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POLYPTYQUE 2 - TK-21

1. 2 2 DP SITIONS E 6 TES 5 Le choix de cr er 2005 les premi res Rencontres Photographiques de Roumanie n tait pas fortuit Timisoara ville h ro que et r volutionnaire mais aussi ville symbole de la manipulation m diatique et du danger des images tel point que pu parler syndrome Timisoara est forc ment li e dans l imaginaire collectif la question de la photographie L occasion nous tait peut tre donn e pr cis ment dans cette ville de r fl chir sur le statut de la photographie sur les enjeux de l image dans nos soci t s satur es d information et plus profond ment Cosmin Bumbut sur la repr sentation photographique Pour la premi re dition avait t retenue comme probl matique l articulation entre R volution et Evolution th me qui trouvait sa pertinence non seulement Timisoara mais dans les pays voisins en particulier Hongrie et Serbie L dition 2006 a souhait se pencher sur le processus m me de la cr ation photographique en interrogeant la notion de passages entre exception et r gle comment la photographie jouant avec ses propres codes de repr sentation permet elle de penser le monde et de se penser elle m me A travers un certain nombre d exp rience embl matiques c est toute la question des limites de la photographie donc indirectement de la sp c
2. H Nitsch et bien d autres comme si elles n avaient pas eu lieu On a l autant transgressions fondatrices Elles sont sans concessions parce qu elles ont voulu entrer directement dans l alt rit et l alt ration du monde sensible pour le sujet humain l ge d une exposition de l humanit son dehors et sa possible d perdition dans le silence r it r de l atroce La vision me revient depuis Timisoara d un amoncellement de corps morts d charn s Que nous repr sentent ils exactement ainsi photographi s La pr sence absence irr ductible des victimes de la mort toute visibilit du fait d un effacement de leur an antissement en d autres lieux qui ne sont pourtant mat riellement pas ici Le transport des images ce qui se regarde pas L image 5 sans que je puisse la voir Ce n est point seulement la question de la mort qui est ici en cause mais aussi sous jacente celle de d un effacement du visible et des corps qui porte atteinte pour nous toute image toute repr sentation Car si d un c t de la modernit en proie la mati re du corps mort il y a l anatomiste fran ais du 182 Fragonard de l autre il y a le m decin allemand du 20 Von Hagens Tous deux mettent en sc ne mort en mouvement immobile car statufi e devenue sous leurs mains sculpturale Ils le font avec les chairs avec les corps m lant la mort et la vie 200 ans d intervalle Tous deux
3. Cette d finition restrictive de la transgression n interdit pas de donner aux diff rentes ruptures de l art travers l histoire moderne une valeur transgressive profane La transgression serait alors le travail du profane dans l art en tant que toujours d j l uvre et s par du r f rent cultuel religieux et moral De plus il faut insister sur cela les normes de l art ne sont pas tant les croyances dominantes d une poque qu il refl te certes et qui le gouvernent plus ou moins que les lois et les formes de sa propre production Par exemple le fait d avoir recours ou la perspective g om trique et la mise en sc ne des mouvements dans la figuration la transgression dans l art est le plus souvent une remise en cause formelle de ses propres crit res de composition et de r alisation donc des normes du go t Quant l actuelle orientation profane de l art et de la civilisation en l absence de sacralit positive si elle nous appara t comme une profanation du profane une transgression g n ralis e c est en tant qu elle fait suite un ensemble de ruptures et transgressions des interdits de la culture et dela repr sentation depuis la Renaissance un ensemble de d sappropriations aussi Ces ruptures se comprennent tout autant comme des basculements historiques au sein des soci t s et de la culture commune que comme des gestes de transgression r alis s par les artistes au sein m me des di
4. d autres de la fin du 148 si cle ce d but du 21 si cle Proposons un tableau deux faces La Renaissance fut l inscription du sujet humain individualis dans la forme d une nature lumineuse et presque cl mente soumise Dieu et aux hommes le m lange des bonheurs de la chair la promesse spirituelle du salut le spirituel et le temporel crois s dans le milieu g om tris d une perspective quilibr e soutenue par le jeu des couleurs des figures des paysages par la foi en un r cit renouvel de la cr ation du monde chr tien et tout la fois La Renaissance a d ploy la concordance encore tenue moment de l Histoire du profane et du sacr au bord d une profanation annonc e des interdits figuratifs de la religion d une profanation du sacr qui advient et que l abondance des images d j provoque D rer peint son autoportrait en figure christique C est une des extr mit s de l arc l autre ceci que vous connaissez Un tourbillon de figures et de formes un art de la rupture anti naturaliste hostile toute vidence repr sentative Un art qui pr ne le surgissement de l infra figural le jeu des mati res une composition hyper formelle 1 exalte le langage et les signes destitue non seulement toutes les normes et les conventions identifiables comme mod les mais en vient r cuser les formes m mes de la production d uvres et d objets d art m langeant la caricature et le
5. par son style et ses orientations par ses formes d expression y compris en se limitant un de ses domaines de production par exemple la musique la photographie Et c est probablement aussi une seconde vidence il que des uvres ou des actes d art d aujourd hui dans leur pluralit Car l art n est nullement moribond malgr ceux qui durant le dix neuvi me et le vingti me si cle annonc rent vigoureusement sa disparition prochaine du fait de son ach vement de son puisement et de sa vulgarisation Au contraire de cela les arts et les artistes ont fait preuve au vingti me si cle d une tr s grande vigueur au travers des divers bouleversements qu ils ont travers s sur les plans formel et technique L art a v cu durant ce si cle une situation de crise et de mise en crise tr s profonde de sa production Ces crises ont proc d d une remise en cause au sein l art et de la culture la fois la repr sentation de la r alit et de la figuration des choses des formes et des techniques de r alisation des uvres ainsi que de leur statut et de leur mat rialit De telles crises sont galement dues comme vous le savez l industrialisation de l art son absorption partielle par la sph re de l exploitation industrielle et technique des Biens reproductrice en une infinie d sacralisation de son sens au profit d un usage de l art comme simple divertissement de masse ou comme source de
6. pique et du lyrique l ode et de l pop e du dramatique et du romanesque Pour parler avec les mots de Nietzsche le dionysiaque va venir submerger l apollinien L art moderne appara t maintenant comme celui qui vient transgresser non plus l interdit sacr de repr senter mais l inverse le consensus rationnel autour de la possibilit de la repr sentation et des canons en une succession de gestes de transgression De ces transgressions successives des modernes la sociologue N Heinich nous en pr sente une recension assez exhaustive dans l art de peindre Transgression des canons acad miques de la repr sentation par l impressionnisme transgression des codes de figuration des couleurs par le fauvisme puis de figuration des volumes par le cubisme transgression des normes d objectivit de figuration l expressionnisme transgression des valeurs humanistes par le futurisme des crit res du s rieux par le dada sme ou du vraisemblable par le surr alisme transgression de l imp ratif de figuration par les diff rentes abstractions depuis le supr matisme ou le constructivisme jusqu l expressionnisme abstrait g n ration apr s g n ration l art moderne met crise en les transgressant les principes canoniques de l art Et provoque ce faisant des scandales 19 Pour autant l inconv nient d une telle recension est qu elle se limite n tre que descriptive Elle ne saisit pas l
7. Gilles Deleuze L image mouvement Paris Les ditions de Minuit coll Critique 1983 173 195 9 ibid 84 201 Georges Bloess Errant central marginal Lieux et parole de l artiste allemand l aube 2 si cle in L artiste Paris L Universit des arts Paris 1 et Paris et Paris 4 s minaire inter arts de Paris 2003 2004 d Kliencksieck nov 2005 21 Marina Grzinic Une Fiction reconstruite Europe de l Est post socialisme et r tro avant garde Paris d de L Harmattan coll L Ouverture Philosophique p 18 SUEXOOMONE CET E DE TES Jean Louis Poitevin l injustifiable contrepoint de Iosif Kiraly A Voir et croire 1 Levuet le cru Le paradoxe interne et intime de l image tient ceci que depuis les premiers temps de l humanit l image est sans doute le vecteur le plus efficace de la croyance Peut tre cependant faudrait il inverser cette proposition et dire que ce qui rel ve du vu et non pas du visible est imm diatement cru Voir n est croire que parce que ce qui est vu s impose comme devant tre cru Simplement la confusion est l entretenue par tant d instances diverses entre vu et visible Le visible semble devoir englober le vu mais il se pourrait aussi que le vu soit plus ouvert que le visible En fait il s agit l de deux approches sans doute si diff rentes qu elles traversent l histoire occidentale
8. la ligne d horizon rarement vidente mais souvent implicite sugg r e par des groupes d arbres ou des collines Dans ces paysages le premier plan domine Les courts textes qui leur sont associ s brisent l harmonie donnent une impression de profondeur Ils relatent l histoire l h telier qui croit tre le Premier Ministre l gitime de Saxe l histoire de l leveur d oiseaux maintes fois c l br qui lib re ses animaux l histoire de l employ commercial pyromane qui boycotte les missions t l vis es l histoire de l ing nieur en b timent qui tue les moutons de son rival avec cruaut Sven Johne veut par le langage des images rendre une forme condens e de r alit La fiction est pour moi plus cr dible que la photographie de sujets clairement d finis vidents qui nous semblent plausibles dit il voquant la diff rence avec le photojournalisme Cependant mes paysages et mes textes n abordent pas une contre r alit mais le r alisme latent des rapports des connexions d un c t le voyage travers l Allemagne de l Est de l autre les coupures de journaux Ce qui est pour moi tr s important est de distiller la v rit apparente et d en extraire l essence qui lui conf re r alit 6 La recherche de traces des deux photographes se conclut par un travail commun intitul Tropical Island Il pr sente les images d un parc de loisirs la v g tation tropicale ayant t l objet d un des nombre
9. le r el derri re l image et la signification hors l image du c t de l invisible Dans l autre cas on prendra l image pour qu elle est une construction qui informe notre regard sur les choses l informe au sens strict lui donne une forme qui permet ces choses de venir s inscrire sur et dans ce regard L image saisie est la fois comme ind pendante de l acte de voir et l informe qu elle t moigne toujours de l illusion qu il y a croire que le visible serait le r el ou le vrai Ce qui est r el c est la vision Ce qui est visible c est l image Ce qui est vu c est le fait qu il y ait du visible dans l image ou sur l image Oublier cette tape ce jeu des m diations devenues si implicites qu on en oublie l existence c est sans doute condamner ne pas pouvoir penser ce qui rel ve de l image aujourd hui Or plut t que de chercher maintenir actuelle la compr hension des m diations dans le processus de fabrication des images on tend laissant s installer la croyance que le r el est le visible et que ce qui est vu est r el alors que les visionnaires savent parfaitement que ce qui est vu n est pas n cessairement r el voire jamais r el et en tout cas pas uniquement r ductible au r el On ne voit jamais qu avec les yeux de son poque de sa culture de sa situation psycho culturelle de sa croyance Il ne faudrait donc pas dire que voir permet de croire au sens de tenir p
10. pulsion sexuelle elles sont extraites de nos comportements r els de nos sentiments r els d un comportement somme toute trop normal Et cette force vitale cette force brute surgie de la violence originaire emprisonne le sujet dans un monde statique motion plut t que mouvement et ne peut que se retourner contre lui Aussi ayant tent d ouvrir la bo te noire celle ci s est cass e en deux D un c t nous en retirons une vision ph nom nologique de l espace formes sensibles pli es sous la structure d une Gestalt Mais d autre part nous sommes plong s dans une conception toute bergsonienne du temps que reprend Gilles Deleuze Il oppose d ailleurs ces deux pens es la ph nom nologie de Merleau Ponty et sa c l bre assertion toute conscience est conscience de quelque chose il lui confronte la philosophie Bergson pour laquelle toute conscience est quelque chose 19 Ainsi sous cette dialectique pourrait on nouveau envisager la bo te noire la fois exprimant un ici maintenant pulsionnel et l affirmation d un lien sujet monde La bo te noire est ce par quoi l accident arrive car elle rel ve de donn es contradictoires soit le sujet est port dans la structure r confortante de l espace soit il est plong dans le continuum sans origine ni fin du temps Conclusion pour une charni re entre espace et temps pr sent nous avons d couvert tout fait le contenu de la bo te n
11. qui permettent de lui conf rer des significations Comme surface signifiante la photographie crit notre avenir Elle met en relation le signe et la forme le visible et le cach mais le cach n est pas ce qui se tient dans l me du photographe ou dans un ciel trop pur pour tre visible mais bien dans ce c ur inconnu de l appareil dans cette bo te noire l Or continuer de pr tendre que l appareil saisit le r el tel qu il est interdit d accomplir geste qui sans doute est n cessaire pour ne pas dire in vitable de d lier l image de m taphysique et nos regards de cette croyance qui nous fait en l image comme tant le meilleur l ment permettant de nous orienter dans le r el c est dire de conna tre ou de dire le vrai Il nous faut donc nouveau tenter de dire de quelle image nous parlons Auparavant il appara t n cessaire d voquer pr cis ment que les autres approches de l image tiennent pour juste a l image dont nous parle M J Mondzain par exemple une image puissante pour ne pas dire toute puissante Pour comprendre ce qu est le pouvoir de l image il faut non seulement dire qu elle est toujours image de quelque chose mais aussi que dont elle est l image lui est tranger substantiellement Toute image est image d un autre m me dans l autoportrait Cet cart est celui la symbolisation cart qui creuse un infranchissable avec l incorporation d une
12. tudiants taient furieux Ils ne me croyaient pas Pour eux les Am ricains les pragmatistes la communication tait une chose primordiale soi disant et vision de l artiste individuel 9 En fait la relation l image est bien double D une part on attend d elle qu elle soit porteuse d informations partir desquelles va continuer de chercher s orienter dans la vie et d autre part elle peut aussi en tant que manifestation d un monde singulier tre quelque chose qui s oppose l information quelque sorte En fait ce n est pas l information que l image 5 tant que telle mais au processus de reconnaissance qui est au c ur de la lecture de l image Voir c est chercher reconna tre L artiste pour Richter ne voit pas il des visions qu il va devoir fait construire et faire exister et ce sens il est visionnaire Les images qu il peut produire dans ce cas ont sans aucun doute une valeur d information mais ces informations ne sont pas lisibles Ces images ne peuvent pas imm diatement servir retrouver son chemin dans la for t des signes N tant pas imm diatement lisibles elles op rent une brisure et cette brisure dans le processus de reconnaissance est en fait ce qui pose probl me et pas seulement aux tudiants de Richter Car en effet ce qu ils ne comprennent pas c est qu il puisse y avoir des choses qu ils ne comprennent pas C est qu il
13. Sculpteur peintre photographe ou sp cialiste de la performance l artiste autoproclam est un com dien qui cache son n ant derri re la monstration obsessive de son propre corps par un jeu de sc ne qui se substitue toute uvre autonome promettant la fin et le d cisif sacrifice de lui m me afin de provoquer motion ou horreur Le vide sur lequel on s appuie n est seulement justifiable qu en fonction de deux pr misses possibles 1 au sens classique dispara t l apparence est captur e par le concept l histoire de l art devient une subdivision de l histoire de la philosophie Ce que l artiste met en sc ne n est que le pr texte pour une fine distillation de certaines id es philosophiques tr s connues l empirique banalis n est que le d clencheur des nuances th oriques de la tyrannie du discours Etre artiste signifie dans ce contexte parler d art expliquer pourquoi l art traditionnel n est plus possible se livrer une forme sp ciale de critique la soci t 2 la force de la pr sence inerte de l uvre de l objet issu du travail de l homo faber est remplac e par l accentuation de la subjectivit du cr ateur de sa gestualit vivante du processus Cr er n est plus une d marche sens unique n est plus quelque chose de ferm rigide orient vers la mati re qui a pour but de laisser des traces esth tiques potentiellement ternelles mais repr sente l uvre orient e vers soi m me le
14. cr ations La sc ne l art la sc ne de la photographie en particulier demeure un terrain d exp rimentations o est renouvel e la perception La transgression est donc envisag e comme destruction cr ative comme lors de la p riode de crise qui a ouvert la modernit o les formes sont d construites voire d figur es ou subverties d velopp es souvent dans l espace par r p tition ou expansion Les formes sont parfois combin es pr caires ou hybrides et se d veloppent dynamiquement Les corps reflets de l instabilit du monde n ont pas fini d tre d senchant s Les figures sont d figur es souvent avec violence elle sont rendues chaotiques et nous manifestent ainsi l tat du monde la monstruosit d un r el pr tendu transparent o les diff rentes sph res int rieur et ext rieur intime et social seraient disloqu es d stabilisant les relations conventionnelles de l homme au monde L artiste met souvent dans traitement du corps le spectateur en situation de voyeur contemplant le monde certes avec effroi mais aussi avec fascination Ces transgressions ont souvent pour corollaire une esth tique de la violence Les formes peuvent tre alors morcel es clat es ou dispers es voire d structur es Les proc dures des transgressions sont donc multiples Elles permettent de sonder les limites de la cr ation de remettre en cause le caract re sacr de l art Les Secondes Rencontre
15. de son inviolabilit et d une mal diction due son acte Elle confirme une n cessit sur laquelle l existence d une chose repose m me temps la transgression rel ve d une certaine d viance par rapport un code une r gle une coutume et appara t comme une provocation aux yeux des tenants de la conformit ou de l ordre Elle n est pas pour autant une perversion m me si le sens commun tend les confondre En latin nous l avons vu la transgressio c est l action de passer de l autre c t de traverser de commettre la faute de violer la loi divine La perversion du verbe latin pervertire signifie mettre sens dessus dessous invertir bouleverser troubler L intention qui l anime est de faire mal tourner de convertir au vice La perversion est une action de corruption la falsification d un texte ou la volont d lib r e de fausser la justice La confusion des deux termes ne se peut que si l on amalgame profanation et intention mauvaise c est dire volont de d truire pour nuire Le h ros grec par exemple pas d intentions mauvaises il transgresse dans l ignorance du mal et de faute qu il commet souvent aveugl par des dieux qui souhaitent sa perte Il ne profite pas de son crime La perversion suppose plut t quelque profit escompt par celui qui la commet et un calcul d impunit Durkheim rappelle que la profanation n appelle pas de condamnation humaine l encontre de son aut
16. des outils Du moins si les outils comme moyens termes sont adapt s au r sultat vis si ceux qui les emploient les perfectionnent C est dans la mesure o les outils sont labor s en vue de leur fin que la conscience les pose comme des objets comme des interruptions dans la continuit indistincte L outil labor est la forme naissante du non moi L outil introduit l ext riorit dans un monde o le sujet participe des l ments qu il distingue o il participe du monde et y demeure comme l eau est dans l eau gt Georges Bataille Th orie de la religion Paris d Gallimard Tel 1973 p 36 37 Z Jean Paul Fargier The Reflecting Pool de Bill Viola Paris d Yellow Now c t films 2005 8 lt Elle la totalit subjective de l expressionnisme aligne au contraire palimpsestes pr caires balbutiements prononc s sous le coup de la sensation imm diate plong e dans la profondeur du sentiment d une force originelle qui tout instant les s ries ind finies des preuves d une uvre jamais diff r e d soeuvr e dira de nos jours Maurice Blanchot port e aux limites du non sens habit e qu elle est par la tentation de n ant mais hant e aussi par ce que C zanne appellera l impuissance r aliser Jean Clair La responsabilit de l artiste Paris d Gallimard coll Le D bat 1997 122 123 91 Nos vieux b b s puisque tout artiste est un enfant r
17. el au moyen d images anim es Or on objectera et juste titre que de tels rapprochements ne sont pas pertinents On peut pas confondre l art et des actions de propagande militaire men es au moyen des images et de la t l vision ou par la fabrication de preuves en utilisant des cadavres Ce n est d ailleurs pas une nouveaut dans l histoire militaire Quant la manipulation par l art du corps du mort des fins de repr sentation elle est il est vrai un acte exceptionnel hors de la sph re des pratiques rituelles religieuses et sacrales d ordre fun raire Pour autant il est ind niable aujourd hui que mise en sc ne dans la r alit v cue comme si elle d pendait directement de l art d actions ou d uvres ne soit pas devenue l un des modes d expression revendiqu s de l art contemporain Elle se fait dans le cadre d une transgression d lib r e et assum e comme telle par les artistes des limites qui s parent l artifice du r el la vie sociale de l art On objectera aussi qu il s agissait Timisoara de morts v ritables et non point de simulations Les cadavres avaient t pr lev s dans les diff rentes morgues de la ville et seule l imputation du massacre tait fictive mise en sc ne mais pas l amoncellement atroce ind cent et funeste de ces corps Ce n tait donc pas de l art une imitation fictive des choses afin de les ressentir et de les penser mais bien plut t du r el exhib et dissimu
18. engendrer le clair obscur d une nuit m lancolique qui loigne l homme de Dieu lui d voilant le drame de la chair morte et ses turpitudes C est donc une dialectique nouvelle qui d ploie jusqu au 198 si cle celle du monde moderne et de sa modernit dialectique qui oppose une transfiguration profane du visuel subjective et imaginaire int rioris e la transformation du visible en une image objective formelle en une image de synth se souhait e par la science comme l crit J L Nancy en se r f rant Kant Elle va s av rer cette image indiff rente toute sacralit destructrice de celle ci et peu peu violemment transgressive des lois de l art Troisi me rupture et transgression la modernit se voit son tour r cus e et confort e par le modernisme de ce que appelle l art Moderne et qui commencerait partir de 1870 La soci t industrielle entra ne l art vers une d marche de transgression de ses formes propres vers une n gation de son pouvoir de transposition et d imitation des choses par les moyens de l art L apparition de la photographie par exemple va ainsi provoquer une mutation des conditions de production de la peinture et entra ner une rupture formelle L art va se radicaliser dans ses exigences de repr sentation soit du c t du sujet qui per oit et ressent soit du c t du repr sent Pour cela l art Va remettre en cause ses propres r gles de composition et de fig
19. est trang re la philosophie m me quand elle se fait cynique transgressive ou d ploie les formes paradoxales d une anti philosophie Le v ritable philosophe se moque de la philosophie crivait d j Pascal 10 Il a donc pas en philosophie de transgression majeure possible philosophe contre la philosophie parce que la philosophie en elle m me est d j toujours une d viance un refus de l ignorance de l arbitraire et de l injustice commune La philosophie parce qu elle est transgression de la cr dulit et de la servitude pas besoin d tre transgression d elle m me et de ses actes Par ailleurs si la philosophie peut justifier une subversion de l ordre au de la justice et du vrai elle la vise pas tant que telle comme sa loi Les philosophes sont plut t l galistes m me quand ils sont des rebelles L esth tique quant elle c est dire la th orie raisonn e des formes et des lois sensibilit telle que l art les donne percevoir et r fl chir n est pas en soi n cessairement transgressive Dans ses figures classique et n oclassique antique et pr moderne elle rel ve d une recherche des principes de l quilibre et de l harmonie des formes d une r gularit naturelle dont les productions de l art seraient le lieu d expression et la th matisation concr te sur le plan du sensible Elle repr sente une exigence d ajustement des productions de l art la natur
20. est pour viter une dislocation de la culture que furent invent es les images techniques tant que code cens valoir pour la soci t toute enti re 10 La brisure de m canisme de reconnaissance peut cependant aussi faire partie des fonctions de l image Et ce sont alors par exemple de telles visions transparentes pour reprendre l expression de Richter qui peuvent devenir les vecteurs de cette brisure 3 L injustifiable La puissance de ces visions transparentes ne peut tre que celle ci rendre tout ce qui n est pas elles sans valeur au moins pour celui ou celle chez qui elles se manifestent Mais que peut bien tre une telle vision transparente sinon l absente de toute image ce qui dans l image est et n est pas image Il faudrait sans doute ici se plonger plus avant dans les d finitions de l image mentale ce terme J P Changeux pr f re pour d signer les processus l uvre dans le cerveau finalement le nom d objets mentaux Le mot image appara t alors trop r ducteur L h misph re droit analyse et produit pr f rentiellement des images alors que l h misph re gauche se sp cialise dans des op rations la fois verbales et abstraites Revenons aux consid rations th oriques pr sent es en d but d ce chapitre Ces r sultats sugg rent que les objets mentaux composante r aliste comme les images mobilisent de pr f rence des neurones de
21. et l histoire de l art en particulier L approche de l image fond e sur une th orie de sa constitution comme articulation entre visible et invisible est globalement d origine chr tienne En fait elle se base sur une conception r troactive de la notion de vision Elle part de l quation suivante selon laquelle ce qui est visible est l expression le masque ou le contenant de quelque chose d autre qui est cach mieux encore absent Cependant cette absence pour pas tre radicale pour ne pas tre v cue comme perte doit rester pr sente et comme la pr sence est associ e ce qui se montre c est travers ce qui se montre qu il faut donc penser la pr sence Ce qui se montre entre dans le visible m me si ce qui cherche se montrer n est pas coextensif au visible Ce qui lui chappe au fond ne peut pas se manifester sous une forme visible Telle est la le on Telle est aussi la racine des conflits entre iconophiles et iconoclastes Les deux camps ont cependant une m me peur sans doute et sont en tout cas port s par une m me incapacit voir le vu gt si l on peut dire ou du moins envisager son existence autrement que comme li quelque chose relevant l invisible Que serait donc le vu par opposition au visible Le vu est ce qui s imprime ou plut t s inscrit et passe et ventuellement revient et repasse dans le cerveau Le vu peut tre le r sultat de deux op rations au demeurant oppos es pour
