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Peurs du noir ok

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1. Le double et son spectre 01 08 13 01 09 48 Cette courte s quence incluse dans le r cit final du film focalise avec une grande originalit tout son pari esth tique sans abandonner sa th matique parvenir faire frissonner en jouant d une repr sentation mini maliste dont le principe central est d enfermer et de faire jouer le sujet l homme fant me noir dans du noir Ce qui retiendra l attention dans l analyse pr sente est la mani re dont McGuire rejoue avec des moyens tr s modernes toute la fantasmagorie initiale du cin ma En outre il appara tra que la s quence est comme une d clinaison des figures qui jalonnent lhistoire des repr sentations optiques Son ouverture est caract ris tique de cette recherche Elle commence dans le noir laissant deviner en fond de champ par quelques simples incisions blanches la pr sence d une figure ou d un masque Celle ci provoque l effroi de l homme dont seuls le visage blanc la petite moustache noire et la d coupe blanche d une lampe p trole esquissent une identit Tandis que l homme s en approche le contre champ donne plus de place au masque qui se m tamorphose soudain sous l effet du halo de la lampe en un simple motif floral Victime de cette premi re illusion de type anamorphique qui a notamment t explor e plusieurs fois par Emile Cohl l homme dont la lampe n claire le d cor de l
2. Mon amie et moi avons d cid de partir en voyage pour cesser de penser cette situa tion horrible Apr s que nous soyons revenus et que nous ayons allum la lumi re nous avons entendu des bruits qui semblaient venir de la chambre d c t Pourtant je savais qu il n tait pas rentr Je me suis lev Je n ai rien remarqu d inhabituel jusqu au moment o je me suis rendu compte que les rideaux devant la fen tre taient agit s par le vent La vision de ces rideaux que le vent faisait onduler a vraiment t une image horrifiante Le propos de Peur s du noir attise et r veille lib re et projette nos peurs latentes Cet effet de projection peut tre le point de d part d un travail fruc tueux avec les l ves Celui d abord d une reconnaissance ces peurs nous appartiennent tous sans distinction de g n ration de sexe ni de race Celui ensuite d une identification nommer sa ses peur s comme le fait et comme y invite le film c est exprimer et lib rer des affects refoul s c est d couvrir ce qu Aristote a initialement nomm catharsis purification pour d crire l effet que produisait vis vis de tout spectateur toute repr sentation th tra le dramatique Nombreux sont les acteurs contemporains avoir th oris sur cette vertu du spectacle Cest notamment le cas du psychanalyste et thologue Boris Cyrulnik qui rappelle q
3. Blutch Charles Burns Marie Caillou Pierre di Sciullo Lorenzo Mattotti Richard McGuire WF A 13 N sl ee I T PEN E ri i Re F h la l MODE D EMPLOI Le d roul de ce livret suit la chronologie du travail men par les enseignants avec les l ves Les premi res rubriques plut t informatives permettent de pr parer la projection Le livret propose ensuite une tude pr cise du film au moyen d entr es vari es le r cit la s quence le plan ainsi que des pistes p dagogiques concr tes permettant de pr parer le travail en classe Des rubriques compl mentaires s appuyant notamment sur des extraits du film sont Bi propos es sur le site internet www lux valence com image si B P Le pictogramme indique m o qu une de ces rubriques est fa en lien direct avec le livret BS S mi o Valence N s 2 gt Directeur de la publication V ronique Cayla Propri t Centre National du Cin ma et de l image anim e 12 rue de L beck 75784 Paris Cedex 16 T l 01 44 34 34 40 R dacteur en chef Jean Claude Rullier p le d ducation artistique et de formation au cin ma et l audiovisuel de Poitou Charentes R dacteur du dossier Pascal Vimenet Conception graphique Thierry C lestine Conception novembre 2008 Poitou Charentes Cin ma p le d ducation artistique et de formation au cin ma et l audiovi
4. On doit admirer au plus haut point la mani re dont un fant me comme celui de Mr Jabot reproduit son individualit impossible sous les formes les plus vari es et dans un entourage qui donne l illusion de la r alit Lettre Fr d ric Sorret 28 janvier 1832 Goethe aurait sans doute comment Peur s du noir Qui s est trouv dans une situation un peu similaire aux r alisateurs du film Sans conteste le fameux Winsor McCay qui fut amen porter pour la pre mi re fois l cran en avril 1911 son propre personnage de bande dessin e l un des tout premiers en couleur Little Nemo Parall lisme pertinent deux niveaux McCay s est imm diatement confront la question de l adaptation prenant en compte sur le champ le d fi du temps cin matographique n h si tant pas modifier profond ment la structure habituelle de ses planches des sin es notamment en liminant les d cors et en rempla ant les phylact res par un langage visuel Par ailleurs consid r comme un dessinateur moderne sinon d avant garde son style tendait l pure Rien voir dans ces passages inventifs du dessin de bande dessin e celui du dessin anim avec les lourdes imitations de planches succ s toujours en dec des mod les pour l unique raison que le cin ma n est pas pris en compte Quand s impose le mot manga c est aussi le nom du fou du dessin le des sinateur et graveur japonais Hokusai q
5. Le Seuil 2007 Claude Jeancolas La Peinture des Nabis FVW 2002 Thierry Groensteen La Bande dessin e mode d emploi Les Impressions nouvelles 2008 Lignes de vie le visage dessin Mosquito 2003 Brigitte Koyama Richard Mille Ans de manga Flammarion 2007 Nicolas Finet Dico Manga le dictionnaire ency clop dique de la bande dessin e japonaise Fleurus 2008 Guy Astic Le Guide de l enseignant le fantastique Librio 1999 2000 Suite fantastique onze nou velles de Charles Nodier Roland Topor Le Seuil 2002 Herv Joubert Laurencin La Lettre volante quatre essais sur le cin ma d animation Presses de la Sorbonne nouvelle 1997 Pascal Vimenet Svankmajer E amp bouche bouche ditions de l il 2002 Et consulter les monographies du Caravage de Goya de Vallotton de Soulages S lection DVD Peur s du noir avec de nombreux bonus diapora ma sur le processus de fabrication visite guid e de l exposition d Angoul me par tienne Robial seg ment in dit de Pierre di Sciullo bandes annonces etc Distribution Diaphana 2008 Loulou et autres loups Marie Caillou Richard McGuire Fran ois Chalet Philippe Petit Roulet Gr goire Solotareft Distribution Gebeka Films 2003 Emile Cohl l agitateur aux mille images Gaumont 2008 Les Aventures du prince Ahmed Lotte Reiniger BFI 2001 Eros Antonioni Soderbergh Wong Kar Wai g n rique et transitions de Lorenzo Mattotti avec
