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1. un kilo neuf cent cinquante d apr s la balance romaine qu elle avait utilis e pour le peser Et cela marchait le Moni se calmait Tante Anna aimait aussi s occuper de son petit jardin elle y entretenait des herbes aromatiques et des fleurs mais chaque ann e elle fulminait contre l glantier qui dans un coin recul fleurissait le premier et embaumait remarquablement le coin jardin et immanquablement elle disait Il est aga ant et encombrant mais je l aime trop regarde s il est beau Il est comme la vie de belles fleurs qui sentent tellement bon et plein d pines redoutables qu il faut viter ou apprivoiser Jacquie approuvait Elle ne savait pas grand chose de cette tante seulement ce qu elle voulait bien laisser entendre car elle tait discr te Elle avait t une cuisini re professionnelle et avait servi dans plusieurs maisons de la grande soci t elle en tait tr s fi re mais surtout elle avait conserv un instinct de la bonne cuisine qui tait saisissant l oncle tait encore toujours sous le charme Le samedi elle allait faire ses courses au 15 march elle rapportait un poulet de ferme des ceufs frais des l gumes et du beurre toujours achet s chez les m mes fermiers Et elle transformait tout cela en potage quenelles choux farcis d une saveur in galable Par contre on s apercevait tr s vite qu elle n avait jamais t femme de m nage car chez eu
2. fa on les jeunes mari s n avaient pas les moyens de faire la fine bouche Et puis ils avaient bien d autres centres d int r ts ils se connaissaient depuis pr s de cinq ans mais n avaient jamais v cu ensemble seuls Ils avaient tout d couvrir Cela se fit progressivement et en toute d licatesse Ils avaient au moins un projet commun devenir parents le plus vite possible et le mode d emploi qui accompagne une telle ambition permettrait un rapprochement pr cieux pour aborder les autres questions Jacquie ne fut pas surprise de d couvrir qu Alphonse partageait certains points de vue qu elle avait d ja stigmatis s chez son pere la femme ne conduit pas la voiture son r le est d lever les enfants elle n exerce pas de m tier Jacquie se 17 comporta telle celle qui n entendait pas elle avait depuis l exp rience de sa m re sa petite id e sur la question Elle rechercha dans la presse locale des offres de travail a dur e limit e et a proximit de leur appartement et elle trouva Une annonce proposant un emploi de secr taire pour un remplacement de six mois attira son attention Elle s y rendit accompagn e de sa m re qui tait en visite et elle fut embauch e en fait elle restera cinq ans dans Pentreprise Lorsqu elle annonga cette nouvelle a son mari il fit grise mine mais se contenta de dire Tu n es pas bien la maison Et le b b Mais de quel b b parles
3. se chargeait de refaire les peintures et selon leurs propres go ts elle les incita vivement accepter Alphonse avait par ailleurs un emploi en vue il s agissait d un poste de conseiller en 16 probation au tribunal de Metz Cela expliquait aussi leur engouement pour l appartement Le Moni fit refaire les papiers et les peintures et fit mettre une plaque d identit a Pentr e de l appartement ainsi que sur la boite aux lettres Jacquie s aper ut cette occasion qu elle n avait pas seulement chang de nom et de civilit mais aussi de pr nom elle tait devenue Mme Alphonse Junges ce qui la rendit furieuse mais elle sut dissimuler son courroux Tout tait presque pour le mieux La b taill re de papa mile reprit du service elle commen ait avoir une belle exp rience en mati re de d m nagement le Jeng accompagnait le convoi un peu par curiosit cette fois Alphonse avait eu le temps de fabriquer des meubles de cuisine et avait retap le vieux coffre en ch ne qui depuis des lustres tait affect la nourriture pour cochons Fixem La chambre coucher en chippendale put enfin tre livr e il s agissait d un cadeau de mariage de valeur mais Jacquie ne supportait pas les meubles de chambre coucher Elle l avait dit sa maman mais celle ci ne concevait pas un jeune m nage sans ce type de meubles probablement symbole d un lien indestructible De toute
