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Burn After Reading

1. souligner en quoi la performance de l acteur agit de mani re extra di g tique sur le film atteignant une dimen sion qui d passe l intrigue pour dialo guer avec les attentes et les r flexes du spectateur C est un privil ge que seul Woody Allen avec quelques autres serait suscep tible de partager aujourd hui avec les fr res Coen afficher une multitude de stars au g n rique d un film dans lequel personne ne tient v ritablement le premier r le La caution repr sent e par les Coen Hollywood leur a permis de r unir pour Burn After Reading un casting de r ve qui en fait un film r alis en partie pour les acteurs George Clooney Brad Pitt Tilda Swinton John Malkovich sont des interpr tes de premier plan auxquels s ajoute Frances McDormand com dienne f tiche du duo elle a re u un Oscar de la meilleure actrice pour son r le dans Fargo Cette brochette d toiles se r partit un temps de jeu qui fait songer la notion de turn over pratiqu e dans les quipes sportives notamment en football r unissant un nombre de vedettes trop important pour que celles ci puissent jouer toutes ensemble Il s agit donc de faire tourner l quipe chaque star de Burn After Reading occupe un temps de jeu pr cis dans un sc nario organis en une multitude d intrigues parall les rebrousse poil Le temps de jeu assez r duit impos par cette dynamique chorale produit un effet logique chaque
2. La transparence pr side en effet la mise en sc ne et vaut simultan ment comme motif de vertige de plaisir et d tourdissement en termes de fluidit et de vitesse Elle est aussi un objet de virtuosit et de ma trise pour des cin astes revenus leur meilleur niveau apr s une p riode plus ou moins d cevante laquelle a mis fin le coup de baguette magique de No Country for Old Men Cette r surrection appara t in fine comme l enjeu critique majeur du texte au del du sujet proche de la pantalonnade qui est celui de Burn After Reading le texte r affirme l im portance de cin astes revenus en deux films au sommet de leur art 20 CRITIQUE Mineur majeur Filmographie Tous les titres des fr res Coen sont disponibles en DVD et les suivants sont particuli rement recom mand s A Serious Man DVD StudioCanal 2010 Burn After Reading DVD StudioCanal 2009 No Country for Old Men DVD Paramount Pictures 2008 The Barber DVD Bac Films 2007 Barton Fink DVD Paramount Home Entertain ment 2007 Fargo DVD M G M 2004 Miller s Crossing DVD 20th Century Fox 2003 O Brother DVD StudioCanal 2002 The Big Lebowski DVD Universal Pictures 1999 Bibliographie Essais et p riodiques En fran ais Fr d ric Astruc Le Cin ma des fr res Coen di tions du Cerf 2001 Julie Assouly L Am rique des fr res Coen CNRS ditions 2012 Eclipses n 49 Joel et Ethan Coen pri
3. la proposition d exercices ou de pistes de travail que l enseignant pourra prouver avec ses classes Il ne s agit donc pas tant d une tude que d un parcours qui doit permettre l appropriation de l uvre par l enseignant et son exploitation en cours Des pictogrammes indiqueront le renvoi des rubriques compl mentaires pr sentes sur le site www site image eu 1 FICHE TECHNIQUE Mis au placard par la direction de la C I A l analyste Osbourne Cox d cide d crire ses m moires Mais le CD qui contient l bauche de son travail tombe accidentellement entre les mains de Linda Litzke et Chad Feldheimer employ s d un club de fitness Voyant la chance leur sourire les deux coll gues mettent au point un projet de chantage et contactent Osbourne Cox qui semble bien peu d cid c der leur tentative d extorsion de fonds La femme de ce dernier qui entretient une relation avec Harry Pfarrer ex flic parano aque et s ducteur compulsif habitu des sites Internet de rencontres a d cid de divorcer Intrigue d espionnage et intrigues conjugales se m lent alors en une s rie de quiproquos et de rebondissements qui placent chacun des personnages face son destin que ressortira t il de tout ce man ge SYNOPSIS Burn After Reading tats Unis Grande Bretagne France 2008 R alisation Joel et Ethan Coen Sc nario Joel et Ethan Coen Image Emmanuel Lubezki Montage Rod
4. autres films plus essentiels durant la m me p riode L ouverture de la critique de Jean Philippe Tess pose d embl e cette question de l appartenance du film l un ou l autre de ces modes mineur ou majeur en se raccordant justement au film phare de la p riode No Country for Old Men Cet enjeu de cat gorisation est important dans Burn After Reading d autant que le film est une com die appa remment l g re Il rappelle que les fr res Coen comme d autres cin astes particuli rement pris s et atten dus par le public et la critique constituent une uvre dont chaque nouveau film vaut autant pour lui m me que comme rendez vous et sympt me plus large d une volution au long cours partag e entre hauts et bas crises et regains d inspiration L un des premiers objets du texte critique semble tre de tirer le film loin de l anecdotique o semble le porter son aspect mineur il est question de farce un peu vaine pour faire valoir des enjeux plus lourds et plus s rieux que ce quoi on pouvait s attendre L autre ambition pos e par cet essai de cat gorisation touche au genre auquel appartient le film lui m me soumis caution et assez ind finissable cf p 4 un film d espionnage mais pas seulement car il s agit pour les Coen de dresser un tat des lieux et de se situer au dessus du genre qu ils embrassent dans la perspective de d finir ce que l auteur appelle le devenir du film d
5. Alfred Hitchcock 1960 avec la c l bre s quence de la douche o le personnage de Janet Leigh la star se fait tuer mi film 8 PERSONNAGES La valse des pantins Burn After Reading peut tre consid r comme un film choral avec sa galerie de stars cf Acteurs p 3 et ses multiples intrigues parall les qui se recoupent ou s embo tent progressivement les unes dans les autres C est de ce fait un vrai film de personnages reposant sur une galerie de caract res dont le nombre important requiert de la part du spectateur une grande attention d autant que le r cit n h site pas multiplier les pistes et cr er des effets de surprise ou de sid ration l image de la mort brutale du personnage incarn par Brad Pitt Un simple recensement des personnages les plus importants de l intrigue per met de prendre du recul par rapport au syst me narratif complexe et assez ver tigineux d un film satur d informations Chacun cherche son chat Osbourne Cox John Malkovich Vir de son poste la C I A au d but du film cet analyste p dant et pr tentieux entame la r daction de ses m moires qui n ont visiblement que peu d int r t Tomb e entre les mains de deux idiots Linda Litzke et Chad Feldheimer une page de ces m moires devient le centre d une intrigue d espionnage qui affole le r cit et pr cipite le destin de chacun des personnages Katie Cox Tilda Swinton La femme d Osbourn
6. C I A 2 Vir 00 01 40 00 06 53 Au quartier g n ral de la C I A l analyste Osbourne Cox apprend de son sup rieur qu il est mis sur la touche en raison de son alcoolisme Le soir avant m me d avoir pu avertir sa femme Katie il se retrouve dans une r ception mondaine o il s ac croche avec Harry Pfarrer un ex policier h bleur qui est aussi l amant de sa femme 3 M moires 00 06 54 00 09 27 Avant de se coucher Katie apprend la nouvelle de la d mission d Osbourne qui lui d clare pom peusement vouloir crire ses m moires Celle ci accueille la nouvelle d un air d sabus et m pri sant Le lendemain Osbourne annonce sa d mis sion son p re un ex de la C I A d sormais para lys une d cision de patriote une poque o les bureaucrates ont remplac les hommes de terrain 4 Le divorce 00 09 28 00 14 43 Katie engage une proc dure de divorce sur les conseils de son avocat qui l encourage fouiller dans l ordinateur de son mari pour lui subtiliser des informations bancaires Seul chez lui Osbourne entame la r daction de ses m moires et se sert quelques verres avant de se rendre un d ner d an ciens l ves Apr s avoir couch avec Harry Katie rentre la maison et entame son travail d espion nage en fouinant dans l ordinateur d Osbourne 5 Linda Litzke 00 14 44 00 24 47 Chez un chirurgien Linda Litzke fait le point sur les multip
7. Une des caract ristiques de Burn After Reading est de traiter de fa on parti culi rement exp ditive et violente ses personnages dont la plupart meurent de mani re brusque et inattendue On pourra s interroger avec les l ves sur l effet de surprise et de sid ration pro duit par la disparition pr matur e du personnage de Brad Pitt qui se fait tuer alors que le film est encore loin d tre termin C est un v ritable coup de th tre qui pose plusieurs ques tions quant son effet sur le r cit il fonctionne comme une rupture traumatique et ac c l re le processus d autodestruction de l intrigue sa force dramatique c est le premier moment o la violence du film clate litt ralement avec l image gore fugitive d une t te explos e faisant basculer la com die dans la farce et la sauvagerie la plus s che sa valeur symbolique faire dispara tre la plus grande star du film bien avant la fin est un choix surprenant voire d ceptif pour le spectateur sa valeur ironique le duel de vedettes que se livrent George Clooney et Brad Pitt vire cette apoth ose incongrue Enfin on pourra revenir sur plusieurs cas similaires de films o le h ros meurt de mani re inattendue c est une sp cialit du polar Les flics ne dorment pas la nuit de Richard Fleischer 1972 Police f d rale Los Angeles de William Friedkin 1985 qui trouve son origine dans Psychose d
8. des personnages de losers de marginaux ou d idiots en prise 19 avec les id aux ou les valeurs fondatrices du pays Dans la satire autobiographique A Serious Man qui suivra Burn After Reading ils questionneront le travail la famille et la religion Autant dire qu l image du vieil Ouest de No Country for Old Men le rapport au territoire son histoire et la question de la fronti re offre une profondeur sociale politique et philosophique aux films des fr res Coen On pourra questionner la vision de notre film le degr de cynisme qui semble tre celui des cin astes par rapport aux institutions politiques et au mod le d mocratique am ricain en le comparant avec d autres films comme Monsieur Smith au S nat de Frank Capra 1939 ayant trait avec moins d ironie de ces m mes institutions 4 La question de la morale Les fr res Coen sont ils des moralistes voir le film jouer avec le destin de ses personnages dans un m lange d ironie et de l g ret il est permis de voir dans la position des cin astes un point de vue sup rieur et omniscient qui pourrait d boucher sur une le on de morale Quelle serait cette morale dans Burn After Reading Il est difficile de r pondre une telle question tant le film dans son lan autodestructeur semble chapper toute logique L absurdit qui r git le petit monde film par les Coen atteint ici un tel degr d intensit qu il place les cin astes a
9. espionnage aujourd hui On sent bien par del l inventaire des l ments objectifs de l intrigue McGuffin coucheries parano a sans objet que s engage ici de mani re implicite un dialogue avec l intelligence suppos e d un film arti cul sur un simple concept qu il s agit de d busquer grandes peurs absurdes causes sorte de prin cipe narratif d ployant ses effets dans un souci de jeu permanent avec le spectateur Les signaux de recon naissance envoy s par le cin ma des Coen familier du public et de la critique impliquent une conni vence et des effets de signature qui sont l oppos de la notion de surprise de d frichement ou de d cou verte qui travaille un autre pan du champ critique notamment la critique issue d Internet dont le site Chronic art est un des plus anciens repr sentants La lecture pos e du critique se place ici clairement en opposition la m canique vertigineuse d un film cherchant paradoxalement perdre son spectateur en route travers illisibilit afflux d informations idiotie et absurdit g n ralis e Cette lecture embrasse la fois la perspective comique l enjeu histo rique et g opolitique la redistribution des cartes post guerre froide le 11 Septembre la crise de la C I A la perspective iconoclaste rature monumentale sur un pass glorieux et la qu te formelle du film qui tient en un mot transparence
