Scions... travaillait autrement,
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1. des ph nom nes s est d velopp e plus tardi vement qui a fait son deuil d une solution purement m canique et conomique croissance revenue emplois retrouv s manant d une pl iade de chercheurs et d analystes dont pas mal de sp cia listes de sciences humaines elle admet qu il faut trouver d autres formules que le travail d sormais ne sera plus v cu comme avant qu il faut accepter les volutions irr versibles les int grer nos fa ons d aborder les probl mes et y adapter les modalit s d un nou veau type de positionnement du travail En un mot il faut travailler autrement Cette optique tait tr s clairement celle du rapport de 1995 de la commission sur le travail du Commissariat g n ral du Plan dont le pr sident Jean Boissonnat avait justement titr la pr face 6 Guy Roustang Emploi trois demi v rit s de la pens e unique Le Monde du 3 avril 1996 Pour une analyse plus g n rale son ouvrage La D mocratie au risque du march Descl e de Brouwer 2002 Travailler autrement Ce n est pas le travail qui manque cri vait il C est nous qui manquons de clairvoyance pour comprendre qu il est en train de changer radicalement et qui n avons pas assez d imagination pour l organiser autrement Dans vingt ans selon ce que nous aurons fait ou non la France comptera toujours plusieurs millions de ch meurs ou les Fran ais travailleront diff remment Pa2. y est donc peut tre pas pour grand chose sans doute faut il chercher ailleurs C est dire dans ce que nous faisions ensemble l poque 13 Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r 14 Scout un jour Depuis l ge de dix ans mes parents m avaient inscrit dans un mou vement de scoutisme li la paroisse protestante de laquelle nous d pendions C est l que j ai rencontr successivement tous ceux qui formeront le noyau initial de l aventure d Ambiance Bois Le scoutisme que j ai ainsi v cu durant une dizaine d ann es deve nant par la suite responsable dans ce mouvement n a rien voir avec la caricature qu on en dresse souvent et moi le premier Dans le scoutisme et cela tait vrai l int rieur m me du scoutisme unioniste auquel j appartenais on trouve le meilleur et le pire Le pire uniforme strict chaussettes blanches et chapeaux 4 bosses confessionnalisation affich e qui manifeste une affiliation cl ricale activit s d su tes hi rarchie parfois carr ment paramili taire organisation non mixte qui entretient une mystique de l hom me et de la femme assez r trograde rituels archa ques aux relents vaguement mar chalistes Tout cela dont on ne peut nier lexis tence nous ne l avons pas connu et nous crachions dessus Notre scoutisme nous tait bien plus libertaire L habit relevait plus de l accoutrement baba que de l uniforme nos responsabl
3. Lulek Quand l entreprise apprend vivre Charles L opold Mayer 2002 Voir aussi La Rete di Lilliput Alleanze obiettivi strategie Editrice Missionaria Italiana Bologne 2002 Travailler autrement Travailler et produire autrement th me central de l ouvrage est une ambition commune un assez grand nombre d initiatives du socialisme utopique du XIX si cle l conomie sociale et solidaire actuelle J ai analys ailleurs les ambigu t s de ces projets de tiers secteur et d nonc les d rives possibles de l associationnisme sans principe Le cocktail dit polanyien trois ingr dients de l conomie plurielle redistribution par l tat r ciprocit par le don et change mon taire par le march peut donner naissance toutes sortes de denr es du paternalisme patronal chr tien renou vel sous le label de l entreprise citoyenne jusqu la sous traitance des services par des associ s auto et sur exploit s Dans tous les cas de d voiement l autre monde possible qu il s agisse d un autre d veloppement ou d une autre mondialisation se trouve tellement dans celui ci que la compatibilit des deux mondes aboutit m me leur compl mentarit Quel est le sens alors du travailler autrement entre religion du travail et l horizon utopique soixante huitard du ne travaillez jamais Pour appeler une pr sentation du beau film de Pierre Carles Danger Travail
4. mais nous serons obli g s de poser des questions fondamentales celles du sens de la vie et d une nouvelle cul ture celle d une organisation qui ne soit ni contraignante ni anarchique l ouverture d un champ d une nouvelle cr ativit L homme a besoin de s int resser quelque chose et c est de manque d int r t que nous crevons aujourd hui Cet homme en g n ral trouvera sa forme d expression et la concr tisation de ses d sirs Ce ne sera peut tre pas beau ce ne sera peut tre pas lev ni efficace ce sera Lui Ce que nous avons perdu Ellul Changer de r volution cit par Jean Luc Porquet in Jacques Ellul l homme qui avait presque tout pr vu Le Cherche midi 2003 p 212 213 Entretien avec Jacques Ellul Patrick Chastenet La Table ronde 1994 p 342 vivre Faux la Montagne sur le site d Ambiance Bois Cette convi vialit en marche vers la soci t de d croissance sereine n est jamais d finitivement acquise c est une lutte permanente pour viter que les compromis pratiques ne deviennent des compromissions de la pens e et de l me Le danger de la plupart des initiatives alterna tives est en effet de se cantonner dans le cr neau qu elles ont trou v au d part au lieu de travailler la construction et au renforce ment d un ensemble plus vaste L entreprise alternative vit ou survit dans un milieu qui est et doit tre diff rent du march mondialis
5. pied ou en stop en g rant un petit budget qui devait nous permettre de nous nourrir et en cher chant le couchage chez l habitant ou dans une colonie de vacances de gar ons qui ne comprenaient pas comment trois filles et quatre gar ons de leur ge pouvaient circuler tous seuls en toute libert C est ainsi qu 14 ans on d cidait de faire un cirque et on appre nait des num ros pr parait des tourn es et partait avec carrioles cheval et v los dans les villages du P rigord Qu 15 ans on se construisait des cano s pour descendre la Dordogne pendant l t Qu 16 ans on passait trois semaines de randonn e en v lo en bande sans adultes responsables de toute notre organisation On ne savait pas que tout cela s appelait la p dagogie du projet que les forums o nous discutions et d cidions parfois dans une parfai te anarchie relevaient d un apprentissage de la d mocratie que la confiance que nous faisaient les adultes en fait des jeunes gens peine plus g s que nous tait un principe d ducation Voil pour le meilleur du scoutisme Je ne raconte pas tout cela pour le plaisir des souvenirs d adoles cence mais parce que sans doute a germ l une grande partie des d sirs qui plus tard nous aiguillonn rent Parce que sans nous en rendre compte ces ann es nous ont fa onn s Parce que ces aven tures juv niles nous ont donn envie de continuer une fois adultes
