Stabilité de l`emploi
Contents
1. conomic impact of flexible labor contracts with an application to Spain European Economic Review 36 pp 1013 1053 BLANCHARD O LANDIER A 2001 The Perverse Effects of Partial Labor Market Reform Fixed Duration Contracts in France NBER Working Paper No w8219 Bomraro J P MAGNAC Th POsTEL VINAY G 1990 Emploi mobilit et ch mage en France au XIX si cle migrations saisonni res entre industrie et agriculture Annales ESC janvier f vrier n 1 pp 55 76 Boyer R 2004 Th orie de la r gulation 1 Les fonda mentaux Paris La D couverte Rep res n 395 Canuc P KRAMAZEF 2004 De la pr carit la mobilit vers une s curit sociale professionnelle rapport au ministre de l conomie et des Finances et au ministre de l Emploi et du Travail et de la Coh sion sociale Paris La Documentation fran aise collection rapports officiels para tre 2005 Canuc P PosTEL ViNAY F 2002 Temporary Jobs Employment Protection and Labor Market Performance Labour Economics 9 1 pp 63 91 CoTTEREAU A 2002 Droit et bon droit Un droit des ouvriers instaur puis vinc par le droit du travail France XIX si cle Annales HSS novembre d cembre ne 6 pp 1521 1557 CoTTEREAU A 2000 Pr carit pluriactivit et hori zons biographiques au XIXe si cle en France in Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 121 Brar I D2. entr es sorties actives au le janvier au d but des ann es 1920 les ann es 1930 se caract risent par une baisse continue Les cons quences de cette d pendance sur les revendications des salari s lutte contre la libert de licencier Le d veloppement de pratiques alternatives de r tention de la main d uvre a conduit aux premi res revendications des salari s en faveur d une plus grande stabilit de l emploi En effet les premi res plaintes de salari s contre la rupture de leur contrat apparaissent dans les ann es 1870 contre des compagnies de chemin de fer ayant cong di leurs salari s qui avaient cotis des Euro caisses de pr voyance retraite En tant licenci s ces salari s perdaient tout droit la retraite qu ils avaient acquis gr ce la cotisation ces caisses ainsi que toutes leurs cotisations Plusieurs juge ments des conseils de prud hommes leur ont donn raison et ordonn aux compagnies le rembourse ment des cotisations Cependant la Cour de cassa tion a cass ces jugements 5 Le m me probl me se pose pour les fonctionnaires et se r sout dans leur cas par le caract re exceptionnel des licenciements DEMARTIAL 1909 Pour les salari s du secteur priv la question commence seulement se poser cette poque et c est une loi de 1890 qui lui apporte une premi re r ponse Le contrat fait sans d termination de dur e appara t l poque comme le plus
3. Le conflit social in BURGUI RE A REVEL J dir Histoire de la France tome 3 L tat et les conflits volume dirig par Julliard J Paris ditions du Seuil GauDpu F 1986 L emploi dans l entreprise priv e essai de th orie juridique th se pour le doctorat d Etat universit Paris I Gans C 1897 L instabilit des ateliers et la r siliation du contrat de travail th se pour le doctorat facult de droit de Paris Laval Imprimerie E Jamin GaAZIER B 2003 Tous Sublimes Vers un nouveau plein emploi Paris ditions Flammarion GERME J F 1978 Emploi et main d uvre au XIX si cle Etude des enqu tes sur la condition ouvri re en France th se universit Paris I HATZFELD H 1971 Du paup risme la s curit 1850 1940 collection Espace social Presses Universitaires de Nancy HENRY F 1991 Le contrat de travail dur e ind ter min e de la marginalit la normalisation m moire DEA facult des sciences conomiques et sociales universit des sciences et techniques de Lille MicHon F Ramaux C 1992 CDD et int rim bilan d une d cennie Travail et Emploi n 52 pp 37 56 Mor M L dir 2001 Prestation de travail et activit de service Cahier Travail et Emploi minist re de l Emploi et de la Solidarit Paris La Documentation fran aise NolRIEL G 1988 Du patronage au paternal isme la restructu
4. encore au sein de l entreprise L existence de migrations saisonni res entre agri culture et industrie t moigne de l enjeu que cons titue pour les salari s la libert de pouvoir quitter leur patron quand ils le souhaitent Mais cet enjeu ne se limite pas aux mobilit s saisonni res et inter sectorielles La figure du sublime 2 qui est un type d ouvrier indisciplin mais souvent habile et qui a de trois cinq patrons diff rents par ann e HATZFELD 1971 repr sente bien l enjeu de la libert de mobilit pour le salari De fa on plus g n rale TopaLov lorsqu il d crit les formes de mobilit qui permettaient de sortir du salariat industriel au XIXe si cle met en lumi re l ambivalence de la pr carit de l emploi qui faisait perdre aux travailleurs des salaires et leur imposait l incertitude du lendemain mais dont les mobilit s associ es leur procuraient en m me temps de l in d pendance vis vis des patrons et plus largement du salariat TopaLov 1994 Selon P FRIDENSON 2003 p 64 le r gime normal au XIX si cle est celui de l emploi temporaire il s appuie pour affirmer cela sur les archives qui ont montr un turn over extraordinairement massif M me si les salari s pouvaient souhaiter obtenir une stabilit de leur revenu passant par la stabilit de l emploi ils taient en m me temps conscients qu ils ne pouvaien
5. est pas non plus un horizon ind passable Plusieurs propositions de juristes ou d conomistes droits de tirage sociaux march s transitionnels GAZIER 2003 SurioT 1999 tendent lui substituer la notion de s curit des trajectoires professionnelles Cependant de telles propositions impliquent de rendre les salari s moins d pendants de la continuit de la relation salariale Cela signifie notamment dispenser des formations caract re plus g n ral et moins sp cifiques l entre prise Or de telles mesures se heurtent aux int r ts des entreprises qui pendant des d cennies ont uvr en sens inverse Ce travail met aussi en vidence que ce qui se joue derri re la d termination ou l ind termina Euro tion de la dur e du contrat de travail varie selon les poques En particulier nous avons fait appara tre que l assimilation actuelle du CDD la pr carit et du CDI la stabilit de l emploi ne va pas de soi L ind termination de la dur e a historiquement d abord t le moyen pour l employeur d obtenir plus de flexibilit alors que seul le CDD permettait d apporter des garanties de stabilit de l emploi Ce n est qu partir du moment o les motifs de rupture du CDI ont t restreints par les conventions collec tives et par la loi et o la dur e du CDD a t forte ment limit e que la sp cialisation de ces contrats respectivement dans la stabilit et dans la f
