SUR LES SOLUTIONS CONSIDERABLEMENT
Contents
1. un chec e d calage tr s lev voire total e d calage mod r par rapport l objectif Solution de correction de initial l objectif e d calage nul par rapport l objectif final GENESE DU DECALAGE e rationalit limit e e rationalit limit e e la solution comme processus d exploration de l objectif e Erreurs techniques e Biais cognitifs e Incidents externes etc Solution effet pervers R Boudon e d calage tr s lev e Effets de voire total composition e d calage tr s lev par rapport l objectif initial e d calage nul par rapport l objectif final e d calage total par rapport l objectif pour ceux qui n y croient pas e d calage nul par rapport l objectif pour ceux qui y croient Solution transf r e un autre objectif J G March dans une partie de son mod le de la poubelle Solution magique e Glissement de la solution e Flight dans la terminologie de J G March e Scepticisme 4126 e Anomie e Auto l gitimation Solution e Incoh rence e Distraction consid rablement imm diate cognitive d connect e e Kidnapping technologique e Incoh rence potentielle m canique DESCRIPTION ET DEFINITION DES SOLUTIONS CONSIDERABLEMENT DECONNECTEES Afin de rendre concret notre propos consid rons un exemple banal de la vie quotidienne Soit l objectif viter les embouteillages d un d part en week end rouge Nous retrouvons2. En r sum les solutions consid rablement d connect es sont le fruit du d rapage des ruses invent es par les rationalit s pour simplifier la liaison objectif action ceci dans des syst mes clos qui loin de corriger ce d rapage le renforcent 1 2 3 4 S 6 7 8 9 10 11 8 janvier 1999 NOTES Nous remercions tout particuli rement J Padioleau J D Reynaud et P Urfalino pour l aide qu ils nous ont apport e J G March et H A Simon Les Organisations Dunod 1979 253 p J G March Decisions and Organization Blackwell 1988 458 p R Boudon Effets pervers et ordre social P U F 1977 286 p C Perrow Organizational analysis Tavistsock 1971 J D Reynaud Les r gles du jeu Armand Colin 1989 306 p M Crozier et E Friedberg L acteur et le syst me Le Seuil 1977 437 p traitent galement plusieurs reprises ce probl me Op cit C Musselin Quelle strat gie de recherche pour les anarchies organis es Actes du s minaire CONDOR s ance du 5 avril 1990 18 p et E Friedberg Le Pouvoir et la R gle Le Seuil 1993 405 p ont parmi leurs critiques du mod le de la poubelle de J G March soulign le caract re exceptionnel des situations voqu es par ce mod le ce qui r duisait sa port e Qu on nous permette de r futer d avance ce type de critique au sujet des solutions consid rablement d connect es que nous tudions ici M
3. Le capitaine qui se laisse couler avec son navire suit bien une 13 26 rationalit li e la valeur de l h ro sme Ce n est pas contestable Notre observation ici est qu on peut en jouer pour justifier une solution d connect e Serait dans ce cas un capitaine qui dans une situation extr mement critique adopterait consciemment une solution insens e accentuer inutilement le danger et justifierait cela par l h ro sme d sint ress de sa corporation S agissant de ce bricolage de la l gitimit on peut assister un ph nom ne tonnant Non seulement la solution consid rablement d connect e se place sous la protection d une valeur g n rale et intouchable mais de surcro t elle peut devenir gr ce ce m canisme un symbole de cette valeur Par un curieux retournement la solution d connect e n e de l anomie devient le porte drapeau de sa valeur refuge et se renforce Par exemple la direction d une entreprise institue un indicateur dans le domaine de la cr ativit En raison d une r flexion insuffisante sur l objectif et de dysfonctionnements dans sa conception cet indicateur devient une solution consid rablement d connect e Il ne veut rien dire La cr ativit est sa valeur refuge La direction est consciente du non sens de l indicateur Toutefois elle le maintient car elle craint que le supprimer soit interpr t comme le signe d une remise en cause du principe de cr ativit De l anomie aux client
4. sultat et donc de son objectif peut conduire des d rapages par exemple un processus qui co te plus que ce qu il rapporte Utiliser une solution comme t moin physique de l existence et de l activation des autres solutions moins visibles favorise aussi la conception d une solution pour elle m me Une part non n gligeable du contr le social dans les organisations quivaut implicitement v rifier l existence de solutions t moins et non les r sultats Il est clair que prendre une solution comme t moin physique peut provoquer l aussi un d rapage l application de la solution t moin devenant un but en lui m me Ce serait le cas d un chef d atelier qui sachant que la propret et l ordre dans les ateliers sont consid r s comme indicateur de qualit totale par la direction concentrerait exclusivement sa politique qualit sur le nettoyage et le rangement aux postes du travail Un ultime facteur banal mais fort de maintien durable d une solution consid rablement d connect e est que g n ralement un certain nombre de personnes en vivent Bien souvent des responsables sont conscients du d calage consid rable d une solution mais la laissent en vie en raison des probl mes humains qu entra nerait sa suppression D autant plus que ceux qui vivent de la solution s accrochent la d fendent la justifiant avec acharnement placement sous la protection d une valeur refuge g n rale et intouchable glissement vers des anti clie
5. Dans telle entreprise la Direction g n rale a mis sur pied une nouvelle organisation assez complexe n cessitant que les directions n gocient entre elles Cette direction g n rale a accompagn cette organisation d un principe selon lequel les directions devaient obligatoirement se mettre d accord car tout recours la direction g n rale serait consid r comme un chec Il n existe donc aucune proc dure de r solution d un puissant d saccord et les acteurs ne peuvent pas ne pas agir Une exclusion de l arbitrage ou du recours peut provenir non pas d une interdiction explicite mais tout simplement de l interdiction implicite de l affrontement ouvert au sommet Si dans telle organisation il n est pas tol r que les directeurs soient en total d saccord sur un sujet parce qu ce niveau cela ne se fait pas les d saccords intenses au bas de l organisation auront 12 26 du mal remonter et tre reconnus afin d tre arbitr s Et comme ne pas sortir de solutions est mal vu cela n emp chera pas la production de solutions Il s agit ici en quelque sorte d une schizophr nie organisationnelle o le conflit est la fois autoris un niveau et interdit un autre niveau o on peut s opposer un objectif mais pas la mise en oeuvre un enfermement dans lequel il n y a pas de soupape permettant d liminer l absurde De l anomie la l gitimit bricol e la valeur refuge Bien entendu si l anomie est
6. avec la certitude que former les agents de ma trise ou informer le personnel est suffisamment clair et pr cis et vont appliquer sans objectif plus clair une solution d connect e Une autre cause du passage direct la solution est qu il est beaucoup plus facile de produire des solutions que de r fl chir des objectifs en d autres termes parce qu il est plus facile de faire de la technique plut t que faire de la politique Sur le plan cognitif approfondir un objectif n cessite une vision largie le maniement de concepts abstraits et la prise en compte simultan e de plusieurs options Il existe beaucoup de solutions qui comportent des techniques avec lesquelles les acteurs se sentent beaucoup plus l aise Il est souvent plus facile un informaticien de concevoir un programme que de mieux d finir ce quoi il va servir Il est galement plus ais de produire de la solution que d approfondir des objectifs parce que la clarification des buts exige que les sp cialistes sortent de leur expertise et adoptent un point de vue pluridisciplinaire ce qui on le sait n est pas leur inclination ni bien souvent leur comp tence Par exemple l objectif former l encadrement la qualit totale exige pour tre pr cis que les sp cialistes en ing nierie de formation s ouvrent la discipline de la qualit et que les experts de la qualit prennent en compte les exigences de la p dagogie Faute de cette comp tence pluridi
7. chie incoh rente La sociologie de la d cision a souvent mis le doigt sur l importance de la non d cision de la passivit voire de la paralysie dans bien des situations Mais ce courant de pens e de l organisation bloqu e a eu tendance occulter le ph nom ne inverse de l organisation agit e notre sens tr s r pandu Dans les entreprises de puissants facteurs favorisent le passage imm diat la solution la valorisation excessive des op rationnels par rapport aux fonctionnels le temps consacr la r flexion pr alable consid r comme un co t et non comme un investissement la valorisation du changement pour le changement etc En troisi me lieu si beaucoup de solutions deviennent fortement d cal es c est pour une raison banale tout simplement parce que le r sultat est difficilement mesurable On ne poss de aucun moyen de contr le de l alignement de la solution sur l objectif Cela signifie que toutes les technologies dont l efficacit est difficilement mesurable notamment toutes celles qui touchent au comportement social et humain comme la communication la formation le conseil sont une source immense et in puisable de solutions consid rablement d connect es Le domaine de la formation illustre cela parfaitement On peut ais ment et encore s assurer de la qualit d une action de formation en interrogeant les stagiaires par exemple Mais il est quasiment impossible de v rifier sauf pour les f
