Représentations sociales et choix alimentaires
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1. conomique dans Identit s des mangeurs images des aliments Giachetti 1 ed CNERNA CNRS Polytechnica Paris FISCHLER Claude 1990 L homnivore Paris Odile Jacob 1990 GIACHETTI Ism ne d 11992 Plaisir et pr f rences alimentaires CNERNA CNRS Paris Polytechnica 1992 GIBSON James J 1979 The Ecological Approach to Visual Perception London Lawrence Erlbaum Associates 1986 2nd ed S Lalhou 46 JAND 12 LAHLOU Saadi 1998 Penser Manger Alimentation et repr sentations sociales Paris P U F 1998 LAHLOU Saadi 2005 Peut on changer les comportements alimentaires Cahiers de Nutrition et Di t tique 40 2 2005 1 6 LEWIN Kurt 1943 Forces Behind Food Habits and Methods of Change Bulletin of the National Research Council n 108 October 1943 pp 35 65 MERDJI Mohamed 2002 L imaginaire du d go t une approche anthropologique de l univers motionnel de l alimentation Th se de doctorat en Sciences de Gestion Universit Paris IX Dauphine Juin 2002 678 p p MOSCOVICI Serge 1961 La psychanalyse son image et son public Paris P U F 2 d 1976 SHANK Roger C ABELSON Robert P 1977 Scripts Plans Goals and Understanding Hillsdale NJ Lawrence Erlbaum Associates 1977 S Lalhou 46 JAND 132. termination des comportements La r alit et ses contraintes doivent tre en coh rence avec la repr sentation et rendre possibles et durables les changements sugg r s Par exemple il est tr s difficile de maintenir un r gime sans tre soutenu par son environnement Ensuite on l a dit les repr sentations sociales sont des populations de repr sentations individuelles Il s agit donc de faire changer une population et pas seulement quelques individus Les repr sentations se reproduisent entre elles Si la repr sentation mutante introduite par la communication est moins efficace que les autres elle ne survit pas spontan ment S Lalhou 46 JAND 11 S il est possible dans une certaine mesure de changer les repr sentations les essais de persuasion des consommateurs pour les faire changer de comportements dans le domaine alimentaire en les endoctrinant avec des arguments rationnels sont vou s l chec comme on le sait en psychologie sociale depuis les travaux de Lewin 1943 Ce n est pas en d montrant scientifiquement que les chiens sont comestibles ni en le r p tant dans des spots radio que l on augmentera leur consommation de bouche en France L ignorance de ces faits scientifiques par un certain nombre de d cideurs et l approche na ve qui s ensuit dans la construction de campagnes de communication n aboutit en fin de compte qu augmenter la d sorientation et la suspicion des consommateurs comme l
3. a justement not Claude Fischler qui parle de cacophonie di t tique La construction des repr sentations sociales et des pratiques est un processus lent n goci progressif qui n cessite la participation active des acteurs concern s Cela passe par une sympathie pour ces acteurs un effort de compr hension de leur point de vue et le respect de celui ci et une ouverture construire avec eux et non pas pour eux des mod les nouveaux Alors que faire Il faut n gocier avec les acteurs les changements de pratiques pour changer les repr sentations Le changement se produit travers l ducation l exp rience directe la r glementation aussi Les repr sentations sociales sont une ressource commune qui guide nos comportements et constitue notre soci t Chacun a la responsabilit de ne pas la polluer en d versant dans cet cosyst me symbolique des communications irresponsables qui en visant modifier un comportement particulier risquent de perturber des quilibres complexes que la culture a mis longtemps construire La cacophonie di t tique n est pas globalement profitable Il ne s agit pas ici d emp cher le changement mais simplement de donner aux acteurs de la communication la conscience de leur responsabilit dans un d veloppement durable de la soci t de consommation alimentaire R f rences bibliographiques COMBRIS Pierre 1996 Mangeurs et aliments que nous apprend l analyse