6. 1789 1880 Paris PUF SUPIOT A 1999 dir Au del de l emploi rapport pour la Commission europ enne Transformations du travail et devenir du droit du travail en Europe Paris ditions Flammarion TH VENOT N VALENTIN J 2003 Sous traitance et pr carit de l emploi une analyse empirique Forum de la r gulation 2003 TH VENOT N VALENTIN J 2004 volution de la sous traitance en France depuis le d but des ann es 1980 Analyse sur donn es individuelles d entreprises Cahier de la MSE s rie rouge n 2004 01 TopaLov C 1994 La naissance du ch meur Paris ditions Albin Michel e 122 Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005
7. augmente la d pen dance des salari s vis vis de la continuit de leur relation salariale Cependant les effets de ces volu tions ne sont pas imm diats Dans les ann es 1920 le turn over a tendance augmenter Mais ce sont surtout les salari s qui ont t le plus pargn s par le taylorisme qui sont en mesure de d velopper ces strat gies En p riode de plein emploi les salari s pouvant facilement passer d un emploi un autre leur objectif n est pas forc ment une dur e maximale de la relation mais le fait de se maintenir dans une relation En p riode de ch mage les transi tions entre diff rentes relations d emploi se font plus difficilement l objectif est donc la dur e de la relation salariale en cours c est dire la stabi lit de l emploi Les p riodes d augmentation du ch mage sont ainsi plus r v latrices de l augmen tation de la d pendance des salari s la stabilit de la relation salariale travers leurs revendications de stabilit de l emploi Ainsi lors de la crise des ann es 1930 on a observ un mouvement de stabili sation des salari s Selon NoRiEL 1986 p 171 la premi re phase de la crise provoque la stabilisation de la classe ouvri re industrielle Les travaux de Omn s 1997 p 159 sur les ouvri res parisiennes confirment les indicateurs de mobilit g ographique sur lesquels s appuie No RIEL Apr s une croissance de l indicateur de mobilit
8. la dur e du contrat Il en r sulte qu il carac t rise des situations de travail plus que d emploi On comprend ainsi pourquoi le type de contrat ne peut tre le crit re pertinent pour rep rer les emplois pr caires avant la fin des ann es 1970 Ainsi lorsque B FourCADE 1992 analyse les situations d emploi particuli res de 1945 1990 il rel ve l existence d une pr carit de fait c t d une pr carit de droit et retient trois l ments fondamentaux pour d finir la pr carit la discontinuit des p riodes de travail qui entra ne celle des revenus individuels la faiblesse de ces m mes revenus l insuffisance de protection sociale L identification statistique des formes particuli res d emploi au sein du salariat n est apparue qu partir du moment o le salariat est devenu largement majoritaire et o le ch mage de masse a renforc les enjeux de stabilit de l emploi li s aux diff rents types de contrat de travail Les travaux de M L Mor 2001 montrent n anmoins l existence encore aujourd hui de formes d emploi hybrides entre salariat et travail ind pendant dont le rep rage statistique n est pas ais Si la pr carit ne se r sume pas au CDD ce contrat de travail est bien devenu une figure embl matique de la pr carit partir des ann es 1970 on assiste plus g n ra lement un recours croissant des formes d emploi cherchant contourner la
9. norme du CDI Outre le CDD qui repr sente d sormais pas loin de 9 des emplois du secteur priv contre moins de 3 au d but des ann es 1980 il s agit du recours aux services des soci t s de travail temporaire pr s de 3 des emplois du priv en 2003 Le d veloppe ment de la sous traitance peut aussi s interpr ter comme un mode de mobilisation de main d uvre indirecte permettant de contourner les contraintes du droit du travail TH VENOT VALENTIN 2004 Dans les deux cas il s agit de substituer au contrat de travail un contrat commercial et de faire porter ainsi un autre employeur toutes les contraintes les responsabilit s et les droits sociaux aff rents la relation salariale Ces pratiques r duisent les protec tions des salari s soit parce qu elles renforcent l instabilit c est le cas de l int rim o les embau ches sont en CDD soit parce qu elles offrent des conditions de travail plus d favorables TH VENOT VALENTIN 2003 Tous ces contournements du CDI rel vent d une m me logique de report des risques assum s auparavant par les employeurs vers les salari s Morin 2001 PETIT SAUZE 2005 Le r gime juridique du CDD a connu au cours des ann es 1980 une forte instabilit qui t moigne de la fluctuation des r ponses apport es la question du degr n cessaire de flexibilit du march du travail au gr des alternances politiques La progression du recours ces con
10. sont pas concern s par ces clauses ceci est m me clairement affirm dans la convention des ouvriers des industries lectro m tallurgiques de la Savoie article 21 On peut donc constater qu au d but du XX si cle il existait une segmentation des emplois tout au moins en mati re de stabilit plus lev e pour les employ s embauch s en CDD que pour les ouvriers en CDI de m me que pour les titulaires par rapport aux auxiliaires ou stagiaires parfois titulaires de CDD de courte dur e L assimilation d un type de contrat une gestion stable de la main d uvre et d un autre une gestion pr caire n est pas aussi claire qu aujourd hui Il existe d j une segmen tation des emplois mais pas sur les m mes bases juridiques F Gaupusitue le basculement du syst me dans les ann es 1950 Le d pouillement des conventions collectives des ann es 1947 1967 l am ne cons tater une multiplication des clauses qui octroient aux ouvriers des indemnit s de licenciement Gaunu 1986 partir de cette p riode le CDD commence tre utilis comme cadre contractuel des emplois pr caires Ce basculement s op re non plus seulement dans les conventions collectives mais aussi dans la loi La loi du 19 f vrier 1958 rend obli gatoire le d lai cong d une dur e minimale d un mois pour tous les salari s dur e qui est port e deux mois par l ordonnance du 15 juillet 19
