L`usage et ses modèles : quelques réflexions méthodologiques
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1. domicile sur les c d rom de mus es puis dans une vari t de lieux publics sur les r seaux en milieu culturel sont apparues des dimensions de l usage qu il semble d sormais imp ratif de restituer dans la mesure o elles ancrent le ph nom ne non plus dans un univers purement discursif et individuel en r action tel objet particulier mais dans la dynamique de circulation tout la fois publique et priv e des savoirs sociaux Dans un premier temps dans la section qui va suivre nous reviendrons sur les m thodologies en partant des approches qui font d river l usage de l utilisation pour aller vers une prise en compte m thodologique de l usage comme repr sentation sociale Dans un second temps nous d taillerons des dimensions de l usage qui sont apparues au fil de nos propres tudes et qui remettent en cause la stricte d pendance des discours des objets empiriques particuliers c d roms bornes interactives sites Cette op ration se r alise non pas en faisant remonter en g n ralit les r sul tats de chaque tude portant sur tel objet particulier mais tout au contraire en faisant d pendre tr s troitement et tr s concr tement les usages non plus seulement des objets mais des contextes tr s pr cis dont ils font partie Par ailleurs nous d veloppons actuellement une perspective de recherche per sonnelle qui n en est qu ses d buts et dans laquelle nous souhaiterions cette fois d cadr2. l usage De ce point de vue les TIC sont consid rer moins comme des r alit s empiriques que comme une perturbation th matique des approches et des d coupages disciplinaires L objet NTIC pose videmment le probl me du pi ge que constitue l asservissement des probl matiques La mise en question croissante d une conception des savoirs comme contenus mentaux qui existeraient ind pendamment des situations sociales et des objets mat riels dans lesquels ils s incarnent est un mouvement quasi g n ral Mais les cons quences de cette mise en question n ont cependant pas fini d tre tir es aux plans th orique et m thodologique 106 L USAGE ET SES MODELES de recherche des enjeux politiques du moment mais cause de cela m me il oblige des d placements aussi bien en sciences de l ducation qu en sciences de l information et de la communication Il intervient plus g n ralement dans la dyna mique de toute approche en sciences qui tente de formuler des questionnements de recherche sur des articulations entre des niveaux individuels et collectifs entre des objets et des savoirs entre ce qui se perp tue et ce qui se transforme C est pourquoi les mutations dont nous parlerons dans cet article sont de ce fait bien moins celles des ph nom nes socio techniques objectifs si tant est qu on puisse jamais parler en ces termes que celles des approches d velopp es dans le champ des
3. on leur fournit ou qu on leur impose c est donc que ceux ci sont ter nellement justifi s La probl matique de l usage est peu peu amen e assumer des dimensions politiques et critiques pour chapper au reproche de faire le jeu du mar ch et de la d magogie lib rale Le chercheur est bien souvent oblig de fournir tout la fois les r sultats de l tude empirique des ph nom nes observables aupr s des usagers et le commentaire critique ou politique qui les relativiserait aussit t La tradition de l analyse critique des prises de position crites ou orales d acteurs publics et les analyses empiriques fond es sur le recueil du discours des acteurs ordinaires n en continuent pas moins de s affronter d s lors qu elles reprodui sent au sein m me des cultures disciplinaires l impossible confrontation qu elles tentent de d passer Les logiques politiques de la promotion ou de la prescription des usages sont analys es sur des plans fondamentalement h t rog nes aux logiques d usages Les premi res font de pr f rence appel des analyses de discours m diati ques ou de strat gies industrielles et conomiques Les secondes privil gient les tudes fond es sur le recueil des comportements et discours aupr s des usagers indivi duels La divergence est parfois purement m thodologique mais elle g n re de toutes fa ons des d saccords insurmontables lorsqu il s agit de mettre en co
4. avec la mont e d un champ de l ducation dite informelle ainsi nomm par opposition au champ de l ducation formelle en milieu acad mique les m dias et les nouvelles technolo gies de l information et de la communication NTIC ont constitu de nouveaux terrains et de nouveaux objets pour des recherches sur les apprentissages et les modes de circulation des savoirs Il se trouve que m dias et TIC sont galement des terrains et objets privil gi s en sociologie et en sciences de l information et de la communi cation o la notion d usage occupe une place tr s importante pour d signer les rap ports la fois sociaux et techniques qui s tablissent entre les individus ou groupes sociaux et les objets techniques L irruption continuelle de nouveaux objets techni ques sur le march a largement contribu au d veloppement de la recherche sur les logiques de l usage et le rapport l innovation Or la sociologie des techniques croise videmment de son c t des questions li es l apprentissage et la construc tion sociale des savoirs les points de convergence entre les approches centr es sur la construction sociale des savoirs et les approches centr es sur le rapport la tech nique sont tr s nombreux SPIRALE Revue de Recherches en ducation 2001 N 28 J LE MAREC L entr e par les nouvelles technologies du moment les c d roms les r seaux lectroniques ne
5. Girault et P Cl ment dir Conceptions et connaissances 7 38 Berne Peter Lang DAVALLON J LE MAREC J 2000 L usage en son contexte Sur les usages des interactifs et des c d roms des mus es R seaux 10 JODELET D 1984 Les repr sentations sociales ph nom nes conceptions et th ories in S Moscovici dir Psychologie sociale Paris PUF JOUET J 1997 Pratiques de communication et figures de la m diatisation des m dias de masse aux technologies de l information et de la communica tion in P B aud P Flichy D Pasquier L Qu r eds Socio logie de la communication Paris CENT LE COADIC Y 1997 Usages et usagers de l information Paris Nathan LE MAREC J 1996 Ecran du regard regards l cran in L Gervereau ed Peut on apprendre voir Paris L image ENSB LE MAREC J 1998 Interactivit et multim dia lieux communs revisit s par l usage Rencontres M dias 2 Paris ditions du centre Georges Pompidou collection la BPI en Actes MOSCOVICI S 1961 La psychanalyse son image et son public Paris PUF r ed 1976 PERRIAULT J 1989 La logique de l usage essai sur les machines communi quer Paris Flammarion TOUSSAINT Y MALLEIN Ph 1992 Diffusion m diation usages des techno logies de la communication et de l information Culture Technique 24 VITALIS A ed 1994 M dias et nouvelles
