La Femme au miroir - Le Livre de Poche
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1. Que dis tu demanda sa cousine Ida Rien Tu r ves de lui c est a Anne baissa le front La future mari e confirmant ses soup ons Ida clata d un rire aigu farci de pens es lubriques Ces 10 derni res semaines elle luttait contre sa jalousie et n y parvenait quen la convertissant en moquerie grillarde Annese croit d j dans les bras de son Philippe proclama t elle d une voix oppress e la cantonade La nuit de noces va tre chaude Moi je ne voudrais pas tre leur matelas ce soir Les femmes grogn rent les unes pour donner rai son Anne les autres pour stigmatiser la trivialit d Ida Soudain la porte s ouvrit Majestueuses th trales la tante et la grand m re d Anne entr rent Tu vas enfin conna tre mon enfant ce que ton mari verra clam rent elles en ch ur Comme si elles d gainaient un poignard des plis de leur robe noire les veuves sortirent deux bo tes en ivoire cisel qu elles entreb ill rent d licatement chaque coffret recelait un miroir cercl d argent Un bruissement de surprise accompagna cette r v lation les pr sentes estimant qu elles assistaient un spec tacle hors du commun les miroirs n appartenant pas leur vie quotidienne si par exception elles en pos s daient un c tait un miroir d tain en m tal poli bomb offrant des images embu es bossel es ternes ici les miroirs de verre reproduisaient la r2. est pour Dieu qu ils meurent en combattant les infid les C est Dieu qui les noie en met sur la route au fond des bois C est Dieu qui les tue au travail C est Dieu qui les rappelle avant nous C est Lui qui nous inflige de croupir sans eux Anne comprit que grand m re Franciska d testait Dieu exprimant plus d effroi que d adoration elle Le d crivait comme un pillard un bourreau un assassin Or il ne semblait pas Anne que Dieu f t cela ni qu Il op r t l o l a eule Le voyait intervenir 13 Toi ma petite Anne reprit la veuve tu auras une vie de femme l ancienne un homme toi de nom breux enfants Tu es bienheureuse En plus il n est pas vilain ton Philippe N est ce pas mesdames Elles acquiesc rent en riant les unes g n es les autres moustill es d avoir se prononcer sur ce genre de sujet Philippe seize ans tait exemple du robuste gar on flamand solide long de jambes troit de taille large d paules la peau beige et la toison houblon Tante Godeli ve s cria Savez vous que le fianc est dans la rue qu il guette sa promise Non Il sait que nous la pr parons il bout sur place De l eau sur le feu Si l on mourait d impatience je crois qu il serait mort Anne s approcha de la fen tre dont on avait ouvert le ch ssis en papier huil pour laisser entrer le prin temps prenant soin de ne pas couper le rayon l
3. laiss Pardon Ida sursauta convaincue d avoir mal compris Je te le laisserais bien Philippe Ah S il n tait pas amoureux de moi Anne croyait avoir dit quelque chose de gentil Une gifle retentit Garce siffla Ida Anne parce qu elle eut soudain chaud la joue s aper ut que c tait elle qui avait re u le soufflet Ida avait frapp e Les conversations se suspendirent les femmes se retourn rent Sale morveuse tu es persuad e qu aucun homme ne me d sirera Je te montrerai que tu as tort Je te le prouverai Tu verras des dizaines d hommes voudront de moi Des centaines 20 Un seul suffira corrigea Anne avec douceur Une deuxi me claque s abattit sur elle Punaise Tu insistes Tu es persuad e que je n en aurai m me pas un Quelle peste Tu es mau vaise Tante Godeli ve intervint Ida calme toi Anne me pousse bout maman Elle pr tend que je suis laide et r pugnante Pas du tout Anne s est content e de dire ce que je pense un homme te suffira tu n as point besoin d en s duire dix ni mille Ida toisa sa m re avec d fi genre cause toujours on verra Godeli ve releva le nez et exigea Excuse toi aupr s d Anne Jamais Ida En r ponse l a n e rouge de hargne les veines du cou saillantes hurla Plut t crever Confiant le miroir qu elle tenait la veuve de l