8. confort int rieur des v hicules Emprunter un itin raire vert et se perdre Partir le samedi apr s midi pour viter les embouteillages comme beaucoup d autres ce qui d place les embouteillages sur le samedi apr s midi Prendre un itin raire vert et rester dans la r gion travers e pour la visiter Pour quelqu un qui n y croit pas invoquer les dieux de la circulation 6 26 Partir de Paris le lundi pour se rendre le Solution consid rablement d connect e samedi et le dimanche la campagne et revenir le vendredi 7 26 Voici un certain nombre d autres exemples Ce texte contient quelques exemples d entreprise Afin d assurer compl tement l anonymat nous avons introduit dans ces exemples des l ments fictifs qui ne les modifient pas quant au fond mais rendent impossible leur identification Le respect de l anonymat nous a galement conduit limiter leur niveau de d tail Que le lecteur ne nous tienne pas rigueur de cette r serve Classons dans la l gende l histoire de ces dizaines de chasse neige envoy s par l U R S S en Afrique au titre de l aide au tiers monde car nous ne poss dons pas la preuve de son authenticit Mais cette histoire ne comporte t elle pas un accent de v rit La direction g n rale d un groupe allemand au d but des ann es 1970 lance une grande campagne pour d velopper le management participatif Elle cr e une universit d entreprise consacr e la sensibilisa
9. fausses Fayard 1990 Op cit Histoire de la seconde guerre mondiale Fayard 1973 R Boudon Action in R Boudon sous la direction de Trait de sociologie P U F 1992 pp 21 55 Sur ce th me nous avons utilis particuli rement R Boudon Action op cit M Crozier et E Friedberg op cit J Padioleau L ordre social L Harmattan 1986 222p Nous avons utilis sur ce point J Th venot et B France Lanord Syst mes d information un pr curseur Revue Fran aise de Gestion pp 96 111 num ro en partie consacr H Simon R Boudon Action op cit p 40 Exemple authentique cit dans L Apport de H A Simon aux sciences de la d cision entretien avec Jean Louis Lemoigne Sciences Humaines Hors S rie N 2 mai 1993 La paternit de cette m taphore revient je crois J Padioleau
10. l origine de la solution consid rablement d connect e cette derni re doit combler le vide de l anomie en trouvant une l gitimit Selon nous la l gitimit laquelle se raccrochent les solutions consid rablement d connect es pr sente chaque fois deux caract ristiques La premi re est que la l gitimit justifiant la solution est beaucoup plus une valeur d une tr s grande g n ralit qu un objectif On ne raccroche pas la solution des normes interm diaires qui donneraient la valeur une consistance L int r t de ce bricolage est vident La valeur est tellement g n rale qu il devient impossible de faire appara tre l incoh rence La g n ralit attrape tout de la l gitimit permet de masquer le d calage total de la solution Le m canisme consiste monter de plusieurs crans la solution dans l chelle des valeurs et des objectifs pour noyer le poisson La deuxi me caract ristique est que la valeur qui sert de l gitimit est socialement intouchable Personne ne peut tre contre Exprimer quoi que ce soit qui pourrait tre interpr t comme une non adh sion totale cette valeur est impossible Le caract re intouchable de la valeur est transf r la solution qui devient elle aussi intouchable La solution capture en quelque sorte non la valeur mais son caract re intouchable Ainsi dans le management des entreprises des valeurs comme la qualit la formation la communication le changem
11. on peut toujours expliquer que les m contents sont ceux qui ont une mauvaise vue ou qui lisent trop lentement ou que les transparents n avaient pas t con us pour une salle aussi profonde etc Alors qu un transparent l envers ou compl tement flou est sans contestation possible reconnu comme absurde Le biais cognitif de la preuve minoritaire Dans le cas d une solution consid rablement d connect e ses partisans son auteur ceux qui en vivent vont chercher justifier son utilit l aide de preuves Comme il s agit g n ralement de domaines peu quantifiables il est difficile de mettre en vidence les r sultats de mani re statistique Les preuves d efficacit vont donc tre essentiellement des cas Mais ces cas seront des cas uniques isol s pr sent s comme tant g n ralisables Or dans les organisations de tr s grande taille il existe toujours une probabilit de trouver un cas unique et isol qui prouve l utilit d une solution La chance d une solution consid rablement d connect e est de d couvrir probablement un cas une monographie un exemple qui la justifie l astrologie fonctionne sur le m me type de raisonnement le fait conforme la pr diction est mis en avant et ceux qui ne le sont pas sont rejet s LE KIDNAPPING TECHNOLOGIQUE Dans le mod le de la poubelle J G March emploie le terme technologie pour d signer les processus d action de l organisation Dans ce chapitre nous utiliserons le m
12. prendre en compte et se satisfait de cette imperfection Les solutions bureaucratiques forment un sous groupe de cette premi re cat gorie Elles substituent une solution personnalis e id ale une solution automatique m diocre mais qui arrange les acteurs concern s Le second type de solutions d cal es est celui des solutions de correction de l objectif La recherche de la solution conduit reformuler un probl me mal pos Une direction g n rale demande une formation pour les responsables d une nouvelle activit dans l entreprise La direction de la formation d couvre que le besoin n est pas une formation mais la constitution d un r seau d change d exp riences entre ces responsables et c est cette derni re solution qui est appliqu e A un niveau beaucoup plus lev de d calage se situent toutes les solutions qui aboutissent un chec en raison de d fauts dans leurs conception d erreurs de mise en oeuvre et d v nements d favorables Une cat gorie de solutions d calage lev par rapport l objectif est celle des solutions effet pervers dont R Boudon a constitu un corpus th orique Les solutions individuellement sont dans l objectif Mais leur composition produit un r sultat qui va en sens contraire Ainsi la d mocratisation de l enseignement qui vise l galit peut produire de l in galit La cinqui me cat gorie de solutions d cal es sont celles qui le sont par attribution de la
13. rendre des bombardiers en vol 20 D alleurs on a tent sur le plan des mots de r concilier le bombardement aveugle et la diplomatie subtile en inventant l expression de frappe chirurgicale Existe t il beaucoup d exemples qu une telle solution ait t effectivement mise en oeuvre et r ussie notre connaissance aujourd hui le bombardement nominatif la bombe intelligente qui atteint le dictateur en p n trant par la fen tre de sa salle de bain n existe pas Une technologie qui ne permet pas de r pondre finement un objectif fin est constitutionnellement productrice de solutions consid rablement d connect es L existence d une incoh rence potentielle dans certains types de solution est contrario prouv e par l introduction volontaire d une telle fragilit structurelle pour limiter l usage de la solution Le syst me des doubles triples ou quadruples cl s fonctionne sur ce principe Le risque que la solution soit inutilisable est consid rablement augment il suffit que manque une cl mais en contrepartie la probabilit d un usage ill gitime ou impr vu est fortement diminu DISCUSSION Des rationalit s qui court circuitent la d lib ration sur les fins L id e qui nous a guid tout au long de notre r flexion a t de rechercher ailleurs que dans la folie des hommes les raisons de l existence des solutions consid rablement d connect es Que pouvons nous conclure sur ce sujet Il nous faut examiner le
14. Christian MOREL SUR LES SOLUTIONS CONSIDERABLEMENT DECONNECTEES 1 Publi dans l Ann e sociologique 1997 47 n 2 2 26 Notre objectif ici est d identifier et d tudier des produits de l action humaines qui sont particuli rement d routants mais qu il est difficile d expliquer selon les mod les classiques des effets pervers du glissement des objectifs ou du garbage can L id e est d expliquer les d viations en introduisant comme facteurs explicatifs d terminants des ph nom nes tels que la distraction ou l auto l gitimation de l action qui sont absents des approches classiques Il est extr mement fr quent qu une solution soit d cal e de l objectif auquel elle est cens e r pondre Ce ph nom ne a suscit un courant de pr occupation et de discussion majeures en sociologie des organisations et en th orie de la d cision Les d cisions non optimis es chez H A Simon 2 le mod le de la poubelle chez J G March 3 les effets pervers chez R Boudon 4 les d cisions bureaucratiques chez C Perrow 5 les d cisions anomiques chez J D Reynaud 6 sont chaque fois une r flexion sur une forme d cart entre objectif et d cision 7 Il est possible de dresser une typologie des diff rents types de d calage entre une solution et son objectif Le d calage le plus courant est celui des solutions non optimis es type c l bre caract ris par H A Simon Elles proviennent de ce que l homme ne peut tout