6. Roman Polanski Shining de Stanley Kubrick et Blue Velvet de David Lynch D autres correspondances s tablissent moins convenues plus secr tes lib r es du noir et blanc et des r cits d horreur lorsque Mattotti voque sa colla boration sur le g n rique et les transitions d Eros 2004 d Antonioni Steven Soderbergh et Wong Kar Wai L rotisme ambigu du th me sugg re alors Mattotti de subtiles et sensuelles transparences o le chromatisme dissout les contours en rendant la lecture ind cise et troublante La Fianc e de Frankenstein Universal Les Aventures du prince Ahmed Carlotta films R pulsion Opening 17 18 Little Nemo Jos Munoz illustration de Carlos Gardel la voix de l Argentine ditions Futuropolis Soulages 1970 FILIATONS Traces et gribouillis Voir le film c est aussi se surprendre laisser venir soi un flot de rumeurs et de murmures de r cits enfouis dans notre m moire d images pr tes refaire surface de rapprochements inattendus Bande dessin e lomnipr sence d un graphisme de bande dessin e et de spectres qui prennent corps notamment par la magie de la reproduction l infini d un personnage de r f rence fait faire retour sur un bien ancien commentaire de Goethe au sujet de certaines planches de Rodolphe T pffer 1799 1846 pr curseur connu et cr ateur du personnage de M Vieux Bois
7. de la paternit de l identit du vide de choses dissimul es limpr cision un moment donn y devient essentielle Le d coupage r pond cette logique qui est celle de la pens e et de la divagation de ses perceptions qui sollicitent l inconscient Dans ces instances de r cit les personnages ne gences visibles tous convergent Mais vers quoi Si ces morceaux alimentent une mise sous tension de nos sens et une attente un peu crisp e sur ce qui va surgir l impression g n rale qui peu peu s ins talle ne se limite pas ce suspense Jouant le r le de compartiments ils constituent un train fant me qui traverse tout le film Et notre insu une identification se produit peu peu non un personnage mais une sensation d en semble qui ressemble au malaise prouv lorsque l on sort d un cauchemar Le r el s en trouve alt r malaise dans la civilisation Les monstres que cr e le film n en rappellent ils pas d autres dont la symbolique a hant nos soci t s modernes les robots et les hallucin s du cin ma expressionniste allemand les monstres ant diluviens du cin ma am ricain de l avant guerre les apprentis sorciers des ann es 50 A notre insu quels signes nous adressent ces nouveaux monstres Parall lisme L une des difficult s d appr hension du film est la nature de son r cit qui en fait la fois un film fantastique un film d pouvante et un film in
8. sa surench re verbale lorsqu elle nonce avec une componction affect e ouvrant la voie d une longue litanie J ai peur d avoir du mal d montrer la sup riorit de la civilisation occidentale un villa geois afghan qui regarderait la t l avec moi Dans un registre hys t ris Aure Atika qui incarne Laura travaille ses dialogues avec Guillaume Depardieu comme autant de phylact res qui seraient simultan ment dits cr ant un v ritable malaise par la surexposition des arch types nous loignant de tout mickey mousing Ouah C est sympa chez toi Voyons voir Qu est ce qu il y a l dedans Oh l adorable petit lit elle rit Mais c est un p tit lit de cow boy Tu veux jouer aux Indiens et aux Cow boys Paou Paou Paou Ou encore Fran ois Creton Linstituteur au ton trop pos et Louisa Pill Sumako la voix exag r ment juv nile surjouent l arch type de l arriv e de la petite nouvelle dans la salle de classe communi quant d embl e la quasi totalit des informations et le sentiment d inqui tude imm diat qu elles induisent O habites tu Sumako San La vieille maison pr s de la chute d eau La vieille maison derri re le cimeti re 2 L en dec du langage A contrario bien que Peur s du noir soit un film relativement bavard il parvient cependant pr server tout un territoire qui est vou au silence ou une bande son
9. Cette derni re conclut Quand nous les avons d couverts il est devenu vident que le film devait tre con u en noir et blanc pour garder cet impact visuel Nous avons d ailleurs chang de titre ce moment l Il y a donc un double retournement de la doxa en usage parmi les producteurs de films anim s la bande dessin e est sollicit e non en tant que medium r exploiter mais en tant que pratique confronter la r gle du cin ma il y a volont d un travail direct sur l origine du dessin sur le rough et donc renoncement la couleur affirmation du noir et blanc Comme le rajoute Christophe Jankovic le noir et blanc c est le dessin dans sa puret Dans le courant de l ann e 2003 l aventure a commenc et plusieurs auteurs ont t approch s pour participer ce projet intitul alors M me pas peur ou Fais moi peur Peur s du noir titre qui s est impo s lorsque les premiers dessins d approche ont t envoy s Prima Linea Productions est une id e graphique d Etienne Robial Tous les auteurs contact s ont dit apr s coup la fois leurs s ductions pour la th matique pour son caract re mature et pour la nature ouverte du projet puisque chacun avait la possibilit d introduire une obsession singuli re Pierre di Sciullo extrait d une planche de storyboard Fin 2003 d butait le travail d criture par les auteurs ayant r pon du pr sents tandi