6. clinaisons et l engagement d viter la pr d termination des enjeux de recherche par la d fense du p le mineur au plan scientifique et au plan social METHODOLOGIES D APPROCHE DES USAGES DE L UTILISATION DES OBJETS TECHNIQUES AUX REPRESENTATIONS SOCIALES S agissant d un champ culturel et m me comme dans le cas des biblioth ques hyper culturel il est impossible de r f rer l tude des usages et de leurs signi 6 Voir J Jouet 1997 Pratiques de communication et figures de m diation des m dias de masse aux technologies de l information et de la communication in Sociologie de la communication sous la direction de P B aud P Flichy D Pasquier et L Qu r R seaux Centre National d Etudes des T l communications Paris 7 Les sociologues de la lecture n ont cess de souligner le fait que la lecture incarnait la pratique culturelle savante par excellence ce qui joue videmment dans l interpr tation que les individus ont de 111 J LE MAREC fications aux seuls objets ou dispositifs techniques tudi s lecture s miologique de ces objets et analyse de leur insertion dans les pratiques individuelles des usagers comme cela a pu tre le cas dans l tude des technologies de la communication dans la vie quotidienne le t l phone le minitel mais aussi le lave linge le four micro ondes etc Le champ culturel est en effet tout la fois le champ de l activation des re
7. comme tant in fine enti rement structur et orient par des rapports de pouvoir et la vision de la circulation des savoirs comme tant galement structur e par des rapports de trans mission Le fait m me de traiter la question des usages par la construction de la figure de l usager tre incarn sensible et pensant socialement comp tent et repr sent par sa propre parole digne d int r t en tant que telle est aussi un moyen de 110 L USAGE ET SES MODELES promouvoir la d fense de la position du plus faible la question des usages est prise encore une fois dans un sch ma qui est en fin de compte soit un mod le de rap port de pouvoir soit un mod le de transmission infiniment d clin M me si l usage est d sormais largement vu comme tant le fait d allers et retours tr s complexes entre des logiques de production et des logiques de r ception il s agit au fond toujours d allers et de retours c est dire d un simple amendement du mod le lin aire et donc de son renforcement La red finition des ph nom nes li s l usage comme tant des articulations entre logiques techniques et logiques sociales ouvre de nouvelles perspectives mais trop souvent le mod le lin aire travaille encore en sous main cette reformulation Il appara t n cessaire de d velopper la r flexivit des approches pour chapper ce probl me notamment par l analyse sur de longues dur es des travaux em
8. d autre part On peut galement l tudier pour la part que la nouveaut peut prendre dans les r ticences ou tout au contraire dans des dynami ques volontaires de cr ation port es par l acceptation d une certaine perte de ma trise et impr visibilit de ce qui peut advenir du fait de la mise en acc s des nouvelles technologies En effet ces technologies sont souvent l occasion de r formes d j plus ou moins annonc es depuis longtemps dans l ensemble du dispositif d acc s et de m diation que constitue une biblioth que Elles sont l occasion d une reconstruc tion plus ou moins volontaire des contextes d intervention professionnelle o la part de cr ation se paie d une part d impr visibilit souhait e ou redout e Techniques de l usage L usage a souvent t d sign comme un bricolage construit des fins tacti ques en r action ici et maintenant l impact d un nouvel environnement ou d un nouvel objet la dimension strat gique tant r serv e la sph re de la production Les activit s manipulatoires peuvent tre lues autrement que comme des fa ons de se d brouiller avec des objets techniques Elles peuvent tre elles m mes consid r es comme des techniques invent es et mises au point par les acteurs pour fabriquer quelque chose avec les technologies que ce soit pour soi m me ou pour d autres que soi On pourrait prendre un exemple de ces techniques dans l utilis
9. le probl me central reste la th matisation du mat riel discursif recueilli Si ce qui est dit par les usagers est rapport prioritairement aux objets techniques on rapportera par exemple ce qui est dit par les visiteurs dans des enqu tes sur le minitel l informatique les c d roms des repr sentations du minitel de l informatique des c d roms l usage qui est saisi travers l observation et les discours est implicite ment une actualisation de la repr sentation sociale de l usage de telle ou telle ma chine Plus on assimile l usage au ph nom ne des repr sentations sociales moins il est pertinent de pr th matiser les discours On peut en quelque sorte l cher le guidon des manifestations objectives comme la manipulation des objets pour tester ce que 114 L USAGE ET SES MODELES cela fait de r ellement prendre au s rieux l hypoth se selon laquelle les usages sont des savoirs sociaux dont il faut d couvrir le sens sans le pr constituer par la r f rence l objet C est essentiellement dans le mode d interpr tation des discours recueillis que se joue le changement de r f rence Les r sultats ne mettent plus forc ment en prio rit ce qui concerne l objet pour ensuite s int resser l ancrage social des rapports l objet On peut tenter de rep rer quels sont les th mes des discours des enqu t s sans les r f rer syst matiquement l objet qui int resse initialement le c
10. rendre n cessaire par des cheminements diff rents aux plans m thodologiques et th oriques l articulation pr cise et d taill e des savoirs des objets et des pratiques Ce qui est en jeu en fin de compte est bien un recadrage th orique des ph nom nes socialement pr d termin s comme relevant initialement soit de l ducation soit du rapport aux objets techniques Jo lle LE MAREC Ecole Normale Sup rieure Lyon 14 Martinand J L 1994 La didactique des sciences et de la technologie et la formation des en seignants Aster 19 Chevallard Y 1985 La transposition didactique du savoir savant au savoir enseign Grenoble La Pens e Sauvage Triquer E 1993 Analyse de la gen se d une exposition de science Th se Universit Claude Bernard Lyon 1 121 J LE MAREC Abstract We try here to discuss how research about the uses of technologies moved in the last years from questions like do we learn better with technologies Or how technologies determine evolutions of society to other questions about com plexity of construction of social knowledge Qualitative research based on a diversity of local situations for example what happens in musems in libraries at home was very important in this evolution Key words Users activity social representation technology museum cdrom network Bibliographie CLEMENT P 1994 Repr sentations conceptions connaissances in Giordan Y
11. repr sentations sociales et des pratiques D une certaine mani re les mutations sociales n ont jamais tre postul es comme telles dans le champ scientifique dans la mesure o elles ne constituent pas des ph nom nes observables mais des interpr tations a posteriori Elles peuvent au mieux tre saisies en tant que repr sentations inspirant les comportements et les interpr tations des acteurs qu ils soient usagers ou cher cheurs A ce titre elles g n rent certes des volutions dans la recherche elle m me et ce sont ces volutions qui engagent la n cessit d tre r fl chies ici et maintenant USAGES NOTION PLASTIQUE AFFAIRE DE CADRAGE Depuis quelques ann es quantit de travaux ont approch le ph nom ne de l insertion sociale des nouvelles technologies de l information et de la communica tion par des voies tr s vari es Les diff rences tiennent bien s r comme toujours des traditions disciplinaires Par exemple pour caricaturer les choses la sociologie tudierait plut t l insertion progressive des usages dans des pratiques sociales l chelle de populations l anthropologie privil gierait l exploration au cas par cas des comportements et des significations attach es la conception et l usage de ces technologies les sciences de l information et de la communication tenteraient de mettre au point des approches int grant la complexit des ph nom nes dans leur dimension comm