22. et que l mergence d un art subjectiv moderne conduit une contestation des formes de l art sacralis es classiques et donc l aussi galement leur transgression Pour autant cette derni re transgression fait alors r appara tre le vertige du sublime un ge o les dieux se sont retir s du monde et o de ce fait l effroi tragique se r v le comme un face face avec l absence ou avec Ce que Hegel avait appel la conscience malheureuse marqu e par mort et la n gativit L histoire et l art nous auraient ainsi conduit conjointement du r gne de la forme brute monumentale inhumaine et sacr e ternelle la dissociation du sujet humain vivant historique de toute contrainte formelle afin d affirmer dans l ordre sensible profane la figure de sa libert au prix d une exp rience po tique de son humanit dramatique et intense singuli re Exp rience moderne dans laquelle et pour laquelle l uvre d art va devenir le vecteur essentiel de son expression Mais nous ne retiendrons pas la chronologie h g lienne comme exacte elle a ici seulement valeur d un mod le structural permettant d velopper l analyse nous situant que dans une esth tique la modernit purement moderne tendons l arc qui pour nous de la Renaissance la Post modernit de la chapelle Brancacci Florence jusqu l actuel jusqu Rothko De Kooning Bacon et Boltanski ou beaucoup
23. et sa gestuelle au niveau de l outil la bo te noire de l artiste devient l indice d un d r glement d autres termes elle voque dans la r it ration m me de son cycle non pas directement le taylorisme ou du corps au travail mais pr ne une sensibilit qui se dresserait selon de simples pics d intensit Pour Jean Paul Fargier la question de l artiste s exp rimentant tant qu outil incarne le principe du ready made o l objet mis nu conteste la loi des objets D embl e la boite noire est reconnue comme strat gie neutraliser ennemi en se parant de ses atours jouer la carte de la r ification dans le seul but de s en lib rer 7 Il ne semble plus tre question de la seule intention de l artiste et sa vague r alisation dans la mati re mais gr ce la bo te noire d une distinction entre intention et fonction au sens o Roland Barthes le d fend c est dire un rapport direct entre cr ation et soci t La bo te noire en somme pourrait se pr senter comme lieu possible de transgression ce qu elle permet aux artistes de contester les outils du langage de retourner au point o le sujet et la chose exprim e ne font plus qu un ce titre elle pourrait tre compar e aux po mes dada de Raoul Hausmann ou ceux lettristes de Fran ois Dufr ne dont le chant invite un ajustement permanent du prisme du particulier sur les intonations de l me Mais une telle pe
24. exercice d une puissance personnelle c est dans le Myst re que je m bats avec le but de compl ter mon tre avant de refaire le voyage de la pierre Je ne consid re pas les m diums artistiques comme des techniques mais telles des effluves de l esprit qui se sont solidifi es pour des organes imparfaits ayant le devoir de se rapprocher de la gr ce m me si pour ce faire il faut en passer par des le ons d pouvante En ce moment je loge et op re Paris mais la g ographie des structures m int resse qu la condition de me fournir mes rations de mati re vivante Je crois plut t que je suis n dans la For t et dans des espaces mentaux que j ai travers s Denis Prot or mars 2006 Denis Prot or BP SITIONS TES S lection de France Presse Bucarest Passages le th me des deuxi mes Rencontres Photographiques de Timisoara est d clinable l infini ou presque Mais ces derniers mois les photographes de l AFP ont v cu sur le terrain actualit oblige des passages parfois tr s douloureux en t moins de grandes souffrances humaines avec parfois quelques rayons de soleil passant par l objectif le sourire d un enfant de r fugi s dans un camp d Afrique pr s d une fronti re h riss e de barbel s et miradors Les yeux des immigrants africains clandestins bloqu s dans les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla premiers symboles du passage l Europe de
25. hui reconnues avant d ouvrir sur une sc ne mergente adepte du burlesque Quelques pr cisions s imposent l tymologie du mot transgression ram ne au latin transgredi passer de l autre c t traverser d passer puis enfreindre Transgredi peut tre d compos en trans au del par del et gredi marcher Le terme transgression rev t un sens moral action contrevenir un ordre correspondant au latin chr tien d o l emploi pour faute p ch Le transgresseur est celui qui bafoue la r gle divine puis dans l usage litt raire celui qui viole une loi Par ses sonorit s transgression sonne comme une action forte connotation agressive Nous laisserons de c t cet aspect pour consid rer plut t la composante gredi de transgredi qui voque la marche et oriente notre approche Une proximit de sens associe donc transgression passage et d marche gt tous mots du cheminement La d marche photographique se r v le tr s li e au parcours dans l espace en t moignent les termes de point de vue distance ou encore cadrage Prenant appui sur cette acception risquons la question suivante l humour apr s tout ne peut il passer pour une fa on de marcher de travers Par jeu consid rons donc la veine comique comme le faux pas choisi pr par assum qui fait basculer un cl
26. importe lequel moteur de recherche sur Internet le terme photo d art nous ne trouvons presque chaque fois que du kitch Est ce que cela sera utile d introduire des termes plus sp cifiques l aide desquels on pourrait faire d autres distinctions que celles de facture th matique paysage portrait etc dans le labyrinthe visuel appel la photo Quelle serait la diff rence entre la photo comme art contemporain et la photo populaire d art losif Kir ly 1 Vil m Flusser Pentru filosofie a fotografiei Gestul Fotografierii Ed Idea Design amp Print Cluj 2003 26 2 Vil m Flusser Pentru filosofie fotografiei Obisnuinta un estetic Ed Idea Design amp Print Cluj 2003 114 42 Aa e a TELET TES conf rences Emmanuel Brassat Esth tique et transgression contrepoint de Ciprian V lcan Pr ambule sera donc ici question de l art et de la transgression de l art et sa transgression C est l le th me qui semble devoir nous r unir en ces lieux et en cette ville de Timisoara Celui de la transgression Mais tout d abord je vais me livrer digression ce qui est dire que je vais marcher de c t tre transgressif par rapport au cadre de mon sujet puisque le terme de digression en fran ais d rive de celui de transgression Ce terme de transgression vient du latin transgredi qui sign
27. l insignifiance dans que l image souvent banalise travers de qu elle exhibe La beaut sera explosante fixe crivait Andr Breton dans L amour fou C est le fait de ne pas gommer ce qu il y de terrible dans l image la fascination qu elle exerce c est de se confronter cette puissance magique non religieuse de l image qui est en jeu ici travers cette ind cence spectrale Le troisi me champ nous l appellerons champ de l invention Il s agit de montrer que ce qui est en jeu dans l image photographique c est l invention r el travers des visions et non pas travers la croyance que la photographie serait une saisie du r el L invention est projet Elle pose qu une image est de facto une mani re de contredire le r el tel que nous croyons qu il est donn De telles photographies sont souvent l uvre d artistes qui utilisent la photographie parmi deux ou trois autres m dia Ils ouvrent le champ du doute dans celui des vidences et le champ de la cr ation de l invention dans monde marqu au front du signe de la r p tition Une telle interrogation a pour fonction de montrer que ce n est pas cloisonnant les r les mais en montrant en quoi ils se recoupent chevauchent se repoussent mais surtout convergent dans l interrogation sur le devenir possible de notre libert que ce que l on nomme la photographie un sens Jean Louis Poitevin 1 Marie Jos Mondzain L image peut e
28. l quelque marque persistante de puritanisme Mais l abolition de l interdit conservatoire quant la fronti re qui s parait autrefois l humanit de la puissance divine ou l humain du Tout Autre pas priori pour moi la valeur moderniste d une norme absolue Et pour faire cho la philosophie cart sienne je dirais que ce serait l comme une sorte d acte de prudence la circonstance d un voyage hors de son propre pays que d accepter qu il y ait encore des tabous quelques interdits sacr s m me s ils ne me sont pas toujours compr hensibles en une sorte de morale comme le disait Descartes par provision 4 Par ailleurs je n aurai pas vous inqui ter de faire figure d en vouloir r tablir Il n en reste mentionn s parmi nous que tr s peu L actuelle hygi ne sociale universelle utilitaire mercantile et s curitaire ne sait plus exactement de quelle divinit pa enne elle arbore encore le nom elle a oubli son origine sacrale Pour autant je vous avouerais que pour moi m loignant ici nettement de Durkheim la sacralit n est nullement r ductible ce que appelle le sentiment religieux la valeur superstitieuse qu auraient les interdits pour je cite l homme cultiv qui n est pas dupe et ne s abandonne pas aux superstitions que ces illusions tendent d terminer 5 Le sacr ne se r duit pas non plus pour moi aux religions ces institutions sociales ordonn es et offici
29. l opulence parlent d eux m mes Et voyez vous m mes Yves Claude Llorca AFP Photos Vicens Gimenez Hommage Henri Cartier Bresson Admiration n f sentiment de joie et d panouissement devant ce qu on juge sup rieurement beau ou grand Dictionnaire Le Robert Nul doute que c est le sentiment qui envahit ces jeunes photographes devant les photos d Henri Cartier Bresson et l hommage qu ils lui rendent en pr sentant ces exercices nous touche car au del de la qualit ind niable de ces photos il s agit de la question d universalit et la transmission de la culture Manu le Debrinay Rizos Directrice du Centre Culturel Fran ais de Cluj Napoca Alina Bondrea Radu Chidris 10 Horence Borel Brossa Bemard Donieck CE g Bi e Le Sergert Jeorlous Aa e a TELET TES conf rences Florence Borel De quelques r cr ations photographiques contrepoint de C lin Stegerean Humour mot anglais qui signifie gaiet d imagination Veine comique 1 L id e directrice de cette communication nous est venue en contemplant une exposition au Mus e de Saint Denis pr s de Paris dans le cadre de la manifestation Placer d placer Intitul Ce n est pas grave cet accrochage temporaire installe des travaux d artistes contemporains au milieu des collections permanentes et historiques 2 Ainsi un t
30. lire le mot transgression gt avec l amertume d un pass qui se r v le comme tel d s que l histoire de l art du XXE si cle d ploie le paravent de sa modernit Chaque battant est le lieu d une nouvelle d figuration s accrochant l poque pr c dente par l ordre que l on conteste Car les artistes sous la coupe de cette formidable machine que nomme avant garde n ont eu de cesse d sorienter le regard conventionnel d volu l uvre au profit du bouillonnement de l activit cr atrice Que parler de transgression pour un artiste contemporain avant lequel toute contestation para t d j avoir t formul e toute r volte prononc e tout combat livr et que les limites du champ de la cr ation s tendent dans une perspective qui se confond dans l infini Que parler de transgression pour un artiste contemporain qui ma trise cette histoire comme le catalogue des mod les ne reprendre que sur le ton de la citation Poser la question de la transgression en art reviendrait de nos jours s interroger sur le r le que rev t l artiste On le dit inscrit dans un processus de mondialisation tout autant que conscient des particularit s culturelles qui font son h ritage L artiste d aujourd hui vit dans une duplicit due une d territorialisation permanente repr sentant de son pays l heure o l histoire de la sc ne artistique mondiale suit celle de la g opolitique et dont l illustration la p
31. lui joue sur l effet de zoom afin d appuyer la port e de ses cris Mais on continue feindre une certaine indiff rence vis vis du tournage il n est rare que l action pousse l artiste sortir du cadre comme si le spectacle tait toujours l occasion d un d centrement d une propulsion hors de l ordinaire C est comme si on cherchait tendre vers l infini Car s il y a les preuves d puisement physique semblent jamais annoncer une fin prochaine mais s accumulent s amoncellent dans l ambition d un record Plus les gestes s additionnent plus le regard du spectateur se fixe plus la bo te noire est dense C est dire que le temps imparti cette r p tition effr n e est un temps plein combl chaque instant par la retomb e geste Dans l espace de la bo te noire le temps s expulse du raisonnable pour d fier l infini Nous pourrions reconna tre l l expression d une force vitale ce grand d sir chant par les artistes de Dada ou par ceux de Fluxus peut tre stimul par le vif succ s que remportent les ouvrages d Artaud dans les ann es 70 Mais bien vite on s tonne de ne pas trouver d objet de prise offerte ce d sir Les images extraites de cette boite noire sont des images pulsions qui selon Gilles Deleuze 18 concentrent une nergie telle qu elles s enroulent sur elle m me emportant tout avec elle sans jamais rien saisir Pulsion alimentaire
32. modelage rigoureux de la subjectivit pour que le corps se transforme entre ses strictes limites temporelles en uvre d art d passant les r gles et le conformisme du gentil bourgeois L excellence de l art traditionnel est le r sultat du caract re de ses productions l accumulation de chefs d uvres d objets consid r s pourvus de qualit s exemplaires tandis que l art moderne s appuie sur transmutation r alis e l int rieur de l artiste sur les transformations que toute sa subjectivit puisse subir devenant ainsi excentrique explosif et unique Si la mort de Dieu est encore en d bat la mort de l art para t plus qu vidente fonction de ces deux nouvelles tendances esquiss es plus haut l histoire glorieuse de Leonard de Vinci Rembrandt ou Canova fusionnera soit avec l histoire de la philosophie comme semblait l entrevoir Val ry dans L onard et les philosophes soit avec celle du th tre Ciprian Valcan
33. ne la percevons plus telle qu elle mais en r f rence aux images connues de la photographie Une prairie ne sera reconnue verte que si la couleur est semblable celle produite par le proc d photographique 14 6 la bo te noire comme permanence et fragilit d un lien entre le sujet et le monde C est dans l effervescence intellectuelle et artistiques des ann es 70 que l on ressent plus qu auparavant la l gitimit de telles recherches L attitude d alors souvent attribu e aux artistes am ricains mais partag e en Europe se veut critique face un march de l art florissant aliment un nombre croissant de galeries et promu par les revues d art On assiste l essor de l art corporel et celui du Land art toutes les pratiques substituant le processus l objet l ludant dans la confiance de pouvoir se propulser hors du circuit marchand Les uvres qui en r sultent si elles revendiquent un caract re ph m re et fragile ob issent une prise en compte de l espace d exposition dans ses particularit s comme site sp cifique Chaque r alisation r pondant au coup par coup un contexte pr cis en appelle donc une conscience accrue du temps pr sent Dans cet esprit Eva Hesse Richard Serra Bruce Nauman et Robert Smithson regroup s g n ralement dans le courant de l Anti form engagent une remise en cause de l h g monie de la vision minimaliste des ann es 60 tout en se situant dans son pr
34. ne pas dire contradictoires La premi re c est celle qui permet une image d appara tre dans le cerveau et pour cela point n est besoin de support r el ou du moins de r f rent Le vu est ce qui se pr sente un visionnaire et non pas ce qui s offre un regard Le vu est aussi ce qui est pr sent par une image photographique ou non en tant qu elle est une mise en sc ne d une partie du visible partir d un point de vue Le vu n oublie jamais qu une image est une d coupe pas dans un visible qui lui pr existerait mais sur le non vu Le vu ne pr existe pas au fait de voir Il se constitue au gr de ces d coupes et c est finalement nous qui sommes les auteurs de notre croyance dans ce que nous voyons et nous appelons le visible De plus nous finissons par facilit ou confort par peur par attirance par tenir pour vrai ce que nous voyons oubliant litt ralement que voir c est inventer ou tre assailli Le processus de reconnaissance la perception des images ne s impose que dans un second temps Oublier cela c est sans doute s interdire de comprendre l image partir de sa racine la plus profonde D une certaine mani re il y aurait l une sorte de principe de classement des images avec d un c t celles qui rel vent de la croyance dans le visible et celles qui se trouvent au contraire du c t de la vision affirmant ainsi un primat de la vision sur le visible Dans un cas cherchera sans fin
35. ne peut exister sans ruptures sans se rendre de l autre c t Mais cela ne nous autorise nullement juger que la transgression serait la norme de l art L art a des r gles et des fa ons qui ne rel vent pas d une norme Il n est pas soumis d un acte id ologique philosophique L art pas se soumettre une obligation de transgression C est pourquoi il ne faut pas que les eaux de la transgression par un trange retournement n en viennent recouvrir les terres de l art Le franchissement d une fronti re s il a lieu d tre doit nous permettre d prouver quelque d voilement de s exposer une br lure On doit pas le confondre avec le geste de la dissimulation avec le recouvrement de l incendie par les lourdes eaux du silence et de l oubli Emmanuel Brassat Paris le 5 mars 2006 1 Emile Durkheim LesFormes El mentaires de la Vie Religieuse Paris Quadrige PUF 2005 458 21 Paul Klee Th orie de l art Moderne 31 Emile Durkheim op cit p 457 4 Ren Descartes Le Discours de la M thode 5 Emile Durkheim op cit 459 61 Michel Foucault Dits et Ecrits 1 1954 1975 Pr face la Transgression Paris Gallimard 2001 p 265 71 M Foucault ibid 265 81 Durkheim op cit 431 9 M Foucault op cit p 266 10 Pascal Pens es U1 Kant Critique de la Facult de Juger voir Analytique du Beau 12 Baudel
36. part ce moment la cam ra qui les avait jusqu alors accompagn s s immobilise et les deux s loignent ind finiment Alors Cassiel demande Damiel s il d sire r ellement devenir humain ce quoi il r pond positivement et affirme qu il souhaite galement conqu rir une histoire Un fondu fait dispara tre les deux anges dans le mur L image du mur persiste encore un court instant Suit un cadrage qui entra ne un changement de perspective L la transformation de Damiel est amorc e Plus tard Cassiel traversera encore une fois le mur Damiel dans ses bras le guidant vers son existence humaine Wim Wenders consid rait le cin ma comme une extension plus moderne de la peinture et la photographie Il voulait seulement montrer les v nements les pr senter comme tels Il s tait ses d buts engag dans le cin ma non narratif Mais quand il d couvrit le d coupage et les possibilit s techniques de montage de plus en plus d l ments narratifs intervinrent dans le jeu et Wenders devint peu peu un conteur Le montage se r v lait comme le premier l ment narratif dans la forme pure du juste tenir la cam ra et ensuite montrer ce qu elle a vu Je m tonnais du fait que le d coupage pouvait faire merger soudain quelque chose de tout autre que la simple reproduction de qui avait t film 4 Les ailes du d sir exprima comme peu d autres films le regard sur la de toute une g n ration et la sc ne
37. pastiche d art la reproduction en s rie et l original le geste et l objet mati re de la composition le sujet vis et aussi les disciplines les domaines Un art qui se livre l exposition directe du corps sexuel mortel festif et criminel sans voile formel ni protection rituelle Un art de la jouissance dionysiaque exalt devenu exhibition de son r el et subversion de sa propre identit Une exp rience profane sans sacralit toujours au bord de sa propre profanation Le monde la transgression ou d une esth tique affirm e comme telle transgressive D faire et d construire rejeter et annuler disperser et provoquer renouveler et r inventer par souci de libert de rupture et d ind pendance l art et les artistes depuis la d claration d incendie rimbaldienne contre l ordre moral et esth tique auront remis cause l art dans toutes ses formes et envisag sa disparition sa d finitive suppression extinction par un puisement de son objet et de sa n cessit Entre l mergence d un id al formel renouvel par les techniques et les sciences math matiques naissantes l accession du spirituel mystique au vivant charnel du corps d un c t de l arc et de l autre l hypoth se extr me extremitas d une destruction int grale de toute repr sentation du subjectif du sensible du corporel du charnel de l affect la culture europ enne travers la p riode qui Va du pr moderne au post m
38. photographique et ses sujets SurExpositions 2006 propose une interrogation ce passage de t moin entre les conventions et le traitement que l exception projette Les visiteurs sont invit s s immiscer dans cet entre deux d un mouvement suspendu que sont les passages qui leur sont propos s Les mouvements n existent jamais tout fait ce sont des passages des interm diaires entre deux existences 21 S il est mouvement suspendu le passage n en est donc pas moins transition SurExpositions 2006 ouvre l exploration de quelques unes de ces transitions par la pr sentation d une s lection d artiste qui leur font d couvrir quelques uns des passages qu ils ont ouverts Et pour clairer les territoires que ces artistes explorent des conf renciers ont analys quelques aspects de ces passages Le fait de passer suppose une travers e celle d un lieu celle d un moment Le passage peut tre autoris ou m me tre grev d une servitude qui en fait un passage oblig n cessaire Dans ce dernier cas il comporte un caract re contradictoire car nul ne peut viter de l utiliser bien qu il soit difficile d y passer Et si le passage est frapp d interdit comment chapper cet interdit Comment m nager une ouverture Il a d autre choix que de braver l interdit que de le transgresser Usuellement transgresser est passer outre passer par dessus un ordre une obligation une loi C est donc aller au del des li
39. portons sur le r el en le regardant travers un appareil On comprend en quoi la m taphore de la bo te noire est ici doublement int ressante Elle fait r f rence d une part la bo te noire de la thermodynamique et elle fait r f rence l aveuglement qui pr side tous les ph nom nes de refoulement ou d ni qui caract risent aussi bien le fonctionnement social que sans doute le fonctionnement g n ral de la psych humaine et en particulier face aux appareils Le probl me pos par la bo te noire est en fait celui du temps En effet comme nous l avons vu la conception du temps qui pr vaut encore chez Barthes et chez tous les tenants de l indicialit est bas e sur une pr valence du pass Le a t de Barthes se double d une approche subjective qui fait de la magie de la photographie le fait que le sujet peut en quelque sorte contredire l irr versibilit du temps La photographie confirme l irr versibilit mais permet une sorte de saut hors de la loi pour remonter sentimentalement le cours du temps En m assurant du pass la photographie m y ancre m y inscrit m y cloue pourrait on dire Or l irr versibilit qui est au c ur m me de la conception et du fonctionnement de appareils est autre Les appareils en tant que li s des m taprogrammes ouverts vers le haut c est dire ouverts vers l avenir participent d une autre conception du temps L irr versibilit temporelle ne constitu
40. profit absorption laquelle il aura du r sister De la sorte la civilisation industrielle et technique marchande a inaugur le couple d une opposition entre la voie devenue dominante et autoris e d une infinie profanation du profane et en r ponse celle ci une expression radicale profane utilisant la sacralit des fins de subversion de l ordre et dress e contre la premi re Cette esth tique de profanation du profane m lange de grossi res transgressions d pourvues de tout rapport incisif la sacralit ou son absence la convention la plus st r otyp e et aussi la plus vide Elle engendre une r alit sociale dont la transgression la plus notable des plus paradoxale serait qu elle peut transgresser ses r gles se d faire de lois autrefois fondamentales sans jamais avoir se reconna tre transgressive et tout autant intimider ceux qui paraissent ne pas s en remettre ces normes de conformit qu elle dicte sans cesse la plupart du temps m diocres et quelconques parfois discriminatoires et s gr gatives Plan propos Je me propose dans cet expos de suivre un plan en trois parties En premier lieu je d finirai la notion de transgression En deuxi me lieu j voquerai diff rentes figures de transgression adopt es par l art travers l Histoire En troisi me lieu j envisagerai la dimension transgressive de l art moderne et contemporain et ses limites 1 De la transgression Qu est ce don
41. que forme leur d sir de ici maintenant au beau milieu du quotidien Pour Nauman et Acconci cela passe par un ordre une injonction pressante qui guide l autre ou soi travers les lieux tandis que Viola et Boltanski en font la raison d une mod lisation Bruce Nauman dans l installation sonore Get Out Of My Mind Get Out Of This Room 1968 brouille les rep res entre la sph re priv e et publique et nous balance de sa voix mena ante l ordre pressant de sortir de la salle comme si nous nous trouvions dans sa propre t te Vito Acconci dans Following Piece 1969 suit une personne au hasard jusqu ce que celle ci p n tre dans un espace priv Face au flux de la circulation pi tonne dans le milieu urbain la r ponse de l artiste proc de la litt ralit du mot de celle d une indication subjective raccrochant son d placement dans un espace public l intimit d une conviction Pour Bill Viola la visibilit du monde ne s obtient pas dans une situation optique mais se d duit de toute une structuration 15 de la perception Enfin Christian Boltanski par le biais des mythologies individuelles s invente une enfance qu il jamais eu lentement construite au fil des clich s des arch types la faveur ce que l on reconna t comme une m moire collective Se reconna tre plong dans le monde c est accepter une r alit aux allures fugaces vanescentes s tonner de la fragilit de son moi comme travers
42. qui regarde La particularit de ce travail photographique est que son objet n est pas une reproduction mais int riorisation impliquant une dimension temporelle Les images sont isol es lib r es de la course du temps et proposent un plan des v nements lisibles telles les strates arch ologiques qui sillonnent une carri re L instant est fig il est une division du temps Il dure aussi longtemps que n cessite l int riorisation comme si le temps de l image tait inscrit de fa on formelle et conceptuelle De cette fa on il se d gage du champ purement documentaire et bascule dans un contexte iconique est plus int ressant de voir dans l image la repr sentation que de consid rer l v nement pour lui m me ainsi que l a d crit Jeff Wall Le journaliste cherche seulement retranscrire l v nement tandis que l artiste transmet une repr sentation de l v nement 2 Ici la photographie au del de la simple reproduction de l objet et inclut toute une s rie de liaisons temporelles complexes qui sont actualis es dans l image De plus une certaine distanciation temporelle par rapport l v nement ainsi qu un regard historique sont n cessaires D autre part Tourneb uf recourt dans son livre la technique du montage textes images en noir et blanc ou en couleur d roulent diff rents fils de lecture Ses images tirent pour la plupart leur signification de l ordre selon lequel tous ces lieux sont r
43. roulent parfois en s quences de clich s agenc s jusqu vingt huit pour Extase de vases dans un noir et blanc somptueux Les tirages jouent de toute la richesse des possibilit s photographiques flou ou mouvement arr t textures magnifi es ou au contraire grain apparent jeux d chelle ombres et reflets points de vues agiles et mise en page dynamique des s ries Constructivisme transcendantal 1992 1994 autre suite d images montre les deux artistes aux prises avec des objets abstraits aux formes g om triques le titre fait bien entendu r f rence la modernit Les Blume peignent un univers tr s sombre leurs d cors de for ts obscures et de placards balais leurs objets hant s rappellent les peurs enfantines Dans le m me temps ils nous font rire sur nos semblables et sur nous m mes ces mod les ridicules et emp tr s peuvent ressembler tout un chacun Ils nous tendent le miroir ironique voqu d but de texte De tels personnages pourraient n tre que comiques mais l univers dans lequel ils voluent est finalement complexe et habit de r f rences ces r f rences philosophiques plastiques qui nous servent justement supporter le monde environnant William Wegman Am ricain n en 1942 photographe et vid aste s inscrit dans le courant ironique d velopp au d but des ann es 70 sur la c te ouest am ricaine met en sc ne de mani re tr s sophistiqu e son chien
