ANSIEDADE EM CONTEXTO ESCOLAR
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1. 185 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL Le lecteur est ainsi conduit dans l espace de villes improbables partager des histoires de vie fragmentaires dont il ne conna tra que quelques instants pr sentifi s le temps du r cit qu aucun lien logique ne semble relier entre eux La chronologie est abolie dans les r cits lovaysiens au profit d un temps que le lecteur ne pourra plus lire selon un ordre successif mais qui lui est offert dans toute sa pl nitude le temps qui fut et le temps qui viendra le pass et le pr sent Sans doute le temps universel qui d finit le mythe ant rieur toutes les manifestations que demande sa mat rialit de m me que d passant les contingences de cette mat rialit pr c dant son intelligibilit un pass ant rieur la conscience Lovay Polenta 103 Le rapport au monde se traduit souvent dans l univers romanesque de Lovay par l effort de concentration de ses personnages sur le menu d tail sans que cela implique forc ment l attribution d un sens l objet observ La curiosit de Barthes envers le contemporain Rabat se mue chez Lovay en curiosit sur les objets apparemment insignifiants du quotidien Lire Lovay est ainsi une invitation regarder le monde autrement l apprendre par la voie du d tail infime Rasson Schuerewegen D un infime qui est pourtant agissant souvent dot d une volont propre auquel sont attribu es des facult s que leur n2. de l Instituto de Literatura Comparada Margarida Losa de la Facult de Lettres de Porto une I amp D subventionn e par Funda o para a Ci ncia e Tecnologia dans le cadre du Programa Operacional Ci ncia e Inova o POCI 2010 Quadro Comunit rio de Apoio M POCI 2010 SFA 18 500 Une version l g rement r duite de cet article en langue anglaise a t r dig e pour actes du colloque Mitos y subversion en la novela contempor nea tenu l universit Complutense de Madrid 9 11 mars 2011 Interview Gilbert Salem http salem blog 24heures ch archive 2008 02 08 jean marc lovay un label de droiture html Site visit le 3 mars 2011 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL l approche des mythes Barthes La mythologie aujourd hui 84 Dans La mythologie aujourd hui article paru en 1971 dans la revue Esprit Barthes fait le bilan des tudes sur les mythes contemporains depuis la parution de son livre Mythologies proc dant leur valuation il constate que l ali nation de la soci t oblige toujours d mystifier les langages et notamment celui des mythes 83 S il est vrai que ses tudes portent la marque du temps o elle furent d velopp es la pens e barth sienne sur le mythe m riterait que l on s y attarde encore Les conditions du retour de l engagement de la litt rature dans les textes contemporains font l objet de la r flexion que m nent depuis q
3. Venvers que la reproduction de la toile de Bosch Le Concert dans Voeuf en couverture du recueil de nouvelles Midi Solaire ou le regard ambigu de Pillustration qui provient de la collection du Mus e de l Art Brut de la couverture du roman Tout l bas avec Capolino introduisent admirablement les r cits de Lovay semblent de ce point de vue profond ment engag s dans le contemporain dont ils mettent nu en toute libert quelques mythes Une forme d engagement qui se dit souvent sous le registre de la parodie du burlesque du carnavalesque dont Bakhtine avait soulign l importance pour l acte de lecture qui leur te toute r surgence tragique Ne cherchant pas r cup rer des figures mythiques dans ses r cits mais par le biais d un patient et m ticuleux travail de 1 Expression inspir e de l analyse des figures privatives dans le r cit de Lovay par Meizoz 101 Le mot crime est r current dans les textes du romancier Sur les figures du renversement de la fonction et le monde l envers v Meizoz 33 Didier Jacob journaliste de Le Nouvel Observateur questionne Lovay sur l tranget de son univers romanesque compar un monde l envers r ponse du romancier Vous dites a mais il m est arriv de retourner ma table pour avoir l impression de travailler apr s un tremblement de terre J ai crit comme a sur ma table retourn e comme un plafon
4. cits mythiques les h ros contemporains se laissent s duire A nous 190 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE montrer que les mythes connaissent bien des moments de dilatation ou de r gression mais que les dieux sont toujours l pr ts nous punir ou du moins nous pi ger La r union des crivains d crite dans La Conf rence de Stockholm en constituerait le r cit exemplaire vrai concile des dieux dans un Olympe r unit au fond de la terre dans un abri nucl aire aux murs d cor s par des enfants qui y ont dessin un norme champignon nucl aire l int rieur duquel saignait par la bouche un chevreuil 14 L aube immobile mais pourtant l aube des clairs nucl aires des incendies d vastateurs mais pourtant source de lumi re petits rep res dans l horizon incertain au bout impr cis de la Route qu il faudra suivre malgr tout sous peine d un ch timent inimaginable le temps pr sentifi mais pourtant la qu te de pistes d un pass imm morial l accomplissement de t ches m me improbables Triomphe de la litt rature solaire dernier recours de l homme postcivilisationnel post technologique post conomique dans la contradiction m me des situations voqu es r surgence du mythe de Janus figur dans ses deux faces qui s opposent dans leur unit constitutive L crivain est un homme qui absorbe radicalement le pourquoi du monde dans un comment crir