11. 67 pour les salari s ayant au moins deux ans d anciennet dans l entreprise L ordonnance du 13 juillet 1967 g n ralise l indemnit de licenciement elle l tablit un minimum de 10 heures de salaire ou 1 20e de mois de salaire par ann e de pr sence pour les seuls salari s ayant plus de deux ans d anciennet inin terrompue dans la m me entreprise Toutes ces lois en envisageant le licenciement et non la d mission permettent une progression asym trique de la stabi lit du CDI au profit du salari La multiplication des l ments de stabilit de l emploi n appara t pas comme le r sultat de luttes sociales GAuDU 1986 indique que les branches dans lesquelles sont d velopp es de bonnes condi tions de stabilit de l emploi ne sont pas celles qui sont le plus syndiqu es Il ne s agirait donc pas de concessions aux salari s lors de luttes sociales mais de mesures allant dans l int r t des employeurs A un moment o la mobilit des ouvriers est particu li rement favoris e par la situation de plein emploi ils appliquent aux ouvriers les m thodes qu ils ont d velopp es d s le d but du si cle pour stabi liser les employ s La p riode se caract rise par Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 119 un consensus entre partenaires sociaux y compris la CGT sur la notion de carri re dans l entreprise et le non recours au licenciement Gaupu 1986 L accord interp
12. EBORDEAUX D LUROL M Vivre la pr carit Trajectoires et projets CouTRoT T 2000 Les facteurs de recours aux contrats temporaires Premi res Synth ses n 25 3 DARES DANTIER H 1907 L indemnit due en cas de rupture du contrat de travail th se pour le doctorat universit de Paris facult de droit Paris Librairie des facult s DauTy F Morn M L 1992 Entre le travail et l emploi la polyvalence des contrats dur e d termin e Travail et Emploi n 52 pp 20 36 DELATTRE E SALOGNON M 2002 Pratiques de gestion de la main d uvre et dur e de ch mage quels enjeux pour la politique de l emploi in Dupuis J M et al Politiques sociales et croissance conomique tome 2 Paris L Harmattan DEMARTIAL G 1909 Le statut des fonctionnaires deux i me dition collection de la grande revue FourcCADE B 1992 L volution des situations d emploi particuli res de 1945 1990 Travail et Emploi n 52 pp 4 19 FREYSSINET M 2002 Modes d accumulation du capital et nature du rapport salarial une nouvelle dialectique in Dock s dir Ordres et d sordres dans l conomie monde collection Quadrige Paris PUF FRIDENSON P 2003 La subordination dans le travail les questions de l historien in CHAUCHARD J P La subordi nation dans le travail Cahier Travail et Emploi Paris La Documentation fran aise FRIDENSON P 1990
13. Euro Stabilit de l emploi conqu te sociale ou politiques patronales Damien Sauze Les modalit s de r gulation de la dur e des relations salariales ont connu des transformations majeures depuis deux si cles Au d but du XIXe si cle la libert de rupture de la relation est l enjeu prioritaire pour les salari s le CDD appara t comme le meilleur moyen de limiter l engagement dans la relation et la d pendance vis vis de l employeur Mais l employeur incite ou contraint souvent la poursuite de la relation au del du CDD Progressivement merge le CDI pour tenir compte de cette r alit sa reconnaissance en 1890 dans le Code civil le CDI devient le contrat le plus flexible r siliable de fa on unilat ral alors que le CDD est utilis pour stabiliser les employ s N anmoins progressivement le CDI appara t comme le contrat qui permet d int grer les nouvelles revendications de stabilit de l emploi des salari s Peu peu les objectifs des salari s et des employeurs sont rejoints pour tablir une norme de stabilit de l emploi la fois une conqu te sociale et le r sultat de politiques patronales Le d veloppement des CDD aujourd hui conduit moins une remise en cause g n ralis e de la stabilit de l emploi qu l accroissement des in galit s entre salari s Le d veloppement de l emploi sous forme de contrats dur e d termin e CDD depuis la fin des ann es 1970 interro
14. Jusqu la fin du XIXe si cle la qu te patronale de la stabilit et de la subordination La stabilit et la durabilit de la relation salariale n ont pas toujours t la revendication prioritaire des salari s concernant le contr le de la dur e de la relation Au XTX si cle la libert de rupture de ce contrat tait un enjeu plus important dans la mesure o elle constituait un moyen de r duire la d pen dance vis vis de l employeur Une moindre d pendance des salari s l gard de la dur e de la relation salariale En France au XIX si cle le salariat n est pas encore dominant au point de constituer l unique moyen d existence des individus et par cons quent la revendication de stabilit de la relation salariale n est pas encore prioritaire pour les travailleurs L assurance de la s curit des moyens d existence passe par la libert de se d sengager d une relation salariale pour aller chercher de meilleures opportu nit s de travail une poque o la recherche de la stabilit de l emploi ne fait pas encore sens partir d un travail d analyses biographiques COTTEREAU 2000 a montr l existence de multiples acti vit s lucratives souvent en dehors du salariat qui au del de l activit consid r e comme normale assurent p riodiquement on qualifie alors cette activit de ch mage ou de fa on r guli re il s agit alors de pluriactivit les moyens d existence d
15. RE SALOGNON 2002 Une interpr tation possible de ce constat est que plus un salari reste longtemps dans une entreprise moins il est susceptible d acqu rir les nouvelles qualifica tions qui lui permettraient de postuler aux nouveaux emplois cr s Si le d veloppement des CDD ne remet pas en cause le niveau moyen d anciennet dans l emploi e 120 Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 en revanche il accro t les in galit s des salari s face cette garantie Derri re une moyenne stable se cachent en r alit des volutions tr s diff ren ci es entre les salari s les plus stables qui voient leur anciennet augmenter et les moins stables qui la voient diminuer Sauze 2004a Loin d un retour aux modalit s de r gulation du XTX si cle une telle volution ne fait que renforcer l attachement des salari s la stabilit de l emploi Une mise en perspective historique de la r gula tion de la dur e des relations salariales permet de mieux comprendre les logiques de d veloppement actuel des CDD Les employeurs qui ont partielle ment g n r cette d pendance accrue des salari s la continuit de la relation salariale ou qui au moins en ont profit pour stabiliser leur main d uvre cherchent depuis les ann es 1970 notamment aux travers des CDD se soustraire aux responsabi lit s qu ils assumaient en mati re de continuit de l emploi La stabilit de l emploi n