10. fatalement le document expliquait Hitchcock Il sera possible de r pertorier avec les l ves quelques McGuffin c l bres de l histoire du cin ma comme la valise de En quatri me vitesse de Robert Aldrich 1955 ou l argent vol dans Psychose d Alfred Hitchcock 1960 avant de voir dans Burn After Reading en quoi le CD d Osbourne qui contient des informations affolant Chad et Linda jusqu au d lire est une sorte de McGuffin terminal et parodique d au tant que l intrigue nous fait rapidement comprendre qu il ne contient que du vent Il s agira d tudier sa fonction drama tique ludique et comique dans le film A t il comme unique fonction de faire agir les personnages Le McGuffin semble ainsi important pour appuyer la dimension orale du film il fait par ler les bavards et imaginer les plus folles th ories Lorsqu il regarde le fi chier sur l ordinateur de la salle de gym Chad surexcit nomme le McGuffin par toute une suite de mots aussi fu meux que vagues documents codes fichiers nombres colon nes chiffres Le vrai McGuffin ce pendant ne serait il pas plut t la cu pidit des personnages l image de Linda et de ses r ves exorbitants d op rations de chirurgie esth tique 7 R CIT Rester en ligne Les fr res Coen s inscrivent dans une tradition du r cit qui renvoie Hitchcock r f rence absolue en mati r
11. jongler avec les formules toutes faites et les expres sions idiomatiques r duisant les comportements et r flexions de chacun une somme de banalit s telles que une femme avertie en vaut deux l avocat de Katie les apparences peuvent tre trompeuses Chad lorsqu il rencontre Osbourne dans la voiture le poisson a mordu Linda l ambassade de Russie PC ou Mac le diplomate russe au diable les broutilles et tout devient broutille Linda et Harry sans oublier le festival de formules gran diloquentes dont use et abuse Harry on r alise qu on n est pas ternel on t che de rester adulte etc Cet empire de la formule qui tourne vide fonc tionne plusieurs niveaux et permet de faire bondir l intrigue par ellipses cl s ou suggestions il suffit par exemple d entendre Harry voquer son envie de courir pour comprendre qu il vient de coucher avec une femme Une machine produire de l information La question du mensonge qui r duit les personnages de pures coquilles vides passe par une syst matisation du d doublement La question des agents doubles et des espions dissimulant leur identit est en effet un clich du film d espionnage que les cin astes red ploient ici sur un mode on ne peut plus d mythifiant Chaque personnage est en quelque sorte un agent double Katie vole les dossiers de son mari pour la proc dure de divorce Linda et Chad deviennent les
12. n est pas absent de la sc ne et ressort du jeu de Brad Pitt et particuli rement du plan trange o ce dernier prend un air ahuri et suspendu 17 juste avant que Harry ne lui tire dessus Ce plan est d routant et agit comme une sorte de gag myst rieux Chad essaie probablement de faire comprendre Harry qu il n est pas l pour lui faire du mal C est un r flexe de la derni re chance mais l effet est inverse il y a quelque chose d inqui tant dans ce sourire forc qui sid re par son incongruit et ren force l effet de terreur sur Harry dont on sait qu il est parano aque depuis le d but du film La vitesse de l encha nement des plans et l aspect cauchemar desque de la sc ne impliquent une rupture de ton brutale Le film bascule dans une folie symbolis e par ce visage souriant et d traqu de Chad qui appa ra t litt ralement comme un diable sorti de sa bo te L effet est appuy par les costumes suspendus qui encadrent son visage comme les rideaux d un petit th tre Notons le travail sur le son apr s le coup de feu une note stridente r sonne et suspend la sc ne dans l irr alit le spectateur est sonn et groggy Retomb e 20 25 La suite de la s quence suit un mouvement logique de d flation et de retomb e Apr s l explosion de violence le retour au r el pour Harry se fait en une s rie de plans assez brefs qui annoncent sa chute venir l intensit du coup de r
13. orie du complot etc On pourra tenter de voir comment le cin ma s est empar de cette p riode marqu e par les deux mandats de George W Bush dans un esprit sou vent critique George Clooney en tant que r alisateur s est inscrit dans un courant d mocrate Good Night and Good Luck 2005 et a produit Syriana dont il interpr te le premier r le un agent de la C I A Peut on y voir un lien avec la vision satirique de Burn After Reading et sa repr sentation d une C I A d pass e et cynique dans les ann es 30 40 des amants s par s se retrouvent comme dans New York Miami de Frank Capra 1934 ou Indiscr tions de George Cukor 1940 Les Coen semblent pour leur part prendre un malin plaisir r aliser avec Burn After Reading ce que l on pourrait appeler une com die de d mariage Comme dans Intol rable cruaut o ils tournaient en d rision le business du divorce les auteurs chroniquent ici deux d sastres conjugaux repr sent s par les deux couples en pleine proc dure de divorce form s par Osbourne et Katie Cox ainsi que Harry et sa femme Le film appara t donc avant tout comme un vaudeville cruel et loufoque une com die sentimentale sans le moindre senti ment qui renverse un un tous les codes du genre Il est vident que les Coen qui ont une conscience aigu de l ge d or du classicisme hollywoodien s amu sent ici tourner en d rision l image de s ducteur l ancienne i
14. pourrait tre le plan sur le diplomate russe qui re oit Linda et Chad dans son bureau l effet de contre plong e sur son visage renforce sa position jusqu au grotesque d autant que le silence et le por trait de Vladimir Poutine qui tr ne derri re lui offrent un surplus de gravit pom pi re la sc ne Nous sommes deux doigts de basculer dans le comique l effet de contre plong e d formant l g rement la r alit en for ant les angles et les perspectives du cadre Les personnages tiennent ainsi un quilibre p rilleux entre r alisme et caricature grima ante Cette dimension cartoonesque du cin ma des fr res Coen est d autant plus efficace dans Burn After Reading qu elle joue sur l esth tique et les d cors tir s quatre pingles du film d espionnage l ancienne Les effets dynamiques qui renforcent ou appuient cette ambition croquer les visages des personnages sont l gion On note le zoom avant qui saisit ou sus pend un plan dans la dur e Ainsi est film le visage de Ted les yeux dans le vide effray l id e de devoir se rendre chez les Cox sur les ordres de Linda L environnement du personnage prend g n ralement l aspect d un d corum mental le fond apparaissant dans un l ger flou en raison de l usage pour filmer les visages en plan rapproch de la longue focale Les portraits capt s par les cin astes agissent alors comme une v ritable ponctuation visuelle rythmant le film
15. r alit est bien loign e de la vanit et des illusions o se noient les autres personnages Il appartient d s lors au spectateur de se demander si cette connivence avec leurs personnages f minins ne sugg re pas un discours discr tement f ministe de la part des cin astes En croyant un peu trop fort dans les pouvoirs du d mon de l inspiration on pourrait penser que Burn After Reading est le genre de film que les fr res Coen n auraient pas r ussi voici quelques ann es avant que No Country for Old Men d un coup de baguette magique les ressuscite tout fait C est dire un petit film pas trop d vor par l ambition pas trop resplendissant mineur en un mot mais qui sous son air de rien fourmille d id es et raconte plein de choses Le film est peupl de cr tins du d bile de base Pitt l andouille parano aque Clooney en passant par le nigaud ructant Malkovich excellent n ayant d autres commentaires durant tout le film que des Fuck des Fuck et encore des What the fuck Tout cela pla t aux Coen est assez plaisant de fait bien que ce d fil risque tout instant l essoufflement Au del de la farce un peu vaine il y a quand m me quelque chose quoi s accrocher et c est justement le McGuffin du film le CD qui comme tous les McGuffin vaut un tout petit peu plus qu il en a l air Par lui transite une affaire s rieuse le devenir du film d espionnage aujourd h
16. recherche est celui qu il a tu Son tat parano aque explose il s enfuit en courant Linda part en voiture et se voit pi e par une horde d agents qui la suivent en voiture et m me en h licopt re Osbourne d couvre Ted qui s est introduit dans la maison apr s un bref dia logue il lui tire dessus sous l emprise de l alcool Alors que Ted s enfuit dehors Osbourne le mas sacre coups de hache 14 Epilogue 01 24 44 01 28 30 Au Q G de la C I A les deux agents tentent nouveau de r sumer la situation On apprend que Harry a tent de s enfuir au Venezuela qu Osbourne s est fait tirer dessus par un agent qui le filait au moment o il tuait Ted et que Linda accepte de tout oublier pour peu qu on lui paie ses op ra tions de chirurgie esth tique ce qui est accept sur le champ Le sup rieur referme le dossier et le plan du d but zoom du haut du ciel vers les bureaux de la C I A se voit invers zoom du Q G vers le ciel 15 G n rique de fin 01 28 31 D COUPAGE NARRATIF Le McGuffin Le McGuffin est un n ologisme inven t par Alfred Hitchcock Il d finit un objet servant de moteur ou de pr texte pour faire avancer l intrigue sans que celui ci soit clairement d fini Il a sou vent l allure d un objet myst rieux aux contours assez vagues Dans les his toires de voleurs c est presque toujours le collier et dans les histoires d espion nage c est
17. reux de Linda il est l une des figures les plus touchantes du film malgr son statut tr s secondaire Il t moigne ainsi de la capacit des fr res Coen faire exister leurs personnages par del la simple caricature Parler pour ne rien dire La sc ne finale dans les bureaux de la C I A entre Palmer le sup rieur d Osbourne Cox et son chef est un mod le de dialogue absurde dont on pourra tudier les ressources comiques vertigineuses dans le d tail Il s agit tout autant ici de broder autour du vide que de feindre le s rieux jusqu au bout et de jouer sur la notion de morale de la fable En voici un passage particuli rement significatif Chef Bon Dieu quel merdier C est fini Personne d autre ne sait quoi que ce soit Officier Palmer vrai dire il reste Chef Quoi Quoi Palmer La femme celle du club Linda Litzke Chef Putain Bon Dieu O est elle Palmer On l a arr t e On l a Chef On l a Pour en faire quoi Palmer Elle accepte de coop rer si on paie pour a va para tre bizarre pour ses op rations de chirurgie esth tique Elle dit qu elle oubliera tout Chef Combien Palmer Au total Chef Payez silence Chef Putain de bon Dieu Qu a t on appris Palmer Palmer Je ne sais pas chef Chef Moi non plus putain ne pas recommencer Palmer Oui chef Chef Je sais pas ce qu on a fichu Palmer Oui chef diffici
18. ti sant le mouvement du film tout entier 1 2 3 7 8 9 4 5 6 PLANS Le th or me des regards 15 pousant l ambiance des films d espionnage Burn After Reading est un film dans lequel la place des bureaux est pr dominante Il faut entendre le terme au sens le plus large de bureaucratie avec son plan d ouverture venu du ciel et plongeant dans les arcanes de la C I A ou tout au moins d une agence similaire qui ne dit pas son nom le film travaille la question de la rationalisation des faits via la parole sup rieure organis e et hi rarchis e d une administration C est dans ces bureaux que le personnage d Osbourne Cox est remerci en d but de film C est encore dans ces bureaux que par deux fois deux pontes font le point sur la situation abracadabrante qui se joue sur le terrain et dont le spectateur est le t moin afflig Le bureau est un lieu o le point de vue s l ve et o les personnages trouvent un moment plus ou moins illusoire de r pit face aux gesticulations du dehors Int rieurs Le motif du bureau comme lot pr serv du monde contamine assez largement le film et ne se limite pas au cadre des couloirs glac s et des salons feutr s de la C I A auxquels r pondent de mani re comique et patibulaire ceux de l ambassade de Russie o se rendent Linda et Chad Le personnage de Linda appara t une premi re fois dans le cabinet d un chirurgien esth tique qui l auscult
19. ton Oscillant entre juxtapositions ellipses et montages parall les les cin astes placent le spectateur dans une situation d attente permanente Prendre le temps de mettre tous les l ments en place est un proc d courant dans les r cits choraux mais les Coen en jouent avec une certaine perversit truffant la narration d informations inutiles ou d veloppant des micro intrigues sans int r t c est ainsi que montrer Cox au banquet des anciens l ves n apporte rien au r cit La fragmentation en sayn tes les espaces clos que repr sentent les cabinets confin s et les nombreux films dans le film d multiplient les centres de gravit de l intrigue et tissent un r seau complexe o les personnages et les informations se neutralisent par l exc s On peut penser au moment o Linda appelle sa mutuelle et se voit pri e de patienter au t l phone comme un v ritable programme pour le spectateur auquel la voix du r pondeur semble s adresser Veuillez rester en ligne Vitesse acc l ration vertige un horizon conceptuel Cette logique de fragmentation met l preuve le go t des cin astes pour la fluidit de la narration La notion de ligne claire dont un des plus fameux exemples serait Les 39 Marches d Hitchcock et sa succession de rebondissements atteignant au vertige 1935 traverse l uvre des cin astes Leur tour de force est de parvenir articuler le trop plein d intrigues et de per