12. technique au sens d une combinatoire complexe entre la technique d utilisation de l objet technique la technique de ma trise de nouvelles situations la technique du regard En ce sens les techniques comme dimensions constitutives de l usage sont bien des repr sentations sociales elles aussi 119 J LE MAREC REEVALUATION DE QUELQUES PROBLEMES gt METHODOLOGIQUES La pertinence scientifique et sociale des recherches empiriques portant sur les ph nom nes li s l usage est continuellement discut e Sont souvent d sign s trois probl mes le d placement continuel de la notion dans le large spectre des repr senta tions sociales comme ph nom nes situ s entre mythes et comportements la question de la difficile mont e en g n ralit des tudes empiriques qui constituent un fonds dont la taille croissante et la richesse g n rent des attentes tou jours d ues de synth ses globales la vari t des contextes dans lesquels est formul e la demande de connaissan ces sur l usage recherche institutions culturelles conception etc A notre avis les trois probl mes pr c dents constituent presque les indices au plan m thodologique du fait que l on n ose jamais aller assez loin dans le lien tr s fort qui existe entre usages et repr sentations sociales Ils d signent pourtant trois pistes int ressantes qui encouragent penser encore plus les usages comme repr sen tations et qui
13. technologies pour une sociopoliti que des usages Rennes Apog e 122
14. technologies La prise en compte de l objet comme tant toujours un projet est centrale elle structure une articulation possible entre la 2 Voir le Marec 1998 116 L USAGE ET SES MODELES r action des personnes aux discours d accompagnement et leur implication toute personnelle par rapport leurs propres int r ts et leur propre histoire En tant que possesseur de c d rom par exemple on est enr l d une mani re ou d une autre dans un projet culturel et soci tal et il n est pas impossible que cette qualification de l objet comme projet social g n ral contribue structurer l usage personnel comme tant lui m me un projet d usage On peut ainsi d ores et d j s appuyer sur certains des r sultats d une tude sur les c d roms culturels montrant la puissance des logiques de projet et la mani re dont elles d terminent le rapport l objet et son contenu Le projet d usage s articule un projet de vie comme dans le cas de retrait s ais s qui sont dans des d marches d auto formation tr s ambitieuses et de requalifica tion de l ensemble de leurs liens sociaux familiaux associatifs institutionnels par le biais de nouvelles pratiques mais aussi dans le cas de jeunes actifs pouss s associer de plus en plus leurs engagements professionnels et leurs investissements personnels avec un degr d exigence tr s fort dans la recherche d une coh rence glo bale qu ils at
15. Jo lle LE MAREC L USAGE ET SES MODELES QUELQUES REFLEXIONS METHODOLOGIQUES R sum Cet article tente propose de discuter de la notion d usage sur la base suivante la notion d usage s est d velopp e en sciences humaines dans un contexte tr s particulier celui de la r sistance une lecture de l insertion sociale des nouvelles technologies en terme de ph nom ne socio conomique et de rapports de pouvoir Les d marches tr s qualitatives centr es sur les pratiques sur la construction des significa tions et des savoirs se sont multipli es ces dix derni res ann es La notion de repr senta tions sociales est selon nous au c ur de ce mouvement elle place les ph nom nes li s l usage dans le champ des savoirs sociaux Pourtant les implications du recours la no tion de repr sentations sociales n ont pas toujours t pouss es dans leur logique on le sent clairement dans le d tail des tudes empiriques qui ont t men es sur les TIC en mi lieu mus al Cette notion d place selon nous la mani re d aborder les usages partir de questions propres des disciplines elle ouvre sur la complexit des ph nom nes de circu lation des savoirs sociaux Mots cl s usages repr sentations sociales technique mus es c d roms r seaux communication La notion d usage est assez peu associ e traditionnellement des probl ma tiques didactiques Mais depuis les ann es quatre vingt
16. MAREC Les concepteurs multim dia de leur c t laborent parfois des outils de travail int grant des ann es d une r flexion qui rel verait de la recherche si elle tait d ve lopp e au sein d un institut de recherche L valuation a galement t tr s largement sollicit e t moignant dans ce champ au moins de la l gitimit des d marches mixtes qui brouillent largement logiques d action et logiques de r flexion A l inverse nombre de chercheurs sont totalement engag s dans des exp rimentations techniques ou dans de la conception la m diation ou l usage de ces technologies multim dia La probl matique des usages tout la fois souffre et b n ficie de ce dyna misme tr s particulier de la r flexion et de l initiative qui touche tout ce qui concerne les nouvelles technologies de l information et de la communication Elle en souffre du fait du soup on permanent de collusion entre la recherche et les instances de pro duction mais elle b n ficie de la confrontation permanente des questions de recherche et des objectifs institutionnels En particulier un des principaux probl mes pos s par l tude des usages r side dans la grande difficult de choisir parmi l infinit des questions possibles celles dont on devra faire l hypoth se qu elles s av reront en fin de compte les plus pertinentes et les plus stimulantes pour la r flexion et ou pour l action sachant qu il n y a pas
17. affronter l inversion entre les ph nom nes objectifs et les repr sentations dans la conception m me de toute la recherche sur la question Ce ne sont plus seulement les objets qui constituent la r alit de r f rence mais l univers des repr sentations en tant qu occurrences concr tes dans les discours et les pratiques de savoirs et d imaginaires qui sont en circulation permanente Les repr sentations largement impr visibles et difficiles cerner constituent la r alit de r f rence des usages lesquels se manifestent partiellement par des ph nom nes objec tifs observables De ce point de vue les objets techniques en fonctionnement au sens le plus large sont eux m mes des l ments constitutifs des syst mes de repr sentations A c t des tudes bas es sur l observation d utilisateurs face l cran la so ciologie des usages a consid rablement d velopp les approches par entretiens longs qui permettent de contextualiser un rapport la machine dans des corps de pratiques et des syst mes de repr sentations Rappelons ici pour m moire que les repr senta tions sociales ont t d finies par Moscovici 1961 comme des savoirs sociaux la charni re de l individuel et du collectif qui sont produits et mobilis s au cours d interactions et dans des processus de communication et qui ont une vis e pratique L entretien est une technique privil gi e pour saisir ces ph nom nes Cependant