15. ON Il s est fait plaisir C est ainsi que les cadres d entreprise s expriment avec humour et pertinence lorsque l un des leurs s est lanc dans une action bien r alis e s duisante mais non v ritablement reli e un objectif 14 26 L mergence des solutions consid rablement d connect es est facilit e par des processus qui tendent leur donner comme finalit elles m mes Examinons ces processus d auto l gitimation Un premier m canisme est que l homme accorde du prix au seul fait d agir quel que soit l objectif Dans l entreprise une personne qui fait un travail peu utile d connect des objectifs mais qui travaille beaucoup d passe l horaire officiel et se montre tr s agit e sera l objet d un pr jug favorable Un autre g n rateur puissant de solutions consid rablement d connect es est la r ticence admettre que des situations soient vides de solutions m me provisoirement La tendance naturelle de l tre humain est de combler une situation avec des solutions Dans les organisations combien de solutions fortement d cal es ne met on pas en oeuvre simplement pour faire quelque chose rapidement devant une situation grave qu on ne sait par quel bout prendre Telle usine fonctionne mal et le diagnostic a r v l des causes multiples et complexes Aussit t saisi par l ampleur du probl me sans avoir vraiment r fl chi aux objectifs on y lance une action de formation non cibl e non r fl
16. a solution potentielle Nous voulons dire que la solution contient dans sa technologie m me un potentiel dormant d incoh rence et qu il faut peu de chose pour qu il se r alise 20 26 Ainsi le fait qu une solution n ait un sens que si elle est totalement appliqu e constitue un premier cas d ncoh rence potentielle puisqu il suffit d une infime fraction de non mise en oeuvre pour la rendre absurde Dans ces cas l le fait que la solution ne soit pas compl te n quivaut pas une non optimisation au sens de Herbert A Simon Elle aboutit une situation nulle Qu une chambre air poss de une fuite m me minuscule n quivaut pas une non optimisation de la solution chambre air elle lui te ce pour quoi elle a t con ue Il s agit d un ph nom ne inverse de l effet pervers ou effet de composition Ce n est pas la composition des solutions qui provoque un effet pervers mais l absence de composition qui an antit la solution On rencontre beaucoup de cas de ce type Lorsque dans le code de la route il a t question d inverser la r gle de priorit relative aux ronds points les pouvoirs publics ont h sit et n ont pas rendu obligatoire partout la nouvelle r gle Cette absence de syst matisation a peut tre provoqu plus de d g ts h sitation et erreur des automobilistes qu elle n en a vit s Autre exemple une entreprise d cide d implanter la messagerie lectronique et compte sur cet outil pour r duire
17. aniel Reynaud l incertitude de l objectif est provoqu e ou renforc e par la pl istocratie c est dire un nombre de parties prenantes excessif une multitude de centres de pouvoir concern s Car la pl istocratie rend plus difficile la d termination d une finalit claire commune pr cise Cette analyse s applique ce que nous appelons les solutions consid rablement d connect es L anomie c est dire des objectifs flous incertains inconnus situations renforc es par la pl istocratie constitue un facteur puissant d mergence de telles solutions Mais nous voudrions prolonger cette analyse de Jean Daniel Reynaud en essayant d approfondir cette anomie Anomie par dysfonctionnement de la d finition de l objectif le passage imm diat la solution Il est naturel qu un objectif au d part manque de clart G n ralement entre l nonc de l objectif et la solution un certain nombre de phases interm diaires doivent intervenir pour pr ciser l objectif groupe de travail charg d apporter de la consistance une id e enqu te 10 26 pour pr ciser une demande ou une attente exp rimentations en vue non de concevoir la solution mais d explorer l objectif etc Mais il n est pas rare que ces phases interm diaires soient totalement escamot es et qu un objectif peine esquiss soit aussit t suivi d une solution pr cise Par exemple dans telle organisation parapublique une d cision importante concerna
18. ation d une solution comme t moin Enfin personne ne sait comment employer autrement les quelques personnes qui sont occup es par ce stage et les moyens de l organisation sont importants la solution comme gagne pain LA DISTRACTION COGNITIVE 16 26 Les solutions consid rablement d connect es existent aussi parce qu elles sont intellectuellement admises Elles le sont travers un certain nombre de m canismes cognitifs qui conduisent ne pas tre choqu par l absurde Nous appellerons cela la distraction cognitive Notre id e ici est proche de celle de James G March 17 dans le mod le de la poubelle quand il parle d inattention oversight pour expliquer un cas d attribution d une solution un probl me auquel elle n tait pas destin e Mais James G March se contente de poser ce m canisme sans le d crire ni l expliquer davantage Essayons d explorer quelque peu cette distraction cognitive qu il est impossible d lucider compl tement du fait de sa nature m me Ses composantes sont les suivantes Le pr jug de raison Certes l esprit humain lorsqu on lui pr sente une solution absurde a tendance l expliquer par un comportement fou Il abuse m me de cette explication la source de l intuition commune de Weber et de Popper r side peut tre dans le fait que le sens commun tend donner une interpr tation irrationnelle des comportements dont le sens lui chappe Le sens commun a souvent tendance abuse
19. au besoin interne et qu elles ont vendues l ext rieur sans jamais en avoir re u l instruction ni m me l autorisation La situation de kidnapping technologique est vraiment un cas sp cifique Il ne s agit pas des structures matricielles avec des quipes projet horizontales et des m tiers verticaux Dans ces cas la coop ration interdisciplinaire exclut en principe ce que nous appelons le kidnapping technologique Nous ne parlons pas non plus des organisations structur es en m tiers juxtapos s Dans ce cas galement la puissance de chaque m tier emp che que l un effectue sans le consulter le travail de l autre La coop ration sera certainement difficile mais il n y aura pas kidnapping d un champ de comp tence sans ses experts Nous ne parlons pas enfin des experts qui sont comp tents dans plusieurs technologies Au lieu d tre en pr sence d un expert de la technologie A dans le champ A on trouve un expert des technologies A B dans les champs A B Le kidnapping technologique repr sente un quatri me cas o quelqu un fait le m tier de quelqu un d autre Les situations productrices de solutions relevant d une technologie A ind pendamment des experts de A sont favoris es dans les cas suivants qui souvent se combinent entre eux e Quand le champ d activit de la technologie A d une part et les experts de la technologie A d autre part sont rattach s deux structures diff rentes qui communiquent tr s mal e Quand des respo
20. bien les diff rents types de solutions d cal es D abord le d calage par solution non optimis e par exemple se d placer en moto et laisser sa voiture La solution est moins satisfaisante la capacit de transport est plus faible le risque d accident plus lev Dans cette cat gorie figure la solution bureaucratique autoriser la circulation selon que le num ro d immatriculation est pair ou impair Puis vient le d calage de la solution correction de l objectif on pourrait imaginer une solution visant non vaincre les embouteillages mais les rendre supportables par exemple en augmentant le confort int rieur des v hicules air conditionn d pollu syst me audio On passe ensuite au d calage de la solution aboutissant un chec prendre un itin raire vert et se perdre Le quatri me type de d calage est celui de la solution effet pervers supposons qu un nombre lev d automobilistes choisisse de partir le samedi au lieu du vendredi pensant ainsi viter la cohue La cons quence perverse sera un blocage de la circulation le samedi au lieu du vendredi Figure ensuite la solution d cal e par son attribution un autre objectif L automobiliste prend un itin raire vert et choisit de rester dans la r gion travers e afin de la visiter N oublions pas le d calage qui proviendrait d une solution magique pour quelqu un qui n y croirait pas par exemple prononcer une incantation Mais lorsqu u