10. Passage d encres ainsi qu la s rie Palettes et a fond la revue Animatographe Il est l auteur et le coordinateur aux ditions de l il de plusieurs ouvrages r cents parmi lesquels Svankmajer E amp J bouche bouche 2002 Emile Cohl 2008 Walerian Borowczyk 2008 Il est par ailleurs le fondateur du dispositif cole et cin ma pour sa par tie animation et enseigne l EMCA d Angoul me la Poudri re de Valence et l Universit Fran ois Rabelais de Tours Ce dossier est une adaptation par Centre Images du document con u en 2008 par Poitou Charentes Cin ma oitou de CIN MA e E b Libert Egalit Fraternit R PUBLIQUE FRAN AISE N
11. attach e son lit d h pital et livr e aux bons soins du terrible Docteur 11 00 38 53 Retour l inventaire des peurs celle du d litement de l impuissance de lexis tence de l homme 12 00 40 20 Dans une atmosph re de clair obscur se d ploie dans un d cor l italienne un nouveau r cit fantastique fait de myst rieuses dis paritions de recherches et de battues o le nar rateur la recherche d un ami disparu s gare dans le brouillard Celui ci progressivement est assimil dans lesprit du narrateur la cr ature monstrueuse que traque le village Le garde chasse en chef lui tend un pi ge et se met l aff t Corps surr aliste surgi du ciel le monstre mi crocodile mi dragon est sanctifi par les officiants de la paroisse Lorsque le narrateur est r veill quelque temps plus tard en pleine nuit par un trange souffle il acquiert la certitude que son ami est lui aussi descendu des nuages 13 00 53 13 Les silhouettes du dernier chien et de son ma tre se profilent sur les murs d une cit improbable Le chien contemple son image dans un miroir tandis que le vieillard danse une sorte de bourr e Le chien se retourne soudainement contre lui et le d vore Sonne le glas 14 00 54 43 l inventaire des peurs se cl t sur une interrogation de l alt rit et sur une moquerie amus e des travers contemporains 15 00 56 46 C est dans le vent et un temps nei geux qu
12. en ressuscitant et en r inventant malgr des graphismes tr s diff rents et innovants et malgr leur appartenance premi re au territoire de la bande dessin e la gestuelle primitive du cin ma d animation et vrai dire du cin ma tout court introduisant m me dans chacun des cas un d r glement du fonctionnement traditionnel de la machine cin matographique 1 Et ce travail des graphismes qui sape nos certitudes et nos propres repr sen tations est amplifi dans cette fonction par la dramaturgie chromatique qui les unit tous Celle ci constitue elle seule la signature de toute la mise en sc ne fonctionnant la fois comme symbolique g n rale et comme traits d union multiples et m tamorphiques entre les s quences Sa symbolique d ensemble qui croise aussi des territoires ant rieurs principalement ceux de l expres sionnisme repose sur un principe diachronique qui lui fait ouvrir le film au noir pour le fermer au blanc affirmant ainsi son principal parti pris esth tique Ses traits d union multiples mettent en vidence quant eux la richesse expres sive des combinaisons suscit es le rapport du noir au blanc envisag dans tous ses tats produit un bouquet de sens hors de port e de la bande parole laissant aux peurs tout le champ libre et muet d une expansion communicative 1 La Lettre volante quatre essais sur le cin ma d animation Herv Joubert Laurencin Presses de la Sorb
13. et d un personnage dont la biographie aurait surgi des limbes de la peinture et du cin ma Goya Le Bossu et Casanova La particularit du person nage de Blutch est d tre aussi animal que ses chiens puisque leur image il n a pas la parole Loup pour l homme il n a pour cette raison pas besoin de mots pour se faire comprendre Blutch a donc d fini un arch type dont la psychologie ne peut que nous prendre revers Blutch ne verbalise pas habituellement La plupart du temps je me parle moi m me je me r plique me contredis me gronde et d cide finalement a va plus vite que de s adresser d autres cerveaux Du coup on com prend que lorsqu il communique avec son quipe d animation cela passe par un jeu mimodrama tique il esquisse devant une cam ra dv les pas de danse l esp ce de bourr e maladroite qu il voudrait faire ex cuter son personnage Le lan gage direct du corps fonctionne en tant qu indica tion d actoring et justifie l enregistrement futur d un langage presque r duit aux seuls grogne ments les siens et un nuancier de cris D autres sch mas d incarnation des personnages sont l uvre dans Peur s du noir qui sont comme les infinies variations de ces principes de construction Richard McGuire en se confrontant a une difficult similaire puisqu il raconte l his toire muette d un homme seul qui rencontre ou croit r
14. g n ratrice d une fantas magorie Les lettres et les syllabes orchestr es comme une symphonie se r p tent tout en progressant obs cur ment et de mani re apparemment al atoire vers une apoth ose qui sera celle du titre Peur s du noir Objets d clairs brefs qui les mettent en lumi re de clignotements sollicitant notre persistance r tinienne ces fragments bri vement saisis jouent de leur ambi guit Dissimul s tapis ils inqui tent Indistincts ils sugg rent des sens m tamorphiques Irradi s ils blouissent De retour dans les t n bres ils perdent leur identit incertaine Formellement ils jouent le r le d enseignes au n on dans un monde de noctam bules revendiquant le modernisme Lorsque s inscrivent et se stabilisent une derni re fois les lettres vacillantes de Peur s du noir avant de dis para tre dans un fondu au noir un carrousel indis tinct de peurs nous environne noir des endroits obs curs noir du sommeil noir de l me noir fantoma tique noir des nuits Et remonte notre souvenir l es th tique des g n riques de Saul Bass dont se r clame tienne Robial Nous sommes pr ts affronter l in nommable PRIMA LINEA PRODUCTIONS IPR TI FEURIS DU NOIR Des g n riques Le g n rique de Peur s du noir est source de r flexion et d approfondis sement par le rapport duel qu il tablit discr tement avec une certaine culture t l visuelle