4. des populations de repr sentations du beurre mais aussi des collections de paquets ou de mottes de beurre En l occurrence elles ont tendance les manger pr cis ment en suivant les indications culinaires ou di t tiques fournies par les repr sentations Cela nous rappelle que les repr sentations ne sont pas un but en soi mais S Lalhou 46 JAND 7 une m diation pour l action sur le r el et qu elles renvoient des objets ou des situations du monde quotidien Les repr sentations et les pratiques sont de deux types qui sont d ailleurs en continuit Le premier type est celui des repr sentations personnelles celles que le sujet s est construite au cours de sa propre exp rience Lorsqu une solution satisfaisante a t trouv e qui permet de concilier les diff rents domaines de contrainte physiologique technique conomique etc l individu la conserve et aura tendance la r utiliser de pr f rence toute autre dans une situation analogue Par exemple l h te aura tendance choisir de pr parer des recettes qu il sait bien faire quand il a des invit s importants Une des principales raisons invoqu es par les consommateurs dans le choix des produits est qu ils les connaissent d j pour les avoir essay s Le second type est celui des repr sentations sociales et des pratiques sociales Celles ci sont valid es institutionnalis es par la collectivit Elles sont donc consid r es comme valides
5. solutions qui marchent et que le sujet a d couvertes par lui m me ou apprises des autres Nous entrons ici dans le champ de d termination psychologique qui est essentiellement li notre qualit d animaux apprenants et sociaux S Lalhou 46 JAND 4 Le plaisir joue un r le primordial dans la constitution et la r p tition de ces d terminants psychologiques Une activit qui aboutit produire du plaisir ou r duire le d plaisir devient d sirable en soi par le m canisme associatif du conditionnement C est ainsi que les sujets vont apprendre des routines ou des repr sentations efficaces Ces sont ces repr sentations et ces pratiques qui organisent le cadre g n ral dans lequel les autres syst mes de r gulation interviendront la marge Au quotidien le sujet ne cherche donc pas constamment r soudre de novo les probl mes complexes d optimisation alimentaire qui se posent lui il applique autant que possible des routines prouv es ce qui est bien plus facile et conomique Cet aspect explique d ailleurs pourquoi il est difficile de changer les pratiques par le discours puisque nous ne nous adressons pas un sujet rationnel mais plut t un organisme empiriste Les d terminants psychologiques Dans les pays d velopp s le besoin alimentaire est globalement satisfait La sensation de faim est devenue rare tout au plus ressentons nous de l app tit C est que pr cis ment nous avons mi
6. 46 J A N D 27 janvier 2006 Repr sentations sociales et choix alimentaires Saadi LAHLOU CNRS EHESS R sum L activit alimentaire s exerce simultan ment plusieurs niveaux m tabolique psychologique technique social Chaque niveau apporte des contraintes et des m canismes de r gulation sp cifiques que le sujet doit tous satisfaire simultan ment Le comportement alimentaire est une s rie de pratiques prouv es qui satisfont ces diff rents niveaux Il est ancr dans les habitudes du sujet soutenu par le contexte culturel qui lui offre les ressources et les dispositifs n cessaires depuis la disponibilit des aliments dans les magasins proches jusqu la convention de la pause m ridienne Le mode d emploi de ces ressources et conventions est fourni par les repr sentations sociales sorte d encyclop die culturelle que le sujet apprend par ducation et qui lui donne la fois la description des choses et de leur mode d emploi Les repr sentations sociales parce qu elles contribuent guider les comportements sont un enjeu conomique donnant lieu des campagnes de communication et des controverses Cependant pour modifier les repr sentations comportements il ne suffit pas de faire des campagnes de communication il faut am nager en m me temps l environnement du mangeur et sa mani re de voir les choses Pourquoi mange t on ce que l on mange Manger comme toute activit hum
