De la science dans la fiction
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1. des jeux de hasard de la biologie ou de la psychologie tandis que Harry Mulischi dans La d couverte du ciel m le arch ologie astronomie musique et religion La litt rature renvoie ainsi les scientifiques leur propre image apportant la critique l o manque l autocritique et d autre part elle interroge la connaissance scientifique dans le contexte plus large de la pens e humaine et non l aune de ses propres crit res Ce qui est vrai pour les disciplines est vrai aussi pour les diff rents niveaux de la pens e L o les sciences s parent trient purent et simplifient artificiellement le roman reste fid le enchev trement inextricable du r el Pour Jean Fran ois Chassay professeur l universit du Qu bec Montr al l activit de la pens e scientifique n est pas faite que de raison mais aussi d autres ingr dients souvent tr s insaisissables parfois particuli rement triviaux Passer des quations de Schr dinger aux jambes d Yvonne n est pas tr s noble sans doute Mais la trivialit est un ingr dient du fonctionnement de la pens e celle ci ne pouvant exister sans m langes Autrement dit le roman est un espace suffisamment brouillon pour que les savoirs et les motions y communiquent librement Il serait un peu le tronc commun dont partiraient les diff rentes branches correspondant aux savoirs organis s au risque de se perdre de vue Qu il y ait racine commune on s en convai2. Hermann Broch Les somnambules Georges Perec La vie mode d emploi Raymond Queneau Petite cosmogonie portative Umberto Eco Le pendule de Foucault La libert de cohabitation Dans une attitude comme dans l autre critique ou pist mologique le romancier prend la libert de mettre en relation des savoirs provenant de sources diverses Il rassemble dans un m me espace narratif des disciplines que l organisation acad mique s pare compl tement L crivain anglais Percy Shelley estimait que l une des t ches de l crivain tait d absorber les nouvelles connaissances scientifiques et de les transformer en de nouvelles racines pour la pens e humaine C est dire poursuit Christine Maillard que le roman est peut tre par vocation ce lieu transdisciplinaire que les scientifiques appellent de leurs v ux alors qu ils se lancent dans des sp cialisations de plus en plus pouss es Depuis que la science se d fie des explications g n rales comme des solutions autres que sectorielles et sp cialis es la litt rature doit relever un grand d fi et apprendre nouer ensemble les divers savoirs les divers codes pour laborer une vision du monde plurielle et complexe notait Italo Calvino C est ce que s emploient faire certains romanciers contemporains dans de grandes fresques aux multiples facettes Dans Habitus James Flint relie des concepts math matiques et informatiques des id es tir es de la spiritualit
3. De la science dans la fiction par Elisa Brune Outre la SF qui fantasme sur l avenir des sciences il y a aussi la fiction tout court qui les d cline au pass ou au pr sent Les romanciers ont la libert de l imaginaire Et la facult de rendre les aventures de la science passionnantes Le physicien Richard Feynman qui l on demandait de r sumer ses recherches en trois minutes pour la radio r pondit que si cela avait t possible il n aurait pas re u un prix Nobel La nature du discours scientifique est d tre complexe et articul Comment donc des romanciers pourraient ils s emparer d un mat riau si difficile d acc s C est que l crivain est libre de traiter son sujet sa guise partiellement partialement au gr de son sc nario et de sa volont Il ne d montre pas il montre Il recompose les l ments de la r alit selon ses propres lois Il choisit ses th mes dans tout ce qui frappe son imagination et surtout il les m tabolise tel un syst me digestif Marcel Proust qui aimait les m taphores emprunt es au domaine scientifique ne disait il pas Inclure de la th orie dans le roman ce serait comme de laisser les tiquettes avec les prix sur les bibelots Les uns et les autres Si l crivain choisit d exploiter le milieu scientifique ce n est g n ralement pas sans arri re pens e Selon Christine Maillard professeur de litt rature et de civilisation allemandes l Universit March Blo
4. ch Strasbourg FR on peut relever deux grands types de motivation Un premier groupe rassemblerait les auteurs d une critique sociale id ologique ou individuelle de la science Celle ci est analys e dans ses impacts sur le lien social les quilibres cologiques les choix thiques ou la sant psychique des individus Le scientifique y est volontiers pr sent comme un homme souffrant de graves troubles psychologiques et incapable d entrer en relation avec ses semblables Le romancier tire la sonnette d alarme et met en garde contre les exc s d un certain scientisme Ainsi des auteurs comme Michel Houellebecq Les particules l mentaires Zadie Smith Sourires de loup Bernard Werber L ultime secret David Lodge Pens es secr tes font ils tous tat des cons quences d shumanisantes d une science pouss e jusque dans ses derniers d veloppements Une seconde tendance r unirait des crivains se livrant une enqu te d ordre plus philosophique sur la nature de la connaissance scientifique ses limites ses liens avec d autres types d approches voire sur la nature de la r alit elle m me sur son unit ou sa connaissabilit C est la l gitimit m me de la d marche scientifique qui est interrog e ainsi que son statut par rapport d autres activit s humaines Cette voie a rassembl de tr s grandes pointures litt raires notamment Robert Musil L homme sans qualit Thomas Mann La montagne magique
5. ncra ais ment continue Jean Fran ois Chassay Toute la d marche scientifique n est elle pas construite autour de la notion d hypoth se Et qu est ce qu une hypoth se sinon une fiction jusqu au jour o une exp rience ad quate la confirme ou l infirme En ce sens on pourrait dire que la science est fille de la fiction Elle prendra des voies sp cifiques bien s r pour explorer ses intuitions mais il reste qu un scientifique sans hypoth se est aussi d muni qu un crivain sans imagination Des vies et des aventures Face aux publications sp cialis es le roman a l avantage de toucher un toucher un public autrement large Il suffit de songer la mani re dont Jostein Gaarder Le monde de Sophie a vulgaris la philosophie De m me l auteur capable de raconter la science en mots en histoires en intrigues se met en mesure de renverser les r sistances et de passionner pour les fourmis ou pour la conqu te de Mars ceux l m me qui avaient ex cr leurs manuels de science A bien y regarder la science est un roman mais les pratiques de communication et d enseignement se bornent trop souvent en transmettre des r sultats aseptis s Pour retrouver sa dimension narrative et aventureuse il suffit de se plonger dans Bertolt Brecht La vie de Galil e Michael Frayn Copenhague Daniele Del Giudice Atlas Occidental Michael Paterniti Driving Mr Albert et bien d autres qui traduisent et communiquent la passi
6. on de leurs personnages Passion sans laquelle la science toute raisonnable se d clare t elle ne serait rien http ec europa eu research rtdinfo special_as article 817_fr html
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