycle des Cit s obscures En m daillon gauche Fran ois Schuiten des sinateur 1956 droite Beno t Peeters crivain sc nariste 1956 Asso ci e l image de Herg la maison Casterman est une vieille dame qui pas sera le cap de son troi si me si cle dans le gj ron du groupe fran ais Flammarion Fond e en 1780 sp cialis e dans le livre religieux au xix si cle elle s taitreconvertie d s les ann es 30 dans le secteur du livre pour la jeunesse notamment avec la reprise en album en 1934 des Aventures de Tintin Dans les ann es 70 avec le magazine suivre disparu en 1997 et de nouveaux auteurs tels que Tardi ou Pratt Casterman n gociait avec succ s sa conversion la bande dessin e haut de gamme Avec le cycle des Cit s obscures de Peeters et Schuiten l imprimeur tournaisien devait en ore faire la preuve de sa capacit investir les formes les plus modernes du r cit en image explorant la fois l architecture d un Bruxelles imaginaire et l univers d un Borg s mis au diapason de l cole belge de l trange du livre consid r comme exploit graphique et prenant num dan hannnna huhuiAHne DR Les Murailles de Samaris Casterman 1988 Indications bibliographiques ARON P et Soucy P Y Les Revues litt raires belges de langue fran aise de 1830 nos jours dition revue et augment
4. au retard g n ral que le pays pour toutes sortes de raisons politiques institutionnelles conomiques et sociales qu il serait trop long de d tailler ici a pris dans le domaine culturel et scientifique par rapport ses Voisins et du m me coup l essor remarquable tout aussi g n ral que connait durant cette m me p riode la Belgique d ErnestS olvay Victor Horta James Ensor F licien Rops Camille Lemonnier ou Maurice Maeterlinck Elle doit tre galement interrog e comme le r sultat tirant cons quences durables d une histoire sp cifique celle du march du livre dans ces r gions avant et apr s 1830 L INFRASTRUCTURE DITORIALE 441 Le temps des imprimeurs xvr xix si cles Si l on n y recense gu re d diteurs au sens moderne avant la fin du xx si cle alors que la France a d s l poque romantique assorti la figure de l crivain comme cr ateur celle de l diteur comme co cr ateur notre profession est plus qu un m tier elle est devenue un art soul nait en 1839 l diteur parisien L on Curmer le territoire qui sera recouvert par la Belgique est cependant terre d imprimeurs plus ou moins prestigieux et respect s depuis Plantin au xvf si cle jusqu la dynastie Casterman en passant du Xvi si cle aux ann es 1850 par les zones troubles de la contrefa on pratiqu e r gime industriel Ta Au travers de Christophe Plantin 1520 1589 s est tr
5. ce contexte deux grandes figures d diteur m ritent qu on s y attarde D un c t Henri Kistemaeckers 1851 1934 adepte d une dition militante et associ au mouvement naturaliste S atta chant d abord diffuser dans sa librairie anversoise puis bruxelloise les crits des Communardsen exil Kistemaeckers saute le pas de l dition en 1878 avec une ph m re Petite biblioth que socialiste pour laquelle il obtient la collabora tion de L on Cladel et de Jules Guesde L ouvrage est assorti d une pr face maison qui annonce fortement la couleur nous d fions la R action tout enti re et nous rions de ceux que la haine poussera vouloir entraver notre propagande r volutionnaire L entreprise avorte apr s quelques mois les lecteurs n ont gu re suivi l activisme politique de l di teur inqui te ses auteurs les ouvrages subissent r guli re ment les foudres de la justice Cet chec explique pour une part la r orientation de Kistemaeckers partir de 1880 vers le secteur de l dition litt raire Le naturalisme encore nimb de scandale dans le champ litt raire fran ais lui offre la possibilit de poursuivre sur un autre terrain son combat contre l oppression mais aussi de capter les laiss s pour compte du syst me ditorial parisien La publication en 1881 d Un m le de Lemonnier amorce le mouvement en faisant rayonner jusqu Paris le professionnalisme d un diteur chez q
6. dans la remarquable collec tion Marabout fantastique dirig e par Jean Baptiste Baronian La grande machine s emballera lorsque l impri meur G rard aux d buts des ann es septante dotera son atelier d une rotative dont les capacit s de production et les seuils de rentabilit allaient exc der de beaucoup la cadence de la conception ditoriale des ouvrages Dans un march o les formes de livre de poche se multiplient et o les cr neaux se resserrent l op ration aura raison br ve ch ance de l entreprise Celle ci existe toujours de nom Nouvelles ditions Marabout 1977 situ es Alleur Mais absorb e par le groupe Hachette elle fonctionne aujourd hui avant tout comme une entreprise de distribution dont le secteur ditorial n en produit pas moins la chaine des manuels d initiation l informatique des guides de tourisme et des Ouvrages prati ques L instrumentalisation du savoir et du livre demeure la r gle mais l esprit d invention des fondateurs ne souffle plus gu re Aspects du march ditorial Contemporain Bande dessin e ouvrages pour la jeunesse livres prati ques constituent les segments de march les plus massive ment investis par l dition belge contemporaine ajoutons le texte juridique notamment chez Bruylant 1838 et Larcier 1839 associ e au Groupe De Boeck apr s 1990 On peut y voir l un des signes d une position de satellite l gard du