44. v n rable et en m me temps ce qui le tient s par le maintient distance la menace d une souillure son contact qui ne peut que susciter l effroi Ainsi le sacr est ce qui appartient un domaine inviolable et interdit digne de respect mais est aussi ce qui ne peut tre touch atteint rencontr sans tre souill maudit E Durkheim crivait Un tre profane ne peut violer un interdit sans que la force religieuse dont il s est ind ment approch s tende jusqu lui en tablissant sur lui son empire Mais comme entre elle et lui il a antagonisme il se trouve plac sous la d pendance d une puissance hostile dont l hostilit ne peut manquer de se manifester sous forme de r actions violentes qui tendent le d truire 3 De sorte que le h ros qui est la figure grecque d un destin de transgression est aussi un sacripant un impie au destin n faste mot de la langue fran aise qui d rive de celui de sacr et qui d signait autrefois un criminel En ce sens j aurais peut tre pr f r moralement et esth tiquement ne pas voir tout fait abolie dans nos m urs la distance circonspecte et l enthousiasme que la sacralit appelait ainsi que l admiration et l effroi qu elle pouvait soulever en pr sence d un lieu favorable l piphanie du divin C est vous dire que je gu re les profanations syst matiques m me spectaculaires que je n en suis pas Peut tre est ce
45. Henri BERGSON op cit p 2 1121 Dans la m me veine d autres photographes auraient pu tre choisis par exemple Sandy Skoglund Erwin Wurm Claude Closky Duane Michals J rgen 131 Nouveau Littr op cit 14 Ainsi avec les Tableaux d art abstrait dans la s rie Constructivisme transcendantal 2 recomposent ils d sormais les concepts et les travaux de Malevitch Kandinski ou Mondrian trait e par les Blume l uvre abstraite en question qui est mat rialis e par des baguettes blanches prend bien entendu physiquement le dessus sur le mod le photographi 151 Expositions r parties en deux lieux l Idiotie Exp rience Pommery n 2 Reims du 3 juin au novembre 2005 et Burlesques contemporains au Jeu de paume Paris du 7 juin au 18 septembre 2005 16 Yves JOUANNAIS L Idiotie Art vie politique m thode Paris Beaux Arts magazine livres 2003 171 Cl ment ROSSET Le R el trait de l idiotie Paris Minuit 1977 Ce sens un peu oubli ressurgit d ailleurs avec le substantif idiotisme du grec idiotismus langage particulier qui signifie selon Le Robert forme ou locution propre une langue impossible traduire litt ralement dans une langue de structure identique 18 R gis DURAND Positionnements De l idiotie aux burlesques contemporains Beaux Arts magazine hors s rie juin 2005 p 5 19 Qu est ce que la photographie aujourd
46. Man Entre 1970 et 1982 docile complice appara t dans de multiples atours ici enrubann de guirlandes argent es l couvert de paillettes robe du soir ou encore d guis en grenouille puis Cendrillon A partir de 1986 Fay Ray Bettina Crooky bient t suivis de Chundo et de Chip se succ dent Costumes et attitudes reprennent les codes du travail en studio Le th me traditionnel de l artiste et son mod le est ici questionn comment nommer ces images insolites L expressivit du sujet photographi amuse La tradition du portrait psychologique semble quelque peu bouscul e Il n y a pas de comique en dehors qui est proprement humain 11 nonce Henri Bergson Ici l hilarit guette La pr sence de l animal au regard r sign ou fuyant capte toute l attention et suscite bien des questions sur la m thode employ e pour parvenir ce r sultat Le temps pass obstin ment mettre en sc ne ces images dr les et m lancoliques la fois fait sourire La beaut plastique des travaux au Polaro d grand format la parfaite ma trise des couleurs et des clairages s duisent Joan Fontcuberta Espagnol n 1955 appara t comme un protagoniste du renouveau de la sc ne photographique de son pays Marqu ses d buts parle surr alisme catalan il d veloppe depuis une pratique de la manipulation mettant en sc ne des animaux des v g taux Son travail se focalise sur l anal
47. a Quelle est la communication Est ce que la communication n est pas la chose plus importante Si vous n avez rien communiquer pourquoi avez vous fait a Alors j ai r pondu Vous avez raison mais seulement moiti parce que le premier soin de l artiste n est pas la communication c est d entendre ses voix int rieures et de voir les visions transparentes qui ne sont ni audibles ni visibles pour les autres et de les r aliser a c est son devoir avant tout 8 Si l on accepte de traduire le terme de communication moins vogue aujourd hui en celui d information on peut alors reposer la question ainsi est ce que cette transmission de l information n est pas l une des fonctions majeures de l image et si oui aurait il pas alors deux types d image ou moins deux mani res de les appr hender Le plus simple est sans doute d couter la suite du propos de Richter Le dialogue se poursuivait ainsi Mais au deuxi me plan vous avez raison disait il ses tudiants naturellement l artiste communique il fait communication Mais ce n est pas son int r t sp cial c est un probl me social Mais d un autre point vue il ne peut faire une communication que parce qu il est membre d une soci t et toutes les id es qu il peut exprimer toutes les visions qu il a sont d j le produit de cette soci t dont vous m mes vous tudiants vous tes des membres Alors les
48. a po sie Vers la fin de cette p riode ce m int ressait dans l criture c tait l id e de la page comme espace parcourir En d autres termes j avais fini par m attacher excessivement peut tre des questions telles que Qu est ce qui me fait passer la marge gauche celle de droite gt Ou bien Qu est ce qui me fait tourner une page pour aller la suivante puis encore la suivante Ainsi je pensais la page au livre essentiellement comme un terrain que je pouvais en tant qu crivain parcourir Vers la fin de cette p riode consacr e l criture je m int ressais tellement la litt ralit de la page que le choix des mots tait devenu un probl me Autrement dit il m tait devenu impossible d employer sur la page des mots comme arbre ou chaise parce qu ils renvoyaient un autre espace situ en dehors de la page En revanche je pouvais employer des mots comme l ensuite ce moment l cet endroit donc des mots qui se r f raient mon activit sur la page lacte d crire sur cette page Hans Ulrich Obrist Comment as tu pu alors transcender la page en quelque sorte Vito Acconci Une fois dans l impasse la seule chose qui vous reste faire est d essayer d en sortir Pour moi en sortir signifiait quitter la page pour l espace concret l espace r el 131 cette litt ralit du mot se joint celle du medium qui p
49. a comp tence de l appareil doit tre sup rieure celle de ses fonctionnaires Aucun appareil photo correctement programm ne peut tre enti rement perc jour par un photographe ni m me par la totalit des photographes C est une black box Et pour le photographe c est justement le noir de la bo te qui constitue le motif photographier 5 S il en est bien ainsi ce n est donc pas le r el qui appara t sur l image photographique mais ce sont les concepts l uvre dans les programmes Le r el que affecte de reconna tre sur les images est tout sauf le r el L image n est pas le r sultat d une intention individuelle Le programme d passant l individu et l englobant l image est sorte de plan de consistance qui forme un double suppos du r el et qui en fait est un double des programmes Pourtant comme le montre Barthes par exemple mais en fait tous les tenants de l indicialit que nous sommes nous croyons tous qu une photo est une preuve de l existence du r el ou au moins de tel morceau de r el un moment donn Et tous nous occultons l existence de l appareil Nous voulons croire en notre libert et nous n analysons pas les conditions r elles de notre enfermement th orique et pratique La question qui se pose est de savoir si la photographie peut finalement chapper au pi ge qui la constitue ou du moins l aveuglement qui pr side tous nos regards tout cas tous ceux que nous
50. a racine m me tendue alors vers un sujet d nonciation plut t que vers la v rit de l nonc Il s agirait pour nous de dessiner les plans d un possible lieu de transgression qui serait comparable une perc e effectu e dans la surface moir e de l information une v ritable chute dans le r el affirmation simultan e de l ici gt et du maintenant Le mot transgression vient du latin transgressio qui veut dire passer de l autre c t et qui s est construit sur gradior gressus c est dire la marche le pas La transgression pourrait donc d signer qui a t diff r de sa course qui a t d raill pour une raison quelconque Alors l image de la bo te noire coffret qui enregistre les donn es d un crash d avion pourrait recueillir les fragments pars de notre r flexion Pour aborder ce terme dont la polys mie clate au travers de la forme simple qu il d signe la bo te noire peut tout aussi bien tre l archive le disque dur de l ordinateur le t l viseur le compartiment de donn es r cup r lors des crashs d avions une m taphore de la m moire ou pourquoi pas le coffret la Dame la licorne nous nous r f rons une discussion imagin e par l anthropologue Gregory Bateson entre un p re et sa fille LA FILLE Papa une bo te noire qu est ce que c est LE Une bo te noire c est une convention entre savan
51. aire L Invitation au Voyage 13 H lderlin Remarques sur dipe et Antigone tr fr F F dier Paris 10 18 UGE 1965 p 63 14 Pascal Quignard Le sexe et l Effroi Paris Gallimard Folio 1996 57 U5 Roger Caillois L Homme et le Sacr Paris Gallimard Folio 1988 48 49 16 Hegel Esth tique t 1 Flammarion 1979 17 M Foucault op cit 262 18 Jean Luc Nancy Au Fond des Images Paris Galil e 2003 p 147 191 Nathalie Heinich Le Triple Jeu de l Art Contemporain Paris Les Editions de Minuit 1998 19 1201 Heinich op cit 20 211 Heinich ibid 75 221 Antonin Artaud Pour en finir ave le Jugement de Dieu 23 G rard Wajcman L Objet du Si cle Paris Verdier 86 24 G Wajcman op cit 182 1251 G Wajcman ibid 253 26 Walter Benjamin L uvre d Art de la Reproductibilit Technique 27 Paul Virilio L Art Perte de Vue Paris Galil e 2005 73 28 Georges Bataille Th orie de la Religion Paris Tel Gallimard 1999 p 143 56 gt BP SITIONS M Horence 1 times Brossa Bemard Gerbouci Donieck Cal 24 Le Sergert Jeorlous DELEE TES conf rences J Ciprian V lcan La revanche du singe Quelques r flexions sur la mort de l art Tout l art moderne est une subdivision d un art du spectacle hypertrophi une vari t trange de th tre
52. aison de leur incompatibilit qui caract rise l histoire dans son ensemble c est lutte de l criture contre l image de la conscience historique contre la magie Avec l criture apparut une nouvelle facult que nous pouvons appeler la pens e conceptuelle et qui consiste abstraire des lignes partir des surfaces c est dire produire et d chiffrer des textes La pens e conceptuelle est plus abstraite que la pens e imaginative car des ph nom nes elle abstrait toutes les dimensions l exception des lignes droites Ainsi en inventant l criture c est d un pas de plus que l homme s est loign du monde Les textes ne signifient pas le monde mais les images qu ils d chirent D s lors d chiffrer des textes revient d couvrir les images qu ils signifient La vis e des textes est d expliquer les images celle des concepts est de rendre compr hensible les repr sentations Par cons quent les textes sont des m tacodes d images 7 C est sans doute l approche la plus explicite de ce conflit interne l humanit et qui a au si cle pris les accents tragiques que l on sait Dans l histoire de l art proprement dite il est n cessaire de remonter jusqu aux avant gardes et Dada en particulier pour voir se manifester cette d chirure La puissance qui vient rompre cet accord suppos ind fectible entre les vidences du visible et les explications de la l gitimit de ce vi
53. ame perceptive de ce qui va guider le cort ges de sensations dans l abstraction de l espace Maurice Merleau Ponty la d finit comme une seule vision mille regards coexistence autant que convergence de tous les points de vue possibles sur un objet D s 1967 Richard Serra r unit tous les gestes constitutifs de fabrication d une sculpture sous la forme d une liste de 100 verbe tourn s l infinitif Verb List 1967 68 Il r alise galement des films de courte dur e dans lesquels une action est isol e et r p t e tel Hand Tields 1968 Semblables un v ritable lexique de sculpture o le volume est index la mesure de cette trame perceptive ces uvres ne peuvent qu inciter la dispersion de ici maintenant du corps dans la permanence d un lien d une suture inali nable un monde pr objectif A l clairage de la ph nom nologie le pr sent peut pr tendre fixer notre 17 l espace r el se franchit l aune du champ d action en suspens de notre corps Cr er les conditions n cessaires l dification d une boite noire c est proposer un chantillon de l espace toucher du doigt une coexistence que l exp rience v cue de la dur e emporte toujours dans un m me sillon La bo te noire est un lieu talon elle scelle permanence d un lien o s origine l espace 8 la br che ouverte le temps Mais il un param tre que nous n avions pas pris en consid ration jusqu pr s
54. anges r citations ou chants d origine inconnue ou encore conf rences conduisent tout droit au chaos L ensemble gravite autour de la notion de catastrophe humour en contradiction flagrante avec les journaux autobiographiques plut t graves actuellement en circulation celui de Nan Goldin par exemple Dans frigo 1996 proposition photographique le renversement burlesque est vident puisque L se trouve couch e sur le meuble en question en robe de chambre carreaux et la t te en bas Boris Achour Fran ais n en 1966 se photographie dans des circonstances saugrenues Entre 1993 et 1997 il r alise dans la ville ce qu il nomme des Actions peu gt il s agit d infimes interventions bricol es partir d l ments trouv s sur place Ridicules et d risoires ces installations quasiment invisibles demeurent comme traces film es et photographi es D pourvus de sens ces signes perdus dans le paysage confinent l irrationnel quoi bon Ainsi les uvres de la s rie Sommes 1999 ont elles t r alis es dans une cit pavillonnaire am ricaine L artiste semble assoupi debout la t te reposant sur une haie bien taill e entourant un jardinet Les principes r gissant cette d marche sont ceux du cin ma chacune de ces images de siestes nigmatiques peut tre lue comme le moment arr t d un film ou son affiche incompr hensible Parcourant l histoire du m dium nous
55. arit s et des formes universelles Le Monde 26 mai 2005 21 D un c t Translation r unit des artistes dont le travail se fonde sur une r sistance l uniformisation en traduisant dans un langage contemporain leur particularismes culturels leurs singularit s sociales leur origine g ographiques et de l autre cette exposition confronte des uvres de nouveaux paysages visuels compos es de signes des indices et des symboles de M M Paris texte de pr sentation du catalogue de Translation un transport visuel op r et articul par M M Paris avec la collection Dakis Joannou commissaires d exposition Nicolas Bourriaud J r me Sans Marc Sanchez 23 juin 18septembre 2005 Paris d du Palais de Tokyo 2005 131 Anne Cauquelin Petit trait d art contemporain Paris d du Seuil 1996 41 Gregory Bateson Vers une cologie de l esprit tome I trad Ferial Drosso Laurencine Lot Eug ne Simion Paris d du Seuil coll Points 1977 p 67 51 lt l criture est une fonction elle est le rapport entre la cr ation et la soci t elle est le langage litt raire transform par sa destination sociale elle est la forme saisie de l intention humaine et li e ainsi au grandes crises de l Histoire gt Roland Barthes Le degr z ro de l criture Paris d du Seuil coll Points essais 1972 p 18 61 La position de l objet qui n est pas donn e dans l animalit l est dans l emploi humain
56. assage car ce qui en g n ral en dehors de l app t du gain incite traduire un texte c est le d sir d introduire dans sa culture et sa langue maternelle des uvres qui ont absolument d quivalent d importer des montagnes dans les plaines de la culture existante Les traducteurs par choix sont des souris qui tra nent des montagnes a change des montagnes qui accouchent de souris on oublie trop souvent que dans l histoire des cultures le r le de ce genre de passeurs que sont les traducteurs est essentiel et qu ils font beaucoup plus que de proposer des quivalents d uvres trang res ils imposent des pens es et des mani res de penser comme de jouer avec le langage avec lesquelles avant eux on ne comptait pas puisqu on ne savait pas qu elles existaient et qui vont constituer de nouvelles r f rences les traductions de grandes uvres modifient les chelles de valeurs am nent consid rer les valeurs tenues jusqu alors pour absolues et sup rieures comme relatives et inf rieures en m me temps qu elles font subir leur langue une sorte d examen de passage pour voir si elle est capable d accueillir des choses si sublimes 4 De m me le mot passage ne d signe pas l activit des passeurs que sont aussi quelque sorte les organisateurs qui prennent l initiative d introduire dans une culture qui n est pas n cessairement celle dans laquelle ils ont baign des uvres qui ont absolument pas no
57. c l art lui m me et ses diff rentes institutions avec sa possibilit m me et qu on pourrait dire post moderne parce qu il joue de son simulacre ou de son extinction Pour N Heinich ce serait cette fois le paradigme de l art contemporain art qui jouerait abusivement de ses fronti res Elle crit Apr s les codes de la repr sentation classique puis de la figuration elle m me ce sont les fronti res de l art en tant que tel qui vont tre syst matiquement mises l preuve partir de la seconde guerre mondiale fronti res dont l art contemporain contribuera ce faisant r v ler les composantes 21 Nous pr f rons pour notre part ne pas dissocier cette volution certes aggravante et de nature seconde de l exp rience qui lui est sous jacente et ant rieure Il s agit de la naissance dans l art du 20 si cle autour du premier conflit mondial d un art qui porte d j en lui ses cons quences post modernes Il s agit d un art que je nommerai de l extr me contemporain tranger aux questions la repr sentation et du beau ainsi qu celle de l uvre Il est tourn cette fois en rupture farouche avec la r alit commune vers le seul r el au bord de l innommable de la chose d figur e et d figurante Il proc de du constat objectif de la d ficience d un monde pr tendument constitu et de toutes ses instances institu es Il faut ici se souvenir ce propos des mots du po te Antonin Artaud
58. c qu une transgression Par d finition est une transgression tout acte qui litt ralement conduit passer de l autre c t d passer ou enfreindre quelque limite que l on n eut pas d franchir Transgresser c est tymologiquement dans la langue fran aise du 16 si cle franchir une borne c est dire aussi violer une loi ou commettre une faute un p ch au sens th ologique ce sens il pas de transgression possible en l absence de quelque loi r gle interdit que le coupable de transgression peut pas ne pas ignorer m me si initialement il n en avait pas connaissance L acte de transgression la fois nie la loi et en confirme l existence Il ne supprime pas qui est transgress mais bien au contraire en rappelle la pr sence en signifie fortement l existence M Foucault crit La transgression porte la limite jusqu la limite de son tre elle la conduit s veiller sur sa disparition imminente se retrouver dans qu elle exclut prouver sa v rit positive dans le mouvement de sa perte 6 De sorte que toute transgression n est pas l abolition de la limite qu elle s efforce de franchir mais au contraire sa r affirmation sa reconduite au risque de sa disparition Il aurait pas de transgression s il avait cette confirmation de qui t transgress par le geste m me de la transgression En ce sens il pas de transgression d finitive da
59. ceptives autant que s ing nient falsifier les codes relatifs aux enjeux politiques ou conomiques d nonc s L artiste actuel renverse l ordre visuel afin de proposer toute une batterie d alternatives aux modes dominants Dans un encha nement quasiment sans fin des substitutions o une information est remplac e par une autre il transpose d place agrandit focalise destitue et remplace instaurant une uvre singuli re dans laquelle l lasticit et la plasticit des formes se font l bauche d un nouvel espace Bref il s efforce d influer sur l opinion comme d une 3 que d placerait au gr d un flux m diatique 1 vers un autre mode de transgression la bo te noire Devons nous reconna tre dans cette figure l de l artiste le lieu possible d une transgression d une transgression banalis e proc dant des tactiques de r sistance quotidien qui se font et se d font au fur et mesure de la conjoncture sociale et conomique Si la cr ation a su renouveler ses modalit s critiques au fil de chaque poque il faudrait pouvoir regarder au del de cette mise plat de la transgression vers une forme de transgression qui lui serait plus radicale Alors nous nous surprenons imaginer une uvre qui se r f re plus l actualit du monde mais tente d y trouver ancrage non pas comme un mot viendrait remplacer un autre mais en se greffant nouveau sur la chose s
60. cinder l espace et le temps n est ce pas une d fense naturelle face un v nement traumatique L les fragments du corps en proie la folie explosent dans un bouquet de temporalit s diff rentes La ruse consiste alors les maintenir s par s s accommoder de cette ambivalence Il nous faudrait alors reconna tre la figure du schizophr ne comme le h ros d une transgression actuelle Mais ceci rien de nouveau Et cette tradition nous le rappelle Georges Bloess 20 remonte loin dans l art allemand du d but du si cle En derni re conclusion je voudrais tablir un parall le avec un ouvrage de Marina Griznic r cemment traduit en fran ais Celui ci pr sente diff rentes strat gies de r sistances artistiques que l auteur regroupe dans le contexte du post socialisme sous le nom de r tro avant garde Pour elle Le sujet est la fois le trou ontologique la faille qui fonde la subjectivit dans son absolue contradiction d une part et d autre part la rupture des connexions entre sujet et r alit 21 ce v u commun il nous faut en d duire que le danger n est pas celui de l homog n isation de la culture l chelle mondiale mais qu il s agit d un risque encouru par le sujet lui m me d une transgression qui se vive en chacun car c est peut tre le plus vieil enjeu de la cr ation moderne Daphn Le Sergent 11 Philippe Dagen Africa Remix des singul
61. constatons que le rire photographique l accompagne tout du long Toujours inscrit en filigrane aux marges se trouve du c t de la transgression du bon usage photographique gt du moment Il permet en creux mettre en lumi re les capacit s singuli res du m dium Ne permet il pas galement d en crire une histoire plus secr te Je fais de la photographie parce que j ai perdu mes pinceaux Bernhard 191 Florence Borel mars 2006 1 Nouveau Littr Paris Garnier 2004 21 Du 18 janvier au 27 mars 2006 31 R gis DURAND Le Regard pensif Lieux et objets de la photographie Paris La Diff rence 1988 p 216 41 Cl ment CHEROUX Les r cr ations photographiques un r pertoire de formes pour les avant gardes Etudes photographiques n 5 novembre 1998 p 73 97 51 exemple de Charles CHAPLOT La Photographie r cr ative et fantaisiste Paris Charles Mendel 1904 61 L on Gimpel 1878 1948 grand utilisateur de miroirs d formants est le seul figurer dans les histoires de la photographie en tant que photographe professionnel reporter inventeur 71 Cl ment CHEROUX op cit p 91 81 L ouvrage le plus c l bre de Hegel s intitule La Ph nom nologie de l esprit 91 Christine MACEL Bernhard et Anna Blume l hyst rie de la normalit Beaux Arts n sp cial Qu est ce que la photographie aujourd hui d cembre 2002 82 10 K chenkoller 11
62. dans laquelle les deux anges traversent le mur est encore dans les m moires Deux ans avant la chute du mur une poque o personne n imaginait que cette fronti re artificielle pouvait apr s vingt huit ans de pr sence dispara tre aussi vite qu elle tait apparue Wenders raconte une histoire dans laquelle les souvenirs le les repr sentations et les visions sont r unis dans une parabole qui s int gre dans tradition litt raire du roman initiatique Les courts textes de Peter Handke ont en quelques sortes inspir Wenders au moment de la conception du film et semblent s y refl ter L crivain et le r alisateur se retrouvent dans le r le du narrateur Chaque narration rev t a priori quelque chose d apaisant et procure une sensation de s curit dit un jour Wim Wenders ne voulais pas transmettre quoi ce soit d autre au public Le spectateur seul arbitre de ses d cisions doit apprendre et comprendre qu il ne tient qu lui sa volont et ses possibilit s d agir sur les choses de fa on les faire changer C est selon moi la moralit inh rente la cr ation d un film Elle rend sensible possibilit de changer le monde 5 Les ailes du d sir est un r cit de ce type un conte pour adultes qui jusqu aujourd hui rien perdu sa po sie justement parce que le monde qui y est d crit change du tout au tout en l espace de quelques ann es Les lieux principaux de l action sont ent
63. de choses indistinctes substituables Car cette industrie pu abolir la sp cificit de l uvre d art et son thique d rob e sa valeur singuli re jamais mercantile dont elle tient son sens La g n ralisation du march des biens culturels abolit les param tres du go t de l interpr tation les rituels de la r ception et d truit l ind pendance l art Elle le fait au b n fice d une jouissance sans id es et d une diffusion sans bornes de produits conventionnels et mal form s certes divertissants voire agr ables mais difiants de banale conformit et de soumission aux objets Cette seconde transgression agit sur les normes la production d objets d art pour chapper la dilution dans la m diocrit et la nullit au risque de la simuler sur ses bords de se d liter dans le quelconque Or quelles sont les tranges cons quences de tout cela Du fait d un abus des possibles formels et pratiques d un art de transgression d un art de la transgression pour une part l art est devenu au bord de son puisement essentiellement son tour ironique et cynique caricatural et simulateur voire de m me nature morale que les agents de l industrie culturelle On conna t chez ces agents la posture nihiliste et l indiff rence singularit des uvres et des personnes qui sont les leurs Ce faisant l art a paradoxalement perdu son caract re transgressif par une inversion dialectique Le recours la trans
64. de protection et de communion qui peut tre acquise son contact dans certaines circonstances ritualis es L interdit de la sc ne sacrale se double donc de quelque rituel sacrificiel le faste d une transgression autoris e permettant la r g n ration Il donc deux formes de sacralit une de respect et une seconde de transgression Revenons notre perspective historis e Si reprend le sch ma historique h g lien bien connu l art aurait travers trois phases dialectiquement reli es 16 Il serait all de la prolif ration formelle archa que et sublime l art classique antique quilibre de la forme et du sensible suivie de l mergence de l art romantique ou chr tien marqu par l affirmation du drame subjectif individuel du salut et dress contre l quilibre trop abstrait des formes Autrement dit se seraient succ d s un art sacr profane premier un quilibre harmonieux et r gl du profane et du sacr second suivis d un refus de la forme sacralis e au nom du salut individuel profane Ou encore les arts travers un processus historique auraient t le r gne d un divin naturel sublime puis l opposition quilibr e divin et de l humain suivie du d sir humain d acc der au divin dans le monde v cu L int r t d un tel sch ma c est qu il nous montre que l opposition du sacr et du profane dans l art conduit n cessairement la transgression de leur opposition de leur distinction
