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1. la cr ation d entreprise D s le milieu des ann es 70 celle ci observe dans un contexte de crise conomique pr sent s et fortement promus comme LA solution au ch mage de masse les dispositifs d aide la cr ation d entreprise individuelle se succ dent C est l poque o Raymond Barre alors Premier ministre lance aux ch meurs Si vous ne trouvez pas d emploi cr ez le Trente cinq ans plus tard gratifi s d un tout nouveau statut d auto entrepreneurs les m mes ch meurs ou leurs enfants entendront les m mes discours Bost cesse d y croire tr s vite Pour elle il est clair que le seul effet court terme perceptible et souhait par les pouvoirs publics est la baisse du taux de ch mage en lien avec le nombre de cr ation d entreprises individuelles Et peu importe si cette politique a des cons quences d sastreuses pour bon nombre des ch meurs cr ateurs qui se laissent convaincre engagent leur patrimoine personnel pour obtenir un pr t leur business plan en poche et se retrouvent finalement en faillite sans ressource et priv s de droits sociaux A rebours de tous les discours dominants Bost s aper oit aussi que beaucoup de ces apprentis entrepreneurs ne r vent absolument pas de cr er une soci t qui leur appartient Ils n aspirent pas devenir patron mais veulent avant tout cr er une activit bas e sur leur savoir faire leur tale2. re collective par d lib ration entre gaux tout le contraire d une gouvernance actionnariale o chaque investisseur dispose d un nombre de voix proportionnel son portefeuille de titres UNE ALCHIMIE SUBTILE Comme on le voit partir de ces deux exemples les innovations que proposent des structures comme SMart ou les Coop ratives d Activit s et d Emploi ont une dimension conomique sociale mais aussi politique Elles modifient l espace commun dans ces trois dimensions facilitant l existence de nombreux acteurs individuels ou collectifs En particulier les CAE qui recourent un mod le coop ratif profond ment ancr dans l histoire ouvri re r activent une m moire f conde par exemple celle de transitions d mocratiques r ussies au sein de nombreuses entreprises occup es par leurs travailleurs et ou reprises en autogestion Pour autant ces initiatives constituent elles l alpha et l omega de l innovation politique et sociale Evidemment non D une part l histoire des CAE montre qu aucune structure de ce type m me inscrite dans l conomie sociale m me coop rative n est l abri d une r cup ration Et d s lors que depuis peu l Union Europ enne elle m me se met subsidier l conomie sociale on peut s attendre une certaine instrumentalisation du secteur par des acteurs opportunistes Il s exporte en Belgique d s 1999 moyennant certaines adaptations Voir l article tr
3. 14 A cet gard la r flexion sur le revenu de base et le salaire vie pour tous d coupl s de toute activit professionnelle peut appara tre comme un chantier beaucoup plus novateur en mati re de refondation d mocratique LE PR DATEUR ET LE COOP RATEUR Publi sous licence Creative Commons Avec le soutien de la F d ration Wallonie Bruxelles Q M art
4. instant sans effet du moins chez nous la col re gronde les analyses foisonnent mais les victoires concr tes se font attendre UNE RECHERCHE ACTION Cela fait dire certains que l on fait fausse route en s attachant ce qui a t perdu en s acharnant par exemple d fendre les derniers vestiges d un mode de production et d un mod le de s curit sociale d pass s Les r ponses collectives labor es au XIX si cle les syndicats la protection sociale li e au salariat ne sont plus adapt es au contexte ne sont plus m me de prot ger des personnes qui sortent du cadre du salariat continu Dans cette perspective la restauration de la d mocratie conomique et de la s curit sociale pour commencer par elles doit emprunter d autres voies I s agit toujours de r inventer un certain mod le de l agir collectif mais en utilisant de mani re pragmatique le cadre en place les solutions mergent alors d exp riences men es l int rieur m me de ce cadre en suivant une m thode essentielle aux exp riences d conomie sociale la recherche action Ainsi quand certains acteurs de terrain ont des besoins sp cifiques qui ne sont pas ou plus rencon tr s par les dispositifs l gaux il arrive qu ils d veloppent des initiatives novatrices Celles ci peuvent 3 LA MANUFACTURE COOPERATIVE Faire soci t le choix des coop ratives 2014 p 27 4 Faire soci t p 159 5 Faire