20. Fargo et The Barber s ajoutent les Oscars re us pour Fargo et No Country for Old Men Le duo qui appartient depuis de nombreuses ann es au gratin du cin ma mon dial peut ainsi s appuyer sur des castings luxueux n importe quelle superstar accepte de jouer dans leurs films Mais c est pourtant l esprit de famille et une fid lit peu commune leurs collaborateurs attitr s qui semble gouverner la m thode des deux fr res Carter Burwell musique Roger Deakins photo graphie et quelques acteurs f tiches Steve Buscemi Frances McDormand John Goodman ont notamment collabor de nombreux films qui ont fait la l gende de ce duo singulier R ALISATEURS Un cin aste deux t tes 2 FILMOGRAPHIE Joel et Ethan Coen 1984 Sang pour sang Blood Simple 1987 Arizona Junior Raising Arizona 1990 Miller s Crossing 1991 Barton Fink 1994 Le Grand Saut The Hudsucker Proxy 1996 Fargo 1998 The Big Lebowski 2000 O Brother O Brother Where Art Thou 2001 The Barber l homme qui n tait pas l The Man Who Wasn t There 2003 Intol rable cruaut Intolerable Cruelty 2004 Ladykillers 2007 No Country for Old Men 2008 Burn After Reading 2009 A Serious Man 2010 True Grit 2013 Inside Llewyn Davis No Country for Old Men 2007 Paramount Vantage Coll Cahiers du cin ma Barton Fink 1991 Circle Films Coll Cahiers du cin ma Joel et Ethan Coen sur
21. LYC ENS ET APPRENTIS AU CIN MA Burn After Reading JOEL ET ETHAN COEN par Vincent Malausa SOMMAIRE Synopsis et fiche technique 1 R alisateurs Un cin aste deux t tes 2 Acteurs Stars contre emploi 3 Genre Le rire dans tous ses tats 4 D coupage narratif 6 R cit Rester en ligne 7 Personnages La valse des pantins 8 Dialogues Le verbe en folie 9 Mise en sc ne Le r gne de l idiotie 10 S quence Coup de sang 12 Plans Le th or me des regards 14 Motif La raison des bureaux 15 Figure Le portrait 16 Parall les Jeux de massacre 17 Pistes Le style Coen en cinq le ons 18 Critique Mineur majeur 20 consulter Directrice de la publication Fr d rique Bredin Propri t Centre national du cin ma et de l image anim e 12 rue de L beck 75784 Paris Cedex 16 T l 01 44 34 34 40 R dacteur en chef Thierry M ranger R dacteur du livret Vincent Malausa Iconographe Carolina Lucibello assist e d Eliza Muresan R vision Sophie Charlin Conception graphique Thierry C lestine Conception printemps 2013 Cahiers du cin ma 65 rue Montmartre 75002 Paris T l 01 53 44 75 75 www cahiersducinema com Achev d imprimer par l Imprimerie Moderne de l Est septembre 2013 MODE D EMPLOI Ce livret se propose de partir des contextes de la cr ation du film pour aboutir
22. acteur pour s affirmer dans cette esp ce d ar ne aux lions doit pour conserver son statut une pr sence qui s affiche et doit tre mise en valeur recourir toute une gamme de techniques ou d artifices visant l extraire du collectif ce qui est aussi une mani re de rentabiliser sa pr sence plusieurs millions de dollars L id e des fr res Coen est la fois simple et efficace le contre emploi syst matique qui donne chaque apparition des stars en pr sence un int r t d passant largement le cadre de l intrigue On y assiste notamment une double performance magistrale qui fait office de spec tacle en soi dans le film le duel de fauves qui oppose George Clooney Brad Pitt dans des r les aux antipodes de leurs habitudes hollywoodiennes George Clooney habitu aux personnages de gendre id al et de s ducteur sophistiqu interpr te un mari infid le et maladif d une extraordinaire muflerie tandis que Brad Pitt h ros multit che du cin ma am ricain de David Fincher Terrence Malick en passant par Quentin Tarantino ou Steven Soderbergh incarne un professeur de sport d une idiotie stup fiante La technique r gne sur leurs partitions respectives le premier multipliant les effets de pr dation un peu bestiale d bit de parole crasant il ac r grognements et grossi ret hypertrophi e le second singeant attitudes et expressions d un grand dadais d bilitant d une formidable
23. an oppressant sur Chad donne le ton de la sc ne la bouche tour tour grande ouverte ou crisp e par la tension l il exorbit par la peur il est en tat d alerte maximum et cherche la moindre occasion qui va se pr senter lui pour s chapper Autour de ce plan pivot s enroulent plusieurs plans en vision subjective qui balayent l espace de la chambre en pousant le point de vue de Chad On distingue Harry sorti de la douche qui sifflote et se pr pare s habiller en deux plans assez courts 2 4 Il faut noter que le suspense ici repose sur un ima ginaire cin phile bien connu clin d il qui renvoie de mani re ludique et distanci e au suspense hitch cockien de la sc ne le cadre une sc ne de douche o un personnage en pie un autre ne manque en effet pas de rappeler le c l bre Psychose 1960 Alors que le regard paniqu de Chad ajoute l in stabilit et la confusion les plans subjectifs sont tous marqu s par une mobilit inqui tante Leur composition est tr s particuli re en tirant parti du format large de l image 1 85 les Coen enserrent le plan entre deux zones d ombre lat rales les volets de la porte agissent comme un tau qui se resserre sur le cadre et l action visible qui correspond au champ de vision de Chad se r sume un mince filet o l on distingue difficilement Harry La fragmenta tion de l action l extr me produit un effet de frus tration e
24. astique Harry est quant lui une sorte de caricature de s ducteur dont la ma trise verbale tient de la compulsion et vire fr quemment l obsc nit comme en t moignent les sc nes de restaurant o le personnage sature l espace de son nergie et de sa parole ou encore son d bit trop rapide et automatis ainsi que ses r pliques du tac au tac Cette ora lit de pr dateur qui caricature les joutes verbales chevel es de la com die am ricaine classique comme dans les films d Ernst Lubitsch s oppose aux personnages de perdants comme Ted la voix douce et chevrotante De m me le premier homme rencontr par Linda via les petites annonces reste silencieux et ne rit pas devant la com die qu ils vont voir au cin ma Enfin la force bur lesque de Chad repose sur sa mani re de parler comme un jeune cr tin d c r br avec ses formules idiomatiques et ses expressions branch es La parole arme bien connue de la com die dresse une typologie des personnages sa ma trise est un atout sans lequel ils sont incapables d entrer dans la musique du film Distanciation et enjeu critique Les com dies des fr res Coen trouvent aussi dans les ressources de l oralit un moyen de se distancier de leur sujet L auto ironie la d rision et la prise de dis tance raccordent avec la tradition orale de l humour juif que les Coen parta gent avec Woody Allen autre cin aste dont le burlesque est indissociable de
25. ativement restreint Parfois le regard impitoyable des auteurs franchit ouvertement le cap de la bouf fonnerie et de la farce Les personnages de Brad Pitt et de George Clooney creu sent dans le film cette veine burlesque o les traits sont d lib r ment forc s ce qu illustrent le comportement d bilitant de Chad ou les grimaces et grognements de Harry le rire se fait alors plus trivial et f roce t moignant parfaitement de la capacit des auteurs ma triser les ruptures de ton et les effets de d calage ou de stup faction Cela peut ouvrir sur un troisi me niveau qui est celui de la sauva gerie plusieurs reprises le film bascule ainsi dans l horreur et fait rire jaune un spectateur cueilli froid Le coup de th tre de la mort brutale de Chad mar qu e par une explosion de violence le plan rapide sur la t te clat e tout comme le massacre la hache de Ted sont des exemples paroxystiques de ce bas culement du comique vers un malaise qui transforme la notion de gag en agres sion pure et simple Jouant avec les r flexes du spectateur ces diff rentes fonc tions du rire remettent constamment en perspective les enjeux en apparence d risoires du sc nario levant la parodie de film d espionnage la com die de d mariage loufoque et la farce triviale en v ritable satire de l poque 5 6 1 G n rique 00 00 00 00 01 39 Plan Google Earth zoomant depuis le ciel vers le quartier g n ral de la
26. bstance m me du r cit l oralit et les dialogues prennent le pouvoir sur la mise en sc ne elle m me 10 Quel est le v ritable sujet de Burn After Reading Ce n est certainement pas le r cit d espionnage fond sur un McGuffin path tique cf p 7 qui importe le plus ici moins peut tre de prendre le terme son niveau le plus prosa que et le plus mesquin un film o tout le monde pie tout le monde dans un jeu de tromperies et de manipulations en cha ne Dans le dossier de presse du film les Coen r sument ainsi leur projet C est un film sur l angoisse de la quarantaine qui met en sc ne des personnages dont la crise professionnelle personnelle et sexuelle touche des questions de s curit de l tat Le sc na rio se situe entre la C I A et l univers du fitness et d crit ce qui se passe quand ces deux mondes entrent en collision Cette id e de la collision absurde est pr cis ment le c ur d un film jouant jusqu au d lire du contraste entre son contexte g opolitique le d cor de Washington D C qui renvoie tout un ima ginaire du cin ma d espionnage et la trivialit du vaudeville qui se joue en r a lit sous nos yeux Par del cette distorsion comique des enjeux la mise en sc ne travaille d crire un monde enti rement r gi par l idiotie et le cynisme M canisation Jamais peut tre l humour noir et m chant des fr res Coen n est apparu de mani re si
27. c ne du lieu dans le cin ma des fr res Coen est inti mement li e une dimension existentielle Dans Barton Fink les sc nes l int rieur de l h tel o loge le jeune sc nariste pousent son tat psychique tourment et ressemblent une construction purement mentale Dans Burn After Reading les bureaux et salons o se replient les personnages semblent parfois marqu s d une m me dimension c r brale les gros plans sur les pieds d valant les couloirs froids de l Agence donnant l impression d une sorte d absurdit m ta physique En t moignent les chos des pas sur un sol film gr ce la fluidit irr elle du Steadicam Cette dimension est renforc e par les lignes de perspective vertigineuses offertes par certains arri re plans sur les n ons lumineux qui prolongent les plafonds des couloirs Hors du monde dans un univers proche de l abstraction le film trouve dans les sc nes au c ur de la bureaucratie secr te de la C I A ou dans celles de l ambassade russe une forme d horizon un peu crasant Au d but du film Osbourne Cox qui vient d tre d mis de ses fonctions exprime son point de vue nostalgique son p re la bureaucratie a remplac les missions qui faisaient le sel de son m tier d agent double C est cette dimension abstraite et sans rapport la r alit que l atmosph re du film rend particuli rement le bureau est un lieu o la parole tourne un peu vide et o
28. d et visions subjectives sur Harry C est le moment o Chad d couvre que l tui du revolver que Harry porte toujours sur lui est juste c t de lui dans le placard 12 La rupture passe par un fulgurant plan rapproch sur le visage de Chad film de face 13 les yeux carquill s cadr s de mani re frontale sonnent l alerte Tout va s acc l rer brutale ment et pr cipiter le destin du personnage Apr s les plans de dur e moyenne qui ont pr c d le rythme de la s quence change du tout au tout en une suc cession de plans extr mement brefs qui durent peine quelques dixi mes de secondes la violence explose Le passage se d coupe ainsi vision subjective de Chad voyant Harry foncer vers le placard 14 plan rapproch sur Chad tentant de se replier en s abais sant au milieu des v tements 15 gros plan brusque et heurt sur le visage de Harry effray 16 il hurle aussi effray que Chad plan rapproch sai sissant sur le visage de Chad avec un grand sourire 17 retour sur le visage en gros plan de Harry qui cette fois braque son revolver face cam ra 18 effet de frontalit maximum il s agit du point de vue de Chad tir de revolver 19 la t te de Chad explose Burn After Reading est une com die mais cette sc ne vire ouvertement la sauvagerie le plan gore de la gerbe de sang qui jaillit dans le placard saisit le spec tateur et agit comme un mauvais gag N anmoins l humour