65. de son ventuel pouvoir de v rit quant l art Je n endosserai pas non plus la posture d une position conservatrice voire r actionnaire ce cas il s agirait d adopter une attitude d nonciatrice du contemporain des modes au b n fice de l ancien ce qui avait pr tendument avant force et noblesse rigueur et puissance forme et coh rence et que le go t aurait du conserver comme norme de l actuel On le sait c est aujourd hui cette place pour le grand public europ en que se trouvent plac s la peinture Impressionniste et quelques Fauves Ils repr sentent ce qui devrait encore faire norme cela dans un oubli presque total du scandale qu avaient repr sent pour le go t de leurs contemporains ces coles de peinture Enfin je n entrerai pas non plus dans la querelle portant sur la validit ou non de l art contemporain Elle suppose qu il y ait quelque chose que l on puisse caract riser en toute homog n it comme un art contemporain et pas une diversit de gestes d actes de productions d uvres ou de non uvres tous contemporains chronologiquement mais tout aussi entre eux divers et h t roclites Pour part je soutiendrai plut t que s il y toujours aujourd hui de l art et des artistes en activit ainsi que des disciplines artistiques distinctes et c est l sans doute presque une vidence il ny a pas pour nous un art contemporain unique qui serait identifiable en sa g n ralit
66. de th tre Sculpteur peintre photographe ou sp cialiste de la performance l artiste autoproclam est un com dien qui cache son n ant derri re la monstration obsessive de son propre corps par un jeu de sc ne qui se substitue toute uvre autonome promettant la fin et le d cisif sacrifice de lui m me afin de provoquer motion ou horreur Le vide sur lequel on s appuie n est seulement justifiable qu en fonction deux pr misses possibles 1 l art au sens classique dispara t l apparence est captur e par le concept l histoire de l art devient une subdivision de l histoire de la philosophie Ce que l artiste met en sc ne n est que le pr texte pour une fine distillation de certaines id es philosophiques tr s connues l empirique banalis n est que le d clencheur des nuances th oriques de la tyrannie du discours Etre artiste signifie dans ce contexte parler d art expliquer pourquoi l art traditionnel n est plus possible se livrer une forme sp ciale de critique de la soci t 2 la force de la pr sence inerte de l uvre de l objet issu du travail de l homo faber est remplac e par l accentuation de la subjectivit du cr ateur de sa gestualit vivante processus Cr er n est plus une d marche sens unique n est plus quelque chose ferm rigide orient vers la mati re qui a pour but de laisser des traces esth tiques potentiellement ternelles mais repr sente l uvre orient e ve
67. e des perceptions la recherche d un accord des facult s au sein de la repr sentation du sensible pour parler avec Kant accord qui permet dans le sentiment de la beaut de voir converger l intelligence et la sensibilit 11 Dans un autre registre celui du langage po tique Baudelaire crit L tout n est qu ordre et beaut Luxe calme et volupt gt il l crit au moment m me ou les crises de la modernit font ce qui fut le programme d un certain classicisme d j la forme d une nostalgie 12 Pour l esth tique les productions de l art doivent montrer l ajustement des formes et des perceptions pr senter la traduction mesur e et proportionn e d une nature quilibr e per ue comme telle par la sensibilit du sujet humain Si l esth tique ne pr tend pas au m me titre que les sciences positives l exactitude elle soutient un projet de justesse quant la r alit sensible et au monde per u subjectivement dont elle pr suppose ontologiquement l quilibre le caract re r gl Toute esth tique classique pr suppose que le domaine sensible est susceptible de repr sentation ordonn e par des rapports constants des ordres de mesure des points de r gularit des r f rents exemplaires et des identit s formelles Dans ce cadre est transgression tout jeu toute production qui remet en cause d lib r ment les r gles de et pr tend transposer les normes du go t en les d pla ant en l
68. e en allusions de La ru e vers Goldrausch Les photographies sont toujours en noir et blanc et l il se positionne en fonction du morceau de carrosserie qui perturbe le regard Derri re la perspective de ces photographies documentaires mises en sc ne comme des enregistrements m caniques sans aucune revendication esth tique se cache une subjectivit arbitraire Haberkorn prend le spectateur avec lui sur le si ge passager et conduit son regard sur un monde ali n derri re la vitre Mais les deux photographes ne collectionnent pas seulement des images et des histoires Ils conservent aussi des coupures de journaux qu ils confrontent la r alit restitu e dans les faits et les v nements diffus s par les m dias et aux repr sentations et projections qu ils suscitent Pouvoir d achat et patriotisme Kaufkraft und Heimatgef hl est le titre de ce travail d archivage Les paysages est allemands de Sven Johne montrent des champs et des prairies Ces vestiges du temps des collectivit s agraires dessinent encore le paysage actuel Toutes les photographies comportent dans leur titre la date et le lieu de la prise de vue Depuis les pr s de fin d t aux premiers jours d octobre jusqu aux terres en jach res moissonn es fra chement labour es en novembre nous lisons seulement l alternance des saisons D autre part appara t en continu dans le premier tiers en haut de l image un peu au dessus du nombre d or
69. e existantes Une ann e apr s l ouverture des fronti res il revint Berlin pouss par le d sir de voir l effet qu avait produit la chute du mur sur l histoire de la ville Durant ces deux s jours il ne prit que peu de clich s Treize ans plus tard il se rendit encore Berlin La ville qu il avait cru des ann es durant tre une simple part de son pass le saisit de nouveau Il ne photographia pas plus qu auparavant mais il s impr gna de beaucoup d images qu il restitua une ann e plus tard dans des photographies couleur prises avec un appareil grand cran Quelques unes des photographies r alis es pendant les ann es pr c dentes furent publi es en 2005 dans le catalogue de ses travaux sous le titre La Cicatrice Die Narbe telle une trace du souvenir 1 De petit format et en noir et blanc ils se distinguent des dix huit grands formats couleur montrant les restes du mur En plus des postes d observation bien connus des rues Bernauer Niederkirchner et le Checkpoint Charlie devenus des monuments comm moratifs Patrick Tourneb uf s est mis en qu te de quelques lieux significatifs Friedrichshain Bezirken Rudow Pankow et Niedersch nhausen Sur ses images il pas que le mur voir Il montre plut t l espace de la ville le paysage environnant et les fronti res arbitraires qui les parcourent Ce sont des images paisibles qui laissent de l espace aussi bien ce qui est vu et signification qu a celui
70. e l quation selon laquelle le r el et le visible tendent de telles images nous prouvent en quelque sorte le contraire effet ce sont moins des traces qu elles enregistrent que des mondes qu elles cr ent Le deuxi me champ nous le nommerons champ de l ind cence L ind cence n est pas ce qui s oppose la d cence mais qui s oppose directement l insignifiance Plus exactement il aurait deux sortes d ind cence celle g n r e par la multiplication et la reproduction infinie d images peu pr s toutes semblables et une autre ind cence qui serait la marque de la tentative de certains photographes de se lancer eux sur les chemins de la libert en tout cas de nous montrer que ces chemins existent toujours L ind cence telle que nous la concevons porte en elle des tentatives de r ponse que nous offrent certains photographes pour nous montrer que certains des chemins de libert ne sont pas ferm s C est pourquoi l ind cence qui est finalement partout dans le r el doivent r pondre des images qui chappent aux contraintes implicites du spectaculaire L ind cence spectaculaire est une mani re de faire et de montrer l image Nous voulons lui opposer une ind cence spectrale celle des visions transparentes qui non seulement montre l ind cence de l ind cence mais aussi nous r v le de nouvelles formes de beaut est dans le quotidien dans l outrance
71. e pas un point de vue subjectif sur des processus qu on pourrait consid rer comme objectivement r versibles sous pr texte que ce serait notre manque d information par exemple sur les conditions initiales d un syst me dynamique qui nous les ferait croire irr versibles ils ne le seraient pas en eux m mes mais seulement pour nous Non c est bien plut t pour mettre de l ordre dans les ph nom nes que nous imaginons des conditions id ales d exp rience pour lesquelles les processus seraient r versibles mais ces conditions ne sont jamais remplies par la nature C est donc subjectivement pour nous que les processus nature sont r versibles En eux m mes ils sont bel et bien irr versibles gt 6 L image est bien ce lieu dans lequel la tension entre ces deux conceptions du temps est la plus sensible la fois que chaque image est une sorte d arr t dans le processus temporel et parce que le regard qui appr hende l image est lui prisonnier de la surface qu est l image En effet l image montr e ouvre la voie un regard qui chappe au temps ce qu il peut ind finiment errer sur la surface et ne pas en sortir Le temps de l image est donc la crois e du temps de l information et du temps de la thermodynamique D une certaine mani re l image est fait le lieu o se mat rialise la d chirure qui est au c ur de notre poque d chirure entre les exigences d un ancrage dans le pass comme moyen d
72. e se situer dans une continuit et donc de s orienter dans le temps et les projections dans un temps ouvert un avenir si l on pr f re que l on agit en permanence et cela en fonction du second principe de la thermodynamique car comme il n est pas possible de conna tre les conditions originaires d une situation chaque geste est une forme d agir Agir c est alors ouvrir le temps et non tourner en rond dans la nuit c est actualiser du virtuel et pas pr sentifier de l absence II Vision et cr ation 1 Images et position existentielle Cette d chirure s effectue le long d une ligne irr guli re l o les points tension sont les plus marqu s Dans le champ de l art au XX si cle cette ligne passe proximit des points o le langage et le visible s articulent Il faudrait dire s articulaient car c est pr cis ment cette vidence d un lien entre image et texte qui se voit mise mal Une partie de la production photographique contemporaine est le fruit du travail d artistes qui utilisent photographie comme instrument au moyen duquel ils interrogent ces liens ou plut t accomplissent le geste soit de tenter de restaurer qui se d chire soit de prolonger le travail de d chirure entam en fait par les avant gardes et par Dada en particulier Quel est la raison de cette d chirure entre le sens que v hicule l image et celui que le texte en donne Quelle est si l on pr f re la r
73. egroup s Tourneb uf est un chroniqueur il travaille toujours par s rie certaines d entre elles ne seront jamais termin es Dans l index de son livre il fait s tendre la s rie Berlin jusqu 2037 qui l int resse dans la documentation n est pas la conservation du souvenir mais l action de rendre visible le temps Rendre sensible la possibilit de changer le monde Quand Wim Wenders a commenc la fin des ann es quatre vingt le tournage de Les qui prennent part la vie des hommes D sirant aussi tourner dans la partie Est de la ville encore divis e il sollicita une autorisation aupr s du Minist re du cin ma de la RDA Le fait qu il n avait pas de sc nario irrita d embl e le Ministre et l histoire de ces anges se heurta une totale incompr hension L id e Wenders selon laquelle un ange peut mouvoir naturellement et traverser le mur en toute libert incita le ministre refuser l autorisation de tournage et par l m me nier l existence du mur de Berlin Suite ce refus Wenders fut contraint moyennant des d penses consid rables de b tir une reproduction du mur dans la partie Ouest de la ville 3 Dans la sc ne cl les deux anges Damiel tomb amoureux et souhaitant pour cela devenir homme et Cassiel se rencontrent au pied mur et se racontent l histoire terre et de l humanit des origines nos jours Puis ils se retournent et traversent le mur de part en
74. elles complexes et des rapports atemporels C est en de la reproduction pure et en incluant des l ments narratifs qu elle devient image photographique La r alit de ces photographies r side dans leurs possibilit s fictives et narratives ce qui ne signifie pas n cessairement qu il s agit de photographie narrative Daniela Goeller 1 Patrick Tourneb uf La Cicatrice Berlin Est Ouest 1988 2004 avec un texte de Jean No l Editions du huiti me jour Paris 2005 21 Jeff Wall entretien avec Jean Pierre Krief Contacts Vol 2 Arte La Sept Vid o 2000 DVD 31 Entretien avec Wim Wenders Les Ailes du d sir 1987 Argos Films Arte France D veloppement 2001 DVD 4 Die Angst des Fotografen vor der falschen Bewegung Wim Wenders en entretien avec Heinz Norbert Jocks Kunstforum Bd 175 2005 S 134 5 ibid S 132 133 6 Sven Johne en conversation In Vor aller Augen Kerber Verlag Bielefeld 2005 S 33 71 Arno Griesinger Uns schmerzt der Grund meiner Augen ibid 5 139 Horence 4 Emme Bross Donieck Cl 4 e Le Sergert Jeorlous e a TELET TES Ciprian La revanche du singe Quelques r flexions sur la mort de l art Tout l art moderne est une subdivision d un art du spectacle hypertrophi une vari t trange
75. elles de la sacralit dont l Histoire montr comme vous le savez qu elles d pendaient surtout de la structure des Etats ou des n cessit s de l ordre social Dans une perspective toujours pour l instant singuli re je dirais que pour moi qui fut surtout la figure du sacr ce fut le travail de l art l nergie la pens e l imagination d ploy es dans la r alisation des uvres d art et leur diffusion J ai t effectivement par ma formation personnelle l h ritier et de cette religion profane et subjective que depuis le romantisme europ en on appelle l art et qui fut marqu e par l id al d une production po tique de la v rit ce que Alain Badiou a caract ris comme ge des po tes dont l arche irait de H lderlin jusqu Celan ce sens c est la c l bration profane du sacr plut t la faveur de mon jugement une certaine sacralisation par l art de la chose profane comme c est le cas au th tre On sait qu est profane profanus en langue latine ce qui se tient devant le temple hors de lui ou bien ce que l on a rendu un usage non rituel en le d sacralisant Or d s que l on veut c l brer quelque chose on n est gu re port apparemment faire de la transgression une norme de l action ou de la pens e bien que toute c l bration soit paradoxalement aussi une transgression Je ne ferai donc pas ici une apologie na ve ou partisane de la transgression et
76. endus du m dium elles les d tournent de leur fonction premi re mais de fa on subtile et cultiv e en jouant sur le statut de la photographie reportage portrait presque sur un mode connivence Burlesque d un comique extravagant et d routant Bouffon comique loufoque 13 Anna et Bernhard Blume servant d cid ment lien nous les retrouvons maintenant dans un autre contexte avec une s rie r cente intitul e Tentative d hommage 2004 14 Ils figurent en effet aux c t s de jeunes artistes dans deux expositions organis es sur le th me De l idiotie aux burlesques contemporains 15 Un courant de r flexion se dessine autour ces notions Pr sentons les elles mod lent la derni re partie de cette courte tude sur le rire photographique Le critique Jean Yves Jouannais dans son essai L Idiotie Art vie politique m thode 16 souligne le rapport troit existant entre modernit et idiotie gt Pour expliquer la nature il rappelle l tymologie de ce mot citant le philosophe Cl ment Rosset Idi t s idiot signifie simple particulier unique 17 L idiotie caract rise l art actuel dans la mesure o la strat gie du nouveau et la qu te d originalit de chaque d marche artistique s affirment d sormais avec force L idiotie participe de cette tradition de la rupture Cela confirme l impression parfois d uvres et de postures si singuli res q
77. ent et qui est inh rent la question du medium de l enregistrement de l action gr ce la cam ra Par elle le corps reste attach au regard du public tout au long de l effort M me si tout se d roule dans l intimit de l atelier le choix en faveur d un enregistrement est indissociable de la promesse de sa diffusion Nous n avons plus affaire un mouvement progression d un corps dans un espace donn mais une motion agitation coordonn e des membres autour d un axe comme le sont les doigts tapant sur le clavier d ordinateur ou la giration infinie des ensembles cin tiques de Tinguely Le corps devient rythme et le fiim se saccade au gr de sa concentration sur un seul geste Et son signal jamais identique agit soit dans l essoufflement d une fr quence soit dans la mont e d une intensit Il n y a pour ainsi dire d but ni fin Quand la fen tre de la bo te noire se referme cela ne trahit pas l aboutissement d un effort l treinte d une action mais signifie parfois tout simplement la fin de la bobine film Certaines actions de Vito Acconci tourn es la cam ra super 8 ne durent que trois minutes le temps d une bobine On dirait que les forces productrices du corps sont devenues totalement adh sives au champ de la cam ra Le ralenti extr me avec lequel Bruce Nauman marche le long d un carr dessin au sol pourrait tout aussi bien tre regard comme l effet d un ralenti Bill Viola quant
78. es d formant en les r cusant ou en cherchant les d truire Mais c est l pr cis ment d signer les conditions d un autre cadre pour l esth tique d un autre paradigme qui est celui de l art contemporain post moderne Il est le contraire ou le renversement du pr c dent Entre cette esth tique de la transgression voulue actuelle et celle de la conformation presque obligatoire de la sensibilit l id al formel ancienne donc entre l art contemporain et le classicisme il aura eu l art moderne comme site historique de la crise des formes 2 Des figures historiques de la transgression dans l art et la culture Reprenons la question autrement sans pr juger d une th orie esth tique d j constitu e Tra ons en premier lieu un arc historique qui prendrait sa source dans l art de la Renaissance et viendrait se prolonger jusqu nous dans les sables et les remous les fractures de la post modernit Le mod le antique de l art classique auquel la Renaissance europ enne va se r f rer en le r interpr tant avait cart de l expression artistique la d mesure et le sublime puissance chaotique et le tumulte la disproportion et l irr gularit comme des maux viter parce qu ils interdisent de distinguer le domaine humain de celui du divin L art ne pouvait que se tourner en s en d tournant de que le po te H lderlin d signera l or e du 198 si cle comme le monstrueux et que l o
79. es photographies n en renseigne pas moins sur les r alit s politiques du pays o l on vit L histoire individuelle faisant alors cho l histoire nationale Int rieur roumain Paris banlieue 2005 Beatrice Minda programme partenaires p LT Cosmin Bumbut St Xcrier 5 Bectrice Mindo Dens Prot or S lection Hommogne Corter Hresson GP SITIONS Aa e a TELET TES Denis Prot or Denis Prot or vit et travaille Paris Chimiste de formation il commence ses travaux dans le domaine artistique vers 1989 et ne commence les divulguer qu en 2000 Se d finissant moins comme un photographe que comme un investigateur les m diums artistiques ne sont pas pour lui des techniques mais des effluves de l esprit qui se sont solidifi es pour des organes imparfaits dont le devoir est de se rapprocher de la gr ce m me si pour ce faire il faut en passer par des le ons d pouvante Son ambition quant la diffusion de son travail est d apporter des l ments nouveaux qui provoquent des failles et des incertitudes En 2001 il publie son premier livre Parts pour Chaudron aux ditions Marval Son travail a fait l objet d une exposition en 2005 au Centre de la Photographie de Gen ve N dans un avion et form comme un chimiste qui ne croit pas une chimie externe la volont et l
80. esser quelque chose il faut admettre de facto qu il d abord des r gles des conventions ou des lois et s y refuser les refuser bien se trouver plac au sein d un conflit entre des r gles discordantes et contradictoires et devoir choisir les plus minoritaires contre celles qui sont dominantes au risque de sa tranquillit Transgresser ne se peut sans une relation intime ce avec quoi va rompre que va interrompre ou d faire La transgression n est pas n gative ni dialectique Elle ne nie pas qu il ait de l ordre mais elle ne le reconna t pas non plus elle s en s pare et s oppose lui en proc dant de la loi m me de cet ordre La transgression ne se pose pas en alternative fondatrice d un ordre diff rent de celui qu elle transgresse afin de le supplanter M Foucault crit Rien n est n gatif dans la transgression Elle affirme l tre limit elle affirme cet illimit dans lequel elle bondit pour la premi re fois l existence 9 Une transgression est un franchissement qui expose illimitation mais pas l acte volontaire et n gateur du renversement d un ordre une n gation visant la suppression de la limite qu elle outrepasse L illicite de la perversion n est pas l exposition l illimit et ses p rils mais la r p tition de la norme des fins de plaisir et de cruaut On ne peut donc pas les confondre Par d finition la philosophie est sou
81. eur La sanction de l acte est un m canisme qui d coule de l ordre sacr des choses son automaticit implique qu il ait nul profit le commettre Transgresser ce sens c est s exposer la vengeance des dieux et punition funeste ou une r demption Au contraire la perversion un calcul d impunit qui n est pas celui de l immunit La perversit ne croit que fort peu l ordre qu elle transgresse a son caract re s par elle croit seulement que celui ci est au service de sa jouissance propre et qu il aura pas de cons quences f cheuses ses actes Elle ne se pr tend pas vicieuse elle se pr sente toujours comme orthodoxe et conventionnelle ne pr tend pas au scandale mais la discr tion et au silence Elle se pr tend l abri l ordre et n est pas en ce sens transgressive ne visant nul renversement de la sacralit ou de la loi car elle officie dans son ombre l encontre de ses victimes Elle ne croit pas la limite parce qu elle ne distingue pas la loi de son d tournement et octroie la profanation une valeur identique au respect du sacr l illicite le statut de la loi Elle subvertit la loi sans pr tendre la renverser et s affirme pr tendument conforme elle Ce n est pas le cas de la transgression Comme la profanation la transgression menace ouvertement l ordre des choses l ordre social et le consentement sa dimension religieuse Pour transgr
82. euve ce corps f minis dans les gestes les plus anodins ou bien encore Adaptation Studies amp Mouth 1970 qui met l preuve les r flexes de l organisme pas vomir quand sa main vient toucher le fond du gosier Dans cette m me p riode Bill Viola entame toute une s rie de gestes r p t s et fim s d bouchant sur des vid os qu il qualifie structurales il crie Tapel 1972 il se colle la vitre In Version 1973 il court Composition D il renifle Olfaction il hurle The Space between the Teeth 1976 Quant Christian Boltanski il semble exalter un rire grin ant dans la torpeur du spectacle L homme qui tousse 1969 verse dans le cynisme tant le rythme de cette toux est suffoquant mais la rougeur carlate du sang sur la poitrine du personnage d ment la v racit d un tel drame 5 l ici maintenant Pour ces artistes la bo te noire s impose eux d s le d but de leurs carri res artistiques comme si encore l gers de leurs probl matiques futures ils marquaient par cette isolation du geste leur simple volont de s inscrire dans le monde Et ce d sir se fixe dans l attention qu ils portent l irruption de leurs corps dans le moment pr sent dans l urgence d un ici maintenant Ici maintenant les bras et les jambes de Bruce Nauman s toilent dans le feu d une dur e d composant ainsi l action aux yeux de tous joignant l effort la promesse d un parta
83. faire exister des proc d s des techniques de r alisation prouver un certain savoir faire permettre certains actes et emp cher d autres L abolition de la limite ouvre ici un art presque sans uvre et sans m tier un art sans tabous ni formels ni pratiques qui serait tout de m me encore un art un art de l art Un art ou l uvre serait paradoxalement la fabrication efficace et effective d un non objet et l acte de production de l uvre une action r elle sans v ritable r alisation d objet Deuxi me cas transgresser c est contempler le quelconque l insipide ou l abject la laideur et la b tise et s en servir pour produire des uvres qui les exhibent et s en d prennent Les crit res d aboutissement des uvres ne seraient plus ici qu elles soient dot es de qualit s formelles identifiables ni la preuve d un respect de l uvre d art comme produit fini sp cifique qualitativement distinct d autres objets L insipide ou le quelconque seraient d sormais les mat riaux de l art qu il soit fait d impressions sensorielles d affects d l ments concrets pr lev s dans la r alit images sons objets fragments d bris crits dessins r cits etc L art s affirme ici comme l expression d une transgression renouvel e de l ordre culturel 1 appara t comme en rupture avec les valeurs de l industrie culturelle cette production massive de marchandises d art et de biens culturels prolif ration confuse
84. fl ter les possibilit s ou les caract ristiques de cette technologie Ou autrement dit est ce que la relation entre l uvre d art et la technologie avec laquelle celle l t produite doit tre visible invisible tout simplement ignor e Cette relation peut elle tre vraiment ignor e Dans quelle mesure la facilit avec laquelle les images se produisent se modifient et se transmettent aujourd hui influence t elle la cr ation des artistes qui utilisent la technique photographique Y a t il une relation entre la technologie de la production de l image et le bon ou mauvais go t Est ce qu on peut dire que plus la technologie est avanc e et plus une image visuelle peut tre produite plus facilement plus compte la culture visuelle et le go t de celui qui la produit Si au p le plus se trouvait limprobabilit absolue l art et au p le moins se trouvait la redondance absolue le kitch quel serait le r le du temps dans cette transformation du big bang assourdissant du d but jusqu au murmure de plus en plus imperceptible qui annonce la fin Quel est le processus par lequel une certaine formule visuelle se transforme ou cause r p tition dans le temps Est ce qu on peut parler de formules visuelles assorties des moments assortis qui une fois que le temps passe si elles ne sont pas r valu es deviennent inad quates Pourquoi si nous essayons de chercher avec Google ou n
85. ge Car dans la rigidit feinte de la statuaire dans l quilibre tendu d une pose l artiste s applique communiquer une tension l arc tendu de son corps d cochant aux yeux de tous la fl che de son tat De m me que les performances de nombreux films portaient sur la danse sur des exercices ou sur des mouvements r p titifs Vous avez une action qui se r p te mais en m me temps sur une p riode de temps assez longue vous avez des erreurs tout du moins leur ventualit des changements la fatigue vous gagne Toutes sortes d v nements peuvent se produire ce qui cr e une tension que vous pouvez exploiter partir du moment o vous comprenez comment tous ces l ments fonctionnent 12 En revanche Vito Acconci monte sur la sc ne de l immanent par le biais l criture Ses recherches dans le domaine du langage l incitent ne plus utiliser de mots dont les r f rents le catapulterait hors du confinement de la page plus de d notation rien que de l imm diat conf r par de multiples adverbes et propositions de temps et de lieu Cet espace difi dans une aspiration au concret ne peut alors prendre v ritablement corps que dans l espace r el et l entra ne dans l exploration de la r p tition de l instant v cu Vito Acconci Initialement je ne me situais pas dans le domaine des arts visuels mais de l criture Jusqu en 1968 69 mon uvre s inscrivait dans le cadre de l criture de l
86. ge Les op rateurs exploitent galement les classiques ratages photographiques comme les d formations ou encore les expositions multiples favorisant l apparition de spectres Ces activit s sont pr sent es comme un passe temps amusant Le tout se d roule dans une ambiance bon enfant plus proche de la plaisanterie que d une r flexion sur le m dium Ces amateurs prennent plaisir d tourner visuellement la bonne photographie au sens traditionnel Comme le montre Cl ment Ch roux leurs inventions plastiques seront reprises et d ploy es par les avant gardes les surr alistes Man Ray en t te mais aussi L szlo Moholy Nagy Alexandre Rodtchenko ou encore El Lissizky Ici la port e est bien autre puisque la d formation s affirme dans les ann es 1920 1940 comme une forme essentielle de la modernit Car l o les r cr ations transgressaient simplement les codes du portrait classique les avant gardes contreviennent d sormais aux r gles de la photographie classique c est dire professionnelle 7 Chez ces groupes d artistes dada stes et surr alistes en particulier l humour et le jeu fonctionnent comme moteur Qu en est il notre poque Les photographes contemporains voqu s par les lignes suivantes ne constituent pas une cole du comique ils s inscrivent parfois dans un courant comme William Wegman ou Martin Parr Ces personnalit s singuli res sont parfaitement int gr es au circuit de