7. a priori par le sujet C est ce qui explique qu un sujet prendra le risque de pr parer une recette qui lui a t donn e ou lue dans un livre de cuisine par exemple On voit bien la continuit entre les deux types les repr sentations sociales sont issues de repr sentations individuelles qui ont connu un succ s de diffusion collectif r ciproquement la plupart des repr sentations individuelles sont des variantes locales ou des combinaisons de repr sentations sociales ant rieures Pour r sumer le sujet moderne qui se nourrit se sert des produits et quipements disponibles en les arrangeant conform ment un corpus de repr sentations sociales qui sont autant de mani res d identifier les produits et de les utiliser II se construit ses petites routines particuli res en fonction de ses sp cificit s et contraintes propres un peu comme chacun adapte les recettes traditionnelles en fonction de son four et des ingr dients locaux Repr sentations sociales et jeux d acteurs Les repr sentations sociales sont alors un enjeu consid rable pour les parties int ress es influencer le comportement des individus puisqu elles contribuent d terminer la mani re dont l objet est per u et utilis Prenons quelques exemples pour illustrer le r le des repr sentations sociales dans la d termination des choix alimentaires Un premier exemple concerne le statut du cheval et du lapin en France Ces deux animaux passent progre
8. aine peut tre consid r plusieurs niveaux depuis les plus lev s comme le raisonnement o l activit consciente et volontaire mobilise des repr sentations jusqu aux plus v g tatifs comme la digestion ou le m tabolisme cellulaire Par exemple lorsque je d guste un vin fin dans un grand restaurant avec des amis je suis la fois m par mes intentions et mon but passer un moment de convivialit exceptionnelle avec des personnes qui me sont ch res participant d un syst me socio technique avec lequel j interagis conform ment des r gles et des conventions sociales suivant un script Shank et Abelson 1977 ritualis depuis l accueil l entr e jusqu au don du pourboire Mais aussi je suis anim de mouvements musculaires volontaires et r flexes par exemple pour manier les couverts ou d glutir maintenu vivant par mon activit m tabolique qui m envoie d ailleurs en permanence des signaux sur mon niveau de sati t et d bri t Quand je l ve mon verre ou que je m che le vin avec ostentation j exprime par quelques contractions musculaires des signes sociaux qui r f rent des valeurs de haut niveau le respect du prestige et du travail bien fait l importance du plaisir compte tenu de la bri vet de la vie etc Les diff rents niveaux auxquels on peut consid rer une activit ne sont pas ind pendants Ils sont plus ou moins ench ss s A l chelle microscopique c est bien d activit c
9. e all g 76 3 p tisserie cuisine petit_ d jeuner g teau Cela est confirm par les les d clarations de consommation plus ou moins fr quente de ces mati res grasses qui sont corr l es avec une repr sentation plus ou moins positive de ces produits Consomme du beurre plus souvent par rapport lan dernier 2 7 sal vitamines all g bon Consomme du beurre autant que l an dernier 67 9 petit _d je ner g teau cuisine tartine pain p tes sauce frais p tisserie lait vitamines Consomme du beurre moins souvent que l an dernier 19 0 cholest rol gras jaune r gime mati res_grasses Ne consomme pas de beurre 9 0 1 mange_pas cholest rol r gime calories gros beurre Consomme du beurre all g plus souvent que l an dernier 10 5 beurre_all g r gime mati res_grasses all g calories go t cholest rol bon frais Consomme du beurre all g autant que l an dernier 17 8 radis calories cholest rol Consomme du beurre all g moins souvent que lan dernier 4 7 p tisserie go ter gras vitamines cuisson sauce Ne consomme pas de beurre all g 64 4 cuisine g teau petit d jeuner fromage p tisserie beurre D une mani re g n rale les connotations sont r v latrices d une repr sentation n gative du beurre chez les non utilisateurs chez ceux qui r duisent leur consommation ou y renoncent pour consomm
10. ellulaire que se composent tous les comportements d un individu m me le plus th orique des discours mobilise les muscles de la langue D ailleurs pour le physiologiste ou le neurologue le sujet humain est implicitement consid r comme une vaste colonie cellulaire et les S Lalhou 46 JAND 2 ph nom nes rapport s par ce sujet au niveau ph nom nologique faim soif plaisir go t etc sont d crits comme l action de populations cellulaires Mais d une part la complexit du syst me exclut avec les moyens techniques actuels de d crire l chelle cellulaire les ph nom nes du sens commun par exemple composer le menu d un d ner entre amis D autre part il semble exister empiriquement une certaine autonomie des