Quarante années de journalisme littéraire
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1. caprices de la vogue aux inutiles dogmatismes des id ologies Ce n est pas une mauvaise entr e en mati re pour le soliloque du critique Je crois m me que jy reviendrai au terme de ma causerie La ton tant donn qui oblige fuir l autosatisfaction et la solennit th oricienne le nombre des ann es pass es lire des livres et crire des articles de journaux ou de revues leur propos peut tre une raison suffisante pour regarder en face le critique litt raire je n ai pas dit la critique litt raire car je nai aucun droit parler la place des autres et nous sommes eux comme moi assez mal pourvus en instruments de r flexion syst matique sur cette vari t modeste empirique peu labor e dans ses pr ceptes de la critique litt raire qu on appellera pour tre un peu clair critique journalistique Il est possible d avancer dans au moins trois directions l exp rience v cue l histoire litt raire ou la situation culturelle et l exercice du journalisme litt raire dans la presse crite 1 Le critique acquiert par son m tier une certaine autobiographie intellectuelle elle ne serait pas la m me s il avait uvr dans la politique ou le sport Toutes proportions gard es il pourrait tenter d crire la suite de Fran ois Mauriac mais loin derri re lui des M moires int rieurs Il s agirait de dire ce qu a t son rapport concret quotidien la litt rature en train2. litt rature et politique etc Que ce soit r alisable je le crois que ce soit int ressant pour un diteur et un public je voudrais le croire Quoi qu il en soit de ces hypoth tiques man uvres de rangement et de mise en perspective le critique litt raire ne se donnera pas conna tre et d abord lui m me sans se situer dans son temps sa p riode elle va de 1955 nos jours C est la situation culturelle du critique que j ai commenc devenir en mars 1955 quand j ai accept non sans ing nuit de prendre la succession du romancier et po te Luc Estang pass aux ditions du Seuil J tais un inconnu je n avais rien publi si ce n est depuis cinq ans des articles sur l actualit sociale j allais si je puis ainsi m exprimer officier dans un quotidien dont l all geance id ologique tait notoire et assez lourde porter De cette situation je retiens quelques traits quelques noms pour moi r v lateurs d une histoire intellectuelle Avec Jean Paul Sartre une partie des intellectuels se demandait quoi sert la litt rature Ils r pondaient par le devoir d engagement Camus de m me Les catholiques Bernanos Claudel Mauriac Julien Green et leur suite une famille de chr tiens ou de spiritualistes affirmaient un engagement d une autre nature L id ologie politique la profession de foi religieuse se rejoignaient pour confier la litt rature une mission la provoquer
3. Les preuves de cet accueil al atoire sont dans la Pl iade Au cours de ma carri re Jai rompu avec l id e na ve que je me faisais de laccord parfait sur le beau et le bon en litt rature je nirai tout de m me pas jusqu pr tendre que les d saccords me laissent indiff rent Information commentaire ce sont les deux mots cl s du vocabulaire journalistique On men a jamais fini avec eux il faut sans discontinuer sans illusions de magist re nouer ensemble la t che d information qui impose de tenter un r sum l valuation litt raire du livre et l in vitable intervention de la subjectivit du journaliste De nos jours on ne fait plus semblant de la dissimuler Delle d pend pour beaucoup le ton de l crit en journalisme comme ailleurs la tonalit d une voix d un style qui traduit l identit de celui qui r dige reconnaissable par une quelconque originalit Il est souhaitable que les articles de critique m ritent gr ce leur ton le qualificatif de litt raires de critique litt raire J ai beaucoup admir et envi le ton de Robert Kemp Un roman de Claude Simon s intitule La bataille de Pharsale 1969 Je ne vous apprends pas que ce titre est anagramme de la bataille de la phrase Form comme je lai t dans ma jeunesse la phrase de Pascal de Bossuet de Voltaire mais oui de Chateaubriand de Balzac de Barr s solidement endoctrin quant au mode d emploi jug exemplaire de la