5. a grimp Pai pens j ai rigol rigol 145 La r p tition des m mes gestes remplit les pages de Lovay pour dire des moments qui d mythifient sans doute parce qu ils s y opposent le mythe de la vitesse au service du gain ou l accumulation de biens de consommation comme gage de bonheur dictats qui 187 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL r gissent la vie contemporaine des vrais humains Ceux ci ressemblent souvent des tres robotis s dont les membres ne semblent plus int grer la totalit de leur corps tel que dans ce passage de Polenta Hector a cout la pluie Il s est tendu vers la porte le visage contre le seuil sa jambe dans les bras comme une chose en dehors de nous trois et il avait cout la pluie 147 De m me le romancier souligne t il la dichotomie entre le sujet et sa pens e face la pr gnance des objets Le narrateur de Polenta s interroge Je me posai cette question mais en m me temps je m apercevais que le bol de soupe et le pain taient vraiment au centre de mes pens es et sans qu il y ait eu une orientation de cette pens e en fonction de mon tude 80 L ordre des choses est de la sorte constamment branl dans les r cits de Lovay Le r cit de la mort du cuisinier dans la Conf rence de Stockholm pourrait tre lu comme un pr lude rebours l hallucination qui s en prend au narrateur de Polenta emport par son im
6. aux moutons en t te du convoi du colonel Fiirst 5 Nous gardons la tonalit rimbaldienne de cette expression En se consacrant aux r cits de Echenoz Guibert et de Quignard Blanckeman met en valeur l effet de domination du langage dont rec le la litt rature fran aise contemporaine langage la fois ordonn et subordonn dans des uvres qui font de sa domination leur dynamique essentielle Blanckeman 13 179 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL esth tique de la privation L insistance sur l adjectivation l emploi excessif et parfois contradictoire des adverbes de mani re en particulier d adverbes connotation temporelle de longues p riphrases de phrases juxtapos es l usage r current des conjonctions et et mais les interrogations successives sur des s quences it ratives conf rent au r cit une tonalit litanique Meizoz vocatrice du style liturgique sinon du titre de son premier roman pitre aux Martiens l inscription des r cits dans un temps et un non temps simultan s dits par la juxtaposition de plusieurs temporalit s contradictoires et dans des espaces devenus des non lieux Aug m tamorphos s suite d hypoth tiques catastrophes ou crimes accentuent leur tour l tranget de certaines situations romanesques et de la grammaire lovaysienne pour dire la contemporan it Misant sur le d r glement de la langue et construisant un monde
7. s de fonctions qui partagent ainsi le sort d objets eux aussi mis hors fonction acquiert 1 Rappelons nous que L re du soup on r unit des textes crits depuis 1947 13 Marc Atallah d finit par expression homme moral de mani re minimale toute personne qui poss de une capacit de jugement et de discernement clair s 220 182 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE une port e m taphysique laquelle ne saurait tre trang re la pens e heidegg rienne sur la question de la technique et de ses effets dans le monde contemporain Situ s l image des narrateurs des r cits initiatiques au seuil d une r alit neuve qu ils sont cens s conna tre et ma triser la fin de leur initiation les trajets les chemins parcourir les objectifs atteindre sont des situations romanesques r currentes chez Lovay les narrateurs lovaysiens l oppos e de ceux l ne cessent de s interroger Meizoz parlera de h ros herm neutes et d interroger les autres personnages le narrateur de Les R gions c r ali res cherchera inutilement des pistes qui l aident comprendre la situation des domaines agricoles dans les journaux tenus par ses ant cesseurs et sa propre situation dans ce milieu sans pour autant parvenir trouver des r ponses fiables Ils ne conna tront que l garement en r sultat sans doute de l vincement de l homme moral objet de la r flexio
