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To be or not to be (1,33)

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1. celles d autres films de Lubitsch les ellipses de celui ci soient moins c l br es pour leur raffinement ser vant maquiller des corps vivants ou morts mettre jour des cadavres ou les escamoter elles ne rel vent d aucune pudeur Si la virtuosit narrative quengendre ce concert d ellipses ne sert pas toujours la r ussite de l action le maquillage de la mort de Siletsky est inutile Tura regagne la confiance d Ehrhardt pour la perdre aussit t ce n est nullement le signe d une fasci nation de l chec mais d un pur amour du pr sent quelle que soit son efficacit terme Enfin au bout du compte il n est pas grave de ne pas tout comprendre En 11 Tura passe sur son incompr hension de la situation tel le spectateur du film il est en retard mais l intuition morale lui dicte de s occuper du dangereux Siletsky condition qu on lui explique ensuite Savoir ou ne pas savoir la place du spectateur Le spectateur a un statut particulier dans To Be or Not to Be dans la mesure ou il semble pleinement int gr au processus narratif Sans tre jamais totalement omniscient ou ignorant sa connaissance des situa tions et du r le de chacun volue constamment Afin d analyser les res sorts de ce dispositif on pourra tu dier diff rentes s quences sous cet angle chaque fois il s agira de faire le point avec les l ves Que sait on lorsque la sc
2. choix de deux r sistants fusill s a donner a Ehrhardt Apr s 15 Tura doit remplacer Siletsky hotel Europe Entre 15 et 16 d couverte du cadavre de Siletsky Avant 18 entre l h tel Europe et la Gestapo Tura passe chez lui frapper Sobinski et au local de la troupe r cup rer une barbe de rechange Entre 16 et 18 Ehrhardt organise la confrontation avec le cadavre Entre 17 et 18 mise au point du sauvetage de Tura Pendant 18 Tura rase et postiche Siletsky Entre 19 et 20 mise au point du sauvetage de la troupe Apr s 18 Ehrhardt et Schultz d cident d interroger Maria Entre 21 et 22 Tura et Bronski d cident que ce dernier ira chercher Maria Pendant 23 il semble que Maria ait pr vu un nouveau rendez vous dans sa loge Quelques constats Les ellipses caract risent le ci n ma classique mais ici elles portent sur ce que d autres montreraient Moins plus en l ellipsant Lubitsch conf re du relief ce qu il juge antispecta culaire d marches explications concertations transformations Il donne l illusion au spectateur de faire la moiti du travail alors qu en supprimant dans la fiction tous les moments de r flexion pr a lable c est son propre labeur d quarrissage du r cit que le cin aste fait dispara tre l attention du spec tateur est encore plus sollicit e que d habitude chez lui car cette fois enjeu est constamment de vie ou de mort D o le fait que par rapport
3. transparence holly woodienne si la philosophie de Lubitsch n tait ce point loign e de la morale puritaine du cin ma am ricain Chaque mouvement est souverainement ma tris qu il soit d homme ou de cam ra et celle ci jamais ne se fait ressentir M me quand la cam ra mime le regard anxieux de Tura scrutant les spectateurs elle ne subjectivise pas outre mesure car Cest au moins autant notre attente amus e qu elle figure alors Sa virtuosit r side dans sa pond ration ainsi de ces panoramiques brefs vifs et nets qui vont cueillir un personnage ou un objet Hitler au d but de 2 Sobinski au lit en 10 Maria au d but de 14 le rasoir en 18 Greenberg en 21 ce dernier mouvement tant un peu plus lent et complexe pour m nager l entr e du com dien tant attendue par lui Plans plusieurs Cet art du mouvement d cisif on le retrouve dans la souplesse v loce de Sobinski ses sauts dans la neige ou sur la sc ne mais plus encore dans le mouvement collectif qui se pr cise au cours du film Atomis au d part les com diens font les cent pas derri re Maria et Dobosh il s unifie mais reste confus lors de la traque de Siletsky pour devenir indivisible dans le promenoir du th tre Polski o la fausse garde d Hitler n gocie un superbe virage comme un seul homme Lubitsch privil gie d ailleurs les plans plusieurs sources d effets comiques comme lors de la discussion autour du cadavre d
4. vanit et manque d inspiration de Tura ins curit d Ehrhardt servilit nazie espoir de Greenberg Ce serait terriblement dr le Dans la grande circulation lubitschienne tout fait cho ou variation farcesque et la fin du film est une apoth ose le salut collectif au Fuhrer de dos est le contrechamp du Heil myself du d but de m me que le salut tremblotant d Ehrhardt Hitler Bronski comme Tura un peu plus t t Maria est enlev e sous les yeux d Ehrhardt le suicide de celui ci est visuellement ellips rappel d risoire de la mort de Siletsky Mais plus sp cifiquement face au r ve nazi d exception psychologique morale raciale absolue la com die ne cesse de c l brer l humain retour du m me dans un camp comme dans l autre La blague sur Hitler de la pi ce Gestapo pourtant in dite revient dans la bouche d Ehrhardt pas plus que la s paration entre th tre et vie Greenberg use du monologue de Shylock pour sauver toute la troupe le foss entre sous hommes et nazis ma de validit Entre eux les chos sont constants Siletsky Tura Ehrhardt Je pensais bien que vous r agiriez ainsi jusque dans l organisation du r cit En 9 Maria transmet un message de Sobinski propos de Siletsky en 10 Siletsky transmet Maria un message de Sobinski de 10 11 la d couverte tonn e de Siletsky par Maria il est d j Varsovie succ de celle
5. Hynkel et sous ses propres traits le film mettant en sc ne un Chaplin Hynkel et un Chaplin Charlot A la fin ce dernier jus qu alors quasiment silencieux adresse un long discours de paix l humanit Cinq ans plus tard le critique Andr Bazin crit propos du film un texte essentiel Pastiche et postiche ou le n ant pour une moustache Selon Bazin Chaplin reprend sa moustache Hitler et ce faisant r duit cin ma tographiquement son mythe n ant Dans les deux films un tr s humain sosie se substitue au monstre moustachu Substitution que l on retrouvera d une fa on ou d une autre dans plusieurs films antinazis mettant en sc ne Hitler vid de sa substance celui ci n est plus qu une pure apparence en repr senta Le Dictateur MK2 tion assemblage de signes distinctifs cens ment uniques mais en r alit repro ductibles linfini commencer par la moustache la diff rence d Hynkel qui vocif re sans cesse Hitler Bronski est quasiment muet la responsabilit du discours humaniste qui chez Lubitsch est autant affaire de circonstances que de contenu puisque celui ci nous est d j connu incombe au personnage de Greenberg porteur non plus de hallebarde mais du monologue de Shylock HESS Rudolf Le 10 mai 1941 Hess compagnon de route d Hitler prend semble t il l initiative de se faire parachuter sur l cosse afin de n gocier un accord de paix avec le Royaume Uni
6. la fois h ro ne et s ductrice et seul person nage fort du film d autant plus starifi qu elle est l unique person nage f minin l exception d Anna On est loin ici de la morale r cur rente des films hollywoodiens de l poque dans lesquels la femme adult re doit se repentir avant d tre punie La derni re sc ne du film montre avec humour que Maria men a pas la moindre intention 19 20 LECTURE CRITIQUE Insensible et macabre Le plus c l bre monologue de Hamlet tait une d claration sans ambi guit compar e aux changements de tons et l humour d routant du nouveau film d Ernst Lubitsch To Be or Not to Be dont la premi re a eu lieu hier au Rivoli dans des circonstances pour le moins d licates Non seulement il sagit du dernier film dans lequel la regrett e Carole Lombard a jou et chacun s imposait un tact inhabituel mais il traite aussi d un sujet loin d tre amusant Et pourtant dans un esprit l ger avec de fr quentes doses de choc M Lubitsch a mis en sc ne ses acteurs dans un thriller d espionnage avec comme toile de fond improbable des ruines et l effrayante oppression des nazis envahissant Varsovie Dire que c est insensible et macabre est en dessous de la v rit Peut tre y a t il beaucoup de gens capables de mettre de c t la r alit de rire de g n raux nazis idiots avec des yeux exorbit s Peut tre qu ils appr cient Jack Benny grim derr
7. plication que donne le retour en arri re est fantai siste mais pas illogique Reliant le tout un com mentaire off suscite son tour de la complexit il nous dit que tout a commenc au quartier g n ral de la Gestapo Berlin mais ce second d but de r cit s av rera spatialement et temporellement contigu la sc ne de Hitler dans la rue Le film qui se d roule dans un pass r cent deux ans avant sa r alisation renvoie lui aussi lici et maintenant Si nous savons la raison du d part de Sobinski au d but du monologue d Hamlet Lubitsch oppose au Heil Hitler des nazis sa propre phrase d clic To be or not to be Tura l ignore pour sa part A ces diff rences de savoir entre spectateur et person nages s ajoutent les perceptions diff rentes d un m me l ment du r cit comme l crit Jacqueline Nacachel ce monologue est selon les points de vue texte r citer souffler couter ou a d co der Ces perceptions multiples tendent elles aussi une complexit croissante celle d un double jeu constant qui avec le spectateur devient triple comme lors de la discussion autour du cadavre de Siletsky Le second d part de Sobinski au son de To be or not to be est exemple le plus flagrant du comique de r p tition et le plus m canique voquant la fois Bergson et Pavlov De pur proc d de com die le retour de r pliques va devenir r v lateur d humanit s
8. question sans doute la plus cruciale pour Lubitsch tre dr le ou ne pas l tre Repr sentation en coulisses La sc ne au th tre le soir de la ve nue d Hitler fait cho la premi re s quence dans la mani re dont elle joue avec les codes de la repr sentation th trale et ses composantes sc ne acteurs spectateurs et dans le r le qu elle accorde au spectateur du film On notera avec les l ves tous les glis sements op r s par la mise en sc ne et par l intrigue narrative du film les couloirs du th tre deviennent la sc ne principale les toilettes deviennent les loges et les coulisses les spectateurs ne sont pas assis dans les fauteuils mais montent la garde les soldats A contrario Lubitsch se d sint resse totalement de la vraie repr senta tion et de l acteur principal de la soi r e Hitler est montr de dos presque en amorce dans un clair obscur et la musique du spectacle n est qu enten due travers les portes Cette fois ci tout le dispositif est clair aux yeux du spectateur m me s il n a pas connaissance des d tails du plan d action Il est pleinement int gr l intrigue d autant qu il reconna t les agissements des uns et des autres qui renvoient leur comportement de la premi re sc ne Greenberg tient le r le de sa vie la perfection Bronski n ouvre pas la bouche et Tura est tout en sobri t tudi e On notera enfin l mot
9. septembre 2010 Synopsis et fiche technique Realisateur Lubitsch ou l air de ne pas y toucher Acteur Mais Pas avec n importe qui Gen se Une tragique com die criture A l origine entre theatre et cin ma Contexte Petit ab c daire des temps troubl s Imbrication des genres D coupage s quentiel Mise en sc ne Style de vie La s ance Analyse du r cit Intelligence avec le spectateur Savoir ou ne pas savoir Analyse de s quence Demandez le programme Repr sentation en coulisses Analyse de plans La brigade des stupefies Champ contrechamp Point technique D cors Ouverture Fermeture Figure Abyme de r flexions La salle de theatre Filiations L invention de soi m me Pistes de travail Atelier Elle et lui et lui Lecture critique Insensible et macabre S lection vid o et bibliographie 10 12 14 15 16 17 18 19 20 vi N 2 NE To Be or Not to Be Jeux dangereux tats Unis 1942 R alisation Ernst Lubitsch Sc nario Edwin Justus Mayer d apr s un sujet d Ernst Lubitsch et de Melchior Lengyel Image Rudolf Mate Son Frank Maher Varsovie 1939 La troupe du th tre Polski dont les vedettes D cor Vincent Korda sont Joseph et Maria Tura r p te une pi ce politique Gestapo Musique Werner R Heymann et le soir joue Hamlet Vidylle naissante entre le lieutenant Montage Dorothy
10. Mason fr re de Siletsky en l gance cauteleuse ne cesse de voir en lui non seulement un agent ennemi mais aussi un acteur usant syst matiquement son sujet de m taphores th trales la premi re Vous tes un si bon acteur que vous transformez cette biblio th que en sc ne de th tre Il conseille m me Thornhill de passer plus de temps l Actors Studio Or ce dernier ne concerne ni Cary Grant ni James Mason et encore moins les com diens de To Be or Not to Be l invention de soi m me ne saurait passer par une m thode qui consiste si bien se conna tre qu on peut aller chercher en soi selon les besoins les outils de son jeu Le Paradoxe sur le com dien de Diderot c est cela m me pour jouer mieux vaudrait ne pas trop re sentir mais cr er de toutes pi ces A partir de l enl vement de Thornhill le film oscille entre deux visions de la com die pour de vrai n gative un acteur est quelqu un qui le temps d un r le accepte d abdiquer son identit propre Mais si l on n existe plus aux yeux du monde que comme acteur la perte d identit qui aurait d n tre que temporaire devient permanente Croyant fermement la sienne J ai un travail une secr taire une m re deux ex femmes et plusieurs barmans qui m attendent Thornhill refuse le r le de George Kaplan tre imaginaire cr de toutes pi ces par la CIA qu on voudrait tant lui faire jouer p
