Temporalité - Jocelyn Robert
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1. rieuse mais bien futile de pr s ou de loin il en coule toujours de partout Et LA CHAMBRE BLANCHE flotte dedans Texte de pr sentation du CD par Jocelyn Robert 1998 nm Un an s empile sur l autre arch ologie du temps couches d heures cras es par des mois ensevelis dans des ann es Vingt moments ne sont pas autant d instants ils sont longs lents retardataires Ils se d brouillent pour ne jamais dispara tre Q Ambulatoire de deux d cennies sur support s dentaire de quarante minutes Le disque 20 moments blancs lents en tant que tel dans sa pochette blanche sur blanc a t distribu dans un premier temps comme un flocon en tombant dans les bo tes aux lettres de ceux qui habitent dans les lignes qui tracent le parcours entre les diff rents lieux de LA CHAMBRE BLANCHE Un disque porte porte inattendu nigme d une chance tr s m thodique Ceux qui l ont re u de cette mani re re oivent ces traces parce qu eux m mes occupent les traces du parcours LA CHAMBRE BLANCHE a t l l l et l 3 Un lieu multipli par quatre pas des chambres blanches mais une qui s adresse quatre fois Une entit qui se g ographie au pluriel m lange sa s dentarit avec un nomadisme elle bouge comme les danseuses de Sarraute L l l elles dansaient tournaient et pivotaient Et pourquoi Et pourquoi Et pourquoi p 21 II y a aussi le l non triple mais double de Derrida il2. semble d acc l rer tant t et de ralentir le mouvement p 406 n La fin d un repas selon Kant doit tre accompagn e de sujets de discussion humoristiques afin d engendrer le rire qui facilite la digestion Dans cette pi ce Jocelyn Robert suit le pr cepte du philosophe de K nigsberg Un rire se r v le puis se d m le il cl t le disque en s effa ant lui m me BIBLIOGRAPHIE n7 Un rire qui cache autre chose peut tre qu un rire cache toujours autre chose ou engendre toujours plus que du contentement ou de la sati t Le rire n appartient pas seulement la joie l hu mour la l g ret Il a aussi un entre les deux Il y a tout un vocabulaire du rire il est polys mique Il est l l l et l Parmi ces l il y a un versant n faste mortel Rabelais Ces parolles dictes entra en si excessive guayet d esprit et Philomenes s esclata de rire tant enormement continuement que l exercice de la Ratelle luy tollut toute respiration et subi tument mouru p 92 18 Bataille aussi gr ce au rire d passe l agonie Je riais comme jamais peut tre on n avait ri le fin fond de chaque chose s ouvrait mis nu comme si j tais mort L exp rience int rieure p 46 ns On entend la voix de Robert certains instants dans des brins de conversation mais ce n est pas son rire qui prend le premier plan Dommage car son rire est contagieux ce qui est peut tre pr cis men
3. Temporalit fs Jocelyn Robert Qu bec 20 moments blancs lents uvre sonore D crire le temps qui passe est une entreprise chim rique Que ce soit celui d un visage ou celui d un village le temps d borde toujours des cadres et des horloges Tout de m me on s attelle la t che avec des strat gies diverses un entomologiste consacrera des dizaines de planches couleur aux petits d tails de la vie d un insecte alors qu un photographe tentera de d crire celle d une ville enti re avec ses clochers ses portes et ses passants par une seule image Car pour bien voir il faut tant t une loupe tant t un plan Un microscope ou un avion J ai tent d entendre le temps de LA CHAMBRE BLANCHE aux deux extr mit s de l chelle diverses r solutions avec diff rents reculs La premi re partie les 8 premi res pistes se pr sente comme un balayage du circuit des lieux occup s par LA CHAMBRE BLANCHE au cours des vingt derni res ann es un peu comme un reportage qui chercherait retracer l histoire du parcours par des montages des s quences des descriptions ou des superpositions La seconde partie de la piste 9 la fin s attarde au lieu actuel de LA CHAMBRE BLANCHE d abord de tr s loin pour n en percevoir que la silhouette puis de plus en plus pr s jusqu discerner le grain d un clat de rire Cette tentative de figer une parcelle de ce temps sur une galette circulaire est s