15. ins tant Le noir ouvre un champ mental qui lui est propre Fran oise Jaunin Pierre Soulages lumi re d outrenoir Arts plastiques Dans les couloirs obscurs du film passent des ombres imperceptibles Pour Blutch ce sont comme il l voque sans s y attarder celles de Goya et de Manet Que veut il en conserver La noirceur du premier Les audaces du second Pour Mattotti les contrastes du Caravage le chromatisme inventif de Giotto les recherches abstraites et notamment celles du futurisme italien Ne pas oublier que ses bandes dessin es sont l oppos du noir et blanc de son trai tement filmique Ne vante t il pas propos de son Docteur Jekyll et Mister Hyde son hyst rie color e insistant sur l importance de la couleur pour lui E mip ad Peine del viento sculptures d Eduardo Chillida Et McGuire d voile la source principale de sa s quence Elle est largement inspir e du travail graphique d un artiste suisse du d but du si cle F lix Vallotton Pendant mes recherches j ai d couvert par hasard un livre consacr ses uvres Il a souvent utilis un truc qui consiste placer des formes noires sur fond noir Par exemple il montrait seulement le visage et les mains d un homme portant un costume noir dans une pi ce noire Vallotton si ce nom semble une d couverte pour le r alisateur il appartient lui aussi d j aux grands classiques de la pe
16. plans Ce cas de figure particulier m rite donc examen d autant que Prima Linea dont le si ge est Paris et le studio Angoul me a donn cette production soutenue par la R gion Poitou Charentes un caract re la fois r gional et interna tional tats Unis France Belgique Chine Comme le rappelle Val rie Schermann au d but nous voulions cr er une s rie pour la jeunesse partir des histoires effrayantes de Robert Louis Stevenson Jack London ou Edgar Allan Poe Mais c tait impossible faire financer par les cha nes Ce rappel pr liminaire est int res sant pour trois raisons ce qui pr existe est une id e de s rie anim e la th matique envisag e est focalis e sur une adaptation potentielle de trois auteurs complexes et qui ont nourri des ruptures dans l histoi re du cin ma d animation l affirmation de l impossible participation des cha nes ce projet ne pr cise pas si elle est due aux co ts des droits ou au rapport inhabituel que suppose l id e de s rie avec la th matique annonc e ce qui est le plus probable L id e de s rie tait donc ici implicitement fond e sur l id e d un traitement successif de nouvelles genre le plus pratiqu par les trois auteurs nomm s et sur l id e de la relation th matique de leurs uni vers une certaine fantasmagorie On retrouvera le principe de trai tements successifs d une m me fantasmagorie dans Peur s du noir mais d l
17. structure des six segments qui composent le film de mani re en faire un tout harmonieux et bien li tienne Robial insiste sur sa pratique et son rapport au noir et blanc en BD Outre son r le de m decin g n ra liste il est le cr ateur de l alphabet cutter qui structure le g n rique Dans Peur s du noir quatre des r alisateurs se frottent pour la premi re fois un v ritable travail d animation trois d entre eux Blutch Lorenzo Mattotti et Charles Burns sont tr s connus dans l univers de la bande dessin e et le quatri me Pierre di Sciullo est un cr ateur de typographie qui s est fait galement conna tre par d originales installations int gr es aux architectures urbaines Blutch collaborateur de Fluide glacial depuis le d but des ann es 1990 auteur d une vingtaine de bandes dessin es est peut tre l auteur le plus repr sentatif de cette exp rience singuli re Comme il le dit Nous tions l l oppos du des sin immobile qui ne se livre pas qui reste toujours d crypter qui se d robe Et ce fut bien l ma principa le difficult comment pr server le silencieux myst re du dessin statique sur le g ant cran Toute sa d marche est passionnante pour cette raison qu il a tent de rester fid le son trait plut t grin ant et satirique tout en int grant les codes d un m dium qui est l oppos de la bande dessin e Lorenzo Mattotti itali
18. vraiment que chaque artiste soit totalement impliqu dans chaque aspect de la r alisation Story board criture musique direction travail avec les acteurs montage Ils vou laient vraiment que chaque segment soit le travail de l artiste ce qui n tait pas pr cis ment une conception commerciale typique l arriv e une exp rience sin guli re Ce film ne ressemble rien de d j vu Il est vraiment l uvre de tous les artistes comme la voix de chacun Sans cesse en mouvement cr atif ce ma tre incontest du noir et blanc se lance d j un nouveau d fi Ma toute premi re BD en couleurs Pour moi c est tr s nouveau et int ressant de r fl chir la couleur Je le fais dans le style d un album franco belge Pour vous c est normal mais pour moi c est exotique Jos Louis Bocquet avec Laetitia Lacour Le Figaro magazine n 63 9 f vrier 2008 GENESE Un pari de producteurs l inverse de nombreuses productions d animation fran aises o l auteur propose un sujet aux structures de production et aux insti tutions pour le soutenir Peur s du noir est n d une proposition des deux producteurs de Prima Linea Productions Val rie Schermann et Christophe Jankovic f rus depuis longtemps de bandes dessin es des auteurs internationalement connus Et cette proposition toute th orique qu elle f t ses d buts a engendr un processus de cr a tion original sur plusieurs
19. a maison hant e que par fragments dans des halos proches des vues circonscrites des lanternes magiques poursuit son exploration Le proc d graphique sugg re un effet de volum trie extr mement r aliste reposant sur une repr sentation tr s partielle de la figure suppos e du spectre et de l homme Qui est le spectre l incertitude de l homme croise la n tre puisque nos sens optiques ont t le jouet d un effet trompeur En tant que spectateur nous sommes d sormais l aff t et sur nos gardes r ceptif aux pas aux grognements touff s au moindre petit craquement louverture d une porte qui constituent les seuls indices du relief sonore du r cit La pr sence du spectre na t peu peu de diff rents effets de rap prochements graphiques dont le motif floral devient la cl le spectre appara t fugitivement en fond de champ peu de temps apr s sous la forme d une silhouette f minine v tue d une robe aux sombres motifs floraux l homme monte un escalier dont le papier fleurs est bri vement mis en lumi re Le spectre ne prend d finitivement corps et vie que lorsque l image sp culaire de l homme viendra se substituer celle de sa forme femme inscrite dans le miroir de la porte d un placard et que celle ci signera sa pr sence par sa fermeture brutale miroir lisse pareil la surface d un cercueil qui scelle le destin de l explorateur De corps actif l homme a t r duit