4. langue fran aise le style classique j avais d j subi avant d entrer dans le journalisme le choc de P guy de Claudel qui en prenaient leur aise avec cet ordonnancement des mots et aussi celui de Ramuz Vinrent ensuite Giono premi re mani re Louis Ferdinand C line Raymond Queneau Claude Simon Michel Butor et ses montages savantissimes Samuel Beckett et son langage de silence Georges Perec et ses livres fabriqu s comme des immeubles plus pr s de nous Alphonse Boudard virtuose de l argot adopt par l Acad mie fran aise Jen passe bien entendu Je vous avouerai que l usage de notre langue soumis ces innovations a t pour moi une preuve dans le travail de critique tout le syst me h rit se trouvait bouscul ce jour sans avoir perdu le sens classique de la phrase bien crite je prends pour une chance d avoir compris les possibilit s d volution qu offre la langue fran aise Que retenir qui soit utilisable pour un bilan de ces quarante ann es telles que les a v cues le journaliste et critique ou plut t qu un bilan une philosophie du pass Je reviens sur le sens du relatif voqu par Gracq Je le partage pleinement comme en d autres domaines de l action et de la pens e Les variations de l esth tique les r gles de Part qui ne sont pas des r gles intangibles mais des codes provisoires le sempiternel d bat sur la nature du roman sur r alisme et fiction
5. litt raire roman ou autre chose est une parole d homme qu il a mission d couter avec la t te et avec le c ur qu elle lui soit agr able ou non S il a compris un peu s il a aim s il a d faire un effort sur lui m me pour entendre il transmet le sens et son admiration et ses allergies ventuelles ceux qui le lisent et qui liront peut tre les uvres cause de sa prose Cela arrive oui et Jen ai la fois du r confort et de la peur Mes go ts et mes enthousiasmes n ont pas t toujours partag s mon retour Paris une des toutes premi res choses que je ferai sera d ouvrir les paquets de livres dans l espoir de De quoi au juste Quelle est cette curiosit que les ann es ont seulement temp r e d un soup on de scepticisme Apr s tant et tant de livres admir s apr s tant de m diocrit s pleines de bonne volont tant et tant de rab chages tant et tant de pages aussi vite oubli es que lues que puis je encore attendre Mon ami Jean Sulivan crivait Ce qui est dit reste dire En accueillant les livres il se pourrait que je fasse la connaissance de quelqu un qui m annoncera il y a du neuf ce matin Ce sera un po me nul autre pareil ce sera une lueur sur les myst res ce sera une vie d homme racont e pour t moigner de la 10 dignit humaine et si cest le r cit encore jamais entendu de nos pires inhumanit s c est qu en effet tout n avait pas t dit Copy
6. part enti re La litt rature est en concurrence avec le politique conomique le social les probl mes de soci t les faits divers tout le mat riau h t roclite du faire savoir qui remplit nos colonnes elle ne donne gu re parce qu on ne le veut gu re sujet reportages enqu tes interviews ces genres nobles de la modernit journalistique Les arbitrages ayant pour but de r partir le nombre de pages se soldent par une portion r duite allou e au livre et on ne ressent que plus vivement la disproportion qui r gne entre la surface des articles et le nombre de livres publi s au cours d une ann e d dition L c est l impasse le recours des s lections approximatives toutes insatisfaisantes et pas seulement pour le critique Ce journalisme n est pas dans lactualit au sens que prend le mot dans les m dias Son actualit est ailleurs d une autre sorte elle est excentrique par rapport aux faits elle ne rel ve que rarement du concept d v nement Il en r sulte que le litt raire est marginalis on lui assigne des pages sp ciales hebdomadaires des suppl ments pr sent s comme des revues en r duction Ainsi se trouve consacr e une mise part qui il faut le reconna tre ne peut pas tre surmont e de fa on probante les critiques ou notes bibliographiques en cours de journal plusieurs fois par semaine n ont pas chang grand chose Cela tant on ne laisse pas tomber les bras La pre
7. preuve du contraire irrempla able Dans le m me temps il souffre de pr carit Il a contre lui les risques d une soci t o les multim dias mettent en action d normes appareils de communication les r seaux d images de sons de signes de connexions et interconnexions la magie de l ordinateur il a contre lui un consensus trop mou des institutions d enseignement en faveur de la lecture il a contre lui sa tr s grande multiplicit un livre chassant l autre les collections qui se copient et se d modent de plus en plus vite l afflux d uvres litt raires en pro venance du monde entier et d autres causes li es au fonctionnement de l dition moderne Pourra t on se passer de lui Je l ignore et je pr f re ne pas trop y penser Les convictions du liseur n ont pas capitul sur le fond des choses C est devenu une seconde nature la r daction de l article hebdomadaire fait partie du besoin plus que de la n cessit au point de ressembler une routine On d joue la routine chacun sa mani re Il y aura une fin Pour le moment le critique a aussi d autres raisons de vivre Si on lui demandait comment il caract rise son voyage parmi les uvres litt raires il r pondrait en reprenant des formules utilis es avant lui que parti d une critique d affirmation de r futation souvent de condamnation parfois il s est form une critique de sympathie et une critique de signification L uvre