7. de proc s saisies campagnes de presse Le coup de gr ce est donn en 1 903 un an de prison et une colossale amende contraignent Kiste maeckers l abandon des affaires et l exil en France Une autre grande figure est celle d Edmond Deman 1857 1918 diteur associ de son c t au mouvement syraboliste et dont l aura elle aussi a rayonn jusqu Paris Ami de Verhaeren qui sera son principal chasseur de textes Deman incarne par excellence cinquante ans apr s Curmer la figure de l diteur esth te d vou corps et biens ses auteurs Libraire bibliophile il ditera des livres pour bibliophiles richement illustr s couteux impeccables Et en petit nom bre le catalogue completne compte que 54 titres mais aligne les signatures de Verhaeren Gilkin Maeterlinck Lemonnier Crommelynck et celles de Mallarm Les Po mes d Edgar Poeen 1888 Pages en 1891 etl dition posthume des Po sies en 1899 Gustave Kahn Ren Ghil Villiers de l Isie Adam Barbey d Aurevilly ou encore L on Bloy Le Mendiant ingrat 1898 Deman c est toutefois bien plus qu un catalo gue un sens du m tier et de la dignit culturelle de l diteur dont t moigne le fait que dans son dition des Soirs de Verhaeren 1888 qui fit tant pour sa r putation aupr s de Mallarm il fait figurer sa marque non pas comme d ordi naire au bas mais au centre de la page de couverture affichant de la sorte
8. e Bruxelles Labor coll Archives du futur 1998 229 p Bauper C Grandeur et mis res d un diteur belge Henry Kistemaeckers 1851 1934 Bruxelles Labor coll Archi ves du futur 1986 277 p BoUFFANGE S Pro deo et patria Casterman librairie impri merie dition 1776 1919 Gen ve Droz 1996 357 p CoLLarT M et ESTERZON A Dix questions pour l exporta tion du livre Bruxelles Direction g n rale de la Culture et de la Communication 1994 76 p D u J BobMorane amp Henri Vernes Bruxelles Gl nat 1990 159 p ill Deu J Cinquante ans de culture Marabout Verviers Nostalgia ditions 1999 489 p ill Dorr H La Contrefa on des livres fran ais en Belgique Louvain Uystpruyst 1932 250 p DRroxEE D Le March de la lecture dans la Gazette de Li ge l poque de Voltaire Philosophie et culture commune Li ge Vaillant Carmanne 1995 198 p Durano P et Winkin De Plantin Deman Pour une histoire des pratiques d dition en Belgique dans Textyles n 15 1999 pp 46 68 Durano P et Winkin Des diteurs sans dition Gen se et structure de l espace ditorial en Belgique francophone dans Actes de larecherche en sciences sociales n 130 1999 pp 48 65 Durano P et Winxin March ditorial et d marches d crivains Un tat des lieux et des forces de l dition litt raire en Belgique Bruxelles Direction g n r
9. gularit provocante de nombre d auteurs d avant garde de Paul Colinet Jean Pierre Verheggen Par ailleurs l efflorescence dispers e des groupes surr alistes et d riv s et plus g n ralement de cer cles po tiques plus ou moins locaux et acad miques s ac Compagnera d un essaimage de petites cellules ditoriales associ es des revues clipses comme les ditions du Disque vert du nom de la revue dirig e de 1922 1957 par Franz Hellens Le Journal des po tes lanc jusqu nos jours en 1931 et li aux tr s correctes Biennales internationa les de po sie ou encore Unimuse fond e en 1949 Autant de structures g om trie variable prolong es Verviers par les ditions Temps M l s du nom de la revue dirig e par Andr Blavier partir de 1952 Bruxelles par les ditions Phantomas revue fond e en 1953 ou les ditions Les L vres nues revue anim e par Marcel Mari n 1954 1958 puis 1969 1975 La Louvi re par les ditions de Montbliard puis du Daily Bul cr es au d part pour l dition des uvres d Achille Chav e partir de 1955 et toujours en activit Le trait commun de ces micro maisons souvent situ es en pro vince et de ces revues qui peuvent prendre quelquefois la forme de tracts ainsi de la s rie Correspondance manant du cercle de Noug 1924 1926 est non seulement qu el les s adressent al atoirement un public r duit fait
10. la science au savoir du savoir au savoir faire du savoir faire au mode d emploi ou de la litt rature l infra litt rature Cette diversification ditoriale sera en outre rythm e par des innovations qui ont fait cole tant dans la mise en forme du livre ouvrages massicot s sous couverture verniss e que dans sa mise disposition en librairie tourniquets coffrets divers etc ou encore dans la production de gadgets allant de la liseuse aux livres porte cl s Ici transparait la singularit essentielle de Marabout dans l espace ditorial contemporain pour la premi re fois c est le paratexte lui m me qui devient l enjeu d une mise en sc ne touchant autant aux textes eux m mes qu au catalogue dans son ensemble et en bout de chaine aux Strat gies d installation en librairie Pens s sur le mode du magazine produits cadence quasi hebdomadaire accompa gn s par le slogan Suivez Marabout les ouvrages sortis des presses vervi toises sont aux antipodes de la tradition voulant dans le domaine de l dition litt raire belge que le livre soit d abord un bel objet vou enrichir les rayonnages des bibliophiles Pendant vingtans la machine tournera sans heurt au profit en particulier sur le plan esth tique des classiques de la litt rature populaire et du r cit fantastique de Jean Ray et Thomas Owen nombre d auteurs contemporains belges ou internationaux qui seront r unis