8. M THESIS 20 2011 177 193 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE LES RECITS INDECIDABLES DE JEAN MARC LOVAY ESPACES DE QUESTIONNEMENT DE QUELQUES MYTHES CONTEMPORAINS MARIA HERM NIA AMADO LAUREL Si l ali nation de la soci t oblige toujours d mystifier les langages et notamment celui des mythes la voie de ce combat n est pas n est plus le d chiffrement critique c est l valuation Barthes La mythologie aujourd hui Est ce que cette vie n est pas une immense fabulation Tout est invent du d but la fin C est une fiction totale Jean Marc Lovay Palavras chave Jean Marc Lovay narrativas subversivas fic o narrativa mito subvers o Keywords Jean Marc Lovay disrupting narratives fictional narratives myth subversion Mythologies le recueil provocateur o Roland Barthes avait r uni en 1957 quelques textes r dig s entre 1954 et 1956 a t l objet d une r dition r cente en 2010 Cette circonstance ne saurait nous laisser indiff rents Ayant r inscrit le mythe dans le contemporain Barthes se situait alors la lign e des tudes s miologiques inaugur es par Saussure Barthes Le mythe aujourd hui 195 Au long des ann es 1970 Barthes ferait appel aux contributions de l ethnologie de la psychanalyse de la s miologie et de l analyse id ologique dans Cette communication a t crite au sein du projet Interidentidades
9. agination d lirante sur Hector sa mort serait tomb e sur la hutte pour bouleverser l ordre des ustensiles friper les couvertures renverser les casseroles dans les tourbillons d un hiver de neiges horribles engon antes qui avaient avant l hiver lui m me oui longtemps avant d j renvers le fragile et inexistant ordre des choses 138 Aux chos oxymoriques baudelairiens les choses et la pens e se pr sentent au narrateur calmement vertigineuses d poss d es immobiles dans un profond tournoiement sur elles m mes 138 La rigueur la n cessit de l ordre les fonctions finalement d mythifi es devant le d r glement de sens que signifie ce tournoiement des choses et de la pens e sur elles m mes Un tournoiement qui normalement s appuie chez le romancier sur l amplification du r cit partir d un myth me initial Prenons l exemple de la mort tel qu elle est trait e dans la premi re nouvelle du recueil Midi solaire Un cort ge Le titre m me de ce r cit s inscrit d une part dans la th matique de la sociabilit l appartenance un groupe la fratrie est r currente chez Lovay m me si les rapports 15 La publication en 2008 du roman R verb ration ne saurait le d mentir dans une soci t o m me la mort peut int grer la liste des situations n gociables Il y est question de l lection des postes de Grand suicideur de bea
10. ations serviles d un fossoyeur de m tier ont ils r v d un autre destin que de partir creuser des tombes ailleurs jusque dans les sables des plus lointaines les Lovay Polenta 7 8 189 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL C est par le travail du romancier sur la langue que s op rent les proc d s de d mythification que nous croyons pouvoir d cerner dans les r cits de Lovay Un travail r alis sous l effet d une fi vre qui s abat sur la syntaxe qu il ressent sous la langue Lovay Conf rences 10 et dont ses r cits prouvent quelques saveurs pour prolonger la m taphore gustative qui est souvent associ e l acte d crire lui m me tel que la conf rence intitul e Ecriture Nourriture l illustre et que la pr sence r currente du repas nous permet d identifier comme un autre myth me dans ses romans Polenta en subit les effets dans son titre m me Ce myth me poursuit dans le tire Les r gions c r ali res o la frugalit caract rise pourtant la nourriture du narrateur nourrit par des bols de soupe la polenta encore une frugalit que contredit l usage souvent excessif de l adjectivation L incipit de Le convoi du colonel F rst l illustre qui juxtapose quatre adjectifs de suite Incroyable abominable effroyable pouvantable tels auraient t les mots 9 Lovay semble nous introduire dans une soci t qui a peut tre subi les cons quences d un pass catas
11. ature d objets jug s inanim s n aurait pas laiss supposer Il en ainsi dans ce passage de Le Convoi du Colonel Fiirst Le colonel criait qu il tait intol rable que le convoi en f t arriv parcourir les derniers m tres de cette progression alors qu une lampe dont l abjection de sa tentative d obscurcissement total x n tait pas prouver ici disait le colonel avait d lib r ment choisi de s teindre Lovay 281 282 La diff rence est parfois difficile discerner chez Lovay entre les fonctions des humains ces tres que le narrateur de Polenta d signe par les vivants Mais qui avait donn une d finition acceptable du monde des vivants Lovay 105 groupe sur son appartenance auquel il s interroge Regardant l ouvrage je me suis senti tr s loin du monde des vivants 104 105 et celles des objets les deux peuvent devenir hors fonction L univers romanesque lovaysien pr sente souvent un monde robotis o les vivants accomplissent des t ches r p titives ce dont le r cit rend bien compte par la reprise des m mes nonc s l insistance sur les m mes occurrences inscrites sur une temporalit romanesque la limite de ce que G rard Genette avait d sign par la vitesse sc ne du r cit Situation que certains changes monocordes 186 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE de Polenta illustrent bien introduits outrance pa