4. que l aristocrate les entendait d j Il faut trouver quelqu un qui le r pare Mais o Ici Saint Andr personne ne Je crois savoir Bruges il y a un peintre Ne soyez pas empot es je dois d abord d cla rer la v rit Que tu la dises ou que tu la caches tu auras acheter un nouveau miroir Mon Dieu comment 24 Je paierai affirma Franciska nous sommes chez moi et c est moi qui l ai l ch Parce que Ida t a brusqu e Je paierai radota l a eule Non moi riposta Ida Et avec quels cus gronda Godeli ve Quand elles eurent num r les solutions la bedon nante cloche du hameau tinta leur rappelant qu Anne devait se marier bient t Godeli ve releva la t te Anne La jeune fille ne r pondant pas Godeli ve tressaillit Anne rejoins nous Toutes les femmes examin rent la soupente puis l tage la fianc e n tait plus l Elle est all e voir son galant conclut grand m re Franciska Godeli ve ramassa une paire de chaussures Sans ses sabots La veuve de l arpenteur indiqua son cadeau pr s de l escabeau Et sans les chaussons brod s que je lui pr te Ida s lan a vers la fen tre Philippe en bas l attend toujours Alors o est elle Le pr nom d Anne r sonna dans la maison de la grand m re pendant que les femmes sillonnaient les pi ces Au
5. ressemblait pas Es tu contente Oh oui Merci C tait la sollicitude de sa tante qu Anne avait r pondu peu vaniteuse elle avait d j oubli l exp rience du miroir Mesures tu ta chance glapit grand m re Franciska Que si protesta Anne je suis fortun e de vous avoir 12 Non je parlais de Philippe On ne trouve quasi plus d hommes de nos jours Les voisines opin rent du bonnet graves Rien de plus rare que les m les Bruges La ville n avait jamais subi une telle p nurie Les hommes avaient disparu Que restait il Un gaillard pour deux femelles Peut tre m me un pour trois Pauvre Flandre un ph no m ne myst rieux l accablait la disette de sexes virils En quelques d cennies la population masculine avait diminu de fa on pr occupante dans le nord de l Europe Beaucoup de femmes devaient se r soudre vivre en c libataires ou ensemble en b guinage cer taines renon aient la maternit les plus vigoureuses apprenaient des m tiers d Hercule la ferronnerie ou la menuiserie afin qu on ne manqu t de rien Percevant un bl me dans le ton de son amie la mer ci re la fixa avec s v rit C est Dieu qui l a voulu Grand m re Franciska tressaillit craignant qu on l accus t de blasph me Elle se corrigea Naturellement que c est Dieu qui nous a envoy cette preuve C est Dieu qui a appel nos hommes aux croisades C
6. rez de chauss e en ouvrant la porte arri re celle qui donnait sur la campagne Godeli ve aper ut de fines traces de pieds nus sur la terre humide avant que l herbe ne couvre la prairie jusqu au bois 25 Quoi Elle s est enfuie Espac es ne gardant que la marque des orteils les empreintes montraient qu Anne avait profit de l incident du miroir pour franchir le seuil et courir l g re travers la campagne vers le bois o elle avait disparu
7. uvre que l astre avait entrepris de constituer dans la pi ce depuis l aube Pitoyable Ida Rustaude et but e Ida qui avec son large bas sin obsc ne d truisait un monument de beaut sans m me s en rendre compte Anne d cida de mentir Ida pourquoi ne profites tu pas des deux miroirs Mets toi ma place Puis s adressant sa tante et sa grand m re Je serais combl e si mes trois cousines b n fi ciaient aussi de ce cadeau Ida d abord interloqu e se rangea du c t d Anne et supplia les deux femmes Celles ci grimac rent puis touch es par la simplicit cordiale d Anne elles hoch rent la t te Hadewijch la plus petite se pr cipita