18. ans leur projet les travaux sur la r ception et les travaux sur la production sont effectu s avec des approches et des enjeux scien tifiques diff rents La confrontation m thodologique est rarement possible de ce fait m me comment comparer par exemple des donn es empiriques sur les usages so ciaux et des analyses de discours d accompagnement suppos s repr senter les strat gies de conception Les tudes d usage accordent souvent en effet un r le central l analyse des discours de personnes saisies dans des contextes o ils sont utilisateurs d objets tech niques Les ph nom nes li s l usage sont associ s presque irr sistiblement des discours d usagers en proc dant pr f rentiellement de cette mani re on contribue rel guer l usager dans un p le final en bout de cha ne puisqu il ne produit plus rien que du discours M me si on pr suppose que ces discours vont de pair avec des com portements sociaux et des pratiques qui circulent hors de la sph re priv e les paroles dites l enqu teur ne p sent objectivement d aucun poids elles ne sont porteuses d aucune tension ou d aucun risque qui les rendrait actives dans un autre contexte que celui de leur traitement par la recherche Cette condition de l usager comme tant statutairement pour la recherche un producteur de discours concernant un objet est selon nous un artefact des tudes d usage Elle a t absolument n ces
19. ation que font de la fonction loupe ou d tails propos e par de nombreux sc narios les utilisateurs observ s dans une vari t de situations et de contextes borne interactive Orsay c d roms de peinture consult s chez soi ou dans la librairie du Louvre On peut en effet mettre en relation des variantes multiples de cette fonction comme technique du regard mat rialis dans son trajet l cran depuis le simple parcours de l image reproduite l cran au moyen de la souris utilis e comme pointeur jusqu la plong e dans l image active au moyen de cette m me souris dans des c d roms o les images sont enti rement num ris es Si on peut parler de technique du regard c est dans la mesure o les personnes interrog es ont pratiqu et compar plusieurs propositions dans les c d roms et acquis une technique de cette technique Ils ont dans le cas des visiteurs de la librairie du Louvre per u le caract re d sormais obligatoire de cette fonction propos e l utilisateur et s en servent pour valuer les c d roms d art Ainsi sont bien distingu s les c d roms o l on propose des agrandissements de certaines parties d images de tableaux en cliquant sur une s lec tion pr constitu e de zones actives les c d roms o l image du tableau est enti re ment active les c d roms qui proposent une fonction zoom La technique au sens de mode d emploi cache finalement la
20. cle de la Librairie ou encore de nombreuses livraisons du Bulletin des Biblioth ques de France sont caract ris tiques de probl matiques de recherche d velopp es dans des cadres institutionnels des enjeux impor tants pour la dynamique et l action professionnelles Pour un r investissement des tudes d usages dans la r flexion professionnelle sur les pratiques in formationnelles voir Le Coadic Y 1997 Usages et usagers de l information Paris Nathan 3 A la Cit des Sciences encore le d partement Audiovisuel et Informatique des expositions exp rimente continuellement la conception de produits interactifs innovants Des bornes interactives comme Le Livre d Or des sites sur r seaux lectroniques en ligne comme Conter ensemble ou masques une collection virtuelle cherchent ainsi inventer des interactions qui sortent du mod le de la transmission institution gt public Il s agit par exemple de favoriser et de l gitimer du m me coup des relations horizontales entre visiteurs ou bien de cr er des relations publics institutions pour l laboration de contenus culturels collectifs ou bien encore de contribuer la cr ation d une commu naut de personnes li es par un int r t th matique culturel transcendant les cat gories de publics et de professionnels Voir notamment Vitalis A ed 1994 M dias et nouvelles technologie pour une sociopolitique des usages Renne
21. constitue en r alit qu un art fact un point de d part dans le regroupement et la caract risation d un ensemble de ph nom nes h t rog nes impliquant le recours des dispositifs techniques L obligation de s int resser aux TIC cr e un effet de nouveaut li la focalisation de la recherche sur des ph nom nes qui tout simplement n attiraient pas forc ment l attention auparavant Le caract re de nouveaut est bien plus souvent dans l attention que les chercheurs accordent tel objet que dans cet objet lui m me Nous allons dans cet article aborder la notion d usage telle que nous l avons saisie tout au long d un parcours de recherche de plus de dix ans dans laquelle elle est intervenue de multiples reprises Nous proposerons de r fl chir cette notion partir d un concept qui a jou un r le tr s important dans le champ de la didactique et dans le champ de la communication les repr sentations sociales Dans chacun de ces champs les repr sentations sociales ont t comprises tr s diff remment ce que nous tenterons galement d analyser en conclusion Avec le recours la notion d usage l individu n est plus avant tout saisi comme sujet pist mique c est dire sujet apprenant face des savoirs constitu s comme repr sentations mentales l attention est focalis e sur les savoirs socio techniques qu il mobilise pour acc der des savoirs Ceux ci continuent cepe
22. er l usage non plus seulement par rapport aux objets techniques empiriques d une tude des usages des c d roms de mus es Voir Le Marec J 1993 L interactivit ren contre entre visiteurs et concepteurs Publics et Mus es 3 Goldstein B Le Marec J Topalian R Pouts Lajus S 1996 Interactifs fonctions et usages dans les mus es Paris Direction des Mus es de France Le Marec J 1997 Le multim dia dans les mus es valorisation du singulier et repr sentations du tout in ICHIM 97 Actes de la 4e conf rence internationale sur les hyperm dia et l interactivit dans les mus es Archives museum informatics Europe Mus e du Louvre Paris 3 5 septembre 1997 Davallon J Gottesdiener H Le Marec J 1997 Approche de la construction des usages des c d roms culturels li s aux mus es Paris Direction des Mus es Nationaux et R union des Mus es Nationaux Saint Etienne CEREM Universit Saint Etienne 10 T s agit d une recherche en cours en r ponse un appel d offre de la BPI et de la DLL sur les pratiques de lecture criture li es aux r seaux coordonn e par Davallon Despres Lonnet Jeanneret Le Marec et Souchier Dans ce cadr Igor Babou et moi m me effectuons une tude sp cifique sur les pratiques li es aux r seaux dans une biblioth que partir des discours et des objets textuels recueillis aupr s des personnels et des usagers 113 J LE MAREC mai
23. es deux ensembles de r sultats n est pas seulement une diff rence entre deux dispositifs techniques et une diff rence entre deux lieux qui seraient r percut es sur ce que font les gens et ce qu ils pensent qu ils font Ce que font les gens et ce qu ils disent qu ils font rendent apparentes des articulations tr s troites entre les dispositifs les lieux et les situations un peu comme les anamor phoses multipolaires changent la vision d une carte en y int grant concr tement la valeur de ce qui y est vu Par exemple c est par le biais des usages des interactifs que les espaces d exposition la cit des Sciences et de l Industrie sont apparus pour la premi re fois comme tant des environnements bien r ellement communicationnels parce que les utilisateurs de bornes interpr taient leur propre activit dans ce contexte comme tant des activit s de communication ils interpr tent leur propre activit comme tant un contenu au sens p dagogique et culturel le plus perti nent des contenus dans la mesure o il s articule directement ce que les concep teurs ont voulu me faire faire Il en va tout autrement pour les c d roms consult s chez soi qui sont tr s ra rement vus comme des moyens de communication avec des auteurs mais comme des 1 J ai d velopp ces aspects dans ma th se Voir Le Marec J 1996 Les visiteurs en repr sen tations l enjeu des valuations pr alables en mus olog