6. C est ce milieu porteur dissident qu il faut d finir prot ger entrete nir renforcer et d velopper par la r sistance Plut t que de se battre d sesp r ment pour conserver son cr neau au sein du march mondial il faut militer pour largir et approfondir une v ritable soci t autonome en marge de l conomie dominante Le march mondialis avec sa concurrence acharn e et le plus sou vent d loyale n est pas l univers o se meut et o doit se mouvoir l organisation alternative Elle doit rechercher une v ritable d mo cratie associative pour d boucher sur une soci t autonome Une cha ne de complicit doit lier toutes les parties Comme dans l in formel africain nourrir le r seau des reli s est la base de la r us site L largissement et l approfondissement du tissu porteur sont le secret de la r ussite et doit tre le souci premier de ses initiatives C est cette coh rence qui repr sente une v ritable alternative au syst me Travailler renforcer la construction des autres mondes possibles passe par la prise de conscience de la signification histo rique de ces initiatives Nombreuses ont d j t les reconqu tes par les forces d veloppementistes des entreprises alternatives iso l es et il serait dangereux de sous estimer les capacit s de r cup ration du syst me Pour contrer la manipulation et le lavage de cer veau permanent auxquels nous sommes soumis la construction d u
7. UIMN qui 7 Le Travail dans vingt ans rapport de la commission pr sid e par Jean Boissonnat Odile Jacob 1995 p 9 8 Id p 31 9 Travailler autrement L appel aux nouveaux d put s L Express du 12 au 18 juin 1997 p 72 73 Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r d fend l id e du travail diff renci de l association patronale Entreprise et Progr s qui pr f re le contrat collectif d entrepri se toutes formules qui remettent en cause pour obsolescence l actuel cadre institutionnel et l gal du travail qui introduisent de la flexibilit mais sans pr carit assure le CDJ et qui r clament aux salari s une souplesse d adaptation aux rythmes conjoncturels de leur entreprise Les syndicats videmment ren clent qui derri re le mot d r gulation d chiffrent suppression des garanties pour les salari s et d une certaine fa on regain d exploitation Il est un point commun toutes ces propositions c est que toutes elles situent leurs solutions l int rieur du syst me pour reprendre l expression de Guy Roustang L encore il ne s agit pas d en sortir mais au contraire de s y fondre davantage de s y adap ter et d en accepter toutes les cons quences M me ce qui peut para tre le plus s duisant le plus humain le plus respectueux des individus ma d int r t que pour le r sultat conomique qu on en escompte Lorsque Jean Boissonna
8. du temps Serge Latouche Pr sident de La Ligne d horizon wwwapr s d veloppement org Fran ois Partant La Fin du d veloppement naissance d une alternative La D couverte Maspero 1983 XI Au bord de la d partementale 992 les b timents d Ambiance Bois Au fond le village de Faux la Montagne Introduction Scions ouvrait le d bat Le travail n est plus ce qu il tait Nous vivons la fin du travail Le monde ouvrier n existe plus Aujourd hui c est Phomme qui est au centre du projet de l entreprise Nous entrons dans la soci t des loisirs La machine a lib r l homme du travail On en apprend des choses tonnantes lorsqu on coute les ana lystes et les experts que r p tent l envi les politiques et les jour nalistes On en d couvre sur notre monde qu on croyait pourtant un peu conna tre Ces sentences qui tombent comme v rit s d viden ce sont elles inscrites dans la r alit sociale ou surnagent elles seu lement dans les discours rassurants et trompeurs de ceux qui ont finalement tout int r t peindre en rose un monde dans lequel ils retrouvent leurs billes Mais les autres ces travailleurs subitement propuls s au c ur du projet entrepreneurial ces ouvriers d sor mais vapor s ces hommes et ces femmes lib r s dont les t ches se seraient subitement enrichies qu en pensent ils eux qui ne prennent
9. pas souvent la parole Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r Heureusement de temps en temps quelques personnes la pren nent pour eux ou la leur donnent et remettent assez bien les pen dules l heure Des cin astes par exemple En 2002 Marcel Trillat balade sa cam ra aux quatre coins de France la recherche des derniers vestiges du monde ouvrier celui l m me dont on nous dit doctement qu il a quasi disparu Son film Les Prolos prouve le contraire Bien s r les contextes ne sont plus tout fait les m mes qu il y a trente ou qua rante ans L exploitation a chang de visage encore que L int rim la sous traitance les contrats dur e d termin e les conditions de travail d plorables la pression de l encadrement les cadences mais aussi le travail clandestin et la persistance d un sous prol tariat corv able merci tout cela se passe sous nos yeux dans notre pays au XX si cle Si il y a quand m me du nouveau les directeurs de ressources humaines ont r ussi faire int grer par ces prolos les n cessaires contraintes impos es par les march s celles l m mes incontournables devant lesquelles tout le monde les patrons les syndicats les simples ouvriers sont gaux Une autre cin aste tout aussi peu consensuelle Jocelyne Lemaire Darnaud arpente les rues de Clermont Ferrand pour recueillir les Paroles de bibs celles des ouvriers de chez Michelin Elle les fa
10. trains gardiens de chiens pendant les courses cireurs de chaussures emballeurs de paquets dans les supermarch s La logique de l emploi tout prix s est impos e comme une viden ce incontest e Comme le dit ironiquement Dominique M da cr ons des emplois m me temporaires m me sans contenu m me sans int r t m me s ils renforcent les in galit s pourvu qu ils existent Pour un peu les nouveaux pauvres comme tout ce qui est nouveau pourraient eux aussi devenir une source in dite d emplois C est d j le cas voyez cet ouvrage publi en 1995 qui affiche fi rement en quatri me de couverture Un nouveau m tier du social est en train de na tre manager d insertion On croit r ver Mais c est un cauchemar Les r flexions et propositions pour r soudre cette crise du travail ne sont pas toutes heureusement de cet acabit S il fallait rapidement et grossi rement les r sumer on pourrait d finir deux types de d marches qui du reste se combinent le plus souvent Un premier style de r ponse seul dans les d buts de la crise mais toujours tr s pr sent en particulier dans le discours des politiques est d esp rer la fin du ch mage et le retour prochain du plein emploi 3 Le Monde du 22 janvier 1997 et l article d Alain Lebaube dans celui du 14 f vrier 1997 4 Dominique M da Le travail une valeur en voie de disparition Aubier 1995 p 16 Un des meilleurs livres s