sur le tabouret moi 19 Ida eut un geste d acrimonie pour emp cher sa s ur de la pr c der geste qu elle retint consciente qu elle devait garder une dignit d a n e De d pit elle chemina vers la fen tre Anne tait c ur e Ida continuait couper le rayon sans remarquer qu il montait sur sa poitrine sur sa figure Elle ne le sentait pas Quelle brute D couvrant Philippe dans la rue Ida sourit Un instant plus tard elle se renfrognait lest d u C est toi qu il cherche pas moi Les traits crisp s l il mort Ida d glutissait pein e Pench e vers elle percevant physiquement l paisseur de sa souffrance Anne tendit la main en direction de sa cousine et lui glissa Je te l aurais
8. alit avec des traits nets des couleurs vives On cria d admiration Les deux magiciennes re urent les compliments les yeux clos puis sans tarder accomplirent leur mis sion Tante Godeli ve se positionna en face d Anne grand m re Franciska l arri re de sa nuque chacune 11 tenant son instrument bout de bras l instar d un bouclier Solennelles conscientes de leur importance elles expliqu rent la jeune fille le mode d emploi Dans le miroir de devant tu apercevras celui de derri re Ainsi tu pourras te d couvrir de dos ou de profil Aide nous nous placer correctement Ida s approcha envieuse O les avez vous d nich s La comtesse nous les a pr t s Toutes applaudirent l astuce de l initiative seule une dame noble jouissait de pareils tr sors car les col porteurs ne proposaient pas ces articles aux gens du peuple trop pauvres Anne jeta un il l int rieur du cadre rond consi d ra ses traits intrigu s appr cia les savantes tor sades qui pliaient ses cheveux blonds pour laborer une coiffure raffin e s tonna d avoir un cou long des oreilles menues Cependant elle prouvait une impression bizarre si elle ne voyait rien de d plaisant dans le miroir elle n y voyait rien de familier non plus elle contemplait une trang re Sa figure invers e de face de c t ou de dos pouvait tre la sienne autant que celle d une autre elle ne lui
9. arpen teur Godeli ve fon a vers sa fille Ida l esquiva sans peur elle traversa la pi ce chassa sa cadette du si ge ordonna aux femmes Maintenant c est mon tour vitant de s embarquer dans un combat qu elle risquait de perdre Godeli ve enjoignit ses amies d ob ir l irascible Elle s approcha ensuite de sa ni ce Je suppose qu elle est jalouse de toi Anne Elle esp rait se marier la premi re Je le sais Je lui pardonne 21 Sa tante l embrassa Ah si mon Ida pouvait jouir de ton carac t re Elle ira mieux lorsqu elle obtiendra ce qu elle souhaite Un jour elle se d barrassera de la col re Puisses tu avoir raison fit Godeli ve en cares sant la tempe de sa ni ce En tout cas je suis triste et heureuse pour toi Triste parce que je te verrai moins Heureuse parce que tu as trouv un brave gar on Quand elle entendait la voix tranquille de tante Godeli ve dessiner son destin Anne reprenait cou rage et cessait de se poser des questions Rass r n e elle offrit son visage l air frais Sur le rebord du toit un papillon se jucha Ses ailes jaune citron l int rieur vertes l ext rieur oscillaient telle une respiration Venu se toiletter se croyant isol inconscient d tre surveill l insecte se frotta la trompe avec ses pattes ant rieures blouie Anne avait l impression que l animal captait toute la lumi re du