4. Jacqueline Nachbaur Junges Fleurs et pines d glantiers Publibook Retrouvez notre catalogue sur le site des ditions Publibook http www publibook com Ce texte publi par les ditions Publibook est prot g par les lois et trait s internationaux relatifs aux droits d auteur Son impression sur papier est strictement r serv e l acqu reur et limit e a son usage personnel Toute autre reproduction ou copie par quelque proc d que ce soit constituerait une contrefa on et serait passible des sanctions pr vues par les textes susvis s et notamment le Code fran ais de la propri t intellectuelle et les conventions internationales en vigueur sur la protection des droits d auteur Editions Publibook 14 rue des Volontaires 75015 PARIS France T l 33 0 1 53 69 65 55 IDDN FR 010 0116928 000 R P 2011 030 31500 Cet ouvrage a fait l objet d une premi re publication aux Editions Publibook en 2012 Les fleurs d glantiers sont si belles et si odorantes Les pines sont redoutables il faut savoir les viter les apprivoiser Ou encore apprendre souffrir L glantier c est un peu comme la vie des joies et des peines Ma Tante Anna mes enfants A mes petits enfants Lucie Benjamin et R mi Premi re partie A Metz sous l gide du Moni Comme on construit son nid on se couche Ils avaient une adresse Une adresse rien que pour eux et qui correspondait un a
5. chir une vaste porte coch re Ensuite un couloir tunnel traversait tout l immeuble et donnait acc s a la cour int rieure Porte et couloir taient encore dot s de chasse roues en pierre datant du si cle pass ils prot geaient la porte et les murs des chocs qu auraient pu leur infliger les charrettes Dans la cour cohabitaient des garages individuels un immense hangar une laverie et le petit jardin qu entretenait tante Anna Le hangar lou un r parateur de deux roues servait galement de refuge aux trois voitures anciennes 14 du Moni dont la Hotchkiss encore utilis e pour de rares d placements Tante Anna tait un personnage ineffable physiquement comme moralement En la voyant pour la premi re fois on pensait aborder un tre rev che mais ses yeux engageants presque lumineux invitaient aussit t a prendre une chaise un caf une d licieuse confiserie On s appr tait s apitoyer sur sa silhouette compacte et lourde lorsqu elle vous surprenait en esquissant un pas de deux comme a pour rien Les m disants d licats disaient qu elle avait l air d un pot tabac les m chants penchaient pour une barrique Lorsque le Moni avait son gard une attitude d sobligeante elle le remettait en place d un regard sombre et d une remarque acerbe tout en lui filant un l ger coup de coude dans les c tes et en clignant d un ceil Elle pouvait aussi faire mine de lui lancer un de ses seins
6. du c t droit Avant la 13 mise en forme ils tombaient formant un rideau clairsem de pr s de trente centim tres Il les plaquait sur l ensemble du crane grace de l eau sucr e qu il prenait a Paide d un peigne dans une cuelle destin e a cet effet Une petite brosse lui servait ensuite a lisser sa moustache Il ne lui restait plus qu a relever les bretelles de son pantalon qui pendouillaient lamentablement puis se redresser et r tablir ainsi l image si caract ristique et impressionnante du Moni son front alors accusait des plis de s v rit Il effectuait ces t ches d licates dans sa cuisine face la glace suspendue au dessus de l vier Parce que Jacquie avait acc s cet endroit en montant le pain ou les croissants elle pouvait voir assez fr quemment l envers du d cor la stature du Moni en n glig mais c tait un privil ge Avec lui habitait Anna qui n tait ni la tante de Jacquie ni l pouse de l oncle mais sa servante lev e un jour au rang de concubine et du m me coup celui de tante Anna Depuis toujours Jacquie ne lui reconnaissait que ce dernier statut Le Moni vivait de ses rentes qui devaient se composer essentiellement de l immeuble de rapport qu il poss dait rue de Queuleu Il comportait un magasin en fait une picerie au rez de chauss e et huit logements dont il occupait l un d entre eux au premier tage Pour entrer dans l immeuble il fallait fran