21. consid rablement la circulation de documents et les coups de t l phone inutiles et perturbateurs Toutefois pour diverses raisons r sistance de quelques uns manque de moyens un certain nombre de personnes ne sont pas connect es au syst me Ces quelques trous dans le r seau vont bien au del de rendre la solution imparfaite ils lui enl vent une grande partie de son int r t En effet d s lors qu on n est pas s r d atteindre tout le monde on l utilise tr s peu Dans le domaine de la s curit et de la d fense on rencontre souvent des solutions qui d s lors qu elles ne sont pas syst matiques deviennent consid rablement d connect es L histoire a montr de quel int r t pouvait tre une ligne Maginot qui n allait pas jusqu au bout Ardennes comprises Si la muraille de Chine s tend sur plusieurs milliers de kilom tres c est qu il fallait a ou rien du tout Un second cas de fragilit potentielle est constitu par les s curit s structurellement incoh rentes Par exemple les s curit s doubl es ou tripl es mais qui peuvent difficilement tre isol es les unes des autres sont potentiellement incoh rentes Nous avons vu que la navette challenger a explos parce que le joint de s curit sur la fus e d envol fonctionnait comme le joint principal compte tenu de la technologie utilis e Dans les organisations il existe beaucoup de m canismes de contr le qui utilisent comme source d information l informati
22. d eux d clarant m me avant le d collage qu il n avait pas envie de se retrouver devant une commission d enqu te L ineptie de la solution est bien illustr e par le directeur de projet des fus es qui devant la commission ne sait que r pondre j aimerais r pondre votre question Monsieur mais c est si tranger la fa on dont la NASA fonctionne que je devrais r fl chir longtemps pour trouver une r ponse 15 Les solutions consid rablement d connect es sont engendr es maintenues en vie renforc es par cinq processus qui tendent les isoler et les rendre autonomes par rapport une finalit claire et pr cise Ces cinq processus que nous allons maintenant d velopper sont l anomie l auto l gitimation la distraction cognitive le kidnapping technologique et l incoh rence potentielle m canique Pour une solution consid rablement d connect e au moins un des cinq processus intervient mais g n ralement plusieurs d entre eux jouent Ces cinq processus n puisent certainement pas tous ceux qui peuvent intervenir L ANOMIE DES SOLUTIONS CONSIDERABLEMENT DECONNECTEES Dans les R gles du jeu 16 J D Reynaud reprend le concept d anomie d fini comme un d ficit de r gulation Il examine plusieurs cas d anomie et leurs effets L un de ces cas est celui qui dans un processus de d cision d coule de l incertitude de l objectif Selon lui cette incertitude explique la d cision fortement incoh rente Pour Jean D
23. emple 8 26 apparemment anodin de solution consid rablement d connect e car il r v le de mani re tr s significative certains ressorts profonds de ce ph nom ne L informatique l administration publique la strat gie militaire sont aussi des sources f condes en bons exemples de solutions consid rablement d connect es Qui ne conna t pas un exemple de programme informatique con u grand frais ayant perdu le sens de ce quoi il devait servir et jamais vraiment utilis Qui n a pas entendu parler de cas de stages publics destin s aux ch meurs compl tement d connect s des besoins au point qu on les nomme stage parking et qu il serait plus honn te d appeler stage terrain vague La premi re caract ristique d une solution consid rablement d connect e est une incoh rence au premier degr c est cette absurdit vidente qui distingue une solution consid rablement d connect e d une solution effet pervers Car les solutions effet pervers bien entendu sont elles aussi incoh rentes Mais il s agit d une incoh rence au second degr Consid r e isol ment une solution effet pervers est parfaitement coh rente C est l agr gation de ces solutions et leur composition qui r v le leur dimension absurde Il faut donc une exp rimentation un effort d analyse pour d tecter l effet pervers En revanche l incoh rence d une solution consid rablement d connect e est imm diate Un transparent quasimen
24. ent la cr ativit sont parfois d vi es pour rendre intouchables des solutions consid rablement d connect es Que d actions de formation totalement d connect es n a t on pas con ues au nom de l id al de la formation La mise l abri de la solution dans une valeur refuge exploite en quelque sorte les deux rationalit s d finies par Max Weber Rappelons que pour Weber 1l existe la rationalit t l ologique des actions adapt es des objectifs faire du sport pour se maintenir en forme par exemple et la rationalit axiologique des actions adapt es des valeurs au dessus des objectifs le sacrifice du h ros par exemple Les solutions consid rablement d connect es faute d tre adapt es un objectif simulent en quelque sorte l adaptation une valeur La premi re rationalit weberienne tant absente on joue sur la seconde On pourrait se demander si l exc s de rationalit li e des valeurs et le manque de rationalit li e des objectifs n est pas une cause directe de solutions consid rablement d connect es La pr sence trop forte d une valeur conduirait n gliger l tablissement d objectifs interm diaires passer trop vite la solution emp cherait de concevoir froidement le champ des solutions hypnotiserait en quelque sorte l acteur et le pousserait la faute Il ne s agit pas ici de critiquer la rationalit adapt e des valeurs par opposition la rationalit adapt e des objectifs
25. ible Dans ces conditions il est fort probable que la d cision finale sera extr mement confuse et contradictoire Consid rons l exemple de la nouvelle r glementation en entreprise qui doit faire l objet d une information A ce titre le but du d partement r glementation et celui du d partement communication interne sont pratiquement inconciliables Le premier cherche informer son r seau de sp cialistes de fa on technique alors que le second entend expliquer le contenu au personnel n ophyte dans un sens p dagogique Supposons que ces deux d partements soient contraints de r diger et diffuser une information commune au point de devoir co signer le document Supposons enfin que ces deux services soient dans l impossibilit d obtenir un arbitrage ou un recours de leurs sup rieurs parcequ il n est pas bien vu de d ranger ces derniers sur des questions aussi subalternes que la fa on de r diger un document d information Le produit le plus probable d une telle situation sera un document illisible les efforts p dagogiques rendus d cousus par les inclusions techniques et les tentatives de pr cisions techniques contrari es par des consid rations p dagogiques Dans les organisations l obligation d agir en commun sans aucune possibilit de retrait d arbitrage ou de recours n est pas si rare Il suffit que se pr sentent des buts inconciliables et surgit alors une forte probabilit de solutions consid rablement d connect es
26. isationnel La rationalit fond e sur la tradition ou le pr c dent Cette rationalit est extr mement fr quente Elle forme la base d un grand nombre de raisonnements juridiques mais aussi d actions non juridiques La rationalit incr mentale qui fonctionne par petits pas par allers et retours permanents entre l action et l objectif et par exploration progressive de l objectif La rationalit axiologique qui explique l action par la croyance en un principe normatif La rationalit t l ologique qui est d finie par un objectif pratique Toutes ces rationalit s poss dent un point commun remarquable elles travaillent toutes sur le principe d un effacement partiel de l objectif ou de sa d clinaison en sous objectifs c est dire du syst me des pr f rences et de leur hi rarchisation Autrement dit elles contournent plus ou moins la d lib ration sur les fins Une solution est th oriquement pr c d e d une cha ne de d cisions sur les objectifs on d cide d un probl me traiter des objectifs atteindre des sous objectifs et des priorit s C est cette cha ne complexe longue aux ramifications multiples que les rationalit s effectivement pratiqu es simplifient La rationalit proc durale des associations d id es des d couvertes par distraction doit justement son efficacit au fait que l acteur met de c t l objectif c est parce qu on ne cherche pas l o l on devrait chercher qu on
27. me si elles sont exceptionnelles il va de soi que la raret d un ph nom ne n exclut pas de s y int resser de pr s et n emp che pas son examen d tre riche d enseignements Pr cisons que notre id e de solution consid rablement d connect e ne contient aucun pr jug sur l ampleur des cas vis s Une solution consid rablement d connect e peut tre aussi bien un objet d une tr s grande ampleur ou port e comme la construction d une fus e qui ne peut fonctionner qu un micro v nement comme la projection d un transparent illisible Soulignons enfin qu il n y a aucun jugement moral dans l id e de solution consid rablement d connect e Nous d finissons ainsi une solution d s lors qu elle vit ind pendamment d une finalit ou d un objectif Une solution qui est reli e un but m me tr s r pr hensible n est pas ici consid r e comme consid rablement d connect e La question de la moralit ou non d une solution est un d bat qui se place en dehors de cet article Op cit Op cit 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 26 26 Op cit Judgement in organizational decision making The Iranian hostage rescue mission Expos au s minaire Condor du 13 mai 1993 Challenger cahier p dagogique E S C P N 90 03 74 p Op cit p 57 Op cit Op cit R Boudon L Art de se persuader des id es douteuses fragiles ou