10. ciel dans ses cailles dor es la concentrant sur lui l emprisonnant en lui Il resplendissait rendait gris ce qui l entourait Qu il est beau dit Godeli ve en fr missant N est ce pas murmura Anne aux anges de partager cette motion avec sa tante patant confirma Godeli ve Oui je resterais des heures le regarder Godeli ve haussa les paules Anne c est ce que tu feras d sormais Tu en auras le droit Tu en auras m me le devoir Anne pivota vers sa tante interloqu e Celle ci insista 22 Tu seras lui mais il sera toi aussi Anne sourit Quoi Elle appartiendrait un papillon qui lui appartiendrait Quel tour extraor dinaire lui sugg rait on D cid ment c tait la meilleure nouvelle de la journ e Sa tante lui parlait en bonne f e des contes La physionomie de la jeune fille d vor e d impatience s illumina Godeli ve attendrie glissa ses paumes sur les joues de sa ni ce Comme tu laimes s exclama t elle Se retournant vers l ext rieur elle d signa une sil houette au loin Il faut avouer que son chapeau lui va bien Troubl e Anne suivit les yeux de Godeli ve et constata qu elle observait Philippe sur la chauss e lequel arborait un casque de feutre avec une plume Elle frissonna Je ne suis pas normale songea t elle Rien n allait plus travers la fen tre qui permettait de contem pler deux choses Phili
11. e l enchanta moins quoi lui aussi Voil qu il raisonnait comme sa cousine comme les gens qui l assommaient Pourquoi cette convention Spontan ment elle n gocia Ne crois tu pas que je puisse te rendre heureux sans t pouser Il s carta suspicieux Es tu ce genre de fille De quoi parles tu Parfois les gar ons montraient des r actions incom pr hensibles Qu avait elle dit de scandaleux Pour quoi fron ait il les sourcils en la d visageant Apr s une pause il sourit soulag de constater qu aucune malice ne se cachait derri re la proposition d Anne Il reprit Je souhaiterais me marier avec toi Pourquoi Tout homme a besoin d une femme Pourquoi moi Parce que tu me plais 16 Pourquoi Tu es la plus jolie et Et Tu es la plus jolie Alors Tu es la plus jolie Puisqv elle lavait sond sans coquetterie le compli ment n engendra nulle vanit en elle De retour chez sa tante ce soir l elle s interrogea seulement Jolie cela suffit il Lui beau moi jolie Le lendemain elle le pria d claircir sa pens e Pourquoi toi et moi Toi et moi avec nos physiques nous fabrique rons des enfants magnifiques s exclama t il Allons bon Philippe confirmait ce qu elle redou tait Il tenait un langage d leveur celui du fermier accouplant ses meilleures b tes afi
12. ilippe courtis dans l choppe de souliers o il travaillait apr s avoir r pondu aux saluts d Ida entreprit la conqu te d Anne lui offrit chaque matin une fleur r v lant sans vergogne Ida qu elle lui avait servi de marchepied pour atteindre sa cousine Face cette man uvre somme toute banale Ida avait con u davantage de d pit qu Anne de fiert Celle ci ne portait pas le m me regard sur les tres que ses compagnes alors que les demoiselles voyaient un clatant gaillard dans l apprenti cordonnier Anne apercevait un enfant qui venait de grandir haut per ch sur ses jambes surpris par ce nouveau corps qui se cognait aux portes Il l apitoyait Elle d celait en lui ce qu il tenait d une fille ses cheveux sa bouche tendre son teint p le Sous sa voix basse timbr e elle entendait au d tour d une inflexion dans l h sitation de l motion les chos de la voix aigu du gamin qu il 15 avait t Lorsqu elle allait au march en sa compa gnie elle contemplait en lui un paysage humain ondoyant instable qui se transformait et c tait cela surtout qu elle s attachait elle que passionnait la pousse d une plante Veux tu me rendre heureux Un jour Philippe lui avait pos cette question En rougissant elle avait r agi prompte sinc re Oui bien s r Heureux heureux implora t il Oui Sois ma femme Cette perspectiv