5. partisans de l une ont certainement beaucoup apprendre des partisans de l autre Au fond dissoudre la comp tition dans la coop ration rel ve et rel vera toujours d une alchimie subtile Toute personne lucide en conviendra pour finir le pr dateur et le coop rateur cohabitent tout moment en chacun de nous STEVE BOTTACIN Juin 2015 SOURCES ET RESSOURCES Elisabeth BOST Aux entreprenants associ s La coop rative d activit s et d emploi Ed Repas Valence 2011 LA MANUFACTURE COOPERATIVE Faire soci t le choix des coop ratives Ed du Croquant Belle combe en B avril 2014 Fr d rique KONSTANTATOS Les coop ratives d activit SAW B Analyse ao t 2012 Marie Christine BUREAU et Antonella CORSANI Les coop ratives d activit et d emploi pratiques d innovation institutionnelle Revue Fran aise de Socio Economie Ed La D couverte 2015 POUR LA SOLIDARITE et SMART Economie sociale secteur culturel et cr atif Vers une nouvelle forme d entrepreneuriat social en Wallonie PLS cahier n 34 mai 2015 Carmelo VIRONE Le Comptoir le pouvoir du collectif APMC SmartBe Analyse janvier 2013 V BARTHOLOME P BOSMANS et al Coop rative mode d emploi Febecoop 2012 Willy HANSON 2012 une ann e internationale des coop ratives en demi teinte en Belgique IHOES Seraing Analyse n 106 d cembre 2012 FRIOT Emanciper le travail Entretiens avec Patrick Zech La Dispute 2014
6. s complet de F KONSTANTATOS Les coop ratives d activit SAW B ao t 2012 12 Pour une description d taill e du fonctionnement d une CAE voir F KONSTANTATOS Op cit 13 Voir le cahier con u par Pour la solidarit et SMart Economie sociale secteur culturel et cr atif Vers une nouvelle forme d entrepre neuriat social en Wallonie Bruxelles mai 2015 LE PR DATEUR ET LE COOP RATEUR Publi sous licence Creative Commons Avec le soutien de la F d ration Wallonie Bruxelles Q M art D autre part un mod le de soci t commerciale ce que reste une coop rative n est pas quoi qu on en dise un mod le de soci t Toute entreprise ayant d velopp une structure innovante peut tre tent e de prosp rer l ombre de cette structure en cultivant l entre soi sans plus s interroger sur la part de la soci t qui n a pas acc s la structure et est exclue de son fonds de commerce uvrer pour la d mocratie ne se r duit pas d velopper des outils ing nieux pour des entrepreneurs avis s fussent ils anim s d un sens aigu du collectif En somme l urgence reste de sortir de l id ologie du chacun pour soi Pour y parvenir certains continueront d emprunter la voie de la mobilisation politique traditionnelle D autres pr f reront porter des innovations entrepreneuriales audacieuses issues de recherches actions gt men es sur le terrain Les deux options ont leur pertinence Elles ne s opposent d ailleurs pas et les
7. soci t p 18 LE PR DATEUR ET LE COOP RATEUR Publi sous licence Creative Commons Avec le soutien de la F d ration Wallonie Bruxelles Q M art prendre une place importante dans le paysage institutionnel pr cis ment parce qu elles r pondent une demande jusque l ignor e Dans le meilleur des cas l innovation renouvelle les repr sentations de ce qui est possible Parfois m me elle modifie en retour le contexte initial y compris sur le plan r glementaire ou juridique En Belgique par exemple plusieurs obligations l gales et administratives constituaient un casse t te pour les artistes intermittents Cela a conduit des entrepreneurs innovants cr er un service de gestion des prestations artistiques au sein d une structure in dite SMart Celle ci a contribu faciliter puis am liorer la couverture sociale des artistes avant de s imposer comme un v hicule incontournable pour les intermittents de diff rents secteurs Au fil d une recherche action rebondissements non sans frictions avec d autres acteurs le mod le SMart n a pas seulement prosp r financi rement il a contribu documenter une situation critique et la faire voluer en Belgique et en Europe VERS L ENTREPRISE PARTAG E C est un chemin semblable qu a suivi en France le mod le des Coop ratives d Activit s et d Emploi formalis sous l impulsion d Elisabeth Bost une sp cialiste de l accompagnement