7. ppartement rue de Queuleu Metz Tout s tait pass tellement vite le retour d Alphonse d Alg rie le mariage la recherche d un emploi Il ne souhaitait pas continuer son m tier de menuisier pourtant il tait titulaire d un brevet de compagnon Jacquie s tait m me offert un miniblues avant mariage Trois fois rien seulement un peu de nostalgie pour bien souligner qu elle quittait sa vie de jeune fille et que c tait un aller sans retour Jacquie et Alphonse ne savaient pas tr s bien pourquoi leur trajectoire les avait amen s Metz Mais ils avaient accept avec enthousiasme l appartement qui leur tait chu en vertu d un contrat entre papa mile et le Moni Ils avaient m me carr ment applaudi lorsque maman lise leur avait fait part de la proposition de l oncle que tout le monde appelait le Moni Moni signifie oncle en Luxembourgeois mais l oncle Jean v ritable oncle du p re de Jacquie tait pour tout le monde le Moni une sorte de g n rique Cela suffisait son identification et lui allait comme un gant Avec ce nom il faisait chef de clan celui qui inspire le respect qui a du pouvoir Un homme plut t redoutable belle prestance bon pied bon il quatre vingts ans il soignait son apparence avec minutie Le matin il lui fallait un certain temps pour r parer les d g ts provoqu s par la nuit Pour dissimuler sa calvitie il avait laiss pousser ses cheveux
8. tu Il faut quand m me neuf mois et l je n ai pris d engagements que pour six Oui mais les visites aux m decins Je trouverai le temps n cessaire D ailleurs nous avons d j vu trois sp cialistes et j ai fait de nombreux examens tout parait normal il faut que nous soyons un peu plus patients Cela me ronge bien s r et j y penserai un peu moins si je suis occup e qu en penses tu Tu as certainement raison D ailleurs moi aussi je vais probablement changer de travail je devais en parler avec toi et tu m as devanc Ah ca alors quelle coincidence de quoi s agit il On m a propos de devenir responsable de la Communaut d Emmaiis Peltre Tu me surprends l et cela te plairait Je crois il faut que j y r fl chisse et que tu me donnes ton avis mais pourquoi pas Le bureau n est pas tellement mon truc et au tribunal je suis quand m me souvent oblig de faire des paperasses Jacquie et Alphonse connaissaient d j les compagnons d Emmaiis ils faisaient partie des amis d Emmaiis grace un ancien copain de la JAC qui leur avait fait conna tre cette structure Jacquie trouvait qu Alphonse tait un peu jeune pour g rer le travail d une 18
9. x le m nage tait rarement fait sauf dans la cuisine ailleurs c tait service minimum Mais quelle tait donc la nature de ce contrat verbal pass entre son p re et le Moni se demandait Jacquie Son p re aurait il oubli que c tait ce m me oncle qui Pavait trahi apr s son apprentissage de boucher en ne tenant pas sa promesse l engager comme boucher et lui c der son commerce sa retraite Sa m re lui expliqua le vaste projet con u par le Moni il avait propos de louer a Jacquie et Alphonse l appartement contigu au sien Ses arguments taient simples il croyait en l avenir de ces deux jeunes Pourquoi C tait logique d s l ge de douze ans Jacquie savait faire des pommes de terre r ties comme personne et elle avait certainement consolid et diversifi ses connaissances culinaires et autres Quant Alphonse il avait une t te qui lui revenait Et un m tier qui laissait pr sager qu il saurait s occuper de l entretien de la grande maison en vertu de quoi le Moni songeait faire de ces deux jeunes ses b n ficiaires testamentaires Cette derni re clause ne devait pas leur tre r v l e car ils devaient bien entendu faire leurs preuves M me papa mile tait m fiant chat chaud craint l eau froide Quant maman lise elle tait totalement incr dule et s etait empress e de r v ler ces deux jeunes les termes du pacte Mais puisque le tonton
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