11. plut t que comme vecteur de textes dans l espace culturel et peut tre au retard d une g n ration pris sur la France dans l closion d une repr sen tation artiste de l activit ditoriale Tout luxueux qu ils aient t les ouvrages griff s Deman pourraient bien en effet avoir reconduit sur beau papier l thos techniciste des contrefacteurs relay entre temps apr s la convention franco belge de 1852 mettant fin la contrefa on parles imprimeurs sp cialis s dans l dition religieuse fa on Casterman cet thos se prolongera jusqu nos jours Etlorsque la Belgique engendre ses Curmer la France est d j pass e au r gime de la grande entreprise ditoriale suivant la voie ouverte d s le Second Empire par Hachette ou Hetzel C est d un Charpen tier ou d un Hachette en effet plus que d un Curmer ou un Ladvocat que les crivains et les diteurs de Belgique avaient besoin au tournant du si cle pour merger collectivement et installer de fa on durable un espace ditorial capable de r sister l attraction parisienne Le moment Casterman 1920 1950 Apr s l chec r p tition des petits diteurs esth tes le terrain est comme lib r en Belgique pour le d ploiement en force de l dition industrielle culturellement moirs auda cieuse mais aux reins plus solides Soixante ans apr s Ha chette la cinqui me g n ration des Casterman install e depuis la fi
12. produits arrivant du Nord ce qui portera nombre des auteurs gommer soigneusement dans leurs th matiques ou leur langage les signes de leur appartenance ou au contraire les surmarquer parodiquement Le m pris de Balzac l gard des contrefacteurs sera ainsi relay par la prudence toute paternaliste que Gide mettra occulter dans son compte rendu du Bon Usage l origine belge de Grevisse Le moment Kistemaeckers Deman 1870 1914 Cette logique de subordination va toutefois connaitre une clipse au moment du Second Empire puis aux lendemains de la Commune avec l arriv e d auteurs fran ais en exil politi que ou en d sh rence dans leur champ ditorial d apparte nance lequel va au surplus entrer en phase de surchauffe autour de 1891 Hugo et Dumas Lautr amont et Rimbaud Mallarm et Bloy viendront tour de r le chercher asile ditorial dans la pauvre Belgique fustig e par Baudelaire Et durant pr s de trente ans pour la plupart Bruxelles des maisons vont faire ponctuellement apparition avec un fort capital symbolique et une haute id e du livre Lacroix amp Verboeckhoven ditent Les Mis rables mais aussi La L gende d Ulenspiegel de Charles De Coster Henri Kiste maeckers publie Maupassant comme Camille Lemonnier Edmond Deman dite grands frais Mallarm et Bloy autant que Verhaeren leur passeur Dans le m me temps des revues ambitieuses porteuses d un projet c
13. s t t profil ce qui deviendra l id al type de l diteur belge un imprimeur d une tr s haute comp tence technique la qualit graphique des ouvrages l enseigne du Compas d or fait r f rence au point que Montaigne lui m me au livre MI de ses Essais regrette que la griffe de l imprimeur anversois suffise conf rer une dignit intellectuelle aux divers tesmoignages imprimez qu il met en moule une relation plut t d tach e l gard des valeurs culturelles qui le porte instrumentaliser le savoir sous la forme d ouvrages encyclop diques et pratiques allant chez Plantin des ma nuels d ducation pour les jeunes filles la Bible polyglotte un rapport de d votion aux valeurs religieuses qui n exclut pas le sens du commerce ni l opportunisme politique ana baptiste de c ur Plantin publie catholique sous Philippe IL et protestant sous Guillaume d Orange Technicien de la chose imprim e plus que concepteur d ouvrages forte valeur symbolique ajout e l id altype prend forme et s affermit au xvir si cle avec la mont e en puissance de la contrefa on Li ge Bouillon et surtout Bruxelles qui va pour longtemps marquer le rapr crt que l dition belge entretiendra tant avec la France qu avec le livre Ta orande hahilat Himooranhinna da rae imnrimenre te Ia L UKAND GC I YES Y INKIN dont certains se montrent capables de prendre de vitesse leurs confr