niveaux Par exemple ce sont bien des objets du sens commun donc des objets symboliques de haut niveau que consid rent les sujets dans leur raisonnement conscient Les r gles sociales et les intentions humaines existent dans un espace o le niveau cellulaire n est pas pertinent La diff rence entre un repas dans une caf t ria d autoroute et dans un restaurant trois toiles au niveau des processus de digestion n est pas vidente Par contre le v cu et le prix sont sans comparaison et ce qui fait la diff rence se trouve d abord au niveau symbolique des repr sentations que le sujet s en fait et des conventions sur ce qu est un bon repas C est d ailleurs le
11. ente au cours des pratiques quotidiennes et des communications La repr sentation du pain guide nos comportements vis vis des pains et nos discours la repr sentation du go ter guide notre comportement vis vis des go ters etc Chaque repr sentation mentale individuelle est unique construite par les S Lalhou 46 JAND 6 apprentissages particuliers de l individu particulier au cours de son exp rience particuli re Cette construction est m diatis e par le langage au cours de la communication ou de la r flexion int rieure Pour chaque objet par exemple pain ou ob sit chaque individu h berge donc sa petite repr sentation mentale personnelle individuelle de l objet en question Alors les populations humaines h bergent des populations de repr sentations individuelles que l on appelle repr sentations sociales Moscovici 1971 1976 Prenons comme illustration le cas du beurre Chacun sait ce qu est le beurre et en a une repr sentation Les populations humaines h bergent donc des populations de repr sentations individuelles de beurre qui varient d ailleurs selon les cultures Une repr sentation sociale c est une population de repr sentations individuelles Elle se comporte comme un tout car les repr sentations individuelles un peu comme les esp ces animales se reproduisent les unes partir des autres par la transmission l enseignement l exp rience commune Les individus hu
12. er du beurre all g Les connotations agr ables apparaissent significativement moins chez ces personnes qui renoncent au beurre C est dire que non seulement apparaissent chez ces personnes des associations n gatives pour le beurre mais aussi que certaines associations positives disparaissent la repr sentation est ajust e au comportement la fois par un appauvrissement hypotrophie et un enrichissement hypertrophie en traits par rapport la repr sentation moyenne Ceci montre comment s op re la consonance cognitive entre comportements et repr sentations On obtient des r sultats analogues avec une question d association libre sur le sucre Lahlou 1998 pour tous le sucre est sucr nerg tique bon doux mis dans le caf l La diff rence de est due une l g re diff rence de formulation de la question S Lalhou 46 JAND 10 etc Cependant il sera plus fr quemment associ roux pour les consommateurs de sucre roux et sera plus souvent associ calorie diab te gros et r gime c est dire ce qu ils cherchent viter pour ceux qui d clarent diminuer leur consommation tandis que ceux qui le consomment l associeront plus souvent l usage qu ils en font caf p tisserie La repr sentation appara t donc comme une image pragmatique de l objet relativement consensuelle par rapport laquelle l individu se situe Dans la perspective de son comportement particulier ce
13. ire des tats du monde qu il se repr sente de mani re anticip e buts par exemple manger des marrons grill s S Lalhou 46 JAND 3 d autre part des r ponses que l environnement retourne aux explorations du sujet affordances initiatives ou r actions des autres sujets pas de marchands de marrons le 15 ao t Trouville juste des glaces ou des cr pes La persistance des intentions du sujet corrige en permanence la trajectoire obtenue en fonction des r actions du contexte pour tendre vers le but ou modifier ce dernier Les affordances Gibson 1979 du contexte limitent ou au contraire permettent certaines trajectoires Dans la pratique on ne dispose que de mod les partiels d crivant l activit un niveau ou d un point de vue particulier physique psychologique technique social etc Pour d terminer une activit on doit donc r soudre simultan ment le syst me des trajectoires dans chacun des domaines consid r s On peut analyser les comportements en examinant uniquement l influence des besoins physiologiques en l occurrence la faim la soif et plus g n ralement l expression physiologique des besoins de l organisme pour assurer ses fonctions vitales La probl matique de la r gulation qui en d coule court et moyen terme est complexe comme chacun sait puisque rentrent en ligne de compte dans le m tabolisme la fois le patrimoine g n tique la position dans le cycle de vie les forme