11. Tura Sobinski et Tura qui doit repasser prendre Maria plus tard partent habill s en officiers allemands 21 Monologue et dialogue 01 23 28 01 28 56 Au th tre Greenberg fait mine r citant le mono logue de Shylock de vouloir tuer Hitler auquel aux yeux des soldats charg s de sa s curit s est susbtitu Bronski la t te de sa garde rappro ch e Tura recommande que celui ci quitte le th tre imm diatement direction l a roport Dans la voiture d Hitler Tura et Bronski se con gratulent mais Tura perd sa moustache postiche il ne peut aller chercher Maria lui m me 22 F hrer ex machina 01 28 56 01 31 50 Maria attend son mari Ehrhardt et Schultz se pr sentent pour l interroger quant sa relation avec Siletsky puis Ehrhardt lui fait une cour appuy e Hitler Bronski vient la chercher constern Ehrhardt tente de se suicider 23 Au pays de Shakespeare Rideau 01 31 50 01 35 06 Partis en avion avec Sobinski pour pilote les com diens sautent en parachute sur l cosse Le souhait de Tura Jouer Hamlet en terre anglaise Lorsqu il commence son monologue ce n est pas Sobinski qui s en va mais un autre spec tateur derri re lui MISE EN SCENE Style de vie Chez Lubitsch pas de tr sor formel cach Du fait de sa naissance dans le milieu de la confection berlinoise on a souvent fil son propos la m taphore boutiqui re Usons en notre tour dans so
12. d j travaill avec Lubitsch pour cinq autres films a galement crit des musiques pour le m me Max Reinhardt au d but des ann es 1920 Parmi les acteurs beaucoup ont commenc sur les planches Carole Lombard a jou quelques pi ces apr s son pre mier film 12 ans et Jack Benny a fait ses d buts dans le vaudeville Parmi les seconds r les beaucoup ont d abord t des acteurs de th tre reconnus Felix Bressart Greenberg et Sig Ruman Ehrhardt en Allemagne Stanley Ridges Siletsky et Lionel Atwill Rawitch en Angleterre Charles Halton aux tats Unis l exception de Robert Stack Sobinski les acteurs de To Be or Not to Be nignorent rien des m ca nismes de la sc ne et de la vie d une troupe de th tre Mais de mani re a priori surprenante To Be or Not to Be est le seul film parlant de Lubitsch avec Ninotchka tre r alis partir d un sc nario original Il n est pas l adaptation d une op rette La Veuve joyeuse 1934 d un roman Cluny Brown 1946 ou d une pi ce de th tre S r nade trois en 1933 ou Rendez vous en 1940 pour ne citer que ceux l Pour autant l encore les sc naristes ne sont pas tout fait trangers au th tre l histoire qui a inspir le film est d Ernst Lubitsch et de Melchior Lengyel Les deux hommes sont amis de longue date depuis leur rencontre en Allemagne alors que Lengyel hongrois tait critique et auteur de th tre Len
13. de Sobinski par Tura il est dans son lit en 12 un faux capitaine emm ne le vrai Siletsky la fausse Gestapo en 15 ces trois termes s inversent sur laxe de la v rit 1 Lubitsch Edilig 1987 Des vides bien remplis Ehrhardt lui ayant envoy un avion Siletsky arrive deux jours plus t t que pr vu La R sistance polo naise ne peut intervenir temps les com diens doivent la remplacer Cette simple avance de lar riv e d Ehrhardt elle m me ellips e lance un film d anticipation le spectateur va devoir constam ment rattraper son retard sur le r cit m me lors qu il croit le ma triser et une arm e des ombres narratives comme la R sistance les ellipses sont choses occultes et de 8 15 tout se d roule dans une m me nuit Voici donc tout ce que vous avez toujours su sans le voir dans To Be or Not to Be Entre 5 et 8 priv s de leur appartement les Tura prennent un modeste studio Siletsky d cide de convoquer Maria espionne potentielle Entre 8 et 9 Sobinski se r fugie chez les Tura et explique la situation a Maria Entre 11 et 12 mise au point de la machination contre Siletsky impliquant le maquillage de sa mort en suicide et l intervention du capitaine Mumm Pendant 12 pr paratifs au th tre Polski et maquillage de Tura en Ehrhardt Entre 13 et 14 maquillage de Tura en Siletsky Apr s 14 Maria d truit les papiers de Siletsky et quitte enfin l h tel Europe Avant 15
14. la mise en abyme se mesure moins sa seule existence qu au gouffre des r flexions en cha ne qu elle entrouvre relevant d un imaginaire th tral plut t que romanesque Anna Kar nine ny joue qu un r le mineur 9 le film adapte et tend son r cit des principes qui s appliquent par excellence dans le champ dramatique r p tition repr senta tion ou les rige en choix moral la petite troupe de th tre oppos e aux grandes troupes militaires lors de la mise en abyme au carr de la tirade de Shylock dans celle de Meurtre l op ra les nazis sont incapables de reconna tre le texte de Shakespeare Mais nous m mes le serions nous si Lubitsch n avait fait en sorte que nous en ayons connaissance d s le d but du film dans cette rencontre du vaudeville et du film d espionnage les petites ins curit s de l un ne sont jamais occult es par les grands p rils de l autre mais elles se d placent du narcissisme amoureux celui de l acteur Tura Maria en plein danger Sois honn te je dois savoir as tu demand ce type de g cher mon monologue l interpr tation d Hamlet par Tura est la fois ridicule et pertinente reposant sur l une des conceptions possibles du personnage celle d un pur esprit vel l itaire et incapable d action auquel Tura devra s opposer dans la suite du film indice de son volution la mani re dont de 11 o il n est qu un
15. pilotes Londres s q 6 Du d but de la sc ne les soldats qui chantent autour du piano la dispersion des soldats partis crire des lettres leur famille on compte quinze plans en un peu plus de deux minutes On peut rep rer trois chelles de plan diff rentes plan d ensemble plan large et plan poitrine mais l angle de prise de vues nest quasiment jamais le m me Non seulement ce choix donne un dynamisme la sc ne avec tr s peu de d placement des personnages mais elle r v le aussi avant m me le d but des dia logues l importance que va prendre Siletsky qu on ne conna t pas encore Elle permet galement Lubitsch de passer du groupe les plans larges aux individus les plans poitrine sur Siletski et deux soldats et de cr er ainsi une identification du spectateur tr s vite impliqu dans cette nouvelle intrigue ATELIER Elle et lui et lui L tude du triangle amoureux de To Be or Not to Be outre le fait qu il apporte un clairage diff rent au film permet d aborder quelques l ments essentiels du cin ma hollywoodien classique Il faut souli gner la pr sence r currente de cette situation dans les films de Lubitsch principalement dans le bien nomm S r nade trois 1933 dans lequel une jeune femme tombe amoureuse de deux hommes On pourra dans un premier temps tudier avec les l ves la mani re dont les aventures du trio ont un impact direct sur l intrigue et sur la s
16. question du m lange des genres qui peut d router les l ves sous l angle de la structure narrative du film quels moments les diff rents genres apparaissent ils quel moment se rencontrent ils Les premieres sequences sont assez simples a apprehender grace a une utilisation des codes relevant presque du stereotype Jusqu a la sequence 5 le film se place dans le registre de la com die avec une satire burlesque du nazisme dont on ne voit encore aucun des repr sentants r els quelques r pliques ironiques sur les acteurs et une intrigue d adult re trai tee sur le mode comique La s quence 5 rel ve la fois du drame et du film de guerre Varsovie est bombard e la tyrannie s installe et la r sistance s organise L utilisation de la musique souligne le tragique de la situation Les s quences 6 10 sont de pures s quences d espionnage dans lesquelles on retrouve p le m le tous les codes du genre le tra tre le h ros en mission les prises de d ci sion dans les bureaux la photographie dans la chaussure les renseignements cach s dans les livres Pendant pr s de vingt minutes ni la farce ni le jeu ne sont repr sent s La s quence 11 avec la premi re confrontation Tura Sobinski r int gre les intrigues narratives et l humour des dialogues Mais le drame et le suspense n ont pas pour autant dis paru Les dialogues les situations le jeu des acteurs et la musique sont
17. vous d j jou un cadavre Monsieur Tura Quelle que soit leur malfaisance les ma tres espions des deux films donnent l occasion Tura et Thornhill de passer pour morts c est dire de se sentir vivants comme jamais 17 18 PISTES De TRAVAIL 1 R sumer On pourra demander aux l ves de faire le r su m de To Be or Not to Be l crit ou l oral Les diff rentes proposi tions permettront de mesurer la complexit du film et la multiplicit de ses intrigues mais aussi les diff rences d interpr tation On d cou vrira en m me temps le travail de la m moire chez le spectateur qu est ce qu il retient Qu est ce qu il oublie D o viennent les faux souvenirs les inventions de la m moire 2 Le genre Les l ves chercheront des r f rences To Be or Not to Be pour d terminer le genre qui lui est donn On commen tera avec eux les diff rentes expressions trouv es com die noire drame d espionnage satire politique On verra la fois l impossi bilit de r duire ce film un seul genre mais aussi la mani re dont la simple mention du genre donne d j un point de vue qui en dit autant voire plus sur le spectateur qui d crit ainsi le film que sur le film lui m me Dans sa r ponse aux critiques n gatives Lubitsch crivait J avais d cid de faire un film sans aucune tentative de soula ger qui que ce soit de quoi que ce soit aucun moment dramatique quand la situa
18. Allemands gagnent du terrain en Russie D s la premi re Hollywood une r plique choque Ce qu il faisait Shakespeare nous le faisons main tenant la Pologne trangement d autres r pliques telles que Nous concentrons et les Polonais campent ne sont pas relev es Lentourage de Lubitsch l incite couper ce passage mais bien qu af fect d tre tax de cynisme il tient bon Les critiques positives ma nent de publications populaires les journaux plus hupp s adoptant souvent pour leur part la m me strat gie reconna tre les qualit s comiques du film pour mieux en fustiger le mauvais go t et souligner l origine allemande de Lubitsch A un article de cet acabit paru dans le Philadelphia Inquirer Lubitsch r pond en d non ant le proc d d loyal qui consiste fl trir le metteur en sc ne n Berlin qui trouve dr le le bombardement de Varsovie FORITURE A l origine entre th tre et cin ma To Be or Not to Be entretient des rapports ambigus avec le th tre dans le processus m me de sa cr ation et ce diff rents niveaux On notera tout d abord le nombre incroyable de par ticipants au film en lien avec le th tre fait loin d tre rare l poque mais qui est ici exemplaire Ernst Lubitsch d bute sa carri re th trale en Allemagne en 1910 et ne tarde pas rejoindre la c l bre troupe de Max Reinhardt Werner R Heymann le compositeur qui a
19. Bernard Eisenschitz Jean Narboni dir Ernst Lubitsch r ed Cahiers du cin ma 2006 Jacqueline Nacache Lubitsch Edilig 1987 Samson Raphaelson Amiti la derni re retouche d Ernst Lubitsch Allia 2006 souvenir de Lubitsch par l un de ses sc naristes Fran ois Truffaut Lubitsch tait un prince Les Films de ma vie r ed Flammarion 1987 Herman G Weinberg Ernst Lubitsch r ed Ramsay 1997 biographie critique Sur le cin ma antinazi Andr Bazin Pastiche et postiche ou le n ant pour une moustache dans Charlie Chaplin r ed Cahiers du cin ma 2000 sur Le Dictateur Alain Masson Du conservatisme a la propagande antinazie dans Hollywood 1927 1941 Autrement 1991 lodie Dulac La force du st r otype Adolf Hitler dans les s ries B d une Am rique en guerre dans Melvyn Stokes et Gilles Menegaldo dir Cin ma et histoire Michel Houdiard 2008 Bernard Eisenschitz Man Hunt Yellow Now 1992 sur Chasse l homme de Fritz Lang Jacqueline Nacache War Comes to America le cin ma hollywoodien entre effort de guerre et pro pagande dans Jean Pierre Bertin Maghit dir Une histoire mondiale des cin mas de propagande Nouveau Monde 2008 DVD To Be or Not to Be est dit en DVD par Studio Canal Les autres films d Ernst Lubitsch dit s en DVD en France sont les suivants Com diennes Arte LEventail de Lady Windermere M