14. sans lour deur effort de faire exister par voie patrimoniale et de transmettre par voie scolaire une litt rature de Belgique en possession de sa propre histoire On notera encore dans un secteur nouveau certes tr s p riph rique l apparition r cente et couronn e de succ s d une maison telle que les ditions Luc Pire 1994 sp cialis e dans le livre v nement portant sur des faits d actualit Le maillage des revues pr sente le m me caract re dis pers voire discontinu que le r seau des diteurs Avant gardistes ou d esprit traditionnel plus ou moins durables p riodicit variable certaines au nombre desquelles se comp tent quelques rampes de lancement pour de jeunes crivains manent de groupes et micro groupes litt raires telles la revue li geoise Odradek 1973 dirig e par J Izoard Luna Park 1974 1985 M Dachy Stardust 1974 M Benoit Jannin Affaires de style 1982 F Dannemark L Delisse B Peeters et al ou plus r cemment Le Fram depuis 1998 S Delaive K Logist er al lieux d exp riences d interven tions ou de paisibles cheminements po tiques renouant plus d un titre avec l miettement f cond des revues dada s tes et surr alistes D autres occupent le terrain de la recher che de la critique ou de la promotion litt raires Mais qu elles soient proches de l tat comme Le Carnet et les Instants organe de la Promotion des Lettres d
15. ale de la Culture et de la Communication 1996 305 p EsterzoN A L dition du savoir en Communaut fran aise de Belgique Bruxelles Direction g n rale de la Culture etde la Communication 1999 111 p Fontanas Ad et L Edmond Deman diteur Art et dition au tournant du si cle Bruxelles Labor coll Archives du futur 1997 356 p Fontamas Ad et L et Van BALBERGHE Publications de la librairie Deman Bibliographie Bruxelles Archives et Mu s e de la Litt rature 1999 375 p Goprroip F Aspects inconnus et m connus de la contrefa on en Belgique Bruxelles Acad mie royale de Langue et de Litt rature fran aises 1998 924 p LENTZEN E Le Livre dans la communaut fran aise Bruxel les Crisp 1990 24 p Dossier du Cris n 32 Lesrecar HL Histoire du livre et de l imprimerie en Belgique des origines nos jours Bruxelles Le Mus e du Livre 6 vol 1923 1934 Voert L The Golden Compasses A History and Evaluation of the Printing and Publishing Activities of the Officina Plantiniana at Antwerp Amsterdam Vangendt 1969 1972 2 vol 501 632 p ill 12 CES GENRES QU ON DIT MINEURS par Jacques Carion et Joseph Duhamel Une certaine tranget Le fantastique se trouve dans la litt rature belge bien avant que le monde ditorial en fasse une production autonome et y trace un r seau de similitudes avant que s labore un discours critique visant tablir
16. d ge Marabout comme Dupuis ciblent identiquement un lectorat adolescent friand d va sion entretenant un rapport ludique la culture qui s expri mera par exemple dans Spirou par certaines chroniques ducatives comme les tr s morales Histoires de l Oncle Paul et dans les collections Marabout Junior par la pr sence en fin de volume d articles documentaires r unis sous la rubrique Le club international des chercheurs Mara bout CICM En lan ant d s 1949 Ia collection Marabout sur le mod le des pocket books l am ricaine l imprimeur Andr G rard et le responsable de revues scoutes Jean Jacques Schellens qui se sont rencontr s la Lib ration pr c dent de quatre ans Hachette sur le terrain du livre de petit format et bon march Le corpus sera d abord celui des grands classiques c est dire des textes inlassablement recyclables puis se diversi fiera tr s vite en direction de l ouvrage pour la jeunesse avec h ros positifs fort pouv ir de projection identification Bob Morane d Henri Vernes pour les gar ons en Marabout Junior et Sylvie de Ren Philippe en Marabout Mademoi selle Les sous collections vont se multiplier dans les ann es cinquante soixante toutes sous tendues par un principe de d contraction autodidacte Marabout Service Marabout Flash Marabout Universit ou Marabout Fantastique rel ve ront d un m me d crochage de niveau de
17. de pairs ou restreint de petites communaut s de c l bration mu tuelle mais aussi qu elles retrouvent pour beaucoup d entre elles dans ce m me secteur litt raire la logique du coup par coup de la g n ration ditoriale pr c dente Fallait il le passer sous silence La fin de la p riode voit l mergence dans la mouvance catholique des ditions Rex 1930 1939 ditrices non seulement de pamphlets politi ques sous la poigne de L on Degrelle mais aussi de collec tions de po sie de romans ou d essais qui accueilleront aussi bien Henry Carton de Wiart et Fernand Desonay que Pierre Nothomb ou Stanislas Andr Steeman Avec ce sens de l instrumentalisation politique des m dias qui le caract rise comme la plupart des agents culturels du fascisme et du nazisme Degrelle innove dans les structures de production et surtout de distribution avec la mise en place d un courtage domicile et d un r seau de vente par correspondance Coups d esbroufe en r gle g n rale sold s par des checs r p ti tion comme le fut aussi sa tentative d ouvrir des bureaux l tranger Dans la foul e des ditions Rex en liquidation d s 1939 se multiplieront sous impulsion et contr le de l occu pant quelques petites maisons disparues la Lib ration telles que les ditions Ignis La Roue Solaire les ditions de Wallonie ou les ditions de la Toison d Or proposant une gamme d ouvrages allant du ro