14. mains ne vivent pas isol s L exp rience de chacun est indissociable de l exp rience collective et la construction des repr sentations est un processus socialis qui intervient lors de l apprentissage au contact des pairs des ma tres des m dias Quand deux individus discutent ou agissent ensemble leurs repr sentations se croisent se renforcent ou se modifient r ciproquement C est cette interd pendance reproductrice entre les membres de la population qui fait la diff rence entre une repr sentation sociale et une cognition sociale ou une simple collection d objets et la rapproche d une esp ce vivante En tant que population c est dire ensemble d individus du m me type elles acqui rent par leur distribution sur les humains porteurs une certaine autonomie par rapport un porteur particulier M me si l un des humains meurt le savoir peut perdurer transmis et distribu sur une population plus large qui en g n ral ne meurt pas toute en m me temps Par ailleurs dans la mesure o elles peuvent exister l ext rieur des humains sous forme r ifi e susceptible de red marrer un cycle de reproduction ult rieur par exemple sous forme de document d artefact etc qui jouent le m me r le que les spores des virus on peut les consid rer comme une esp ce autonome C est pour cela que nous parlons de repr sentation sociale Un examen m me superficiel montre que les populations humaines h bergent non seulement
15. monde mental est am nag de mani re conna tre le mode d emploi des choses en particulier ce qui se mange et comment on le mange C est dans cette encyclop die des repr sentations que nous allons puiser les mod les qui guident nos comportements C est la mani re dont y sont d crits les objets du monde qui fera que nous en userons de telle ou telle mani re Cette encyclop die n est pas absolue S Lalhou 46 JAND 5 c est une construction sociale historiquement et g ographiquement situ e qui nous a t l gu e par nos p res Dans certaines versions par exemple le cheval le lapin la grenouille les escargots sont mangeables mais pas les abeilles ni les chiens Nous h ritons de cette encyclop die de repr sentations et de pratiques et nous l apprenons avec la langue et l ducation Pour chacun d entre nous d un point de vue subjectif la construction du monde commence la naissance en fait m me un peu avant Mais nous n arrivons pas dans un monde vide Chacun d entre nous vient au monde tel un personnage qui arrive dans une histoire d j en cours une histoire dont d ailleurs il ne verra pas la fin non plus Le monde ne nous appartient pas il est d j peupl L encyclop die des repr sentations fixe des r gles qui permettent la coop ration C est parce que ces r gles sont partag es que le monde est vivable Vivre conform ment nos repr sentations mentales n est donc pas se
16. niveau symbolique que le sujet utilisera pour d crire son activit lorsqu on l interroge Il s est cr des logiques explicatives ce niveau logiques qui sont suffisamment efficaces pour lui permettre de pr dire le comportement des autres personnes dans la vie quotidienne C est aussi ce niveau que seront exprim es des contraintes explicites comme les lois ou les r gles c est ce niveau que les humains communiquent entre eux Un menu n est crit ni en langage de neurosciences ni de nutrition Il est donc bien n cessaire de consid rer le comportement diff rents niveaux et l un n exclut pas l autre Les diff rents aspects voqu s ce matin participent tous d un certain point de vue la construction du comportement global que nous observons C est difficile pour nous autres scientifiques qui voyons le monde du seul point de vue de notre discipline Heureusement les mangeurs ordinaires ne semblent pas prouver de difficult particuli re utiliser la fois leur syst me nerveux leur syst me digestif et leur syst me socio conomique dans le cours de leur vie de relation lls g rent simultan ment plusieurs syst mes de contraintes d une grande complexit L activit est la r sultante mergente et localement construite en fonction des situations rencontr es dune part d une intention du sujet qui cherche atteindre des tats internes qui lui procurent une satisfaction motifs ou produ