8. Quarante ans de journalisme litt raire COMMUNICATION DE LUCIEN GUISSARD LA S ANCE MENSUELLE DU 13 JANVIER 1996 pos que je pr parais ces quelques consid rations r trospectives un vieux critique litt raire je relisais des textes de Julien Gracq dans P dition de la Pl iade qui vient de publier le deuxi me volume de ses uvres compl tes et J ai trouv ceci De la survie des ouvrages litt raires L uvre d un crivain pass P re classique s installe de moins en moins dans la dur e comme un absolu de plus en plus comme un tat temporaire ou un garant quon r active occasionnellement pour les besoins de P id ologie dominante ou de la technique litt raire du jour Ce que nous appelons immortalit mest le plus souvent qu une continuit minimale d existence en biblioth que capable d tre remobilis e par moments pour cautionner la mode ou l humeur litt raire du temps Carnets du grand chemin La technique litt raire du jour L humeur litt raire du temps L auteur de La litt rature l estomac a plus d une fois et vertement dit ce qu il pensait du milieu litt raire et des critiques ils le d oivent lui crivain en expliquant en classifiant en dictant des principes au lieu de faire aimer les livres Il se d marque des auteurs programme il alerte le critique sur la pertinence discutable de ses interventions il me renvoie la fugacit des techniques successives aux
9. de se faire les effets qu il en a ressentis pour son style de pens e et de vie int rieure l ventuelle transformation mentale voire spirituelle qu il a exp riment e en habitant si intens ment lunivers des fictions de la po sie des id es naissantes ou mourantes des questionnements humains que ne cesse de faire na tre la litt rature m me la plus videmment romanesque Je me suis d j quelque peu aventur dans la traduction de cette exp rience en tant qu elle est personnelle ici m me devant vous Je n y reviendrai pas me r servant si le temps m est accord de r capituler plus longuement cette longue travers e de quarante ans si br ve vue de maintenant ne serait ce qu mon propre usage afin d claircir si possible ce que je suis venu faire l dedans et dans quel tat je me trouve la fin Ce qui est certain c est que le critique en moi et par lui la litt rature ont profond ment travaill et fait travailler Phomme cet homme que l on est dans le for int rieur J aurai t je crois tout le contraire du dilettante de lesth te heureux seulement de humer les humeurs du temps Mais peut tre y a t il l un individu s rieux l exc s 2 La dur e quand elle prend une dimension assez large inspire le projet d crire l histoire en l occurrence l histoire litt raire de presque un demi si cle Dur e d autant plus inspiratrice qu elle commence au lendemain d une guerre comm
10. e la derni re apr s quoi on croyait tout recommencer et qu elle s tend jusqu l aube d un mill naire nouveau Cette histoire a d j t crite par plusieurs auteurs et elle sera on peut en tre certain r crite encore Il se peut que le critique en exercice ait sur elle une vue d ensemble qui ne co ncide pas en tous points avec celle des historiens Ce sera vrai en tout cas s il y cherche des rep res des hauteurs jug es significatives en op rant un choix de livres et d crivains dont il a admir la puissance de cr ation le don de po sie le ton nouveau la force de pens e le langage et son retentissement dans l me Mais chacun son m tier Et d ailleurs ce choix exemplaire est intimement li l exp rience autobiographique des m moires int rieurs Dans quelle litt rature le critique le fera t il Dans la litt rature fran aise dans les litt ratures trang res Ce ne serait plus une histoire ce serait la biblioth que imaginaire J avoue cependant que la vell it pas davantage jusqu ici m est venue d luder le propos historien et le genre panorama en tra ant parmi les milliers de livres accumul s les chemins d une synth se Les uvres seraient regroup es par th mes litt rature et histoire litt rature et g ographie litt rature et religion litt rature et interrogation spirituelle litt rature et sens de l homme litt rature et amour litt rature et mort