4. fade out ce qui pr sume des moments qui pr c dent le premier et des moments qui suivent le vingti me Les vingt sont au milieu La pi ce est une continuit d limit e semblable dans ce sens au Clock for 300 Thousand Years de Tatsuo Miyajima pi ce qui compte jusqu 9 999 999 999 999 secondes Donc des pi ces qui d passent le temps enfin notre temps puisqu elles ne sont pas infinies ce sont des infinis parmi notre finitude Un infini qui en d borde mais qui se d finit seulement par rapport l chelle de nos vies Le rapport haute tension entre la paire qui contient le contenant et le contenu et l incontenable nous rappelle les infinitudes de Pascal sauf qu ici l art permet aux chelles de se confondre des d cennies se r duisent en quelques minutes une horloge nous am ne des milliers d ann es dans le futur des neutrinos s crasent sur Neptune 8 Pause 20 moments blancs lents la piste num ro 8 fait une pause Le sonar change de param tres pour entamer un second balayage Cette c sure nous permet aussi de souligner que ce texte ne peut servir de mode d emploi s il explique ce n est qu travers II ne remplace pas l coute au contraire il la force presque C est une entente tacite entre deux formulations d une recherche similaire le texte et le disque ne sont envahis par la vie que dans la mesure o leur lecture et leur audition sont r ciproques c est dire dans la mesure o elles g n
5. nesse amn siaque Crat res fissures failles faillites s rie d interventions sur le paysage d une vie Une s rie de paires impaires contraires font aussi partie du jeu crat res montagnards sore eros palindrome de Bruce Nauman p 51 monter la c te pour la redescendre rection molle vide plein obscure clart multitude seule Pour Jocelyn Robert sa solitude a une silhouette elle est en pl nitude il cache tout parce qu il n a rien cacher Sa limpidit n quivaut pas une simplicit On ne sait rien des vingt moments tout reste deviner 6 Bataille s avant propose dans La litt rature et le mal Il est temps Parfois m me il semblerait que le temps manque Du moins le temps presse p 9 J ajouterais pire le temps s empresse de nous presser Il nous s che il nous d serte il nous aride On se rend compte de notre Sahara trop tard plus de recul possible les moments blancs lents se d roulent une vitesse fixe une pur e dure Dans ce contexte d shydrat qu en est il de cette uvre sonore qui se manifeste sur support binaire de forme ronde et reflets pur et dur et d une temporalit qui nous exc de pas s r selon certains Bien que l objet ait une permanence et que les sons qu il contient soient fixes Jocelyn Robert r ussit ralentir la course il force des virages il embosse la piste TEMPORALI 7 20 moments blancs lents commence avec un fade in et finit en
6. rent des inquisitions in puisables 9 Jocelyn Robert n a rien nous faire voir ni nous faire entendre On est par contre introduit une conceptualisation du temps dans l espace c est dire le r tr cissement et l tirement simultan s des donn es temporelles pour en faire surgir ce qui n est pas donn leurs infinitudes Bachelard dans une discussion o il cherche se lib rer du temps horizontal nous pr sente trois mani res qui rendraient possible ce d bordement 1 s habituer ne pas r f rer son temps propre au temps des autres briser les cadres sociaux de la dur e 2 s habituer ne pas r f rer son temps propre au temps des choses briser les cadres ph nom naux de la dur e 3 s habituer dur exercice ne pas r f rer son temps propre au temps de la vie ne plus savoir si le c ur bat si la joie pousse briser les cadres vitaux de la dur e p 227 Pour celui qui suit ces directives le temps ne coule plus Il jailli p 227 Jaillir bondir surgir d passement d bordement 0 Mais le temps s vase et s trangle en un m me geste ou plus pr cis ment il s chappe tout en nous emprisonnant Comment s en sortir de cette certitude Par la pulsion po tique par exemple constatation du fait in luctable entrelac par le d sir de se trouer une issue hors en dehors et en d sordre im Tra ons un autre parcours celui de l artiste Individu qui
7. s Paris Gallimard 1976 Miyajima Tatsuo Big Time Modern Art Museum of Fort Worth 1996 Rabelais Le Quart Livre Paris Flammarion 1971 1552 ruce Bruce Nouman conservateurs Kathy Halbreich et Neal Benezra Minneapolis Walker Art Center 1994 Robert Jocelyn Untitled dans The City Within Banff Jeanne Randolph d Banff Center for the Arts 1992 Sarraute Nathalie Tropismes Paris Les ditions de Minuit 1956 1939 Stuckenberg LHW The Life of Immanuel Kant Lanham Maryland University Press of America 1986 1882 35