13. le Livre de Poche a le plaisir de vous proposer le premier chapitre de gt N le E MMAN SCHMIT La Femme au mir i a Le Livre de Poche remercie les ditions Albin Michel qui ont autoris la publication de cet extrait RIC EMMANUEL SCHMITT La Femme au miroir ROMAN ALBIN MICHEL Je me sens diff rente murmura t elle Personne ne pr tait attention ses mots Tandis que les matrones s agitaient autour d elle celle ci arrangeant un voile celle l une tresse cette autre un ruban alors que la merci re raccourcissait son jupon et que la veuve de l arpenteur lui enfilait des chaus sons brod s la jeune fille immobile avait l impression de devenir un objet un objet passionnant certes assez affriolant pour mobiliser la vigilance des voisines un simple objet cependant Anne contempla le rayon de soleil qui jailli de la fen tre trapue traversait la pi ce en oblique Elle sourit La mansarde dont ce jet d or trouait la p nombre ressemblait un sous bois surpris par l aube o les paniers de linge rempla aient les fou g res les femmes les biches Malgr les bavardages incessants Anne coutait le silence voler dans la chambre un silence trange paisible touffu lequel venait de loin et d livrait un message sous les jacas series des comm res Anne tourna la t te en esp rant qu une des bour geoises l avait entendue mais elle n attrapa aucun regard condamn e
14. n qu elles se multi plient Entre les humains c tait donc cela Pamour Rien d autre Si elle avait eu une m re pour en dis cuter Se reproduire Voil ce pour quoi les femmes qui Pentouraient affichaient tant d impatience M me Pindomptable Ida cette demande en mariage Anne songeuse ne r pondit pas L ardent Philippe lut un consentement dans cette placidit Avec ivresse il commen a annoncer leur union confiant son aubaine chacun Dans la rue on f licita Anne laquelle surprise ne d mentit pas Ensuite ses cousines la congratu l rent y compris Ida qui se r jouissait que sa s dui sante cousine dispar t du march des rivales Enfin 17 tante Godeli ve battit des mains jubilante les pau pi res d bordant de larmes apais e d avoir accompli son devoir emmener la fille de sa regrett e s ur jusqu l autel En face de cette me charitable pour viter de la d cevoir Anne pi g e se contraignit au mutisme Ainsi faute de d ni le malentendu prit les couleurs d une v rit Anne allait pouser Philippe Chaque jour elle trouvait plus farfelu que ses proches manifestassent un tel enthousiasme Persua d e qu un l ment essentiel lui chappait elle laissa Philippe s enhardir embrasser la serrer Tu n aimeras que moi rien que moi Impossible Philippe J en aime d j d autres Pardon Ma tante mes cousines grand m re Franci
15. ppe et un papillon la fianc e s attardait sur le papillon la tante sur le fianc Un hurlement retentit dans la pi ce Quoi Qu est ce que c est cette tache Assise sur le tabouret Ida bl missait de rage en pointant du doigt le miroir devant elle Craignant un acc s de rage grand m re Franciska retira le miroir arri re Il n ya rien Tu as cru voir quelque chose Il n y a rien Alors n enl ve pas la glace En tremblant l a eule repla a le miroir 23 Ida d tailla sur sa nuque la marque violac e que tout le monde lui connaissait qu elle seule ignorait Ah C est r pugnant Horrible Ida bondit du si ge cumante furieuse Surprise grand m re Franciska l cha ce qu elle tenait en main Choc au sol Bruits de verre Un silence constern commenta l clat sonore Le miroir tait bris Si le cadre d argent demeurait intact l int rieur il n y avait plus que des losanges disjoints qui affol s refl taient en d sordre des bouts pars de la chambre Franciska g mit Godeli ve se pr cipita Mon Dieu que va penser la comtesse Les femmes se group rent autour des morceaux comme elles auraient veill un cadavre Ida se mordait les l vres h sitante ne sachant sur quelle catastrophe elle devait pleurer sa dartre la nuque ou la glace d truite Elles d lib r rent mi voix d un timbre teint le souffle oppress convaincues