12. currentes renforce la situation d exil devant soi m me o se trouve le narrateur l emploi d adversatives a pour effet d accentuer le passage de soi aux autres ses fr res dans lesquels finalement il se reconna t ces autres accomplissant les m mes gestes fonctions que lui la r p tition d adverbes interrogatifs dit l exil de l crivain dans sa langue tout autant qu elle situe le lecteur dans un espace temps imm morial vers lequel semblent se diriger leur insu les hommes L espace temps du destin r gi par la volont de dieux lointains et impr visibles qui d tiennent arbitrairement les ficelles de toute existence malgr le ton d sacralis du r cit lovaysien Peut tre tais je vraiment occup observer une photographie mais alors j avais perdu le mode d emploi de cette observation j tais gar au seuil d une image Et je me souvenais avoir jadis devin qu en acceptant de penser de telles pens es je creuserais ma tombe Mais tous ceux qui sortent leurs t tes de leurs nuits pour crier qu on m enterrera encore plus profond qu ils ne sont enterr s qu ont ils fait d autre que creuser leurs tombes jour apr s jour Et quand les tombes de tous ces proches r unis en familles en corporations en clans en pays amalgam s comme des d bris d avion rassembl s pour une enqu te quand toutes ces tombes furent rouvertes d un coup puis referm es sous les acclam
13. d qui m crase in http didier jacob blogs nouvelobs com jean marc_lovay Site visit le 2 mars 2011 10 Mus e de Lausanne qui accueille la collection de Jean Dubuffet compos e d objets cr s principalement par des personnes d pourvues de formation artistique et vivant dans des situations de marginalit malades mentaux prisonniers vagabonds Martinez 105 1 Adolf W lfli Saint Adolphe portant des lunettes entre deux villes g antes Niess et Mia 1924 note de l diteur 180 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE d mystification du langage et de l criture litt raire qu il d figure le romancier engage le lecteur dans un processus subversif de d r alisation du monde que ses r cits fracturent et dont ils nous donnent une image prismatique La r currence de certains myth mes Durand tout autant que de leur d montage semble identifiable au long de ce processus Parmi les premiers la mort la libert la communication l exil dans la langue les rapports entre les hommes l organisation insolite des soci t s voqu es dans ses romans le travail ali nant et la mise hors fonction des tres et des objets l atmosph re de pers cution d angoisse sinon de conspiration le caract re d urgence de la plupart des actions accomplir par les personnages le chaos qui caract rise leur environnement la surveillance exerc e sur les hommes souvent ressentie comme de la violenc
14. e Barthes Essais critiques 191 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL BIBLIOGRAPHIE Attalah Marc La science fiction face face en conscience Formes de l engagement litt raire XVe XXIe si cles Lausanne Editions Antipodes 2006 219 235 Aug Marc Non lieux Introduction une anthropologie de la surmodernit Paris Editions du Seuil 1992 Barthes Roland Le mythe aujourd hui Mythologies Paris Editions du Seuil 1957 191 247 Ecrivains et crivants Essais critiques Paris Seuil 1964 147 154 La mythologie aujourd hui Le bruissement de la langue Essais critiques IV Paris Seuil 1984 81 85 Blanckeman Bruno Les r cits ind cidables Presses du Septentrion 2008 Durand Gilbert Mito e sociedade Lisboa A Regra do Jogo 1983 Kaempfer Jean J r me Meizoz Formes de l engagement litt raire XVe XXle si cles Lausanne Editions Antipodes 2006 Lovay Jean Marc Les r gions c r ali res NRF Paris Editions Gallimard 1976 Polenta Gen ve Editions Zo 1980 Lovay Jean Marc Conf rences aux Antipodes Gen ve Editions Zo 1987 Midi solaire Gen ve Editions Zo 1993 Ep tre aux Martiens Gen ve Editions Zo 2004 Tout l bas avec Capolino Gen ve Editions Zo 2009 Mart nez Esther Gonz lez La strat gie communicationnelle du mus e de l Art brut consid rations d un r cepteur avis Les D