16. aite 7 Les parties peuvent r ciproquement r silier en se pr venant huit jours d avance et par crit ou en se payant une indemnit de r siliation fix e titre de clause p nale expresse une somme quivalente l appointement fix pour un pareil temps de huit jours BEAU 2001 p 166 8 Ces conventions collectives sont conserv es aux archives nationales Toutes les conventions n ont pas t consult es mais nous avons retenu un chantillon de branche et de lieux assez diversifi la fois industrie et services Paris et province Nous avons parti culi rement pris soin de s lectionner des branches potentiellement soumises des variations d activit ex industrie des conserves 9 Plus exactement les employ s techniciens agents de ma trises regroup s l poque sous le terme de collaborateurs e 118 Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 ment quant la stabilit de l emploi entre ouvriers et employ s est flagrante La principale r gle concernant la stabilit de l emploi et qui se trouve codifi e dans les conven tions collectives des ann es 1930 est celle du d lai cong En effet la r glementation du d lai cong est une des sept dispositions qui doivent tre obligatoi rement int gr es dans la convention collective en application de la loi du 24 juin 1936 Le d lai cong dont b n ficient les employ s est syst matiquement plus long qu
17. celle de l ouvrier le premier le plus souvent est embauch sous contrat dur e d termin e L entreprise en effet a besoin de s assurer ses services D ailleurs pour ce salari dont l entendement peut tre pr sum plus clair que celui des autres l engagement de longue dur e cons titue moins un asservissement qu une garantie Pour l ouvrier au contraire l embauche se fait en g n ral sous contrat dur e ind termin e souvent la journ e ou la semaine C est parce que au contraire en fait et souvent en droit la situation des employ s est relativement stable qu ils ont pu tre d sign s par un tel vocable Gaunu 1986 p 13 Ainsi la notion d emploi qui suppose une certaine stabilit de la relation salariale se serait elle d abord d velopp e dans le cadre du CDD et pour une cat gorie de salari s que les employeurs cherchent fid liser plus que les autres les employ s Une consultation des conventions collectives des ann es 1930 8 permet de constater les progr s des m canismes de stabilisation de l emploi cette poque Pour commencer il faut pr ciser que dans la plupart des branches industrielles on trouve deux conventions L une r gle les relations entre patrons et ouvriers l autre les relations entre les patrons et les employ s 9 souvent d sign s l poque sous le terme de collaborateurs La diff rence de tr
18. cifique au travail La suppression des corpo rations par le d cret d Allarde en 1791 avait cr un vide dans la r glementation des conditions de travail Par ailleurs l interdiction de coalition par la loi Le Chapelier en 1791 avait limit d embl e la relation salariale un contrat entre deux indi vidus Ainsi les relations de travail taient donc r gies par le Code civil par le droit commun des contrats Elles taient formalis es par deux types de contrats le contrat de louage de services et le contrat de louage d ouvrage qui se distinguent par leur objet dans le premier cas il s agit de la force de travail d un salari dans le second c est le produit du travail d un ouvrier qui est chang Par cons quent seul le louage de services rel ve du salariat Il ne s agit pas ici d ignorer que les r dacteurs du Code civil ne concevaient le louage de services que comme une exception et ont essay de l aligner sur le mod le galitaire du louage d ouvrage comme cela a t mis en vidence par COTTEREAU 2002 N anmoins ce dernier consid re en outre que la plupart des ouvriers relevaient du louage d ouvrage ce qui revient nier l existence du salariat avant la fin du XIX si cle Une telle hypoth se nous para t excessive et nous tudierons la relation salariale au XIX si cle dans le cadre du louage de services Seuls deux articles du Code civil 1780 et 1781 apportent des pr cision
19. de deux modes d emploi diff rents au d but du si cle celui des auxiliaires et celui des non auxiliaires ou titulaires Pour ces derniers le respect d un d lai cong en cas de rupture est inscrit sur le bulletin 7 ce qui n est pas le cas pour les premiers L emploi d auxiliaire est un mode d emploi pr caire Il signifie que l employ e peut tre d bauch e sans pr avis ni indemnit BEAU 2001 p 165 Progressivement au Grand Bazar l emploi d auxiliaire devient le mode d emploi exclusif l embauche Les employ es quittent ce statut d auxiliaire en moyenne au bout de six sept mois et b n ficient alors d une r mun ration mensuelle au lieu de journali re ainsi que du d lai cong Beau 2001 On trouve aussi mention dans la jurisprudence des conseils de prud hommes d ouvriers suppl mentaires pour lesquels la loi du 27 d cembre 1890 ne s applique pas Journal des prud hommes 1898 p 112 113 Plusieurs juristes du d but du XX si cle font tat de l utilisation du CDD comme contrat visant stabiliser les salari s notamment les employ s Ces t moignages confirment la r partition des usages de ces deux types de contrat au d but du XX si cle telle que F Gaupu 1986 l a tablie dans ses recher ches sur les origines de la notion d emploi en droit priv Il existe aussi une diff rence entre la situa tion juridique de l employ et
20. e celui dont b n ficient les ouvriers Tr s souvent le d lai cong pour les ouvriers est d une semaine alors qu il est d au moins un mois pour les employ s La quasi totalit des conventions concer nant les employ s pr voient en outre des indemnit s de licenciement ind pendamment du respect ou non du d lai cong et dont le montant varie suivant l an ciennet de l employ dans l entreprise On rel ve une logique d laboration de relation de confiance avec les employ s Plusieurs conventions pr voient d ailleurs des clauses de non concurrence La plus grande protection des employ s par rapport aux ouvriers en mati re de licenciement est par ailleurs renforc e par les indemnit s de licenciement dont b n ficient les employ s Outre le d lai cong la question de la stabi lit du lien salarial est aussi appr hend e dans ces conventions collectives par le maintien de liens entre employeurs et salari s au del de la rupture du contrat de travail avec des clauses de r embauche et des clauses de non concurrence La plupart des conventions pour les ouvriers comme pour les employ s incluent la clause de r embauche suivante Dans les entreprises dont la marche est sujette des fluctuations il sera fait appel de pr f rence lorsqu il sera proc d des r embau chages aux ouvriers et ouvri res qui auront t licenci s pr c demment pour manque de travail Les clauses de non concu