28. moindre d clinaison de la valeur et cr e par cette absence de d clinaison et la g n ralit de la valeur une anomie La rationalit t l ologique en dirigeant l attention sur la dimension op rationnelle de l action finit par lui enlever son sens Autrement dit les solutions consid rablement d connect es prennent leurs racines dans ce qui fait l efficacit m me des rationalit s naturelles Les ruses et les raccourcis de ces rationalit s naturelles qui permettent d viter l extr me complexit de la d clinaison et du d ploiement des objectifs de la cha ne des d cisions concernant les pr f rences peuvent devenir des pi ges o se perd le sens Un syst me clos plut t qu une poubelle ou une auberge espagnole Notre sentiment est que les discordances majeures entre objectifs et solutions sont suscit es moins par une circulation libre et ind pendante de probl mes de solutions de participants et d occasions mod le de la poubelle ou de l auberge espagnole 26 que par des pi ges pr cis qui enferment les acteurs dans la production de solutions inconsistantes et incoh rentes Un certain nombre de m canismes que nous avons d crits comme g n rateurs de d calages importants sont des situations dans lesquelles les participants ne peuvent pas sortir ou ne peuvent pas entrer et non des situations de sortie et d entr e libres de participants comme dans le mod le de la poubelle L interdiction du veto ou du
29. n journaliste la radio demande aux automobilistes parisiens qui doivent partir en week end de ne pas circuler le vendredi apr s midi et le samedi matin dans le sens Paris Province ni le dimanche apr s midi et soir dans le sens Province Paris il ne propose rien d autre si on pr te un minimum d attention ce que signifie la recommandation du 5 26 pr sentateur que de se rendre le samedi et le dimanche la campagne en partant le samedi soir et en revenant le dimanche matin ce qui est absurde On quitte l l univers des solutions non optimis es d H A Simon 10 celui des solutions effets pervers de R Boudon 11 celui des solutions transf r es un autre objectif de J G March 12 pour entrer dans l univers nigmatique des solutions consid rablement d connect es Types de solutions d cal es par rapport l objectif POUR UN PARISIEN PARTANT EN WEEK END EVITER LES EMBOUTEILLAGES Solution non optimis e Solution bureaucratique sous cat gorie de la pr c dente Solution de correction de l objectif Solution aboutissant un chec Solution effet pervers Solution transf r e un autre objectif Solution magique Laisser sa voiture et se d placer en moto capacit de transport plus faible sensibilit plus grande aux intemp ries Autoriser la circulation selon que l immatriculation est paire ou impaire Rendre les embouteillages moins d sagr ables en augmentant le
30. nsables imposent une solution relevant d une technologie A sans tre experts de cette technologie A e Quand la complexit de la technologie A concern e est peu visible C est le cas par exemple de la technologie de la formation Beaucoup de personnes en entreprise consid rent que former n est pas compliqu et s improvisent ing nieur de formation sans faire appel aux experts de la formation Mais il n y a pas que la formation La technologie des enqu tes d opinion par exemple fait aussi partie des technologies fr quemment consid r es comme simples e Quand la technologie est peu professionnalis e et institutionnalis e Un exc s de structuration d une technologie peut tre un facteur de rigidit et de perte de cr ativit Mais un manque de structuration peut conduire lui enlever l autorit n cessaire pour imposer ses m thodes rigoureuses et ses connaissances Des technologies comme le management la formation la communication le d veloppement social souffrent d un manque de professionnalisation et d institutionnalisation ce qui laisse la porte ouverte la production de solutions d une technologie par des non experts de cette technologie 19 26 e Quand il s agit d une technologie dont les solutions se pr tent difficilement une valuation L absence d valuation rigoureuse emp che de d montrer aux non experts l int r t de faire appel des experts de la technologie concern e e Quand la technologie A c
31. nt la r glementation a fait aussit t l objet d une brochure largement diffus e en vue d une bonne communication Mais dans cette pr cipitation l objectif de cette communication n a pas t d fini Les sp cialistes de la r glementation ont con u implicitement cette brochure afin que leurs correspondants techniques re oivent une information synth tique dans un d lai tr s court Le service de la communication quant lui a vu la brochure comme un produit de vulgarisation rapide destin aux clients de l organisme Cette incertitude n e de l urgence excessive a produit une solution qui n a pas eu de sens Le bulletin trop technique s est r v l incompr hensible pour les clients Mais en m me temps comme il n a pas t con u dans un but exclusivement technique il n a t d aucune utilit pour le r seau des experts Comment expliquer l escamotage de la phase de clarification et de pr cision de l objectif et le passage imm diat la solution Une premi re cause est extr mement triviale et pourtant fr quente Il s agit d un biais cognitif la tendance croire qu un objectif est d embl e clair et pr cis et qu il n est pas n cessaire de l examiner davantage Des objectifs aussi g n raux que il faut former les agents de ma trise ou il faut informer le personnel comportent une multitude d options possibles Or il est fr quent que les acteurs consid rent ces objectifs tels que et se lancent dans la solution
32. nts Voir pr c demment Bien entendu cela suppose que l organisation qui abrite la solution d connect e soit suffisamment riche et m me tr s riche pour supporter le maintien de solutions aberrantes Pour illustrer ces diff rents processus d auto alimentation d une solution consid rons un exemple Dans telle organisation 1l existe pour ses membres un programme de formation qui constitue une sorte d lectron libre Il n est rattach aucun l ment du plan beaucoup n en connaissent pas l existence ceux qui le d couvrent sont fort tonn s de son contenu et le responsable de ce stage pratiquement ne rend compte personne On retrouve les m canismes d crits pr c demment le responsable de ce stage se donne son oeuvre avec un dynamisme et un courage qui forcent l admiration de beaucoup l action comme objectif en tant que tel Cette formation concerne un besoin qu en fait il n est pas possible de satisfaire Mais elle donne l illusion de faire quelque chose le refus de l absence de solution Comme souvent en formation 1l est impossible d valuer les effets impossibilit de v rifier que la solution est reli e un objectif La qualit de la p dagogie et de la logistique est particuli rement soign e qualit d une solution comme garantie suppos e de son efficacit Cette formation est regard e comme un indicateur que la cat gorie sociale concern e par elle est prise en compte par la politique sociale utilis
33. ologie qui pr sente une ou plusieurs des caract ristiques suivantes dissoci e entre ses experts d un cot et d un autre cot son activit conduite ou dict e par d autres apparemment facile peu professionnalis e et institutionnalis e difficilement valuable peu valoris e dans l opinion dot e d un r le secondaire a toutes les chances de voir son champ d activit captur par les experts d une autre technologie et d tre ainsi productrice de solutions consid rablement d connect es Il est certain que le kidnapping technologique n puise pas les cas d organisation technologique l origine de solutions ineptes Ainsi l organisation en m tiers juxtapos s qui n est pas un cas de kidnapping technologique selon notre d finition peut elle aussi produire des solutions absurdes par exemple quand chacun con oit dans son coin une partie de la solution sans tenir compte de la coh rence d ensemble Notre intention ici tait ici d attirer l attention sur un cas d organisation technologique qu on ignore ou qu on sous estime dans l explication de d cisions ineptes En effet il est difficile d imaginer que l absurdit de d cisions puisse provenir tout simplement de ce que des acteurs ont exerc un m tier qui n tait pas le leur L INCOHERENCE POTENTIELLE MECANIQUE Un ultime ph nom ne favorisant l mergence de solutions consid rablement d connect es est une fragilit en quelque sorte constitutionnelle m canique de l