17. rtains traits qui guident son comportement lui appara tront plus saillants ce sont ces derniers qui seront sur repr sent s dans l expression de ses repr sentations Repr sentations et enjeux de marketing et de sant publique Celui qui parvient modifier les repr sentations dans le sens de l action qui l int resse par exemple un certain type d acte d achat peut en principe compter sur l ing niosit du consommateur pour ensuite accomplir ses buts malgr les obstacles locaux Par exemple un consommateur pourra aller chercher le produit sur un autre point de vente si son point de vente habituel ne le propose pas il pourra r sister aux incitations publicitaires ou conomiques acheter d autres produits De plus il contribuera ventuellement diss miner la repr sentation en question de mani re pid mique On comprend que la manipulation des repr sentations fasse l objet d investissements consid rable en nergie et en budget que ce soit dans la publicit les campagnes d information les packagings et toutes les formes de communication que l ing niosit des fabricants des distributeurs des pouvoirs publics et autres groupes d int r t qui cherchent modifier les comportements Temp rons l enthousiasme de ces acteurs en constatant que les changements sont lents et que la communication seule ne suffit pas Lahlou 2005 Les repr sentations ne sont on l a dit qu un des lieux o se joue la d
18. s de d pense nerg tique l historique r cent en termes de prise cf par exemple Giachetti d 1992 On peut galement analyser l influence des contraintes qui limitent les comportements alimentaires possibles et en particulier les contraintes socio conomiques qui limitent le sujet ou son m nage en mati re de ressources financi res ou de disponibilit des marchandises dans son bassin de chalandise et qui l am nent faire des arbitrages entre produits dans son approvisionnement en vivres Combris 1996 De cet ordre galement sont les contraintes domestiques ou technico culinaires qui limitent les possibilit s de suivi d un r gime par exemple Ces aspects d terminent en amont les produits qui auront une chance de p n trer dans le temple sacr du corps du sujet pour y subir une transformation ultime dans son syst me digestif Ces aspects sont primordiaux A l nonc de ce qui vient d tre d crit comme syst mes de d termination on imagine combien la t che de prendre en compte simultan ment tous ces facteurs pour r aliser un comportement adapt sur le long terme la fois sur les plans organique technique conomique etc est complexe Comment un sujet y parvient il En fait dans nos soci t s il ny parvient pas ou plus exactement il n y parvient ni tout seul et ni tout de suite Au quotidien il suit plut t un certain nombre de routines mentales et motrices qui sont la r p tition un peu m canique de
19. s en place des routines de repas qui anticipent la faim De m me les portions qui sont servies un repas correspondent elles plus ou moins ce qu un individu normal doit ing rer pour tre repu Les repas eux m mes correspondent une composition qui m me si elle s loigne un peu des apports recommand s fournit une r ponse relativement acceptable aux besoins organiques Plus g n ralement il existe tout un syst me de production de transformation et de logistique qui nous met disposition une distance et un co t raisonnables un assortiment de produits qui satisfont la fois nos besoins nerg tiques et notre pulsion de ramassage de chasseur cueilleur Nos logements sont con us et quip s de mani re fournir un espace pour le stockage et la pr paration des aliments et la soci t elle m me est organis e pour m nager des pauses destin es favoriser l acte alimentaire notamment midi Autrement dit l homme ne se nourrit pas sur une tabula rasa mais bien sur une tabula ad caenam apparata une table dress e pour le repas qui lui a t pr par e par la culture Et pour savoir se tenir cette table il faut des comp tences d interpr tation de cette situation socialement construite Or de m me que notre monde physique est am nag de mani re a faciliter la vie et satisfaire nos besoins sans trop d effort en s appuyant sur une vaste coop ration qui va de la fourche la fourchette de m me notre