11. es sont morts pour des raisons la fois culturelles et financi res qui ont fait galement dispara tre des revues remarquables d int r t g n ral comme La vie intellectuelle Le traitement journalistique de la litt rature va d pendre pour la plus large part des quotidiens et des magazines J ai entendu dire nagu re quon se consolerait de la mort des hebdos litt raires les magazines news allaient compenser sur le mod le am ricain Des diteurs je men souviens essayaient de s en convaincre Ils ont d chant et les amateurs de litt rature avec eux Les magazines ne font certes pas le silence sur les livres mais les diteurs se plaignent maintenant du peu d ouvrages qu ils pr sentent des omissions bizarres de choix qui sentent l arbitraire l id ologie le copinage et autres choses semblables Il m arrive de trouver qu avec les moyens qu ils ont ces magazines ne font pas ce qu ils peuvent Je m abstiens de parler de la Belgique Ayant eu les responsabilit s de r dacteur en chef ayant pu observer assid ment la presse quotidienne et ce qui se passait dans d autres salles de r daction j ai compris que ce que je croyais normal n allait pas de soi il fallait revendiquer pour les livres pour le culturel en g n ral un domaine visible r gulier le plus souvent possible m lang avec celui des informations quotidiennes il fallait se d fendre et prouver que le journaliste litt raire est journaliste
12. faisaient autorit on les citait comme des ma tres de la chose les jeunes les enviaient Les critiques d aujourd hui ont perdu ce statut de mandarins et c est notons le en passant le signe d une volution dans la population des journalistes volution ten dant l galitarisme et au rejet de vedettes dans la corporation On se souvient de Robert Kemp de Ren Lalou d Andr Rousseaux d Andr Billy d mile Henriot d Albert B guin de Robert Kanters d Andr Wurmser d Hubert Juin Rien qu les nommer on tale le pluralisme des temp raments et des opinions sur le litt raire comme sur le politique cela qu on examinerait si on entreprenait une histoire de la critique Ce n est pas au programme des coles de journalisme ni des chercheurs la critique de journalistes s est ajout e la critique d auteurs particularit qui elle aussi est en voie de disparition Albert Camus dans Combat Aragon dans Les Lettres fran aises Fran ois Mauriac et son fameux Bloc notes dans Express puis dans Le Figaro Jules Romains dans L Aurore Claude Roy dans Le Nouvel Observateur o il continue d crire ainsi que Jean d Ormesson dans Le Figaro Cette conjonction de l crivain et du critique est une bonne transition pour en venir un troisi me point de r flexion la lumi re du proche pass savoir le comportement de la presse et l originalit du journalisme litt raire 3 Les hebdomadaires litt rair
13. la coexistence de plusieurs critures du fran ais en m me temps et parfois de la part d un m me crivain les dissonances permanentes dans les jugements prof r s par les m dias sont autant de raisons de se faire une raison la v rit absolue n a pas cours en litt rature Dans ce climat constant d incertitude le difficile a t dans la pratique professionnelle de parvenir obtenir une confiance durable entre le critique et les responsables de son journal entre le critique et les producteurs de litt rature entre le critique et la part du public qui le lit Si je suis encore ce poste apr s quarante ans en d pit de passages houleux j ai une satisfaction toute simple la confiance a exist On est seul et on travaille en solitaire Je me souviens de ce qu crivait Pierre Henri Simon un romancier Roger B sus il constatait avec m lancolie sans doute avec un peu d amertume que l immense majorit de ses articles tombait dans le silence si je re ois pas mal de lettres d crivains j en re ois assez peu de lecteurs La situation aurait pu me sembler morose si je navais gard intacte une pers v rance lucide si je n avais acquis la certitude de faire un travail l gitime et utile pas plus mais pas moins La morosit aurait pu na tre des obstacles surmonter dans le journalisme qui se pratique de nos jours et des doutes sur le livre en tant que vecteur de culture Il a t essentiel et jusqu
14. nous d couvrions ou red couvrions la litt rature des deux Am riques on ditait Paris des crivains maghr bins Aragon lan ait chez Gallimard une collection intitul e Litt ratures sovi tiques bient t arriverait l autre univers de l Est avec les dissidents porteurs d une litt rature dont il faudra peser un jour la richesse la libert le pouvoir de contestation et le ferment novateur appel faire clater le r alisme socialiste avant de le discr diter Encore un trait de la situation culturelle il existait alors une presse litt raire Les Nouvelles litt raires Le Figaro litt raire Les Lettres fran aises Je mentionne dessein ces trois publications parce que c taient des hebdomadaires proches par cons quent de l actualit de l dition plus proche que les mensuels actuels qui ont bien de la peine se l gitimer comme se diffuser Nous de la presse quotidienne nous les suivions avec le plus grand int r t Les deux premi res arrivaient d un pass assez lointain toutes trois taient condamn es dispara tre Personne n est parvenu les sauver financi rement leur conserver une client le les faire porter par un groupe de presse ni les faire r ellement regretter sauf d une petite bande d attard s dont je suis Profitons en pour remettre en m moire les noms des critiques litt raires en place apr s la guerre Dans les ann es 60 70 ils taient bien en place ils