29. e Harry retrouve Linda l occasion d une rencontre Internet ils passent une soir e et une nuit formidables 8 Le poisson a mordu 00 40 42 00 47 51 Au club de fitness Linda d crit sa rencontre un Ted constern Avec Chad elle se rend un rendez vous qu ils ont fix avec Osbourne Cox qui envoie nouveau balader Chad et l avertit des dangers qu il encourt en marchandant ces informations Apr s une course poursuite Chad et Linda se ren dent l ambassade de Russie pour tenter de vendre leurs informations Ils retrouvent Ted au club 9 La chute 00 47 52 00 53 16 Lors d un d jeuner Katie pousse Harry divor cer Harry retrouve Linda et lui pr sente sa sur prise dans sa cave une machine jouir De son c t Osbourne Cox explique le chantage dont il est victime son ex patron de la C I A Rest s dans son dos deux hommes lui d livrent l assi gnation en divorce de sa femme En rentrant chez lui il trouve la porte ferm e 10 Coup de th tre 00 53 17 01 05 40 Au cours d une discussion dans un fast food Linda et Chad d cident de poursuivre leur chan tage Chad est envoy r cup rer des informations suppl mentaires chez les Cox Chad s immisce dans la maison mais se fait tuer accidentellement par Harry qui passait au m me moment et l a pris pour un dangereux espion Au quartier g n ral de la C I A deux ex sup rieurs d Osbourne tentent de r s
30. e Cox est une bourgeoise froide et pinc e Elle trompe Osbourne avec Harry Pfarrer et assure le lien entre les deux personnages C est elle qui en tentant de r cup rer les informations bancaires de son mari n cessaires la proc dure de divorce qu elle engage ouvre la bo te de Pandore et lib re des documents qui vont semer le trouble dans le r cit Harry Pfarrer George Clooney Cet homme mari qui passe son temps tromper sa femme entretient une relation avec Katie Cox et se retrouve plong bien malgr lui dans l intrigue d espionnage du film au moment o il rencontre Linda Litzke une vieille fille pleine d nergie Fonctionnaire d tat aux finances et ex garde du corps qui a toujours une arme sur lui c est un parano aque qui se croit poursuivi en permanence Le duo Linda Litzke Frances McDormand Chad Feldheimer Brad Pitt Linda qui rencontre Harry via un site Internet de petites annonces et Chad sont employ s dans un club de fitness et tombent sur une page des m moires d Osbourne Cox qu ils tentent de monnayer Aim e en secret par son patron Ted Linda est obs d e par les op rations de chirurgie esth tique que sa mutuelle refuse de payer Chad est quant lui un simplet m cheur de chewing gum totalement obs d par les marques et technologies du moment iPod Gatorade cha nes de fast food etc surexcit par la ran on qu il pourrait obtenir en change de ces pages dont il ne compr
31. e de narrations virtuoses et de m caniques sc naris tiques implacables Rigueur des m canismes fluidit des encha nements pi ges fatals menant les personnage la mort avec une froide ironie le sc nario du film est un mod le du genre et t moigne du plaisir de conteurs qui anime les Coen lorsqu il s agit de suspendre leurs personnages aux fils d une narration aux allures de machine parfaite Cette virtuosit atteint n anmoins ici un point limite Burn After Reading fonctionne selon une logique d exc s qui reposant sur la fragmentation du r cit et l acc l ration continuelle a une vis e tr s simple noyer le spectateur dans un torrent d informations Ce jeu met en crise tout en les transcendant les principes m mes de cette toute puissance du r cit sur laquelle reposait jusqu alors leur cin ma Fragmentation effets de brouillage Le plaisir simple de raconter une histoire qui nourrit l uvre des fr res Coen atteint une dimension d lirante proportionnellement au nombre de personnages important de ce film choral cf p 8 les intrigues prolif rent dangereusement Le r cit met en sc ne cette polyphonie en passant d une histoire l autre en une suite de d crochages ou d embo tements complexes qui s ment la confusion Rien ne relie a priori la premi re partie les probl mes conjugaux d Osbourne Cox et celle du gymnase mais le film passe de l une l autre sans la moindre rupture de
32. e et va d terminer la suite de l intrigue puisque c est le prix exorbitant des op rations qui va inciter Linda trouver de l argent au plus vite Katie la femme d Osbourne Cox se retrouve quant elle rapidement dans le bureau d un avocat qui engage sa proc dure de divorce Quant au bureau administratif de la salle de gymnastique o travaillent Linda Chad et Ted il appara t comme l un des centres nerveux du film c est une sorte de bo te de Pandore d o les informations concernant le CD myst rieux se r pandent comme une tra n e de poudre euphorisante Contrairement aux sc nes d int rieur en milieu domestique chambres salons cuisines sous sols qui semblent contenir toutes les pulsions intimes et les affects n gatifs des personnages des trom peries aux meurtres les s quences de bureaux sont celles o le r cit s arr te et se suspend loin de la d pense physique effr n e dans la quelle s ext nuent Harry Linda ou Chad et de leurs obsessions spor tives et cosm tiques C est le lieu des r ves de fiction qui se lib rent de la pesanteur du r el les op rations de Linda pour se r inventer le divorce de Katie l espoir de trouver un tr sor pour Chad C est encore celui o l intrigue alambiqu e du film semble se r soudre comme par magie en quelques mots comme en t moignent les deux sc nes de r sum entre les pontes de l Agence cf p 9 Un lieu abstrait La mise en s
33. e les pistes et plonge rapidement le spectateur dans une ronde d appa rences et un brouillard de signes qui confinent au vertige pousant une certaine r alit de notre poque en jouant avec ces effets de vitesse et d illisibilit les fr res Coen ont r alis ce qu ils savent faire de mieux un grand film m taphysique cach dans un petit d lire m tafilmique Les cin astes n ont peut tre jamais atteint un tel degr de ma trise ce qui les pousse ce geste extatique et autodes tructeur une mise en sc ne qui finit par s effondrer sur elle m me R DACTEUR EN CHEF Thierry M ranger est depuis 2004 critique et membre du comit de r daction des Cahiers du cin ma Agr g de lettres modernes et concepteur de documents p dagogiques il enseigne en sec tion cin ma audiovisuel au lyc e Rotrou de Dreux et dans le cadre du Master Pro Sc nario r alisation et production de l Universit Paris I Panth on Sorbonne Il est galement d l gu g n ral du Festival Regards d Ailleurs de Dreux R DACTEUR DU LIVRET Vincent Malausa est membre du comit de r dac tion des Cahiers du cin ma Dans le cadre du dis positif Lyc ens et apprentis au cin ma il a r dig les dossiers consacr s Noi Albinoi 2006 La Famille Tenenbaum 2008 Grizzly Man 2009 et Bamako 2011
34. en 1991 Barton Fink film cerveau sur les m andres de la cr ation et vue en coupe d Hollywood t moigne d une profondeur qui tend dans la plupart de leurs films une dimension existentielle d une grande richesse La vision du monde lucide et d senchant e qui en ressort passant par une veine satirique tr s aigui s e d passe largement le cadre des genres abord s du polar enneig Fargo au n o western No Country for Old Men en passant par la com die dramatique A Serious Man L uvre traite des mythes fondateurs de l Am rique comme celui du Grand Ouest mais aussi de ses tares la violence originelle les aberrations de l administration le cynisme de l poque comme dans Burn After Reading sous un angle historique ou sociologique qui fait parfois ressembler les films des tra vaux d entomologistes cruels et distanci s ce dont t moigne particuli rement The Barber l homme qui n tait pas l et ses personnages sinistres fig s dans un noir et blanc glacial Le souci du d tail et l art de la caricature servent constam ment chez les Coen une vidente vision d auteur Esprit de famille Depuis le succ s de Barton Fink les Coen b n ficient d une reconnaissance qui ne s est jamais d mentie de la part du public et de la critique Les r compenses qui ornent leur filmographie sont nombreuses aux multiples s lections et prix obtenus Cannes prix de la mise en sc ne pour Barton Fink
35. end pas qu elles sont sans int r t Des personnages marionnettes On voit que les personnages de Burn After Reading pris un un vaquent des occupations relativement anodines bien loign es du sentiment de folie et de d traquement qui p se rapidement sur le film Tous se retrouvent pris au pi ge d une m canique qui les d passe et en fait de v ritables pantins du r cit aucun d entre eux ne se d tachant pour s affirmer en h ros Cette instrumentalisa tion des personnages t moigne d un penchant naturel du cin ma des fr res Coen faire peser sur la soci t des hommes un sentiment de fatalit touffant On pourrait ais ment y voir une mani re de surplomb cynique r duisant l huma nit un spectacle d insectes observ la loupe depuis un point de vue divin Pourtant la force du film est de ne pas s en tenir ce sentiment de toute puis sance bien qu impitoyables dans leur peinture d une galerie de figures l exis tence m diocre les Coen laissent poindre et l une empathie discr te pour leurs personnages Il y a dans les personnages de Harry qui s effondre peu peu sous le poids de ses mensonges et de Chad qui a un grand c ur une m me tendance rester de grands enfants path tiques et dans ceux de Linda et Katie un volontarisme et une capacit aller de l avant qui rel vent d une r elle profondeur humaine Quant Ted le patron de la salle de sport amou
36. erick Jaynes Direction artistique David Swayze Chef d corateur Jess Gonchor Musique Carter Burwell Son Peter Kurland et Skip Lievsay Producteurs Joel et Ethan Coen Production Focus Features StudioCanal Working Title Films Distribution France StudioCanal Dur e 1 h 36 Format 1 85 Sortie 12 septembre 2008 tats Unis 10 d cembre 2008 France Interpr tation Harry Pfarrer George Clooney Linda Litzke Frances McDormand Chad Feldheimer Brad Pitt Osbourne Cox John Malkovich Katie Cox Tilda Swinton Ted Treffon Richard Jenkins StudioCanal Joel et Ethan Coen sont d illustres repr sentants de la cat gorie des fr res cin astes aux c t s des Dardenne Larrieu Quay Taviani Farrelly Jusqu Ladykillers 2004 premier film o les deux fr res sont cr dit s en tant que cor alisateurs la r partition officielle de leurs r les est tablie selon cette habi tude le duo cosigne les sc narios tandis que l a n Joel est cr dit en tant que r alisateur et le cadet Ethan en tant que producteur Dans les faits cette r par tition n a jamais t claire et tous deux ont partag de mani re informelle ces fonctions d s Sang pour sang 1984 Joel n en 1953 et Ethan n en 1957 sont tellement indissociables qu ils signent le montage de leurs films sous le pseudo nyme de Roderick Jaynes et que le public est habitu depuis long
37. erri re Ce mouvement qui voit une intuition valid e par son contrechamp la paire 1 2 est red ploy tout au long de la sc ne Deuxi me phase Linda tourne son regard vers sa droite 3 une voiture au volant de laquelle se trouve un autre homme en noir lunettes de soleil la double et vient boucher son horizon lat ral 4 Par un effet d entra nement la logique parano aque de la sc ne s amplifie d autant que le regard de Linda devance le plan qui vient confirmer l intuition qu elle a d tre suivie et pi e la logique de la folie l emporte et le spectateur a l im pression que la mise en sc ne vient conforter le sentiment de pers cution du personnage dans une logique d automatisation qui donne au regard de Linda qui anticipe le mouvement de la sc ne un caract re presque magique Troisi me phase un bruit venu du ciel 5 attire le regard de Linda vers le haut 6 l effet d amplification est cette fois comique car le plan de validation montre un espion observant Linda avec des jumelles depuis un h licopt re 7 L horizon du ciel lui m me est bouch il ne reste Linda que le repli dans sa voiture 8 9 Effet de boucle L effet comique de cet encha nement tient essentiellement au fait que le personnage de Linda embarqu dans une affaire de chantage dont elle n a pas le contr le est l un des rares du film ne pas tre victime de parano a contrairement Harry qui se c
38. es fois adapt le th me plus g n ral du jeu de massacre nourrit abondamment l imaginaire du cin ma et du th tre par sa dimension ludique et les usages spectaculaires qu il peut offrir au r cit et la mise en sc ne Le film d horreur a logiquement exploit le filon Parmi les plus beaux exemples La Baie sanglante 1972 et L le de l pouvante 1971 de Mario Bava imposent des adaptations somptueuses et tr s ironiques de Dix petits n gres pousant jusqu la forme de la comptine qui sert de source au roman Plus pro sa quement le slasher qui est le genre de films o s vit un serial killer l image de la s rie des Scream peut tre vu comme la variation la plus archa que et la plus m canis e du r cit la Dix petits n gres L encha nement m canique des meurtres r pond une logique de pure r p tition qui peut se m ler la forme litt raire polici re du whodunit contraction de Who done it Qui l a fait o la question de savoir qui est l origine des meurtres est essentielle au suspense Le polar comme Identity de James Mangold 2003 et le film d espionnage La Taupe de Tomas Alfredson 2010 trouvent dans les r cits criminels ou les his toires d agents doubles les plus emberlificot es une mati re id ale pour jouer avec une galerie de personnages manipul s par le destin ou des syst mes qui les d passent compl tement C est cette source que s abreuve B