34. on absurde En revanche nous serions enclins consid rer la navette Challenger non comme une solution conduisant un chec mais bien comme une solution consid rablement d connect e Pourquoi L explosion a t provoqu e par une fuite de gaz sur une des deux fus es de lancement Un joint a tout simplement mal fonctionn Jusqu ici on reste dans l chec normal Le probl me est que ce joint fonctionnait tr s mal basse temp rature ambiante que la Floride peut tr s bien conna tre De plus le joint de secours fonctionnait exactement sur le m me principe La panne du premier joint due la temp rature ambiante ne pouvait pas ne pas s accompagner automatiquement de la m me panne sur le joint de secours C est a qui l ve cette solution du rang de solution chec au rang de solution consid rablement d connect e 9 26 Concevoir un joint qui ne fonctionne pas une temp rature ambiante possible est d j une premi re aberration Que le joint de secours suive la m me loi rend absolue cette ineptie Il n est pas n cessaire d tre un expert de cette technologie pour le comprendre C est comme si les compartiments tanches d un navire taient dot s d un m canisme fou les faisant communiquer pour qu ils se remplissent en m me temps La solution des joints de Challenger tait si clairement d connect e que de nombreux ing nieurs avaient recommand l annulation du lancement de Challenger pour cette raison l un
35. on m me qui doit tre contr l e Pour donner un autre exemple tout en restant dans le domaine de la s curit les alarmes d brayables ou ph m res sont potentiellement incoh rentes Des avions de tourisme se sont cras s l atterrissage parce que l alarme informant le pilote que le train n tait pas sorti tait d brayable et parce que le pilote exc d par le bruit l avait d sactiv e Le principe m me d une alarme est d tre bruyante et g nante pour ne pas dire exasp rante et tous les efforts pour rendre une alarme confortable d sactivation possible dur e limit e sonorit plaisante la d tournent de sa finalit premi re En poussant le raisonnement une alarme ergonomique est une solution consid rablement d connect e Un troisi me cas d incoh rence potentielle affecte les technologies structurellement grossi res employ es pour remplir des objectifs fins Dans le domaine de la strat gie militaire si la technologie des bombardements a riens produit si souvent des solutions absurdes n est ce pas parce qu on cherche mettre cette arme aveugle au service d objectifs militaires ou diplomatiques fins voire extr mement subtils Sur les bombardements aveugles 21 26 des grandes villes allemandes au cours de la seconde guerre mondiale l historien L Hart a expliqu la faible rentabilit politique de la d moralisation ainsi provoqu e par cette formule remarquable les individus ne peuvent pas se
36. oncern e d tient un soutien affectif tr s inf rieur celui dont b n ficie une autre technologie B Ce d s quilibre peut pousser les experts de la technologie B se consid rer aussi comme des experts de la technologie A sans que les vrais experts de A disposent de l influence sociale permettant de s y opposer Par exemple dans le couple qualit totale formation la technologie de la qualit totale b n ficie d une faveur et d un int r t tr s lev s compar s la technologie de la formation Cela peut conduire par exemple les experts de la qualit se consid rer comme concepteurs de la formation en marginalisant les experts de formation e Quand une technologie semble intervenir de fa on secondaire dans une solution cette condition est voisine de la pr c dente C est souvent le cas de la technologie de l information qui vient en appui d une autre technologie dans le cadre de sa diffusion Par exemple l application d une loi ou le fonctionnement d un appareil font intervenir l information la loi doit tre diffus e et expliqu e et l appareil doit tre pourvu d un mode d emploi Mais on accorde g n ralement peu d importance la technologie de l information du type mode d emploi Or une loi qui n est pas connue est une solution inepte puisqu elle ne r pond pas un objectif essentiel que nul ne l ignore De m me un appareil au mode d emploi incompr hensible peut perdre le maximum de son utilit Ainsi une techn
37. ormations techniques l efficacit de la formation par rapport l objectif ultime On peut v rifier qu un stage de relations humaines est une formation de qualit Mais comment prouver que ce stage am liore la prise en compte des relations humaines dans l entreprise o 1l est dispens Un quatri me facteur d auto l gitimation de la solution est la doctrine du management ax sur le processus par opposition au management ax sur le r sultat L id e du management orient vers le processus est que la qualit d un processus finit par produire de bons r sultats et de surcro t leur r gularit Un management exclusivement port sur les r sultats peut conduit des effets positifs voire spectaculaires mais instables et superficiels si les processus sont d faillants Michel Hidalgo l ancien entra neur de l quipe de France de football recommandait ses joueurs au d but des plus grandes rencontres en substance ceci ce que je veux c est que vous jouiez bien faites un beau jeu Ne vous pr occupez pas du r sultat je m en charge Je l assumerai moi seul quel qu il soit Le management orient sur le 15 26 processus inspir du management japonais est une pratique tr s int ressante mais qui peut aussi faciliter l mergence d une solution consid rablement d connect e Concentrer exclusivement son attention et son nergie sur la qualit d un processus c est dire d une solution ind pendamment de son r
38. ot technologie dans ce sens tout fait sp cifique J G March consid re qu une technologie ainsi d finie complexe peu ma tris e et peu claire constitue l un des trois piliers de l anarchie organis e avec les objectifs flous et les participants peu impliqu s terreau de solutions reli es de fa on arbitraire un objectif Nous voudrions reprendre cette id e de technologie probl matique que James G March pose comme une des trois conditions de d part de l incoh rence mais sous un autre angle Selon nous un g n rateur efficace de solution consid rablement d connect e est 18 26 constitu par les situations que nous appellerons kidnapping technologique o la solution est con ue ind pendamment des experts de la technologie concern e Au d but de ce texte nous citons l exemple d une universit d entreprise cr e dans un groupe allemand qui n avait pas r pondu au besoin de formation au management participatif pour lequel elle avait t con ue et qui tait devenue un organisme de formation vendant des stages classiques l ext rieur Une des raisons de ce d tournement est que cette universit avait t con ue organis e et dirig e totalement en dehors des experts de la formation par des personnes qui ne poss daient aucun professionnalisme dans ce domaine Non expertes elles sont all es vers les solutions les plus simples laborer cours magistraux produits standards compl tement inadapt es
39. r des explications irrationnelles 18 Toutefois la situation inverse explication rationnelle d une solution absurde peut survenir dans les ph nom nes de connaissance ordinaire Des exemples de la vie quotidienne le montrent La r ussite de canulars les plus extravagants en est une illustration Les canulars t l phoniques o on entend des correspondants sens s croire qu une chaussette encombre un couloir a rien des milliers de m tres d altitude et va atterrir sur leur pied ou qu une quipe de t l vision se d place l int rieur des canalisations de leur logement et va leur tendre une main par l vacuation des sanitaires montrent qu on peut faire accepter plus de situations absurdes qu on ne le pense Ainsi il peut arriver que le sens commun juge fond es des solutions consid rablement d connect es et consolide de ce fait leur existence D autant plus que dans les organisations toute solution consid rablement d connect e b n ficie des symboles de l institution et de l autorit On sait qu un canular a d autant plus de chance de r ussir qu il utilise du papier en t te et des acteurs simulant des repr sentants de l autorit policier pompier fonctionnaire maire ou du savoir enseignant m decin Le quiproquo des responsabilit s Un autre biais cognitif conduisant admettre les solutions absurdes est le m canisme conduisant chacun croire que c est quelqu un d autre qui va ou doit arr te
40. r douloureusement qu il ne soit pas atteint Mais 22 26 lorsqu un journaliste propose de partir en week end le lundi le sens de la solution s vanouit est ce s rieux qui s adresse t on Est ce bien une r ponse la question Il existe donc des combinaisons particuli res de processus rationnels pr cis qui au lieu de d truire le r sultat d truisent le sens b Les autres conceptions de la rationalit consid rer ici 22 sont celles qui bien qu elles ne soient pas d finies de fa on s mantique comme le propose R Boudon sont relativement r alistes Nous faisons allusion La rationalit qui fonctionne l aide de processus tels que les associations d id es l usage des symboles et analogies la d couverte par distraction etc Elle pourrait tre consid r e comme appartenant la rationalit proc durale d H Simon 23 La rationalit qui fonctionne sur le principe d un court circuit d imitation entre l objectif et la solution 24 Par exemple si l objectif est de r soudre tel probl me technique et si comme souvent les responsables r agissent aussit t en disant qu il faut former le personnel cette technique on a un court circuit d imitation de la solution par rapport l objectif la solution traite le probl me sans interpr tation Probl me technique lacune formation n cessaire Alors que la formation n est peut tre pas la solution adapt e c est peut tre un probl me organ