8. Accord de Gouvernement belge pr voit de mettre en place un compte carri re qui permette aux travail leurs d accumuler du temps et ou une r mun ration qu ils pourront ensuite utiliser pour interrompre temporairement leur carri re pour assurer la transition entre deux emplois en compl ment de l allocation de ch mage ou pour compl ter leur pension l gale Accord de Gouvernement 9 octobre 2014 p 11 Sur le concept de droits rechargeables voir la r gle du m me nom introduite dans l assurance ch mage fran aise en octobre 2014 et r cemment modifi e http www unedic org nouvelle convention droits rechargeables LE PR DATEUR ET LE COOP RATEUR Publi sous licence Creative Commons Avec le soutien de la F d ration Wallonie Bruxelles Q M art On assiste alors la r surgence de relations qu on pourrait qualifier de f odales au sens o une des parties est concr tement inf od e l autre le salari pr caire ses employeurs le ch meur son organisme de contr le et le travailleur ind pendant lui m me dans une logique d auto exploitation f roce et d sesp r e Bien que les discours et les repr sentations classiques les opposent bien que chacun persiste voir dans l autre un privil gi qui s ignore ch meurs salari s modestes et petits ind pendants finissent par constituer un seul et m me pr cariat Tous partagent la m me ins curit les m mes peurs du manque d argen
9. Le pr dateur et le coop rateur L id ologie ultra lib rale du chacun pour soi ravage les formes collectives de vie et de travail Comment se soustraire son emprise et refonder la d mocratie dans l espace conomique et politique Pour certains cela passe par des innovations entrepreneuriales audacieuses issues de recherches actions de terrain Ces innovations r pondent des besoins sp cifiques non pris en compte proposent des solutions la pr carisation des parcours professionnels m lant autonomie et s curit M me s ils peuvent d concerter ces projets ont une r elle dimension politique Il est bon de les suivre et de les tudier de pr s sans a priori mais aussi sans na vet car naturellement le chemin de lEnfer ultra lib ral est pav de bonnes inventions La gestion de la crise financi re de 2008 par les gouvernements notamment ceux de la Zone Euro a consist sauver des banques insolvables en s endettant leur place aupr s d elles Depuis lors jug s trop d pensiers les Etats s chinent rembourser ces dr les de cr ances en vidant m thodiquement les budgets publics Ces choix politiques pr cipitent notamment le d mant lement des m canismes collectifs de s curit sociale con us apr s 1945 D sormais qu il s agisse de soins de sant d assurance ch mage ou de pension place aux comptes ou aux droits rechargeables individuels chacun de se const
10. atut d entrepreneur salari Concr tement au sein d une telle struc ture chaque porteur de projets cr e et apprend g rer en toute autonomie son activit comme un authentique entrepreneur ind pendant Il facture sa prestation au nom de la soci t comme si c tait la sienne et celle ci lui restitue une fraction des sommes factur es sous forme de salaire comme un employeur classique Alors que deux autres fractions r tribuent les services de la CAE et alimentent ses fonds propres les r serves impartageables une derni re constitue les dividendes vers s aux coop rateurs Parmi ces coop rateurs se trouve g n ralement le porteur de projets lui m me Dans ce cas la m me personne est donc la fois entrepreneur autonome coop rateur et salari de la CAE Une autre sp cificit de la CAE est que les entrepreneurs qui s y trouvent rassembl s sont actifs dans des secteurs extr mement vari s Cela favorise entre eux diverses collaborations nourries aussi par leurs rapports r guliers de co dirigeants de la soci t En effet le choix de constituer entreprise en coop rative a d importantes implications en mati re de gouvernance si chaque coop rateur contribue au capital par un apport financier le volume de cet apport n a pas d influence ors des votes Ceux ci sont tous r gis par le principe une personne une voix La production de la soci t est donc g r e de mani