24. forc ment possibilit d int grer les deux d marches mais qu inversement elles ne sont pas n cessairement oppos es la r flexion serait du c t de la recherche tandis que l action serait du c t du sens commun Plusieurs auteurs dans le champ des sciences de la communication et de l information traitent de cette difficult anticiper les bonnes questions dans le cas de ph nom nes qui sont v cus de trop pr s pour pouvoir en d gager les enjeux r els Certains s emploient tenter d organiser l ensemble du champ en classant les d mar ches selon qu elles sont centr es sur la r ception ou bien sur la production Ils s efforcent de mettre ces approches en perspective les unes par rapport aux autres mais ils sont oblig s pour ce faire de quitter le champ des ph nom nes observables tion aventures en science p 301 320 in Science en Biblioth que sous la direction de F Agostini Paris Le Cercle de la Librairie Des m diath caires sont parfois continuellement en situation de susciter et d exp rimenter de nou veaux modes de relations aux publics dans des secteurs th matiques sensibles comme la sant Pour ce qui concerne les publications la collection Etudes et Recherche de la BPI du centre Geor ges Pompidou ou bien collection Biblioth ques des ditions du Cercle de la Librairie par exemple Rouhet M 1996 Les nouvelles technologies dans les biblioth ques Paris ditions du Cer
25. hercheur un c d rom un ensemble de sites etc On aboutit parfois la d couverte de nouveaux objets L objet de l usage peut alors tre une petite partie de l objet mat riel pr d fini par le chercheur comme tant l objet technique dont il est question ou bien un ensemble mat riel plus large ou un mixte de composants mat riels et spatiaux le PC des fragments de c d roms des dossiers imprim s etc C est ainsi que le contexte de l usage et les techniques d velopp es par les personnes ont finalement chang de statut au fil de mes propres tudes d usages des nouvelles technologies en milieu culturel Le contexte n est pas un environnement objectif ventuellement filtr par les repr sentations sociales dans lequel prendraient place les ph nom nes de l usage tels qu ils se manifestent par des comportements et des discours en situation Il est un contenu de repr sentations En analysant la mani re dont les usages sont li s des contextes j ai t amen e basculer le point de vue dans la mesure o les usages peuvent tre vus comme des repr sentations en actes qui s actualisent dans des situa tions qu elles contribuent cr er orienter ou modifier le contexte est une partie int grante de l usage On le voit particuli rement dans la comparaison entre usages d interactifs dans les espaces d exposition et usages de c d roms de mus es chez soi La diff rence entre l
26. ie Universit de Saint Etienne 115 J LE MAREC objets enti rement priv s Plusieurs facteurs entrent en jeu dans ce d calage le changement de contexte bien s r au mus e ou chez soi la nature des objets bornes informatiques et c d roms et la nature des contenus sc narios souvent r alis s dans un contexte de diffusion des sciences dans un cas navigation dans des fonds manant de mus es de collections dans l autre cas Toutes ces diff rences sont articul es dans des configurations complexes o les choses vont ensemble bien plus qu elles ne sont la cause ou l effet On aboutit une inversion possible le probl me de la mont e en g n ralit des r sultats de recherche sur les usages tudi s pour une grande vari t d environne ments de lieux de dispositifs peut se r soudre bien autrement qu en attendant ind finiment de voir appara tre ce qui serait transversal et permanent au del des cas de figures multiples On peut tout au contraire au fil des recherches faire l hypoth se que les usages sont une notion qui permet de voir la construction des contextes so ciaux en tant que repr sentations sociales int grant des l ments mat riels et situa tionnels La mont e en g n ralit se fait sur la port e de la notion comme vari t des repr sentations sociales int grant des comportements et des savoirs mais aussi n cessairement pour de vrai en quelque sorte des objet
27. la tions entre sens et savoir et le champ de l activation des relations de l individu des collectifs de r f rence L importance de ces deux dimensions dans le champ culturel les contenus et les rapports entre le collectif et l individuel permet d viter la tenta tion de hi rarchiser les ph nom nes de l usage en les tudiant d abord en termes de rapports la technique pour ne s int resser qu ensuite l appropriation de contenus L usage peut tre envisag comme la mani re dont s incarnent mat riellement des relations au savoir Cette perspective est d autant plus int ressante qu au sein des institutions culturelles du point de vue m me des concepteurs dans des domaines o sont en jeu des ph nom nes de circulation des savoirs et communications sociales il est impos sible de penser les usages en termes de simples rapports la technique ou ph nom nes de r ception Qu il s agisse des dispositifs cr s par des concepteurs pour des usagers ou de situations de communications interpersonnelles directes entre des repr sentants de l institution qui mettent en circulation des technologies et des mem bres du public qui les acqui rent ou en disposent dans des lieux d di s les ph nom nes sont bien trop difficiles mod liser selon les sch mas de la transmission ou mod le offre demande Il serait mal venu que la recherche projette sur les logiques institutionnelles d organisation ou de pr
28. mmun et d utiliser les travaux ainsi r alis s En effet les premi res prennent leurs distances par rapport aux discours produits par les acteurs tandis que les secondes convoquent largement le discours des usagers sur le terrain Les usages restent naturellement cal s du c t de la r ception du fait m me de ces clivages th oriques et m thodologi ques qui reproduisent finalement une structuration pr existante conomique et so ciale Ce qui est reproduit sans cesse dans ces pr f rences est une opposition bipo 5 En France en particulier depuis Michel de Certeau les usages ont t tr s vite tudi s en rela tion avec les pratiques culturelles au sens anthropologique en tant que ph nom nes directement int ressants par eux m mes m me si leur port e s est toujours limit e la sph re des passions et des sociabilit s priv es des tactiques et des ruses Voir Perriault J 1989 La logique de l usage Essai sur les machines communiquer Paris Flammarion Toussaint Y Mallein Ph 1992 Diffusion m diation usages des technologies de la communication et de l information Culture technique 24 109 J LE MAREC laire logique offre logique technique logique conomique d une part logique d usa ge logique sociale sph res des int r ts priv s d autre part Les tudes d usages ont pu ainsi contribuer r ifier la partition qu elles met taient pourtant explicitement en cause d
