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1. 95 PORTFOLIO 2 4 c LES ARBORESCENCES ORANG ES du chlorure de fer se d veloppent plus rapidement que celles des autres substances Ce sel doit donc tre introduit en dernier des c pes et des bourgeons Ce qui nous laisse penser que Leduc a acquis au cours de deux d cennies de travail une ma trise prodigieuse des substances chimiques Il nous sera difficile d acqu rir cette sen sibilit en quelques jours comme il serait impossible un peintre d bu tant de reproduire la finesse d une toile d Ingres Jeudi 22 juin 2006 Nous d cidons d explorer une deuxi me facette du travail de Leduc les arborescences sortes de tiges qui se d veloppent verticalement Afin 96 LA RECHERCHE SEPTEMBRE 2006 N2 400 CETTE CELLULE OSMOTIQUE a t produite par l introduction d un morceau de chlorure de calcium fondu dans une solution tr s dilu e de phosphate et de carbonate de sodium La cellule cro t tr s lentement sa membrane semi perm able laissant entrer l eau sous l influence d un ph nom ne appel osmose La pression interne augmente la membrane se rompt et se reforme aussit t un peu plus loin d obtenir une grande vari t de formes et de couleurs nous prenons le parti de tester nos substances dans toutes les combinaisons possibles Nous constituons plusieurs variantes de la solution initiale en lui ajoutant les adjuvants min raux pr conis s par Le
2. PORTFOLIO scies CE ri hin Jardins c E a Me ER E E l a a E e Dr SRE eF mu Ji QE 2 Richard JE Emmanuel IN Eastes est professeur de chimie au d partement d tudes cognitives de l cole normale sup rieure Paris r agen RS te m ER E me 1 m atomes crochus di ens fr Cl vis Darrigan est ma tre de conf rences en chimie th orique l universit de Pau et des pays m i n el i M de l Adour i r i FA clovis darrigan E univ pau fr 3 Photos E St phane i 3 Querbes Tu LT aan pl CE JARDIN MULTICOLORE a t obtenu en d posant dans une solution de silicate de sodium concentr e un cristal de chlorure de cobalt sur des sels de nickel 90 LA RECHERCHE SEPTEMBRE 2006 N2 400 ecr erlavie l aide de sels m talliques il n en faut pas plus la presse scien tifique anglo saxonne pour consacrer entre 1905 et 1913 de Aombreuses colonnes St phane Leduc Ceprofesseurdephy sique m dicale est un v ritable touche tout Depuis le d but de sa carri re ila men des travaux debact riologie travaill sur les effets des courants lectriques sur l organisme explor le r leth rapeutique desions du XX si cle voil qu il d veloppe une th o
3. d hui est habitu Quant aux unit s elles ne nous vo quent parfois plus grand chose Nous d cidons de faire plusieurs essais Nous introduisons des sels dans une solution satur e elle est trop visqueuse et la croissance des cellules se bloque Dans une solu tion dilu e dix fois des cellules appa raissent et s affaissent lamenta blement Finalement nous optons pour une solution satur e dilu e cinq fois et obtenons de belles cel lules artificielles ph m res elles finissent par se percer donnant nais sance des arborescences tonnan tes Nous sommes h las loin TRENTE MINUTES s parent le premier clich du dernier Ce jardin chimique a t obtenu par l utilisation d un m lange de sels de cuivre cobalt et mangan se dans une solution de silicate de sodium Extr mement corrosive cette derni re ne s journe pas dans un r cipient en verre sans y laisser de traces Laiss e l air libre elle absorbe le dioxyde de carbone et perd ses propri t s ce qui oblige l exp rimentateur pr parer la solution juste avant utilisation TOUTES LES VARIANTES DE COULEURS ET DE FORMES semblent pouvoir tre obtenues par l utilisation du chlorure de cobalt dont les degr s d oxydation et le taux d hydratation contr lent les teintes Un tel jardin peut tre conserv pendant des semaines condition que le r cipient soit dispos l abri des vibrations N 400 SEPTEMBRE 2006 LA RECHERCHE