41. r ou corriger la solution ou qui a une bonne raison de la maintenir Comme cette famille r partie dans deux voitures qui oublie un enfant chacun croyant que l autre l a pris avec lui Ce quiproquo des responsabilit s est d autant plus important que la taille de l organisation est lev e et donc que le nombre d acteurs est grand La pleistocratie d crite par J D Reynaud 19 pour expliquer les d cisions incoh rentes est aussi pour nous un facteur de distraction cognitive la multiplication des parties prenantes augmente les possibilit s de croire que quelqu un d autre va r gler l incoh rence ou que plus g n ralement quelqu un quelque part poss de l explication rationnelle La limite incertaine entre l absurde et le sens Il arrive qu une solution consid rablement d connect e donne une image d elle qui la situe la limite de l absurde et du sens Alors cela conduit la consid rer comme sens e Autrement dit quand un cas est absurde mais de fa on ambigu le pr jug de raison est encore plus fort La fa on dont un auditoire spontan ment refuse ou accepte des transparents consid rablement inadapt s pass s au r troprojecteur renseigne utilement sur ce ph nom ne Par exemple si le 17 26 conf rencier par m garde passe son transparent l envers aussit t la salle r agit bruyamment et l orateur remet l endroit son document Si le transparent est compl tement flou un murmure s l ve de l audi
42. retrait d une n gociation que nous avons identifi e comme facteur d anomie n est rien d autre que l impossibilit pour des participants de sortir du jeu De m me l interdiction du recours facteur d anomie quivaut une impossibilit pour les participants un certain niveau de l organisation d entrer dans le jeu Le kidnapping technologique qui constitue pour nous une des cinq explications du divorce profond entre fins et moyens n est rien d autre que l impossibilit pour des participants experts d une technologie d entrer dans le jeu de leur technologie qui a t confisqu e par les experts d une autre technologie De m me le passage trop rapide la solution est une fa on pour les sp cialistes de rendre impossible l entr e des participants politiques dans le jeu La constitution d une solution comme gagne pain entra ne un blocage du flux des participants Nous voyons donc qu chaque fois l explication est plus un gel de la participation des acteurs qu un flux libre et autonome de participants Notre id e est que des syst mes beaucoup plus organis s que des anarchies organis es du type des universit s peuvent produire des solutions consid rablement d connect es sous certaines conditions recours interdit impossibilit du veto ou du retrait kidnapping technologique absence de circulation entre politiques et sp cialistes ordre du jour rigide participants accroch s de fa on vitale une solution 25 26
43. s tranges la r cup ration On pourrait penser qu une solution consid rablement d connect e ne poss de pas de clients Or ces solutions finissent par en trouver Dans notre exemple de l organisme de formation au management participatif dans une entreprise allemande consid rablement d connect par rapport son objectif les clients sont devenus des stagiaires externes qui se sont r v l s tre plusieurs reprises des concurrents Le journaliste qui propose aux parisiens de se rendre la campagne en dehors des week ends trouvera bien quelques auditeurs int ress s des retrait s sans famille des ouvriers employ s uniquement les samedis et dimanches etc Le conf rencier qui projette des transparents illisibles de la salle utilise l cran comme notes personnelles Le prestataire du support est en fait son propre client Ces quelques exemples donnent une id e des caract ristiques des consommateurs des solutions consid rablement d connect es La solution trouve comme d bouch s soit ses propres adversaires les concurrents soit des utilisateurs marginaux les retrait s dans notre exemple des embouteillages soit les prestataires eux m mes de la solution l orateur dans le cas du transparent illisible Autrement dit ces divers clients des solutions consid rablement d connect es poss dent un trait commun ils sont l oppos de ce qui constitue la raison d tre de la solution L AUTO LEGITIMATION DE LA SOLUTI
44. s diff rentes d finitions de la rationalit a Consid rons en premier lieu la d finition s mantique de R Boudon 21 est rationnel tout comportement Y dont on peut dire X a de bonnes raisons de faire Y car Un grand nombre des explications que nous avons propos es peuvent tre consid r es comme les bonnes raisons de cette d finition Ceci dit d autres solutions qui sont fortement d cal es de leur objectif comme les solutions conduisant des checs ou les solutions effets pervers sont aussi le r sultat de bonnes raisons Cependant s agissant de ces solutions les bonnes raisons ne remettent pas en cause l intention d origine Alors que les bonnes raisons de la solution consid rablement d connect e d truisent le sens m me de l action Pour reprendre l exemple familier du r troprojecteur l orateur qui passe un transparent l envers le remet aussit t l endroit L erreur ne touche pas l objectif de lisibilit Au contraire elle le renforce l erreur rappelle avec clat que l cran doit tre lisible En revanche projeter des textes trop longs crits trop petit cette pratique tant largement r p t e et diffus e an antit le sens de l outil On ne sait plus quoi il sert De m me l effet pervers de se retrouver dans un embouteillage un jour th oriquement d gag ne touche pas l objectif de fluidit du trafic L encore l effet pervers renforce plut t l objectif en faisant senti
45. s gisements de solutions consid rablement d connect es par exemple les solutions dans le domaine de l information au sens large Ils appartiennent la micro sociologie Mais on aurait tort de ne pas y pr ter attention car ils sont sur ce plan r v lateurs et r p titifs Ainsi une entreprise fran aise labore un syst me expert destin aux ouvriers de sa filiale hollandaise pour les aider mieux comprendre et g rer les pannes survenant sur leurs installations Le syst me expert con u et mis en place est irr prochable sur le plan p dagogique la r serve pr s que les messages qui apparaissent l cran aux postes de travail sont en fran ais que les ouvriers hollandais ne lisent pas On ne peut contester que des messages 1llisibles constituent une solution consid rablement d connect e Autre exemple dans ce domaine en entreprise l usage du r troprojecteur est devenu la r gle dans les r unions Pr parer une r union et faire des transparents sont deux expressions devenues synonymes Mais il est extr mement fr quent que les transparents projet s soient illisibles parce que les caract res utilis s sont trop petits et parce qu ils comprennent trop de texte pour le temps pendant lequel le document est pr sent D ailleurs leurs auteurs ne s en cachent pas faisant chaque fois une d claration telle que vous ne pourrez pas lire les transparents mais je vous les passe quand m me Nous reviendrons sur cet ex
46. sciplinaire la r action naturelle des ing nieurs de formation et des experts de la qualit sera de tacitement s entendre pour laisser produire de la solution au lieu d approfondir les objectifs 11 26 Une disponibilit insuffisante des responsables un niveau de direction strat gique accompagn e de services techniques qui eux disposent de davantage de temps peut aussi favoriser l escamotage de la phase politique Sur un sujet donn les services techniques travaillent sans que les responsables pris par le temps puissent dialoguer avec eux sur la dimension strat gique Une solution peut ainsi partir la d rive d connect e de toute vision politique claire L anomie par compromis forc sur des objectifs inconciliables Il existe une configuration de n gociation g n ratrice de solutions consid rablement d connect es que nous appellerons le compromis forc sur des objectifs inconciliables Cette configuration de n gociation pr sente trois caract ristiques D abord le d saccord sur les objectifs est particuli rement profond Il s agit en fait plut t d objectifs compl tement contradictoires Le but d un adversaire exclut presque m caniquement ou logiquement le but de l autre En second lieu les acteurs de la n gociation sont dans l obligation absolue de produire une solution commune Aucun des deux ne peut se retirer ou mettre un veto Enfin aucun arbitrage ni recours aupr s d un niveau sup rieur n est poss