87. ge aurait du tre ce pont entre science et imagination et entre les hommes or elle ne l est pas devenu prisonni re qu elle est rest e r p tition pi g e qu elle est au bord du r el ce qui la contraint osciller sans fin au bord de l insignifiance Pour poursuivre cette interrogation sur les relations entre images techniques et images visionnaires sur ces zones grises ces mondes interm diaires ces apparences masqu es par d autres apparences que seuls l il et l esprit de chercheurs de libert savent nous faire appr hender nous voyons se dessiner trois champs d investigation Ils correspondent aux domaines dans lesquels la lutte pour chapper l insignifiance est pour nous la plus pre Le premier champ nous le nommerons champ de l incertitude Il est celui des images scientifiques ou li es la science Peu d artistes utilisent des moyens techniques dont la science peut disposer Peu d artistes s int ressent ces images qui pourtant d terminent notre avenir dans la mesure o par elles s crit la nouvelle image du monde de l infiniment grand l infiniment petit L homme ici pas de place privil gi e et ce qui est inclus dans de telles recherches c est la possibilit de son effacement de sa disparition S il faut donner ces images un nom g n rique nous les appellerons images quantiques effet bien que nous acceptions l id e que la photographie enregistre le visible ainsi qu
88. ges des camps d extermination nazis images dont vous savez le pouvoir de sid ration Des images absolument absentes et tout autant sur pr sentes la m moire Fin de la digression Voici un second commencement Je voudrais faire d buter mon propos en vous confiant cette fois la fable d un aveu Celui ci Personnellement je n prouve de go t particulier ni d attirance pour ce que le sens commun entend aujourd hui par le terme de transgression c est dire la facilit convenue d enfreindre un interdit Pour part ne crois pas devoir valoriser la transgression ni dans les uvres ni dans les actes et pas non plus dans l ordre du jugement comme ayant la valeur d une norme Et si par d finition on donne au mot de transgression sa signification ancienne acquise au treizi me si cle dans la langue fran aise celle d une violation de la loi divine je suis plut t rest rebours de l actuel une sorte d adepte intempestif et d mod du respect d la chose sacr e et la sacralit qui l entoure un opposant la croyance en la facilit de pouvoir ou devoir contracter quelque souillure Autrement dit dans un registre de langage qui est celui du grec antique je ne me crois pas devoir tre h ro que H ros vient du grec hieros qui signifie sacr sacer en latin Or comme vous le savez ce mot a une signification ambivalente Le sacr est la fois ce qui d signe le surhumain le surnaturel comme
89. gression g n ralis e par un art d j trop profane aurait supprim la transgression une profanation du profane dont en litt rature M Houellebecq est l une des figures embl matique tardive attitr e cette figure r pond exactement l inverse celle de ce simulacre kitsch restaurateur du sacr dont vous savez l actuel succ s mondial au cin ma et dans la litt rature En ce sens la transgression revendiqu e aurait cess d tre d actualit et c est pourquoi contemporain voluerait maintenant vers d autres orientations En voici quelques unes succinctement pr sent es La premi re est celle d une fid lit d cal e l art pr c dent travers son imitation partielle ou sa reconduite en citation de fa on un peu formelle et ironique mais v ritable Quelques exemples pour la France J Echenoz et J P Toussaint P Sollers en litt rature de style moderne Quignard en style classique ou Goldring en peinture Je n oclassique Elle comporte la r actualisation de proc d s de composition et de figuration de l art pass proc d s ant rieurs l art moderne l origine de son mergence Ils apparaissent m l s troitement des proc d s techniques modernes Par exemple en peinture le recours la photographie Cette orientation n est nullement celle d un art acad mique il ne faut pas les confondre L acad misme d aujourd hui rel ve de l imitation plate e
90. hui op cit 19 Horence Borel Brossct Donik Gocfer Dophn Le 5ergert Jeorlous Aa e a TELET TES conf rences Calin Stegerean Bo te noire la violence d une r lit Une exp rience personnelle sunt leones partir d ici sont les lions telle tait l inscription qui marquait sur les cartes anciennes la fin du monde connu Il s agissait d un monde non seulement inconnu mais qui pouvait tre ignor Regard e de l ouest la Roumanie s est trouv e pendant des d cennies sous la grisaille noire du communisme dans une sorte de bo te issue des accords de Yalta Tout comme la bo te noire imagin e par Gregory Bateson pour la plupart des gens la r gion tait compliqu e impr cise une r gion o il valait mieux ne pas s aventurer Ces chos persistent encore de nos jours Un ami Italien me demande chaque ann e des d tails sur la garantie de la s curit des personnes et des biens dans mon pays pour qu il se d cide me rendre une visite visite toujours repouss e Je le comprends J ai v cu 29 ans dans ce pays comme dans une bo te noire Une personne qui a suivi une formation artistique peut certainement distinguer plusieurs nuances de noir Le noir de cette poque tait l un des plus intenses Les lignes qui suivent sont crites pour ceux qui ont connu Ceausescu seuleme
91. ich hors de son registre habituel somme une transgression d un usage classique Cet cart prend tout son sens pour ses auteurs Selon la formule de R gis Durand l artiste persiste dans voie car il lui semble possible d y recueillir quelques images et quelques pens es auxquelles ne m ne aucun autre chemin 3 O ce rire photographique peut il conduire Un bref regard en arri re apporte de pr cieux l ments Cl ment Ch roux consacre un article riche en pr cisions historiques et esth tiques un pisode peu connu de l histoire de la photographie 4 Au tournant des XIX ME et si cles les Hydropathes Incoh rents et autres Zutistes parmi eux Alphonse Allais se livrent sans r serve la pratique du canular litt raire dans un registre proche des praticiens amateurs inaugurent au m me moment les r cr ations photographiques Ils cherchent avant tout se distraire en tirant parti d effets cocasses vari s rendus possibles par la technique Tout un vocabulaire se constitue relay par des publications sp cialis es 5 La caricature est r solument privil gi e collage d une grosse t te sur un petit corps d formation du mod le par un jeu de perspective cadrage contre plong e encore emploi de miroirs d formants 6 Les codes du portrait classique sont enfreints ce qui divertit beaucoup un nombreux public Ces jeux s effectuent la prise de vue mais aussi au tira
92. idique les instances judiciaires et politiques ne cessent d intervenir pour d limiter l usage des images et en proscrire certaines confondant la repr sentation et les actes Il nous est devenu difficile de dire ce qu est une transgression dans l ordre repr sentation et ce qu elle serait dans l art L hypoth se d une visualit int grale monde est devenue notre r alit apparente toute fronti re ayant t presque abolie entre le d rob et le d voil entre le cach et le visible selon la loi d un pouvoir tout montrer qui s est substitu la sacralit Il se tient d ailleurs la m me place qu elle celle medium Car la mise en crise de la repr sentation par l art moderne corr lative de la perte pour les uvres de leur aura n a nullement emp ch la g n ralisation sur le plan social d une exp rience de la r alit fond e sur les techniques visuelles de repr sentation et de reproduction Nous sommes plus que jamais l re d sign e W Benjamin comme celle de la reproductibilit technique m me si celle ci est maintenant pass e de l impression et du photogramme aux formes du virtuel gr ce l informatique 26 Elle cro t m me de fa on exponentielle en franchissant les limites les plus inou es des corps et des mati res des distances et des proportions des supports et des perceptions Rien n chappe plus l intercession de l image et certains donnent voir leur existence pri
93. ieu quelque transgression des interdits du regard des interdits l gaux un passage de c t c t de la repr sentation et de la mutualit par une transposition Ce passage se situe dans le regard sur l exposition l exp rience d un r el sans transcendance vide et d sacralis qui advient la visibilit en se mat rialisant En ce sens qu on le veuille ou non que cela ait t voulu d lib r ment par les militaires ou pas de telles images de cadavres entass s abandonn s enchev tr s les uns sur les autres atteignent sur le plan sensible esth tiquement donc un point capital de la m moire europ enne des images et de notre humanit Or il s agit l d une question capitale la fois pour l art et pour la pens e mais aussi quant au sujet humain et son exp rience Il s agit de la question de ce que des images ont pouvoir de montrer ou de ne pas montrer d voquer ou de d rober au regard Pour le regard occidental les visions de Timisoara rel vent in vitablement toutes d une m me ligne de fuite Ligne de fuite est prendre ici une double signification la fois le point vers lequel le regard tend vers lequel il converge et en m me temps le point de focalisation qu il ne peut pas atteindre qui lui chappe et l oblige un d placement une fuite devant la vision de l objet et un franchissement Il s agit la trace dans la m moire collective et individuelle des ima
94. ificit de la photographie qui se trouve pos e Cette deuxi me dition pr sentera huit expositions dans le IN chaque exposition abordant sa mani re la question du passages Cette ann e et c est une nouveaut une partie OFF r serv e aux jeunes photographes sera pr sent e dans des lieux non conventionnels et compl tera le IN Les Rencontres professionnelles elles r uniront philosophes historiens et l art et photographes qui vous proposeront des clefs pour appr hender les expositions Donner voir et donner penser tels sont les buts qui permettront nous l esp rons de redonner de la couleur et du sens aux images trop vues trop sur expos es du monde qui nous entoure BP SITIONS N y Evgen Bavcar Evgen Bavcar est en 1946 Slov nie vit et travaille Paris 16 ans soit quatre ans apr s avoir perdu la vue il se saisit de sa premi re cam ra Alors qu il tudie la philosophie Paris il d veloppe une intense activit photographique et expose tr s rapidement dans l Europe enti re D une sensibilit plus de celle de Man Ray que du travail des photoreporters ce photographe extra ordinaire utilise son art pour l interroger sur ses propres limites distinguer le visuel que voit l il du visible ce que voit l esprit Le sens n tant pas donn Evgen uniquement par les exp rience
95. ifie tymologiquement passer de l autre c t marcher de c t puis d passer enfreindre Je vais aller en face Voici mon premier commencement Timisoara fut un temps symboliquement pour les europ ens de l Ouest le lieu mat riel et embl matique d images t l visuelles fictives fabriqu es alors pour montrer au monde l abomination d un r gime politique alors sa chute Elles accompagnaient la mise sc ne par la t l vision d une r volution factice organis e clandestinement et l insu de son chef par une large partie de l arm e de l Etat communiste roumain en train de se d faire J voque ici l affaire des charniers des charniers dits de Timisoara Vous vous en souvenez il s agissait alors pour les r alisateurs de celles ci de montrer le caract re criminel du r gime politique de l poque d exhiber par les moyens de l image les exactions de la police du gouvernement de Ceausescu contre son opposition d mocratique Or comme nous le savons maintenant ces images taient fictives artificielles et mensong res Plus que transgressives elles taient donc au sens propre de ce mot perverses puisqu elles pr tendaient montrer une r alit une v rit la falsifiant dans ce cas c est bien d une falsification de la r alit par des images qu il s agissait ainsi que de la mise en sc ne et de l exhibition toujours par l image de visions atroces et scandaleuses Elles devaient provoquer en r acti
96. itif vrai faux ou ext rieur int rieur Depuis 1996 il travaille en partenariat avec de grands mus es mus e des arts d Afrique et d Oc anie Museum d Histoire naturelle mus e Buffon mus e Xavier Lucchesi expos dans toute l Europe en Russie et au Japon Evgen Costin St phane remresron Acier Luggdhesj Bectrice Mindo Dens S lection Corter Hresson projet expositions 0 INTERIEURS Roumanie Exil Beatrice Minda est Munich 1968 Elle tudie l Art l Ecole Sup rieure d Art Berlin puis aux Beaux Arts de Paris elle obtient en 2003 une bourse du Minist re de la Culture allemand pour venir tudier Paris Elle pr sente ici sa s rie Int rieurs Roumanie Exil travail entrepris l t 2003 qui se d veloppe en trois parties dans un premier temps Beatrice Minda a photographi des int rieurs de Roumains dans leur pays d origine puis dans un second temps les int rieurs de Roumains install s Paris pour finir par les int rieurs de Roumains install s dans la pr carit en banlieue parisienne Ce travail aborde les probl matiques de l attachement au pays d origine de l exil migration et de la migration Moins concentr es sur l aspect purement documentaire de ces lieux que sur ce qu elles disent de leurs occupants de leur vie s
97. ito Acconci entretien par Hans Ulrich Obrist in Hors Limites l art et la vie 1952 1994 ouvrage publi l occasion de l exposition Hors Limites Paris d du Centre Georges Pompidou 1994 301 141 Entretien de Christian Boltanski avec Irmeline Leeber in L art c est une meilleure id e Entretien 1972 1984 Irmeline Lebeer Paris d Jacqueline Chambon 1997 p 93 15 La v ritable nature de notre rapport au r el ne r side pas dans l impression visuelle mais dans les mod les formalis s des objets et de l espace que le cerveau cr e partir de sensations visuelles L image n est plus la source la donn e que entre entretien avec St phane Barron http stephan barron fr Je fais des bandes pour une personne pas une personne pr cise Il n y ni classe d ge ni pays particulier C est l id e que chaque personne individuelle poss de une perception compl te de la r alit un monde personnel avec lequel je veux tre directement connect Bill Viola in Anne Marie Duguet D jouer l image cr ations lectroniques et num riques Paris d Jacqueline Chambon 2002 60 16 Rosalind Krauss Abaisser tendre contracter comprimer tourner regarder l uvre de Richard Serra in Richard Serra catalogue de l exposition Paris d du Centre Pompidou 1983 33 17 Maurice Merleau Ponty Ph nom nologie de la perception 1945 Paris d Gallimard Tel 2005 p 114 18
98. j caract ris es L art pas se limiter des formes et figures n gatives il ne doit pas lui tre interdit d tre une figure affirmative Car si la commodit de la transgression fait loi ce qui la rend absurde le devoir de l art est pas consentir Pour autant il ne doit pas adopter la position r active r actionnaire de la restauration d un pass ant rieur aux fracas formels et historiques de la modernit Car que signifie aujourd hui vouloir restaurer le pass esth tique d un monde d avant les camps d extermination d avant la destruction de l homme par l homme Peut on effacer l effroyable terreur devant laquelle la modernit nous aura plac s sur les plans historique politique technique esth tique et qui aura conduit les artistes une incessante lutte pour le renouvellement des formes et des uvres une trahison r solue des canons du go t Ne fallait il pas transgresser les limites de la forme pour acc der au r el en se d barrassant des oripeaux de la r alit ainsi que de ceux du r alisme Dans le miroir d form de l art la r alit appara t ind form e crivait F Kafka Qui d entre nous pourra revenir sur les ruptures multiples d un Picasso sur l effraction nucl aire de la langue chez J Joyce sur l trange musique dod caphoniste de A Sch nberg sur l extravagance des figurations de F Bacon sur la radicalit du cin ma de Pasolini sur du th tre
99. l du r el manipul par de l image Certes de telles objections sont valides mais s en contenter revient oublier quelque chose auquel l art contemporain lui pas t indiff rent dans ses recherches sur l image le r el et la m moire Je pense ici par exemple au travail de Christian Boltanski Vous le savez l art moderne contemporain celui du vingti me si cle ne montre pas un visible d j identifi P Klee crivait L art ne reproduit pas le visible il rend visible gt 2 Il instaure ce que la repr sentation peut ni capter ni d tenir en lui permettant de se pr senter dans sa forme absente comme une objectivit Or tr s pr cis ment ce qui se produit ce moment l du fait de la manipulation des images des fins de propagande et du fait de la valeur instrumentale artificielle qui leur est donn e pour d noncer l horreur des crimes Ceausescu les actuels et ceux du pass c est le devenir tout autre qui est le leur Si elles ne sont d abord que qu elles sont des images qui montrent un amoncellement de corps morts et d figur s corps quelconques victimes de la mort aussit t elles sont tout autant autre chose qui leur chappe et qui leur appartient Elles sont pour le regard l preuve d un saisissement in vitable qu elles rec lent sans jamais rien refl ter pr senter l horreur moderne de la mort inflig e en masse et aveugl ment Or cela ne peut pas se produire sans qu ait eu l
100. l ann e d cern par la Romanian Publishers Association pour Transit Bumbut participe pour la seconde ALLER ann e aux SurExpositions Il propose pour cette seconde dition un travail in dit Cosmin Bumbut Evgen Comm St phor Dremszion Xavier Lucchesi Bectrice Mindo Dens S lection expositions St phane Diremszian Corps rod s St phane Diremszian est un jeune photographe fran ais d origine arm nienne Dans ses s ries corps rod s il travaille avec une technique de surimpression La surimpression prend sa source dans le monde mental Elle refl te comme lui la simultan it des pens es Les images ainsi produites addition de deux images restituent des fragments de ce qui n a pas chang et tendent vers une nouvelle continuit se rapprochant de mes images int rieures L image vient de surgir et de na tre avec ses deux composantes et d j s amorce sa d composition image offerte l usure du temps l rosion la d composition corporelle L image montre et efface ce qu elle montre simultan ment tandis qu elle m me est la fois vidente et vanescente Corps rod s St phane Diremeszian La s rie de photographies Corps rod s pourrait aussi s appeler Nevermore du nom d un c l bre po me d Edgar Allan Poe ca
101. l h misph re droit tandis que ceux contenu plus verbal ou abstrait les concepts recrutent plut t des neurones de l h misph re gauche Il s agit cependant que d un dosage car chacun des deux h misph res poss de des aires sensorielles fonctionnelles par exemple les aires visuelles des deux h misph res contribuent la fois la vision d un objet dans l espace et la formation d un percept spatial 11 Ces constatations de J P Changeux nous conduisent faire un parall le entre la crise de la culture et la prise de pouvoir de l h misph re gauche au cours des trois ou quatre derniers mill naires Si en effet nous pouvons nous accorder en suivant les th ses de Julian Jaynes sur le fait que pour les hommes d avant l invention de l criture voire m me des d buts de cette invention l h misph re droit tait dominant et si donc a assist durant l poque historique de la vie de l humanit une sorte de transfert de pouvoir vers l h misph re gauche alors la crise de la culture se double aussi d une crise dans le fonctionnement du cerveau Cette crise se traduit par une sorte de d ni de la puissance de l h misph re droit Car c est sans aucun doute que l on peut appeler la fonction image qui tait le vecteur de l ordre dans le monde d avant l criture et les concepts que l on peut conjecturer c est que la prise de pouvoir de l h misph re gauche se traduit pas une sorte de
102. l lui semble possible recueillir quelques images et quelques pens es auxquelles m ne aucun autre chemin 1 8 Enfin passage peut se d composer en pas sage et en effet les passeurs les gens qui sont seulement de passage ou les passants dans les passages sont souvent tent s de c der toutes sortes de folies Ces retours sur quelques sens du mot passage nous introduisent repenser la diversit des v nements de cette semaine expositions projections et conf rences comme nous venons d j de pr c demment SurExpositions 2006 m nage des passages invite des travers es pour se rendre d un lieu un autre d un bord l autre de l acte photographique Ainsi les visiteurs sont convi s ces voyages qui leur permettront d accompagner dans ces travers es les artistes dont les uvres leur sont pr sent es Ainsi les visiteurs passeront d un hommage rendu Cartier Bresson par quelques repr sentants de la jeune g n ration des photographes de Cluj o la photographie nous donne voir ses conventions techniques ses conventions de composition et ses conventions iconographiques des exp rimentations qui outrepassent d une mani re ou d une autre ces conventions Les visiteurs peuvent alors suivre ces passages d un tat un autre ces changements dans l acte photographique Passer quelque chose et aussi faire subir un certain traitement l objet concern l image
103. lequel la conscience ne se voit en tant que sujet mais tant qu activit Mais si l acte de la prise de vue est sans code d o viennent ces codes qui peuvent infl chir la lecture de la photographie Et que lire sur une image si elle restitue le r el tel qu il est tait ou fut Et qu est donc cette magie de la photo 3 Boite noire Si on ne prend en compte le fait que l appareil encode l image il reste donc lire sur l image le r el pur et sans fard et les lin aments de la conscience de l artiste lui m me La photographie en ce sens est donc essentiellement un reflet du fonctionnement de la conscience et le r el qui pour tre transform en image doit passer par le filtre du photographe est donc le jouet de ses intentions Elle n est en sens pas diff rente la peinture Alors d o vient cette diff rence si l on s accorde effet dire que photographie et peinture ne sont pas la m me chose malgr videmment tout ce qui les relie l une l autre C est sans aucun doute le philosophe Vil m Flusser qui apporte cette question la r ponse la plus pragmatique et la plus radicale la fois La diff rence vient bien de ce que la photographie est prise par un appareil L appareil photo illustre bien cette robotisation du travail et cette lib ration de l homme pour le jeu C est un outil intelligent dans la mesure o il produit automatiquement des images Le photographe n a pl
104. les descentes sanglantes des mineurs pendant toute la p riode des ann es 1990 ont fait que le sch ma de la bo te noire dans laquelle on ne sait pas ce qui se passe ou pourquoi a se passe reste valable pour nous Il n tait certainement recommandable de faire entrer dans cette bo te des choses de valeur comme par exemple les expositions itin rantes qui tournaient dans les pays voisins C est pourquoi Bruce Nauman Valie Export Douglas Davis Bill Viola restaient pour nous seulement entre les pages de magazines et d albums d art Pour la plupart de nos artistes et critiques l art occidental du XXME si cle n tait qu une exp rience de deuxi me main ce qui a t aussi retenu par Magda Carneci dans son livre sur l art de la Roumanie communiste Une bo te noire avec un emballage brillant dont le contenu est toujours ignor Des motivations d terminations et m canismes qui nous chapent parce que nous avons v cu isol s dans d autres temps avec d autres d terminations L acc s est toujours limit faute de traductions et cause de la pr carit des possibilit s de voyage L art n est pas une chose qu on puisse comprendre gr ce consultation de dictionnaires et la navigation sur Internet Je suis content lorsque Dan Perjovschi expose Tate ou Mircea Cantor au Centre Pompidou mais ces apparitions sont de pures exceptions la r gle qui semble nous gouverner et dont Bill Viola exprime sa
105. lit rant ainsi la vision de l espace alentour et ce durant heures puis elle s effondre Surgissant dans l uvre de ces diff rents artistes souvent acteurs de l art corporel et fortement inspir s par la vague des performances venant de Fluxus la bo te noire se tient au confins de l objet et de la th tralit Qu elle se constitue sous l effet de la r p tition ou alors sous celui de l isolation elle semble maintenir le geste de l artiste dans un espace fig presque sculptural tant il s exprime au travers d une tension d un puisement 3 une chute au sein d un continuum Gr ce la bo te noire l intention artistique est dans ce qu elle de plus personnel individuel ou subjectif L artiste saisit cette bo te la brandit Bient t ne sait plus tr s bien s il s agit d un geste qui est s par du reste du corps consign r p t ou bien d un objet que l on pourrait appr cier comme tel 1 semble avoir dans cette utilisation de l archive dans cette fa on de mettre le corps en bo te un secret renoncement Elle se tient dans la recherche d un corps quasiment universel d un corps v cu par tous dans les diff rentes fragmentations et r ifications que la machine sociale op re en nous Le corps devenu ainsi outil homme qui tousse homme qui saigne marteau qui frappe clou qui s incise vis qui s che s emballe se perd s oublie lui m me afin de se dresser contre ses propre
106. lle tuer d Bayard 29 30 21 Roland Barthes La chambre claire note sur la photographie d Cahiers du cin ma Gallimard Seiul p 133 31 Roland Barthes op cit p 138 139 41 Vil m Flusser Pour une philosophie de la photographie d Circ p 30 31 51 Vil m Flusser op cit p 29 61 Bernard Piettre Philosophie et science du temps Que sais je p 82 71 Vil m Flusser op cit p 12 8 Philippe Sers Sur dada d J Chambon 71 72 91 Philippe Sers op cit p 72 10 Vil m Flusser op cit p 19 11 Jean Pierre Changeux L homme neuronal d Fayard 203 204 12 Vil m Flusser op cit 20 41 gt BP SITIONS Borel EMMOMLIEN Brossa Bemard Gerbouri Donieck Gocer Di Le Serdert kondLous losif Kir ly Dans le geste prendre des photos ce que le photographe veut et le photographe doit vouloir ce que l appareil est capable de faire 1 L art est cette activit humaine qui produit intentionnellement des improbabilit s et qui est d autant plus artistique que la situation qu elle produit est plus improbable 2 partir des ces deux citations de Vil m Flusser j envisagerai des questions que de d tailler le long du s minaire Dans quelle mesure la cr ation de l artiste qui utilise un certain type de technologie doit elle re
107. lus criante est l ouverture au fil du si cle la Biennale de Venise aux pays mergents de l conomie mondiale l artiste voyage au gr de ces grandes manifestations claireur averti de l actualit prenant position dans un style que l on pourrait qualifier d international Paris des expositions telles que Africa Remix au Centre Georges Pompidou r unissant une s lection de la production artistique du continent africain t 2005 ou plus r cemment Notre Histoire au Palais de Tokyo concentr e autour d une trentaine d artiste mergents de la sc ne fran aise mais comprenant des artistes n s l tranger hiver 2006 ont stigmatis cette ambivalence Pour Philippe Dagen critique d art au journal Le Monde la d finition de l artiste contemporain passe avant tout par une ma trise de l histoire de l information m diatique et des outils techniques qui lui permettent ainsi de r pondre d une fa on ad quate la situation qu il analys e L artiste actuel est inform des d veloppements les plus r cents de cr ation autant que de son histoire ancienne et proche ma trisant l ensemble des techniques averti de l actualit mondiale affect par la mondialisation et le risque d uniformisation 1 Quant au Palais de Tokyo il n h site pas le qualifier d altermondialiste 2 dans les cartels de l exposition Translation t 2005 Les strat gies qu il d ploie alors d jouent nos habitudes per