15. relire l histoire des m dias le journaliste sp cialis dans le livre s est impos une d ontologie l mentaire qu il nonce ainsi le devoir d informer passe avant le droit d avoir des opinions Cela m rite peut tre un mot d explication Nous parlons pr sent du travail sp cifique de critique non plus de la fabrication des nouvelles Le journaliste qui touche aux affaires de l esprit est enclin crire pour les initi s les diteurs les crivains les confr res la caste Et le public l dedans Il ne sait rien encore concernant le livre dont il est question il n en saura rien ou presque apr s lecture de certains articles allusifs qui semblent vouloir viter le r sum comme un pensum trivial des articles crits pour se faire plaisir ou pour briller Le reproche d litisme qu on nous oppose volontiers n est pas toujours imm rit Le devoir d information exigible par notre public nest pas rempli aussi malais qu il puisse tre s agissant d un objet d information non pareil le livre Ceux parmi vous qui ont publi des romans savent comment certains informateurs n informent pas Le r dacteur en chef que j ai t a d rappeler plus d une fois ces rudiments des jeunes tout contents de pouvoir enfin s exprimer Les opinions du critique on les attend on les r clame on les partage ou non Savez vous que Le rivage des Syrtes n a pas fait l unanimit de la critique parisienne
16. right 1996 Acad mie royale de langue et de litt rature fran aises de Belgique Tous droits r serv s R f rence bibliographique reproduire Lucien Guissard Quarante ann es de journalisme litt raire en ligne Bruxelles Acad mie royale de langue et de litt rature fran aises de Belgique 1996 Disponible sur lt www arilfb be gt II
17. sse telle que nous Pavons vue voluer sous la pression de l historique et du narratif reste le lieu privil gi de la promotion de l crit Ce n est pas la t l vision qui la remplacera surtout pas elle Elle a fait la preuve de ses carences de ses rat s des missions sans lendemain sauf l une ou l autre elle est frapp e d une inaptitude qu on dirait cong nitale informer de mani re continue et organis e sur le fait litt raire Elle est fascin e par la th tralisation la presse l est par la nouvel le ce qu il y a de neuf ce matin Le roman g nial n est pas une nouvelle annoncer comme le dernier hold up Les quotidiens de masse traitent la litt rature comme si elle n existait pas en dehors de la mort des crivains de la distribution des Prix en fin d ann e ou de l crivain signant une p tition C est l homme qu on traque pas le contenu d une uvre Les n crologies num rent quelques titres au hasard rien sur la litt rature J ai suivi avec attention et un agacement professionnel croissant ce ph nom ne d inculture Jai r sist ma petite place La direction qwa prise la grande presse n est pas favorable la culture populaire pour ce qui nous occupe Je le sais les j r miades n y changeront rien la presse a t mise sur des rails aucun contre pouvoir n est l pour r orienter sa fa on de concevoir l v nement et de le trier Dans ce contexte qui invite
18. un au del d elle m me Il est peine besoin de rappeler que le marxisme en France jouissait d une audience sans pr c dent chez les notables de l intelligentsia Cela n allait pas sans r percussions sur la critique et sur l valuation des uvres On avait donc une litt rature de gauche et une litt rature de droite Un clivage tout sp cial s est manifest propos de ce que nous continuons faute de mieux d nommer nouveau roman Des crit res politiques jouaient aussi dans les choix esth tiques une id ologie de la litt rature portant sur la technique litt raire pour parler comme Gracq qui ny croyait pas Comment trouver une posture dans ce d bat J tais visc ralement allergique certains proc d s de narration de phras ologie de rejet du roman dit traditionnel je lisais sous la plume de Robbe Grillet une argumentation mes yeux injustifi e sur lhumanisme qu il fallait expulser du roman sur l animisme pervers qui r gnait dans la m taphore et la peinture psychologique Mais je voyais bien sur quoi appuyer une volont d innovation et je ne voulais pas tomber dans la critique partisane uniform ment n gative Jai mis un peu de temps trouver un quilibre et je rejoins Julien Gracq quand il crit Toutes les techniques sans exception se justifient sauf en ceci qu elles se pr tendent exclusives des autres Lettrines r ponse une enqu te sur le roman 1962 En ce temps l
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