39. et assurant ses encha nements d une s quence une autre ou faisant office de suspensions ludiques avec notamment le personnage d hurluberlu haut en couleurs de l avocat de Katie longuement film derri re son bureau dans un pur souci comique Le plaisir de capter une performance d acteur comme celle de Brad Pitt tr s souvent film selon ce dispositif frontal dans son contre emploi burlesque participe de cette m me perspective portraitiste Br lez ce message Pour son exploitation en France le film comme souvent avec les Coen a gard son titre original en langue anglaise Burn After Reading Traduction pos sible br ler apr s lecture Pour quoi ce titre l vidence il fait r f rence tout un imaginaire du film d es pionnage la James Bond et notam ment Mission impossible et son fameux leitmotiv Attention ce mes sage s autod truira dans les dix secon des Burn After Reading appara t donc comme un clin d il aux classiques du genre On peut n anmoins voir en quoi ce titre pose d autres questions Comment l information circule t elle dans le film La vitesse et l illisibilit r gnent le titre renvoie aussi la ma ni re dont le spectateur re oit les infor mations tout va trop vite les donn es apparaissent comme un carburant l intrigue chauffe jusqu s enflammer En quoi ce titre peut il voquer la structure du film Burn A
40. ettre en valeur aussi bien les stars que les seconds r les toujours truculents de leurs intrigues ACTEURS Stars contre emploi 3 Burn After Reading s ouvre par un plan offrant un point de vue cosmique la Terre vue du ciel et chutant une vitesse vertigineuse vers le sol am ricain afin de d voiler l int rieur des locaux surprot g s de la C I A non loin de Washington D C C est un plan truqu qui ne manque pas d voquer les zooms de Google Earth ce logiciel cr l origine par les services secrets am ricains qui permet de cibler n importe quel endroit de la plan te en quelques clics La musique et les roulements de tambour qui accompagnent cette ouverture en grande pompe donnent imm diatement le ton nous sommes de toute vidence dans un film d espionnage La question du genre est essentielle dans l uvre des fr res Coen qui n ont cess depuis leurs d buts de dialoguer avec tout un pan du cin ma classique archiv en diverses poques leurs films reconstituent diverses p riodes de l histoire des tats Unis et cat gories polar fantastique com die western Dans Burn After Reading le film d espionnage leur offre un terrain de jeu dont les figures les motifs et les codes espions en pagaille parano a tous les tages intrigue plus ou moins fumeuse autour d informations cruciales pour la s curit de l tat sont videmment s rieusement mis mal Peut on pour auta
41. evolver le projette terre en une chute en plan rapproch film e de mani re heurt e et r aliste 20 le corps de Chad s effondre dans le placard dans un brusque mouve ment vertical 21 Harry se pr cipite hors de la chambre et fuit dans les escaliers 22 23 24 25 Le principe de fuite qui propulse la sc ne dans un lan de panique incontr l e fait progressivement bascu ler l chelle des plans on passe d un tat de sid ra tion appuy par les multiples gros plans qui ont pr c d une suite de plans moyens qui r duisent Harry lors sa fuite dans les escaliers une esp ce de b te traqu e On remarquera ici l usage subtil par les cin astes du motif de l escalier qui n est pas non plus sans rap peler la maison de Psychose Les trois plans d esca liers sont marqu s par une suite de raccords dans l axe extr mement marqu s aux angles exag r s et violents presque expressionnistes Harry s enfuit dans le fond du cadre 23 et d vale les escaliers selon un d coupage en deux temps un premier plan en contre plong e le montre courant de haut en bas 24 la cam ra est plac e en bas des escaliers puis un autre en plong e 25 de bas en haut cr ant une impression de vertige le montre en un effet de sym trie inverse chuter en se pr cipitant maladroitement dans les marches Comme autant de tours de vis ces trois plans dessinent la trajectoire d une spirale et semblent annonce
42. fter Reading s affole sur du vide et l on comprend mesure que l intrigue se d ploie que rien ne tient debout ou ne restera en m moire une fois le film termin La discussion finale entre les pontes de la C I A fait imploser le film personne ne comprend rien ce qui s est pass Le titre peut donc sugg rer cet horizon de n ant et d absurdit une fois l intrigue consum e et ses personnages limi n s un officier ordonne de br ler le corps de Chad comme s il n avait jamais exist que reste t il de tout ce que l on vient de voir Le verbe to burn qui signifie br ler d signe aussi en informatique le fait de graver un CD ou un DVD Comment le titre s enrichit il de cette polys mie 17 PARALL LES Jeux de massacre Le bain de sang qui affole la derni re partie de Burn After Reading avec les morts successives de Chad et de Ted auxquelles il conviendrait d ajouter la mort sociale d Osbourne dans le coma et celle de Harry exil au Venezuela rel ve ouvertement du jeu de massacre On peut y voir une variation lointaine et amus e sur le r cit arch typal de Dix petits n gres d Agatha Christie roman de 1939 dans lequel dix personnages retenus sur une le se voient myst rieu sement assassin s les uns apr s les autres Le roman est lui m me adapt d une comptine Ten Little Niggers crite par Frank Green en 1869 mettant en sc ne la mort de dix perso
43. ilm repose sur ce d calage entre la grandiloquence du ton qui laisse penser que nous assistons un film d espionnage hi tech et ces enjeux d risoires qui mobilisent les personnages La com die de remariage est un genre qui a fait les beaux jours d Hollywood 4 GENRE Le rire dans tous ses tats C I A et cin ma post 11 Septembre Il est int ressant de voir en quoi Burn After Reading s inscrit dans une lign e de films ayant trait de la question des services secrets am ricains au cours des ann es 2000 Tournant en d rision la C I A les Coen n y vont pas de main morte On pourra avec les l ves r pertorier les films de tous bords action espionnage thriller politique qui ont abord la question des services secrets ces derni res ann es Syriana de Stephen Gaghan 2005 Mensonges d tat de Ridley Scott 2008 Fair Game de Doug Liman 2010 Raisons d tat de Robert de Niro 2007 la saga Jason Bourne Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow 2012 la s rie Homeland et bien d autres Ce regain d int r t du cin ma pour l es pionnage qui tait une grande lubie des ann es 70 vient assur ment de la politique ext rieure des tats Unis au cours de cette p riode marqu e par des v nements majeurs attentats du 11 Septembre interventions en Irak et en Afghanistan scandale m diatique concernant le mensonge sur les armes de destruction massive en Irak ap tres de la th
44. interm diaires d une intrigue qu ils inventent de toutes pi ces Osbourne se r ve en espion l ancienne Harry s duit en mentant Cet horizon MISE EN SC NE Le r gne de l idiotie De la musique L utilisation tr s particuli re de la mu sique dans le film pourra tre relev e De quel type de musique s agit il Quels effets provoquent les roulements de tambour de l ouverture La ten sion de certains th mes a pour fonc tion de placer le spectateur dans une situation d attente Promesse de fic tion simulacre de film d espionnage avec les bruitages de donn es informa tiques qui accompagnent l ouverture tout est le signe d une grandiloquence que le film prend un malin plaisir con tredire dans les faits Un exemple sail lant correspond la pr paration par Harry de sa surprise dans sa cave la suite de sc nes dispers es dans l in trigue et renforc es par une musique suspense n annonce finalement qu une d couverte d risoire On essaiera de r pertorier les plans ou les sc nes dans lesquels la musique est en d calage complet avec ce que l on voit comme lors du premier footing de Harry accom pagn d une musique tonitruante le personnage est parano aque et se croit suivi mais rien dans le plan ne confirme cette hypoth se Ailleurs la musique assure des sauts entre diverses intri gues en induisant des chos et des liai sons compl tement artificielles Il en es
45. l on ordonne de br ler un corps celui du personnage de Brad Pitt avec la m me froi deur et le m me ton d saffect que si l on commandait un menu emporter Ce que nous appelons la raison d tat c est la raison des bureaux disait Anatole France Dans Burn After Reading cette raison des bureaux est la fois le salut et la trag die d un film o les per sonnages n ont que deux issues se retrancher du monde ou mourir MOTIF La raison des bureaux 16 FIGURE Le portrait Par sa dimension chorale le film offre une piquante galerie de portraits et t moigne de la volont des fr res Coen de croquer leurs personnages Le portrait est une figure essentielle de l uvre des cin astes et l on retrouve travers le film un nombre important de plans compos s selon un dispositif pr cis v ritable signature visuelle du style Coen un personnage film en plan rapproch de face dont le visage ressort de mani re particuli rement saillante Les portraits de personnages ne r pondent pas une logique de pose comme par exemple chez Wes Anderson autre cin aste am ricain travaill par cette question mais semblent arrach s leur environnement pris dans le vif de la sc ne Si beaucoup de personnages dans Burn After Reading discu tent dans des bureaux la mise en sc ne des Coen se pla t trouver dans ces instants de dialogues en champ contrechamp l occasion de mettre en valeur ce
46. le dire Chef Putain de bon Dieu il referme le dossier 9 DIALOGUES Le verbe en folie Le travail des fr res Coen repose sur une ma trise plusieurs niveaux rigueur du r cit esth tique tir e quatre pingles l gance des reconstitutions comique du d tail Ne laissant aucune place l improvisation l art tr s contr l des cin astes repose sur une musicalit et un rythme qui donnent aux dialogues une importance capitale La sophistication verbale de leur syst me comique est essentielle et l on ne compte pas tous les gags et effets de sid ra tion reposant sur le seul travail d criture des dialogues Ceux ci concernent aussi bien travers des r pliques qui font mouche l efficacit imm diate et r solument ludique du film qu un travail de distanciation plus large o la mise en sc ne d crypte l action dans une perspective critique La parole comme raison d tre La caract risation des personnages passe en grande partie par l oralit Cox mod le de p dantisme parle de mani re mielleuse th trale et sophistiqu e et une grande part de sa force comique repose sur le d calage entre cette pr ciosit et les moments o r duit n ant par son repos forc et l tat d aban don o l a laiss sa femme il enrage en invectivant son entourage ou en mau gr ant tout seul r p tant des je suis plus fort et de retour en suivant le rythme d une mission de gymn
47. le tournage de Burn After Reading StudioCanal Bouger les lignes L utilisation d un acteur contre emploi a connu de nombreux exemples dans l histoire du cin ma On pourra essayer de r pertorier des films c l bres ayant permis des com diens de mettre en valeur une face cach e de leur talent Audrey Hepburn dans le western Le Vent de la plaine de John Huston Robert Mitchum dans La Nuit du chas seur de Charles Laughton Beaucoup d acteurs comiques ont souhait pas ser un registre s rieux En France Bourvil Le Cercle rouge de Jean Pierre Melville 1970 Fernandel Regain de Marcel Pagnol 1937 ou Coluche Tchao Pantin de Claude Berri 1983 ont franchi le cap Aux tats Unis Tony Curtis a incarn un tueur dans L tran gleur de Boston de Richard Fleischer 1968 et Jerry Lewis a jou un formi dable clown blanc dans La Valse des pantins de Martin Scorsese 1983 Le passage du registre dramatique la com die est moins fr quent mais n est pas rare pour autant comme l illustrent Marlon Brando dans La Comtesse de Hong Kong de Charles Chaplin 1965 ou Tom Cruise dans le finale de Ton nerre sous les tropiques de Ben Stiller 2008 travers l analyse de quelques exemples de contre emploi on pourra r pertorier les mani res de jouer avec l apparence d un acteur en l affublant d artifices en le d guisant ou au con traire en le pr sentant sous un jour moins glamour