11. un tract reprenait le slogan situationniste Jeunes gens ne travaillez jamais Il d veloppait m me le th me avec un luxe gourmand Battez en retraite N int grez pas le monde du travail avec pour seul espoir la retraite Ne perdez pas votre vie la gagner vivez tout de suite votre r ve au lieu de r ver votre vie bas l esclavage salari Vive les modes de vie alterna tifs Invit participer au d bat je peux t moigner que la discus sion fut rude entre partisans et adversaires du travail salari ou non Pour beaucoup travailler autrement paraissait un oxymore une Voir en particulier Malaise dans l association in Laville et alii Association d mocratie et soci t civile La D couverte MAUSS CRIDA Paris 2001 repris dans la revue Silence et Loxymore de l conomie solidaire revue du MAUSS n 21 1 semestre 2003 Les deux articles sont plus ou moins repris dans le chapitre deux de mon livre Justice sans limites Fayard 2003 sous le titre Loxymore de l conomie morale contradiction le mariage de la carpe et du lapin pour reprendre la d finition de Michel Lulek propos du d veloppement durable tandis qu aux autres l abolition du travail semblait une aberration Pourtant pour chapper la d ch ance de la mendicit ou du para sitisme travailler autrement m me aujourd hui cela n est pas for c ment une mystification cela peut aussi constitue
12. 960 nous grandirons adolescents entre chocs p troliers 1973 et 1979 sous le r gne peu exaltant d un ancien ministre des finances C tait le temps o le Premier ministre sacr meilleur conomiste de France n avait gu re d autres propositions faire aux ch meurs que de cr er leur propre entreprise Ch meurs devenez patrons C tait le moment o ce que l on appelait d sormais la crise commen ait emporter toutes les certitudes et tous les conforts qu avaient grassement offerts les Trente Glorieuses Nous avions 17 ans et d horizon qui se d gage en sortie de tunnel annonc e nous menions cependant sans trop d angoisse nos petites barques La crise ne nous avait pas encore submerg s nous laissant l esprit assez libre pour imaginer plut t joyeusement notre avenir N s trop tard pour tre mont s en 1968 sur les barri cades mais trop t t pour nous faire pi ger par les noires inqui tudes d un avenir incertain nous humions encore l air de libert laiss par les sixties sans nous laisser asphyxier par les d l t res exhalaisons des tristounettes ann es rigueur version Raymond Barre mill sime 1978 ou plus indigestes version Fran ois Mitterrand mill sime 1983 Comment 20 ans on d cide de vivre autrement Nous n tions pas pour autant l abri des malheurs du temps Ainsi je rentre au lyc e un an apr s que mon p re licenci pour raisons conomique
13. Scions travaillait autrement Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r La collection Pratiques utopiques rassemble des livres qui ont l ambition de montrer qu il y a toujours place ici et maintenant comme hier et ailleurs pour des r alisations qui se donnent d autres priorit s que le profit la course la consommation ou le tout l conomie et qui inscrivent leur sens dans le concret de pratiques libres et solidaires Face au partage du travail la d sertification des campagnes la d shumanisation dans les cit s ou l exclusion des entre prises des groupes des associations ou des individus apportent des r ponses originales et adapt es ces questions de soci t qui paraissent parfois insolubles Concr tement il s agit de b tir cet autre monde possible qui ne peut objectivement se d cliner qu au pluriel Exemples de d mocratie conomique elles bousculent gale ment quelques sacro saints principes de notre soci t marchan de d montrant au quotidien que l association est plus enrichis sante que la comp tition que la coop ration vaut mieux que la concurrence ou que l autogestion permet de reprendre le pou voir sur sa vie Pratiques utopiques esp re par ce biais encourager ceux qui sont insatisfaits du monde dans lequel ils vivent faire le pas vers d autres possibles L utopie est port e de main Dans la m me collection Moutons rebelles Ardelaine la fibre du d v
14. ailleurs investis dans le commerce quitable et solidaire d autres dans des organisations syndicales ou citoyennes etc et que tous fonctionnent financi re ment en mutuelle avec une Banque thique les initiatives et l acti vit de chacun renforcent celles de tous Le producteur de miel trou vera ses principaux clients au sein du r seau mais son tour il nourrira les affaires des autres membres du moins si l insecticide Gaucho n a pas d truit ses ruches Toutes ces formes de r sistan ce et de dissidence doivent fonctionner en r seau pour d boucher terme sur une soci t autonome C est cette strat gie que tente de mettre en place en Italie la rete di Lilliput Il s agit d une immense toile d araign e tiss e par les innombrables petites organisations alternatives pour paralyser le g ant Gulliver du capitalisme transna tional C est ce que tente un niveau plus modeste en France le R seau d changes et de pratiques alternatives et solidaires REPAS Cette strat gie de la niche n est pas un repli frileux il ne s agit pas de construire une oasis dans le d sert du march mondial mais de nourrir un organisme vivant et coh rent qui r affirme en son sein la pr sence du probl me moral susceptible de prolif rer et de fertiliser peu peu le d sert ambiant C est cette coh rence qui repr sente une v ritable voie alternative au syst me Voir B Barras M Bourgeois E Bourguinat M
15. amiliaux On nous annonce la venue par dizaines de milliers d emplois verts li s l environnement Les petits boulots font flor s Le portage des journaux ou des pizzas domicile est red couvert comme une r ponse intelligente de nou veaux besoins Apparaissent successivement les emplois d initiative locale de proximit d utilit collective puis les emplois jeunes droite ou gauche certains r vent l mergence d un vaste tiers secteur associatif qui promet des millions d emplois Le gouverne ment presse les pr fets de partir la d couverte des emplois dor mants de leur d partement Etc Traduisant all grement des besoins effectifs en emplois sonnants et tr buchants m langeant les potentialit s et les r alit s instillant de l emploi l o jusqu alors il n y en avait pas forc ment la surench re arrive m me au comique le plus grotesque quand dans cette foire l emploi un ancien ministre de l conomie convoque ses troupes pour une tonnante Nuit des nouveaux emplois Partant du pr cepte d Alain Madelin selon lequel les emplois ne sont pas par tager mais inventer chacun y est all de son id e lumineuse Et voici p le m le ce que pourraient tre nos emplois de demain formateurs au sourire pour les petits commer ants porteurs de petits d jeuners pour Parisiens en week end dans leurs r sidences secondaires coiffeurs manucures dans les
