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Avant-propos

1. Genevi ve Jacquinot Delaunay et Laurence Monnoyer Avant propos IL TAIT UNE FOIS On peut par certains dispositifs de rythmes de rime et d asso nances bercer notre imagination la ramener du m me au m me en un balancement r gulier H Bergson Le rire p 62 Il tait une fois trois jeunes chercheurs post ou tout juste doctorants form s trois disciplines diff rentes philosophie sociologie communication qui avaient t frapp s comme certains d entre nous par la fr quence voire la prolif ration de l utilisation du terme dispositif dans un certain nombre des champs aussi divers que la communication la m diation des savoirs l art la th rapie le droit la technologie Certes ils n ignoraient ni les d finitions des dictionnaires ni les usages anciens et stabilis s du terme dans les contextes policier militaire judiciaire scientifique voire rh torique ni bien s r les travaux th oriques de Foucault qui avait t le premier proposer quelques rep res conceptuels ni la relecture qu en avait fait Deleuze pour pouvoir r pondre la question qu est ce qu un dispositif Mais justement ils souhaitaient v rifier si les nouveaux usages de ce terme dispositif renvoyant des pratiques sociales extr mement diversifi es all gu dans des contextes discipli naires d connect s les uns des autres recouvraient des points communs voire convergents vers une seule e
2. ciation Ainsi coexistent dans les usages la rationalit op ratoire et la subjectivit ce que Marc Guillaume appelle le bricolage post moderne qu il d finit comme un m lange de dispositifs sic hypercomplexes et de positions archa ques 11 Genevi ve Jacquinot Delaunay et Laurence Monnoyer Si les notions d usages et de pratiques sont souvent employ es indiff remment cela ne devrait pas nous faire oublier que l un est plus restrictif que l autre usage renvoie la simple utilisation fut elle d une machine complexe tandis que la pratique int gre cette dimension les comportements les attitudes et les repr sentations voire les mythologies suscit s par emploi des techniques dont la pratique d Internet rend particuli rement bien compte l heure actuelle Et c est bien le retour du sujet et des dispositions qu il peut prendre que scelle cet appel la m diation dispositive au del de la m fiance envers la technique et les formes modernes du savoir rationnel qu Andr Berten ici m me d nonce dans la conception foucal dienne du dispositif normalisateur moins qu il faille y substituer le d sordre normatif seul susceptible de favoriser chez l usager des comportements atypiques et non program m s comme le propose de son c t G rard Leblanc C est l ancrage en extension de ce mot valise qu est le dispositif que nous avons cherch question
3. ergonomie psychologie et anthropologie cognitives ethnologie pour analyser les lieux et les actes professionnels notamment ceux qui se d roulent au contact de dispositifs techniques sophistiqu s ou qui font un usage important d outils informatiques de communication permettant des quipes dispers es de travailler ensemble en groupe projet merge alors dans les sciences sociales et cognitives un mod le alternatif de l action o l acteur n est plus le si ge exclusif de la capacit d agir et de contr ler mais partage ces attributs avec les objets les artefacts les outils et les non humains en g n ral Situ et ins r dans un environnement il conomise ses efforts cognitifs et se dispense de repr sentations de d lib rations et de plans La sociologie des sciences et des techniques de son c t a contribu mettre en question les cat gories traditionnelles d objectivit et de subjectivit notamment dans nos relations aux objets que Latour en particulier envisage comme un type d actants parmi d autres associ s aux humains dans le tissage de la vie sociale La notion de dispositif on le voit contribue la reformulation d une probl matique ancienne et r currente qui est celle du statut des objets techniques de l usage et de l appro priation des outils via leur mode d emploi aux relations hommes machines jusqu aux activit s coop ratives compl
4. exes qu elles permettent en prenant en compte les contextes situationnels dont la description exige la prise en compte et l interaction des dimensions ergonomiques cognitives et plus largement anthropologiques et sociales Que cherchait on finalement en explorant la diversit des contextes d utilisation du terme et en se livrant l analyse de certaines pratiques attest es sinon comme le disait Schaeffer d couvrir sous les apparences l emploi l usage et le d tournement Le mode d emploi d crit la bonne fa on de faire l utilisateur sait ou ne sait pas se servir d un outil au pire il est devant lui comme une poule qui a trouv un couteau au mieux il se l approprie et la plupart du temps il finit par en avoir l usage sinon la pratique moins qu il ne le rejette ou le d tourne d autres fins d o face la logique technicienne ce que dans la tradition ethno technicienne on appelle la logique de l usage Mais dans cette histoire complexe des relations entre l homme et la technique il fallait aller plus loin encore au c ur m me des circonstances concr tes des actions complexes l o se joue la m diation non pas avec mais dans l environnement Le mode d emploi comme support didactique joue d j ce r le de passeur de la machine l usager qui en ignorant certains l ments et en en r interpr tant d autres s engage dans une v ritable n go