29. moins implicites des missions institutionnelles de la bi blioth que publique pris en charge et discut tous les niveaux par les personnels celui des usagers eux m mes sur leurs propres aspirations et leurs propres valeurs plus ou moins disponibles pour prendre en charge ou jouer le jeu d une utopie collective Ils l assument alors soit directement soit en la raccrochant des aspirations individuelles Celles ci peuvent par exemple tenter de recr er des liens sociaux transcendant les classes et les groupes de r f rences classiques multiplier les secondes chances et acc der tout moment des opportunit s de changer d tat de condition de destin personnel etc Le contexte intervient alors tr s fortement dans la mise en place de l articulation entre l individuel et le collectif On l a vu avec la comparaison des bornes mus ographiques et des c d roms culturels il peut parfois y avoir un changement radical dans la nature de ce qui est fait l cran selon que l on se trouve dans un lieu public ou chez soi Cette importance du contexte est probablement galement importante dans la construction de l offre On peut l tudier pour les d terminations que les cultures professionnelles et institutionnelles font peser sur la conception multim dia d une 118 L USAGE ET SES MODELES part et sur l am nagement de modes d acc s et de formes de m diation impliquant ces nouvelles technologies
30. ndant tre pos s comme des repr sentations mentales mises en forme sur des supports mat riels le plus souvent des documents Par exemple on se demandera comment l individu se repr sente les ph nom nes de digestion dans le but de lui proposer de nouvelles repr sentations mentales du ph nom ne Mais si ces ph nom nes sont abord s par le biais d un didacticiel on consid rera que la manipulation de ce dernier est un pr alable oblig l appropriation de la proposition p dagogique l individu apprenant sera d abord utilisateur de dispositifs p dagogiques il devra utiliser de mani re plus ou moins autonome des dispositifs et mobiliser pour ce faire une culture technique et m diatique la ma trise du dispositif appara tra comme un pr alable n cessaire l apprentissage C est l une premi re entr e de la logique de l usage dans le champ ducatif par la sociologie des techniques et des sciences de l information et de la communication De leur c t les recherches sur les usages des TIC ont tir parti d un largis sement des enjeux bien au del des questions li es au rapport l innovation techni que Les questions li es l apprentissage l activation des savoirs et leur cons truction leurs modes de circulation et leurs ancrages locaux multiples dans des situations de communications sociales sont continuellement r activ es dans toute observation ouverte des ph nom nes li s
31. oduction un simplisme qui n existe plus gu re que dans les discours d accompagnement lesquels ne repr sentent qu eux m mes C est par leur importance pour la compr hension de la mani re dont s actualisent des communications sociales structur es et les processus de construc tion des significations que les usages peuvent tre sortis du p le mineur de la sociabilit priv e et des repr sentations sociales prises comme conceptions na ves Dans une s rie d tudes men es sur le multim dia culturel dans les mus es le croisement des regards individuels de professionnels sur les logiques de conception institutionnellement cadr es par des objectifs ducatifs et des regards individuels d usagers sur les logiques d usages nous a permis de montrer que ce niveau tout au moins les logiques d usages int grent un rep rage et une reconnaissance des intentions de conception partir desquelles ils se construisent tandis que sym tri quement les logiques de conception se fondent partiellement au moins sur une anti cipation constante des usages suppos s Il suffit de saisir les unes et les autres par toutes les pratiques li es au livre la lecture aux biblioth ques Voir notamment les contributions de Martine Poulain Jean Fran ois Barbier Bouvet et Michel Peroni Poulain M ed 1993 Lire en France aujourd hui Paris ditions du Cercle de la Librairie 8 C est le cas de la cit des Sciences e
32. our une notion qui ne peut tre que toujours en construction L usage pourrait de ce point de vue tre un concept instrument un concept catalyseur pour continuellement mettre en question et rouvrir des cat gories qui se figent tou jours trop vite le contexte par exemple et les techniques 120 L USAGE ET SES MODELES CONCLUSION Si l on revient notre point de d part c est dire l importance de la question des usages dans les probl matiques ducatives on peut faire appara tre un d place ment progressif des raisons qui ont motiv le recoupement usages ducation c est en premi re approche une injonction sociale externe l int r t oblig pour tout ce qui concerne les nouvelles technologies qui a op r une articulation entre les questions d apprentissage et d appropriation individuelle et sociale des savoirs d une part et les usages vus comme des rapports oblig s des dispositifs techniques de diffusion des savoirs d autre part Mais de mon point de vue et partir de la r flexion m thodolo gique et th orique que j ai pu d velopper sur les usages depuis de nombreuses ann es cette premi re articulation purement th matique a fourni l occasion de creuser un concept qui est commun depuis longtemps aux chercheurs en ducation et aux socio logues des usages et qui est retravaill en profondeur la faveur de ce croisement d approches les repr sentations sociales Les repr sentations
33. permettent de plus de se servir des usages pour enrichir le concept de repr sentations En premier lieu la plasticit de la notion d usage est en soi int ressante le d placement entre mythes les imaginaires et comportements les manipula tions observables n est difficile penser que s il est mod lis comme un ni me sch ma lin aire qui irait de la surface des observables aux couches profondes des logiques inconscientes L usage est int ressant justement condition de ne pas tre son tour d compos en strates sur un mode analytique Il n est int ressant que s il manifeste lui m me en permanence le fait que les ph nom nes qu il d signe sont des mixtes qu on renonce au moins momentan ment d composer pour les voir juste ment marcher en tant que mixte On est l rigoureusement dans la m me probl mati que que les repr sentations sociales Par rapport celles ci trop souvent consid r s comme des contenus mentaux les usages permettent en plus d int grer la demande institutionnelle de leur de prise en compte car ils conservent le caract re tr s dynamique et op ratoire de savoirs sociaux saisis en actes En second lieu la mont e en g n ralit n est peut tre pas le destin le plus int ressant des tudes de cas Elles devraient tout au contraire tre examin es dans ce qu elles ont de toujours diff rents Les tudes de cas ne cessent de proposer des ouver tures th oriques p