16. apport malheureux au travail Ils mettent aussi en vidence la contradiction qui est au c ur des nouvelles formes d organisation D un c t l engagement dans les projets exige un enthou siasme g n ralis et renouvel De l autre la pr carit du tra vail et de l emploi g n ralise l exp rience de la d ception De leur c t un psychologue et un sociologue sollicit s pour don ner leur avis sur les mouvements sociaux de 2003 suscit s par le projet de r forme des retraites confirment l tendue du d sastre Ce qui ressort tr s fortement c est l importance de l extra ordinaire attachement la retraite comme alternative comme compensation une exp rience du travail qui n a jamais t simple mais qui est aujourd hui massivement per ue comme usante et frustrante Les p nibilit s du travail les frustrations et les difficult s qu elles engendrent sont deve nues pour des cat gories de population salari e tr s larges une question absolument centrale Quand la retraite devient ainsi l horizon salvateur qui permet de tenir l urgence est bien de s interroger sur les rat s d une organisa tion sociale et conomique v cue si n gativement C est du reste ce qui se passe depuis une trentaine d ann es que la crise est arriv e Le travail par le biais de ce qu on a vite consid r comme son envers le ch mage a t projet au c ur du d bat 1 Christian Baudel
17. e SAPO soci t anonyme participation ouvri re Un statut peu cou rant une quinzaine d entreprises en France bien qu assez ancien puisque cr par la loi du 26 avril 1917 Participation ouvri re Ambiance Bois cela signifie que 50 des voix l assembl e g n rale et que la moiti des postes du conseil d administration appartiennent aux salari s de l entreprise Sur la porte des bureaux sont affich es les heures d ouverture qui indiquent Ferm le vendredi matin Les machines ne fonction nent pas les clients trouvent porte close le r pondeur t l phonique gr ne sa petite litanie frustrante qui laisse le correspondant seul avec le bip sonore Que se passe t il le vendredi matin pour la plupart des membres de l entreprise Dans une maison du village une quinzaine de personnes s est retrouv e agendas en main Elles s informent d battent d cident et valident le planning propos pour la semaine suivante par l une d elle En un mot elles g rent Sur le catalogue qui pr sente la soci t et ses produits un petit para graphe en bas de la page 22 pr cise qu Ambiance Bois on a fait le choix de entre guillemets travailler autrement On y lit Gestion collective de l entreprise partage des responsabilit s salaires gaux temps partiel choisi et polyvalence sur les t ches de production sont les principales caract ristiques de notre fonctionnement Treize lignes discr tes mais n anmo
18. eloppement local La danse des ceps chronique de vignes en partage Les Editions REPAS 2003 07190 Saint Pierreville Graphisme et illustration couverture David Franqueville et Manuel Gracia Maquette int rieure St phane Pr vot Correction et mise en page La P niche Michel Lulek Scions travaillait autrement Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r Pr face de Serge Latouche Ce livre est la nouvelle dition actualis e et augment e d un chapitre couvrant la p riode 1998 2003 de l ouvrage paru en 1998 aux ditions Utovie sous le titre Ambiance bois le travail en partage Page V Page 1 Page 11 Page 41 Page 85 Page 131 Page 166 Avant propos L histoire d Ambiance Bois Pr face de Serge Latouche Il y a un autre monde et il est dans celui ci Introduction Scions ouvrait le d bat I Comment 20 ans on d cide de travailler autrement II Comment on devient cr ateur d entreprise III Comment on devient agent d usinage du bois IV Comment l aventure continue Contacts Avant propos L histoire d Ambiance Bois Sur le plateau de Millevaches au c ur du Limousin sur la d parte mentale 992 entre Felletin Creuse et Eymoutiers Haute Vienne se trouve le village de Faux la Montagne 400 habitants En le quittant pour aller vers Limoges on passe devant une ancienne b tisse agrico le La Fermerie qui abrite depuis 1989 une PME de transformation du bo
19. ent comme un outil au service de l homme Notre entre prise ne se justifie pas par la recherche du profit pour le pro fit mais par sa vocation de production en cela elle n est pas diff rente des autres r alis e dans le cadre humain d une uvre collective Pour nous la fa on de travailler est aussi importante que le produit qui est fabriqu Le processus de prise en charge de la n cessaire production prime sur son r sultat 10 C est ce dont nous voudrions t moigner dans les pages qui suivent Il ne s agit pas de d velopper une nouvelle th orie du travail ou d laborer sur le papier un mod le de substitution qui r pondra it toutes les questions ne serait ce que parce que toutes les questions ne sont pas forc ment pertinentes Nous avons besoin de pratique de concret de r alit De ce point de vue nous pourrions nous sen tir assez proches de la mani re de voir d un P guy lorsqu il disait Avant d tre loquent avant de haranguer l univers le premier devoir c est de r aliser autant qu on le peut son id al dans sa vie et dans son travail Avant la parole est l criture avant l critu re est l action avant l action est la vie Et si nous pouvons avoir aujourd hui quelque l gitimit m ler notre voix au concert des discours sur le travail ce n est que pour avoir fait n tre ce pr cepte pour avoir soumis nos r ves l preuve des faits Aussi rac
20. enture collective il y a d abord une forte envie de conti nuer vivre nos envies avec une certaine intensit Michel L autre h ritage de cette p riode c est que pour moi la vie doit tre un minimum palpitante et un peu folle pour avoir assez de piquant et d int r t Autrement dit vivre en collectif c tait aussi le choix de poursuivre l aventure de la vivre non plus dans les interstices d une vie sociale rang e mais aux dimen sions de toute la vie de A Z 15 Ces citations sont extraites des contributions crites des uns et des autres d cembre 1995 Comment 20 ans on d cide de vivre autrement Nous voil donc quelques uns qui nous c toyons depuis plusieurs ann es dans ce mouvement de jeunesse comme d autres ont pu se rencontrer dans les jeunesses communistes d autres encore dans les JAC JOC JEC Olivier est n comme moi en 1961 Il est arriv dans le scoutisme unioniste par l interm diaire d un copain de classe Ensemble nous avons t successivement louveteaux jusqu 12 ans puis clai reurs de 13 15 ans avant de devenir 17 ans responsables d un groupe de gamins Nous y rencontrons Marc un peu plus vieux que nous il a alors 19 ans et sur le tas dans un climat un peu assagi nous nous initions l animation et la p dagogie Avec d autres filles et gar ons de notre ge nous allons ainsi tout en pr parant nos bacs et entamant des tudes occuper