20. al d Iggy Pop De passage en France pour accompagner la sortie de Peur s du noir Charles Burns est de ces artistes am ricains qui n h sitent jamais emprunter les passerelles vers l Europe Au d but des ann es 80 il a v cu en Italie avec son pouse elle m me peintre Les critiques fran ais disent de lui qu il est le plus europ en des Am ricains Ils disent aussi que son g nie est unique Il semble ainsi se dessiner une rela tion passionnelle entre le public fran ais et cette uvre aux inspirations pro fond ment am ricaines Un lien organique peut tre J ai grandi en lisant Herg ce qui n est pas vraiment habituel pour un Am ricain Mes parents m avaient offert les albums de Tintin en anglais alors que j tais encore tout petit je pouvais peine lire Plus tard j ai d couvert Swarte Tardi La bande dessin e franco belge m a toujours influenc R v l d s 1981 par Art Spiegelman le cr ateur de Maus Burns appara t deux ans plus tard dans les pages d Heavy Metal version am ricaine de M tal hurlant avec le premier d une longue s rie de personnages d viants le d tective l allure de catcheur mexicain El Borbah Ces courts r cits aussi implacables que ceux crits par Harvey Kurtzman pour les comics des ann es 50 vont aussit t fasciner Jean Pierre Dionnet En 1985 l huma noide en chef de M tal publie en France le premier album de l Am ricain Aujourd hui l auteu
21. aussi stylis e minimaliste et expressive que son graphisme Cette autre ligne de flottaison se situe juste en dessous ou plut t en dec des mots et du langage implicite dont l expression se r v le par la seule combinaison des dessins et d une ambiance sonore particuli re Ce sont sans que cette liste soit exhaustive la sinistre d ambulation de l Homme aux chiens et son cort ge d aboiements le chemine ment d Eric dans la for t ou sa d couverte des insectes devenus g ants et leurs chuchotis les signes abstraits qui se m tamorphosent et leurs bruitages expressifs la galerie des horreurs vue par Sumako San et sa r sonance r verb r e le marais italien du Crocodile et le feutrage de ses sons ou la maison hant e et ses cisaillements sonores l opposition et la combinaison de cet explicite et de cet implicite ne provoquent pas eux seuls le malaise que parvient installer le film L en dec le nourrit et l amplifie au del de l tranget des situations que concr tise le dessin par plusieurs modulations qui l accr ditent et concourent d construire les sch mas rationnels le c t tant t flottant ou lastique tant t th r ou vectoris de l animation des dessins la spatio temporalit discursive des r cits les points de vue propos s cr ateurs de fantastique en soi paysage d sert de Burns illuminations diaboliques de Caillou il visage d Eric la mise en exergue d
22. chel Pirus Qui R siste inventer des polices de caract res aux intitul s fac tieux le Minimum le Gararond et syst matiser ses recherches la fois dans l en seignement Ecole sup rieure des arts d coratifs de Strasbourg depuis 1997 ou dans le cadre de manifestation artistique Nuit Blanche 2006 Paris ne semblait le pr disposer r aliser une s quence d animation Rien si ce mest pr cis ment cette capacit jouer de la m tamorphose des signes de leurs stylisations et de leurs expres sions mi abstraites mi concr tes Les deux derniers r alisateurs Marie Caillou et Richard McGuire outre leurs travaux graphiques ont d j collabor des r alisations anim es et ont pour point commun d avoir chacun cr un court m trage d animation dans Loulou et autres loups d j produit par Prima Linea Production et d avoir t tous deux pensionnaires de la Maison des auteurs d Angoul me pour d velopper leur travail sur le film Marie Caillou jeune r alisatrice originaire de Montb liard est connue elle pour ses dessins de presse et de publicit vectoriel d inspiration manga Sa renomm e est grande au Japon Candidate naturellement d sign e pour participer cette nouvelle aventure l univers japonisant qu elle introduit est l un des facteurs de d stabili sation du spectateur Quant au New Yorkais Richard McGuire il est un cr ateur inventif sachant ma
23. cit sommes nous donc confront s absence de causalit apparente interne au r cit implique t elle une lacune propre au r cit qui se serait content e d un bout bout grossier d un r cit sketches L hypoth se semble peu probable tant le simplisme et la maladresse de cette solution sur la peur du loup la phobie adolescente du corps f minin la fascination de la possession hyst rique l illusion m tamorphique De ce point de vue le film fait un travail sur la notion de peur et n est pas du fait de ses variations un simple film d pouvante il en joue mais s en distancie en m me temps Et ce travail est vectoris et identifiable de facon tr s coh rente par la multipli cation des styles graphiques Malgr leurs diver irait l encontre de la pr cision qui habite tout le film Il serait donc bien plus pertinent de consid rer la trame du d coupage comme le d calque d un vagabondage de l esprit d une r verie d un jeu de fantasmes Cette absence de causalit ce principe de semi coq a l ane ressemble plus un encha nement d instances ou d arch types de lieux ou de topiques au sens psychanalytique du terme l Homme aux chiens inti tul presque freudien est le paradigme de tous les r cits du film Tous sont des r cits exploratoires de diverses phobies celles des corps des insectes du sang de la piq re des liens de la sexualit