8. songe a un art qui participe d un instantan spatial et temporel dans AB Box 1993 qui pour Le Piano Flou 1992 1995 dit qu il s agissait de faire des pi ces qui ne font que c hercher la diff rence Larose p 13 C est une uvre qui oscille et s empile elle g n re des palimpsestes de toutes sortes na Tout se passe par raccourci en hypoth se on vite le r cit phrase de Mallarm en pr face d Un coup de d s jamais n abolira le hasard p 406 phrase que l uvre de Robert poursuit en permutations idiosyncratiques Parfois le raccourci est le chemin le plus long Parfois en vitant on en raconte plus 3 Dans Untitled 1992 uvre typographique de Robert on trouve un alphabet qui s empile puis un qui le suit et se d pile Dans un premier temps chaque lettre se superpose sur l autre puis elle se soustrait a puis a sur b puis a et b sur C puis a et b et c sur dw u avec ev et aw et x et y et az av avec ew et ax et y et z Wa avec x et y et z ax avec y et z y avec z et finalement z 4 Palimpseste lettriste qui frustre l orthographe qui explicite la technique qu on retrouve dans 20 moments blancs lents d une mani re plus complexe Les vingt ann es se m tamorphosent en vingt moments par couches par acc l rations 15 par ralentissements Retour Mallarm en mi phrase
9. t la gen se de ce rire amplifi et contorsionn C est le rire d une chambre dans une chambre le rire d une Jocelyne blanche comme le vide 20 Le rire caduc nous ram ne Barthes cet ent tement du R f rent tre toujours l p 17 II nous parlait aussi d une immobilit amoureuse o fun bre p 17 dans notre cas le rire mobilise mais il s achemine vers un destination finale Sauf que rien ne nous oblige de descendre au terminus L ent tement lui aussi se d brouille pour ne jamais dispara tre CHRISTOF MIGONE Christof Migone est un artiste multidisciplinaire qui explore la dimension sonore Il a obtenu sa maitrise en arts visuels au Nova Scotia College of Art amp Design Halifax en 1996 et poursuit actuellement un doctorat en Performance Studies la New York University Bachelard Gaston Instants po tique et m taphysique dans Le droit de r ver Paris PUF 1970 p 224 232 Barthes Roland La chambre loire note sur la photographie Paris Gallimard Cahiers du Cin ma 1980 Bataille Georges La litt rature et le mal Paris Gallimard 1957 Bataille Georges L exp rience int rieure Paris Gallimard 1954 Derrida Jacques Cinders Lincoln University of Nebraska Press 1991 Larose Karim Musique non musique et nouvelles technologies Entrevue avec Jocelyn Robert pr sident d Avatar ETC vol XI no 41 1998 Mallarm St phane Igitur Divagations Un coup de d
10. y a l cendres p 21 Le l derrid en ne se double pas sur la page mais l oreille o l accent se perd est ce un lieu ou un article d fini Pour lui cette question marque une certaine ind cision entre l criture et la voix p 22 Le mouvement ici se joue entre l il et l oreille une polys mie s ins re dans l entre deux travers 20 moments blancs lents LA CHAMBRE BLANCHE devient auriculaire elle s entend en pleine polys mie la chambre est une au pluriel l l l et l 33 34 4 20 sur 20 titre qui lui aussi est ind cis parmi les multitudes significations de sur et de son homonyme s r Barthes se perd dans l incertitude priv es d un principe de marquage les photos sont des signes qui ne prennent pas bien qui tournent comme du lait Quoi qu elle donne voir et quelle que soit sa mani re une photo est toujours invisible ce n est pas elle qu on voit p 18 Le moment sonore qui s efface lui m me fr le l inaudible mais c est l arri re go t du lait s r qui laisse des traces ineffa ables Un tout rempli de presque riens 5 La pur e dure notion de Bergson lue de mani re dyslexique r f dur e pure Un liquide visqueux mais avec potentiel d coulement une chappatoire de la certitude de l immobilit S cr tion somatique du temps rides qui apparaissent pour annoncer notre disparition Vieillesse et ses crat res toujours plus belle que la jeu
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