20. ERNST LUBITSCH dlo Be or Not to 5e asfir lie D UMM Udi aba yra i F ES w MODE D EMPLOI Le d roul de ce livret suit la chronologie du travail men par les enseignants avec les l ves Les premi res rubriques plut t informatives permettent de pr parer la projection Le livret propose ensuite une tude pr cise du film au moyen d entr es vari es le r cit la s quence le plan ainsi que des pistes p dagogiques concr tes permettant de pr parer le travail en classe Des rubriques compl mentaires s appuyant notamment sur des extraits du film sont propos es sur le site internet www lux valence com image consulats Le pictogramme indique 3 WA qu une de ces rubriques est 2 en lien direct avec le livret 2 S Valence of Directeur de la publication V ronique Cayla Propri t Centre National du Cin ma et de l image anim e 12 rue de L beck 75784 Paris Cedex 16 T l 01 44 34 34 40 R dacteur en chef Simon Gilardi Centre Images R dacteurs du dossier Jean Francois Buir Julie Garet rubriques p dagogiques Conception graphique Thierry C lestine Conception juin 2010 Centre Images p le r gional d ducation artistique et de formation au cin ma et a l audiovisuel de la R gion Centre 24 rue Renan 37110 Chateau Renault T l 02 47 56 08 08 www centreimages fr Achev d imprimer
21. Entretemps plusieurs films de Lubitsch dont L homme que j ai tu ont fait le proc s sans appel du militarisme allemand et en 1935 Phomme qui sauva l conomie du cin ma de son pays est d chu de sa nationalit par le r gime nazi ACTEURS amp sur MAIS pas avec n importe qui Lubitsch opposant au culte du chef nazi la relative d mocratie des com diens qui ne va pas de soi au d but du film on aimerait c l brer tant les seconds que les premiers r les de 10 Be or Not to Be Des seconds voquons au moins deux acteurs l un qui migra d Allemagne aux Etats Unis avant l arriv e de Hitler au pouvoir l autre apr s celle ci Venu en Am rique en 1924 Sig Ruman devint une figure comique dans les ann es 1930 entre autres dans les films des Marx Brothers Son interpr tation d Ehrhardt est irr sistible face au jeu velout de Lombard et l underplay de Benny sa prestation s av re subtile dans l norme jouant de toutes ses res sources faciales et gestuelles pour incarner au sens fort ce bourreau aux pieds d argile En 1933 Felix Bressart quitta l Allemagne apr s y avoir tenu dix huit r les importants dans des com dies de la D pression Lubitsch lui donne celui du vendeur Pirovitch dans The Shop Around the Corner 1940 qui dispara t d s que son patron demande ses employ s leur opinion sinc re Entre exc s tragique et effacement le personnage de Greenberg dans To Be or Not
22. Il est aussit t arr t et incarc r Pour pr parer la sortie le 13 juin 1941 de Chasse l homme le film antinazi r alis par Fritz Lang le service publicitaire de la Fox pr tend que son plan final le prota goniste sautant en parachute sur l Allemagne est une r ponse chaud cet v nement ce qui est pure affabulation partir d un hasard En revanche la fin de To Be or Not to Be y fait effectivement allusion D abord a a t Hess mainte nant c est lui dit l un des deux paysans cossais propos de Hitler Bronski A n en pas douter cette r f rence l actualit est m me la raison pour laquelle les com diens sautent sur l cosse et non sur l Angleterre KLEMPERER Victor Dans LTI la langue du Troisi me Reich qu il crivit clandestinement sous le r gime nazi le philologue consigne les perversions et les appauvrissements que ce dernier fait subir la langue allemande Dans 10 Be or Not to Be cette langue semble ne plus tendre que vers le seul Heil Hitler et le d but du monologue d Hamlet se voit soup onn de n tre qu un code secret Ironiquement c est Ehrhardt qui pointe un crime fait la langue Ce que Tura faisait Shakespeare nous le faisons maintenant la Pologne LANG Fritz Apr s Chasse l homme histoire d un Anglais qui juste avant la guerre laisse passer une chance de tuer Hitler Fritz Lang r alise trois autres films antinazis d
23. Sam Quelle universit enseigne le cin ma Mais le th tre si c est de la litt rature On publie tes pi ces Un jour ou l autre un tudiant travaillera sur toi tu as une sacr e chance Ce regret d cida t il Lubitsch en 1941 aborder de front le th tre qui fut toujours sa s ve dans un de ses films Quoi qu il en soit on esp re que personne aujourd hui ne contestera l int r t d tudier To Be or Not to Be Th tre nazisme cin ma Shakespeare Hitler Lubitsch voil de quoi occuper les esprits Le probl me serait plut t que le s rieux p dagogique passe c t de l extraordinaire force co mique d un des films les plus malicieusement h roiques de histoire du cin ma tre ou ne pas tre trop didactique telle est la question 1 A laugh is nothing to be sneezed at r plique de Greenberg Felix Bressart dans To Be or Not to Be RFA R DACTEUR EN CHEF Simon Gilardi REDACTEURS DU DOSSIER Jean Francois Buir critique et enseignant de cin ma r alisateur de courts m trages Julie Garet rubriques p dagogiques auteur d une these sur les relations entre personnages f minins et actrices dans les films de George Cukor enseignante en esth tique et en histoire du cin ma l universit Paris 8 depuis 2000 elle intervient pour les enseignants et les l ves dans le cadre de Lyc ens et apprentis au cin ma depuis 2008 CN el
24. Spencer Sobinski et Maria s interrompt lorsque l Allemagne envahit la Production Ernst Lubitsch Pologne En ruines Varsovie vit sous la terreur du colonel Alexander Korda Ehrhardt et de la Gestapo De Londres o il a rejoint la Royal Distribution tats Unis 1942 Air Force Sobinski est renvoy en Pologne pour tenter d emp United Artists cher le professeur Siletsky espion la solde des nazis de leur France 2010 Tamasa livrer une liste de noms qui mettrait la R sistance en p ril Dur e 1h 39 Celle ci ne pouvant intervenir temps c est la troupe de th tre Formats 35 mm noir et blanc 1 1 37 qui va devoir agir Les Tura et leurs camarades mettant a profit Tournage 6 nov au 23 d c 1941 les uniformes nazis de la pi ce Gestapo font ce qu il savent faire Sorties tats Unis 6 mars 1942 le mieux jouer et repr senter pour mettre Siletsky hors d tat France 21 mai 1947 de nuire et berner le colonel Ehrhardt Au terme de vertigi i neuses p rip ties toute la troupe parviendra s envoler pour la Interpr tation Grande Bretagne o elle pourra de nouveau jouer Hamlet Maria Tura Carole Lombard Joseph Tura Jack Benny Cay 1 I Ni Lieutenant ell ET pi cll Stanislav Sobinski Robert Stack Lustspiel einer Trag die eg Emst Lubitsch Professeur Aa Anan N e Ve Sressart Rober Stak Bs Alexander Siletsky Stanley Ridges Se Colonel Ehrhardt Sig Ruman Affiche allemande Hans Hillmann Greenbe rg Feli
25. UR Lubitsch ou Pair de ne pas y toucher De ce cin aste mort cinquante cinq ans en 1947 qui semble s tre cantonn au genre comique nous n voquerons que quelques facettes Le Berlinois On croit souvent Fritz Lang berlinois et Lubitsch viennois alors que c est l inverse Lubitsch est n dans le milieu de la Konfektion son p re tait tailleur pour dames Le petit commerce de v tements marque ses premiers films allemands et son souvenir se perp tuera dans la maroquinerie de The Shop Around the Corner Plus g n ralement chez Lubitsch le v tement est roi et m me il fait le roi ou l officier de la Gestapo De l esprit juif berlinois Lubitsch conservera un sens du grotesque ac r que r sume cette phrase Ma th orie de base est que l tre humain le plus digne est ridicule au moins deux fois par jour L acteur Au lieu de reprendre l affaire de son p re Lubitsch embrasse la carri re d acteur et fait ses classes chez le grand metteur en sc ne Max Reinhardt de 1911 1918 l influence de ce dernier sur la conception du d cor et de la sc nographie de ses films sera d terminante Sur sc ne Lubitsch ne joue que des petits r les dont celui du deuxi me fossoyeur d Hamlet que rappelle dans To Be or Not to Be l image des seconds couteaux du th tre Polski maniant la pelle dans Varsovie en ruines Il a plus de succ s au cin ma mais son emploi de Juif fruste et arriviste est tellemen
26. autres sous l in fluence de Winston Churchill courant 1941 Signalons toutefois que le mot polonais pour victoire est zwyciestwo WALSH Raoul Dans le cadre de l effort de guerre hollywoodien le cin as te am ricain Raoul Walsh fut Pun des plus prolifiques puisque de Sabotage Berlin Aventures en Birmanie il r alisa cinq films qui en rel vent La sc ne o Sobinski vient d tre parachut en Pologne rappelle fortement le style nerveux des sc nes d action des films en question mais ceux ci ont tous t r alis s apr s To Be or Not to Be Si influence il y a c est donc des r alisations ant rieures de Walsh westerns ou films de gangsters WHY WE FIGHT De m me le commentaire off employ au d but de To Be or Not to Be particuli rement lors du bombardement de Varsovie et de la r ac tion de la R sistance polonaise fait irr sistiblement penser a la s rie documen taire Pourquoi nous combattons initi e par le cin aste Frank Capra un commen taire extr mement dynamique faisant partie de la batterie de proc d s rh to riques dont cette s rie use en abondance Celle ci cependant n apparaitra sur les crans qu en 1943 M me si le commentaire galvanisant n est videmment inven t ni par Capra ni par Lubitsch le film de ce dernier pr figure l en raccourci une forme majeure que prendra la propagande cin matographique am ricaine Imbrication des genres On pourra aborder la
27. ce remplit peut tre une fonction de repoussoir Cest un personnage essentiellement n gatif pour les autres et pour lui m me F t elle forc e par les v nements et dtt elle passer par des masques et des r les divers l invention au sens de d couverte de soi m me est une possibilit que To Be or Not to Be laisse entrevoir elle est d j en puissance dans son titre sans la pousser plus avant En 1959 North by Northwest La Mort aux trousses d Alfred Hitchcock creusera cette perspective La Mort aux trousses Warner Je ne suis fou que par vent de nord nord ouest Hamlet IL 2 Comme le film de Lubitsch celui d Hitchcock joue sur l intelligence Son protagoniste Roger Thornhill se doit d en faire preuve lorsqu il s av re que des intelligences sup rieures cherchent r genter sa vie dans To Be or Not to Be l habituelle intelligence des personnages de Lubitsch devenait d j imp ratif vital Ces intelligences surplom bantes n ont plus pour nom MI5 et Gestapo mais CIA et suppose t on KGB une certaine continuit existe cependant puisqu un agent de ce dernier voque un vieux truc de la Gestapo Bien que Roger Thornhill Cary Grant ait des dispositions la simulation c est un publicitaire il n est pas un com dien de profession contrairement Tura et ses comparses Pourtant partir de son enl vement initial et jusqu la fin du film le maitre espion Vandamm James
28. cettes dans l ordre sc ne cou lisses loge sous sol bureaux salle promenoir balcon l h tel avec son esca lier autour duquel se distribuent de vastes couloirs et d aussi vastes apparte ments Mais la plupart sont fond s dans leur fonctionnement cin matogra phique sur le principe de la boutique et de l arri re boutique ou de la chambre et de l antichambre chacun de ces deux termes pouvant constam ment permuter en termes d importance aux yeux du spectateur en un vertigi neux renversement du montr et du cach du champ et du hors champ du public et du clandestin C est le cas de l appartement de Siletsky comme de la librairie des vrais locaux d Ehrhardt comme des faux ces derniers communi quant avec la salle du th tre Polski et m me du promenoir du th tre avec ses salons pour hommes ou femmes Ehrhardt tentera d user de cette configu ration sur un mode psychologique 18 les nazis ayant une f cheuse ten dance faire du d cor un enjeu de pouvoir qu ils d truisent et occupent loi sir l occupation nazie de la plupart d entre eux les Tura et leur bande r pondent par une tentative constante d infiltration leurs risques et p rils car chaque d cor est susceptible de se transformer en tombeau C est le devenir possible de tout d cor l h tel Europe pour Maria le th tre pour Siletsky le si ge de la Gestapo pour Tura et l appartement des Tura pour Ehrhardt Ce devenir to
29. e Siletsky qui donne celle ci un ton presque badin ou dans ces moments o l on peut remarquer la r action d un personnage tiers spectateur int gr la sc ne l habilleuse de Maria levant un sourcil flegmatique aux arrangements de celle ci avec la conjugalit Maria souriant d une pique la vanit de son mari Dobosh c ur par la fatuit de Tura le capitaine Mumm accabl par le cabotinage de Rawitch Ehrhardt toujours inquiet de ce qui se dit La transparence lubitschienne permet aussi la plus grande clart lors des mises en sc ne de mises en sc ne entre autres celle du promenoir du th tre Polski succession r gl e des mouvements de Greenberg et de la fausse garde d Hitler ou celle la fois grossi re et moderniste des nazis faisant de Silestky une sorte d installation macabre pour spectateur unique Le micro s av re aussi discret que la cam ra et la musique audacieusement rare dans le cadre d une com die Citons pourtant deux moments de mise en sc ne sonore l hymne hitl rien en contrepoint tragique du monologue de Shylock 21 et la troupe de th tre muette coutant sur sc ne Hitler au Reichstag acteurs devenus auditeurs d une folie qui les d passe 4 Puisqu il n est pas question de donner la parole un instant au Fuhrer seule la clameur du public nous est donn e entendre l effet est encore plus terrible Une foule hurlant non de plaisir au spectacle mais de fanatisme deva