15. e ou de l agressivit sont rep rables dans la plupart de r cits de Lovay Le d montage de ces myth mes est appuy par le travail exigeant du romancier sur la langue dont il d mystifie les conventions Pour ce faire Lovay met nu leurs engrenages utilitaires et c l bre souvent des h ros priv s de l usage de la langue Le recours des personnages muets comme dans Le convoi du colonel F rst ou qui refusent de parler tel le personnage de la fillette dans Polenta en constitue une modalit op ratoire des dialogues improductifs ou des descriptions qui faussent le r el une autre tel qu il arrive dans Les R gions c r ali res o le Surveillant un des personnages de ce roman d couvre que les rapports crits sur les mensurations l objet de son travail sont d lib r ment incorrects Le r cit lovaysien n ob it plus aux conventions figuratives cens es le d finir en tant que r cit romanesque Comment identifier ses personnages Peut on parler encore d action romanesque et d encha nement successif des situations de temps ou d espace Reste t il encore des situations ou des personnages de r f rence des h ros dans ses romans Le colonel les d cideurs les juges sont plut t caricatur s m tamorphos s en des personnages burlesques dont les attributs identitaires sont d ceptifs le colonel crie met des ordres absurdes qui n admettent pas de r plique d mystifiant ainsi les figure
16. ioramas Publics et Mus es 9 janvier juin 1996 105 127 Meizoz J r me Le toboggan des images lecture de Jean Marc Lovay Gen ve Editions Zo 1994 Rabat Jean Michel ed Writing the Image after Roland Barthes Philadelphia Pennsylvania U of Pennsylvania P 1997 Rasson Luc Franc Schuerewegen Le Pouvoir de Vinfime variations sur le d tail Saint Denis PUV 1997 Sarraute Nathalie L re du soup on Paris Gallimard 1956 Viart Dominique Fictions critiques La litt rature contemporaine et la question du politique Formes de l engagement litt raire XVe XXle si cles Lausanne Editions Antipodes 2006 185 204 192 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE RESUMO prop sito deste artigo estudar alguns processos de subvers o de mitos contempor neos em textos de Jean Marc Lovay nos quais se poder reconhecer a vis o l cida de Tir sias face cegueira colectiva perante o jogo incessante entre a vida e a morte ABSTRACT We intend to study some procedures of the subversion of contemporary myths in Jean Marc Lovay s narratives as the result of a particular lucid vision in which one can recognise the figure of Tiresias facing the collective blindness towards the incessant game between life and death 193
17. n d velopp e par la science fiction contemporaine Qu est devenu le monde qui a trop cru Prom th e et au mythe d un progr s permanent qui a d fi les dieux qui a trop surveill et contr l qui a abus de son pouvoir destructeur qui a s duit ses populations l image de Faust dans le mirage du bonheur Le personnage du r cit Trois vasions est pr t se faire couper les doigts en change du paradis que lui offre une inconnue Tu ne peux pas imaginer tout ce qui t appartiendra si tu acceptes tout ce qui te fera oublier que tu avais cinq doigts une main Lovay Midi solaire 17 Un monde l envers en r sulte certes o ne sont rep rables que quelques fragments d un monde ant rieur quelques ruines dont les narrateurs s acharnent poursuivre les pistes La dimension r flexive qui en r sulte dans les r cits de Lovay nous autorise peut tre aborder ces textes sous le prisme de l interrogation sur quelques mythes contemporains en ce que le mythe r pond la qu te de l homme devant les raisons d tre de son existence et les situations dont il fait l exp rience La notion d ind cidable Blanckeman qui nous semble galement pertinente pour la caract risation des r cits lovaysiens acquiert alors une tonalit ontologique laquelle l interrogation kantienne et aussi derridienne sur l homme ne saurait tre trang re dans la mesure o le comportement des person
18. n incide surtout dans les r cits lovaysiens sur les effets des mythes voqu s L vincement de l homme moral en est peut tre l un des majeurs pour reprendre l expression de Marc Atallah propos des risques que court l homme contemporain dans l environnement technologique et n olib ral qu est le n tre Enon ant diff rentes situations fictionnelles qui voluent au gr de deux modalit s g nologiques privil gi es le roman et les r cits brefs dont les nouvelles les r cits de Jean Marc Lovay nous semblent t moigner au m me titre que les r cits de science fiction devant le r el contemporain et sans parti pris dificateur de ce que Marc Attalah d signe par une attitude interrogeante devant les objets Pourtant si dans le contexte des r cits de science fiction gr ce la distance critique et la d couverte des diff rentes modalit s d existence de l objet il est possible de choisir librement de nous rapporter une potentialit d existence particuli re Atallah 223 chez Lovay la pr sence r currente de narrateurs de premi re personne bien qu elle accorde ceux ci une dimension r flexive ne conduit pas n cessairement la libert d expression et du choix de ces narrateurs Effectivement les narrateurs lovaysiens ne sont pas libres de choisir leur destin L attitude interrogeante r currente dans le discours de narrateurs et de personnages d nu