4. duc Puisintroduisons dans chacune d elles des sels m talliques chlorures de cobalt de fer et de nickel sulfates de cuivre et de mangan se nitrate et ac tate de cuivre Nous obtenons toute une gamme de r sultats du bourgeon noir et rabougri au chlorure de cobalt multicolore en passant par le chlorure de fer d un orange flamboyant Leduc avait parfaitement compris le ph nom ne gouvernant la formation des cellules et des arborescences Apr s introduction du sel m tallique dans la solution il se dissout et forme une membrane en entrant en contact avec le silicate La cellule primordiale est n e minuscule Semi perm able sa membrane ne laisse passer que l eau Elle d limite donc deux domaines une solution int rieure contenant le sel dissous et une solution ext rieure contenant lesilicate Cette diff rence de composition conduit un afflux d eau de l ext rieur vers l int rieur de la cel lule travers la membrane selon un ph nom ne dit d osmose La pression interne augmente La membrane de la cellule se rompt puis se reforme aussi centim tres Laissez reposer la solution quelques minutes puis intro duisez dans cette derni re de petits cristaux de sels m tal liques CusO Ni NO3 2 FeCl CoCL MnS0 en vitant de les d poser trop pr s les uns des autres ou de faire bou ger le r cipient Les cristaux des kits jardins chimiques commercialis s par les fournisseurs de pro
5. duits chimiques conviennent parfaitement La nature des contre ions n est pas d terminante mais des variantes polymorphes et colo r es sont obtenues lorsqu on les substitue les uns aux autres Une fois le travail r alis contemplez t t un peu plus loin La cellule cro t Sila solution ext rieure est tr s dilu e la cellule reste peu pr s sph rique et se d veloppe peine Dans les solu tions plus concentr es en revanche la cellule primordiale donne rapide ment naissance de longs prolonge ments des arborescences Pourquoi filent elles presque tou jours vers le haut Parce que la cellule initiale a tendance se rompre sur sapartiesup rieure Lasolution interne esten effet moins dense que la solution externe et a tendance remonter En outre la macrophotographie nous permet de mettre en vidence le r le des bulles d air form es par le d gazage de la solution sous l influence de la cha leur des projecteurs Elles acc l rent la croissance des arborescences vers le haut avant de s en d gager parfois bru talement interrompant le processus Un param tre que Leduc contestait tantiltenait asseoir la puissance cr a trice de la pression osmotique qui de toutes les forces physiques poss de la puissance d organisation la plus remar quable les facult s morphog niquesles plus tendues Vendredi 23 juin 2006 L essentiel du travail est fait mais des variantes restent exp rimen
6. ile d interpr ter le d veloppement parall le des deux flagelles En revanche nous avons pu montrer que les bulles d air produites par le d gazage de la solution sous l influence de la chaleur des projecteurs jouent un r le important dans l initiation des arborescences Elles acc l rent leur d veloppement avant de se d gager parfois brutalement interrompant le processus N 400 SEPTEMBRE 2006 LA RECHERCHE 93 PORTFOLIO scies LES ARBORESCENCES deviennent parfois des crins magnifiques pour les bulles serties de filaments 94 LA RECHERCHE SEPTEMBRE 2006 N2 400 a laiss peu d indications sur son travail Pour toute documentation nous nous reposons sur sa Th orie physico chimique de la vie et g n ra tions spontan es publi e en 1910 Leduc y raconte la fa on dont il a caract ris ses premi res cellules osmotiques C est cette exp rience que nous nous attelons Elle consiste introduire dans une solution m re satur e en silicate de sodium un sel m tallique tel que du chlorure de calcium Nous choisissons d utiliser le sel sous sa forme amorphe Leduc emploie le terme fondu que nous obtenons en chauffant le produit commercial hydrat jusqu sa fusion vers 770 C La mise au point de la solution satur e en revanche est plus ardue la notion de saturation sign e Leduc nous para t floue Ses recettes manquent de la pr cision laquelle le chimiste d aujour
7. inures de glace dessin es sur les carreaux d une j a s 1 1 al Lens de cuivre N 400 SEPTEMBRE 2006 LA RECHERCHE 9 1 UE F QUELQUES DIZAINES DE SECONDES s parent ces trois clich s montrant l expansion de filaments n s de cristaux de sulfate PORTFOLIO scies fen tre un jour d hiver Les id es de Leduc sont ensuite balay es par 8 de nouvelles connaissances sur les origines de la vie issues de la chimie ss de l astronomie et de la g n tique Ne reste de lui que d tranges jar J dins chimiques photographi s b en noir et blanc Mercredi 21 juin 2006 r Dans un laboratoire de l universit a de Pau nous nous appr tons repro a duire pr s d un si cle plus tard les ai exp riences de Leduc L homme g CES EXCROISSANCES EXUB RANTES qui se d veloppent avec une rapidit in gal e sont particuli rement caract ristiques du chlorure de fer La croissance peut se faire par le bas sous forme de plissements ou par le haut en grappes donnant naissance aux formes les plus vocatrices 92 LA RECHERCHE SEPTEMBRE 2006 N2 400 FOND TOIL des bulles d air adh r es aux parois donne une ambiance sid rale au mouvement du sulfate de mangan se CETTE S QUENCE repr sente de bas en haut la croissance d arborescences artificielles de chlorure de cobalt Diffic