108. mais qui est redoutable au sujet consacr et ceux m mes qui Ce sont les suites de cette cons cration qui sanctionnent en partie l interdit 11 Toute cette affaire de Timisoara v ritable mise en sc ne de la r alit par les moyens de la fiction gr ce des techniques audio visuelles utilisant les mat riaux du r el aurait pu se voir confondue fort cyniquement en son artificialit m me avec une sorte d art vivant macabre r alis par des militaires ayant pu manipuler des cadavres comme les l ments d un tableau Une performance Un tel art au go t douteux se serait livr de fa on perverse un trange m lange Il aurait m l le contexte d actions fictives en v rit reli es d autres qui bien que dissimul es taient r ellement men es une manipulation conjointe d l ments de la r alit et d images de celle ci Les images jouant ici le r le de pi ces authentiques afin de l gitimer des actions port es par une v rit fabriqu e De sorte que la technologie audio visuelle et son maniement en soient venus s interp n trer avec la vie r elle avec les v nements dans une ind termination concr te de leur diff rence Une technologie audio visuelle dont nous savons qu elle est tout la fois un instrument de p n tration de la r alit d archivage et de reproduction de celle ci et tout autant le plus puissant des moyens dont nous disposons pour fictionner le monde r
109. me et le Sacr i p 24 20 rare Horence Borel Berrad Gerbovd Dorieig Le UE TES Daniela Goeller L image photographique au del de la repr sentation contrepoint de Lucian Ionica Apr s des semaines de manifestations pour des r formes politiques et la libre circulation des centaines de milliers de personnes mass es dans la rue et l arri re plan une foule grandissante d Allemands de l Est se dirigeant vers les r gions voisines d Allemagne de l Ouest la fronti re int rieure de l Allemagne fut ouverte le 9 novembre 1989 entra nant un bouleversement de la politique mondiale aux cons quences tr s importantes Ce jour l marqua la fin de l histoire la RDA mais aussi celle de la guerre froide En l espace quelques ann es furent pos s les grands principes de la r unification les traces de la s paration furent largement effac es et Berlin redevint la capitale de l Allemagne Depuis lors la ville autrefois divis e attire toujours plus de personnes venant d Europe et du monde entier Chaque instant a sa propre dur e laquelle il survit Le photographe fran ais Patrick Tourneb uf est de ces chercheurs de traces qui ont investi Berlin Il arriva en 1988 naviguant entre les parties Est et Ouest de la ville essayant d appr hender les fronti res encor
110. mentant sur ce qu elles d voilaient et qu elles se savaient fabriquer Par elle m mes de nature perverse jouant d un devoir de transgression pour d voiler une pseudo v rit elles devaient provoquer par un effet de retour la fois intentionnel et inconscient une autre dissimulation quant la v rit du r gime et de son renversement Elles devaient favoriser l gitimation d une d sacralisation la destitution du gouvernement par ceux l m mes qui en taient encore membres et qui transgressifs eux m mes tra tres leur propre loi organisaient secr tement sa chute comme si elle n avait pas d pendu d eux Vous le savez c est une connaissance ancienne qui nous l enseigne de nature initiatique le d voilement qui ne peut tre vu le franchissement par le regard ou le corps d une limite interdite d une limite symboliquement li e un sacr entra ne aussit t quelque retrait conjuratoire quelque effacement et mise l cart de celui et de qui n aurait pas du acc der la visibilit au toucher la conscience commune et qui devient d s lors un tabou Cela se produit sans que soient jamais dissociables le geste profanateur et celui de la resacralisation rituelle de ce qui a t transgress sa cons cration Ils sont pris ensemble n cessairement les conditions de la p rennisation d un sacr ce propos le sociologue E Durkheim crit Toute profanation implique une cons cration
111. mise au de l h misph re droit Or il semble qu au moment o les tenants de la raison et de la puissance des concepts commencent ne plus pouvoir assurer la survie de leurs semblables mais au contraire engendrer leur malheur la fonction image retrouve un peu de sa puissance perdue Cependant comme le fait remarquer Vil m Flusser les images techniques loin de ramener les images traditionnelles dans la vie quotidienne les remplacent par des reproductions et prennent leur place contrairement ce qui tait envisag elles ne rendent pas non plus repr sentables les textes herm tiques mais les falsifient en traduisant les nonc s et les quations scientifiques en tats de choses en images pr cis ment D s lors elles peuvent pas contrairement ce qui tait envisag ramener la culture un d nominateur commun au contraire elles la moulent en masses amorphes La cons quence en est la culture de masse 121 Cette culture de masse se traduit comme nous pouvons le constater par une sorte de d doublement de fonction image L une vient fait recouvrir l autre Les images techniques accroissent l illisibilit des textes sans pour autant clarifier leur message lors m me que les visions transparentes sont pour ainsi dire exclues de mani re radicale du champ des exp riences humaines possibles Ce processus de recouvrement de l illisibilit par l insignifiance d images techniques se mul
112. mites permises passer franchir les bornes et ainsi contrevenir ce qui est prescrit par les usages par la morale par les codes par la loi c est donc d sob ir ces prescriptions voire les violer Sont transgress s des ordres des r gles etc L acception g ologique de la transgression nous est galement pr cieuse puisqu elle est m taphoriquement proche de ce que nous voulons donner voir savoir que la transgression s accorde l avec l volution tout comme qui peut tre le motif de l activit cr atrice Presque tous les po tes ont fait des vers admirables transgressant les r gles 31 Les cons quences de cette volution peuvent tre peu sensibles comme elles peuvent tre consid rables plus ou moins long terme La transgression n est donc jamais innocente m me lorsqu elle s exerce la marge un acte est tabou qu on peut accomplir sans porter atteinte cette ordonnance universelle qui est la fois celle de la nature et de la soci t Chaque transgression d range l ordonnance tout enti re 4 Mais aucune ordonnance en particulier sociale n est si absolue si sacr e qu elle ne puisse tre transgress e Les effets de la transgression sont pourtant loin d tre tous catastrophiques contrairement ce que les prescriptions nous contraignent croire L ordonnance n est pas toujours universelle Si tel tait le cas il aurait plus ni volution ni
113. n plus d quivalent d importer donc m me des montagnes dans les plaines la culture existante Ces passeurs gt activent toute une cha ne d autres passeurs qui demeurent anonymes mais qui n en sont pas moins actifs dans cette modalit du passage Si modeste soit l activit de ces derniers elle n en est pas moins n cessaire la logistique qui ouvre le passage on oublie aussi trop souvent que dans l histoire des cultures le r le de ce genre de passeurs est essentiel et qu ils font beaucoup plus que de donner voir des uvres trang res ils contribuent imposer de m me que les traducteurs des pens es et des mani res de penser comme de jouer avec les signes et les formes qui n avaient pas d quivalents et qui vont aussi constituer nouvelles r f rences 5 Ces derniers passeurs ne sont souvent que de passage Etre de passage c est tre l fugacement de mani re momentan e ph m re passag re ne faire que passer c est dire pas rester ce sens parle d oiseau de passage amant de passage de passe de passade 6 Tous artistes po tes traducteurs organisateurs et autres passeurs passent donc quelque chose et ce quelque chose est une mani re de t moin Ils uvrent au passage de t moin d une culture l autre d un individu l autre En donnant lire et voi
114. n pourrait aussi nommer l horreur du sacril ge Pour le d finir il crit comment le dieu et l humain sont accoupl s et comment toute limite abolie la puissance de la nature et l int rieur de l humain deviennent un dans la col re de telle sorte que le devenir un illimit se purifie par un divorce illimit 13 Dans ce cadre l art transgressant la limite d un interdit s parateur parce qu il donne voir la sc ne du divin son extase ne peut que se d tourner d un tel tumulte de r union et de s paration de confusion et de disjonction Un tumulte dont on sait qu il saisit de son vertige le h ros tragique et le brise en l cartant du monde humain en le pr cipitant vivant parmi les morts et en d obscures souffrances L art doit pouvoir s loigner de ce tumulte afin de donner forme au regard humain sur le monde et la distance voil e qu il r clame Dans l art antique il s agira donc d un regard qui regarde la fronti re de ce qui ne se regarde pas un regard doublement d tourn louche qui sait la dimension d effroi qu il rec le part d Autre qu il appelle et qui s en prot ge tout en s y exposant dans l ordre ostensible d une c l bration picturale de la beaut L crivain P Quignard parle fort bien de cela en nous rappelant ce que signifiait le mot extremitas dans la langue de Pline l Ancien terme que ce dernier emploie pour d signer le contour en peinture l extr mit doit se t
115. ncore les conflits du m canique et de l humain Le second facteur est la combinaison d actes dont l encha nement engendre un accident De cette sc ne assez parpill e dans les d marches comme dans les techniques photographie vid o installation voici trois repr sentants Olaf Breuning Suisse n en 1970 recycle les clich s m diatiques et la culture populaire La photographie lui permet de jongler par des usages d cal s avec le rat et le ma tris la notion de faux ou encore le mauvais go t Ainsi l hilarant Easter Bunnies 2004 n est il rien moins qu une fiction touristique de de P ques L artiste montre un alignement des c l bres statues affubl es d oreilles de lapins et de larges bouches souriantes Le trucage utilis pour masquer les monuments sacr s une armature plac e au premier plan et supportant des postiches figure bien en vidence au premier plan de l image De son s jour sur le site Breuning rapporte qu il avait pour but les deux p les oppos s de la stupidit et de la saintet Anne De Sterk Fran aise n e 1971 pr sente L un personnage f minin qu elle incarne personnellement dans diverses situations la fois quotidiennes et totalement absurdes Se pr sentant comme po te avant tout et po te syst matiquement m contente des modes d nonciation de cette po sie elle tente donc un d tour pour l exprimer ses chor graphies tr
116. ns e est bien vite rattrap e par les critiques acerbes de Jean Clair 8 ou R gis Debray 9 De la marque d authenticit que nous lui avons accord e la voil d chue dans un infantilisme assumant la d fection de la modernit Essayons de l y arracher d en faire merger une autre probl matique celle d une charni re articulant espace et temps 4 d cryptage de la bo te noire dans notre pr sent Mais de quelles couleurs se teinte le r troviseur de notre regard actuel la lumi re de ces uvres des ann es 70 Dans quelle mesure peuvent elles exercer une quelconque influence sur notre critique de la transgression dans l art contemporain A suite Walter Benjamin nous postulons dans cette bo te noire la possibilit de d gager une image dialectique L image dialectique nous renvoie en effet au masque de l interpr tation que l on a plaqu sur le pass Elle implique une connaissance historique non plus d ploy e selon un axe chronologique mais qui suppose un temps arr t fig stopp net dans sa course fragment au plus haut point 10 En vue d une telle fin il nous faut r duire notre champ d tude un ensemble plus r duit d uvres et carter de cette liste qui ne rendrait pas compte du caract re fragmentaire propre l image dialectique De nouveau posons les fondements de la bo te noire et r duisons le champ de son accident aux seuls supports de la vid o et cin ma On pourrait do
117. ns laquelle on pourrait s installer du fait de l abolition d une limite la limite est toujours l uvre dans la transgression et peut se voir absolument supprim e Tout franchissement transgressif implique une dichotomie une dualit d tre la fois sur la limite et en de d elle puisqu il est impossible de M Foucault crit encore La limite et la transgression se doivent l une l autre la densit de leur tre inexistence d une limite qui ne pourrait absolument pas tre franchie vanit en retour d une transgression qui franchirait qu une limite d illusion ou d ombre 7 Dans les formes religieuses l mentaires la transgression est l acte de profanation qui vient m ler le sacr et le profane les contaminer en les rendant indistincts et ce faisant menacer l ordre des choses Par exemple confondre le monde des dieux et celui des hommes m ler les morts et les vivants ou encore absorber un aliment interdit r serv un rituel sp cifique Plus pr cis ment comme l indique E Durkheim ce qui ne doit pas tre m l c est le sacr faste et le sacr n faste car entre les choses sacr es il existe des rapports de disconvenance et d incompatibilit 8 Le coupable de transgression appelle sur lui la Vengeance de l ordre sacr des puissances et des forces qui le fondent ordre dont l acte impur qu il a commis menace la conservation La souillure contract e au contact du sac
118. ns d un genre Or le double dessein de devoir chapper au cadre et de devoir en reconduire un fut la loi paradoxale de l art au cours de la modernit En cela l art moderne aura t structur par une dialectique de de la r gle naturaliste et figurative et de sa transgression de sa subversion moderniste artificielle et abstraite formaliste La transgression dans l art est n e d un renversement de l ordre sacr l art du renversement d un monde sacralis par la religion au profit d une resacralisation profane de l existence dont il fut l artisan La premi re transgression de l art ant rieure la modernit fut d carter l interdit de transgresser la loi religieuse par une transgression des r gles formelles d un art sacralis pour le culte et troitement codifi Or nous sommes un ge ou la repr sentation de la r alit au moyen des techniques audiovisuelles est omnipr sente et incessante La pr sence de rituels et de c l brations sacrales autour de la repr sentation n est plus qu un aspect mineur de l exp rience sociale et quand il a lieu d tre ce sont les m dias audiovisuels qui le pr sentent comme tel Les diff rences du licite et de l interdit sont devenues moins nettes sur le des formes repr sent es de la production d images et sur le plan politique la soci t se donne voir comme potentiellement transgressive tendanciellement anomique Sur le plan jur
119. ns intention la parabole dans l installation vid o Cinq Anges pour le Mill nium que j ai vue Paris une bo te noire dans laquelle des apparitions ang liques sortent quelques instants du noir pour s immerger apr s dans la m me obscurit C lin Stegerean 17 Horere Borel Errn wuel Spectre Demag Gerbovd Pere zj Le Sergert remis Rotevin Aa ka a TELET TES PASSAGES ENTRE EXCEPTION REGLE Secondes Rencontres internationales photographiques de Le mot passage en fran ais a plusieurs sens 1 Un passage est une rue troite en g n ral couverte et bord e de boutiques qui relie deux rues normales et permet donc de sortir des parcours ordinaires des sentiers battus Les passages sont ce sens des lieux qui sortent de l ordinaire o l on aime fl ner prendre son temps o l on ne fait pas que passer des lieux essentiellement po tiques qui ont quelque chose de secret et d intime En slovaque comme en tch que et comme en roumain le m me mot d signe la m me r alit extr mement pr sente Prague comme Paris ou Lyon plus rare Bratislava ou Timisoara Pour ceux qui d couvrent l une de ces villes ou plus g n ralement ceux qui aiment s y promener m me les rues passantes peuvent se transformer en passages Il existe un livre qui c l bre les passages Le Paysan de Paris d A
120. nt travers les bulletins d information qui le montraient se promener cal che avec la reine d Angleterre la fin des an es 80 nous avions une carte pour le pain et le sucre du courant apr s 20 h lorsque commen ait le programme t l vis de deux heures Les radiateurs taient froids tout l hiver et les informations taient censur es En occident voyageaient que ceux qui sont suspect s aujourd hui d avoir collabor avec la Securitate Nous avons appris l existence de Bruce Nauman Valie Export Douglas Davis Bill Viola la Biblioth que Am ricaine ou l Institut Fran ais o nous allions craignant une convocation ult rieure la milice L odeur des radiateurs brulants et des couvertures de livres lisses feront toujours partie de l odeur la libert aper ue l bas pendant ces ann es Mais que peuvent rendre les pages d un album ou d un magazine des installations de Nauman ou des films d Export Comment comprendre la lib ration de la lourde responsabilit de l intentionalit artistique partir d un anglais ou d un fran ais qui ressemble pas celui que l on avait appris l cole Ici nous apprenions ces choses comme on apprend le d luge dans la Bible on sait que cela s est pass mais le sens nous chappe Trop affam s pour une r volution de velours les Roumains ont pass les f tes pendant l hiver 1989 entour s de vraies balles La cruaut de cette p riode ainsi que
121. oderne Nous sommes devenus dans la seconde moiti du 20 si cle les contemporains d un art hant par la disparition de la vie sensible dans l impossibilit objective le r gne universel de la chose sans art impossible transposer Le grotesque culte du toujours plus d motion et d images qui nous environne en atteste comme s il fallait d sormais saturer et recouvrir notre perception sensible trop crue d une intensit provoqu e par des perceptions sensorielles artificielles L id al d une harmonie spirituelle de la chair et du vivant humain nous quitt s s est rompu d une part devant la violence g n rale de l histoire contre les personnes les uvres les corps et les peuples et d autre part du fait de l irruption des techniques dans la production de notre r alit C est pourquoi Foucault peut d finir la transgression comme une profanation dans un monde qui ne reconna t plus de sens positif au sacr 17 Il tend donc en r duire le sens sa sp cificit moderne ou contemporaine Pour Foucault la transgression cesse d tre de nature dialectique la n gation de ce qui a t abandonn et transgress parce il a plus de sacralit identifiable laquelle l art serait oppos Pour autant le geste de transgression reste dans cette d finition ind fectiblement reli celui de la profanation et cela malgr le retrait de la sacralit comme instance positive de la culture et de la soci t
122. oire et avons d cel une faille une br che un point d articulation trange o se rencontrent et s articulent philosophie bergsonienne et ph nom nologie La bo te noire contient une charni re qui maintient s par tout autant qu elle unit L est la faille que nous avions d sign e au d part comme propre l image dialectique Elle est cette f lure jaillissant du ricochet de la trajectoire du d sir cr ateur sur la profondeur de la pens e Car dans un monde du langage et la doxa dans qui ne pr sente pas d asp rit s ce qui demeure plat univers o semble r gner l artiste altermondialiste la transgression que nous avons mis en exergue est cette faille l int rieur m me de l uvre Elle se constitue comme la d flagration survenue sur la surface miroitante du monde de l information mirage du kairos Peut on penser la transgression non pas dans l av nement d un langage universel des formes se d f rant de doxa comme de l autorit en place mais dans la tension d une contradiction d une dialectique Nietzsche dans la Naissance de la Trag die l avait annonc Entre l image apollinienne ouvrant sur un espace absolu et le rythme du c ur dionysiaque battant dans le flux de la dur e la bo te noire propose t elle un prolongement possible la naissance de la trag die antique Mais la faille l accident que cette bo te noire d crit ne peut surgir que si le sujet la porte d j lui S
123. olongement D autre part si l uvre se veut incrust e dans la perception imm diate de son environnement elle est alors l indice d un rapport au monde pr cipitant elle l attitude de l artiste vis vis de la soci t C est l poque des premi res grandes expositions la mani re de Quand les attitudes deviennent formes d Harald Szeemann la Kusnthalle de Berne 1969 L l objet d art n est pas appr ci tant quel tel mais t moigne la position de l artiste la signification de son geste dans une structure politique et sociale Aux artistes pr sent de recourir au champ des sciences humaines et celui de la philosophie afin de pointer les revers du monde Que leurs uvrent s y immiscent dans l espoir d un d r glement d une perturbation d une redistribution il est toujours question du rapport qu entretient le sujet avec son environnement toute affaire de changement s obtient dans le radicalisme d une position Chacun va par cons quent de l engagement de son travail comme la r plique qui se voudrait cinglante la longue tirade des utopies qui en retentissent de Mai 68 ou de la contre culture am ricaine Si c est par l attitude que l on prouve la r volte comment contaminer la soci t Quel trait d union l uvre doit elle tracer entre espace priv et espace public Hors des chemins battus des conventions et des normes les artistes de la bo te noire r vent ce lien dans le pr cipit
124. on un consensus autour de la d nonciation du gouvernement de Ceausescu Il fallait provoquer une r ponse unanime sainte et l gitime puisque de l ordre de la justice un outrage commis l gard du peuple roumain Provoquer une r ponse louable des crimes affreux qui serait universellement admise par le relais sanctificateur des m dia internationaux seuls r v lateurs et administrateurs de la v rit des images in fine Ces media audio visuel qui comme vous le savez targuent de repr senter aujourd hui la religion du Droit et ses protocoles de v rit Avant proc s et ex cution pour ne pas dire sacrifice de celui et de celle qui victimes expiatoires d livreraient par leur mort la Roumanie de son destin funeste Or de telles visions auraient d non seulement tre normalement d rob es au regard elles sont insoutenables ne regarde pas sans voile ni sans rituel un amoncellement de cadavres de corps livr s brutalement la mort mais encore elles furent pr sent es au regard comme le d voilement n cessaire bien que transgressif d un r el que le gouvernement aurait tent de dissimuler apr s avoir agi de mani re criminelle l encontre de son propre peuple Ces images taient donc d autant plus mensong res qu elles venaient mon avis simultan ment superposer plusieurs gestes de perversion et de transgression Elles jouaient ouvertement de la transgression par souci de se montrer vraies tout
125. on dont on pourrait attester de la n cessit en l inscrivant dans une causalit explicative Une volution peut tre motiv e produite par des conditions n cessaires qui en entra nent le cours et comporte donc une certaine pr visibilit La transgression n est gu re pr visible m me si le discours de l historien peut apr s coup la r inscrire dans une certaine n cessit en montrant par exemple que l av nement du vers libre dans la po sie du 198 si cle europ en r pondait l puisement des formes litt raires classiques et romantiques Pour Rimbaud et Verlaine la rupture stylistique est bien une transgression une rupture profane avec un id al formel dont ils d cr tent la fin par un d sir insurrectionnel de r g n ration qui peut seul selon eux transfigurer le g nie po tique et la langue Mais ce faisant ils proclament une nouvelle loi sacr e pour la po sie le devoir de bouleverser toutes les formes Transgresser c est donc ne pas s en tenir la r gle c est d vier par rapport un code des formes pr tablies c est vouloir pouvoir rompre avec ce qui fait loi et instaurer que cela ne soit plus ne fasse plus loi afin de pouvoir jouir de cette loi au del de forme de la loi La transgression proc de d une ambigu t elle n est pas l ennemie de ce qu elle condamne bien qu elle le condamne de fait Porteuse d une rupture elle vient le prolonger le renouveler et le transfigurer au prix du sacrifice
126. our vrai mais que croire permet de voir et que l on ne voit jamais que quoi l on croit Seule une d finition du voir comme vision c est dire op ration de formation d images dans le cerveau pouvant avoir lieu sans l intervention d un r el existant face un regard suppos peut permettre de ne pas tomber dans le pi ge de la croyance en la dimension fondamentalement indicielle de la photographie 2 L appareil et la conscience Si l image permet la conscience de voir de se conna tre comme reflet du monde et monde du reflet la photographie en introduisant l appareil dans la fabrique l image aurait d lib rer l image de la m taphysique Or il n en est rien bien au contraire C est qu il en va pour l appareil comme il en va pour le visible Ils sont pris dans le m me effet de croyance En effet pour qui veut que le r el et le visible co ncident l appareil est une sorte de fen tre neutre qui fait que d couper du r el dans le visible et du visible dans le r el Au mieux comme dans la peinture croit on que le seul filtre est celui qui apporte en fait le style savoir l artiste lui m me C est donc celui qui prend la photographie que va chercher retrouver alors des insistances du r el que l on va chercher lire dans les images et en aucun cas les programmes qui constituent l appareil La question pos e est la suivante Qu en est il du visible lorsque ce sont des appareils
127. ourner et s achever de fa on donner l impression qu il y a autre chose derri re elle et voir m me ce qu elle cache 14 Souvent les peintures de ce temps sont des fresques qui repr sentent des personnages dont le regard se porte sur des choses qui ne sont pas directement repr sent es Cette peinture se pr sente comme le regard d un regard le regard sur un regard qui regarde l extr mit en tenant distance ce qui est regard mais d j infiniment pr sent Les regards sont pr sent s voil s ou d tourn s orient s de c t Transgressifs et fascin s donc Transpos dans le vocabulaire th ologique latin on peut dire qu il s agissait aussi dans l art de pouvoir pr server et soutenir la diff rence entre la monstration du tremendum et l appel au fascinans c est dire opposer la pr sentation de l horreur tragique et l octroi de l ivresse sainte dionysiaque Car la divinit a toujours ce double aspect comme nous le rappelle R Caillois de poss der en elle un l ment terrible qui carte et un autre captivant qui attire 15 Le premier nous pr cipite dans l effroi et la destruction dans culpabilit le second nous entra ne dans la c l bration des plaisirs et de l amour dans l extase et la communion dans le pardon De sorte que si le sacr est marqu par le rapport d interdiction et la menace d une transgression n faste tenant l humain distance il est aussi d termin inversement par la promesse
128. par tous les courants id ologiques politiques et autres modes de la soci t Et la vuln rabilit per ue des choses ferait cho autant la notion largement diffus e dans les crits de l historien d art George Kubler et dans ceux de Robert Smithson qu l instabilit d un lien sujet monde Voir ce lien implique d une part l abandon d une pens e de l ontologique et de l individuation et de l autre une br che toujours mouvante entre int riorit et ext riorit sujet et objet autre et soi C est dans la r it ration de chacune de ces ambivalences dans la concr tion progressive de l exp rience que fixe les coordonn es de ces rapports et que l on d cide de leur caract re invariant 7 L espace ph nom nologique de la bo te noire C est l preuve du corps que Richard Serra d finit le lien sujet monde Le corps s ouvre sur le monde et dans le prolongement de ses gestes il est la cl de l unit spatiale il en est la mesure L espace d termin ainsi par les sculptures de Richard Serra est un espace du parcours du mouvement chaque fois livr selon un point vue particulier Pour lui la perception est une donn e fondamentale qui d s lors qu elle est structur e par un objet se traduit en termes de permanence ce que Rosalind Krauss nomme transitivit et qu elle rattache une approche ph nom nologique de la perception 16 Cette transitivit ob it l existence d une tr
129. pr sence substantielle et fatale Le paganisme grec rejoint en cela le monoth isme biblique aussi bien que musulman Tous partent de la conviction qu un certain face face tue et que pour que la figuration soit possible il faut faire un sacrifice faire le deuil d une pr sence identificatoire 11 L tranget de cet aveu tient ce que l image ici est la fois puissante puisqu elle convoque l invisible et sans pouvoir sinon celui de d signer l absence de ce qu elle pr tend pouvoir saisir sans oser pourtant le faire Si cela vaut en effet pour l image tant qu ic ne religieuse et donc en tant qu instrument d une croyance est ce que cela peut encore valoir pour l image photographique l vidence oui si du moins l on s en tient par exemple ce qu en dit Roland Barthes La photographie ne dit pas forc ment ce qui n est plus mais seulement et s r ce qui a t Cette subtilit est d cisive Devant une photo la conscience ne prend pas n cessairement la voie nostalgique du souvenir combien de photographies sont hors du temps individuel mais pour toute photo existant au monde la voie de la certitude l essence de la photographie est de ratifier ce qu elle repr sente 2 Cette position essentialiste est en fait l affirmation d une croyance La th se barthienne est m me en fait un acte de foi Mais en quoi croit on lorsque l on accepte de r duire l image cette fonction de