19. nages 14 Lecteur de l article de Heidegger La question de la technique Marc Atallah souligne l importance du concept heidegg rien de Destin m taphysique de l tre dans les soci t s issues de la r volution industrielle o l homme peut devenir son tour marchandise exploitable 231 Un destin semblable atteindrait les personnages lovaysiens 183 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL lovaysiens auxquels est t e toute capacit de d cision et toute responsabilit les soutiendraient m me s ils n en n ont pas une conscience claire et s ils sont d nu es de toute qu te id aliste N appartenant pas au registre du roman initiatique puisque un sens leur existence ou la possibilit d un avenir sont d fendus leurs personnages qu ils remplissent le r le de narrateurs de premi re personne le statut de h ros ne saurait leur tre attribu puisqu ils ne se voient attribuer que des r les secondaires dans la poursuite de t ches souvent absurdes n appartenant pas non plus au registre de la science fiction puisque la possibilit du choix est galement d fendue leurs personnages les r cits de Lovay me semblent pourtant partager avec la science fiction l int r t envers les cons quences du potentiel de l tat actuel de la science Atallah 227 de part les sc narios de d solation et de ruines que leurs situations romanesques laborent l tat d ga
20. onne un narrateur auquel sont fr quemment assign es des fonctions de scripteur o de r dacteur comme c est le cas dans Les R gions c r ali res voire m me un narrateur qui s assume en tant qu crivain comme c est le cas des Conf rences aux Antipodes bien qu il joue un r le secondaire au niveau de l histoire assume la m diation entre l crivain et la langue Ce choix d terminera chez le romancier un style particulier marqu par quelques proc d s morphosyntaxiques qui jaillissent d un imaginaire sans dout ancr sur un r el v cu mais qui en instituent un monde autre qu ils rendent tout aussi ind finissable et impr visible que possible l espace fictionnel Les r cits de Lovay invitent le lecteur la d couverte d un univers insolite ponctu par des d r glements de sens que les mots ne sauraient plus v hiculer Il nous semble possible dans ce contexte d tablir un rapport entre le travail men par le romancier sur la langue et la mise en texte du monde contemporain L exploration des possibilit s expressives de la langue g n re chez Lovay un travail de d r glement voire de d mythification des conventions du langage utilis des fins communicationnelles d o merge une La r f rence au paysage de nature suisse n est sans doute pas trang re l espace de Polenta ni celui de la Conf rence de Stockholm celui de l Ecosse
21. r le verbe d claratif dire J ai dit la fillette Je crois que tu peux aller dormir Elle a dit Je ne veux pas dormir maintenant Pai dit Va seulement dormir maintenant Elle a dit C est mieux si je reste je crois Pai dit Il va avoir une bonne nuit je crois Elle a dit Je me demande qui a empoisonn Hector Pai dit Papporterai du bois pour la lessive Et elle a dit Merci 129 L utilisation de phrases juxtapos es l num ration d actions de Journ es qui se ressemblent toutes combien de temps restent ils resteront ils encore dans leurs huttes le narrateur la fillette et Hector dans Polenta Quand y sont ils arriv s et pourquoi le lecteur ne le saura jamais le recours la parataxe ce sont encore quelques uns des proc d s narratifs qui accentuent le caract re m canique des fonctions que les personnages ex cutent tous les jours machinalement Le recours au pass compos et la voix passive devient alors le support discursif privil gi pour dire ces situations r currentes Un paragraphe de 15 lignes l illustre bien dans Polenta dont nous ne transcrirons que les nonc s verbaux J ai rang et vid et j ai remont Jai pos j ai constat avait t accomplie J ai entass j ai aussi bross et contr l j ai t tendu Un cigare a t allum la fum e
22. rement qui caract rise leurs personnages Subissant les cons quences ali nantes auxquelles semble vou e la soci t contemporaine dont les membres semblent partager avec les personnages lovaysiens le manque de rep res et de marques qui les diff rencient dont par exemple l usage d une parole cons quente ou l absence de l usage de la parole les narrateurs lovaysiens en sont peut tre les derniers survivants ceux qui il reviendrait d tablir le lien fragile entre un pass qui n est plus et dont ils se souviennent difficilement et un avenir inconnu fig s dans un pr sent d shumanis non familier en proie au jeu incessant entre les deux seules r alit s qui unissent les hommes pour les d sunir la vie et la mort paradoxalement tout aussi impr visibles que s res C est l int rieur de ce jeu dont le spectacle est souvent difficilement supportable chez Lovay la mort y est une pr sence obs dante et ses corollaires la violence et l agressivit impr visibles et sans justification apparente que se situent les trames romanesques de ses r cits les contours de ce jeu sont sans doute d termin s par un surplus de lucidit du romancier un surplus duquel la figure de Tir sias ne saurait tre absente devant l aveuglement collectif Un aveuglement qui a inspir d autres que Lovay dont le Nobel Jos Saramago notamment dans un de ses derniers romans intitul Blindness p