5. ions th oriques susceptibles d aider formaliser le concept de dispositif jusque l marqu par l approche foucaldienne Au del des traditionnelles dichotomies ce concept permet d appr hender dans toute leur complexit les rapports entre le technique et le symbolique entre le sujet et l objet en mettant en vidence la fois les logiques d usages et le positionnement id ologique ambigu du dispositif entre libert et d terminisme Le classement r sulte d une lecture trans versale selon l axe qui nous semble avoir t privil gi par chaque auteur ind pendamment du champ d intervention sociale ou disciplinaire dans lequel s ancre son analyse Le terme fait office de joker dans l espace des discours et voisine ou alterne selon les cas avec des termes comme structure mais il lui manque alors sa dimension dynamique ou syst me mais c est alors la place du sujet qui fait d faut ou encore r seau et dans celui des pratiques o il s accompagne souvent de la disparition du statut d auteur voire de respon sable Au fond le recours la notion de dispositif la fin des ann es quatre vingt dix 12 Avant propos renvoie la r f rence oblig e au concept caoutchouc de repr sentation auquel les sciences humaines et sociales avaient eu recours au d but des ann es quatre vingt m me consensus implicite m me flou conceptuel m me urgence des diff re
6. ner dans ce num ro afin de d gager derri re la r it ration dans les usages l mergence d un concept Poursuivant en effet la r flexion entam e Louvain La Neuve cette livraison reprend des textes d auteurs intervenus au colloque et de quelques autres chercheurs sollicit s pour y collaborer Les r f rences disciplinaires et les champs d intervention sont h t rog nes souhait m me si l on peut d plorer l absence d analyse de dispositifs plus classiques les protocoles politiques ou scientifiques les organisations mus ales ou militaires ou plus exotiques la sc ne th trale ou cin matographique les installations artistiques ou les rites d initia tion Ils fournissent d j n anmoins une brass e de variations contextuelles comme autant de fen tres s mantiques alternatives pour une lecture transversale et concernent aussi bien l cole que la t l matique routi re les rites fun raires que la t l vision les objets de notre quotidien que les laboratoires industriels les preuves identitaires que les critures d Internet les th ories de la communication que les campus virtuels dans des environnements plus ou moins bienveillants c est dire tol rants l erreur Les textes se r partissent en trois grands sous th mes intimement li s et en interaction constante puisqu ils identifient les axes th matiques mergents et les ensembles de proposit
7. ntes disciplines se r f rer un concept clef et paradoxalement rarement d fini devant le constat d chec des mod les explicatifs ant rieurs sympt me en tout tat de cause de la n cessit d un changement de paradigme Les diverses contributions qui suivent s ancrent plus ou moins d lib r ment dans cette perspective certaines s attachent plus d crire la complexit et l conomie d un dispositif sp cifique qu elles ne contribuent directement l laboration du concept certaines manent de chercheurs confirm s quand d autres sont de premi res tentatives d articulation th orique autour d un objet d tude tout juste familier Quelle meilleure illustration du dynamisme et de la jeunesse d une revue qui va f ter son 10 anniversaire Les trois jeunes chercheurs qui ont t initiative de cette manifestation ouvrent et ferment le num ro Philippe Charlier et Hugues Peeters par le texte d introduction labor partir de la synth se du colloque qui sert de pr sentation et d orientation pour la lecture des diff rents articles Emmanuel Belin par un texte posthume puisqu il a pr f r nous quitter avant m me la tenue du colloque lui qui en avait t l instigateur et venait de soutenir une tr s brillante th se Hommage lui est rendu NOTES 1 Colloque international Dispositifs et m diation des savoirs organis par le GReMS Groupe de Recherche en M diati
8. on des savoirs Universit catholique de Louvain Belgique en collaboration avec le GRAME Groupe de Recherche sur les Apprentissages les M dias et l ducation Universit de Paris 8 avec le soutien du Fonds national de la recherche scientifique belge FNRS de la Commission europ enne Direction G n rale XIII et du Minist re de la Communaut fran aise de Belgique Les actes sont accessibles sur le site http www comu ucl ac be reco grems agenda dispositif colloque html 2 Koski Christophe Interfaces bomme machine application aux syst mes industriels complexes Paris Herm s Informatique 1997 2 dition revue et augment e p 231 237 3 SCHAEFFER Pierre Machines communiquer Paris Le Seuil 1972 T II p 158 159 4 Cardon Dominique Pr sentation R seaux La coop ration dans les situations de travail 85 1997 Paris CNET CNES p 5 5 Qu r Louis La situation toujours n glig e R seaux op cit p 165 6 Latour Bruno Une sociologie sans objet Note th orique sur l interobjectivit Sociologie du travail KXXVI 4 p 587 607 7 SimMoNDON Georges Du mode d existence des objets techniques Paris Aubier 1969 8 PERRAULT Jacques La logique de l usage Essai sur les machines communiquer Paris Flammarion 1989 o il voque les travaux du groupe Ethno technologie Voir notamment Gaup Thierry L coute des silences 13 Genevi ve Jacq