30. e Tura plac sur celui de Maria amour et rivalit M lange voca teur d emphases th trale et martiale la musique claironne pour mieux se rar fier par la suite IL Lubinski Kubinski Lominski Rozanski et Poznanski avant que les jeux de mots dangereux ne se multiplient en voici un inoffensif pour l instant base de noms Litanie de patronymes typ s dont le premier polonise celui du cin aste qui pr figure lallit ration Sobinski Siletsky p les positif et n gatif entre lesquels seront pris les poux Tura Le second inventaire de ces cinq patronymes apr s le bombardement de Varsovie sera muet et tragique Dans ce film o la vanit le dispute l h ro sme les noms comme les mots deviendront des f tiches comiques le grand acteur Joseph Tura voire inqui tants Camp de concentration Ehrhardt et le moteur du r cit sera une liste de noms ne pas divulguer Soudain la classique voix off de narration se fait commentaire de propagande qui alarme le spectateur Tout le monde semble regarder dans une m me direction pour aussit t dissoner Hitler s int resserait il l picerie de M Maslowski D s cette remarque d pla c e au regard du s rieux attendu d un commentaire engag com mence le jeu avec les niveaux de repr sentation et avec la conscience qu a le spectateur de ceux ci d autant qu il s agit d une sc ne de spectacle la star la vitrine le r
31. e de r p tition le fait quelle soit surinvestie de signification n y pas r pondre correcte ment serait un crime la rend absurde elle sera de plus en plus un automatisme d sesp r Secundo cette sc ne est fond e sur la r ac tion retard e alors qu Ehrhardt le v ritable colonel de la Gestapo aura plut t tendance sur r agir car pour lui malgr son statut tout fera menace pour les nazis aussi il sera de plus en plus question de vie ou de mort Tertio appliqu aux deux bras le geste du salut nazi deviendra mains en l air de Tura Ehrhardt face au revolver de Silestky Du vainqueur au vaincu il y a peu Le deuxi me cart par rapport au vraisemblable se mesure la hau teur de la porte du bureau Le Wilhelm Kuntze annonc qui appa ra t dans son cadre s av re tre un enfant un peu trop parfaitement aryen Pr figurant deux des principaux proc d s nazis venir gra tification le don du petit tank et insinuation propos du p re du gar on la man uvre qu exercent les deux hommes se d nonce comme grossi re au moins autant que la blague du subordonn propos de Hitler Rendement maximal des signes Hitler s tant arr t devant un deli catessen la blague en question qui sera elle m me recycl e est base d picerie eau de vie hareng et morceau de fromage Lesprit de s rieux nazi ne pouvait que terrifier Lubitsch Sa revanche sur un monde o m me l humour d
32. e doit pas tre pr sent explicitement ou justifi ou pr sent d une mani re attrayante Lubitsch et beaucoup d autres r alisateurs ont contourn avec bonheur ce code au nez et la barbe des censeurs en utilisant des subterfuges vari s l uvre dans To Be or Not to Be Il faut noter que le mot adult re n est jamais prononc et quaucun l ment n apporte de preuve irr futable de son existence En remarquant que le film ne se d roule pas aux tats Unis le p ch vient toujours d Europe on pourra demander aux l ves de d couvrir les diff rentes strat gies de contournement de Lubitsch On peut en noter quelques unes les sous entendus dans les dialogues on sera particuli rement attentif aux remarques d Anna l habilleuse de Maria le double discours de quoi Sobinski et Maria parlent ils vraiment lorsqu ils voquent le m tier du jeune homme et ses talents de pilote le hors champ que se passe t il lorsqu Anna sort de la loge et laisse entrer Sobinski l ellipse si l on sait que Maria et Sobinski se sont vus pour aller au caf par exemple aucune sc ne n a t montr e au spectateur la m taphore par une obligation narrative Sobinski dort dans le lit de Tura met ses pantoufles et sa robe de chambre prenant litt ralement la place du mari l gitime Pour finir on pourra engager une r flexion sur la place et le statut de Maria Tura dans le film
33. e est par d finition le lieu de la repr sentation rares sont les r elles repr sentations qui s y d roulent On pourra recenser les diff rentes uti lisations du lieu et la mani re dont elles offrent pour la plupart une r flexion passionnante sur la fronti re fluctuante entre l art et la vie la v rit et le mensonge Il s agira de d termi ner dans un premier temps la mani re dont Lubitsch met en sc ne les repr sentations en dehors de la sc ne Maria et sa grande sc ne de s duction dans sa loge la troupe enti re qui joue son r le et sa vie de gestapistes On notera au passage le g nie de Lubitsch lorsqu il montre la mani re dont les acteurs attendent non pas que le rideau se l ve mais que la porte s ouvre pour commencer leur interpr tation Toutefois c est bien sur la scene de th tre que l v nement le plus r el mais aussi le plus thea tral arrive la mort de Siletsky qui tombe sur sc ne sous les projecteurs et apr s le lever de rideau comme un v ritable acteur tragique wuilar om 0 Q o tence pny Mage h GURE Abyme de r flexions En 1921 est cr e la pi ce de Luigi Pirandello Six personnages en qu te d auteur qui comme lo Be or Not to Be commence par une r p tition interrompue Parangon du th tre dans le th tre aux yeux des modernistes la pi ce ins pire le pirandellisme th orisation simpliste de la pens e de l auteur i
34. e les plans sont bouleversants mais bien les nazis et leur doctrine Lubitsch ne confond pas le sinistre et le comique mais assume pleinement leur coexistence dans son film ainsi que le confirme une mise en sc ne toute en ruptures de ton et en doubles discours Il semble que le manque de recul face 4 la situation de 1942 et l indignation aient emp ch Crowther de distinguer toute la complexit et la subtilit de Lubitsch Ses remarques lapidaires sur le jeu de Jack Benny sont en ce sens r v latrices De quel jeu parle t on Le jeu r el de Jack Benny n intervient qu peu d occa sions La plupart du temps il se superpose d autres le jeu du com dien Tura grim en Hamlet ou en repr sentant de la Gestapo et vaniteux face la troupe le jeu de la s duction et de la trompe rie du mari avec sa femme SELECTION VIDEO amp BIBLIOGRAPHIE Sur To Be or Not to Be Peter Barnes To Be or Not to Be BFI Films Classics 2002 en anglais tude historique et cri tique par le dramaturge Peter Barnes Jean Louis Comolli Francois G r Deux fic tions de la haine Cahiers du cin ma n 286 288 et 290 291 mars mai et juillet ao t 1978 analyse approfondie de la premi re s quence du film Jean Douchet Ernst Lubistch L Art d aimer ditions de l toile Cahiers du cin ma 1987 Sur Ernst Lubitsch Eithne et Jean Loup Bourget Lubitsch ou la satire romanesque Stock cin ma 1987
35. er auquel la noirceur sous jacente de To Be or Not to Be devra sans v ae Mexander Korda doute beaucoup Le personnage de Tura est crit d s le d part en pensant Jack Benny En revanche le r le de Maria est attribu dans un premier temps a Miriam Hopkins qui avait t la vedette de trois films de Lubitsch Mais les egos ne jouent pas que dans la fiction Des tensions naissent car Hopkins demande que son r le soit toff par rapport a celui de Benny Exit Hopkins entr e en sc ne de Carole Lombard qui r ve depuis longtemps de travailler avec Lubitsch et propose ses services Avec son humour habituel elle argue du fait que son ami Jack Benny a les meilleures r pliques pour obtenir la premi re place au g n rique Tournage idyllique sortie endeuillee Lubitsch sait s entourer l image il fait appel Rudolf Mat polo nais de naissance dont le premier haut fait fut le travail sur La Passion de Jeanne d Arc de Carl Dreyer en 1928 Son art des lumi res et des ombres sert un film en grande partie nocturne par exemple dans la sc ne visuellement complexe de la traque de Siletsky dans le th tre Vincent Korda officie au d cor deux ans auparavant il a pr sid la folie d corative du Voleur de Bagdad produit par son fr re Alexander Le tournage rapide et efficace fait mentir le lieu commun selon lequel une com die ne saurait se tourner dans la bonne humeur Benny se souviendra de Lubitsch
36. et Ange pour ne citer que la p riode am ricaine ils comptent pourtant parmi ses plus beaux L apolitique Lubitsch devint c l bre pendant la Premi re Guerre mondiale gr ce ses com dies la suite de sa carri re sera souvent tax e d apolitisme et d absence de sens historique d autant que ce n est pas le nazisme qui l incite a quitter l Allemagne mais en 1922 linvitation de Mary Pickford Une chose est s re il fuira toujours la doctrine A la fable antisovi tique un peu pesante de Ninotchka on peut pr f rer le portrait de Siletsky id ologue dangereux car s duisant Le fait m me qu il apparaisse dans le film comme un porteur de th ses fussent elles cens es dans un premier temps tre antinazies le rend d embl e sinon suspect du moins peu lubitschien Pour autant ce serait une erreur de faire de la fameuse Lubitsch touch une fa on de ne pas y toucher car la plupart de ses films jouent sur la relation entre quatre termes sexe pouvoir argent et classe sociale Une des meilleures d finitions de cette touch fut celle d un censeur On sait ce qu il dit mais on ne peut pas prouver qu il le dit qui la place sous le signe de la transgression Evolution politique Dans les superproductions de la p riode allemande la destin e collective tait inconciliable avec le bonheur de l individu dans To Be or Not to Be une petite communaut d gocentriques uvre pour le bien de son peuple
37. evient dangereux et o une plaisanterie peut d cider de votre sort consiste en l occurrence extraire de la pr sente blague un comique en quelque sorte au carr lequel joue sur notre capacit de tol rance aux carts qui finissent par nous faire pas ser d un niveau de repr sentation un autre Cela permet au cin aste de d tourner le spectateur d une autre forme d intol rance inh rente aux films engag s celle des indignations morales trop faciles IV Arrive enfin l cart qui d cide du passage un nouveau niveau de repr sentation Succ dant l enfant Hitler appara t dans le cadre de la porte et c est le Heil myself de trop qui fait tomber le quatri me mur pour d voiler par contrechamp dans un espace dont nous n avions pas conscience jusqu alors Dobosh le metteur en sc ne de la pi ce Gestapo Au lever de bras de Hitler Bronski r pond le bras de Dobosh qui s abat sur la table soulevant plusieurs questions dont un figurant n a t il pas voix au chapitre Bronski dans le r le d Hitler ne prononcera plus un mot jusqu la fin du film sauf un le fatidique Sautez avec lequel il se r appropriera la puissance de son mod le dans les arts du spectacle le vraisemblable est il une cat gorie pertinente ou n est ce que l apparence superficielle de la v rit infi niment relativisable Le Hitler ressemblant est une photo de Bronski enfin
38. gyel est ainsi l auteur de nom breuses pi ces adapt es au cin ma dont Paradis d fendu 1924 et Ange 1937 r alis s par Ernst Lubitsch mais galement l origine de l histoire de Ninotchka Le sc nariste Edwin Justus Mayer a crit pour sa part plusieurs sc narios originaux mais aussi des pi ces de th tre Il a galement crit le sc nario de D sir r alis par Frank Borzage et produit par Ernst Lubitsch en 1936 Ainsi tout en tant par certains aspects un film sur le th tre et non pas un film th tral To Be or Not to Be a t crit pour le cin ma Les contraintes notamment li es l utilisation de l espace et l uni cit des lieux ne sont qu apparentes et r sultent de choix cin matographiques On notera d ailleurs les fr quents changements d espaces et de temporalit s l utilisation de la voix off et du flash back peu com patibles avec un dispositif th tral comme mat riau original Pr cisons pour finir que To Be or Not to Be a lui m me t adapt en pi ce radiophonique en 1943 en films un remake de Mel Brooks en 1983 et une version Bollywood Maan Gaye Mughal E Azam en 2008 et in vitablement en pi ce de th atre cw Mill Winston Churchill CONTEXTE Petit ab c daire des temps troubles BENJAMIN Walter Le philosophe allemand met en lumi re une rivalit nouvelle entre l art et la politique en tant que syst mes de re
39. hrhardt la Gestapo Il lui r v le que Siletsky a t tu son corps a t trouv au th tre Polski lors de la pr paration d une repr sentation en l honneur du F hrer de passage Varsovie Il ne s agit donc pas de Tura mais Maria apprend du colonel qu il avait rendez vous avec le professeur le jour m me Maria partie Siletsky appelle Ehrhardt pour confirmer le rendez vous 17 Encha nement de d cors 01 13 27 01 14 38 Maria va l h tel Europe pour emp cher Tura d aller au rendez vous mais il est d j parti leur appartement il n a fait que passer pour frapper Sobinski Elle va au sous sol o vivent les com diens et les exhorte sauver Tura 18 Com die macabre 01 14 38 01 20 53 Ehrhardt laisse Tura mariner dans un salon o a t plac le cadavre du vrai Siletsky Heureusement il a une barbe postiche de rechange et un rasoir port e de main Dans la confrontation qui s ensuit entre le vivant et le cadavre Ehrhardt tire la barbe de ce dernier qui lui reste dans la main Le colonel s excuse mais la troupe de th tre d guis e en unit de s curit du F hrer vient av rer limpos ture de Tura et l emm ne 19 Querelles d acteurs 01 20 53 01 22 27 Dans le sous sol les com diens se disputent maintenant toute la troupe est en p ril Mais le metteur en sc ne a une id e 20 Mari femme amant bis 01 22 27 01 23 28 Appartement des