18. e l Universit comme Li ge les revues critures ou Traces celle ci manant du Fonds Simenon ou encore de l enseignement secondaire et sup rieur comme la revue Textyles qui cible pour l essentiel le public des enseignants de lettres qu elles soient associ es des institutions culturelles ou des centres de recherche comme L Arbre Paroles accompagnant depuis 1983 le travail ditorial de la Maison de la Po sie d Amay Sources revue publi e depuis 1987 par la Maison de la Po sie de Namur Le Mensuel litt raire et po tique bulletin d information du Th tre Po me ou Les Cahiers internationaux de symbolisme fond s en 1962 par Claire Lejeune ou situ es sur un terrain articulant la litt rature l actualit sociale et politique ainsi de La Revue Nouvelle depuis 1945 ou de Marginales dirig e par Albert Ay guesparse de 1945 1975 etrelanc e partir de 1998 par l ditrice Luce Wilquin et le critique litt raire Jacques De Decker aucune d entre elles n exerce sur le secteur un v ritable magist re Onpeutle regretter en y voyant l une des causes de l absence dans la Belgique francophone contemporaine d un espace intellectuel fortement int gr et susceptible de relayer vers les grands m dias nationaux les d bats touchant aux ques tions de litt rature et plus largement de culture en dehors des v nements festifs ou Commerciaux comme La Fureur de Lire ou la Foire Inte
19. ier obstacle proprement ditorial habilement contourn sui vre tiendra jusqu en d cembre 1 997 mais au prix d une sorte 1 de translation dans le secteur paralitt raire du r flexe d imi tation qui dans Le secteur lettr traduit la subordination des diteurs au mod le fran ais Par ailleurs que l entreprise Casterman ait lutt pour sa survie partir de la perte en 1998 du monopole qu elle d tenait sur l impression des annuaires t l phoniques t moigne encore du rapport d inh rence r ci proque que la maison entretient avec un Syst me dans lequel l imprimerie n aura pas cess de jouer le double r le d ins tance motrice comme de vecteur repr sentations et de frein au libre d veloppement de fonctions proprement dito riales La faible d finition de l dition litt raire en Belgique est lourde n anmoins d un potentiel paradoxal Les maisons qui enrel ventpleinementexistentetsubsistent dans une p nom bre qui les accable sans doute mais autant qu elle les prot ge Dans un r cent ouvrage paru Sous un titre qui sonne comme un glas L dition sans diteurs 1999 Andr Schiffrin a dress le lugubre constat pour l aire anglo saxonne de la disparition des diteurs ind pendants au profit d un grand march de l dition o la logique du best seller et da profit imm diat d termine les circuits de publication Pour avoir maintenu des structures de production semi ar
20. l existence d une cole belge de l trange en fixer les codes y dessiner des filiations Pas davantage qu apr s la Seconde Guerre mon diale untel fantastique dans les premiers textes o il apparait ne constitue un genre litt raire I s agit plut t au d but de la litt rature belge d une fantasticit d une tonalit fantastique qui sans rien modifier ou si peu de l intrigue donne celle ci une dimension particuli re Tonalit du conte Les r cits l gendaires issus du terroir constituent un espace narratif dans lequel l trange au del des conventions folkloriques accentue la bizarrerie des comportements et la
21. la conscience qu il a d tre un partenaire de l crivain et un alchimiste de la chose imprim e La m daille a son revers trop g n reux avec ses auteurs Deman court la faillite l dition disait il c est ma danseuse Et mal diffus s aupr s d un public f tichiste le plus beau papier les textes les plus rares les gravures les plus finement cisel es retournent au vil mat riau dont ils avaient su se d gager Amer l diteur quitte la sc ne la veille de la guerre ruin financi rement autant qu accabl parla constatation qu il confiait d s 1900 Verhaeren qu apr s 20 ans d ef forts d un travail souvent exag r aucune active vitalit d esprit n a pu surgir en notre Laponie intellectuellement aussi gel e qu autrefois C est que le d gel souhait exigeait davantage qu une succession de feux de paille Lacroix amp Verboeckhoven tomb s en faillite peu apr s 1870 Kistemaeckers terrass par l ordre moral Deman puis apr s vingt ans d activit en cercle restreint ont ouvert une trop br ve parenth se dans l histoire du livre en Belgique Leur chec n est pas seule ment le fait d une conjoncture et dans leur chefs respectifs d une pi tre gestion commerciale d un militantisme trop ardent ou d une complexion trop g n reuse Il tient aussi surtout chez le dernier au maintien d une conception du livre comme objet th saurisable
22. les march s ext rieurs leur public tudiant L Universit Libre de Bruxel les parait bien seule dans ce domaine sous haute contrainte o les auteurs les plus l gitim s s adressent au Seuil Minuit ou aux P U F maintenir des Presses proprement universitaires qui ne se r signent pas la simple publica tion de syllabus ou autres th ses en mal d diteur Quelques maisons r sistent vaille que vaille ce tropisme g n ral Bruxelles Les peronniers ayant pris la succes sion des ditions J acques Antoine Le Cri 1981 Le Pr aux sources 1986 dans le Hainaut Talus d Approche 1980 en r gion li geoise Luce Wilquin 1991 pratiquent parmi d autres une dition lettr e peu diffus e en France mais assur e d atteindre un public de fid les avec quelques auteurs de qualit recrut s sur le march belge ou quelques collec tions de bon aloi tant t po tiques ou romanesques tant t dans le domaine de l essai ou de l ouvrage caract re ency clop dique destin au grand public Plus largement les di tions Labor ont efficacement lanc en 1984 dans la foul e de la s rie Pass pr sent aux ditions J acques Antoine la remarquable collection Espace Nord associ e pendant plusieurs ann es la collection Babel des ditions Actes Sud r dition de textes d auteurs classiques ou contempo rains accompagn s de lectures savantes mais