48. les op rations esth tiques qu elle d sire entreprendre Plus tard dans le club de fitness o elle travaille elle tudie avec Chad son coll gue le profil des hommes qui ont r pondu ses petites annonces par Internet Apr s avoir tent de joindre sa mutuelle qui refuse de payer pour ses op ra tions elle retrouve un homme dans un parc Ils pas sent la soir e et la nuit ensemble En fouillant dans son portefeuille Linda d couvre qu il est mari Pendant ce temps Katie annonce son amant Harry qu elle va divorcer Ce dernier semble beau coup moins d cid 6 Un CD explosif 00 24 48 00 29 50 Au club de fitness Linda retrouve Chad qui est surexcit par le contenu d un CD perdu qu un des employ s a retrouv dans les vestiaires Chez lui avec sa femme Sandy Harry travaille dans sa cave la construction d un myst rieuse surprise Au caf Linda tente d expliquer ses probl mes financiers Ted le patron de la salle de sport qui l aime en secret Ellipse on retrouve Harry qui rencontre une nouvelle femme par Internet 7 Le d but des embrouilles 00 29 51 00 40 41 Chad d barque chez Linda apr s avoir trouv le num ro de t l phone du possesseur du CD perdu la salle de sport il s agit d Osbourne Cox Ils l appellent dans l espoir de marchander les infor mations mais celui ci les rejette en les traitant de clowns Plus tard alors que sa femme est partie en voyag
49. miroir grima ant de la soci t et des tares de l Am ricain moyen vis e laquelle Burn After Reading n chappe videmment pas la dimension conceptuelle du film qui nous montre des ahuris ou des monstres de b tise de cupidit ou de muflerie courir leur perte tient la fois de l tude de m urs et de la satire de l poque Les d cors parfois proches de l abstraction qu il s agisse des couloirs glac s de la C I A de la salle de gym pleine de figurants s agitant comme des robots ou du cabinet du chirurgien o le corps de Linda est analys en d tail le confirment Au moment de tuer Ted le directeur du club de fitness Cox l che cette r plique particuli rement explicite Vous tes le symbole de l idiotie de l poque Cette idiotie dans le film est entendre des degr s multiples idiotie litt rale comportementale psychologique voire psychiatrique mais aussi exis tentielle et m taphysique Il y a chez les fr res Coen une ambition de peinture sociale qui a toujours raccord leur cin ma la logique de la fable par del la machinerie impeccable du sc nario et la sophistication de la mise en sc ne l hyperr alisme le souci du d tail et la finesse des descriptions rel vent d une ambition morale qui fait de Burn After Reading une esp ce de conte d une grande lucidit sur les processus de d shumanisation de l poque Les hommes n appa raissent assur ment
50. ncarn e par George Clooney et avec lui tout le folklore de la com die sophistiqu e dia logues brillants l gance vestimentaire la Cary Grant en l opposant la trivialit d une poque dont le romantisme est cens surgir de sites de ren contres sur Internet Un rire niveaux multiples D limiter les enjeux d un tel film n est pas ais tant il s amuse singer divers genres sans pour autant se laisser tout fait saisir L humour noir qui traverse toute l uvre des fr res Coen est un fil qui permet de reconna tre coup s r leur patte mais on n en finirait pas de d finir toutes les modalit s du rire tel qu il s exerce dans un film comme Burn After Reading Sa dimension ironique en tant que peinture d une galerie de caract res tous plus m diocres les uns que les autres se tient parfois un ton pince sans rire o excelle l art de la caricature froid des auteurs Une mani re de parler ou un d tail anodin comme par exemple les expressions toutes faites de l avocat de Katie Cox ren dent imm diatement risible un personnage sans que le trait soit forc ou appuy C est dans cette veine la fois hyperr aliste et discr tement loufoque que les fr res Coen excellent brosser des portraits d une grande acuit comique et qui parviennent s imposer en quelques plans l image du per sonnage discret de Ted figure inoubliable du film malgr son temps de jeu rel
51. ncipes d incertitude d cembre 2011 Transfuge hors s rie n 4 Les fr res Coen janvier 2008 Les anglophones consulteront Mark T Conard The Philosophy of the Coen Brothers University Press of Kentucky 2009 Josh Levine The Coen Brothers The Story of Two American Filmmakers ECW Press Toronto 2000 James Mottran The Coen The Life of the Mind Batsford Londres 2000 Carolyn R Russell The Films of Joel and Ethan Coen McFarland amp Company Jefferson 2001 Entretiens et articles Michel Ciment Entretien avec Joel et Ethan Coen Bien n gocier le virage Positif n 520 juin 2004 Thierry Jousse et Nicolas Saada Entretien avec Ethan et Joel Coen Cahiers du cin ma n 448 octobre 1991 Thomas Bourguignon L illusionnisme et le vision naire Le cin ma des fr res Coen Positif n 367 septembre 1991 Yannick Dahan Du r ve la r alit Les films des fr res Coen Positif n 447 mai 1998 Critiques de Burn After Reading Franck Garbarz La conjuration des imb ciles Positif n 574 d cembre 2008 Jacques Mandelbaum Une galerie de stars lustre le noir des Coen Le Monde 10 d cembre 2008 Didier P ron Les hoquets de la m thode Coen Lib ration 10 d cembre 2008 Antoine Thirion Gymnastique internationale Cahiers du cin ma n 640 d cembre 2008 Ouvrages g n raux sur le cin ma am ricain Vincent Amiel et Pascal Cout Formes et obse
52. nda Litzke Qu est ce qui les diff rencie des hommes Une premi re remarque s impose les femmes sont du c t de l action tandis que les personnages masculins sont du c t de la parole Linda pousse les hommes comme Chad et Ted se bousculer Katie quant elle reste froide en toutes circonstances et se pla t dire qu elle joue franc jeu aux belles paroles de Harry dis sertant sur le mariage elle oppose un cinglant Je vais divorcer Les deux sont des femmes de carac t re volontaires et qui ne se perdent pas dans le r gime verbal d lirant des personnages masculins qu il s agisse des mensonges de Harry du consum risme d bilitant de Chad ou de la pr ciosit impuissante d Osbourne Mais il est surtout frappant de constater que Linda et Katie chappent au jeu de massacre du film la premi re comme le spectateur l apprend lors du dialogue final entre les agents de la C I A parvient finalement se payer ses op rations de chirurgie dans un semblant de happy end La seconde dispara t du film lorsque le jeu de massacre commence alors que les hommes eux sont vou s la mort ou l exil De toute vidence ce traitement privil gi permet de conclure qu en chappant la logique de mensonge qui contamine les hommes les deux personnages f minins conservent une forme de luci dit et de fra cheur qui les place du c t de la vie en d pit de leurs d fauts et de leurs faiblesses leur
53. nnage dans lequel tous les codes du genre se renversent en motifs path tiques Tous les personnages se transforment en caricatures d espions malgr eux Katie Cox vole les donn es de l ordinateur de son mari Linda sort avec un agent f d ral dont elle fouille les affaires Chad se fait tuer en passant pour un espion Harry est poursuivi par une horde d agents myst rieux Des relents de Guerre froide avec les sc nes patibu laires dans l ambassade de Russie viennent m me ajouter une touche l an cienne ce r cit pourtant ancr dans son poque Une com die de d mariage Malgr ces r f rences en forme de gimmicks au cin ma d espionnage on ne peut pour autant pas voir le film comme une simple parodie de ce genre Car Burn After Reading est un film d espionnage par d faut c est un malentendu concernant des fichiers sans int r t les pages des m moires d Osbourne Cox qui le propulse sur les rails d un genre avec lequel il n a finalement que peu voir Les enjeux g opolitiques concernant la s curit de l tat r sum s le temps de sc nes grotesques dans les locaux de l Agence ne sont qu un leurre grossier Au contraire les vraies pr occupations des personnages sont d une trivialit confondante proc dures de divorce tromperies r ves de chirurgie esth tique tout dans ce sc nario tient d un mauvais vaudeville sans la moindre ampleur Une grande part de la force comique du f
54. nnages au fil des couplets de la chanson Les fr res Coen ont d s leurs d buts construit leur uvre fortement influenc e par le polar sur ce th me du jeu de massacre Sang pour sang 1984 dont l intrigue cri minelle d une noirceur extr me conduit les personnages s entretuer en est un exemple saillant tout comme Fargo ou The Barber L origine du roman dit bien quel point la notion de fatalit qui p se sur les r cits la Dix petits n gres engage des questions d ordre rythmique et musical Les fr res Coen aiment travailler sur des intrigues aux rouages parfaitement huil s et s appuient sur une mise en sc ne r gl e comme du papier musique ce qui a pour effet de faire entrer les personnages dans la ronde d un r cit sou verain qui souvent les d passe Ici le film se cl t sur l image d un dossier que l on referme cette logique circulaire correspond au mouvement cyclique de la comptine et trouve dans le grand jeu de massacre final une forme d apoth ose entre synth se et version acc l r e du roman d Agatha Christie Si le film ne r pond pas la structure it rative du roman et de la comptine o les morts s accumulent selon un rythme m tronomique il la prolonge en se soumettant un principe d autodestruction articul autour d une m me suite de r actions en cha ne parmi un petit cercle de personnages Adaptations et variations Au del du roman d Agatha Christie maint
55. nt parler de simple parodie L art du pastiche La parodie est un horizon naturel du cin ma des fr res Coen mais leur travail sur les genres est pourtant loin de se limiter caricaturer en les grossissant ou en les d naturant les conventions qui les d finissent Leur uvre balaye un spectre qui va de l hommage cin phile la moquerie pure et simple On d note chez eux un go t du pastiche qui a deux vis es il offre en premier lieu un d fi technique des cin astes marqu s par un certain f tichisme de la mise en sc ne et qui mieux que personne aiment d montrer une virtuosit exceptionnelle et un soin d orf vre dans la r alisation de leurs films puisque pasticher revient prouver qu ils peuvent tout faire mais surtout le pastiche des genres permet aux Coen de brosser la fiction d une Am rique prise rebours de ses id aux le fameux mode de vie am ricain American way of life et le mod le d mocratique et de ses mythes fondateurs la fronti re le Grand Ouest les effets de folklore etc dans une perspective d licieusement iconoclaste Dans Burn After Reading le film d espionnage et ses enjeux g opolitiques sont litt ralement dynamit s en quelques plans La figure d Osbourne Cox l espion mis au repos forc incarn par John Malkovich qui passe son temps en robe de chambre et en pantoufles ruminer son aigreur est loquente il s agit presque d un anti film d espio
56. nterpr t par Frances McDormand dont la culotte de cheval et les d fauts physiques sont symboliquement mis en avant dans la sc ne chez le chirurgien Nombre de s quences en ext rieur et en lumi re naturelle dans les rues de la ville ou dans le parc par ticipent de cette logique r aliste Pour autant l univers des Coen est toujours pr t basculer dans l irr el Ainsi la d formation de la r alit produite par un grand nombre de plans en plong e ou inversement en contre plong e force les angles et appuie les effets de perspective cf p 16 Par ailleurs le recours des mouvements d appareil extr mement fluides comme le travelling avant sur les pieds qui avancent dans les couloirs implique une griserie plus proche du cartoon ou de la bande dessin e que du r alisme C est dans cet quilibre entre le r alisme et la fantaisie qui passe aussi par un usage subtil de la couleur que se tient la mise en sc ne du film Ainsi les ext rieurs sont souvent film s au cr puscule ou dans une lumi re bla farde pendant les joggings de Harry au parc tandis que les int rieurs multiplient les tons plus criards et les couleurs vives qui voquent le dessin anim Les surv tements rouges du club de fitness ou l ambiance cossue des bureaux de la C I A jouent ainsi subtilement du d calage avec la r alit pr parant la mise en sc ne d boucher ouvertement sur la farce 2 L art de la caricature Partag e entre hyper