40. i re des lunettes et une barbe qui tire les oreilles des meilleurs limiers de la Gestapo m taphoriquement par lant Ces personnes vont certainement savourer les provocations bur lesques de ce film Et beaucoup plus aimeront les retournements de situa tion et le suspense de l intrigue Mais il est difficile d imaginer quelqu un pouvant supporter sans un battement de cil le bouleversant raid a rien contre Varsovie juste apr s une s quence burlesque ou le spectacle de M Benny jouant une sc ne de com die avec un cadavre de la Gestapo M Lubitsch avait un sens de l humour trange et un sc nario embrouill quand il a r alis ce film Comme toujours avec les films de Lubitsch il est injuste de tout raconter Je me contenterai de dire qu il raconte cette fois un conte merveilleux sur une compagnie d acteurs polonais Varsovie tout juste envahie et sur la mani re dont les com diens audacieux vont tre plus fut s que la stupide Gestapo Opportun ment la compagnie a r p t une pi ce anti nazie et ils sont donc capables d endosser leur r le et leurs costumes quand la situation l exige En tant que stars de la compagnie M Benny et Miss Lombard le couple Lunt en version polonaise manifestement sont invit s tenir les r les principaux et se confrontent aux dangers de l intrigue Et les astuces gr ces auxquelles Miss Lombard charme les loups nazis et Jack Benny les embobine avec deux costumes tiennen
41. icid e Wellman 1937 une pro vinciale simule une maladie incurable pour devenir c l bre et Mr and Mrs Smith Hitchcock 1941 Dans To Be or Not to Be font merveille son port altier son phras suspendu sa mani re d enchainer rapidement les segments du texte sans les charger de sens cf la fa on dont elle dit l m terribly frightened and terribly thrilled bye et de teinter la s duction d humour m lange indis sociable de feinte et de sinc rit Comme Maria Tura elle fut pouse de com dien William Powell puis Clark Gable avec lequel elle forma un couple id al que seule sa mort en 1942 dans un accident d avion put briser N Benjamin Kubelski d un p re juif polonais Jack Benny fut une des per sonnalit s comiques am ricaines les plus populaires du XXe si cle m connue en Europe car essentiellement radiophonique puis t l visuelle Sinon tenter d exploiter sa renomm e le cin ma ne sut trop que faire de lui d o l tonne ment devant une filmographie constitu e d une vingtaine d opus oubliables et d un chef d uvre irr futable Benny avait cr la radio un personnage carac t ris par des d fauts vanit pingrerie et m chancet port s un point extr me mais compens s par les perp tuelles offenses que lui infligeait une bande de comparses tr s soud e dont son pouse Mary Livingstone Outre son timing comique parfait fond sur des pauses silencieuses qui ne deva
42. ideau qui descend les passants qui ne forment plus qu un regard tonn Sur cette chelle nous mon tons d embl e d un cran mais malgr l incongruit soulign e de cette situation limite d s le d but du film Adolf Hitler seul dans une rue de Varsovie nous voulons bien continuer un temps faire comme si ce moustachu tait Hitler Question en suspens comment cette situation va t elle pouvoir se justifier III R ponse par un surcro t de repr sentation Tout a commenc au quartier g n ral de la Gestapo l encore nous acceptons de jouer le jeu jusqu ce qu il ne soit plus tenable et qu un nouveau niveau de repr sentation se fasse jour Mais d ici la nous sommes pr ts laisser passer un grand nombre d carts par rapport au vrai semblable Premier cart un subordonn arrive dans le bureau du colonel de la Gestapo fait le salut hitl rien le colonel y r pond en baillant puis se ressaisit effray d avoir sembl prendre ce salut la l g re Effet de com die mais un nazi n est il pas humain apr s tout ce que Siletsky confirmera dans la sc ne 10 en adaptant son compte le monologue de Shylock De la com die comme moyen d exprimer l humain trop humain jamais trop pour Lubitsch Trois remarques Primo le Heil Hitler n est qu un moignon de r plique signal de la simplification nazie de la langue allemande et c est la premi re faire l objet du comiqu
43. ient pas d plaire au cin aste des ellipses Lubitsch sut voir ce qui ferait de Benny l interpr te id al de Joseph Tura le c t fou de lui m me de son personnage Benny stup fait qu il lui proposat le r le aurait accept d embl e sans m me lire le sc nario Contagion inconsciente ou d lib r e Quelque chose de lhu mour bennyesque se retrouve m me dans des sc nes o il ne joue pas tel le suicide d risoire du colonel Ehrhardt GENESE Une tragique com die En 1941 Ernst Lubitsch doit un second film la United Artists apr s Illusions perdues La compagnie est plus lib rale que les major studios dont il a Vhabitude si les salaires sont moindres l ind pen dance artistique est accrue Tenu pour politiquement engag il a produit Blockade un des rares films qui voquent la guerre d Espagne avant 1940 Walter Wanger assure la production de To Be or Not to Be puis se retire du film Heureusement le producteur anglais Alexander Korda prend le relais Korda qui l image de Siletsky aurait t cette poque espion mondain en Am rique pour le compte de l Angleterre Lubitsch obtient un contrat excep tionnel qui comprend la haute main sur le montage et l assurance que son ami Korda sera son unique interlocuteur Toutefois la United Artists conseille fortement de changer le titre quelle juge d courageant pour les spectateurs Faisant mine d acquiescer Lubitsch propose The Censor Forbids Interd
44. ion qui se d gage de la sc ne notamment gr ce l interpr tation de Greenberg Felix Bressart et l id e magnifique de Lubitsch filmer Hitler mu l coute du monologue de Shylock 13 14 Champ contrechamp Le champ contrechamp est la solution de montage la plus courante pour fil mer un dialogue en montrant tant t un interlocuteur tant t l autre Son utilisation dans To Be or Not to Be sans tre fr quente apporte des informations fondamentales sur les rapports entre les personnages en accordant une place essentielle au spectateur tour tour frustr il ne voit pas la r action d un des person nages ou privil gi le plan resserr lui permet de mieux saisir les mo tions Aucune sc ne du film n est int gralement en champ contrechamp mais Lubitsch en ins re quelques uns toujours de fa on concert e dans les scenes de discussion de confronta tion Citons ainsi plusieurs exemples la premiere tirade de Shylock Greenberg est l acteur Bronski est le spectateur admiratif pour la derniere prestation de Greenberg il importe de garder en m moire cette admiration de Bronski la confrontation s duction entre Maria et Siletsky l utilisation du champ contrechamp permet de souli gner a la fois le comique de r pliques m morables et la prestation des deux actrices Maria et Carole Lombard la confrontation Tura Siletsky chaque fois le champ contrechamp
45. is Plus singuli rement c est jusque dans sa fiction que To Be or Not to Be est presque exclusivement un film d int rieurs Les sc nes cens es se d rouler essentiellement en ext rieur sont rares se cantonnant au d but dans la rue var sovienne la fin en cosse et au moment qui s loigne le plus du monde th a tral 5 9 Car cette tendance l int riorisation voque le th tre mais un th tre mis en mouvement par le cin ma l exemple le plus flagrant tant le moment o les d cors s enchainent 17 apr s que Maria a quitt celui de la Gestapo pour tenter de pr venir son mari de ne pas s y rendre Si Shakespeare peut se jouer partout ailleurs que sur la seule sc ne du th tre Polski c est parce que ce monde entier est une sc ne o circulent blagues et r pliques D o qu il puisse tre transform comme un pur d cor l h tel Europe en nid d espions le th tre Polski en si ge de la Gestapo l appartement des Tura en th tre de boulevard Antichambres et tombeaux Les d cors r currents du film sont le th tre Polski l appartement des Tura l h tel Europe le si ge de la Gestapo et ce lieu trange qu est le local en sous sol o semble s tre r fugi e toute la troupe voquant une communaut de Sur le tournage de To Be or Not to Be proscrits r duits au silence Certains d cors sont plus subdivis s que d autres le th tre Polski dont on d couvre plusieurs fa
46. it Maria arrive et r v le que Siletsky doit rencontrer le colonel Ehrhardt a la Gestapo d s le lendemain Bien que d pass Tura d cide de s occuper du professeur 12 Maria sort le grand jeu 00 44 39 00 49 28 Maria rejoint Siletsky l h tel Un des com diens d guis en officier allemand passe prendre Siletsky pour l emmener le soir m me la Gestapo avec la liste On interdit Maria de quitter l h tel 13 Le th tre des op rations 00 49 28 01 00 06 Dans le th tre Polski maquill en si ge de la Gestapo Tura d guis en Ehrhardt apprend de Siletsky le message de Sobinski Maria et le fait qu un double de la liste se trouve l h tel Europe Siletsky le d masque tente de s enfuir et est abattu par Sobinski 14 Duettistes 01 00 06 01 04 46 l h tel Maria doit attendre avec le capitaine Schultz venu chercher Siletsky Survient Tura transform en Siletsky il dit Maria de br ler les papiers de celui ci et repart avec Schultz la Gestapo 15 Un grand Guignol 01 04 46 01 10 46 Au si ge de la Gestapo Siletsky rencontre le colo nel Ehrhardt Les deux leaders de la R sistance dont il lui donne les noms ont d j t fusill s Il doit repartir d s que possible Londres et propo se d y aller avec Maria en tant qu espionne Ehrhardt renaclant il lui propose de la rencontrer 16 Un cadavre dans le d cor 01 10 46 01 13 27 Maria vient rencontrer E
47. it par la censure ce qui ne manque pas d ironie l gard de la demande qui lui est faite tout en restant li une sc ne du film l interdiction de la pi ce Gestapo Mais comme il l avait sans doute pr vu ce sont les deux vedettes qui s opposeront ce changement avec d autant plus de poids qu elles ont investi de largent dans la production D autre part on recom mande au cin aste d voquer aussi peu que possible la jud it dans le film On mesure l ind pendance d un Chaplin qui un an plus t t emploie ouvertement le mot Jew dans Le Dictateur Les Juifs est remplac par nous dans le monologue de Shylock qui gagne en universalit sans perdre son identit initiale car Lubitsch contournant l interdit gr ce son habituel recours l indirect fait dire le texte de l usurier juif de Shakespeare par Greenberg Or celui ci confie Rawitch au d but du film Ce que vous tes je n en mangerais pas quoi Rawitch r pond Vous osez me traiter de cabot Jouant sur le double sens de ham la fois jambon et cabot cet change confirme s il en tait besoin la jud it du personnage To Be or Not to Be se base sur un sc nario original une premi re chez Lubitsch qui pour ses films parlants tait jusqu alors toujours parti d une pi ce ou d une op rette la plupart du temps europ enne Il crit le sc nario avec l ancien dramaturge Edwin Justus May
48. les principaux l ments permettant de rep rer l utilisation des codes des dif f rents genres qui coexistent d sor mais jusqu l pilogue en Ecosse D COUPAGE S QUENTIEL Le minutage indiqu entre parenth ses corres pond au DVD dit par StudioCanal 1 G n rique d but 00 01 46 2 Coups de th tre 00 01 46 00 07 33 Stupeur en ao t 1939 Varsovie Hitler est seul en pleine rue Tout a commenc la Gestapo o le F hrer appara t au cours d un interrogatoire mais il s agit de la r p tition au th tre Polski d une pi ce politique Gestapo Le metteur en sc ne refuse une initiative comique de Bronski l interpr te d Hitler et le d bat vient porter sur sa ressemblance avec le F hrer Pendant ce temps Joseph et Maria Tura le couple vedette ont une querelle d histrions Pour prouver sa ressemblance avec Hitler Bronski d ci de de se montrer dans la rue 3 To be or not to be 00 07 33 00 15 55 Une repr sentation d Hamlet Bronski et Greenberg qui r ve de jouer Shylock d plorent de n tre que des seconds couteaux et les Tura se chamaillent Au d but de son monologue Tura voit un specta teur partir le lieutenant Sobinski qui rejoint Maria dans sa loge ce moment convenu 4 To be or not to be bis 00 15 55 00 20 55 La pi ce Gestapo est interdite remplac e par Hamlet Sobinski part de nouveau au d but du monologue de Tura Annonce de la g