21. eproductible telle quelle mais possible tout de m me Car finale ment qui une histoire comme celle ci serait elle interdite Pas de recette donc mais un possible Un exemple dans le sens d un cas parmi d autres qui montre que r ver l impossible n emp che pas de vivre un peu ses r ves que l utopie n a pas forc ment besoin d un Grand Soir et que pour travailler autrement il vaut mieux compter sur son imagination et sa volont que sur un ministre du Travail ou un quelconque plan de lutte contre le ch mage Une invitation donc pour que chacune chacun prenne le pouvoir le vrai celui qu on peut avoir sur sa vie son destin On ne fera donc pas d buter cette histoire au moment o l entreprise se met produire en 1989 Ni la date de sa cr ation juridique en 1988 Ni encore au d marrage de sa pr paration en 1984 Ni m me aux premi res vocations qui en sont faites par ses futurs promoteurs en 1981 Il faudra remonter la rencontre de ces m mes promoteurs alors qu ils ne se doutent pas encore qu ils cr eront ensemble une entreprise il faudra s enfoncer jusque dans les ann es 1970 pour comprendre le sens et le cheminement du projet conomique d Ambiance Bois Qui nous sommes comment nous nous sommes rencontr s comment l quipe a volu quelles furent les r flexions les rencontres qui men rent peu peu la d finition du projet d en treprise comment ce projet lui m me fut remis en cause retravail
22. es on rejetait le titre de chef lisaient Rouge ou Lib et nous laissaient une grande autonomie dans la gestion de nos activit s Malgr un brin de d magogie et quelques exc s nous avions le sentiment de vivre gar ons et filles m lang s des aventures dont nous tions de fait les h ros Baignant dans un curieux climat fait de protestantis me lib ral et tol rant et de gauchisme contestataire nous n en tions pas moins confront s des mod les plus rigoristes et conser vateurs au sein m me du mouvement de la paroisse ou de nos familles Nous pouvions croiser un objecteur de conscience et un saint cyrien un paysan du Larzac et un ancien ministre de Pompidou un pasteur th ologiquement progressiste et un autre plus fondamentaliste des militantes f ministes qui n en taient pas moins m res au foyer de 4 enfants etc Nous vivions dans un milieu assez ouvert qui globalement reconnaissait chacun sa libert et nous offrait en maintes occasions la possibilit de jouer des r les qui Comment 20 ans on d cide de vivre autrement n taient pas que de figuration Nous avons ainsi go t aux plaisirs des vacances collectives un peu folles aux projets qui faisaient baver les copains du coll ge qui s tonnaient de tant d autonomie eux qui ne connaissaient que les colonies ou les t s en famille C est ainsi qu 13 ans nous partions quatre jours sept gar ons et filles du m me ge nous balader
23. faire ensemble des projets et les r aliser vivre nos vies non comme un parcours professionnel mais comme de grandes vacances qui n en finiraient pas non comme une carri re construire mais comme une aventure poursuivre Faisant quinze ans plus tard le point sur les motivations qui nous pouss rent dans nos choix l occasion de l arriv e de nouveaux venus dans l qui pe il est r v lateur que presque tous les anciens se r f rent cette p riode 15 Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r 16 Marc Quand l id e a t lanc e Et si on vivait en communau t a coulait un peu de source vivre ensemble sur une longue dur e c tait la continuation de ce qu on avait pu vivre ensemble pendant des p riodes de vacances en organi sant des camps Philippe Ce mode de vie m a paru enthousiasmant et dans la continui t de ce que j avais pu vivre en tant que responsable d unit ce moment ce n tait pas une r flexion pouss e sur l existen ce mais simplement l envie de faire des choses en grand inenvisageable tout seul Catherine Une p riode de vie enthousiasmante faite de projets un foi sonnement d activit s de r unions pendant laquelle j ai ren contr les autres membres du groupe Envie de conti nuer l aventure dans la vie quotidienne Olivier En 1981 quand nous sommes plusieurs d cider de tenter l av
24. iff rentes de se r approprier la monnaie aussi pour un usage diff rent selon une logique autre que celle de l accu mulation illimit e et de l exclusion massive des perdants C est tr s exactement ce que font les compagnons d Ambiance Bois Au Sud o l conomie mondiale avec l aide des institutions de Bretton Woods a exclu des campagnes des millions et des millions Albin Michel Paris 1998 de personnes a d truit leur mode de vie ancestral supprim leurs moyens de subsistance pour les jeter et agglutiner dans les bidon villes et les banlieues du tiers monde l alternative est le plus sou vent une simple condition de la survie Les naufrag s du d velop pement les laiss s pour compte condamn s dans la logique dominante dispara tre n ont d autre choix pour surnager que de s organiser selon une autre logique Ils doivent inventer et certains au moins inventent effectivement un autre syst me une autre vie Cette deuxi me forme de l autre soci t n est pas totalement s pa r e de la premi re et cela pour deux raisons D abord parce que l auto organisation spontan e des exclus du Sud n est pas n est jamais totalement spontan e Il y a aussi des aspirations des pro jets des mod les voire des utopies qui informent plus ou moins ces bricolages de la survie informelle Ensuite parce que sym trique ment les alternatifs du Nord n ont pas toujours le choix Ce sont aus
25. ins pr sentes On n a pas voulu faire du pros lytisme on n a pas cependant voulu cacher cet aspect v ritable ment fondateur de l histoire de l entreprise Ainsi donc en grattant un peu comme a partir de quelques angles particuliers on en arrive percevoir au del de l entreprise stricto sensu une exp rience qui semble remettre en cause quelques habi tudes de fonctionnement bien peu bouscul es aujourd hui surtout dans le secteur de la production de biens o ceux qui d cident ne sont pas ceux qui ex cutent o une entreprise sans patron est une vue de l esprit o ceux qui travaillent avec leur t te usent peu leurs mains et ceux qui travaillent avec leurs bras ne semblent gu re avoir besoin de faire fonctionner leur cervelle o le travail n est gu re con u autrement que dans le cadre de l change salarial Alors Derri re l usine la plage L utopie En la mati re le t moignage vaut mieux que le slogan Chacun au final conclura comme il le souhaite applaudira ou grimacera s en thousiasmera ou restera dubitatif Car l histoire dont je m appr te t moigner ne s crira pas dans les lignes qui viennent comme l exemplaire d monstration d un r ve devenu r alit m me si on y trouve et du r ve et des bouts de r alit fa onn s par lui Clin d il Elsa Triolet Le vrai r veur est celui qui r ve de l impossible Serait ce dire que le possible est toujours r veil douloureu