23. leur chance Paris Le secteur des sciences humaines subit les effets d une loi comparable Mardaga 1966 Li ge La Lettre Vol e 1989 Bruxelles malgr la haute qualit des ouvrages produits ne parviennent gu re encore d velopperune politique d auteurs durablement suivis Un diteur bruxellois tel que Complexe 1971 doit peut tre une part de son relief et de sa stabilit Sa capacit jouer sur les deux tableaux belge et parisien avec des bureaux Bruxelles comme Paris et des collections de poche principalement dans le domaine de l histoire Sont les sujets les auteurs ou les pr faciers sont indiff remment recrut s en France et en Belgique Le cr neau universitaire n est gu re mieux prot g Le groupe De Boeck structure ditoriale issue en 1986 de la reconfiguration de maisons scolaires parfois tr s anciennes telles Dessain et Wesrnael a certes su d velopper l enseigne De Boeck Universit et gr ce un r seau serr de conseillers et prescripteurs de lecture quelques collections remarquables bien dirig es dont la plus saillante et la mieux diffus e en France est sans doute Le point philosophique comptant son catalogue en fait d auteurs ou d auteurs objets Vattimo Deledalle ou Couloubaritsis Derrida L vinas ou Michel Serres On n en remarquera pas moins la difficult des universit s promou voir une dition de qualit susceptible de percer
24. man d vasion au r cit de guerre C est dans la m me p riode sombre et en se situant sur un terrain de propagande morale fortement impr gn e d thos catholique que l imprimeur Jean Dupuis lancera des maga zines tels que Le Roman son objectif lutter l instar du magazine Rex des ditions du m me nom contre la litt ra ture corrompue en attendant Le M oustique et d s 1938 le magazine Spirou Dans cet lan Dupuis saute le pas de l dition avec plusieurs collections romanesques sous couvertures de couleurs diff rentes red couvrant ainsi cent ans apr s Hachette et sa Biblioth que des chemins de fer le principe d un ciblage g n rique et lectoral imm diatement visible En 1940 un premier album sign Rob Vel le cr ateur du personnage de Spirou sort des presses de Marcinelle Le magazine Spirou prendra quant lui son v ritable essor dans l imm diat apr s guerre foyer d une nouvelle cole de la bande dessin e dont les vell it s frondeuses tr s sensibles chez un Franquin dans les ann es soixante seront le plus souvent noy es dans l uf cf ch 16 Le moment Marabout 1950 1970 La mont e en force dans les ann es cinquante du maga zine Spirou est contemporaine de l apparition sur le march ditorial du label Marabout Cette co ncidence n a rien de fortuit r pondant l appel d air cr par la Lib ration en prise sur une nouvelle classe
25. mment ne pas voir que cette naissance longtemps prorog e est exactement con temporaine de l apparition elle m me particuli rement tar dive de quelques maisons d dition et revues litt raires dignes de ce nom Comment d autre part ne pas voir dans l irr sistible tendance conduisant jusqu nos jours tant d cri vains belges se faire publier Paris ou en Arles plut t qu Bruxelles ou Li ge o pourtant les diteurs ne manquent pas une preuve par le contraire de cette n cessaire coop ration soulign e par Pierre Bourdieu dans Les R gles de l art entre le travail de fabrication mat rielle de l objet livre et un travail de production de la valeur de l objet fabriqu Faire du livre n a jamais suffi faire un livre diter ou tre dit n a jamais suffi faire exister un texte sur le march des biens symboliques ni y tre per u comme auteur part enti re Encore faut il que l diteur ou le directeur de revue apparaisse comme autre chose qu un simple ex cutant qu il soit reconnu comme un v ritable agent culturel et qu existe un espace ins parablement litt raire et ditorial o cette reconnaissance soit possible et effective Tardive en effet la double naissance dans le dernier tiers du XIX Si cle d un appareil ditorial au sens moderne et d un espace litt raire national mais tous deux faiblement d finis doit sans doute tre r f r e