24. concepteur de la dramaturgie d ensemble D autre part son influence sur le choix du titre du film du lettrage et du g n rique du noir et blanc et sur l talonnage est de m me ordre Ces orientations et ces choix ont tous eu une incidence essen tielle sur l impression que laisse le film au final notam ment sur sa rythmique et son esth tique g n rales tienne Robial appara t donc comme le chor graphe de cette partition plusieurs mains Le choix qu il a op r sur l ordre de succession des s quences sur le caract re r current des sc nes de l Homme aux chiens et de num ration notamment cr e une tension et un rythme particuliers qui partici pent la mont e de l impression de malaise Il y a quelque chose la fois de s duisant et d inconfortable dans les ruptures que nous impose ce choix Nous ne sommes jamais install s pour longtemps dans telle ou telle ambiance dans tel ou tel espace Parfois nous voudrions nous attarder ou au contraire chapper au caract re lanci nant ou angoissant de tel ou tel passage Mais comme dans les r ves ou les cauchemars la sensation se modifie notre insu nous laissant face des impressions d in gales dur es Notre inqui tude de spectateur est travaill e par ces in galit s spatio temporelles qui alimentent l angoisse sourde que le film diffuse nos codes et nos points de rep re habituels pris en d faut nous n avons d autres possibilit s que de nous la
25. d s lors que son image s est d doubl e une simple image impuissante tandis qu il nous est sugg r que le spectre est devenu vivant Inversion des r les jeu d change effets visuels o le contraste du noir et du blanc modifie son gr toute forme 15 16 GURE Noir et blanc Le noir est la seule couleur int rieure Et le seul savoir est d en faire une porte Bernard No l Dans notre culture europ enne le film est victime de deux pr jug s bien ancr s qui lui donnent a contrario un statut qui l inscrit dans une certaine contre culture contemporaine Ce sont ceux qui sont attach s d une part au dessin anim et aux arts graphiques et d autre part la symbolique du noir Bien que le dessin anim la bande dessin e et les arts graphiques aient conquis depuis longtemps leurs lettres de noblesse et se soient affirm s comme des expressions artistiques part enti re ils demeurent n anmoins aux yeux de toute une partie de la soci t et notamment de celle qui d tient encore un pouvoir poli tique id ologique et ducatif entach s d une certaine suspicion qui les inscrivent implicitement au bas d une hi rarchie imaginaire sous litt rature sous peinture sous cin ma condition de faire fi de ces pesanteurs Peur s du noir appara t comme une ind niable tenta tive de renouvellement stylistique qui privil gie un floril ge de pres tigieuses expressions graphiques contemporai
26. dam Sundance Bruxelles Annecy il a d j t r compens en Allemagne et en Cor e 1 Le rough est une esquisse un projet dessin DECOUPAGE SEQUENTIEL 1 Le g n rique dans un jeu tr s scand de lettres blanches et orange sobrement d coup es sur fond noir d apparition et de disparition de fragments de mots de clignotements passagers parall les une trame musicale de suspense hitchcockienne et burtonienne d voile progressivement sur la nuit de l cran les noms de ceux qui ont fait le film jouant cinq fois d allers retours au titre d clin fantomatiquement 2 00 02 23 Dans un paysage d sol et rocail leux trait comme au fusain appara t gros plan une meute de quatre chiens hargneux Leurs aboie ments leurs souffles courts pr dominent jusqu ce qu ils grognent la vue d un lapin esseul La fuite perdue de celui ci permet d largir le plan Les chiens sont tenus en laisse par un vieillard osseux bossu et antipathique attif comme un marquis du XVIII si cle Lorsqu un jeune gar on sort d une anfractuosit rocheuse pour observer la sc ne le vieillard l che l un de ses chiens sur lui L enfant fuit pouvant au del de la ligne d hori zon Seul son hurlement lointain t moigne d une fin tragique 3 00 04 19 Tandis que se m tamorphosent les premi res images abstraites et symboliques du film la voix off de la narratrice Nicole Garcia de ma
27. e certains signes f tiches seringue sang t tes blessures le surgissement de signes b d iques mode narra tif ellipse abandon d explication l atmosph re chromatique g n rale drap e dans des noirs et des blancs entiers travers e de domi nantes chaudes ou froides envahie de clairs obscurs et de cama eux grisaillants Dans toutes ces anfractuosit s la verbalisation n a plus cours laissant le champ libre au d veloppement fantasm de toutes les angoisses et de toutes les peurs 1 Synonyme de bulle le phylact re d signe le moyen graphique utilis pour faire parler les personnages 2 On parle de mickey mousing quand la musique colle litt ralement aux mouvements des personnages comme si elle les mimait ANALYSE DE SEQUENCE G n rique La singularit du film et notamment sa diversit sty listique et le chevauchement de ses r cits incitent analyser plusieurs moments caract ristiques ce titre le g n rique en tant qu annonce de la th ma tique et de l esth tique une s quence de l Homme aux chiens en tant que s quence transitionnelle et la Maison hant e embl matique de plusieurs dispositifs l uvre dans le film permettent cette approche 00 00 00 00 00 22 Voici un g n rique qui de plusieurs mani res annonce la couleur bien qu il ne fasse appel aucune image et ne soit construit que sur un jeu cin tique de lettres Ces lettres cr es par t
28. e et de l incongru est la r gle Le fantastique les sensations oppressantes et angoissantes les r pul sions qui en naissent proviennent de cette combinatoire sacrifiant la fois l innocence de nombreux r cits anim s et la lin arit causale de r cits aux happy ends convenus Comme les deux r cents ph nom nes Persepolis et Valse avec Bachir Peur s du noir appartient cette nouvelle g n ration de films d une po sie cr pusculaire inqui te et politique qui expriment un refoul de la terreur et du cauchemar Leurs stylisations et leurs minimalismes proches de la source cin matographique pre mi re mais proches aussi du symbolisme de l expressionnisme alle mand noncent en langage peine cod une inqui tude profonde tr s contemporaine Cette peur du noir dit la r surgence d un cin ma hant ante Qui ne reconna tra dans cette peur du noir celle que nous avons tous prouv e lorsque nous tions enfants ou celle qui de tout temps a fait frissonner l humanit soit le noir atavique de la caverne R DACTEUR EN CHEF Jean Claude Rullier responsable du p le d ducation artistique et de formation au cin ma et l audiovisuel de Poitou Charentes R DACTEUR DU DOSSIER Pascal Vimenet est auteur r alisateur critique et enseignant de cin ma connu comme l un des sp cialistes et des experts internationaux de l image d animation Il collabore aux Cahiers du cin ma