26. is Ambiance Bois Des panneaux indiquent ses productions lambris parquets bardages constructions de maisons bois et pr ci sent qu on peut acheter en direct l usine C est une entreprise qui emploie une vingtaine de personnes et qui assure les premi re et deuxi me transformations des bois en l occur rence du m l ze et du douglas deux essences r sineuses locales issues des plantations massives qui depuis un peu plus de 70 ans ont recou vert plus de 50 de la superficie du plateau de Millevaches Les bois y arrivent par grumiers L des ouvriers vont successivement scier les billons de bois les s cher un s choir est install derri re les vieux b timents de pierre pour en faire du parquet et du lambris Il y a aussi un atelier de menuiserie o sont fabriqu s des escaliers des tables de jardin ou des lits et des sommiers en bois et un hangar o les ouvriers pr fabriquent des panneaux qu ils iront eux m mes assembler sur chantier pour construire des maisons ossature bois Vue c t route Ambiance Bois est une entreprise comme les autres Pourtant si l on y regarde de plus pr s si l on prend le temps de fouiller un peu au del de la fa ade assez classique qu elle propose on s apercevra bien vite qu Ambiance Bois n est pas tout fait une entreprise comme les autres Ainsi sur ses documents publicitaires ou sur son papier en t te on peut d couvrir si on les lit attentivement qu Ambiance Bois est un
27. it r agir la logorrh e patronale que leur big boss a confi e deux journalistes merveill s Et au del du rassurant sermon patro nal nous d couvrons sous des habits plus ou moins neufs mais il y a aussi quelques costumes taill s sur des vieux patrons d hier les formes classiques de l exploitation t ches salissantes dangereuses toxiques syndicalisme brim contenu p nalis d tournements des lois ou judicieux montages qui permettent par exemple de devoir travailler davantage en passant de 39 35 heures Une nou velle fois on douterait du si cle dans lequel nous vivons Et encore nous cantonnons nous ici dans les fronti res de l Hexagone Si nous allions voir dans quelque contr e d Asie ou d Afrique du Nord les conditions dans lesquelles travaillent les salari s des usines d locali s es de nos propres groupes industriels le tableau serait bien pire Parmi les emp cheurs de penser en rond il y a aussi des socio logues Par exemple ceux qui ont men avec Christian Baudelot et Michel Gollac une vaste enqu te sur le bonheur et le travail en France Leur conclusion est pour le moins tr s en retrait de lopti misme simpliste des chantres de la mondialisation heureuse ou du nouvel panouissement au travail Ils montrent que siles conditions de travail les plus critiques ont tendance reculer la pr carit la pression et la concurrence accroissent le nombre de salari s qui ont un r
28. l puis mis sur rail Et depuis quelles furent les difficult s rencontr es les ruses trouv es les contraintes subies les inerties et les complici t s Autant de questions qui n cessitent de commencer l histoire bien au del de l instant o la premi re machine s est mise ronfler Une douzaine d ann es pas moins Pr face Il y a un autre monde et il est dans celui ci Cette belle phrase de Paul luard mise en exergue de mon livre L Autre Afrique Entre don et march conviendrait parfaitement aussi pour le pr sent ouvrage Il ne s agit toutefois pas d un hasard cela r sulte d une connivence entre l exp rience africaine de l alternative historique et le projet d alternative volontariste d Ambiance Bois d une part et de la complicit intellectuelle entre tenue d assez longue date entre Michel Lulek et moi m me d autre part en particulier travers La Ligne d horizon l association des amis de Fran ois Partant Cela nous a amen s finalement animer ensemble deux ateliers Porto Alegre lors du Forum social mondial de 2002 Au Nord en effet quand on parle alternative on pense d abord aux projets volontaires et volontaristes de construction de mondes diff rents Des individus refusant totalement ou partiellement le monde dans lequel ils vivent tentent de mettre en uvre autre chose de vivre autrement de travailler ou de produire autrement au sein d entreprises d
29. les faire travailler temps partiel les placer en forma tion Malgr le discours la mode sur le retour en force de la sp cificit de chaque individu dans l entreprise voil un vocabulaire qui ram ne la personne sa triviale fonction d outil de production L homme Un rouage de la machine La marge d initiative et de cr ativit laiss e au travailleur ne va jamais jusqu lui laisser celle de questionner le sens de son activit La traditionnelle division des t ches manuelles et des t ches intel lectuelles n est pas bouscul e Il y a toujours d un c t ceux qui d ci dent et de l autre ceux qui ex cutent m me si la parole de ces der niers peut tre dans certaines limites sollicit e Bref on changerait le travail sans changer la place minente qu il occupe sans changer l entreprise sans changer la r partition des r les sans changer ses finalit s Pour notre part nous nous situons dans un tout autre registre Travailler autrement a pour nous un autre sens d autres raisons Derri re l expression nous osons r ver le travail remis sa juste place l entreprise comme le lieu de la coop ration de producteurs associ s les r les redistribu s Il y a m me au del l ambition d mesur e de subvertir l conomie et son imp rialisme Face au mod le d une entreprise pour laquelle l objectif est l argent et l homme un outil nous avons cherch utiliser l arg
30. lyse de Jacques Julliard enfonce douloureusement le clou en dressant sous le titre Des jeunes gens rang s le portrait d une jeunes se qui te et passive L attitude de la majorit des jeunes de 13 17 ans est faite d un subtil m lange assez giscardien de permissivit pour tout ce qui touche la vie priv e et de mod ration teint e parfois d une assez nette exigence d ordre en ce qui concerne les relations sociales 14 Le Nouvel Observateur n 727 16 octobre 1978 Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r 12 Et de poursuivre On s tait habitu voir la contestation comme la nata tion am ricaine aller chercher ses champions parmi des sujets de plus en plus jeunes Nous nous apercevons que ce n est pas vrai La lecture est am re pour moi qui croyais que tous les jeunes de mon ge ne r vaient que de bousculer le vieux monde et d en ima giner d en construire un nouveau Et m me lorsque Julliard conclut On peut tout attendre m me l impr visible d une jeu nesse aussi collectivement individualiste c est ce dernier mot que je retiens comme le verdict sans appel d un repliement go ste et d finitif Quelle que soit la r alit des choses pour moi et les copains d alors c est clair la bof g n ration c est les autres d faut de nous reconna tre sous cette tiquette nous tions au moins des enfants de la crise N s au d but des ann es 1
31. n autre monde ici et maintenant appara t essentielle dans la bataille du sens Elle participe pleinement aux objectifs du r seau sur l apr s d veloppement et de La Ligne d horizon savoir 1 Concevoir et promouvoir r sistance et dissidence la soci t de croissance et de d veloppement conomique 2 Travailler renforcer la coh rence th orique et pratique des ini tiatives alternatives 3 Mettre en uvre de v ritables soci t s autonomes et conviviales 4 Lutter pour la d colonisation de l imaginaire conomiste domi nant L alternative crivait Fran ois Partant en 1983 n tant pas imagi ner pour demain mais au contraire mettre en forme aujourd hui la probl matique politique est toute nouvelle Il ne s agit plus de pr parer un avenir meilleur mais de vivre autrement le pr sent De plus la mani re de vivre le pr sent peut fort bien d terminer l avenir C est donc pr ciser cet avenir que nous devons nous employer afin de s assurer que nos actions pr sentes le pr parent et ne le com promettent pas Ou pour encourager des initiatives en dehors m mes de celles que nous prenons En cons quence il faut tre vigilant en permanence pour ne pas se faire r cup rer ni rattraper par la religion du travail du progr s du d veloppement de la crois sance de la productivit productivisme et finalement du profit qui n est pas l ambiance du bois mais bien h las celle