26. n du xvm si cle Tournai fait tourner ses presses non plus seulement au profit des ouvrages de pi t dont la maison d tenait le quasi monopole en tant qu diteur du Saint Si ge mais surtout au profit des annuaires t l phoni ques partir de 1926 des Guides Michelin de 1923 1928 et des albums de Tintin partir de 1934 en couleurs apr s 1942 Est ce simplement qu il s agit de faire ronfler les machines et que l diteur de Herg demeure avant tout un imprimeur Plus exactement on peut faire l hypoth se que Casterman pionnier de l dition belge cet gard convertit massivement dans le secteur de la grande production pour la jeunesse avec une force conomique sans gale ni pr c dent en Belgique la comp tence graphique acquise dans la pro duction intensive des cat chismes et autres missels sur papier bible C est ainsi que prennent leur essor parall lement aux albums de Tintin une s rie d albums illustr s en couleurs L Oiseau de France et des collections d ouvrages Ma biblioth que Po tes de la famille Zi et Za qui ciblent en priorit un jeune public avec une vis e d difica tion fortement impr gn e de morale catholique en atten dant les albums de Petzi de Carla et Vilhem partir de 1958 ou les s ries Alix et Lefranc de Jacques Martin partir de 1965 C est ici le lieu de signaler que le secteur de la bande dessin e et de l o
27. on auteur le co cr ateur de l uvre du livre consid r comme nhint A7 us Het mara AU PAIE ANUS AVAST NI ANDINA JT Un Marabout Junior En m daillon gauche l impri meur Andr G rard droite Jean Jacques Schellens Ph S nom ne ditorial sans qui i valent en Europe l aventure Maraboutn apas proc d seu 5 lement de la rencontre provi dentielle dans l imm diat 4 apr s guerre entre un impri meur ambitieux et un direc teur ditorial particuli rement inventif Elle a aussi tir astu cieusement parti d un faisceau de facteurs culturels sociaux et conomiques favorables COR EN e Un lieu Verviers vieille cit d industrie laini re Un con texte historique l appel d air cr par la Lib ration Une tranche d ge en formation celle des ados Une classe sociale montante la petite bourgeoisie avide de saine va sion et soucieuse d acqu rir sur le tas ses quartiers de noblesse culturelle Suivez Marabout claironne l un des slogans maison De 1949 aux d buts des ann es 70 l entre prise produira cadence industrielle en livre de poche de l aventure des h ros positifs du r cit fantastique de la vulgarisation scientifique du conseil pratique Ferveur auto didacte et volont d entretenir en chaque lecteurun capital de sympathie du livre consid r comme lien de communication DR Photos M F
28. res fran ais par des pr fa ons pr c dant l dition originale quand ils ne les surclassent pas dans la qualit graphique des ouvrages propos s se double alors d une r putation pour le moins ambig e Sous l ancien r gime finissant le contrefacteur li geois ou bruxellois tel Jean Fran ois Bassompierre en Cit ardente apurepr senter pour nombre d hommes de lettres menac s philosophes ou cri vains rotiques un moyen de contourner la censure en pu bliant au del des fronti res du royaume de France les livres qu il suffisait ensuite de faire revenir Paris en contrebande Mais cet habile industriel l abri des l gislations fran aises passera sous peu non sans raison pour un pirate dont la seule disposition culturelle sera de savoir rep rer temps les valeurs qui montent de Chateaubriand Balzac de Janin Dumas La dynamique est ainsi lanc e tournant vite l inertie la France produira la Belgique reproduira techniquement l poque de la contrefa on intellectuelle ment et litt rairement ensuite La difficile mergence en Belgique d une litt rature sp cifique n est pas trang re cette Structure de subordination ditoriale qui conduira l imitation et un exc s de d f rence l gard de ce qui vient de Paris ou inversement incitera durablement les acteurs culturels fran ais consid rer de haut ou avec quelque m fiance les pratiques m thodes et
29. rnationale du Livre de Bruxelles On peut aussi bien porter cette discr tion qui n exclut pas l esprit de controverse au cr dit d un microcosme intellectuel moins Soumis que le champ parisien la pression d une intelli gentsia m diatique suivre La subordination des petites maisons lettr es au syst me fran ais n implique pas que les entreprises ditoriales situ es dans les cr neaux culturellement minoris s mais conomi quement majeurs chappent de facto aux forces qui assurent la domination hexagonale Les difficult s r centes de la v n rable maison Casterman rachet e en 1999 par le groupe fran ais Flammarion montrent que l ouvrage pour la jeu nessen arien d unsecteuren soi prot g Ainsi lorsque la BD a b n fici en France dans les ann es soixante du processus de l gitimation amorc par le magazine Pilote et appuy par l arriv e sur le devant de la sc ne d une nouvelle g n ration d auteurs celle de Gotlib Reiser et Wolinski on a vu Casterman tenter de relayer un mouvement qui d j commen ait de lui chapper L imprimeur de Tournai investira bien et fortement le secteur de la BD haut de gamme en donnant leur chance Hugo Pratt partir de 1973 suivi de Tardi Sokal Manara Schuiten ou encore Bourdon il lancera bien partir de 1978 le magazine suivre s adressant un public adulte reste qu il le fera avec plusieurs ann es de retard Prem