49. mbeau est concentrique sur le mod le l h tel Europe des papiers dans la malle dans la chambre dans lappartement dans l h tel ce sont Varsovie et m me la Pologne qui risquent de se refermer sur la troupe d o l urgence s enfuir l envers id aliste de ces emboitements mor tif res est l extension concentrique de la notion de communaut humaine de cet tre hyper individuel qu est l histrion la troupe au peuple humanit leur envers cruellement dr le c est le saut dans le vide des deux pilotes nazis Et les portes bien s r sont cruciales qui permettent de circuler entre les l ments du d cor Pour avoir saisi la poign e de l une d elles a la l g re 13 Tura manque de perdre la vie Ouverture Fermeture Lubitsch est c l bre pour la mani re dont il filme les ouvertures et ferme tures de portes v ritables passages entre deux espaces et ou deux intri gues diff rentes Le d placement des personnages d un monde a l autre rel ve parfois d une v ritable chor graphie partir de To Be or Not to Be par exemple la sc ne de la venue de Siletsky au faux si ge de la Gestapo on pourra mettre au point des exercices autour de cette figure L action d ouverture ou de fermeture qui semble d une banalit absolue peut avoir des implications impor tantes pour la perception du r cit in formations donn es rythme bande son et releve de la pure grammaire cin matogra
50. ment ces visages surpris auxquels il consacre plusieurs plans Cela commence par une salve de six plans de passants varsoviens estomaqu s par la vision d Hitler en pleine rue auxquels s ajoute celui des yeux carquill s de M Maslowski derri re sa vitrine Toutes personnes d ge m r de la g n ration de Lubitsch la vieille Europe n en croit pas ses yeux c est une fillette qui ventera la m che l autre bout du film deux paysans cossais sont effa r s de voir Hitler apr s Rudolf Hess parachut au pays de Macbeth D ailleurs dans la rue comme dans l appartement des Tura le divin F hrer semblait d j surgir de nulle part Parachutages comiques contre bombardements tra giques Nombre des autres plans de surprise semblent en effet r pondre une chose tomb e du ciel Explicitement lorsque Tura trouve Sobinski dans son lit Comment tes vous l J ai saut d un avion Dans mon lit La d cou verte de Sobinski constitue le plus long plan de surprise et le seul qui soit en mouvement Cam ra et musique y pousent chaque oscillation de la stupeur de Tura qui tente de raccorder les d parts r p t s du jeune homme au th tre et sa pr sence sous ses draps C est Ehrhardt qui fait le plus les frais de ces parachutages de l appel de Siletsky cens tre mort dans son t l phone de la barbe postiche dans sa main et de la fausse garde d Hitler dans son bureau irruption
51. n cin ma rien n est gratuit Si la mise en sc ne se donne a voir cf le d but de Lhomme que j ai tu cette visibilit doit tre totalement payante en termes de narration et d motion Nulle trace de ce pur plaisir formel qu on trouve parfois chez Murnau ou m me chez Hitchcock Cette absence de gratuit serait asphyxiante si elle ne se justifiait d une philosophie selon laquelle la vie ne vaut d tre v cue qu en appr ciant le moindre de ses instants mais sans les comptabiliser ce qui tranche avec lesprit de boutique que le jeune Ernst quitta Corollairement chaque instant du film se doit d tre porteur de rire et d motion vitale mais s efface au profit du suivant loin de tout talage artistique C est la fusion parfaite entre ce cin ma et cette philosophie qui fait l art et la beaut des films de Lubitsch m s par la seule pulsion de vie A priori peu dispos s au sacrifice les histrions de To Be or Not to Be sont pr ts mettre leur existence en jeu pour pr server l art de vivre lubitschien mis en p ril par le nazisme En 1941 aux yeux de Lubitsch nul besoin d effets visibles pour intensifier la narration et l motion celle ci est g n rale et l Histoire est en marche Dans To Be or Not to Be c est donc une mise en sc ne invisible que l on assiste sans coutures apparentes le tomb du tissu filmique n ayant d gal que celui de la robe de Maria Ce pourrait tre le summum de la
52. n de soi m me Ne dit on pas dans le monde qu un homme est un grand com dien On n entend pas par l qu il sent mais au contraire qu il excelle simuler bien qu il ne sente rien r le bien plus difficile que celui de l acteur car cet homme a de plus trouver le discours et deux fonctions faire celle du po te et celle du com dien Cet extrait de la derni re page du Paradoxe sur le com dien de Diderot claire une id e forte que l on peut discerner dans To Be or Not to Be la faveur des aventures que le film raconte les com diens font l exp rience de cet homme du monde que d crit Diderot ils doivent cr er au sein de la vie r elle un texte et une fa on de le jouer qui contrairement ce qui se passe sur sc ne ne sont pas pas compl tement du moins pr tablis Cela va au del de limprovi sation en milieu th tral sur la sc ne du r el ce sont de v ritables fragments de vie que Tura et ses comparses doivent inventer sous peine de perdre celle ci d finitivement Mais c est sans doute la condition de ce p ril que des capacit s in dites peuvent se r v ler Jouant successivement Ehrhardt et Siletsky Tura d couvre peu peu en lui m me des qualit s et des facult s insoup onn es qu en tout cas la d clamation chaque soir du m me monologue m aurait pu d voiler l gard de cette d couverte positive de soi m me Hamlet qui joue la com die de la folie pour servir sa vengean
53. n que celle ci f t un peu moins imp rieuse depuis le d but de 1940 la fin de son tournage et sa postproduction ont lieu au moment o le pays suite ce traumatisme entre r solument dans le conflit la production cin matographique se mettant alors soutenir massivement l effort de guerre La fin du film est contemporaine de son tournage le planning d une journ e d Ehrhardt indique la date du 16 d cembre 1941 POLOGNE D but du film Nous sommes en ao t 1939 l Europe est encore en paix l invasion de la Pologne par l arm e allemande sans d claration de guerre pr alable consid r e comme l v nement d clencheur du second conflit mondial est annonc e pendant la deuxi me repr sentation d Hamlet Histo riquement elle a lieu le let septembre 1939 mais l affiche de la repr sentation indique la date du 31 ao t D but 1942 sont mis en activit les six camps d extermination situ s sur le sol polonais En 1941 et jusqu a la fin de la guerre les opinions publiques alli es ignorent tout de ces camps le gag r current autour de Camp de concentration Ehrhardt fait allusion aux grands centres p nitentiaires nazis et non ces lieux de destruction collective syst matique Sabotage a Berlin MGM United Artists Why We Fight U S War Department V for VICTORY Trac dans To Be or Not to Be par la R sistance sur les murs de Varsovie ce signe s est propag dans les pays alli s entre
54. nd showman sil n avait couvert toute l tendue qui va du raffinement le plus sophistiqu l norme pure et simple sid ration On r sume souvent sa touche au pre mier mais elle ne r side pas moins dans la ma trise jubilatoire de la seconde qui elle m me ne se cantonne d ailleurs pas forc ment au comique un des plans les plus m morables du film sorte de gag tragique est celui des com diens m dus s face la mort de Siletsky 1 Journal de l an pass Trafic n 1 hiver 1991 p 28 POINT TECHNIQUE Decors l exception de quelques plans documentaires avions et parachutiste en plein ciel D C A anglaise To Be or Not to Be a t enti rement tourn dans les stu dios Goldwyn ce en quoi il ne fait pas exception Dans les ann es 1930 et 1940 le fait de ne pas sortir le nez hors du studio constitue presque une r gle pour le cin ma am ricain du fait de son organisation industrielle et de l enre gistrement du son Cependant dans le cas de Lubitsch cela vient de plus loin En 1919 son film Die Puppe commence par une sc ne presque th orique o on le voit mettre en place les l ments en r duction du d cor venir signe de l importance chez lui d une donn e qui le rattache quoi qu on ait pu en dire l expressionnisme non pas l expressionnisme de la dramatisation m taphy sique du monde cf Caligari mais de sa r interpr tation enchant e par les moyens d un art styl
55. ne com mence sur les connaissances des dif f rents personnages et sur les enjeux de la situation Qu apprendra t on par la suite qui donnera un clairage nouveau a la scene Comment avons nous obtenu nos informations Ont elles t montr es dites sugg r es Quels sont les manques d informa tions dont nous avons conscience Quels personnages ont les m mes connaissances Comment la mise en sc ne int gre t elle le spectateur On sera ainsi tout particulierement attentif aux elements connus du seul spectateur et qui sont donc mis en sc ne pour son seul b n fice Ainsi les reactions de Tura a son jeu et a adultere de sa femme lorsqu elles n ont pas de cons quence existent uniquement pour faire rire le specta teur De la m me mani re Lubitsch lorsque Tura se retrouve avec le cadavre de Siletski joue avec les attentes et l imagination du specta teur lorsqu il ins re un plan sur le rasoir sans en montrer l utilisation avant la confrontation avec Ehrhardt 11 12 ANALYSE DE S QUENCE Demandez le programme I G n rique Apparaissent Carole Lombard toute coute et sourire puis Jack Benny qui v rifie sa moustache dans le miroir reflet de leurs personnages venir lui toujours d guis et inquiet elle tou jours elle m me et d sir e de tous Sur les cartons qui suivent Vhabituel duo de masques du th tre grec est remplac par le profil d
56. ngleterre et le retour de Sobinski Deux sc nes sont particuli rement int ressantes analyser dans la mani re dont elles mettent en sc ne les trois personnages la sc ne apr s l arriv e de Maria chez elle retrouvant Joseph et Sobinski s q 11 et la sc ne d adieux avant la repr sentation au th tre s q 20 On pourra en tudier diff rents l ments avec les l ves en faisant abstraction des dialogues le d placement des personnages leur position dans le cadre et les uns par rapport aux autres les regards chang s les entr es et sorties de champ En quelques plans Lubitsch donne voir les rapports de force et accorde Maria le pouvoir de d cision Adult re et censure Pour mieux comprendre la mani re dont Lubitsch met en sc ne ces personnages et leurs comportements il est essentiel de revenir sur le contexte du cin ma classique hollywoodien On pourra cet effet se reporter au code de censure le Motion Picture Code dont le texte en anglais est consultable en ligne http www artsreformation com a001 hays code html Appliqu partir de 1934 et jusqu en 1966 le code de censure Hays intervenait toutes les tapes de production du film criture du sc nario tour nage montage avec une liste d interdits notamment sexuels Le premier paragraphe du chapitre Sexualit pr cise ainsi que l adult re parfois n cessaire dans le contexte narratif d un film n
57. nt un dictateur voil qui ne pouvait que d primer Lubitsch La S ance Pour pr parer le travail en classe on pourra demander aux l ves d tre attentifs certains aspects du film pendant la projection Quels sont les diff rents moments o les personnages sont en repr sen tation On pourra proc der un recense ment des diff rents lieux de repr sen tation la rue le theatre sc ne cou lisses loges couloirs et antichambres le si ge de la Gestapo Qui est en repr sentation Pourquoi quel est le but atteindre Quel est le statut des spectateurs lucides sur leur r le de spectateur manipul s complices Il importe galement de diff rencier les niveaux de repr sentation de ordre de l intime Maria joue un r le pour correspondre au fantasme du Lieutenant Sobinski lors de leur pre mi re rencontre ou de la sph re his torique Greenberg joue le r le de sa vie avec la tirade de Shylock devant son meilleur ami grime en Hitler mais aussi devant de vrais soldats nazis Cet exercice pourra galement amor cer une r flexion sur la valeur de la parole de celui qui est en repr senta tion et son lien avec la v rit Celui qui ment peut il faire merger une certaine sinc rit 10 ANALYSE DU RECIT Intelligence avec le spectateur Fran ois Truffaut mettait quiconque au d fi de raconter To Be or Not to Be notre d coupage s quen tiel cho
58. ont Les bourreaux meurent aussi 1943 Le sc nario passablement remani par Lang fut le seul crit par Brecht pour un film hollywoodien Le film est d une grande complexit narrative et morale pour sauver des civils de repr Chasse l homme Twentieth Century Fox sailles qui font suite lassassinat de Reinhard Heydrich le bourreau de Prague sans pour autant sacrifier son meurtrier la R sistance tch que fait en sorte qu un tra tre sa cause passe pour l assassin en question aux yeux des nazis Comme dans 10 Be or Not to Be les faux semblants r gnent Lang pousse l extr me la monstruosit d Heydrich effectivement assassin Prague en 1942 et qui trouve son pendant carnavalesque dans le personnage d Ehrhardt Dans une lettre de r ponse aux d tracteurs de To Be or Not to Be Lubitsch crit par rap port la repr sentation habituelle des nazis dans les films am ricains Mes nazis sont diff rents il y a longtemps qu ils ont d pass ce stade de la folie sadique Les s vices les coups de fouet la torture sont devenus pour eux une routine quotidienne PEARL HARBOR Le tournage de To Be or Not to Be se d roule du 6 novembre au 23 d cembre 1941 En plein milieu de celui ci le 7 d cembre l aviation japonaise attaque par surprise Pearl Harbor base navale des tats Unis aux les Hawaii Le film avait t entrepris sous la doctrine am ricaine officielle de liso lationnisme bie