130. puisse avoir des informations qui ne soient pas communicables par les moyens habituels de la communication et des informations qui ne soient pas des informations tourn es vers le pass c est dire dont le r le est de rassurer et de confirmer celui qui les re oit quele monde ne change pas mais des informations sur quelque chose de litt ralement non encore advenu que seule cette machine visionnaire qu est l artiste peut capter et produire Mais sans doute comme le remarque juste titre Philippe Sers le probl me est qu une telle position est au fond injustifiable Mais le plus grave est sans doute qu elle fait du monde une entit injustifiable qui trouble et contredit la position qui est la n tre aujourd hui savoir que rien ne peut et ne doit rester incommunicable c est dire que rien doit r sister sa transformation information Nous touchons l au paradoxe que peuvent incarner certaines images Elles ne sont pas tant des vecteurs d information que des gestes qui brisent la continuit de la transmission de l information Elles prennent en quelque sorte le r le jusqu ici assum par le texte Or c est autre chose que l on attend de l image que l on attend de l image c est bien qu elle nous attire nous pi ge dans et par sa magie magie dont l efficacit est tout enti re contenue dans le fait qu elle agit en nous sur le processus de la reconnaissance Ou pour parler avec Vil m Flusser c
131. qui crivait Et d o vient cet abjection de salet De que le monde n est pas encore constitu ou de ce que l homme qu une petite id e du monde et qu il veut ternellement la garder 22 Un tel art certes de nature profane n est plus de l ordre de la profanation il s agit plut t pour lui d un for age du r el qui implique tout autant d actes d actions que productions formelles et m mes picturales mais d plac s Quels sont ses caract res principaux C est un art r solument profane qui en un certain sens ne pr tend plus transgression Pour quoi Contrairement l interpr tation qu on en fait il ne vise pas rompre un interdit r gler ses comptes avec les canons d une esth tique pr c dente Il vise restituer Il s agit pour lui d atteindre au plus r el en se portant sur la limite du visible afin d exposer selon les mots Wajcman le socle d absence sur quoi repose le visible gt Pour cela il lui faut se d faire des oripeaux de la r alit ou des signes et des moyens d une interpr tation visualis e du visible d un plein de sens du regard Il lui faut aborder ce que Wajcman toujours nomme un manque voir de l objet dont notre d sir de voir serait le corr lat 23 Il crit En d finitive au regard des uvres de modernes il me semble donc justifi de les concevoir comme anim es positivement d un double d ficit une d fla
132. qui enferme contient et qui s pare du reste du monde soit un geste soit une information soit un signe Depuis la Bo te verte de Duchamp les artistes s vertuent mettre en bo te capturer dans l espace de l uvre les fragments de r el En fait il semble toujours avoir eu entre la question de l archive de la bo te et celle de l intention artistique une certaine d fiance presque naturelle comme si l artiste attir ce qui justement ne caract risait pas son activit s y rapportait de fa on ironique Marcel Duchamp trouve dans la Bo te verte un syst me d archivage et de gestation de son travail cette bo te est semblable un croche pied que l artiste ferait son intention pr sente avec le levier de ses intentions pass es les notes qu elle contient sont pour lui l cart n cessaire toute r alisation Il suffit pr sent pour les artistes d extraire d isoler d arracher d extirper d m ler de s parer qui pourra tre enferm ensuite dans cette bo te Il leur suffit d y d poser le moindre de leurs gestes de leurs actions de leurs habitudes pour qu ils puissent dire que ceux ci ne leurs appartiennent plus qu ils sont devenus le fruit d un classement d une archive d un ordre arbitraire Lib r de la lourde responsabilit de l intention artistique chacun y glisse le bulletin de son ali nation au monde C est vers les ann es 70 que le mod le de la boite noire prend
133. r doit conduire un d cha nement du n faste l encontre de son auteur et des siens ou bien une destin e exceptionnelle qui le s parera des vivants ordinaires Par son geste il est lui aussi devenu un tre tabou un impie et un criminel mais tout autant l un de ceux qui participent du monde sacr et en confirment la puissance s par e s paratrice Le h ros cette figure de la transgression dans le mythe tragique en Gr ce antique est menac de destruction car il a mis le monde en p ril il le menace de destruction Tout autant ce h ros est transfigur par son acte et devient l gal d un Dieu une puissance surhumaine La transgression n est donc point l abolition de ce qui est transgress mais sa plus ample confirmation compris dans l exp rience de la mal diction D fini de fa on profane l art de la transgression consiste savoir se porter sur une limite pour l enfreindre afin de jouer de ses potentialit s destructrices et re cr atrices voire restauratrices La transgression n est donc pas une mutation comme il peut s en produire dans le monde vivant naturel La mutation ne transgresse pas elle fait appara tre accidentellement et supprime par voie de cons quence sans qu il ait eu la moindre confirmation de ce qui dispara t La mutation provoque une substitution mais par un effacement et une extinction ce qui pr c dait La transgression n est pas non plus le r sultat d une voluti
134. r ils donnent penser 7 Passage est galement li a contrario la notion et au terme impasse Un passage ne peut pas en principe tre une impasse ni inversement une impasse un passage Dans une impasse on ne passe pas on se retrouve comme au fond d un sac ce qui est d sagr able surtout si vous tes poursuivi e par des malabars qui veulent vous faire go ter les joies probl matiques du passage tabac et c est la raison pour laquelle on peut d signer galement une impasse par l expression po tique de cul de sac Si passage et impasse s excluent logiquement le mot impassage gt devrait pas avoir de sens ni donc de raison d exister mais il est int ressant de remarquer qu il convient parfaitement aux inventions humoristiques l humour est l art de trouver des solutions quand il en pas l art des slep pasaze des impassages exemples collage o l on voit des hommes bien couverts sur banquise contemplant les rondeurs d une immense moiti de femme nue couch e sur le ventre dans ce cas a m me un cul de sac sans le sac situations catastrophiques auxquelles et Bernhard Blume confrontent tendresse et ironie dans pr sentation des st r otypes que nos cong n res v hiculent par William Wegman et Martin Parr Selon la formule de R gis Durand cit e par Florence Borel l artiste persiste dans sa voie car i
135. r navant la d finir ainsi isolation d un geste qui n est pas sans rappeler la notion d event 11 ch re au mouvement Fluxus encore les films d Andy Warhol r p tition de ce geste et surtout enregistrement de la totalit de l action par la cam ra Bref la bo te noire s expose dans une unit d action de lieu et de temps concentration d un fonctionnement au sein duquel il est alors envisageable d en faire surgir la fissure Cette nouvelle d finition de la bo te noire englobe donc les uvres de Bruce Nauman n en 1941 de Vito Acconci n en 1940 de Bill Viola n en 1951 et de Christian Boltanski n en 1944 Bruce Nauman se filme dans l intimit de son atelier Le cadrage est fixe et donne voir un corps dont l application effectuer une seule t che exalte toute la ma trise d une ivresse rebondir Bouncing in the Corner 1968 se pincer Pinch Neck 1968 jouer du violon Playing a Note on the Violin While I Walk around the Studio 1967 68 marcher Walking in an Exaggerated Manner Around the Perimeter of Square 1967 68 Vito Acconci au cours des ann es 1970 71 r alise de nombreuses actions dont la r p tition r sonne dans l absurde Pryings 1971 montre son obstination soulever de force les paupi res closes d une femme Conversions Part IT Insistence Adaptation Groundwork Display 1971 o il se dresse nu le p nis coinc entre ses jambes s effor ant de mettre l pr
136. r sente pour Bill Viola la possibilit d une destructuration devenant ainsi machine d r gl e impossible compteur du temps Information 1973 est issue d une erreur de connectique o il branche directement le signal de sortie du magn toscope sa ligne d entr e d routant ainsi l engin qui tente d enregistrer sa propre mission Dans la r it ration d une boucle c est une forme th orique du pr sent qui nous est propos e jet e comme l impossible circularit du temps Christian Boltanski lui imagine un pr sent toujours acquis dans l imm diatet d une repr sentation Ainsi la r alit n est vocatrice qu au travers du mod le mn monique qu on lui accorde Que ceux ci d livrent des attributs propres au medium telle la clart d un ciel due la sensibilit de la pellicule photographique ils sont automatiquement re us comme les seuls paradigmes nous reliant aux choses Les clich s sont donc l tat d une r alit id elle la manifestation d un pr sent toujours venir Les mod les varient naturellement suivant les poques et les classes sociales Le photographe amateur trouve certains de ses mod les dans la peinture impressionniste il ne produit que des images de bonheur de vacances remplies de beaux enfants qui jouent dans une nature idyllique On peut imaginer que le nombre croissant des images et l utilisation grandissante de la photographie finissent par transformer le rapport la r alit nous
137. r c est bien de cette mythologie romantique de la putr faction dont elle rel ve et qu elle c l bre sa fa on comme un long discours de fun railles sans doute au corps m me d fendant de l artiste Plus que d rosion des corps nous assistons leur putr faction dans ces photographies pourtant pudiques la r exhumation de toutes ces jeunes femmes et jeunes hommes fauch s dans la fleur de la jeunesse et de leur beaut Si belles leurs seins et ventres plantureux marqu s du sceau de la pierre tombale de sinistre m moire que St phane Diremszian se permet de retoucher lui du regard num ris et d licat afin de nous convier ce Voyage imaginaire dans le pass o des d cors transplant s ressuscitent ces traces mortes et glac es Gilles Verneret 4 BP SITIONS Xavier Lucchesi Exploration m canique Xavier Lucchesi est n 1959 Il vit et travaille Paris Dipl m de l Ecole de Photographie et Audiovisuel de Marseille en 1981 ce photographe sans appareil photo se d finit comme photoplasticien En effet depuis 1991 sa pratique photographique est troitement li e au m dium de la radiologie D tournant l imagerie m dicale de son r le de support d information et d interpr tation il lui attribue un statut artistique de repr sentation et de cr ation Usant de cette technique comme d un passage d un tat photographique un autre il joue des effets n gatif pos
138. ragon et Nadja comme Les Vases communicants sont les livres d un po te qui prend un plaisir sans cesse renouvel errer dans les rues de Paris en qu te de hasards objectifs D j Apollinaire Le Promeneur des deux rives et L on Paul Fargue Le Pi ton de Paris taient de tels promeneurs ainsi que le sera aussi Walter Benjamin philosophe po te qui offre notre r flexion son plaisir errer dans la pens e Le Livre des passages 2 Un passage est aussi une voie qui permet de franchir un obstacle par exemple une rivi re un est un passage ou un d troit ou une ouverture dans la banquise le Passage du Nord Ouest En ce sens les passages permettent d atteindre un ailleurs une autre rive un autre c t ce sens ils jouent un r le essentiel dans la po sie l art qui visent toujours atteindre et permettre d acc der une r alit invisible sup rieure un po te un artiste au sens o les deux termes sont identifi s est quelqu un qui cherche et trouve de tels passages qui font voir tout autrement le monde visible familier et cela est particuli rement sensible dans cette forme d art souvent po tique que peut tre la photographie 3 Contre toute logique le mot passage ne d signe pas l activit des passeurs marchandises prohib es des contrebandiers des paseraci et il ne d signe donc pas non plus l activit de traducteur qui rel ve souvent de ce genre de p
139. ratification du r el Rien ne peut emp cher que la photographie soit analogique mais en m me temps le no me de la photographie n est nullement dans l analogie trait qu elle partage avec toutes sortes de repr sentations Les r alistes dont je suis et dont j tais d j lorsque j affirmais que la Photographie tait une image sans code m me si c est vident des codes viennent en infl chir la lecture ne prennent pas du tout la photo pour une copie du r el mais pour une manation du r el pass une magie non un art d un point de vue ph nom nologique dans photographie le pouvoir d authentification prime le pouvoir de repr sentation 31 Donc on le voit pour Barthes la photographie a bien pour fonction de nous permettre de nous orienter dans la vie de nous permettre de prendre des d cisions puisqu elle tient sous sa coupe le pass et ceci elle le fait en toute transparence puisqu elle est elle m me comme acte pourrait on dire sans code c est dire imm diate sans m diation Elle est une sorte de doublet empirico transcendental de la conscience pourrait m me dire qu elle est jusqu un certain point la conscience ou du moins qu elle est la preuve que la conscience s invente pour se prouver qu elle existe ou exist Elle sert donc la conscience s orienter dans le taillis du r el ou du moins de r assurance pour la conscience C est une sorte de miroir dans
140. re temps d truits ou bien devenus m connaissables et l histoire appartient d sormais un pass r volu Cette impression est tr s nette dans suite de l histoire tourn e sept ans plus tard Wenders dans laquelle la ville et le sujet semblent lui chapper Cette suite porte le titre symbolique tous points de vue de Si loin si proche In weiter Ferne so Le paradis perdu Falk Haberkorn et Sven Johne sont eux aussi des chercheurs de traces Consid rant l extension de l Est l Union Europ enne voqu e un an auparavant et quinze ans apr s la chute du mur les deux jeunes photographes entreprirent voyage de cinq semaines travers Leur but tait de trouver des images de cette soci t en perp tuel bouleversement d envisager gr ce elles les circonstances sociales conomiques et psychologiques et de les transposer de fa on artistique Les deux jeunes gens dipl m s de la Hochschule f r Grafik und Buchkunst de Leipzig Haute Ecole de Graphisme et des techniques artistiques de l dition issus de l atelier de Timm Rautert d velopp rent alors leur propre forme de la photographie de voyage Haberkorn prit inlassablement des photographies travers les vitres des voitures en marche Ces clich s documentent la fa on d un roadmovie le chemin parcouru et sont fid les la tradition de la Street Photography Il rassembla 150 de ces prises de vue sous le titre rich
141. riptyque des photographes allemands Anna et Bernhard Blume intitul Sc ne m diumnistique 1986 est il plac dans une salle consacr e aux r cipients et pots pharmaceutiques de l H tel Dieu municipal aujourd hui disparu Les trois clich s montrent une m nag re aux prises avec les pi ces d un service th ayant manifestement d cid de lui chapper en fusant dans toutes les directions Dispos e devant cet ensemble de c ramiques v n rables l uvre fait assur ment sourire Ceci n affaiblit ni sa beaut plastique ni la mani re pertinente dont elle s adresse au spectateur et lui tend un miroir ironique Les photographes faisant appel au rire dans leur d marche hormis par le gag ou l anecdote ne sont pas si nombreux Depuis ses d buts en effet la prise de vue ob it des r gles et se conforme des usages plut t s rieux Elle r pond certaines demandes bien pr cises et d finies telles que fournir des documents garder une trace aider la science ou encore servir la cr ation L humour ne semble pas figurer au programme rares sont les textes l associant la photographie Plusieurs artistes dont les Blume misent franchement sur le comique Qu apporte t il leur recherche Peut il tre assimil une transgression Ces questions m ritent d tre pos es Apr s avoir d limit notre sujet nous effectuerons un rapide parcours historique d abord puis contemporain gr ce quatre uvres aujourd
142. rme en lui attribuant une valeur ou de nullit radicale Non seulement cette d marche vient jouer par rapport la valeur sociale de l art mais aussi par rapport ses contraintes propres de r alisation On atteindrait ici hypoth tiquement un point o il aurait plus ni interdits ni normes ni figures ni repr sentation ni non plus de formes organis es voire seulement une vertigineuse absence d objet et de limites quant aux actes de l art L art serait il alors parvenu au del de toute chose tangible et visible n tre plus que performance et affects un pur vouloir voire devenu l expression d une nergie d mat rialis e C est l atteindre un point de crise d une grande difficult pour la pens e et l esth tique Il est sans pr c dent dans l exp rience artistique depuis Renaissance et il met en crise le point de crise de la modernit par son redoublement r p tition au sein de la crise de la crise d une crise Pr cisons l abolition de la limite dans l art peut se poser sur deux plans qui d terminent tous deux l existence de l art D une part elle se pose sur celui du donner voir ou entendre de la monstration du repr sent qui tend d livrer compris minima quelque produit ou emp cher l exhibition et la r alisation de certains objets dans le circuit de l art D autre part elle se pose sur le plan du faire de l acte de r alisation qui tend lui
143. rrogation au prix d un loignement in vitable de la source originelle du cri de protestation et l lan nihiliste seule force qui pouvait ouvrir v ritablement la voie la nouveaut La photographie ceci d incontournable aujourd hui c est qu outre le fait d avoir envahi nos vies elle est investie d un r le particulier celui de servir de refuge nos affects Il se pourrait aussi que nous soyons contraint de dire qu elle les pi ge Comment nous pi ge l image photographique Elle nous pi ge ceci que la repr sentation qu elle nous propose du monde et de nous si l on peut faire une telle g n ralisation peut passer pour faire se rejoindre ce qui se passe en nous m me et ce qui se passe hors de nous Nous reconnaissons le monde travers elle ou des tats du monde bien s r mais ainsi nous les reconnaissons comme n tres c est dire comme manifestation de nos images int rieures Notre position face aux images photographiques tient aussi en ceci que chacun peut en faire et d ailleurs chacun fait Ainsi l appareil photo sert la fois r assurer l existence de chacun transformer les moments de la vie comme le dit encore Flusser en tats de chose Et d autre part les photographies elles comme surfaces signifiantes se voient servir dans le cadre de l usage priv miroir et donc aussi de moyen de r assurance psychique Cependant plus globalement elles forment une sorte de monde en
144. rs soi m me le modelage rigoureux de la subjectivit pour que le corps se transforme entre ses strictes limites temporelles en uvre d art d passant les r gles et le conformisme du gentil bourgeois L excellence de l art traditionnel est le r sultat du caract re de ses productions de l accumulation de chefs d uvres d objets consid r s pourvus de qualit s exemplaires tandis que l art moderne s appuie sur la transmutation r alis e l int rieur de l artiste sur les transformations que toute sa subjectivit puisse subir devenant ainsi excentrique explosif et unique Si la mort de Dieu est encore d bat mort de l art para t plus qu vidente fonction de ces deux nouvelles tendances esquiss es plus haut l histoire glorieuse de Leonard de Vinci Rembrandt Canova fusionnera soit avec l histoire de la philosophie comme semblait l entrevoir Val ry dans L onard et les philosophes soit avec celle du th tre Ciprian Va lcan 24 rare Horen e Borel Miroir Brassa Permer g Gerboud Verre Ce 2 Dophn Le Tr 5 Rotevin TES Daphn Le Sergent Bo te noire violence d une chute dans le r el Pour la compr hension d une cr ation dialectis e entre espace et temps Introduction quel mode de transgression pour l artiste contemporain dit altermondialiste Aujourd hui il nous semble
145. s galeries et mus es Un point commun les rassemble leur d marche est labor e r fl chie et plac e sous le signe du rire Tous ont suivi des tudes li es l image arts plastiques photographie ou journalisme Tr s inform s ils jouent sur la subversion des codes Le travail de Bernhard et Blume Allemands n s 1937 et 1935 s inscrit dans la tradition germanique du r cit photographique qui remonte aux ann es 20 et au d but des ann es 30 l ge d or de la presse illustr e Il lui donne un tour bien nouveau Apr s une double formation de peintre et de philosophe Bernhard Blume entreprend d utiliser la prise de vue comme moyen d analyser les rapports entre normalit et folie D s 1970 ses clich s montrent des sc nes de la vie quotidienne se d roulant dans un int rieur petit bourgeois allemand o il joue la plupart du temps avec sa femme Anna le r le fictif de Johannes Hegel 8 un nom qui ne rel ve du hasard L expression hyst rie de la normalit 9 peut qualifier ces images Le couple photographique lutte contre d tranges ph nom nes contrariant ses entreprises bien banales les pommes de terre s envolent Embrouille dans la cuisine 10 1985 les aliments deviennent projectiles Repas 1986 ou encore des vases blancs se livrent d infernales sarabandes a riennes Extase de vases 1987 au grand dam de notre h ros qui ne peut les ma triser Ces aventures se d
146. s et les interdits Ici la transgression nous renvoie la destin e de l artiste maudit souill de son acte ou la figure du rebelle proscrit subversif et visionnaire La transgression est alors encore de nature prom th enne l artiste est l inventeur d un monde nouveau d rob aux dieux aux pouvoirs aux lois obtuses et aux superstitions pieuses Il est un voleur de feu ainsi le nomme Rimbaud en r f rence au mythe grec Deuxi me cas transgresser c est encore exp rimenter aux limites d un impossible faire ou dire et qui expose un ordre sup rieur de l exp rience et de la vie cach et dissimul dans les rituels du sacr l exp rience d une souverainet Bataille crit Souverainet d signe le mouvement de violence libre et int rieurement d chirante qui anime la totalit se r sout en larmes extase et en clats de rire et r v le l impossible dans le rire ou les larmes 28 Ici l art franchit pour accomplir d truit pour r v ler en se sachant de nature religieuse d termin par la dialectique du profane et du sacr et fondateur d une mystique sans Dieu d un art festif et pa en qui se pose destructeur pour transfigurer l existence humaine tout enti re Du c t post moderne Premier cas sans qu il soit possible de le s parer nettement des deux pr c dents transgresser c est abolir la limite c est supprimer la r sistance de la limite de la fo
147. s outils ceux de la pens e ceux du langage En s incriminant soi m me outil l artiste semble reculer d un pas pour se tourner vers une pens e d avant le langage d avant les concepts d avant le temps o ceux ci d cidaient dans le r el ce qui est op rant et ce qui ne l est pas Il n est en effet plus question de l emprise d un mot sur une chose de la pertinence d une critique mais d un jeu dans lequel se d noue un mouvement qui para t sans fin Il r side au fond de cette bo te noire la promesse qu un jour l homme revienne une condition presque animale une conscience d un moi profond uni au monde dans un continuum Car comme l crit Georges Bataille dans Th orie de la religion l outil compris comme objet comme entit ext rieure au sujet est ce qui s pare la condition animale de la condition humaine 6 Finalement ce n est pas la bo te noire qui s pare notre corps du reste du monde mais l outil et son corollaire l objet la suite des artistes cherchons dans la vie les guillotines qui scinderont nos corps ou les chafauds qui disperseront nos organes afin de faire de l art ce qui r parera la trop grande distance du monde avec nous m me Niant toute expression de subjectivit la bofte noire se dresse tel une machine m canisme qui esp re se greffer directement sur le corps social tant elle croit abolir tous les outils inh rents la codification de l objet et du verbe Rabattant ainsi le corps
148. s photographiques internationales de Timisoara ont cons quent pour objet d explorer l volution en cours les mutations de diverses ordonnances que nous donnent voir les photographes que nous avons invit s Cosmin BUMBUT Beatrice MINDA Herv RABOT Eli LOTAR Denis PROTEOR Boris MIKHAILOV St phane DIREMSZIAN Michal MACKU Tom DRAHOS Samer MODHAD Evgen BAVCAR Ariane LOPEZ HUICI Xavier LUCCHESI Tamami MINAGAWA Daphn LE SERGENT Florence BOREL la s lection de l Agence France Presse de Bucarest et en contrepoint l hommage rendu Henri CARTIER BRESSON par Adrian CHIRA Alina BONDREA Andrei BUDESCU Lorand VAKARCS Radu CHINDRIS soit qu ils en fassent le constat soit qu ils contribuent par leur investissement de cr ateurs Les conf renciers invit s Emmanuel BRASSAT Daniela GOELLER Daphn LE SERGENT Jean Louis POITEVIN et Florence BOREL nous ont donn quelques uns des motifs et quelques unes des clefs de celle volution lors des journ es d ouverture de ces Secondes Rencontres ces propositions th oriques ont r pondu Ciprian VALCAN Ioseph KIRALY Calin STEGEREAN Marcel et Lucian Que tous en soient ici remerci s chaleureusement au nom des organisateurs 1 R gis DURAND Le Regard pensif Lieux et objets de la photographie Paris La Diff rence 1988 216 2 Jean Paul SARTRE in L F 3 Louis ARAGON Les Yeux d Elsa Pr face XVII 4 Roger CAILLOIS l Hom
149. s visuelles mais aussi par celles invisibles l il Bavcar con oit la photographie non comme une technique mais comme id e et s int resse donc ses origines conceptuelles Aveugle il ne fignole pas la perspective la lumi re qu il capte est naturelle il pose sa cam ra la hauteur de sa bouche et prend en photo les personnes avec lesquelles il parle 1 mesure avec ses mains la distance entre lui et son mod le quand l autofocus est absent Tout est retravaill de l int rieur sans rien ajouter ce qui se produit au moment o il d cide de d clencher sa prise de vue Au sein de l Institut d esth tique des arts contemporains Paris il se consacre depuis 1976 la r flexion autour du statut de l image mais aussi l esth tique en philosophie litt rature et po sie liant troitement ce travail de chercheur celui de photographe Evgen projet expositions programme partenaires Bumbut LOST CUITE St phane DAME Cosmin Bumbut est n en 1968 en Roumanie Dipl m du d partement Film Mern Photographie de l Acad mie Film Th tre de Bucarest en 1997 il est 52 0 51 aujourd hui unanimement reconnu et r compens pour son travail de photographe dans la mode et la publicit Dents En 2000 il fonde le groupe 7zile et MB recoit en 2003 le prix du meilleur livre d art de
150. sation de l objet uvre pu se voir caract ris e comme une volution de l art vers sa propre subversion un art du rejet de l art un anti art Il ne s est plus agi seulement de la subversion de la repr sentation des canons du go t et de la composition mais de ce qui allait tendre jusqu une esth tique de la disparition comme l crit encore P Virilio Une telle esth tique remettant en cause toute possibilit d art identifiable comme tel tait donc en son principe videmment transgressive De la sorte la transgression est devenue l preuve syst matique du franchissement voire la recherche des derni res fronti res de l interdit un id al en art de la transgression comme forme la production Ce faisant la transgression de nature Il ne s est plus seulement agi de choquer ou d exp rimenter sur les bords mais de travailler sur l abolition de la limite voire l abolition de la limite Pour comprendre cela il faut donc opposer et distinguer plusieurs figures de la transgression Je les dirai moderne et post moderne Du c t du moderne Premier cas transgresser c est choquer pour rompre pour renouveler pour manciper Il s agit de choquer la sensibilit et les croyances du public ou le go t de celui ci ce qui pr suppose l existence de normes fortes autour d un sacr de respect autour conceptions r gl es du go t admises et m connues sacralis es comme le sont les norme