47. solution un autre objectif une solution d fectueuse devient une solution efficace par changement de l objectif 3 26 Les solutions attribu es par transfert flight d autres objectifs que d crit J G March 8 dans son mod le de la poubelle entrent dans cette cat gorie elles s adaptent l objectif sur lequel elles tombent Afin d tre complet 1l faut citer une sixi me cat gorie de solutions d cal es Il s agit des solutions magiques Le d calage par rapport l objectif est relatif Pour ceux qui n y croient pas le d calage est vident et fort Pour ceux qui y croient elles sont parfaitement dans l objectif Mais cet inventaire n puise pas toutes les solutions d cal es Il existe une ultime cat gorie que nous appellerons solutions consid rablement d connect es Elles poss dent comme caract ristique une incoh rence au premier degr qui les rend intrins quement absurdes en quelque sorte comme une roue carr e une casserole sans fond ou un escalier qui ne monte ni ne descend Elles existent et sont activ es de fa on autonome par rapport tout objectif Ce sont des lectrons libres dans l univers des finalit s 9 TYPE DE SOLUTION THEORICIENS Solution non optimis e DIMENSION DU DECALAGE PAR RAPPORT A L OBJECTIF H A Simon e d calage mod r Solution bureaucratique sous cat gorie de la C Perrow e d calage mod r ou pr c dente assez lev Solution aboutissant
48. squisses de solutions Son principe est d agir avant m me d avoir fix de fa on pr cise l objectif afin de l explorer et ainsi de mieux le d finir et le d cliner Enfin selon nous la rationalit axiologique est une rationalit qui fait l conomie de la rationalit t l ologique et inversement En effet quand on agit en fonction d une valeur le capitaine qui se laisse couler avec son navire il n y a g n ralement pas de d clinaison de cette valeur Le capitaine efface les tapes interm diaires dans la cha ne qui va de la valeur supr me de l h ro sme la solution dispara tre avec son bateau La solution est imm diatement accol e la valeur au point qu il est difficile de distinguer les deux se laisser couler avec son navire est autant la valeur que la solution Inversement la rationalit t l ologique pour l ing nieur construire un pont ignore l objectif sup rieur Il manque dans la cha ne des d cisions toute la partie amont Autrement dit la distinction de M Weber conduit penser que l acteur peut agir soit en fonction de la rationalit axiologique soit en fonction de la rationalit t l ologique mais qu il lui est extr mement difficile de concilier en les coordonnant les deux rationalit s C est le dilemme du Pont de la rivi re Kwa comment tre la fois h ro que et m ticuleux On voit donc que toutes les rationalit s r alistes fonctionnent l aide de m canismes qui r duisent occ
49. t illisible est absurde au premier degr Seule une certaine inattention nous y reviendrons au chapitre de la distraction cognitive peut conduire ne pas enregistrer l incoh rence C est galement cette incoh rence au premier degr des solutions consid rablement d connect es qui les distingue des solutions aboutissant un chec Dans les checs les causes sont complexes plus souvent cach es et souvent m me impr visibles Essayons de mieux expliciter cette incoh rence imm diate des solutions consid rablement d connect es travers deux exemples c l bres de d calage entre la solution et l objectif l chec du sauvetage des otages am ricains en Iran tel que l analyse P Rosenzweig 13 et l explosion au d collage de la navette Challenger le 28 janvier 1986 tudi e par H Laroche et J M Saussois 14 Pour nous quelles que soient les erreurs commises dans la conception de l op ration am ricaine en Iran cette solution est bien une solution conduisant un chec et non une solution consid rablement d connect e selon notre d finition Bien s r la mission fut affect e d un risque excessif d une information d fectueuse dans sa pr paration d erreurs techniques assez graves erreurs de calcul des chances de succ s notamment de malchance vent de sable et collision de pressions politiques mais elle n tait pas intrins quement incoh rente au premier degr Elle tait tr s risqu e imparfaite mais n
50. tion aux relations humaines Mais cette universit d s le d part prend une grande autonomie par rapport l objectif elle se contente de diffuser un discours incantatoire l ensemble de l encadrement puis se transforme en organisme de formation vendant l ext rieur du groupe des stages de formation au management classiques Elle ne sera jamais ce qu elle devait tre un instrument interne au service d une politique de changement des mentalit s On pourrait penser que l orientation prise par cette universit correspond un simple changement d objectif Mais ce n est pas le cas dans notre exemple L objectif initial a t maintenu de fa on tr s affirm tel point qu un dirigeant de l entreprise a demand cette universit d organiser un stage de relations humaines sans imaginer la moindre difficult puisque cette demande tait parfaitement conforme la mission de l universit Mais elle a t incapable de satisfaire la demande du dirigeant en raison de ses engagements l gard de ses clients externes Consid rons un autre exemple de solution consid rablement d connect e emprunt au management la direction d une entreprise am ricaine demande la cr ation d une cellule interne de conseil en organisation A la place se d veloppe un service d tude qui lance de sa propre initiative des investigations assez acad miques qui ne sont pas exploit es en interne Il existe des domaines qui sont plus que d autres de
51. toire Le conf rencier comprend ce qui se passe mais maintient le transparent Il a au moins appris que son transparent tait flou En revanche si le transparent est tout aussi illisible mais pour d autres raisons les caract res sont trop petits ou il y a trop de texte par rapport au temps de lecture personne ne r agit et l orateur continue croire qu il est lisible Dans les trois cas transparent l envers transparent flou transparent crit trop petit ou trop long lire l cran est illisible Il s agit donc bien de micro solutions consid rablement d connect es Le d calage est aussi fort dans les trois cas Toutefois la r action varie en fonction du caract re plus ou moins clatant du d calage r action bruyante pour le transparent l envers murmures pour le transparent flou silence pour le transparent crit trop petit ou trop long lire Dans le troisi me cas o l illisibilit prend une forme ambigu cach e pour ne pas dire sournoise l auditoire laisse passer la solution Des solutions consid rablement d connect es mais dont le d calage prend une forme ambigu entre le sens et l insens sont plus facilement accept es ou tol r es C est un probl me majeur des solutions consid rablement d connect es la limite du sens et de l insens Il est tr s difficile de d montrer leur d calage de les d noncer en quelque sorte Quand un transparent est crit trop petit ou trop long lire
52. trouve Par exemple 25 quelqu un ne parvient pas retrouver le nom d une personne qu il conna t Son interlocuteur soudain se souvient son nom commence par Z Tu as raison lui r plique l autre c est Frizell Il est vident que l acteur n aurait jamais retrouv le nom s il avait ax sa recherche sur les noms commen ant par la lettre Z C est exactement parce qu il a laiss son esprit s garer en dehors de l objectif qu il a 23 26 trouv la bonne solution En poussant quelque peu cette observation on pourrait dire que la distraction est une ruse importante de la rationalit proc durale par opposition la logique d ductive formelle La rationalit par court circuit d imitation consiste mettre de c t non l objectif mais le travail de d clinaison en sous objectifs Elle permet de trouver une solution par simple calque de la solution sur l objectif la formation pour combler une lacune par exemple Cette ruse permet l esprit humain en r duisant la cha ne des d cisions entre l objectif et la solution de d gager rapidement et facilement une solution La rationalit fond e sur le pr c dent peut aussi tre consid r e comme un processus qui efface l objectif C est un moyen de combler l absence d objectifs clairs et pr cis faute de politique on fait comme avant La rationalit incr mentale est de fa on vidente un effacement de l objectif et de sa d clinaison en sous objectifs priorit s e
53. ultent en partie simplifient la d lib ration sur les fins Le principe fondamental de la rationalit humaine naturelle serait de tout faire pour r duire la cha ne des d cisions sur les objectifs et les buts interm diaires oublier l objectif imiter simplement l objectif commencer par agir faire comme avant pr c dent agir en rejetant toute fin ultime Si cela est vrai on comprend que des solutions consid rablement d connect es surviennent parfois Les rationalit s humaines qui toutes poss dent comme principe de fonctionnement une simplification du travail sur les objectifs d rapent parfois en passant de la simplification l oubli ou l escamotage des objectifs lorsque les conditions identifi es tout au long de cet essai sont r unies La distraction au lieu de produire une d couverte permet l tablissement d une ineptie 24 26 Le court circuit d imitation de l objectif au lieu de produire une solution adapt e rapide et simple conduit une solution en fait d connect e par exemple instituer une formation pour combler une lacune qui n est pas en fait un probl me de formation La rationalit fond e sur le pr c dent aboutit faire de lui le but ultime La rationalit incr mentale au lieu d aider explorer l objectif conduit l oublier compl tement et noyer la solution dans le plaisir de l action La rationalit axiologique pouss e un point extr me rejette la
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