23. s celle de l identit soumise la volont d un Juge ou plut t d un Surveillant Barthes Le mythe aujourd hui 44 pour Lovay l p tre aux Martiens est sans doute le r sultat de la d solation du monde imaginable la d m ture de l Axe terrestre et la vue de la Terre qui bascule sur Axe inversant les P les 16 un monde o la mission des Surveillants ne s exerce plus que sur des r gions c r ali res d saffect es h ritage probable d une immense catastrophe nucl aire tel un midi solaire dont la Conf rence Stockholm avait lanc le pr sage La poursuite de la fratrie sans doute encore un mythe lovaysien est une constante dans ses textes d s l p tre aux Martiens o des compagnons se rejoignent dans la Route vers un l bas certes illocalisable mais qui justifie tous leurs efforts Sensible dans la correspondance que Lovay a entretenue avec Maurice Chappaz ses d buts litt raires les deux pistoliers s identifiant l un l autre dans la communion po tique la poursuite de la fratrie se manifeste sous d autres formes dans ses romans Ceux ci mettent en sc ne des personnages qui d ambulent dans des espaces illocalisables dans la poursuite de rep res qui chaque fois se d robent de finalit s que des obstacles des pannes successives Meizoz 10 38 tout autant impr visibles que d routants ajournent dans des romans non conclusifs
24. s dictatoriales les rapports de soumission hi rarchiques dans la soci t et toute forme de censure dans les r cits lovaysiens les d cideurs ne d cident rien les personnages se voient attribuer des fonctions dysfonctionnelles qu ils r alisent sans contestation aveugl ment d mystifiant ainsi l univers administratif bureaucratis qui g re non 181 MARIA HERM NIA AMADO LAUREL seulement les institutions les domaines mais sans doute aussi toute la soci t et les Etats C est donc partir de cette double articulation d r glement de la langue par le refus de tout utilitarisme et d r glement du r cit romanesque par la mise en cause de ses figures qu il nous semble possible de consid rer les r cits de Jean Marc Lovay comme un espace d interrogation de certains mythes contemporains Par la mise en cause des r gles de communication conventionnelles par la d mythification des finalit s utilitaires d une langue que le romancier r ussit ne plus faire servir rien l articulation d ficitaire entre les questions et les r ponses sont une marque des dialogues lovaysiens ses r cits instituent une logique qu il faudra situer dans un espace d interrogation r current sans doute encore dans l re du soup on qui ne cesse de caract riser les r cits fran ais contemporains depuis que Nathalie Sarraute en a formul les principales contraintes en 1956 Cet espace d interrogatio
25. travail sur le langage dans des uvres qui font de sa domination leur dynamique essentielle Blanckeman 11 Si le mythe et la litt rature se rencontrent dans l espace commun du questionnement sur le rapport de l homme au r el force est 3 Notion sur laquelle je me suis appuy e dans Introduction la lecture de Jean Marc Lovay propos du livre Epitre aux Martiens http portal doc ua pt journals index php Carnets article view 813 747 Site visit le 3 mars 2011 178 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE d admettre que ce questionnement pr suppose celui du rapport du romancier au texte et de ce fait la soci t D autre part si l on consid re que l uvre de Jean Marc Lovay s ins re dans le mouvement du retour au r el qui d apr s Dominique Viart caract rise la litt rature fran aise contemporaine il conviendrait alors de nous attarder sur la question suivante dans quelle mesure pourrions nous concevoir que des mythes contemporains sont mis en question par les r cits de ce romancier Les r cits de Lovay partagent avec ceux d autres crivains contemporains des litt ratures de la langue fran aise dont Jean Echenoz Fran ois Bon ou Jean Philippe Toussaint une attention soutenue aux rapports de l crivain avec la langue de m me qu aux rapports entre le r el et la fiction Chez Jean Marc Lovay la figure d un narrateur qui s exprime la premi re pers