21. e r ten tion se d veloppent au moment o le livret ouvrier est remis en cause puis supprim par une loi en 1890 et o la rupture croissante entre le monde industriel et le monde rural laisse la place aux grandes entre prises pour prendre en charge l organisation de pans entiers de la vie sociale autrefois assum e par les solidarit s familiales rurales comme par exemple les retraites Par rapport au patronage ces strat gies paternalistes franchissent un pas de plus vers un contr le total sur la vie ouvri re NOIRIEL 1988 FREYSSINET 2002 analyse le taylorisme et l exten sion des formes de production capitaliste comme les deux piliers de l offensive patronale contre l auto nomie ouvri re 4 Cette analyse semble pouvoir s appliquer la d pendance des salari s vis vis de la continuit de la relation salariale L Organisation scientifique du travail OST selon les principes de Taylor est introduite en France dans les ann es qui pr c dent la premi re guerre mondiale notamment chez Renault mais se d veloppe surtout dans les ann es 1920 notamment dans la construction m ca nique NOREL 1986 Elle consiste d une part s parer les t ches de conception et d ex cution et d autre part parcelliser les t ches d ex cution Le r sultat est que l ouvrier perd la ma trise de l orga nisation du travail Il est pr sent non seulement d pendant de l entreprise pour la vente de
22. egard de la mise en perspective histo rique que nous proposons dans cet article Ce que nous appelons ici modalit de r gulation de la dur e des relations salariales renvoie ce que les th oriciens de la r gulation appellent modalit de mobilisation et d attachement des salari s l en treprise et qui est l une des cinq composantes de la forme institutionnelle du rapport salarial BOYER 2004 p 39 Cette composante restant peu tudi e par les conomistes sur longue p riode 1 il s agit ici d en approfondir la connaissance afin d valuer la port e de ses transformations r centes La stabi lit de l emploi est elle seulement un acquis social d fendu par les salari s A t elle d ailleurs toujours t une revendication de leur part N est elle pas aussi une exigence patronale Nous analysons les modalit s de r gulation de la dur e des relations salariales comme le r sultat de la confrontation des strat gies des acteurs en pr sence salari s employeurs et dans une moindre mesure l tat Ces strat gies pour partie interd pendantes sont le produit du contexte conomique et social Matisse UMR 8595 CNRS Universit Paris I 106 112 boulevard de l h pital 75647 Paris cedex 13 sauze univ paris1 fr Je tiens remercier Julie Valentin Bernard Gazier J r me Bourdieu S bastien Chauvin H lo se Petit Christophe Ramaux Nadine Th venot Bruno Tinel ainsi
23. es travailleurs De plus il note que l tablissement son compte constitue l poque une aspiration largement partag e pour conclure que resitu parmi les projets de vie professionnelle le salariat s av re essentiellement provisoire La mobilit saisonni re entre les secteurs agricole et industriel constituait une pratique courante au XIXe si cle L enqu te de 1862 sur l agriculture r v le que les m nages journaliers habituellement employ s dans ce secteur consacrent sur une ann e pr s d un quart de leur temps des industries diverses les occupant accessoirement pendant le ch mage des travaux agricoles ou m me pendant la dur e de ces travaux BOMPARD MAGNAC PosTEL ViNAY 1990 De fa on sym trique len qu te de 1860 dans l industrie permet une valua tion mensuelle du taux de ch mage qui met en vidence une progression du ch mage industriel les mois d t et une diminution l hiver laissant forte ment pr sumer selon BomPraRD ef al l existence de nombreuses migrations saisonni res entre les secteurs industriel et agricole Ces auteurs montrent les incitations salariales ce type de migration le salaire agricole devenant plus lev que le salaire industriel dans la p riode estivale Cette mobilit entre industrie et agriculture s explique aussi par un fort attachement des travailleurs au monde rural et une socialisation l int rieur du village et pas
24. es le versement de dommages int r ts est une obligation pour la partie qui a rompu le contrat Par cons quent les limites la r siliation du contrat de travail restent faibles Mais il s agit quand m me l d une premi re tape dans l laboration du droit du licenciement Les progr s dans la stabilit de l emploi se r alisent ainsi au sein du CDI dont on peut dire que cette loi marque la date de naissance Si tout au long du XIX si cle le pouvoir de d ter mination de la dur e des relations salariales tait in galement distribu en faveur des employeurs les lois de 1890 par la suppression du livret ouvrier et la premi re pierre de la construction d un droit du licenciement marquent le d but d une mod ration de ce pouvoir Construction de la stabilit de l emploi la permutation des contrats Apr s la loi de 1890 les modes d embauche flexi bles n ont pas pris imm diatement la forme du CDD qui cette poque pouvait encore appara tre comme le contrat le plus stable C est par une absence de g n ralisation du d lai cong que s est cr e une distinction entre emplois stables et emplois pr caires au sein m me du CDI la fin du XIX si cle certaines entreprises commencent distinguer parmi leur personnel des salari s titulaires et des salari s auxiliaires ou temporaires Ainsi au Grand Bazar de Lyon l analyse des bulletins d admission a fait ressortir l existence
25. flexible L utilisation croissante de ce type de contrat est une des raisons invoqu es par les juristes de l instabilit dans les ateliers Gans 1897 Cette possibilit de rompre tout moment le contrat par sa seule volont est d ailleurs tr s appr ci e des patrons comme des ouvriers Elle a en effet des avantages qui expliquent la fr quence de plus en plus grande de l engagement sans d termination de dur e Avec le d veloppement des commu nications et l largissement des march s la produc tion est devenue irr guli re L industriel est oblig en certains moments pour satisfaire la demande des consommateurs d accro tre sa production et de prendre un personnel plus nombreux pour un temps qu il ne lui est pas possible de pr voir Avec le contrat dur e d termin e il devrait conserver les ouvriers en surnombre jusqu l expiration de l en gagement m me si le travail venait diminuer dans son tablissement d o perte pour lui Au contraire sous le r gime de la convention sans d termination de dur e il peut se s parer de ses ouvriers aussit t que leur concours lui est devenu inutile DANTIER 1907 Ainsi la probl matique de la flexibilit du contrat de travail pour faire face aux fluctuations de l acti vit n est pas nouvelle La diff rence est qu la fin du XIX si cle le contrat le plus flexible tait le CDI alors que depuis les ann es 1970 c es