29. e se boucle le film Un homme venu du froid silhouett par un graphisme tr s stylis frappe au carreau d une maison isol e et d serte Espace d illusions optiques parfois proches d ef fets propres aux anamorphoses la maison se r v le vivante et hant e au grand dam de son visi teur que la blancheur de lhiver efface de l cran Fondu au noir FIN 16 01 13 06 G n rique de fin truff de croquis de rappel et d un pilogue vocal ironique 01 18 56 sulla v9 Cy Mage 3 2 ci ANALYSE DU RECIT Le r cit dispers KZ Ce r cit filmique dont le principe directeur appara t tr s nettement dans le d coupage peut tre d boussolant par son usage contre emploi des codes habituels mise en ab me de la th matique annonc e les peurs absence de trame bas e sur la causalit absence de personnage de r f rence h t rog n it des regards graphiques et esth tique cantonn e au sont que des arch types des spectres presque sans consistance aux identit s multiples Cette dispersion ou cette h t rog n it est la fois celle de la th matique et celle du graphisme Elle est aimant e au principe d crit Mais elle existe aussi en tant que morceaux sp cifiques de focalisation noir et blanc Ce choix fonde sa radicalit son refus de composer avec un habitus Il est proposition en soi d un autre mode de r cit quelle nature de r
30. en vivant depuis longtemps Paris malgr une grande diversit de domaines d int r t et de cr ations tudes d architecture tienne Robial participation de nombreuses revues graphiques Grand Prix de Bratislava en 1993 pour Eugenio affichiste du Festival international de Cannes en 2000 consacr par plusieurs expositions notam ment Rome et Haarlem se confrontait lui aussi pour la premi re fois au cin ma d animation puisque comme il le rappelle quand j avais col labor avec Antonioni sur le g n rique d Eros ou avec Wong Kar Wai ce n tait pas en tant que r alisa teur Son univers graphique fantastique qui l a notamment men adapter Stevenson et Collodi trouve dans Peur s du noir un terreau fertile Burns originaire de Washington 1955 o il a tudi l Evergreen College cole r put e d arts plastiques connu mondialement pour avoir parti cip entre autres la revue Heavy Metal avait notamment collabor une s rie en 1993 pour MTV Lunivers de son graphisme et de ses r cits cisel macabre stylisant les clich s concourt modeler l atmosph re d ouverture du film Quant Pierre di Sciullo parisien de naissance 1961 rien dans l original parcours qui est le sien o pr domine une pr occupation exp ri mentale qui l a men cr er en 1983 une revue 5 pur Kr ms Jerry Kramsky Romain Slocombe Mi
31. encontrer un fant me dans une maison iso l e a bas sa construction sur une bauche de croquis et de story board dont il jouait les sc nes avec son sc nariste La mise en exergue de d tails importants non pr vus initialement comme il le rapporte sont intervenus pour construire le per sonnage de l homme Quelquefois une id e s imposait apr s qu une sc ne soit finie comme le pas sage o une araign e passe devant l homme Apr s lavoir vue anim e il est devenu vident qu il fallait que l homme la tue C est un petit d tail mais qui en dit long sur le personnage Du c t de Lorenzo Mattotti le personnage du nar rateur semble se construire en creux de ce qui est pr minent au d part du r cit une bande dessi n e ant rieure consacr e l histoire de ce crocodile r alis e avec son sc nariste Jerry Kramsky Nous avons juste gard la base de l histoire et avons d velopp le th me de la peur Comme souvent chez Mattotti l ambiance qui est v hicul e par les paysages lar chitecture toutes les formes qui impr gnent notre vision aide d finir et percevoir le personnage image presque d Epinal au visage enfantin et au corps svelte ceint d un maillot ray et d un short fait pour les aventures myst rieuses Ce qui est nouveau pour Mattotti est la transformation des monologues int rieurs propres ses r cits dessi n s en v ritable voix off Nulle sur
32. et cin matographique tienne Robial son cr ateur est direc teur artistique de Canal et a r alis pour cette cha ne plusieurs habillages qui s apparentent aux g n riques Dans Peur s du noir il prend le contre pied de l esth tique kitsch color e et clean de la cha ne L espace cin matographique semble lui donner plus de libert et sa reven dication d une typographie non m ca nique r sonne comme une critique peine voil e des g n riques standar dis s que produit de plus en plus la t l vision Il rappelle qu il a eu locca sion de collaborer au lettrage de plu sieurs films d Alain Resnais notam ment La vie est un roman Lorsqu il se r clame du nom glorieux du dessi nateur et producteur am ricain Saul Bass c est toute l esth tique moderne et souvent abstraite des g n riques anim s d Hitchcock Vertigo Psychose de Preminger Carmen Jones L Homme au bras d or de Wise West Side Story ou de Dmytryk La Rue chaude qui est voqu e C est aussi indirectement celle des films d animation du studio UPA scission des studios Disney apr s guerre qui influenc s par les comics strips nerveux des ann es 50 les caricatures du New Yorker et une partie de l h ritage surr aliste visait l pure et le symbolique s ries des Mister Magoo et de G rald Mac Boing Boing Dans de nombreux films d animation o pas le g n rique est une annonce condens e du film qu i
33. hique o l vocation du fantastique et de lhor reur tiendra le haut du pav D clinaison onirique Peur s du noir tresse d cline m le et explore dans un cheveau foison nant nos peurs intimes nos peurs secr tes nos peurs d antan toutes nos phobies lentement accumul es ce sont celles qu ins crivent sur l cran les lettres d Etienne Robial celles qu gr ne la voix insolente de Nicole Garcia celles que content les nigma tiques morsures d Eric et Laura les deux personnages de Charles Burns celles de Sumako San digne h riti re des fan t mes japonais cr e par Marie Caillou celles du monstre myst rieux que dessinent dans l ombre la voix d Arthur H et le crayon de Lorenzo Mattotti celles de la maison hant e de Richard McGuire Carrousel cauchemardesque et graphique o tous nos points de rep re familiers vacillent sans cesse au rythme des m tamorphoses abstraites de Pierre di Sciullo oscillant entre le noir de la nuit et le blanc de ce qui pourrait tre la lumi re Marie Caillou Lorenzo Mattotti Pierre di Sciullo Blutch Richard McGuire Charles Burns R ALISATEURS 7 auteurs animer L une des originalit s du film est d avoir t frag mentairement concu par sept auteurs aux sensibi lit s diff rentes et de devoir son unit un seul d entre eux Une autre de ses originalit s est de reposer la fois sur des r alisa