59. ontparnasse Eternal Love Malavida LHomme que j ai tu et Illusions perdues Bach Films Une heure pr s de toi Haute P gre Ange La Huiti me Femme de Barbe bleue et La Dame au manteau dhermine Bac Ninotchka et Rendez vous Warner Le ciel peut attendre Fnac et La Folle Ing nue Carlotta Un coffret dit par Mk2 r unit cinq films alle mands de Lubitsch Je ne voudrais pas tre un homme La Princesse aux hu tres Sumurun Anna Boleyn et La Chatte des montagnes Enfin chez Bac et chez Sidonis sont respective ment parus Si j avais un million film sketches dont un au moins est r alis par Lubitsch et D sir film de Frank Borzage que Lubitsch super visa et qui porte sa marque En regard de To Be or Not to Be Jean Renoir La R gle du jeu 1939 Montparnasse Charlie Chaplin Le Dictateur The Great Dictator 1940 Mk2 Fritz Lang Les bourreaux meurent aussi Hangmen Also Die 1943 Carlotta Alfred Hitchcock La Mort aux trousses North by Northwest 1959 Warner N B dans Nord par nord ouest Trafic n 8 automne 1993 le philosophe Stanley Cavell voque le rapport de La Mort aux trousses au th tre et plus particuli rement Hamlet Un rire n est pas une chose n gliger Un jour Ernst Lubistch aurait dit l un de ses sc naristes attitr s Samson Raphaelson dramaturge ses heures Tu fais le bon choix en continuant crire pour le th tre
60. ositive au d part tout d signe Thornhill comme un personnage s duisant mais vain une pure surface Or un acteur contrairement aux visages du Mont Rushmore ne se limite pas une surface si s duisante soit elle C est partir du moment o elle accepte de jouer le jeu que cette belle enveloppe vide va s emplir d une humanit ines p r e l int gralit de ses efforts dans la derni re s quence du film tant consacr e sauver une autre vie que la sienne La premi re fois que Thornhill passe l preuve du jeu c est lors d une vente aux ench res o il parvient se faire prendre pour un authentique idiot il ne s agit encore alors que de sauver sa peau mais c est d j une tape importante qui se traduit pour le spectateur du film par une jubi lation toute particuli re La deuxi me fois Cest dans une caf t ria o il va faire le mort cette fois pour r parer le tort qu il a caus l tre auquel il consacrera toute la capacit d altruisme qu il vient de mettre jour Ce point extr me de la com die jouer le mort dans la vie r elle constitue une nouvelle tape qui avait t annonc e par Vandamm lors d un change pr c dent avec Thornhill Apparemment la seule prestation qui vous donnera satisfaction sera celle o je jouerai le mort Votre prochain r le Vous serez tr s convaincant je vous assure D j dans To Be or Not to Be Siletsky demandait Avez
61. phique Apr s avoir imagin rapidement le contexte fictionnel dans lequel s ins crit le passage de porte on d termi nera la mise en sc ne en fonction de ce que l on veut donner voir et comprendre On tablira un d coupage technique o tous les plans seront d crits en r ponse aux questions sui vantes Comment se d compose l action quelle est sa chronologie Que filmer La porte oui mais quelle partie Les plans sur les poi gn es de porte et sur les serrures porteurs de suspense abondent dans les films Quelle chelle de plan Donne t on a voir la seule porte quelques d tails a proximit ou tout son environne ment et eventuellement les person nages impliqu s De quel c t installer la cam ra du c t de la pi ce d origine ou de desti nation Quel angle de prise de vues choisir 19 16 La salle de th tre Lieu par excellence de la mise en abyme la salle de th tre se voit ac corder une attention toute particuli re Lubitsch semble en montrer tous les recoins pendant le film la sc ne orchestre les loges les coulisses les couloirs l entr e le sous sol sont autant de lieux d intrigues de repr sentations de r p titions de r v la tions et de retournements de situa tion Apr s la premi re s quence o le spectateur est volontairement induit en erreur la salle de th tre garde un statut particulier si la sc n
62. pleurant de rire c t de la cam ra Seule grande difficult semble t il le plan muet o Tura d couvre Sobinski dans son lit Malgr trente prises diff rentes Lubitsch n obtient pas le jeu de regards qu il souhaite C est l unique moment du film qu il devra aider d un commentaire musical appuy En plein tournage a lieu l attaque de Pearl Harbor Les sc nes o les com diens coutent la radio puis apprennent l invasion de la Pologne S r nade trois d Ernst Lubitsch Paramount droite Miriam Hopkins ont sans doute leur quivalent sur le plateau de tournage Malgr cela Lombard dit son biographe C est la seule fois o tout com menca bien continua bien et se termina bien En r alit cela se ter mine en trag die Alors que le film est en postproduction l actrice qui participe activement une tourn e de soutien l effort de guerre meurt dans un accident d avion d au black out le 16 janvier 1942 Le pr sident Franklin Roosevelt la d clare premi re femme tu e dans l exercice de ses fonctions en temps de guerre National le deuil est plus long qu l accoutum e pour un membre d Hollywood Une des r pliques de Lombard dans To Be or Not to Be Que peut il arriver en avion est coup e au montage D autant plus incertaine de lac cueil du film que l actrice y joue une pouse inconstante la United Artists lui d die sa sortie le 6 mars 1942 alors que les
63. pr sentation concurrents Dans LCEuvre dart l poque de sa reproductibilit technique 1935 il pr cise La crise actuelle des d mocraties bourgeoises implique une crise des conditions qui d terminent la pr sentation m me des gouvernants D o une nouvelle s lection une s lection devant l appareil de prise de son ou de vues ceux qui en sortent vainqueurs sont la vedette et le dictateur BRECHT Bertolt Ecrite en 1941 sa pi ce La R sistible Ascension d Arturo Ui qui transpose sur le mode grotesque l ascension d Hitler dans le Chicago des ann es 1930 ne sera publi e qu en 1959 Grand peur et mis re du IIIe reich est jou e d s 1938 dans Le Mouchard lune des vingt quatre sc nes qui com posent cette pi ce un homme pense que son fils est all d noncer a la Gestapo les menues critiques qu il a formul es l gard du r gime nazi Dans To Be or Not to Be la pi ce Gestapo met en sc ne deux nazis qui tentent de faire dire a un enfant des Jeunesses hitl riennes que son p re a d nigr Hitler Au m me moment le th me de l enfant d nonciateur est galement pr sent en URSS comme dans Le Pr de B jine 1937 de Serguei Eisenstein CHAPLIN Charlie Le 15 octobre 1940 la United Artists qui distribue ra galement To Be or Not to Be sort en salles Le Dictateur le film le plus controvers de Chaplin jusqu alors qui deviendra son plus grand succ s Il y satirise Hitler sous le nom d
64. qui donne lieu un beau plan de stupeur d doubl e entre Tura et le colonel Inversement les pilotes nazis auxquels Hitler Bronski ordonne de sauter sans parachute ne manifestent aucun tonnement Ces deux gar ons tr s obligeants sont en fait des robots la surprise est humaine et la sympathie que nous accordons Ehrhardt tient au contraste entre le d miurge sanguinaire des placards du d but et cet homme constamment pris de cours dont la bouche b e et les yeux exorbit s expriment comiquement la surprise absolue avec des variantes sur prise terrifi e amus e irrit e etc Dans l ordre de l tonnement c est tout un spectre qui se dessine du plus froid Siletsky les membres du renseignement anglais au plus chaud Ehrhardt avec au centre les com diens qui font m tier de leur ma trise des motions Maria impressionne par sa capacit de dissimulation cf le plan o elle apprend le lien entre Siletsky et Ehrhardt ou d att nuation de son d sarroi lorsqu elle croit apprendre la mort de son mari et le pauvre Tura est oblig de continuer jouer malgr le trouble qui le saisit lorsque deux reprises Sobinski quitte la salle ce relatif self control lui sera utile face au cadavre de Siletsky Toutefois au dernier plan du film la stupeur le laisse sans voix Tous ces plans de surprise renvoient bien s r la notion de spectacle Lubitsch qui consacra sa vie ce dernier n aurait pas t un si gra
65. souligne les moments importants les premiers doutes de Siletski la r ac tion apr s le mot de passe la discussion Maria Ehrhardt le champ contrechamp met en valeur l annonce de la mort de Silestky le vrai et la double reaction de Maria qui se doit d tre discrete choc et tristesse puis soulagement ANALYSE DE PLANS La brigade des stupefies Si nous tions s rieux nous analyserions les plans d crits qui pars ment To Be or Not to Be Entre autres enseignes affiches placards d Ehrhardt couvertures de Mein Kampf V de la Victoire plaque du renseignement anglais note au dos de la photo de Silestky signature de celui ci fausse lettre d adieu que Maria lui joint Mais c est le principe de plaisir qui l emporte cette formidable com die nous rappelant la phrase de Serge Daney Cela fait longtemps que face aux merveilles de la technologie nous avons tous adopt un air entendu et opaque qui rend bien difficile la com die laquelle reposera encore longtemps sur l h ritage muet d un visage surpris 1 En 1941 lair entendu et opaque n est pas encore de mise mais ce qu on appellera plus tard le politiquement correct commence pointer cf p 20 Afin de contrer la mont e de cette sinistrose qu elle soit due au jugement bien pensant ou l horreur nazie Lubitsch revient un gro tesque qu il pratiquait volontiers dans ses films allemands et plus particuli re
66. spectateur d pass de la relation entre Maria et Sobinski il devient en 20 le metteur en sc ne de celle ci cette fin Tura doit surmonter le complexe qu il semble prouver face Silestky grand imposteur et manipulateur qui l am ne se trahir aussi s re ment qu il avait dup les aviateurs polonais Siletsky qui go te en connaisseur le texte de Maria et sa fa on de le dire en retour il fait une variation sur le monologue de Shylock Nous sommes humains et parfois tr s humains discerne en revanche tr s vite l incapacit de Tura improviser Sa mort sur sc ne tr s stylis e est digne d un trag dien et tout se passe comme si Tura devait assister sa chute pour imposer son propre jeu Leffroi du com dien face au retour du cadavre est comparable celui d Hamlet lors de la d cou verte du spectre de son p re acte I sc ne 4 Texte et jeu de Tura s am liorent vue d il mais c est seulement apr s que dans le secret il a proc d au rasage de Siletsky qui tient la fois de la profanation et de l ultime rituel fun raire qu il devient carr ment brillant lors de la discussion autour de sa d pouille Avant il a encore besoin de tester ses effets comme quand il dit Ehrhardt J ai la cl dans la main tout ce que j ai faire c est de trouver la serrure C est mieux que d avoir la serrure et de devoir trouver la cl Qu en dites vous FILIATONS L inventio
67. t de la com die et de l excitation sinistre que M Lubitsch a imprudemment confondues Miss Lombard dans son dernier r le est tr s belle et ing nieusement comique et l on ne ressent pas les sentiments de tristesse qu on pourrait imaginer en raison de sa pr sence C est la un hommage sa personnalit radieuse Mais M Benny malgr une tentative r ussie de changer son style ressemble toujours trop Moi Jack Benny le comique de radio pour tre juste Il se vexe trop souvent des r flexions sur son talent Trop souvent il fait la moue joue l indign ou a une r action retardement Bien s r le sc nario encourage cette vieille l gende du mauvais acteur Comme un officiel allemand le souligne en riant grassement Ce qu il a fait Shakespeare nous le faisons la Pologne Cela vous donne une id e du film Dans les seconds r les Sig Ruman fanfaronne dans son r le de colonel nazi Stanley Ridges est un agent de la Gestapo mielleux et sinistre Robert Stack est agr ablement juv nile dans son r le de pilote polonais et Tom Dugan est dr le en Hitler burlesque Dommage qu un peu plus de bon go t et d unit de ton ne soient pas pr sents dans ce film Comme il est on a l trange impression que M Lubitsch est un N ron qui joue du violon pendant que Rome br le Bosley Crowther To Be or Not to Be The New York Times 7 mars 1942 S N i En 4 i L Quelques l men