34. piriques ayant mobilis la notion d usage Nous pensons qu il faut remettre plat la mani re dont est en permanence r activ e la perception des usages sociaux comme ph nom nes existant en r action quelque chose de pr d fini des objets des environnements objectifs des logiques de production La traditionnelle partition entre production et r ception strat gies et tactiques bricolages et proc dures professionnelles rationalis es est bien s r ni e de fa on consensuelle dans les multiples r flexions et recherches qui tentent de rendre compte de la complexit des logiques sociales et des articulations entre tous les ph nom nes en jeu Mais ce qui en r sulte est souvent un simple am nagement de l usage comme tant moins faible et plus riche que certains le supposaient et de la production comme contenant elle aussi de l usage Ce qui doit tre repens est moins l usage proprement dit que la pr structuration de la recherche sur l usage et la ma ni re dont cette pr structuration participe le plus souvent involontairement un mod le confort par ses am nagements Une r elle remise en cause du mod le lin aire dans l analyse de l usage passe par un d cadrage radical des questions de recherche qui mobilisent la notion et par cons quent une approche m thodologique qui int gre absolument la contrainte d viter la pr d termination des ph nom nes par ce mod le lin aire et par toutes ses d
35. s Editions Apog e Voir aussi le num ro 11 12 1993 de la revue Herm s A la recherche du public r ception t l vision m dias Editions du CNRS 108 L USAGE ET SES MODELES pour acc der une analyse des analyses n cessairement tr s distante des terrains o se produisent les ph nom nes li s l av nement des nouvelles technologies de la communication et de l information NTIC Ces visions globales permettent d adosser les ph nom nes des usages fon damentalement positifs puisque les gens font toujours quelque chose avec avec la machine l objet le dispositif dont on tudie l usage des analyses qui en relativisent malgr tout la port e soit en signalant le cadre limit que constitue la marge de man uvre des usagers une fois que tout a t d cid en amont sans eux soit en mettant l accent sur l importance des dispositifs de l gitimation de certains usages au d triment d autres ou bien sur la pr construction des usages dans des configurations de conceptions qui d terminent largement les conditions sociales de l acc s aux dispositifs culturels ou bien encore sur l importance des discours d ac compagnement qu on peut soup onner d orienter l ensemble des dynamiques appropriation La question des usages est en effet souvent critiqu e pour son caract re tou jours trop positif puisque les gens font tant de choses si int ressantes avec les dispositifs qu
36. s mat riels des lieux concrets etc De m me les techniques mises en uvre par les utilisateurs de machines pour utiliser celles ci en tant qu outils techniques sont traditionnellement per ues dans la recherche sur les usages comme tant li es imm diatement aux contraintes et potentialit s d utilisations des objets Elles sont donc per ues comme relevant du mode d emploi c est dire le plus court chemin entre l individu comme op rateur de comportements et la machine Et pourtant l encore un largissement de la notion d usage comme s adossant des repr sentations permet de consid rer les fa ons de faire avec l outil non pas comme tant avant tout des r actions la machine mais comme tant des laborations parfois tr s complexes Nous en verrons un exemple plus bas avec l utilisation des grossissements pour les c d roms de peinture LES DIMENSIONS DE L USAGE PROJETS CONTEXTES TECHNIQUES Nous faisons l hypoth se que l usage est une notion plastique ouverte et complexe qui peut int grer au moins trois autres dimensions fondamentales les projets les contextes les techniques ces trois dimensions s appuyant largement sur les repr sentations sociales Le projet comme dimension de l usage Les personnes que nous interrogeons dans le cadre des tudes d usage ne sont presque jamais na ves quant leur propre implication dans un projet culturel et social de diffusion des nouvelles
37. s par rapport la production de discours comme manifestations typiques de la r ception Les ph nom nes li s l usage ont longtemps t r f r s des objets techni ques particuliers PC minitel cran clavier c d rom borne interactive etc Il semble toujours tomber sous le sens de commencer par les objets dans la d termina tion de ce qui fait usage en faisant d river celui ci des ph nom nes li s l utilisa tion Cependant surtout dans le cas des r seaux il faut mettre en cause le support initial de la nouvelle technologie dont il est question M me s il est important de savoir comment les utilisateurs tapent sur le clavier cette donn e d observation est videmment insuffisante pour savoir ce qu ils fabriquent au juste Si l objet g n re un niveau homog ne d activit s observables par ses utilisations lesquelles sont reli es aux usages il est cependant fort possible qu avec les r seaux le rapport l objet technique comme pr alable ph nom nal oblig dans l analyse des usages soit d sormais remis en cause et oblige une radicalisation d une dynamique qui tait l uvre depuis 10 ans dans la recherche La r alit la plus sensible et la plus g n ra trice de ph nom nes observables est bien moins l univers de l objet lui m me que l univers des repr sentations d usages qu il g n re On se trouve un moment que la recherche sur les usages s est pr par e
38. saire dans une vision un peu militante pour constituer les usagers en individus concrets interlocuteurs sociaux potentiels puisqu ils sont des interlocuteurs authen tiques pour le chercheur Par contre on renforce ainsi tr s concr tement un rapport de force qui constitue l usage en ph nom ne de r ception pour des objets produits ail leurs Pourtant la notion d usage s tait largement d velopp e en r action la conception consensuelle du processus d innovation comme m canisme lin aire faisant intervenir une cha ne d acteurs depuis les inventeurs et les promoteurs de l in novation technique jusqu aux utilisateurs lesquels n interviennent qu en bout de course Mais m me si la r action cette conception a favoris l int r t pour les usages en tant que ph nom nes construits ind pendamment des logiques de produc tion elle a contribu paradoxalement renforcer la puissance du mod le lin aire devenu implicite En effet en s attachant valoriser l importance des utilisateurs pour contrebalancer les repr sentations de la toute puissance des logiques de produc tion on s inscrit l int rieur m me du mod le qui les oppose Fondamentalement celui ci persiste d autant plus qu il se d cline en une s rie de variantes offre deman de mission r ception qui renforcent la r alit de la structuration qu elles proposent Or ce mod le ne se superpose que trop bien la vision du social
39. sociales ont une poque constitu en didactique une ouverture importante dans l tude des conceptions des apprenants dans la me sure o elles ont pos les situations ducatives comme des situations de communica tions sociales et pris en compte les apprenants comme des individus socialement situ s ayant des motivations tout autres que le simple d sir d apprendre Les repr sentations sociales ont donc d centr les recherches en didactique depuis une concep tion des savoirs vus comme des contenus mis en forme mentalement chez le sujet pist mique vers une conception des savoirs en actes et en situations chez des sujets sociaux dans des communications o ces savoirs sont mobilis s et construits Ces ouvertures sont all es de pair avec une attention croissante aux dimensions sociales de la construction des savoirs avec par exemple les concepts de pratiques de r f rence Martinand ou de transposition didactique Chevallard puis de transposition m dia tique Triquet En sociologie des usages les repr sentations ont permis presque l inverse de prendre en compte la richesse des savoirs mobilis s dans l tude du rapport entre des individus et des machines L objet de cet article a t pr cis ment cet enrichissement de la notion d usage par des dimensions multiples qui d passent totalement les questions d utilisation En fin de compte dans les deux cas les repr sentations sociales ont servi