26. ge pouvoirs publics et cher cheurs sur les modalit s de r gulation de la dur e des relations salariales Au cours des trente derni res ann es la l gislation qui encadre ces modalit s lois sur les CDD l int rim et le licenciement a volu de multiples reprises Parall lement l ap pareil statistique a progressivement pris en compte de nouvelles formes d emploi premi re enqu te ACEMO sp cifique sur les CDD en 1977 apparition de la cat gorie CDD dans l enqu te Emploi en 1982 Chez les conomistes deux types de travaux sur les CDD se sont d velopp s des tudes empiri ques sur les motifs recours des entreprises aux CDD en France MICHON RAMAUX 1992 RAMAUXx 1994 CouTROT 2000 mais aussi une litt rature domi nante th orique tudiant les effets sur l emploi de la l gislation de la protection de l emploi BENTOLILA SAINT PAUL 1992 BLANCHARD LANDIER 2001 CAHUC POSTEL VINAY 2002 Cet int r t partag des pouvoirs publics et des chercheurs t moigne de l ampleur des enjeux li s aux transformations intervenues dans les modalit s de r gulation de la dur e des relations salariales ces derni res d cennies Il s agit la fois des enjeux traditionnels touchant la s curit de leurs moyens d existence pour les salari s et de politique de gestion des ressources humaines mais aussi d enjeux de lutte contre le ch mage m me si ce dernier semble plus r cent au r
27. lexibi lit s est r alis e On peut alors se montrer r serv vis vis des propositions d unification du contrat de travail par suppression des CDD et assouplisse ment de la l gislation sur le licenciement Canuc Kramarz 2004 En effet cela nous am ne nous demander si aujourd hui ce que recherchent les employeurs en recourant aux CDD n est pas tant la d termination de la dur e que la limitation de cette dur e et de leurs obligations vis vis des salari s Si tel est le cas la suppression de la possibilit de recours aux CDD associ e une facilitation du licenciement ne pourra contrer la limitation de la dur e des contrats des nouveaux embauch s autre ment dit de la pr carisation Les salari s qui taient embauch s en CDD seraient embauch s en CDI et l employeur pourra mettre fin leur contrat encore plus rapidement que lorsqu ils taient embauch s en CDD Sauze 2004b Alors que depuis les ann es 1970 la flexibilit de l emploi se d veloppait par un contournement de la norme du CDI elle pourrait dans les ann es venir se d ployer dans le cadre m me du CDI Bibliographie AUER P Cazes S 2000 L emploi durable persiste dans les pays industrialis s Revue internationale du travail vol 139 n 4 pp 427 459 BEAU A S 2001 Grand Bazar modes d emploi th se de doctorat d histoire universit Lumi re Lyon II BENTOLILA S SAINT PAUL G 1992 The macrc
28. n d uvre et ne pas tre touch s de la m me mani re par cette mobilit Certains secteurs retien nent plus facilement leurs salari s en leur propo sant des salaires plus lev s que le salaire agricole L utilisation du livret ouvrier ou du r glement d ate lier pour retenir les travailleurs n est pas syst ma tique Elle est d autant plus fr quente que la poli tique salariale ne peut pas jouer ce r le Le fait que l exemple d avances salariales cit plus haut se situe dans le secteur du textile n est certainement pas un hasard En effet d apr s Bomparp et al 1990 le textile fait partie des secteurs qui versent plut t de bas salaires et rendent attractives les mobilit s saisonni res vers l agriculture Dans la m tallurgie les employeurs cherchent exploiter la pluriactivit en conc dant aux ouvriers des terres autour des logements NoIRIEL 1988 tout en essayant d enraciner les ouvriers l usine par opposition au village lorsque la pluriactivit est davantage une strat gie d ouvriers paysans Ces strat gies de patronage cherchent davantage fixer la main d uvre qu la capter par des salaires plus lev s Elles n ont pas non plus vocation remettre en cause les marges d autonomie des ouvriers dans l organisation du travail Par ailleurs les pratiques de r tention de la main d uvre ne s appliquent que de fa on s lective La population flottante qui d
29. que les rapporteurs anonymes de la revue pour leurs encouragements et commentaires qui m ont permis d am liorer des versions pr liminaires de ce texte Je reste enti rement responsable de tous les manques et imperfections qui peuvent n anmoins subsister i 1 La principale r f rence dans ce domaine reste la th se de J F GERME 1978 Emploi et main d uvre au XIX si cle Etude des enqu tes sur la condition ouvri re en France Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 113 Elles s inscrivent dans un cadre juridique qu elles contribuent fa onner Il s agit donc d articuler toutes les facettes de l histoire conomique sociale et juridique de mani re comprendre l volution des objectifs prioritaires des acteurs et des outils juridiques leur disposition En s appuyant sur cette grille de lecture nous d fendons la th se suivante Au XIXe si cle en ce qui concerne les salari s l arbitrage se fait plut t en faveur d un moindre engagement de leur part dans la relation dans le but de pr server leur libert Ce n est plus le cas au XX si cle au cours duquel on assiste un renversement des priorit s des salari s La stabilit de l emploi devient pour eux priori taire Les objectifs des salari s et des employeurs se rejoignent alors pour tablir une norme de stabilit de l emploi dont les fondements ne paraissent pas remis en cause par le recours accru aux CDD
30. ration des formes de domination de la main d uvre ouvri re dans l industrie m tallurgique fran aise Le mouvement social n 144 pp 17 35 NoRIEL G 1986 Les ouvriers dans la soci t fran aise XIXe XXe si cle collection Points Paris ditions du Seuil Omn s C 1987 Ouvri res parisiennes march s du travail et trajectoires professionnelles au XXe si cle Paris ditions de l cole des hautes tudes en sciences sociales Perit H Sauze D 2005 Une lecture historique de la relation salariale comme structure de r partition d al as en partant du travail de Salais in EYMARD DUVERNAY F FAVEREAU O dir Conventions et Institutions appro fondissements th oriques et contribution au d bat poli tique Paris La D couverte para tre Ramaux C 1994 Comment s organise le recours aux CDD et l int rim Travail et Emploi n 58 pp 55 76 SAUZE D 2004 a Recours aux CDD et volution de la dur e du lien d emploi en France au cours des ann es 1980 et 1990 contribution au d bat sur la stabilit de l emploi Document de travail SAUZE D 2004 b Supprimer les CDD une fausse bonne id e Lib ration 14 d cembre SAUZET M 1890 Le livret obligatoire des ouvriers ditions F Pichon SoBOUL J 1976 Le choc r volutionnaire 1789 1797 in BRAUDEL F LABROUSSE E dir Histoire conomique et sociale de la France W1