57. onnel Au del de la cr ti nerie g n ralis e qui semble tre le moteur de l intrigue de Burn After Reading tous les personnages appa raissent ainsi comme les avatars path tiques d un cirque humain o la caricature rompt avec la monotonie des d cors que symbolise le cadre bureaucratique du film 3 Banni res toil es Un motif visuel important traverse Burn After Reading celui du drapeau des tats Unis On pourra rele ver ses occurrences lors de la projection du film et voir en quoi ce symbole est particuli rement maltrait par les cin astes C est sur des oreillers arborant la banni re toil e que Harry et Katie se font des confi dences dans le dos d Osbourne Cox d autant que les oreillers se trouvent dans le bateau de plaisance de ce dernier Un drapeau en berne tr ne sur le bureau des deux sup rieurs qui tentent de comprendre l in trigue dans le quartier g n ral de la C I A Washington D C cadre majestueux du film dont on distingue en arri re fond lors des joggings de Harry le Capitole et de nombreuses institutions nationales bascule dans le pire prosa sme avec le d cor du gymnase dans un lan de d rision assez explicite Quel que soit le lieu de l action de leurs films les Coen n ont jamais cess de brocarder l American way of life et le folklore de l Americana nombre de leurs intrigues prennent place dans le Sud ou les plaines agri coles du c ur des tats Unis o ils filment
58. pas sous leur meilleur jour dans cette satire cruelle absurde et path tique mais ils se d battent avec une nergie et une soif de vivre qui don nent au film une profondeur sociale philosophique et terriblement humaine 11 12 C est le grand coup de th tre de Burn After Reading la s quence par laquelle le petit d lire parano aque vire au jeu de massacre et entra ne le film entier dans sa chute Sur les conseils de Linda Chad s est intro duit dans l appartement des Cox pour tenter de voler d autres documents qui pourraient servir leur chantage Une fois sur place Chad d couvre avec effroi que Harry l amant de Katie Cox entre dans la maison il a tout juste le temps de filer se cacher dans un placard de la chambre l tage Coup de malchance Harry qui rentre d un jogging se rend justement dans cette chambre pour prendre une douche dans la salle de bain attenante mais en laissant la porte ouverte Dissimul dans le placard Chad observe la sc ne en esp rant pouvoir s chap per Le suspense monte et devient insoutenable Nous entamons l analyse de la s quence son mo ment de tension maximale 00 59 35 juste avant que n clate le coup de th tre de la mort de Chad Un suspense hitchcockien 1 11 La s quence a pour pivot un gros plan sur le profil de Chad observant ce qui se passe dans la pi ce depuis la mince ouverture de la porte du placard 1 3 5 6 7 9 11 Le gros pl
59. pouss e Harry le mufle Osbourne le pr tentieux aigri Chad le ben t au grand coeur Ted le loser font partie des sp cimens d idiots et de b tas inven tori s avec un malin plaisir dans le sc nario Le film voque en outre un jeu de massacre cf Parall les qui pousse chaque personnage dans une logique de cau chemar kafka en qui le d passe compl tement Le personnage de Brad Pitt r pond parfaitement cette logique d automatisation g n ralis e grossi re ment d guis en prof de gym ou en espion obs d par les marques il fomente avec Linda ce qu Osbourne appelle au moment de tuer Ted un complot de cr tins Le cadre du club de fitness o l on distingue en arri re plan toute une foule de personnes s animant comme des robots et des pantins anonymes s excitant sur des tapis de course t moigne de cette vision d lirante du monde tel qu il appara t dans le film un univers d apparences et de simulacres o chacun dans son obsession du para tre semble s puiser dans le vide Cette obsession du para tre ne se limite pas au club de gym mais contamine presque tous les personnages Linda r ve de se r inventer gr ce des op ra tions de chirurgie esth tique et en triant des hommes sur des sites de ren contres Harry ne songe qu s duire par tous les moyens Osbourne s entra ne devant des missions de gymnastique pour garder la forme Sur le plan verbal il faut noter une tendance
60. puissance burlesque jeunisme compulsif addic tion aux marques excitation des gestes regard ahuri Rien que pour ce duel improbable Burn After Reading appara t comme un v ritable tour de force comique Enlaidissement grimaces et caricature Cette logique du contre emploi contamine tous les personnages John Malkovich voit son r le d espion mis au repos forc sombrer dans le grotesque son phras un peu snob onctueux et mani r laissant peu peu place un torrent d in sultes motiv es par l aigreur et la haine Quant Tilda Swinton qui incarne un docteur froid et m prisant elle se retrouve particuli rement enlaidie par la mise en sc ne de mani re embl matique dans la s quence o elle se trouve affubl e d un masque de soins sur le visage Dans cette ronde o les com diens peuvent se livrer des exc s inhabituels chacun fait son num ro avec un plaisir vident Jamais probablement Brad Pitt n a pu se laisser aller une telle libert roulements d yeux travail sur la voix lorsque son personnage s adresse Osbourne Cox De son c t George Clooney recourt toute une gamme de gri maces notamment lorsqu il parle la bouche pleine et feint de s touffer qui d voilent une force comique inattendue Le cabotinage et la caricature ont libre cours dans ce film qui n est jamais loin de la farce et les fr res Coen confirment ici leur statut de brillants directeurs d acteurs capables de m
61. r alisme et stylisation la mise en sc ne de Burn After Reading renvoie une dimen sion essentielle du cin ma des fr res Coen le plaisir de la caricature On pourra d terminer par del la composition la fois frontale et d cal e des cadres les diverses modalit s selon lesquelles s exerce plus pr cis ment cet art de la d formation et de la d rision Il convient en premier lieu de voir tout ce qui dans le film concerne les costumes et les accessoires dont sont affubl s les personnages Le masque qui d figure Katie Cox au d but du film les pantoufles et la robe de chambre d Osbourne Cox l attirail d ob jets superficiels dont s entoure Chad qui passe l essentiel de son temps m cher du chewing gum boire du Gatorade ou tripoter son iPad sont de l ordre du d guisement Les Coen jouent avec l apparence de leurs stars cf p 3 avec un plaisir presque sadique qui d borde la question de l interpr tation On pourra souligner ainsi que plus que les accessoires les coiffures rev tent un caract re particuli rement impor tant les m ches peroxyd es de Chad les cheveux mi longs de c libataire coquette de Linda ou le look la Clark Gable de Harry en disent beaucoup plus sur leur personnalit ou leur appartenance sociale que tout autre d tail Les Coen ont toujours cherch d crire des personnages correspondant une vision iconoclaste de l Am rique loin du mythe et du glamour hollywoodien traditi
62. r que le film a d finitivement bas cul dans la folie au cours de cette s quence de meurtre qui n a dur qu un peu plus d une minute 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 14 Burn After Reading pourrait se r sumer un petit jeu sur la parano a g n ralis e Dans un fragment de sc ne particuli rement explicite 01 22 35 Linda se voit poursuivie par une horde d agents secrets myst rieux Prise dans l cheveau des multiples points de vue qui p sent sur un film enti rement soumis la circulation des regards elle voit son espace l int rieur d une voiture se resserrer comme une peau de chagrin C est peine une sc ne plut t une suite de plans mont s en parall le avec une s quence autrement plus impor tante celle o Ted se retrouve nez nez avec Osbourne Cox ces neuf plans t moignent pourtant de la virtuosit des cin astes pro duire un suspense incongru en une s rie de raccords virtuoses Horizon bouch Le temps d un feu pass au rouge Linda d couvre qu elle est encer cl e par la C I A Elle regarde dans son r troviseur 1 le plan rap proch de face sur son visage laisse entrevoir dans l arri re plan une voiture qui bouche l horizon arri re Le contrechamp sur le r troviseur 2 appara t comme une confirmation un homme en costume noir avec des lunettes de soleil masquant ses yeux semble bien l observer dans la voiture qui se trouve d
63. res Coen sont coutumiers L ironie pince sans rire et la f rocit bien connue des auteurs tourne ici plein r gime et transforme le film choral en une sorte de construction purement th orique o seule importe la virtuosit de leur mise en sc ne Enti rement vou s maintenir un suspense artificiel qui ne repose litt ralement sur rien les cin astes s en donnent c ur joie dans la mise en place d un syst me ronflant les roulements de tambour de la musique les mouvements d appareil dynamiques et sophistiqu s comme l ouverture avec les gros plans sur les pieds des agents filant dans les couloirs de la C I A les ellipses et les effets de vitesse ou d acc l ration comblent litt ralement le vide sur lequel s appuie la fiction Entre grandiloquence et d ri sion Burn After Reading interroge la virtuosit des auteurs en la confrontant ses pires d mons repr sent s par la menace d un cin ma habile mais creux et sans affects Le film accumule une montagne d effets qui accouchent d une souris vaste supercherie dont le symbole pourrait tre cet extraordinaire gag de la machine jouir construite en cachette par le personnage de George Clooney une longue progression qui d bouche sur une surprise grotesque Idiotie de l poque Cette dimension ludique est primordiale mais le film est plus qu un simple objet th orique s tourdissant de sa propre virtuosit L uvre des fr res Coen s offre en
64. roit poursuivi par des espions en permanence La sc ne prend d s lors un caract re d cal et incongru elle force presque la logique parano aque du r cit enclenchant une m canique de pers cution d autant plus absurde qu elle ne produit chez Linda qu une r action de surprise distanci e la seule r plique de ce passage tenant en deux mots l ch s sans grande conviction Zut alors Par ailleurs l extraor dinaire suite de raccords de regards qui gouverne la sc ne dont le pivot est le plan rapproch de face sur le visage de Linda 1 3 5 9 produit un mouvement de boucle qui vient s ajouter au sentiment d oppression cr par la pr sence des agents autour du v hicule L espace est bouch partout derri re sur le c t en haut et la dy namique de la sc ne repose enti rement sur un mouvement circu laire qui met particuli rement en valeur la ma trise d un certain art classique de la repr sentation de l espace On peut y voir une le on de mise en sc ne portant sur les ressources du cadre champ hors champ et contrechamp mais aussi une belle parabole sur la repr sentation d un espace parano aque o la boucle appara t comme figure de la folie Cela tient quelques plans qui se r pondent par paires 1 2 3 4 s ries dynamiques 5 6 7 8 ou simples rimes visuelles 1 9 Il est possible de voir dans cet encha nement de plans d une grande puret une forme de th or me visuel synth
65. s dialogues Plusieurs sc nes t moignent de cette vis e cathartique des r pliques les plus mordantes L une des plus dr les est celle o Harry qui vient d ap prendre que sa femme demandait le divorce retrouve Linda et se lance dans de grandes tirades sur la vie On croit au mariage et d un coup boum Celle ci qui Harry a fait croire qu il tait en train de divorcer depuis plusieurs mois le ram ne aussit t son mensonge grossier Ce n est pas vraiment une surprise cela dit Le dialogue est au c ur des strat gies mises en place du d guisement de s rieux sous lequel Chad tente de passer pour un espion lors qu il appelle Osbourne Cox en for ant sa voix et en plissant les yeux avec bouffonnerie aux multiples verbiages de Harry ou de Cox lui m me C est encore par la parole que le point de vue des cin astes et des spectateurs d bouche sur une perspective critique inatteignable par d autres moyens L exemple des sc nes l int rieur de la C I A o l action est d cortiqu e par deux agents est loquente Autour d un bureau les personnages s engagent dans une suite de commentaires dont l apparente objectivit r v le peu peu l absurdit Le film bascule ce moment dans la folie et atteint son plus haut point comique tout en gardant l apparence du s rieux cf Atelier Dans cet espace qui n appartient plus tout fait au film o le commentaire devient la su
66. sonnages du film cette ligne claire qui r gne ici envers et contre tout Burn After Reading est un film qui va constamment de l avant l image du personnage volontariste de Linda ou du besoin d exercice physique qui caract rise Harry Le brouillage et l illisibilit des informations produisent moins des n uds paralysant le r cit la plupart des enjeux sont d risoires qu une sorte de d calage absurde pro pulsant le film dans une course contre le vide Ce vide est embl matis par le McGuffin cf Atelier que sont les informations d rob es Cox un malen tendu autour duquel s agitent en vain les personnages Dans ce cadre les deux sc nes capitales dans les bureaux de la C I A du milieu et de la fin du film o deux agents tentent de r sumer la situation offrent des respirations inesp r es et accentuent l impression de l g ret et de vaste fumisterie par laquelle le film trouve son salut ce r cit marqu par l horizontalit comme si les auteurs jetaient des hypoth ses et des pistes en pagaille pour alimenter leur boulimie s ajoute une verticalit souveraine du point de vue Ainsi les deux sc nes de r sum dans les locaux de la C I A sortent litt ralement le spectateur de l intrigue tout en levant le film un degr hautement conceptuel cet instant c est la toute puissance m me du r cit qui semble mise en crise et rendue son statut de simulacre Mourir avant la fin