32. onterons nous seulement une histoire la n tre celle d une poign e d individus qui cr rent une entreprise Ambiance Bois parce qu ils voulaient travailler autrement et imaginaient que c tait l le chemin le plus s rieux pour faire avancer la r flexion sur le sujet Au travers de cette histoire nous esp rons que le lecteur saura d couvrir les lin aments d une autre mani re d int grer le travail dans nos vies et que nous l aurons aid questionner le travail davantage sur ses fins que sur ses moyens 13 Charles P guy dans uvres en prose compl tes biblioth que de la Pl iade tome I 1987 p 1789 Il disait aussi Je suis frapp de ce que les intellectuels en g n ral ne connaissent rien des conditions o s op re la fabrication industriel le id p 1394 1978 1984 Comment 20 ans on d cide de vivre autrement Octobre 1978 Le Nouvel Observateur radiographie les jeunes du moment Le diagnostic est claironn en pleine page de couverture c est la bof g n ration J ai 17 ans et curieux avide et inquiet je me jette sur ce miroir Et je tombe de haut On imagine parfois que les jeunes d aujourd hui sont violents d linquants drogu s en tout cas r volt s C est faux compl tement faux Le sondage qu a r alis pour nous la SOFRES trace d eux un portrait inattendu tran quilles presque trop tranquilles La r volte n est pas leur fort Et l ana
33. ot et Michel Gollac Travailler pour tre heureux Fayard 2003 2 Entretien avec Yves Clot et Olivier Schwartz Le Monde des 22 et 23 juin 2003 Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r Syndicalistes comme patrons lib raux comme socialistes d un bout l autre de l chiquier politique sociologues ou journalistes tous s vertuent comprendre analyser d cortiquer cette crise du travail et plus difficile proposer les mesures qui peut tre r us siront inverser la courbe fatale d un ch mage diabolis Mais force de se focaliser sur ce dernier ph nom ne estampill une fois pour toutes comme le mal supr me voil qu on est arriv une situation o l on consid re presque tout travail comme forc ment bon Voil que pour un peu on en viendrait se satisfaire de n importe quelle occupation pourvu qu elle g n re de l emploi Voil en tout cas qu on ne se pose plus gu re de question sur le tra vail si ce n est Comment cr er de l emploi Quels nouveaux m tiers inventer Quels besoins non satisfaits peuvent d bou cher sur des cr ations d emplois Le d bat se r sume alors dans la recherche d sesp r e de nou veaux gisements d emplois Des activit s qui jusqu alors chap paient au champ du travail salari sont r quisitionn es pour on l esp re du moins se traduire en activit marchande r mun r e On cr e les emplois f
34. r exemple et c est selon ses r dacteurs la r forme cl du rap port en substituant au classique contrat de travail entre un salari et une entreprise le contrat d activit qui conclu entre un salari et un r seau d entreprises de collectivit s locales d coles etc engloberait temps de travail et temps de formation p riodes de pleine activit et p riodes de rel che Ainsi une entreprise temporairement priv e d un certain volume de commandes pourrait pr ter certains salari s une autre entreprise les faire travailler temps partiel les placer en formation leur favoriser l exercice pendant un temps d une activit ind pendante ou encore leur d gager du temps disponible pour d autres activit s sociales L ar opage de la commission du Plan n est pas isol dans cette recherche Il faut r inventer le travail proclame un appel pour travailler autrement que 333 experts chefs d entreprise et cher cheurs ont adress en juin 1997 aux d put s fra chement lus Des propositions pour travailler autrement fusent maintenant de partout constate Alain Lebaube en introduction d un dossier du Monde Initiatives titr lui aussi Le travail autrement qui en voque quelques unes Celles du Centre des jeunes dirigeants d en treprise CDJ qui invite aller vers l entreprise la carte de l Union des industries m tallurgiques et mini res
35. r un compromis transitoire travailler moins dans des conditions moins stressantes sans se laisser prendre ni dans l engrenage de l accumulation illimi t e ni dans le cycle infernal des besoins et du revenu Travailler moins cela peut vouloir dire par exemple viser les deux heures par jour de Jacques Ellul En 1981 d j Jacques Ellul l un des premiers penseurs d une soci t de d croissance fixait comme objectif pour le travail pas plus de deux heures par jour Ne pas tomber dans le cycle infernal des besoins et des revenus mais s autolimiter c est d une certaine fa on se faire objecteur de croissance car pour reprendre le m me Ellul ce sera une satisfaction parfaitement posi tive que de manger des aliments sains d avoir moins de bruit d tre dans un environnement quilibr de ne plus subir de contraintes de circulation etc C est pr cis ment ce qu il ma t donn de Jacques Ellul s inspire ici de deux ouvrages le fameux Deux heures par jour sign Adret et La R volution des temps choisis L ennui le vide le d veloppement de l indivi dualisme l clatement des communaut s naturelles l affaiblissement la r gression conomique ou enfin la r cup ration du temps libre par la soci t marchande et l in dustrie des loisirs qui fera du temps une nouvelle marchandise ceux qui vivront coll s leur cran TV ceux qui passeront leur vie au bistrot
36. s selon la formule nouvellement consacr e tait rentr en ch mage Recherches d emplois pointages hebdomadaires puis stage de formation nouveau ch mage un peu d int rim et enco re le ch mage re recherches d emplois re pointages hebdoma daires pour finir apr s six ans de ces allers et retours aux marges du march du travail aux ASSEDIC comme agent de l emploi Itin raire exemplaire plus d un titre fils d ouvriers agricoles il a pass la plus grande partie de sa vie dans l industrie comme maquettiste apr s un court passage dans l artisanat en tant que menuisier b niste pour finir apr s ce que je n oserais appeler une formation sur le tas offerte par la crise dans la para administration orienter et conseiller les demandeurs d emploi Du secteur pri maire de mes grands parents au tertiaire en passant par l tape logique du secteur secondaire sa vie est un parfait r sum de toute l histoire du travail et de l conomie au XX si cle Pour finir apr s l avoir subie par vivre de la crise Ces ann es l qu avec le recul on identifie un peu exag r ment la fin d un ge d or sont pour nous qui 15 ans plus tard ferons Ambiance Bois des ann es plut t exaltantes Question d ge aurais je pens si le Nouvel Obs ne m avait pas d menti et si aujourd hui que la crise bat son plein on ne nous pr sentait pas une jeunesse plut t triste et angoiss e pour son futur Si l ge n