40. t de l Industrie On se r f re ici deux ensemble de travaux d une part une s rie d analyses des usages des bornes interactives la cit des Sciences et de l Industrie et au Mus e d Orsay et d autre part l analyse actuellement en cours des discours de concepteurs de c d roms culturels en compl ment 112 L USAGE ET SES MODELES les m mes m thodes pour d j permettre des articulations qui d passent la probl ma tique du d calage entre conception et usage ou de la confrontation de logiques entre organisations et individus Nous r fl chissons actuellement dans la foul e de ce type de recherche un protocole permettant de recueillir aupr s des concepteurs et des usagers non plus des donn es homog nes en termes de discours mais des donn es homog nes en terme de productions concr tes et dispositifs cr s les concep teurs sont usagers et producteurs en tant qu usagers les usagers sont producteurs de dispositifs mat riels priv s dispositifs de rangements enregistrements compila tions etc qu ils peuvent m me mettre en circulation comme ce passionn d art rencontr dans nos enqu tes qui fabrique l usage d une association laquelle il appartient une encyclop die des cartes postales des logos des recueils d images en d sossant ses c d roms de mus es Au fil des tudes r alis es la cit des Sciences dans un premier temps sur les bornes interactives puis
41. tendent aussi des contenus propos s par les nouvelles technologies Dans une r cente tude d usages culturels d internet on retrouve galement des projets d usages associ s des projets de vie mais cette fois de la part de jeunes ch meurs ou de personnes qui se ressentent marginalis es ou en passe de l tre Pour la plupart non quip s en informatique et ne disposant gu re des moyens de l tre ils utilisent les bornes et les r seaux dans des lieux publics de consultation avec le souci d articuler deux temps contradictoires de l usage le court terme l ici et maintenant de la consultation sur le lieu public et le projet long terme de r int gration de collectifs de r f rence et de formation personnelle Dans les deux cas les r cits biographiques mettent en sc ne des repr senta tions de l volution et du changement individuel et g n ral mais aussi des repr sen tations de proc dures formelles d apprentissage de pratiques informationnelles de modes d acc s aux savoirs Or ces repr sentations activent elles m mes des conceptions de l institution culturelle des r f rences culturelles des m tiers et des sp cialit s des critiques des m dias et de la m diation les visites guid es les missions t l vis es les exposi tions les nouvelles technologies les propositions culturelles d une mani re g n ra le que l on peut croiser avec les repr sentations que les sa
42. u assist es et contr l es l gi timantes ou non Il d termine galement quoique moins fortement un cadrage de l usage dans des pratiques sociales et culturelles pr existantes la fr quentation des biblioth ques la visite d exposition la lecture et les loisirs cultiv s l auto formation et l autodi daxie la sociabilit familiale ou urbaine autour des objets culturels et des technolo gies de communication l int r t syst matique pour la nouveaut et la fr quentation des lieux branch s la circulation par achat don pr t et change de nouveaux objets symboliques Ces pratiques peuvent cependant tre leur tour recadr es recompos es com plexifi es par l usage du nouveau dispositif mais surtout par la volont de nom breux usagers de faire du nouveau avec le nouveau Le discours d accompagnement des nouvelles technologies de la communication intervient videmment ce niveau mais dans la mesure o on se trouve dans le champ culturel par excellence celui du livre et de la biblioth que il intervient dans un domaine d j naturellement tr s charg en prescriptions symboliques c est dire en usages symboliques de r f ren ces tout aussi importants et pr gnants que les usages effectifs Ces discours implici tes sont au moins de trois ordres celui des instances politico culturelles rattach es notamment aux minist res et d di es aux nouvelles technologies celui plus ou
43. unicationnelle Mais il nous semble que ces diff rences tiennent surtout au positionnement des tudes dans des lieux tr s vari s qui en cadrent tr s diff remment la port e On tudie les nouvelles technologies dans les laboratoires universitaires les minist res et les d l gations minist rielles la ville et l insertion aux nouvelles technologies aux arts plastiques la formation dans les collectivit s territoriales dans les acad mies scolaires dans les institutions culturelles mus es et biblioth ques en tout premier lieu dans les d partements marketing des soci t s de produc tion multim dia Ces tudes rel vent de la recherche de l valuation de la veille professionnelle de l engagement personnel 2 Parmi les institutions culturelles les mus es et biblioth ques ont notamment mis en place des lieux et des r seaux o professionnels et universitaires peuvent d velopper des actions et des r flexions crois es comme par exemple le Service Etudes et Recherches de la BPI la cellule valuation des expositions de la Cite des Sciences et de l Industrie CSI A la m diath que de la Cit des Sciences et de l Industrie un d partement Fonctions et publics sp cifiques coordonne une r flexion continue dans le but d anticiper et de favoriser des volutions dans les relations entre la m diath que et ses publics voir Agostini F 1994 L espace de la m dia 107 J LE
44. vants les profes sionnels de tous ordres se font des ignorants ou bien du public L int gration du contexte dans la construction des usages et dans la construction de l offre Par la comparaison d une s rie d tudes ind pendantes men es successivement la BPI dans des mus es et expositions la maison dans des magasins faisant office de lieux publics de consultation dans des salles municipales des coles des centres culturels des salons temporaires nous avons pris la mesure de ce que pou 83 Voir encore Davallon J Gottesdiener H Le Marec J 1997 Approche de la construc tion des usages des c d roms culturels li s aux mus es Paris Direction des Mus es Nationaux et R union des Mus es Nationaux Saint Etienne CEREM Universit Saint Etienne 117 J LE MAREC vait repr senter dans la construction des usages non seulement la nature particuli re du dispositif informatis tudi ce qui tait pr visible mais aussi le contexte d utilisation public ou priv institutionnel ou totalement informel Ce contexte d termine bien s r des conditions sp cifiques d utilisation des dispositifs tudi s On ne fait pas la m me chose avec un catalogue informatis la biblioth que des bornes mus ographiques dans les mus es des c d roms de consommation chez soi des r seaux lectroniques dans une vari t de lieux et de configurations d acc s gratuites ou payantes libres o
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