26. trophique ses personnages semblent merger d une exp rience pass e dont ils ne gardent que les traces d un souvenir brumeux ils voguent dans une qu te de quelque chose d inatteignable d ou le d sir d unicit mythique n est sans doute pas absent mais que le lecteur ne saurait faire remonter des origines paradisiaques Dans Polenta le pass est inconnu instructurable 119 En conclusion rapprocher Lovay des auteurs contemporains de ceux qui font revenir la litt rature au r el demandera de ne pas consid rer ce r el comme un r el r aliste mais possible envisageable un r el qui partage des traits de la science fiction en ce que celle ci dit le contemporain un r el h ritier de la croyance prom th enne annonc e au XIXe et dont la mat rialisation a t repr sent e par Barthes dans tous ces objets dont il a relev la nature mystifiante dans Mythologies Le risque de la d shumanisation en ressort exacerb e dans le r cits de Lovay o r sonnent les chos de catastrophes apocalyptiques vers o la d gradation du mythe conduira peut tre en fin de ligne les fratries convoqu es pour leur dernier cort ge dans le Chaos retrouv o elles voluent et dont les l ments primitifs la terre l eau l air le feu sont r currents dans les r cits de Lovay De m me que dans les r cits de science fiction les personnages de Lovay ont peur ils h sitent de m me que dans les r
27. u pleureur 16 Personnage que rien n aurait pu rapprocher du personnage tragique du m me nom Hector mari d c d d Andromaque personnage ponyme de la pi ce qui a valu le succ s Racine 188 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE entre les membres du groupe sont inexistants d autre part ce titre d note l id e de mouvement al atoire sans que l origine du cort ge m ait t pr alablement situ e ni sa finalit aboutie Il s agit ici de suivre un cort ge fun bre comme le font les moutons ob issants une hi rarchie toute aussi exigeante qu elle est absurde dans Le Convoi du colonel Fiirst Le renversement de l ordre des choses demande souvent outre l amplification du r cit la transition vers un autre r el celui d un monde possible non actuel au sens o U Eco l avait d fini en 1979 dans Lector in Fabula le seul monde que le r cit puisse instituer Le recours des images y joue un r le d terminant Dans la nouvelle Un cort ge le narrateur observe une photographie l image fig e d un instant pass sa pens e s gare L id e d exil dans la langue se pr cise elle s accompagne de celle de l garement devant le r el l imagination multipliera alors l infini la pens e initiale dans une spirale au mouvement incontr l vou l ternit soumise au destin L emploi d expressions dubitatives de verbes au conditionnel d interrogations r
28. ubli en 1995 Le d r glement des sens et des images chez Lovay est alors susceptible d tre interpr t comme un cri d alerte qui ne peut maner que d un romancier engag contre un monde souvent r gi par les bureaucrates devenus des tres mythiques leur tour puisqu ils 184 DEREGLEMENT DU SENS ET ECRITURE sont cens s maitriser le monde et instituer la mort parmi les vivants Si certaines situations romanesques semblent voquer le contemporain chez Lovay leur localisation spatiale et temporelle est pourtant troublante Circonstance qui leur accorderait une dimension mythique de ce point de vue nous pourrions admettre que ses r cits instituent des situations universelles et qu ils r pondent une r alit qui nous d passe Tr s curieusement Lovay et Barthes se rejoignent autour des Martiens le premier leur adressant une p tre le second une de ses mythologies en pleine fi vre des voyages dans l espace et de la peur de l existence d autres formes de vie Barthes d nonce l anthropomorphisme troit sous jacent la projection terrestre qui semble pr sider toute r f rence aux Martiens et leur pr tendue civilisation Mars n est pas seulement la Terre c est la Terre petite bourgeoise c est le petit canton de mentalit cultiv ou exprim par la grande presse illustr e A peine form e dans le ciel Mars est ainsi align e par la plus forte des appropriation
29. uelques ann es plusieurs critiques et th oriciens de la litt rature dont Dominique Viart Pour l auteur de l article intitul Fictions critiques la litt rature contemporaine et la question politique publi en 2006 l on n assiste pas aujourd hui au retour de ce qu il a t convenu d appeler la litt rature engag e mais bel et bien l mergence de nouvelles pratiques parfois m me de nouvelles formes litt raires qu il a propos d appeler fictions critiques L ampleur de la question de l engagement recouvre ainsi selon Dominique Viart la question du discours critique que la litt rature peut tenir sur l tat du monde la r alit sociale et sur les options politiques 185 Un dialogue f cond pourrait s tablir notre sens entre la notion de fiction critique en ce qu elle engage l espace de r flexion que Viart assigne la litt rature contemporaine et celle de r cit ind cidable par laquelle Bruno Blanckeman tenant compte des caract ristiques historiques de la contemporan it et en tant que profond connaisseur des tendances esth tiques dont rel ve le r cit litt raire fran ais du dernier quart du XXe si cle y d cerne des signes de notre temps Une production qu il estime marqu e par des fictions probl matiques o il d note la pr minence du romanesque la pr carit des identit s l importance accord e au
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