30. tisanales peut tre quelques diteurs litt raires de Belgique sauront ils re pr senter dans l avenir avec d autres en d autres zones marginales des foyers de r sistance aux grands pr dateurs internationaux autant que des lieux d accueil ouverts aux cr ateurs menac s par la loi du rendement court terme Rendez vous dans vingt ans S Biblioth que Royale de Belg ique Archives et Mus e de la Litt rature Page de titre des Soirs d mile Verhaeren 1888 En m daillon l diteur Edmond Deman En quantit le catalogue de la Librai rie Deman est presque n gligeable une cin quantaine de titres sur beau papier peu d exemplaires En qua i i lit il aligne parmi d autres les noms de Verhaeren Maeterlinck Crommelynck Lemonnier ou encore ceux de Mallarm Bloy Villiers de PIsle Adam Barbey d Aurevilly Preuve clatante s il en fallait que le Libraire asu non seulement capter quelques unes des meilleures signatures de son temps mais aussi construire l image d un diteur d exception dont le d voue ment et la vigilance esth tique ont rayonn de Bruxelles Paris Sur la page de titre du recueil de Verhaeren la marque Deman dessin e par Khnopff figure au centre et non au bas de la page cette place ce n est pas un simple label de fabrique c est une signature de plus une griffe la cons cience affich e exhib e que l diteur a d tre avec s
31. ui le souci du beau livre une constante dans l dition litt raire en Belgique n exclut ni l audace dans le choix des textes ni chose plus rare la vigilance requise par la diffusion et la promotion des ouvrages Aux c t s d auteurs confirm s Cladel les Goncourt ou Maupassant Kistemaeckers lancera des d butants plus expos s que leurs ain s la vigilance des censeurs tels Henri F vre et Louis Deprez Autour d un clocher Jules Gu rin Fille de fille Francis Poictevin Ludine ou Paul Bonnetain Charlot s amuse Surtout l heure o La Jeune Belgique s efforce de promouvoir une litt rature nationale Kistemaeckers publiera d abondance de jeunes auteurs belges Rodenbach L hiver mondain Han non Rimes de joie ou encore Eekhoud Kermesses Des proc s r p tition rythment cependant en France comme en Belgique le d veloppement d un catalogue o les nouveau t s marqu es au sceau d un naturalisme intransigeant c toient les r impressions galantes illustr es par F licien Rops entre autres S il en sort plus d une fois son honneur les poursuites dont l diteur ne cesse pas de faire l objet r dui sent ses marges de man uvre Apr s 1887 Kistemaeckers fait moins de place aux uvres de combat Sa cadence de production fl chit Emmen s par Lemonnier qui a rompu avec lui en 1885 les jeunes naturalistes le quittent Dans les ann es 1890 le d clin s acc l re coup
32. ulturel collectif et se laissant porter par les principaux courants esth tiques du temps Parnasse naturalisme symbolisme voient le jour et entrent en rivalit sous l impulsion Bruxelles de Max Waller et Albert Giraud La Jeune Belgique 1881 1897 ou d Edmond Picard L Art moderne 1891 1914 ou encore Li ge d Albert Mockel La Wallonie 1886 1892 Adeptes de l Art pour l Art ou du Symbole tenants d un art d politis et pour quelques uns d un art social les acteurs f d r s par ces revues se tiennent l coute des d bats d cole parisiens mais se montrent aussi soucieux de promouvoir une litt ra ture de Belgique ou de Wallonie en prise sur le si cle Il est significatif que cette p riode au cours de laquelle se dessinent les contours d un appareil ditorial vis e pure ment litt raire corresponde dans les esprits la rapide closion d une conscience litt raire nationale particuli re ment volontariste penser en Belge voil ce qu il faut aux Belges c est dire exprimer ses conceptions selon la pente naturelle nos m urs et notre race d clare Picard en 1884 et que cette conscience soit prise en relais par la reconnaissance l chelle internationale dont b n ficieront certains des auteurs associ s aux mouvements naturaliste Lemonnier ou Th odore Hannon et surtout symboliste Verhaeren ou Maeterlinck prix Nobel 1911 Dans
33. uvrage pour la jeunesse restera essentielle ment soumis au contr le implicite ou explicite de l glise dont des diteurs comme Casterman Dupuis ou d autres sembleront autant de relais missionnaires aupr s du grand public Pour autant le march du livre n est pas occup entre les deux guerres que par des maisons vocation omnibus et tirant des productions paralitt raires en particulier de la bande dessin e l essentiel de leur chiffre d affaires et de leur renom international Terre d imprimeurs la Belgique est aussi terre de po tes ainsi qu on l a peut tre trop dit mais galement de fous du langage et de grammairiens Parall le ment l installation durable de maisons sp cialis es dans le beau livre et dans les romans de bonne composition comme La Renaissance du Livre 1926 le secteur du livre Scolaire fait large place bien apr s Dessain 1760 et Wesmael 1795 aux ditions Labor 1926 diteur engag dans la cause la que et socialiste et l essor de Duculot 1919 rachet par De Boeck en 1993 imprimeur d ouvrages pour la jeunesse auquel on doit d avoir fait confiance l instituteur Maurice Grevisse Le Bon Usage 1939 tout en capitalisant avant d autres sur l hypercorrectisme qui en Belgique est le reflet d un sentiment diffus d ins curit linguistique propre aux aires p riph riques comme l est aussi bien en sens inverse l audace carnavalesque l irr
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