9. s des articles qui suivent dans quelles disciplines dans quel champ d intervention sociale a t il t explicit Guy Lochard fait r f rence Pierre Schaeffer 1971 et l origine professionnelle du terme bien avant sa propagation dans les discours th oriques sur le cin ma et la t l vision dont cette livraison donne plusieurs exemples propos de l ensemble de r gles de fonctionnement propre un produit m diatique pour Schaeffer un dispositif t l visuel de recherche comme en a produit le service dont il a t responsable l poque de l ORTF ce n est ni le genre d une mission ni le sujet ou la fausse bonne id e mais quelque chose comme un pi ge tendu l animal humain pour sa capture en vue d observation on pense tout aussi bien aux protocoles sophistiqu s voire tortionnaires de nos psychologues exp rimentalistes traquant la gente animale ou humaine au nom bien s r de la recherche de la v rit Mais le terme est plus souvent utilis qu interrog et c est sans aucun doute dans le champ 10 Avant propos de la sociologie depuis Foucault 1976 plus sp cifiquement de la sociologie du travail des organisations Eymard Duverney et Marchal 1993 94 et notamment de l innovation Collon 1986 que le terme sinon le concept est l uvre Il y a scell la n cessaire alliance entre diverses sciences humaines et sociales
10. s entend comme chacun sait c est dire comme le rappelle le dictionnaire dans une acception prioritairement technique comme un ensemble de pi ces constituant un m canisme un appareil quelconque Puis d englober par extension tout agencement d l ments humains ou mat riels r alis en fonction d un but atteindre Les techniciens d aujourd hui ceux qui travaillent concevoir et valuer ces syst mes industriels complexes que sont les interfaces homme machine emploient ce terme pour d signer les dispositifs de commande soit les techniques actuelles utilis es par l op rateur pour dialoguer avec le syst me interactif du clavier traditionnel la commande vocale et jusqu aux interfaces tol rantes certaines erreurs humaines Le dispositif est bien au centre de la relation homme machine et c est incontestablement avec le d veloppement des Nouvelles Technologiques de l Information et de la Communication qui rel vent techniquement de la num risation qu on a vu cette notion sortir du champ d limit de ses origines pour prolif rer dans d autres sph res d activit s humaines avec ou sans machines et d signer des pratiques qui ont toutes pour particularit de se d rouler au sein d environnements am nag s Qui le premier a accord quelque importance conceptuelle ce terme En dehors de la r f rence foucaldienne laquelle renvoient plusieur
11. t m me perspective Car ils avaient aussi constat que si cette notion tait de plus en plus utilis e elle apparaissait en revanche rarement lucid e comme si son caract re d op ra tivit dispensait d en penser la pertinence th orique Ils souhaitaient la fois voir t moigner de terrains concrets et de pratiques sociales attest es o professionnels et chercheurs se retrouvent du moins en apparence pour parler de dispositifs et entamer l exploration d un concept en mergence dont ils sentaient confus HERM S 25 1999 9 Genevi ve Jacquinot Delaunay et Laurence Monnoyer ment au del des modes et conscients de la non innocuit des mots la valeur heuristique Ouvrir des d bats clairer non seulement ceux qui con oivent mais aussi ceux qui utilisent des dispositifs et en traquer la trace et le sens l o on les attend le moins dans la r serve des pratiques muettes mais op rantes Bref ils cherchaient un dispositif qui leur aurait permis de concilier ces inconcilia bles D o ce colloque organis les 24 et 25 avril 1998 l Universit de Louvain La Neuve auquel Dominique Wolton directeur du laboratoire Politique et Communication du CNRS apporta son soutien ind fectible en d p chant sur les lieux Laurence Monnoyer et en proposant d en faire la mati re de ce num ro th matique Mais que diable allaient ils donc chercher dans ce mot valise Le dispositif
12. uinot Delaunay et Laurence Monnoyer Paris 10 18 1978 GLIE Bertrand Histoire des techniques Paris Gallimard La Pl iade 1978 et SALOMON Jean Jacques Prom th e emp tr Paris Pergamon 1983 9 Marc Guillaume Les technologies de la communication ordinaire in Technologie et mode de vie 5 Paris Centre d tudes sociologiques 1987 10 Par exemple le chapitre intitul valuer et simplifier le dispositif de transfert et de diffusion de la technolo 14 gie du Rapport au Ministre de l ducation nationale de la Recherche et de la technologie au ministre de l conomie des finances et de l Industrie et au Secr tariat d tat et l Industrie par Guizaue Henri Paris La Documentation fran aise 1998 commence par cette phrase I tait au dessus des moyens de la mission de proc der un inventaire et une valuation des structures de transfert et de diffusion de la technologie et alterne Pun ou l autre terme tout au long de l article B

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