67. ssions du cin ma am ricain contemporain Klincksieck Paris 2003 Jean Loup Bourget Hollywood la norme et la marge Nathan Paris 1998 Jean Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier 50 ans de cin ma am ricain Omnibus 1995 Peter Biskind Sexe mensonges amp Hollywood Le Cherche Midi 2006 Sur le monde du cin ma ind pendant dans lequel l uvre des Coen s est panouie au cours des ann es 80 90 Sitographie Jean Philippe Costes Du cr tinisme dans l uvre des fr res Coen Origines caract ristiques et pers pectives de l Homo Imbecilius in Encyclop die de l Agora http agora qc ca Dossiers Joel_et_Ethan_Coen Paul Caughlin Joel and Ethan Coen http sensesofcinema com 2003 great directors coens Une tude en anglais de l uvre des fr res Coen sur le site australien de r f rence Senses of Cinema Coenesque http coenbrothers net blog Un blog en anglais enti rement consacr aux Coen et une mine d informations CONSULTER www site image eu Transmettre le cin ma Plus d informations de liens de dos siers en ligne de vid os p dago giques d extraits de films sur le site de r f rence des dispositifs d duca tion au cin ma Extase et autodestruction Malgr ses allures de com die pleine d entrain Burn After Reading est un film beaucoup plus complexe qu il en a l air Sous le vernis du film d espionnage le film secoue les hypoth ses multipli
68. t ainsi au moment o Osbourne l ve son verre lors du banquet d anciens l ves qui pr c de l arriv e de l intrigue dans le club de fitness Enfin on notera que cette supercherie est donn e pour telle dans le g n rique de fin le tube rock C I A Man du groupe The Fugs apportant une touche ouvertement comique et d risoire tout ce qui a pr c d de mensonge permanent et syst matique engage une vision parano aque du monde embl matis e par le personnage de Harry qui se croit pers cut par un r seau d espions qui ne sont en fait que les avocats envoy s par sa femme pour divorcer La parano a affecte la mise en sc ne qui se r sume traiter toutes ces informations sans les trier la fiction s emballe dans un lan centrifuge et pro duit des gags savoureux comme lors de la sc ne tr s dr le o Ted qui lui aussi cache une autre vie r v le Linda son pass de pr tre orthodoxe en Gr ce Le film appara t ainsi comme une machine produire de l information spirale infernale laquelle font cho une des formules toutes faites de Harry l in formation c est le pouvoir et les multiples sc nes d embrouilles t l pho niques qui reposent sur les messageries automatiques et les r pondeurs de la mutuelle ou de la banque Le d s quilibre aberrant produit par cet exc s d in formations transforme les personnages en hommes creux et implique une ab sence d motion dont les fr
69. t art du portrait pris sur le vif L attention port e aux visages trouve plusieurs occurrences dans le film comme cette sc ne o Harry et Katie allong s sur un lit conversent film s de c t hauteur de lit leurs profils se superposent dans un jeu tr s harmonieux de champs contrechamps Mais c est dans la frontalit que s exprime le mieux l art du portrait des cin astes Les exemples sont multiples tous un moment o un autre se retrouvent film s de face Comme attrap s par la cam ra ils sont isol s de leur environnement le temps d un plan plus ou moins appuy dans la dur e Quelle est la principale sp cificit de ces portraits C est d abord une certaine crudit qui saisit le spectateur comme lorsque le visage de Linda est minutieusement tudi par son chirurgien esth tique Cette mise nu t moigne du souci d observation impitoyable des Coen mais aussi du point de vue iro nique et clinique qu ils portent sur la r alit Grimaces Il semble pourtant difficile de tenir ces portraits pour r alistes On note ainsi que leur composition passe souvent par un usage discret de la contre plong e g n ralement utilis e pour mettre en avant ce qui est film en lui donnant une posi tion de sup riorit le visage domine alors le cadre et le spectateur Cet effet donne de l importance au personnage et met en relief sa pr sence l cran m me quand il n est que secondaire Un exemple
70. t de morcellement qui aiguise le suspense et maintient le spectateur dans l attente Apr s les deux plans brefs sur Harry en peignoir un troisi me se d ploie sur la longueur et joue avec une plus grande perversit sur le dispositif mis en place par les Coen le son s approche Harry continue de chanter mais dispara t du champ de vision de Chad va t il sur gir avant de r appara tre de dos en train de bou tonner sa chemise 6 Il se retourne et s approche du placard comme pour venir l ouvrir Le plan de relais sur Chad horrifi n est plus de profil mais frontal comme si une collision allait avoir lieu et laisse sup poser une rencontre imminente 8 Mais c est une fausse alerte Harry se d tourne au dernier moment et repart un peu plus loin sur la droite du cadre 10 On reconna t ici la virtuosit des cin astes qui n en sont pas leur premier pastiche hitchcockien et multiplient les rebondissements et les effets de sur prise au sein de la s quence Cela a pour effet d amor cer l explosion qui va suivre en une longue mise en tension les Coen bandent leur arc avant de d co cher leur fl che On entend d ailleurs Harry armer son revolver 10 S QUENCE Coup de sang 1 3 5 6 7 9 11 2 4 6 8 10 12 13 14 15 13 Le coup de th tre 12 19 Alors que la tension monte une rupture a lieu dans le jeu d allers retours entre gros plans sur le visage de Cha
71. temps pour voquer leurs multiples succ s l expression un film des fr res Coen L absurde une vision d auteur Le sens de l absurde et l humour noir f roce qui d finissent le polar Sang pour sang qui demeure un film culte pour toute une g n ration imposent un uni vers que l uvre du duo ne cessera de red ployer Sous l apparence de la diver sit et de l h t rog n it des genres les films ne se d parent jamais de cette unit de ton faite de dr lerie et de cynisme si reconnaissable qu elle est devenue un effet de signature Les Coen sont des touche tout bien que l imaginaire du film noir hante leurs cr ations Leur filmographie prot iforme t moigne d une bouli mie repriser tous les genres road movie Arizona Junior farce burlesque The Big Lebowski com die sophistiqu e Ladykillers Intol rable cruaut film noir en costumes Miller s Crossing film de studio Le Grand Saut fable picaresque O Brother western True Grit etc Issus de la g n ration des movie brats cin astes cin philes des ann es 80 comme leur comp re Sam Raimi avec qui ils ont collabor leurs d buts les Coen ont un rapport f tichiste l histoire du cin ma et leurs films sont truff s de clins d il S il y a une vidente dimension ludique dans l uvre des fr res Coen celle ci est loin de s y limiter La Palme d or du Festival de Cannes d cern e
72. u del de tout point de vue moralisateur les deux fr res agi tent cette folie destructrice avec un plaisir de sales gosses la fois ludique et iconoclaste Pour autant l observation du monde et des comportements humains qui travaille l uvre dans son ensemble permet de voir d un film l autre une coh rence correspondant une certaine morale de mise en sc ne le cin ma des fr res Coen semble en qu te d une v rit et celle ci passe souvent par la voix d un sage l image des voix off dissertant sur le monde sur un ton d senchant dans No Country for Old Men The Barber ou encore The Big Lebowski Dans Burn After Reading l ultime instance cens e d boucher sur une hypoth tique v rit est celle du quartier g n ral de la C I A o les deux sup rieurs tentent de d m ler l intrigue qui se noue sous leurs yeux affol s Que cette instance supr me ne permette de conclure qu un surplus d absurdit t moigne paradoxalement de la vis e morale des films des fr res Coen la qu te de v rit ne formule pas de r ponses mais c est son mouvement m me jusque dans ses aberrations qui claircit une grande part du myst re du film 5 Du c t des femmes Pour prolonger la question de la morale dans les films des fr res Coen on pourra s interroger sur la place des femmes dans Burn After Reading et particuli rement sur les r les interpr t s par Tilda Swinton Katie Cox et Frances McDormand Li
73. ui apr s la redistribution des cartes post guerre froide le 11 Septembre la crise de la C I A quoi ressemble une affaire d es pionnage aujourd hui Des histoires de coucheries au mieux Parce que concernant le trafic des secrets on a ferm boutique Bref on n est plus apr s qu apr s dans un post qui ne signifie plus rien pas d enjeu une parano a sans objet sinon du c t des imb ciles heureux ceux qui croient au complot Cette d flation de tout est au c ur du film la fois ressort comique et rature monumentale sur un pass glorieux Apr s No Country for Old Men les Coen se sont trouv s un nouveau condiment grandes peurs absurdes causes couple qui se d cline l infini du film d effroi la farce la plus l g re y gagnant toujours un suppl ment de transparence Jean Philippe Tess www chronicart com 9 d cembre 2008 Les fr res Coen sont des cin astes excessivement productifs Ils ont r alis quatre films entre 2007 et 2010 ann e o fut r alis Burn After Reading changeant de registres ou de sujets avec une aisance qui force g n ralement l admiration on ne sait jamais o ils vont rebondir Cette diversit a instaur l id e d sormais admise que leur uvre se partage entre films mineurs et films majeurs certaines com dies des ann es 2000 Ladykillers Intol rable cruaut ayant notamment t moign d une ambition bien moins importante que d
74. umer la situation 11 Panique 01 05 41 01 13 13 R fugi dans son bateau de plaisance Osbourne Cox fait du sport devant la t l vision Linda pa nique et s inqui te du sort de Chad Elle demande 24 heures Ted pour tenter d arranger la situation Un appel de l ambassade de Russie relance ses attentes Harry sombre et distrait se dispute avec Katie et s enfuit Il appelle sa femme et d couvre qu un homme myst rieux le suit il s agit en fait de l employ d un cabinet d avocat qui lui annonce la proc dure de divorce engag e par sa femme Celle ci se trouve Seattle en compagnie de son amant 12 Osbourne craque 01 13 14 01 17 50 Osbourne d couvre que tous ses comptes ban caires ont t vid s par sa femme Pendant ce temps Linda l ambassade de Russie apprend que les informations qu elle marchande n ont aucun int r t Chez lui d sesp r Harry craque et d truit tout Linda parvient convaincre Ted de se rendre chez les Cox pour poursuivre son enqu te Harry en pleine crise appelle Linda et cherche du r con fort Celle ci lui demande de rechercher Chad gr ce ses comp tences de policier 13 Le massacre 01 17 51 01 24 43 Osbourne Cox d cide de retourner chez lui Il d fonce la porte la hache et ramasse tout ce qu il peut bouteilles d alcool bijoux Pendant ce temps Linda retrouve Harry au parc qui apprend horrifi que l homme qu il
75. urn After Reading r affirmant le r gne d une fatalit qui fait ressortir par del l aspect ouvertement ludique du film une vision cynique et d sabus e de l humanit Il y a dans cette mani re de faire mourir si brutalement et si grotesquement les personnages un plaisir sadique qui touche la jouissance du narrateur qui appara t comme un dieu qui tire les ficelles Mais il faut surtout y voir une fa on de dire avec une froideur ironique un tat du monde les personnages apparaissent comme des insectes sous la loupe des cin astes et le film s offre en tude comportementale d saffect e et presque scientifique de l esp ce humaine Dans cette perspective de distanciation morale les fr res Coen por tent leur intrigue une dimension de fable philosophique qui d passe le cadre du cin ma Identity de James Mangold 2003 La Baie sanglante de Mario Bava 1972 L le de l pouvante de Mario Bava 1971 La Taupe de Tomas Alfredson 2010 18 PISTES DE TRAVAIL Le style Coen en cinq le ons 1 Entre r alisme et fantaisie C est une constante dans l uvre des cin astes Burn After Reading comme les autres films du duo joue d une esth tique qui se partage entre r alisme et fantaisie La volont de filmer la soci t am ricaine dans une perspective critique les pousse souvent une certaine crudit un refus du glamour qui se trouve ici dans le personnage tout en naturel et en spontan it i

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