37. si souvent des exclus des laiss s pour compte ch meurs en fin de droits ou candidats potentiels au ch mage ou plus simplement des exclus par d go t Il y a donc des passerelles entre les deux formes qui peuvent et doivent se f conder mutuellement Cette coh rence d ensemble r alise d une certaine fa on partiellement l objectif que Fran ois Partant attribua it sa centrale c est dire son projet de coordination des initiatives dissidentes Donner des ch meurs des paysans ruin s et toute personne le d sirant la possibilit de vivre de leur travail en produisant l cart de l co nomie de march et dans des conditions qu ils d terminent eux m mes ce dont ils estiment avoir besoin La Ligne d horizon La D couverte Paris 1988 p 206 Le R SEAU un champ de complicit L extension et l approfondissement du champ des complicit s sont le secret de la r ussite et doivent tre le souci premier des entre prises alternatives mais il s agit aussi de coordonner la protestation sociale et la protestation cologique d articuler la solidarit envers les exclus du Nord et du Sud avec toutes les initiatives associatives Sels syst mes d change locaux producteurs alternatifs n oru raux syst mes financiers thiques mouvements associatifs r solu ment engag s dans cette voie Lorsque les agriculteurs bios partici pent un Sel dont certains membres sont par
38. t d crit l entreprise de demain comme le lieu de la personnalisation du travail o sont d mul tipli s les niveaux d initiatives et de responsabilit s il pr cise Elle ne le fait pas seulement ni m me d abord pour am liorer les conditions de travail mais avant tout pour tre plus pr s du client et soigner ainsi sa rentabilit De m me le travail diff renci de PUIMN n a de sens que s il permet d tre plus efficace et plus rapide pour r pondre aux demandes du march Il faudrait pouvoir aug menter les horaires lorsqu il y a du travail et les diminuer lors qu il y en a moins Que les na fs qui esp raient voir rendre l homme une place plus centrale et moins soumise dans le dispositif conomique se ravisent Ce sont les march s qui d cident Selon la formule d sormais consa cr e le vrai patron c est le client Il faut consid rer chaque client comme un march et chaque salari comme un entrepreneur 10 Le Monde Initiatives du 22 novembre 1995 11 Le Travail dans vingt ans p 12 12 Id p 13 Plus que jamais voil l conomie qui r gente la soci t et r duit cha cun au r le qu il est cens jouer sur la sc ne conomique Qu tes vous Un march Qui suis je Un vendeur Remarquez les mots utilis s par Jean Boissonnat pour pr senter son contrat d activit Il dit que l entreprise pourrait pr ter ses sala ri s
39. une part de plus en plus grande de notre temps Car bien vite au del de l animation sur le terrain avec les enfants et les adolescents nous nous investissons dans les structures r gionales et nationales du mouvement D un stage de formation pour le BAFA aux assembl es g n rales o nous rencontrons des responsables d autres villes de la banlieue parisienne dont Anne Catherine et Philippe qui compl teront bient t l quipe de d part du futur Ambiance Bois d ateliers de for mation qui sont autant pr texte retrouvailles que lieux d appren tissage au comit de r daction du journal interne nous voil plu sieurs soirs par semaine plusieurs week ends par mois plusieurs semaines dans l ann e vivre l activit f brile d un mouvement de jeunesse o nous r vons des projets avant de les traduire dans la r alit Lorsque le soir tr s tard et au grand dam de certains de nos parents nous avons termin la pr paration d une prochaine animation nous nous retrouvons chez l un ou l autre imaginer d autres pro jets discuter de l actualit refaire le monde comme je crois qu on le fait quand on a 20 ans 16 Brevet aptitude aux fonctions d animateur 17
40. ur le sujet compl ter du m me auteur par Qu est ce que la richesse Aubier 1999 5 Dominique Rassouw Manager d insertion Syros 1995 Il s agit de manager les travailleurs sociaux qui s occupent d insertion Ambiance Bois l aventure d un collectif autog r d s que la machine conomique aura t suffisamment relanc e pour tirer derri re elle la cr ation des emplois qui manquent tant aujourd hui C est transcendant tous les clivages politiques la croyance dans les vertus de la croissance Croissance croissance ch rie Toi qui nous as tant g t s de 1945 1975 reviens et nous serons nouveau heureux Patronat et syndicats droite et gauche lib raux et communistes se disputent sur les chemins qui pour raient y conduire mais tous sont unanimes sur le but atteindre le retour d une croissance forte Un peu de recul suffirait pourtant pour requestionner cette vidence Ainsi comment expliquer que le PIB fran ais ait augment ces deux derni res d cennies de plus de 70 alors que le ch mage tait multipli par quatre se demande Guy Roustang qui poursuit La pens e unique est celle qui fait de la croissance le principal rem de tous nos maux En un sens on comprend cette insistance trouver des solutions l int rieur du syst me Comment n aurait on pas le vertige l id e d en sortir Une seconde approche moins aveugle prenant davantage en compte la complexit
41. x d utopiques espoirs Les choses sont bien moins cat goriques bien s r et heu reusement L exp rience d Ambiance Bois est ainsi faite d utopie et de r alit de r jouissants succ s et de r guli res difficult s de grandes id es et de petites r alisations d ambition et de modestie On ne lira donc pas ici un conte de f e autogestionnaire mais bien plut t une histoire de vies au pluriel En effet si je veux que cette histoire soit compr hensible si je ne veux pas trop la rationaliser a posteriori ni trop la d sincar ner si je veux qu elle soit lue comme elle fut v cue avec ses d bats ses hauts et ses bas ses obstacles et ses coups de chance ses calculs et ses hasards et non comme le processus glac d un cheminement de cr a tion d entreprise il va me falloir raconter des tas de choses qui nont dans un premier mouvement gu re de rapports avec Ambiance Bois telle qu on peut la voir aujourd hui le long de la d partementale 992 Mieux pour parler d Ambiance Bois il faut en sortir tout comme pour travailler autrement il faut sortir du strict cadre du travail De cette fa on l exp rience sera sans doute plus facile comprendre Elle appara tra moins extraordinaire et coulera davantage de source Elle sera sans doute moins exemplaire dans le sens d un mod le imiter et ressemblera moins un mode d emploi Comment cr er son entreprise en milieu rural qu une aventure particuli re pas r
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