8. ner la nature actuelle Pour le prouver Leduc s applique m langer toutes sortes de sels avec des solutions vari es Ses cr ations prennent des allures de c pes de pous ses dot es de bourgeons d amibes n y a je crois aucun spectacle plus extraordinaire et plus clairant que celui d une croissance osmotique s enthou siasme un ancien membre dela Soci t royale dem decine W Deane Butcher s dans sa pr face au livre de Leduc The Mechanism of Life Elles imitent les formes la couleur la texture et m me la structure microscopique d une crois sance organique de mani re si parfaite que cela trompe les lus m mes De fait pour beaucoup Leduc claire la nature et l origine de la vie Ses mod les crit Evelyn Fox Keller dans son livre Expliquer la vie r pondent un besoin largement ressenti l po ils d montrent que desformes complexes peuvent tre engendr es par des processus physiques et chimiques quel bien identifi s Mais ses travaux sont rapidement hi contest s D s 1907 Henri Bergson s oppose Leduc dans son volution A cr atrice Vingtansplustard douard Leroy du Coll ge de France crit au sujet de ses th ories Onn apasimit Leseffets d os mose n ont gu re plusde signification Ja vie m medeloin dans le probl me de la naissance de la vie queles fleurs ou ra
9. rie s duisante 1l est convaincu CS i APCE L CON CE 5 Au C i I ais St p si cle le m decin ane Leduc a cherch synth tiser le vivant l aide de substances chimiques obtenant des formes d une rare vari t Pouvaient elles tre reproduites un si cle plus tard Pour La Recherche deux chimistes se sont pris au jeu T h Elles sont entour es d une mem Aud but brane semi perm able ou osmoti que qui laisse entrer l eau Du coup les cellules grossissent vue d il pou vant atteindre plusieurs centim tres Le plus souvent explique Leduc la premi re cellule donne naissance une seconde celle ci une troi si me et ainsi de suite donnant un ensemblede cavit s cellulaires microsco piques s par es par des cloisons osmoti ques Une structure analogue selon le scientifique celle qui constitue les I _ tres vivants Des millions de formes que la vie est n e la faveur de ren contres entre substances chimiques min ral s Dans son laboratoire de l cole de m decine de Nantes il tente donc d imiter le vivant SE US En d posant des sels m talliques dans des solutions de carbonate de potas sium l minent m decin fran ais comme l appelle alors le Scientific American obtient des cellules arti ficielles plus vraies que nature Ca ph m res ont d ainsi se former pour don
10. s chimiques Procurez vous une solution commerciale de silicate de sodium satur e et diluez la deux fois avec de l eau dis till e de pr f rence d gaz e Filtrez la sur du verrefritt et sous aspiration si elle est troubl e par des particules en suspension Puis dans les heures qui suivent versez la dans un r cipient en Plexiglas sur une hauteur de 10 15 N 400 SEPTEMBRE 2006 LA RECHERCHE 97
11. ter additions de substances tran g res en cours de croissance super positions de couches de solution m re de diff rentes concentrations utilisation de granul s form s par le m lange de diff rents sels m tal liques entre eux ou avec du sucre en poudre Nous abandonnons l id e d obtenir le moindre c pe pour nous satisfaire de l infinie diversit des for mes et couleursauxquelles nous som mes d ores et d j parvenus Face ce spectacle ph m re nous nous interrogeons que reste t il des travaux de Leduc Malgr ses erreurs et sa na vet enthousiaste nous ne pouvons nous emp cher de revendi quer pour lui une certaine r habili tation D autant qu en montrant que des formes aussi complexes pouvaient tre synth tis es par des m canismes physico chimiques l mentaires il a sans doute contribu faire avancer la connaissance de la vie Pourtant il reste peu detraces de sa vie scientifique On trouve son nom dans der centes tudes concernantlebiomi m tisme de mat riaux inorganiques la qu te de traces de vie fossiles ou extra terrestres Avec des conclusions qui ne lui auraient gu re plu S appuyant sur ses travaux des chercheurs ont en effetmontr que certaines concr tions consid r es jusqu icicomme des fossi les taient probablement des vestiges de formations min rales osmotiques d origine inerte IE R E E et C D MODEDEMPO Pour r aliser des jardin

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