16. ska Un gar on Non Mais j en connais peu j ai manqu d occa sions Quand elle lui fournissait ces pr cisions il la consi d rait m fiant incr dule puis parce qu elle soute nait son regard sans ciller il finissait par clater de rire Tu me fais marcher et moi je galope Oh la vilaine qui meffraie Quelle rus e Tu sais te d brouiller toi avec un homme pour qu il s ent te qu il s entiche davantage qu il ne pense qu toi Saisissant mal son raisonnement elle n insistait pas d autant que dans cet tat de trouble il se collait elle l il brillant la l vre fr missante or elle prenait plaisir fondre entre ses bras elle appr ciait sa peau son odeur la fermet de son corps fi vreux plaqu e contre lui enivr e elle loignait ses doutes 18 Dans la mansarde une ombre s tira La densit de la chambre avait chang Anne sursauta Ida venait de fracasser le rayon lumineux La future mari e prouva une douleur au ventre comme si par un coup de poing sa cousine lui avait ouvert les entrailles Elle cria sur un ton de reproche Oh non Ida non La cousine s arr ta surprise sur la d fensive pr te griffer ignorant que ses jupons d chiraient le rai de soleil Quoi Qu est ce que j ai Anne soupira soup onnant qu elle n arriverait jamais lui expliquer qu elle avait lac r un tr sor pr cieux un pur chef d
17. subir leurs obsessions d cora tives elle douta d avoir bien prononc cette phrase Je me sens diff rente Que pouvait elle ajouter Elle allait se marier tout l heure pourtant depuis son veil elle n tait sensible qu au printemps qui d boutonnait les fleurs La nature l attirait davantage que son fianc Anne devinait que le bonheur se cachait dehors derri re un arbre tel un lapin elle voyait le bout de son nez elle percevait sa pr sence son invite son impatience En ses membres elle prouvait une d mangeaison de courir de rouler dans l herbe d embrasser les troncs d inspirer pleine poitrine lair poudr de pollen Pour elle l v nement du moment c tait le jour lui m me frais blouissant g n reux non ses pousailles Ce qui lui arrivait s unir Philippe s av rait d risoire par rapport cette splen deur avril qui affermit champs et for ts la force nou velle qui panou it coucous primev res chardons bleus Elle d sirait fuir ce r duit o se d roulait la pr paration nuptiale s arracher aux mains qui la rendaient plus jolie et se jeter nue dans la rivi re si proche l oppos de la crois e le faisceau de lumi re avait accroch en ombre la dentelle du rideau sur la chaux in gale Anne n oserait jamais troubler ce fascinant rayon Non lui annoncerait on que la maison br lait elle resterait fig e sur ce tabouret Elle fr mit
18. umi neux elle se pencha de c t et rep ra sur le pav gras Philippe la ga t aux l vres qui palabrait avec ses amis venus de Bruges Saint Andr village o logeait grand m re Franciska une lieue de la grande cit Oui v rifiant p riodiquement l ultime tage du logis il attendait fervent et guilleret Cela lui r chauffa le c ur Elle ne devait point dou ter Anne habitait Bruges depuis un an Auparavant elle n avait connu qu une ferme isol e au nord sous les nuages crasants au milieu des terres plates mal odorantes humides elle y avait v cu avec sa tante et 14 ses cousines son unique famille puisque sa m re tait morte en la mettant au monde sans r v ler l identit du p re Tant que son oncle avait dirig l exploitation elle ne s en tait jamais loign e au d c s de l oncle tante Godeli ve avait d cid de regagner Bruges o r sidaient ses fr res Non loin sa m re Franciska cou lait ses derniers jours Saint Andr Si pour Godeli ve Bruges avait repr sent un ras surant retour aux sources pour Anne Ida Hadewijch et B n dicte ses trois cousines cela avait consti tu un choc de campagnardes elles taient devenues citadines et de filles jeunes filles Ida l a n e d termin e vite lier son sort un homme avait abord les gar ons disponibles avec une fougue et une audace quasi viriles qui l avaient desser vie Ainsi Ph
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