11. ituer son capital aliment en cash ou en points au prorata de ses seules r mun rations Ce mod le tend vers une r gle simple et sans appel sans emploi point de droit s En cons quence dans nos conomies r put es avanc es le march de l emploi devient le lieu de toutes les rivalit s et de toutes les violences une ar ne surpeupl e o se joue le pr sent mais aussi l avenir de chacun Chacun pour soi bien entendu conform ment au projet ultra lib ral et son id al d Homo conomicus uniquement pr occup de maximiser ses gains EXTENSION DU DOMAINE DE L IMPUISSANCE Avec ou sans emploi l individu se retrouve donc isol fragilis de toutes parts Dans ce contexte anxiog ne plus rien ne s oppose une d r gulation acc l r e des pratiques d embauche et de travail Avec le concours et la b n diction de l Etat dans une qu te sans fin de l avantage comp titif et ou de la marge budg taire les contrats atypiques et pr caires se multiplient l intermittence se g n ralise les carri res discontinues deviennent la r gle En Belgique la situation se complique du fait d une r forme institutionnelle de grande ampleur vot e au c ur m me de la crise conomique la Sixi me r forme de l Etat Celle ci modifie en profondeur le fonctionnement et les ressources des R gions et Communaut s annon ant d autres ajustements budg taires potentiellement douloureux 2 Par exemple le r cent
12. nt et pouvoir en vivre 0 D o l id e de rompre avec l accompagnement la cr ation d entreprise individuelle pour concevoir une sorte de couveuse d entreprises am lior e cesser de former des entrepreneurs solitaires en s rie pour permettre des porteurs de projets d apprendre entreprendre au sein d une structure solide qu ils pourront ensuite rejoindre faire vivre et voluer ensemble une entreprise partag e 6 Lire Elisabeth BOST Aux entreprenants associ s La coop rative d activit s et d emploi Ed REPAS 2011 7 E BOST p 9 C est moi qui souligne 8 E BOST p 72 9 E BOST p 9 10 E BOST p 87 LE PR DATEUR ET LE COOP RATEUR Publi sous licence Creative Commons Avec le soutien de la F d ration Wallonie Bruxelles Q M art ENTREPRENEUR SALARI COOP RATEUR La longue recherche action d Elisabeth Bost aboutit en 1995 la cr ation de la premi re Coop rative d Activit s et d Emploi CAE Vingt ans plus tard le mod le a largement essaim et la recherche action se poursuit regroup es au sein du r seau Coop rer pour entreprendre de nombreuses CAE certaines de grande taille comme Oxalis ou Coopaname continuent d explorer cette alternative la cr ation d entreprise individuelle et au march de l emploi Car la principale originalit d une CAE tient au fait qu elle permet d exercer n importe quelle activit sous le st
13. t du d classement et finalement la m me impuissance PR CAIRES DE TOUS LES PAYS Comment reprendre la main Comment se soustraire cet ordre utra lib ral mortif re sans verser dans un ordre collectiviste Peut on concevoir un d passement de ces deux syst mes o les valeurs d autonomie et de s curit ne seraient plus contradictoires et o seraient restaur es des pratiques d mocratiques dignes de ce nom Car c est bien la d mocratie conomique et politique qui constitue aujourd hui l enjeu central Pas seulement pour conserver le droit d lire ponctuellement un dirigeant plut t qu un autre Pas davantage pour se complaire dans des activit s participatives de pacotille Mais pour revendiquer sa part dans les prises de d cisions qui engagent la soci t dont on fait partie et assumer sa part de responsabilit quant aux cons quences de ses d cisions Or cette reconqu te d mocratique est en panne Dans l espace social comme dans l entreprise les pr caires ne parviennent pas s unir loin s en faut Cela tient entre autres la persistance de vieux clivages dont celui entre salari s et entrepreneurs l inertie de grands corps constitu s dont les f d rations patronales et les syndicats ainsi qu la fragmentation du pr cariat chacun luttant d abord sur son terrain Quant l mergence de plusieurs collectifs et mouvements dits citoyens par ailleurs dynamiques et inventifs elle reste pour l
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