20. ssivement du statut d aliment celui d animal de compagnie non comestible La d saffection du cheval en tant qu aliment s explique par des raisons conomiques S Lalhou 46 JAND 8 notamment la disparition du cheptel qui produisait du cheval de r forme L les repr sentations ont suivi les pratiques Le cheval est maintenant essentiellement consid r comme un animal de monte Dans d autres lieux comme au Khirgizistan le cheval est une viande de choix Le cas du lapin remarquablement tudi par M Merdji 2002 montre un cas inverse o la modification de la repr sentation notamment travers les peluches et les dessins anim s transforme graduellement le lapin en animal de compagnie trop proche pour tre comestible Les jeunes consommateurs en particulier sont de plus en plus nombreux exprimer un d go t l id e de le manger La fili re cunicole s meut naturellement de ce fait et cherche promouvoir la consommation du lapin sous des formes d j d coup es dans lesquelles il n a que peu de rapport avec la forme compl te sous laquelle les consommateurs pourraient tre g n s de le reconna tre Les tabous sur la consommation de divers produits sont fr quents et certaines des pr parations culinaires animales d un peuple suscitent souvent le d go t des autres Prenons un autre exemple les cas du beurre et du sucre que nous avons tudi plus en d tail Lahlou 1998 travers l anal
21. ulement une facilit qui nous donne un mode d emploi du monde et nous permet d utiliser les quipements install s et les conventions en cours c est aussi une obligation sociale pour que nos comportements soient pr visibles par les autres et coh rents avec une utilisation durable du monde Par exemple pour bien se tenir table C est travers le niveau psychologique que les repr sentations agissent Elles orientent les intentions du sujet et c est en termes de repr sentations qu il se repr sente ses buts Par exemple je me dis je vais me faire un petit sandwich au p t et non pas je vais pr parer un composite de graisses et de prot ines animales tal sur une plaque obtenue par cuisson de c r ales broy es et de levure Rappelons si n cessaire que ces repr sentations ne se substituent pas aux m canismes physiologiques elles s y ajoutent de m me que l apprentissage du tango et de la valse ne supprime pas le r flexe tendineux rotulien Ce que voit arriver mon estomac d un point de vue digestif est bien un bol alimentaire contenant les dites prot ines animales Les repr sentations sociales Les repr sentations sont ce qui tient lieu des objets dans l esprit Sur le plan individuel elles prennent la forme de repr sentation mentale c est la mani re un individu per oit un objet au sens large Cette repr sentation lui permet de se comporter vis vis de l objet de mani re culturellement pertin
22. yse statistique des associations libres de 1600 consommateurs fran ais A la question Si je vous dis beurre quels sont les 5 premiers mots qui vous viennent l esprit nous observons les caract risations suivantes des consommateurs par les termes qui reviennent plus fr quemment dans leurs associations libres termes revenant significativement plus Consommateurs quotidiens de beurre 70 cuisine pain sauce petit d jeuner vitamines tartine p tisserie Consommateurs moyens de beurre 18 p tes calories Non consommateurs de beurre 11 cholest rol mange pas r gime calories gras beurre La non consommation correspond bien des associations n gatives tandis que la consommation correspond des associations pragmatiques qui sont des modes d usage du beurre Les associations libres sur le mot beurre par les consommateurs quotidiens de beurre all g montre qu ils ont une image du beurre comprenant des l ments n gatifs qui sont congruents avec leur substitution du beurre par le beurre all g Consommateurs quotidiens de beurre all g 13 3 sont caract ris s par all g beurre_ all g calories r gime vache cholest rol mati res_grasses radis bon S Lalhou 46 JAND 9 Consommateurs moyens de beurre all g 9 2 sont caract ris s par beurre all g gras frais cholest rol p tes bon mati res_grasses jaune Non consommateurs de beurr
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