31. rofessionnel de 1969 sur la s curit de l emploi en est une illustration Finalement c est donc le CDI renforc par les lois sur le licenciement de 1973 et 1975 qui est apparu le mieux m me de concilier les objectifs de chacune des parties cr er des conditions propices la stabilit de l emploi tout en pr servant sa libert de rupture Le CDD peut tre utilis pour remplir chacun de ces deux objectifs s par ment un CDD court pour r pondre un objectif de flexibilit un CDD long pour r pondre un objectif de stabilit mais il ne peut pas assurer les deux simultan ment Aujourd hui le CDD se situe plut t du c t de la flexibilit dans la mesure o sa dur e maximale est de dix huit mois Le CDD n ayant pas permis de r pondre simultan ment aux deux objectifs il tait plus ou moins tomb en d su tude au cours du XX si cle partir des ann es 1970 l apparition d un niveau de ch mage lev freinant la mobilit des salari s et faisant passer au second plan le souci de fid liser les salari s il retrouve un int r t pour les employeurs dans la mesure o un CDD de courte dur e leur assure une plus grande flexi bilit qu un CDI dont la rupture devient de plus en plus co teuse Pour reprendre les termes de DAUTY et Morin 1992 on assiste progressivement une sp cialisation de l usage du CDD dans des situations de travail de courte dur e Le CDD est utilis pour limiter
32. rrence se trouvent exclu sivement dans les conventions collectives concer nant les employ s Ainsi la convention collective de l automobile de la Seine collaborateurs stipule en son article 3 l interdiction un collaborateur qui quitte volontairement ou non son employeur de se placer dans une maison concurrente situ e moins de 2 km de la maison qu il quitte Elle pr voit en m me temps une indemnit sp ciale pour les salari s soumis cette interdiction On trouve des dispositions similaires dans les conventions du b timent collaborateurs Aisne Enfin il faut noter que la plupart des droits des salari s inscrits dans ces conventions collectives augmentent avec la dur e de leur pr sence dans l tablissement ce qui constitue autant d incitations pour les salari s ne pas quitter leur emploi Dans les ann es 1930 on peut d j voir appara tre le r le du CDD dans la gestion des fluctuations de l activit Les salari s embauch s en CDD ne b n ficient pas de d lai cong et sont ainsi les premiers Euro voir leur relation salariale cesser d s la fin de leur contrat Plusieurs conventions pr voient des clauses de roulement du personnel en cas de p riode creuse afin d viter des cong diements Conserveries de poisson Bordeaux Ganterie Is re Savoie Industries lectro m tallurgiques et lectro chimi ques et connexes de la Savoie Cependant les salari s en CDD ne
33. s sur le contrat de louage de services par rapport aux autres types de contrat N anmoins la question de la dur e de relation de travail est d j tr s pr sente et la d termination de la dur e du contrat appara t comme un m canisme protecteur de la libert des travailleurs L article 1780 On ne peut engager ses services qu temps ou Euro pour une entreprise d termin e permet de garantir les travailleurs contre tout risque d esclavage ou de servitude conform ment l un des principes du Code civil qui est l interdiction des engagements perp tuels Cependant au del des principes du Code civil la loi du 22 Germinal an XI instaurait par son article 12 le livret ouvrier dont la r tention par le patron permet de prolonger la dur e de la relation sa guise Nul ne pourra sous peine de dommages int r ts envers son ma tre recevoir un ouvrier s il n est pas porteur d un livret d acquit de ses engage ments d livr par celui de chez qui il sort Ainsi il suffit un employeur de faire des avances sur salaire ses ouvriers pour remettre en cause le principe de la limitation de la dur e des engagements De telles avances permettent l employeur de conserver le livret tant qu elles ne sont pas rembours es SAUZET 1890 p 40 42 et ainsi de s octroyer une sorte de garantie de fid lit SoBouL 1976 p 121 L existence et la persistance de la l gislation sur le livret ou
34. sa produc tion mais aussi pour l organisation de son travail Les qualifications des salari s sont de plus en plus 4 Selon FREYSSINET 2002 au XIX si cle les travailleurs peuvent tirer parti des caract ristiques du syst me productif pour construire des bases partielles d autonomie D une part ils trouvent des marges de libert dans le fait que le mode de production dominant est loin d tre g n ralis D autre part ils pr servent sur la base de leurs savoir faire empiriques un certain degr de ma trise des processus productifs p 59 Le taylorisme et la g n ralisation des formes de production capitaliste remettent en cause ces deux vecteurs d autonomie 116 Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 interchangeables au sein de l entreprise mais pas forc ment l ext rieur En effet l extorsion des savoir faire ne signifie pas que les salari s n ont plus aucune qualification mais qu ils sont d pen dants de l employeur pour en acqu rir de nouvelles C est la direction de l entreprise qui d tient les savoir faire les techniques de production et qui forme les salari s l usage des nouvelles techni ques qu elle souhaite mettre en uvre Par ailleurs la part des non salari s ne cesse de d cro tre avec une acc l ration apr s la Seconde Guerre mondiale La r duction des possibilit s d exercice d activit s lucratives en dehors du salariat
35. signe au XIX si cle la partie de la population active qui n est pas durable ment stabilis e dans une entreprise est une popu lation assez h t rog ne GERME 1978 Outre les ouvriers professionnels dont le sublime est un repr sentant typique et les ouvriers retournant de fa on saisonni re dans le secteur agricole la popula tion flottante renvoie aussi l instabilit de l emploi du fait du patron autrement dit l existence d un volant de main d uvre GERME 1978 Au XXe si cle les salari s revendiquent la stabilit de l emploi partir de la fin du XIX si cle la modifica tion des structures conomiques et sociales rend les salari s plus d pendants de la continuit de la relation salariale et les incite revendiquer des garanties de stabilit de l emploi au sein du contrat dur e ind termin e Les salari s deviennent de plus en plus d pendants de la relation salariale Alors que la S curit sociale n est pas encore g n ralis e et obligatoire la constitution de caisses de pr voyance pour la maladie les accidents du travail mais surtout les retraites taient un moyen pour certains patrons de s attacher leurs salari s Nous voyons appara tre une sorte de salaire indirect qui s ajoute au salaire proprement dit et dont le but est videmment d assurer l attache ment du travailleur l entreprise qui l emploie HATzFELD 1971 Ces nouveaux moyens d