68. t de nature sexuelle tr s pr sents lors des sc nes de s duction avec Maria les r p titions exemple they call me concentration camp Ehrhardt o s ajoute une tension dramatique l effet comique les m taphores par exemple lorsque Siletsky et Maria trinquent Shall we drink to a Blitzkrieg I prefer a slow encirclement les dialogues qui deviennent absurdes par exemple lorsque Rawitch sermonne Ehrhardt quant a son attitude face au faux Siletski Well What have you to say for yourself now Here is a man with a beard and you didn t even pull it Qu avez vous dire pour votre d fense Voici un homme avec une barbe et vous ne la tirez m me pas Pour ne rien perdre de la saveur de humour du film et de ses inten tions on travaillera plut t sur les dialogues originaux m me si une tude compar e avec les traductions propos es dans les sous titres peut tre galement int ressante 4 La mise en sc ne Lubitsch est un metteur en sc ne qui utilise toute la grammaire cin matographique C est particuli rement vrai dans To Be or Not to Be On pourra d abord demander aux l ves de citer les l ments de cette grammaire peut tre en posant la question des diff rences avec le th tre le montage le cadrage les mouvements de cam ra On reviendra plus en d tail sur les diff rences d chelles de plan et d angles de prise de vues par exemple dans la sc ne des
69. t typ qu il opte pour la seule r alisation bien que dans son dernier r le l cran son film Sumurun le montre admirable de tragi comique Il fait mentir le truisme selon lequel la direction d acteurs n existe pas jouant comme Chaplin tous les personnages sur ses tournages et communiquant ses interpr tes la finesse jusque dans le grotesque et la vivacit que n ces sitent ses films En outre de Kohlhiesels T chter Cluny Brown Shakespeare est souvent ouvertement et malicieusement convoqu L h doniste Caviar et champagne qui abondent dans les films am ricains de Lubitsch ne constituent pas l aboutissement de son cin ma Loin d tre une fin en soi le champagne n est que l cume de sa po tique l accessoire de son art de vivre et de prendre plaisir la vie Ses films peuvent tr s bien s en passer et c est le cas de To Be or Not to Be linsidieux Siletsky Sur le tournage de La Huiti me Femme de Barbe Bleue Paramount s en sert pour attirer Maria dans ses rets mais elle ne fait que feindre de s y laisser prendre Lh donisme de Lubitsch n est pas seulement celui d un jouisseur c est une philosophie la fois plus joyeuse et plus profonde Chez lui pas de pulsion de mort mais une constante conscience de celle ci Au nom de l tiquette h doniste on a souvent minor ces films non exclusivement comiques voire franchement graves que sont Le Prince tudiant Lhomme que j ai tu
70. talien Le film de Lubitsch est aux antipodes de ce courant qui met sur le devant de la sc ne l explicitation de l artifice th tral en exposant le spectateur une sorte de commentaire live du rapport du th tre au mensonge et la v rit Moderne sans modernisme To Be or Not to Be exclut ce didactisme antidrama tique et aspire son contraire la fusion du th tre dans le cin ma qui n est pas sans rappeler une mise en abyme beaucoup plus ancienne Dans Hamlet le prince fait jouer une transposition th trale du meurtre de son p re La Sourici re destin e attraper la conscience du meurtrier acte I scene 2 De m me dans To Be or Not to Be la reprise de la pi ce Meurtre lop ra dans le promenoir du th tre Polski vise produire un effet sur les spectateurs pr sents capter l attention du cordon de s curit du F hrer et sur le cours des v nements faciliter la fuite des com diens vers l Angleterre Tout en per mettant Greenberg d accomplir son r ve de th tre elle participe pleinement de laction en cours Et si l interruption de la r p tition de la pi ce Gestapo au d but du film am ne le spectateur songer aux diff rents niveaux de repr sentation qui d filent devant lui Lubitsch ne tente pas in fine de briser sa croyance dans la fable cin matographique mais cherche au contraire la ravi ver au contact de celle que fournit le th tre Comme toujours l int r t de
71. tion l exigeait satirique ou comique quand il y en avait besoin Ou peut appeler cela une farce tragique ou une trag die farceuse je m en moque et le public aussi New York Times 29 mars 1942 3 L humour dans le film Si l on sait que le film n a pas fait rire tout le monde il ne s agit pas forc ment de revenir sur la question Peut on rire de tout mais plut t d tudier le m ca nisme du gag dans To Be or Not to Be On demandera dans un pre mier temps aux l ves ce qui les a fait rire les dialogues les mimiques la gestuelle le visuel les situations On s int ressera ensuite plus sp cifiquement humour des dia logues et ses diff rentes d clinaisons les jeux de mots comique essentiel dans la com die classique hol lywoodienne et les difficult s de traduction qui se posent n cessai rement Le dialogue entre Greenberg et Rawitch dans la premi re s quence est ce titre exemplaire What you are I wouldn t eat How dare you call me a ham ham signifiant la fois jambon Greenberg est juif et mauvais acteur les quiproquos engendr s par les diff rents mensonges qui consti tuent l un des ressorts essentiels du film rendent dr les certains dia logues a priori anodins Tura qui pense que Sobinski n aime pas son monologue Siletski qui apprend a Tura la liaison de Maria Ehrhardt qui raille le jeu de l acteur les sous entendus pour la plupar
72. to Be est un h ros paradoxal qui s absente quasiment du film pendant une heure puis est tir de sa paillasse pour y jouer un r le majeur via le monologue de Shylock Juif allemand comme Lubitsch et du m me ge que lui Bressart incarne peut tre l alter ego du cin aste aussi neurasth nique bien que ce soit lui qui fasse l loge du rire que ce dernier tait publiquement joyeux son reflet en outsider a priori vou l oubli ou la pers cution La blonde et moi moi moi Le chemin qui va de Jane Alice Peters Carole Lombard l actrice la mieux pay e d Hollywood en 1937 ador e de ses pairs autant que du public fut la fois vident et tr s progressif Ses qualit s la pr disposaient devenir la reine de la com die loufoque fantaisie vitalit sens tr s vif de la camaraderie et de l auto d rision alli s une beaut dont le model n avait rien envier celui de Dietrich Elle est merveilleusement cingl e avec un grand naturel dira d elle Robert Stack le lieutenant Sobinski de To Be or Not to Be Ce n est pourtant qu en 1934 apr s dix ans de r les divers qu elle acquiert ce titre avec Train de luxe de Howard Hawks o elle joue d j une com dienne dont l hyst rie n a d gale que celle de son mentor John Barrymore Son parcours comique est marqu par ses r les dans My Man Godfrey La Cava 1936 une riche cerve l e joue la grande amoureuse La Joyeuse Su
73. tructure narrative du film La liaison entre Maria et Sobinski est ainsi l origine de nombreux retournements de situation qu on pourra recenser par exemple le fait que Joseph perde son sang froid et r v le sa v ritable identit lorsque Siletsky lui apprend la liaison de sa femme Dans la continuit on pourra tre attentif la mani re dont l intrigue amoureuse accompagne le ton de la s quence ou au contraire se confronte lui Ainsi dans la premi re partie du film avant l invasion de la Pologne la relation entre Maria et Sobinski accompagne le ton l ger et spirituel de la com die th trale qui semble se mettre en place interruption du monologue qui pro voque l inqui tude de l acteur vaniteux et aveugle jeu de la s duc tion entre une diva et un jeune naif Dans une seconde partie ces m mes caract ristiques sint grent dans un contexte la fois plus dramatique et plus confus comme en t moignent certaines r pliques de Tura relevant la fois des intrigues amoureuse et dra matique Je d cide avec qui ma femme d ne et qui elle doit tuer On notera au passage que c est la premi re confrontation entre Sobinski et Tura et le fameux To be or not to be prononc dans la chambre coucher soulign e par une musique guillerette qui r int gre le genre de la com die au film apr s plusieurs s quences relevant du drame invasion de la Pologne et du film d espionnage toute la s quence en A
74. ts sont pr ciser pour mieux appr hender la cri tique de Bosley Crowther Deux ans plus t t Crowther critique c l bre du New York Times pendant 27 ans avait crit toute son admiration pour Le Dictateur de Charles Chaplin et il fut par la suite beaucoup plus bienveillant l gard de deux autres films de Lubitsch Le ciel peut attendre 1943 et La Dame au manteau d her mine 1948 Ce ne sont donc ni le sujet proprement dit ni le r ali sateur lui m me qui provoquent autant de m pris mais bien le film et les intentions qui semblent s en d gager To Be or Not to Be semble pourtant r pondre par anticipation aux reproches de Crowther interloqu par le m lange des genres et la r f rence directe la situation mondiale Chaplin dans Le Dictateur parle d Hynkel et non d Hitler le mauvais go t suppos du film et le jeu des acteurs Il est vrai que la superposition du drame et de la com die parfois dans une m me sc ne a de quoi d concerter et cr er un certain malaise Mais un bon rire n est jamais d daigner annonce Greenberg apr s avoir comment le Heil Hitler de Bronski C est une plai santerie terrible et le choix de la robe de Maria Cela ferait une plaisanterie terrible Lubitsch a fait sienne cette maxime et conju re l horreur de la situation polonaise par l humour et le burlesque Lubitsch ne ridiculise pas la trag die de Varsovie Crowther recon na t lui m me qu
75. ue en effet rendre compte de la puissance de signification des creux de ce r cit qui comptent autant que ses pleins Les films de Lubitsch carburant l intelligence s adressent celle du spectateur Intelligence aussi des personnages le genre comique rit parfois de la b tise de ceux ci pas Lubitsch Quand un homme du renseignement Military Intelligence voque la possibilit que Siletsky soit un imb cile un autre r pond Il n en serait pas moins dange reux Et je connais Siletsky ce n est pas un imb cile M me Ehrhardt est loin d tre stupide et Schultz a ses moments de g nie Excellent Schultz Les probl mes surviennent parce qu ils oublient qu malin malin et demi sc ne 18 et que chez eux l intelligence ne communique pas avec la sensibilit cf 22 les cadeaux qu Ehrhardt promet Maria au contraire de la Lubitsch touch Une complexit croissante La premi re s quence du film pose les bases d une complexit narrative qui va se d multiplier Com men ant par une ellipse il nous met devant un fait accompli Avant m me d envahir la Pologne Hitler est d j Varsovie et cet Hitler devenu objet de spectacle exprime de fa on stup fiante la quintes sence du principe du film la confrontation entre nazisme et th tre Apr s avoir envisag toutes les solutions Lubitsch ma retenu que l absolument impr visible mais pas impossible De m me l ex
76. uerre d part de Sobinski bombardement fuite des spectateurs 5 Trag die polonaise 00 20 55 00 23 20 Varsovie est en ruines La R sistance contre attaque 6 Lombre d un doute 00 23 20 00 26 48 A Londres laviation polonaise f te le professeur Siletsky Partant Varsovie il recueille les messages des aviateurs leurs proches dont celui de Sobinski Maria To be or not to be Le jeune homme s tonne que Siletsky ne connaisse pas celle ci 7 Intelligence avec lennemi 00 26 48 00 29 47 Sobinski fait part de son tonnement au rensei gnement anglais Il est envoy Varsovie pour emp cher Siletsky de transmettre la liste des noms qu il a recueillis la Gestapo 8 Objectif Varsovie 00 29 47 00 32 42 Parachut en Pologne Sobinski ne peut acc der la librairie qui doit faire passer la R sistance le message concernant Siletsky 9 Maria entre en sc ne 00 32 42 00 34 25 C est Maria qui va la librairie transmettre la photo de Siletsky cens n arriver que le surlendemain 10 Siletsky tombe le masque 00 34 25 00 40 59 Le m me soir des soldats allemands emm nent Maria l h tel Europe Siletsky la re oit transmet le message de Sobinski et lui pro pose d tre une espionne mondaine Invit e a diner Maria pr texte quelle doit aller se faire belle 11 Mari femme amant 00 40 59 00 44 39 Appartement des Tura Tura d couvre Sobinski dans son l
77. x Bressart Bronski Tom Dugan Dobosh Charles Halton Rawitch Lionel Atwill Acteur Capitaine Mumm George Lynn Capitaine Schultz Henry Victor Anna l habilleuse Maude Eburne Le maquilleur Armand Wright FILMOGRAPHIe 1918 1918 1918 1919 1919 1920 1920 1920 1921 19274 1925 1927 1932 1932 1933 1934 Angel Ange Ninotchka Cd The Shop Around the Corner 1937 1939 1940 1945 1946 SELECTIVE Ernst Lubitsch Ich m chte kein Mann sein traduction litt rale Je ne voudrais pas tre un homme Die Augen der Mumie Ma t l Les Yeux de la momie M Meyer aus Berlin t l Meyer de Berlin Die Austernprinzessin t l La Princesse aux hu tres Madame Dubarry La Dubarry 1919 1920 Die Puppe La Poup e Kohlhiesels T chter t l Les Filles de Kohlhiesel Romeo und Julia im Schnee t l Rom o et Juliette dans la neige Sumurun id Anna Boleyn Anne de Boleyn Die Bergkatze La Chatte des montagnes The Marriage Circle Com diennes Lady Windermere s Fan LEventail de Lady Windermere The Student Prince in Old Heidelberg Le Prince tudiant The Man I Killed Lhomme que j ai tu Trouble in Paradise Haute P gre Design for Living S r nade trois The Merry Widow La Veuve joyeuse Rendez vous Heaven Can Wait Le ciel peut attendre Cluny Brown La Folle Ing nue R ALISATE

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