151. sible par un au del du visible est celle de la voix et plus globalement de ce que depuis l on nomme dans le champ de l art contemporain le corps En fait le conflit oppose la radicalit du chaos au sens ou Dada utilise ce mot une raison fatigu e et morbide En fait cette opposition prend plusieurs formes ou plusieurs noms la raison contre la d raison les injonctions du cerveau droit face aux contr les du cerveau gauche les figures du moi contre celle de ses doubles imparfaits et impuissants les reflets des miroirs contre les accents d vastateurs d images que sont les mots En d autres termes ne cesse de d noncer l impuissance des images nous aider nous orienter dans la vie par le recours des mots qui eux m mes ont perdu pour l essentiel leur fonction mobilisatrice La r action Dada est bien passant par la violence de la voix et du corps de renvoyer les mots au non sens qui les hante et les images aux d formations qui les habitent Les mots servent acc l rer la d chirure des images d montrer leur insignifiantes malgr leurs pr tentions les images permettent de montrer que les mots n atteignent plus cette puissance mobilisatrice des nergies psychiques et vitales que les images elles parviennent elles malgr tout mobiliser La puissance de Dada c est bien de dire qu il n y l rien sauver La grandeur et la faiblesse de l art qui suivit ce fut d avoir poursuivi l inte
152. soi sur lequel nos regards cherchent et croient trouver les signes n cessaires notre orientation dans la for t sombre du monde Pourtant c est aussi du c t des artistes photographes des signes complexes que la photographie nous envoie C est effet souvent la d chirure ou les tensions qui se produisent l articulation texte image qui sont pr sent s incarn s mis en sc ne bref qui font l objet d un travail acharn Et les traces de ces d chirures forment elles m mes un r seau de signification qui tend contredire le jeu de r assurance psychique voqu pr c demment C est donc peut tre moins d un regard ou d un point de vue concret au moment de la prise de vue que d pendent les images et bien plut t d une position par rapport au monde Or une telle position se manifeste par la saisie implicite ou explicite de cette d chirure que nous voyons traverser encore notre poque entre texte et image 2 Transparentes visions Dans un long entretien accord Philippe Sers en 1971 par le dada ste Hans Richter on peut lire ceci Je peux vous rappeler une exp rience assez curieuse J tais professeur au City College l universit de la ville de New York de 1942 1956 et il y avait toujours un probl me quand je projetais des films abstraits nos premiers films d Eggeling de Ruttmann de moi Les tudiants taient un peu stup fi s Ils nous ont dit bien Mais qu est ce que vous voulez dire avec
153. sont des savants des hommes de l art avant que d tre des artistes Des adeptes de la thanatopraxie Tous deux semblent transgresser le sacr des fins scientifiques La sacralit d robe en son principe le corps mort l exhibition et toute manipulation profane Qu est ce qui les s pare Le sublime de l un voyez les photographies de son Cavalier de l Apocalypse la banalit formelle m dicale de l autre D un c t la profanation du sacr est encore l uvre afin d acc der l uvre de mort qu est aussi la vie l amour sensuel de l autre il a que la profanation du profane qui s expose L objectivit sans voile du regard Des millions d entre nous sont all s voir les corps morts statufi s plastin s de Von Hagens Berlin sans qu il ait l motif scandale La profanation du profane extermine la beaut sacrale du repr sent dans une exhibition infernale du corps r ifi de la chose morte qu est aussi un corps Est elle encore transgressive est ce encore de l art Quelque chose encore s pare ces deux savants artistes qui mat rialisent le mort et le repr sentent Entre eux deux il a eu l administration la mort en masse dans les camps nazis Cette mort on sait qu elle s est accompagn e d une volont concert e d effacement du meurtre et des victimes une strat gie d effacement de la mort m me Hors de la repr sentation et dans la figure de leur suppression se seront
154. spositifs esth tiques J L Nancy nous le rappelle l art chr tien m di val tait fond sur une c l bration du spirituel et de la parole qui enjoignait de tenir l image et le visible distance par souci sacraliser l existence 18 L image devait tre que sainte La Renaissance rompre avec cet interdit en d ployant une spiritualisation profane du visible dans l art Elle naturalise le sensible et expose le corps vivant sa r alit profane tout en ouvrant la perspective nouvelle d une sacralisation enchant e du profane C est d j l une transgression bien qu elle soit la profanation d un sacr religieux encore vivant Le Classicisme qu elle engendre et qui lui succ de va accro tre cette rupture en orientant le regard sur les choses et leur repr sentation vers une objectivation du visible vers un r alisme objectif et une figuration math matis e qui est ma trise et p n tration du monde per u et v cu Seconde transgression le r el devient perm able au regard aux sciences et aux techniques et se voit peu peu d lester de sa part enchanteresse et myst rieuse pour donner voir les choses et les ph nom nes et non plus la cr ation La nature se d voile La d sacralisation progresse et renverse l ancienne po tisation du monde acquise dans l humanisme contre la religion Le Baroque voudra reconduire la splendeur des choses et des corps une mystique sensuelle et spirituelle du monde il ne pourra qu
155. syst mes de langage et d expression d j tablis sans chercher n cessairement s en d faire Ce sont ici ceux de la modernit qui font r f rence L aussi on trouvera des l ments de ce n o classicisme de fid lit La troisi me est de transgresser l obligation la transgression de nier quasi obligation la d viance et au scandale qu elle est devenue en perdant peu peu cette valeur diff rence non dialectique que lui attribue Foucault partir de G Bataille Cette puissance de diff rentiation tait due la nouveaut ancienne fructueuse et insurg e archa que et actuelle intemporelle de la transgression du monde profane Pour Bataille l exp rience de la transgression tait bien de m ler l image le mythe la peinture le sacrifice et le rituel de montrer la religion et le sacr et donc l art comme des rapports la mort et l rotique Il fallait d apr s lui pouvoir dire le divin comme une exp rience vitale une extase tragique et furieuse du corps embras du corps sexu d bord par le d sir et la violence en une vide absence D une telle digression nous avons souvent oubli le sens faisant perdre aux d clarations de transgression leur puissance profane Conclusion Il faut r affirmer que l art est vivant hors de toute interpr tation esth tique de son sens hors de toute assignation de son tre des conduites obligatoires m me subversives socialement d
156. t de la r p tition l identique des uvres des ann es vingt jusqu aux ann es soixante ad nauseam La seconde est celle d une avanc e exp rimentale qui n cessite de se servir des nouvelles technologies pour r inventer ou capter l tat la sensibilit et du corps sans c der une fascination pour les proc d s de la technique ni pour l exploitation industrielle des r alisations Cela n est totalement nouveau mais l informatisation modifi les param tres de l art exp rimental Il s agit de d celer la structure nouvelle des perceptions du psychisme des mouvements du corps et des soci t s de la langue de la subjectivit depuis l explosion de la mutation informatique et des appareillages automatiques visualisation et de symbolisation ainsi que des industries culturelles Elle n est pas tourn e vers le postulat d une r volution formelle radicale de l art comme dans les ann es soixante mais vers l observation de la modification des formes de la perception et l existence et essaie d en d river une analyse de ses cons quences formelles art C est soit un art de l observation clinique et sophistiqu soit un art de l exp rimentation et d intervention En litt rature Bon et Morgi ve en danse L Marthouret photographie M Parr Cette orientation exp rimentale et ou d observation n cessite de pouvoir disposer de contraintes formelles fortes et de ma triser des
157. taire mais de fa on singuli re T moin privil gi de la soci t britannique dont il fait partie il poursuit une uvre caract ris e par un usage magistral et aveuglant de la couleur Il relate dans ses s ries l histoire des mauvais go ts habits int rieurs loisirs nourriture et des habitudes de la classe moyenne Parr s amuse montrer par exemple le tourisme mondial vers de grandes destinations comme les pyramides d Egypte et pingle avec d lices les foules bariol es affubl es de tous les accessoires les plus voyants casquettes fluos lunettes clinquantes appareils photos et t l phones portables en activit Cette uvre poss de des implications directement sociologiques Juxtapos es les tirages composent une extravagante collection un mus e des horreurs contemporaines les bestioles en peluches r pondent aux d bordants chariots de supermarch s Le rire le dispute une incr dulit vaguement g n e Ces artistes font rire parce qu ils osent la transgression Contrairement aux r cr ations photographiques fond es uniquement sur des exercices formels et visuels leurs travaux plastiquement tr s tiennent aussi compte d une avanc e des sciences humaines et portent un regard aigu sur le monde Tous s inscrivent dans la subversion en montrant leur connaissance des domaines vis s 12 Notre amusement d coule de ces images absurdes qui ne r pondent plus aux usages att
158. tion s mantique et un d ficit d image une d flation imaginaire 124 Une telle d flation pr sente un double visage dont les faces peuvent se voir reli es mais aussi dissoci es Ce qui selon lui explique qu elle peut la fois engendrer l inflation s mantique de l abstraction ou le mutisme de l hyperr alisme Un tel art dit il encore consiste fabriquer des objets avec l absence du visible avec du manque voir du dur avec un trou de l art avec du d chet du grand avec de l horreur 25 D un tel art peut on encore dire qu il soit une transgression une violation de l interdit Ne rel ve t il pas plut t d une volont de t moigner d interc der voire d une exigence br lante et sinc re de v rit Le t moignage serait il lui m me transgressif Car si transgression il y a elle serait ici dans la volont manifest e par l art de rendre minemment visible ce qui se d robe la visibilit Au del de toutes les censures 3 Principes d analyse de la transgression dans l art contemporain Encore une fois qu est ce que la transgression dans l art ou que la transgression l art L art peut tre transgression de quelque chose qui lui est ext rieur mais le plus souvent nous l avons dit il est d abord une transgression de l art lui m me et de ses r gles Transgresser dans l art c est franchir l interdiction conventionnelle d une invariance de la r gle ou de la forme des cano
159. tipliant l infini rend le monde d une certaine mani re la fois impraticable et insignifiant L exp rience artistique du moins celle qu voque par exemple Richter mais aussi tant d autres qui prend appui sur l exp rience individuelle vision semble le seul et ultime recours contre cet envahissement du monde par des images falsifi es Ce n est pas leur caract re transmissible communicationnel ou informationnel qui importe c est au contraire le fait que de telles images montrent qu il est toujours possible de recourir la puissance visionnaire celle qui perdure dans quelques strates oubli es de l h misph re droit de nos cerveaux pour s orienter dans le monde et tout cas pour mieux le comprendre De telles visions sont injustifiables en effet car elles sont absolument individuelle et non communicables par les mots et parce qu elles portent en elles toute la puissance magique de l image lorsqu elle n est pas prisonni re d une surface ou d un cran L enjeu pour la photographie se trouve sans doute dans ce dilemme rendre perceptible ou plut t r veiller en nous malgr tout sur des surfaces les processus psychiques par lesquels nous pouvons chacun avoir acc s aux visions transparentes L injustifiable appara t encore et toujours comme la r ponse la plus radicale l enlisement morbide et mortel dans l insignifiance dans lequel le monde des images techniques nous emporte Conclusion L ima
160. tout son essor s ins rant dans des d marches tr s diff rentes Dans Self portrait as a Fountain 1966 Bruce Nauman se photographie expulsant de sa bouche un mince filet d eau cristallisant dans ce geste une r f rence l objet l urinoir Duchamp Valie Export au d tour d un festival de cin ma enferme sa poitrine nue dans une bo te et invite les passants venir glisser leurs mains exp rimentant ainsi son cin ma elle en guerre contre l image d objet sexuel que attribue sur nos grands crans la femme und taskino Touch Cinema 1968 Christian Boltanski lui fime un homme qui tousse jusqu au malaise jusqu au sang L homme qui tousse 1969 Vito Acconci imagine le film Blindfolded catching 1970 o il tente d attraper une balle alors qu il a les yeux band s Gilbert amp George dans Singing Sculpture Underneath the Arches 1971 se tiennent face au public dans une immobilit toute statuaire et v tus dans la pur tradition du chic londonien saccadent leur geste la mani re des automates Chris Burden reste allong vingt deux jours dans un lit plac dans la salle d exposition vide de la galerie dans Bed Piece le lit de 1972 Bill Viola se filme en train de l cher une vitre In Version 1973 bien train de crier 1 1972 Quant Marina Abramovic dans une performance de 1975 elle danse sur des percussions africaines la t te couverte par un sac lui ob
161. ts qui d cident d arr ter les explications un certain point Je suppose d ailleurs que ce n est l qu un certain accord temporaire LA FILLE Mais quel rapport entre tout a et une bo te noire LE C est comme a que a s appelle Souvent les choses ne ressemblent pas leurs noms LA FILLE Je vois LE En fait c est une expression mise en circulation par les ing nieurs Lorsqu ils dessinent une machine tr s compliqu e ils utilisent une sorte de st nographie C est dire qu au lieu de dessiner les d tails ils mettent une bo te la place de tout un ensemble de parties et ils lui donnent le nom de la fonction que cet ensemble est cens remplir 4 D s lors la bo te noire sera consid r e pour nous comme qui t moigne d une chute d une trou e dans le r el comme ce qui a pour fonction de d stabiliser de perturber d engendrer de l h t rog ne dans les apparences lisses du parc d informations dont se nourrit l artiste altermondialiste D ailleurs la fonction est d apr s Roland Barthes l expression d un degr z ro de l criture elle branche la cr ation directement sur le social dans le projet que sa forme soit comprise dans son intention ou sa connotation plus que dans sa d notation ou dans l indexation qu elle fait du 51 2 jection depuis les ann es 70 de la bo te noire un espace fig et sculptural Dans l art la bo te est ce
162. u elles n cessitent un mode d emploi pour tre comprises Cette tymologie est clips e par le sens plus courant de b tise l aspect absurde de certaines propositions semble confirmer cette acception ce premier point vient la notion de burlesque qui renoue avec le fil de cet expos Le burlesque de techniques qui mettent le corps ou l objet l preuve et provoquent le rire inversions redoublements r p titions sans fin retournements d montages par exemple Ces proc d s et preuves s organisent en quelques grandes figures morales la vexation la punition la frustration l puisement Et s il y a quelque chose de cruel parfois dans le burlesque c est une cruaut saine et n cessaire revigorante car elle s en prend avant tout l esprit de s rieux et aux pompeuses baudruches qui l incarnent 18 Les artistes participant de cette appellation ne cherchent pas tous amuser leur ironie semble souvent grin ante Le burlesque se rapproche d ordinaire du comique gestuel il engage le corps de l artiste plus que le langage La r f rence au cin ma muet reste incontournable Deux facteurs le d terminent enfin Le renversement tout d abord intervient fr quemment dans sa mise en uvre utilisant les lois physiques de la gravit et de l apesanteur les lois sociales la comp tence et de l incomp tence les lois morales de la force et de la faiblesse ou e
163. unit d un processus celui que la philosophie nomm la crise du sujet la rationalit occidentale crise dont l art dans son ensemble lui aussi s est empar pour en d ployer peu peu toutes les cons quences La production artistique partir de ce moment 1870 1930 et apr s va cesser de ressembler quelque chose de pr tendre simuler la r alit ou illustrer le monde en se lib rant des contraintes de l ordre de la repr sentation et de ses formes contraintes qui ont constitu la modernit depuis le 17 si cle depuis l art classique N Heinich crit encore Les scandales de la modernit ont ceci de sp cifique qu ils ne touchent plus tant la nature de ce qui est repr sent qu la dimension proprement plastique de la figuration technique style picturalit 20 C est vrai mais comment penser que cette diffraction des figures et des modalit s du repr sent est indissociable de ce qui r cuse la repr sentation et que l un est la cons quence de l autre De plus objectera Heinich que ce n est pas l art qui est scandaleux Le scandale l obstacle ou le pi ge rencontr par l art c est l irruption d une exp rience et d une pens e du sensible et du r el qui provoque de telles ruptures Enfin la derni re de ces figures historiques de la transgression ce serait la transgression par l art de l art lui m me La figure d un art qui romprait ave
164. uration L art va affirmer un droit la transgression de ses propres formes par une exigence plus intense de fid lit au monde La repr sentation se voir d termin e par l id al d une repr sentation objective et mat rielle du per u en m me temps que par un objectivisme figuratif et figural qui tend r cuser l art lui m me comme exp rience intime sacralis e L exigence de ne dire et montrer que le seul r el tend enlever l art toute Valeur sacrale compris celle laquelle il pr tend encore et qu il a arrach la religion cette sacralisation du profane qui a commenc avec la Renaissance De mani re ultime elle aura engendr une vision religieuse de sous la forme enthousiaste du Romantisme ou pr cieuse de l art pour l art au 19 si cle Cette tension interne d un art en proie au modernisme le conduire l abandon du r alisme et l preuve d une formidable crise de la repr sentation Cette derni re vous le savez est contemporaine des catastrophes politiques et sociales du 202 si cle et en est ins parable D s lors on assiste un retour du sentiment tragique dans la conscience occidentale et la naissance d une esth tique m lant la jubilation et l effroi devant le r el du monde ou exhibant la futilit de l objet et des images La parodie la satire et la trag die vont devenir les trois Parques d un art du vingti me si cle r solument anti classique qui s loigne de l
165. us comme le peintre se concentrer sur un pinceau il peut tout entier s adonner au jeu avec son appareil Le travail qu il doit accomplir l apposition d une image sur une surface se fait automatiquement Ce qui dans l appareil tient de l outil est termin l homme ne s occupe plus que de l aspect ludique de l appareil Ainsi l appareil photo comporte deux programmes intimement li s l un am ne l appareil confectionner automatiquement des images et l autre permet au photographe de jouer 4 Ainsi c est donc bien la pr sence de l appareil entre le r el et le regard qui d termine l un et l autre L appareil les relie et les repousse ou les s pare L appareil est bien s r fabriqu par l homme mais les programmes qu il contient sont eux d veloppables l infini Comme on peut le constater chaque jour avec les appareils num riques les programmes sont de plus en plus complexes au point qu il faut apprendre ob ir programme avant m me de pouvoir faire une photographie ou alors s en remettre au programme automatique et donc bien laisser l appareil faire la photo notre place Mais c est sans doute travers cette autre r flexion que la radicalit de la position de Flusser est la plus sensible Le programme photographique doit tre riche sans quoi le jeu prendrait vite fin Les possibilit s qu il rec le doivent d passer la facult qu a le fonctionnaire les puiser autrement dit l
166. ux investissements ruineux r alis s par la nouvelle capitale Berlin Le parc de loisirs comme paradis perdu camouflant toutes les contradictions du mur devenant pour les photographes l all gorie d une transformation historique qui pas seulement affect la politique mondiale mais aussi la structure conomique et sociale de l Allemagne Dans la stratification avec laquelle les deux photographes abordent leur th me s exprime une forme du documentaire qui inclut volontairement la fiction et qui au lieu de cr er une proximit claire induit une distance d observation 7 Haberkorn et Sven Johne croient ni l image ni aux conventions iconographiques qui s y rattachent Ils utilisent souverainement la technique du montage et combinent des approches conceptuelles et empiriques travaillent tour tour avec des l ments r els et fictifs et ouvrent de cette mani re une espace d interpr tation La transgression et le passage des fronti res rendus possibles par la photographie para t tout d abord contradictoire tant donn que l image photographique par les contraintes mat rielles et techniques qu elle suppose suscite l id e de limite temporelle Dans la confrontation de diff rents t moignages photographiques relatifs l un des plus grands bouleversements politiques de l histoire r cente il appara t distinctement que l image photographique rend visible sous certaines conditions des structures tempor
167. v e film e et diffus e sur Internet L ordre de la repr sentation qui est aussi celui de la circulation des images para t aujourd hui hors normes transgressif mais d une transgression qui ne d tiendrait plus le principe de sa limite et qui de ce fait cesserait d tre une transgression pour devenir contamination quelconque et indiff rente par la chose rencontr e Nous sommes aliment s contin ment en images chocs horribles par une t l visualit omnipr sente perfor s par des intrusions dans l intime du corps exhib s au dehors en toutes nos parties comme cadavres plastin s confront s la mise en images de toute sexualit et sollicit s pour nous faire les spectateurs de pratiques spectacles transgressives parce qu anti intimes ou les personnes sont livr es au voyeurisme et l exhibition L ensemble de ces pratiques aura d ploy autour de nous une sorte obscurantisme de la surexposition comme le nomme tr s justement Virilio 27 H riti re d un si cle de ruptures de avec ses contraintes propres confront e la violence d territorialisante des syst mes de communication la tentation de l art contemporain dans la seconde moiti du 20 si cle aura t de rechercher l ultime rupture de tendre surench rir sur les pr c dentes afin de sauver sa libert formelle et son existence La ligne de fuite Une telle recherche situ e aux limites formelles de la figuration et de la r ali
168. vent de joindre l motion du cri primal et l interpr tation conceptuelle de leur cri Le choc et le chic le contact physique et l interpr tation th orique le raptus d extase dans la galerie et la pr face de Derrida dans la catalogue Projet d enfants g t s que des ready made la fonction d un alphabet formel R gis Debray Vie et mort de l image Paris d Gallimard coll Folio essais 1992 97 101 Une image dialectique est en quoi l Autrefois rencontre le Maintenant dans un clair pour former une constellation En d autres termes l image est la dialectique de l arr t Car tandis que la relation au pr sent est purement temporelle continue la relation de l Autrefois avec le Maintenant pr sent est dialectique ce n est pas quelque chose qui se d roule mais une image saccad e Walter Benjamin Paris Capitale du XIX si cle le livre des Passages Paris d du Cerf 2002 479 11 Olivier Lussac nous rappelle que l event est la plus petite unit l mentaire d finie par Dick Higgins comme unit minimale dans une uvre d art ou dans une performance dans musique Olivier Lussac Happening Fluxus Paris d de L Harmattan coll Arts et Sciences de l art 2004 12 Entretien de Bruce Nauman avec Michele de Angelus Bruce Nauman image texte 1966 96 catalogue d exposition Paris d du Centre Georges Pompidou 1996 122 13 V
169. vent une activit tendanciellement transgressive Elle se s pare du dogme le r cuse fait obstacle Elle prend la libert de penser quelque chose autrement dans l lan d un scepticisme d une suspension du jugement qui permet la critique Pour autant la philosophie n est pas n cessairement subversive elle ne vise pas un renversement de l ordre mais plut t autrement en lui restituant ses principes m connus Et si ordre renverser il a c est parce que celui ci lui appara t fallacieux erron injuste inexact voire d viant c est dire en v rit d sordre et illusion C est dans la perspective restauratrice d un acc s plus aigu la chose m me que la philosophie met en doute et r cuse Elle vise rendre l exp rience v cue plus juste distincte de l erreur et de l illusoire voire du mal Mais philosophie certes activit transgressive par elle m me incr dulit transgression du r gne de l opinion et de l ob issance servile ne proc de jamais d une transgression de la philosophie Pour la philosophie est transgression tout abandon de la discussion toute rupture du pacte implicite de rationalit li l change de paroles et d arguments pour lui substituer une violence contre la v rit et les personnes qui en t moignent ou l exigent Une telle transgression est constitu e par un refus du discours et de l change argumentatif dans l intention de les supprimer Or une telle violence
170. vues an anties des millions de vies Corps objets vides insaisissables dans la suppression de leur tre chass s de leur mort De cela Von Hagens n est pas le t moin il ne peut rien en savoir Il ne transgresse rien il peut se d clarer artiste c est possible Il fabrique la monstration fig e de la mort absente Il ignore le sacr et son retrait ni respect ni transgression et en simule l exhibition Il n est pas le seul la foule des humains se presse autour des morts mais de quels morts Nous sommes l sur une fronti re mais quelle fronti re Est ce que nous la connaissons Vous le savez la nouveaut de l art n est plus aujourd hui la question des formes Elle n est plus d pendante du jeu de l opposition d un mode formel un autre avec lequel l art devrait rompre L clectisme actuel l incroyable comparution des styles des supports des genres des pratiques de production des moyens des mat riaux des poques d inspiration l h t ronomie du jeu des r f rences l impossible pluralit des suggestions n impliquent plus des antagonismes exclusifs Ils ne sont plus qu entre les uvres et les travaux pris dans leur singularit Cela devrait contribuer l affaiblissement d un art pr tendument justifi par un id al simplifi et caricatural de la transgression Pour conclure il me para t que la transgression n est plus tout fait la question de l art Qu il y ait de la transgression dans l art c est entendu L art
171. yse des couples th oriques fondamentaux nature et artifice r alit et repr sentation Fauna est le titre du livre r alis conjointement entre 1985 et 1990 avec Pere Formiguera crivain et auteur des textes Chaque article de ce bestiaire imaginaire consiste en une vue compl t e de croquis et de notes explicatives Par exemple un commentaire savant d butant par les mots On aurait ainsi observ en 1944 au fin fond de la for t amazonienne ce singe volant consid r comme un demi dieu par les tribus voisines gt accompagne t il l effigie du Cercopithecus icarocornu 1986 L preuve montre une b te inconnue mais en apparence bien vivante et ins r e dans son milieu naturel Il s agit bien s r d un trucage r alis partir de plusieurs n gatifs Fontcuberta fabrique quantit d images pseudo documentaires divertissantes et belles qui constituent un univers en soi et apportent une r flexion sur l enjeu proprement plastique du clich Merveilleusement r alis es elles tranchent avec le s rieux cultiv par nombre d artistes dans les ann es 70 et 80 Les l gendes au jargon savoureux ajoutent l effet comique Le tout subvertit de mani re plaisante la relation entre photographie et savoir scientifique Martin Parr Anglais n en 1952 nous pr sente une plan te mal en point et satur e de coloris voyants Son travail s inscrit d lib r ment dans le courant de la photographie documen

POLYPTYQUE 2 - TK-21

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