36. t le CDD qui remplit ce r le Comment s est op r ce renverse ment La reconnaissance l gale 6 du contrat de louage de services sans d termination de dur e s effectue pour la premi re fois dans la loi du 27 d cembre 1890 sur le contrat de louage de services et sur les rapports des agents des chemins de fer avec les compagnies par l ajout d un alin a l article 1780 du Code civil Le louage de service fait sans d termination de dur e peut toujours cesser par 5 Cass Civ 5 f vrier 1872 6 Franck Henry 1991 a montr comment s est labor e la construction doctrinale du contrat dur e ind termin e pour faire sortir ce contrat de l ill galit Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 117 la volont d une des parties contractantes Par rapport la r daction de 1804 il y a la prise de conscience qu un engagement pour une entreprise t che d termin e peut avoir une dur e ind ter min e Mais la dur e de l ex cution de la t che ou la possibilit de pouvoir rompre le contrat de fa on unilat rale apporte tout de m me une limite l en gagement Cette loi pose aussi la question des obligations que peut entra ner une telle rupture unilat rale Elle dispose N anmoins la r siliation du contrat par la volont d un seul des contractants peut donner lieu des dommages int r ts Mais elle ne d finit pas les conditions dans lesquell
37. t pas compter sur une telle stabi lit de l emploi dans la mesure o ils ne disposaient d aucun moyen pour s opposer la non reconduc tion d un contrat de louage Cette absence de pers 2 Le sublime est le titre de l ouvrage de Denis Poulot contrema tre parisien devenu petit patron Dans ce pamphlet anti ouvrier publi en 1869 Poulot tablit une typologie des ouvriers dans laquelle le sublime d signe l ouvrier allergique l autorit patronale 114 Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 pective cr dible du c t de la stabilit de l emploi conjugu e la possibilit de trouver des moyens d existence hors du salariat et une relative p nurie de main d uvre avaient pour cons quence que la priorit pour les salari s au XTX si cle n tait pas la stabilit de l emploi Les solutions d velopp es par les employeurs pour retenir les salari s Face l instabilit de la main d uvre les solu tions mises en uvre par les employeurs se carac t risent par leur caract re coercitif Les incitations salariales ne semblent pas suffisantes pour retenir les salari s Ils ont recours des r gles qui ne sont pas toujours conformes au Code civil ou qui sont d finies de mani re unilat rale par eux Avant la fin du XIXe si cle mise part une loi 22 Germinal an XI relative aux Manufactures Fabriques et Ateliers il n existait pas de l gisla tion sp
38. taine sous peine d indemnit envers le chef d atelier Mais le d lai cong est aussi valable pour le ma tre qui cong die l ouvrier Le ma tre d atelier qui renvoie un ouvrier sans lui donner la huitaine est passible envers lui de dommages int r ts Le d lai cong varie enfin selon la nature de l acti vit Il est plus lev ou doit s accompagner d une indemnit pour les emplois de surveillant 3 Journal des fabricants et manufacturiers des directeurs d usines des chefs d atelier des prud hommes et des conseils de prud hommes Travail et Emploi n 103 Juillet septembre 2005 115 Par ailleurs des r glements sont tablis assez souvent par les patrons pour sanctionner des comportements contraires leur int r t absen t isme retards fl neries Ils vont parfois l en contre de l usage et de la jurisprudence des conseils de prud hommes en mati re de d lai cong lorsque c est l employeur qui est l initiative de la rupture Certains de ces r glements suppriment tout droit d lai cong pour le salari Leur existence t moigne de l existence de ce que FRIDENSON 1990 2003 appelle les formes sourdes de conflit absen t isme freinage sabotage furn over qui consti tuent des marges d autonomie pour les salari s au XIX si cle Tous les secteurs industriels ne semblent pas adopter les m mes r ponses face l instabilit de la mai
39. trats ne permet cependant pas d ac cro tre le degr de mobilit g n ral des salari s Les statistiques d anciennet dans l emploi n ont pas diminu malgr le d veloppement des CDD AUER Cazes 2000 La progression concomitante du ch mage incite les salari s en CDI conserver leur emploi Par ailleurs malgr cette menace du ch mage qui rend la stabilisation moins n cessaire pour les employeurs la fid lit des salari s reste toujours un de leurs objectifs Le d veloppement de la formation g n rale qui pourrait tre un moyen de favoriser la mobilit des salari s n est pas compatible avec l ob jectif de fid lisation qui implique de rendre le salari le plus d pendant possible de l entreprise Les strat gies des entreprises portent une responsabilit consi d rable dans le degr de mobilit des salari s Ce sont l origine elles qui en cherchant fid liser leur main d uvre r duisent cette mobilit Le choix du taylorisme qui s est traduit par une d possession des salari s de leurs qualifications r duit leurs capacit s ma triser leur mobilit entre diff rents employeurs Ceci est d autant plus vrai aujourd hui que l appari tion de nouvelles technologies n cessite une acqui sition importante de nouvelles qualifications On observe que ce sont les ch meurs qui ont la plus forte anciennet dans leur dernier emploi qui restent le plus longtemps au ch mage DELATT
40. vrier tout au long du si cle s expliquent en partie par la volont de la part des employeurs de contr ler la dur e de la relation chaque fois que cette l gislation est remise en cause les employeurs s y opposent en craignant de perdre un moyen de contr le sur leur main d uvre Ainsi en 1854 alors qu il est question de supprimer le droit pour le patron de retenir le livret on trouve de fortes oppo sitions relay es au sein des assembl es parlemen taires SAUZET 1890 p 36 En dehors du Code civil et de la loi du 22 Germinal les relations entre employeurs et travailleurs sont r gul es par les conseils de prud hommes qui arbi trent d s le d but du XIX si cleles litiges quinaissent de ces relations La suppression des corporations a en effet cr un vide juridique dans la r gulation des relations de travail qui se comble petit petit par la jurisprudence des conseils de prud hommes Notre source pour l tude de cette jurisprudence est le Journal des prud hommes 3 qui se veut un recueil mensuel consacr la jurisprudence indus trielle au sein de laquelle les rapports des ouvriers avec le ma tre et avec l atelier occupent une place importante Il informe ainsi des pratiques de d lai cong qui pr valaient l poque Le conseil des prud hommes de Lyon rend plusieurs reprises des jugements consacrant la pratique du d lai cong de huit jours L ouvrier est tenu de finir la hui
Download Pdf Manuals
Related Search