34. ienne Robial alpha bet cutter car comme il le dit jai d coup chaque lettre dans du papier avec un cutter participent d une volont bien pr cise Je ne voulais pas que ce soit une typographie m canique mais une criture compos e de lettres aux formes al atoires Il y a trois ou quatre E et A diff rents par exemple et cest ce qui donne cette impression de dessin manuel D s louverture du g n rique suite v loce de syllabes non sensiques qui forment soudain l ensemble Prima Linea Productions nous nous saisissons en quelques fractions de seconde notre insu de la r gle de jeu implicite dans laquelle nous sommes appel s voluer Plong s instantan ment dans un univers de tension par ce qu voque le proc d des lettres d coup es la lettre anonyme menacante et le rythme haletant d clats musicaux tamis s nous sommes dans le m me temps confront s un jeu de cruciverbiste fou Le sens g t dans l occultation ou la d robade et ne jaillira fugacement perceptible que par l accumulation des fragments Ce que le contraste noir de l cran oppos aux fulgurances fugitives blanches et oranges des phon mes nous ass nent ins tant apr s instant Cet espace d un noir dense inverse radical de la neige de l cran t l visuel laquelle se confronte habituel lement tienne Robial nourrit d embl e une d so rientation spatio temporelle
35. ignature singuli re de Peur s du noir Ils alimentent le sentiment de d paysement et d tranget dans lequel nous sommes plong s Ils appartiennent trois cat gories distinctes dont deux sont sp cifiques au dessin anim Le premier qui est de toutes les mises en sc nes est l ambiance sonore Dans Peur s du noir cette bande sonore bas e sur une trame musicale rythm e gutturale et primitive constitu e par un ensemble de cordes de vents et de percussions et combin e un hyperr alisme du bruitage pouse la perfec tion les m andres et les ruptures du r cit Elle contribue hautement par ses r tentions ses jeux sur des silences brutalement rompus ses effets de r ver b rations de chuchotis de rumeurs de craquements de grincements de sifflements ou de souffles donner corps l aspect spectral du film Les deux autres plus singuliers les graphismes et la dramaturgie chromatique ouvrent sur les sentiers infinis de l tranget achevant le processus de d r alisation qu effectue le film C est dire que ces deux particularismes nous arrachent aussi s rement au r el que la t te du samourai Adjim qui jaillit de son bocal D s lors la diversit des graphismes tout en instaurant des compartimentations narratives devient exploration de fantasmagories singuli res dont le d nomina teur commun sur le plan th matique est phobique Ces fantasmagories agissent comme des r v lateurs
36. images nous gu rissent Magazine litt raire n 428 f vrier 2004 Michel Chion La langue des films francais la Proph tie des grenouilles de Jacques R my Girerd Bref n 82 mai juin 2008 y Romans r cits essais Marcel B alu M moires de l ombre Ph bus 1991 Journal d un mort Ph bus 1991 Andr Breton Anthologie de l humour noir d Le Livre de poche 2002 William Burroughs Le Festin nu Gallimard 1979 Louis Ferdinand C line Voyage au bout de la nuit Folio 1972 E T A Hoffmann Les lixirs du diable Ph bus 1979 Henry James La Redevance du fant me 10 18 1984 Stephen King Carrie Jai lu 2000 Shining len fant lumi re Poche 1999 Lautr amont Isidore Ducasse Les Chants de Maldoror Poche 2001 Andr Pieyre de Mandiargues Le Mus e noir recueil de nouvelles Gallimard 2003 Guy de Maupassant La Petite Roque et autres contes noirs Librio 2000 Bernard No l Le Ch teau de C ne Gallimard 1993 Fernando Pessoa L Heure du Diable Jos Corti 1995 Edgar Poe Nouvelles Histoires extraordinaires Poche 2006 Sade Les 120 Journ es de Sodome 10 18 1998 Robert Louis Stevenson Int grale des nouvelles 2 t Ph bus 2001 Dr Jekyll et Mr Hyde Ph bus 1994 Roland Topor Le Locataire chim rique Buchet Chastel 2003 Portrait en pied de Suzanne Folio 2001 Bandes dessin es Blutch Le Petit Christian L Association 2003 La Volupt Futuropolis Galli
37. inture li qu il tait au mouvement si novateur des nabis dont l tymologie signifie proph tes voyants mouvement auquel appartenaient aussi S rusier Bonnard ou Vuillard Et ce mouvement comme on pourrait presque le dire aujourd hui pour les travaux de Marie Caillou tait inspir par le japo nisme Serions nous entr s dans un second japonisme Marie Caillou reven dique la fois d anciennes gravures japonaises o sont repr sent s d ton nants fant mes les modernes mangas tr s stylis s et certains des travaux photographiques de son sc nariste Romain Slocombe dont les japonaiseries ont t expos es dans de nombreuses galeries D un classicisme ces r alisa teurs dessinateurs d avant garde Et quelques ouvrages Sous les pav s la plage et sous les images les livres cume bruissante de mil lions de feuillets Outre les deux grandes sources voqu es par la produc tion qui elles seules suffiraient g n rer dix films ce qu elles ont d j lar gement fait et dont la vol e nous pouvons retenir Pour Poe toutes ces Nouvelles Histoires extraordinaires pr fac es initialement par Baudelaire aux titres d j vocateurs Le D mon de la perversit Le Chat noir Le Masque de la Mort Rouge Le Diable dans le beffroi et ces mots d un pr facier moderne Tzvetan Todorov Rien d autre qu un jeu sur cette limite natu rel surnaturel Pour Stevenso
38. isser entra ner par ce flux heurt et impr visible Comme dans les r ves aussi notre raison est sid r e comme mise entre parenth ses essayant vainement de se d fendre avec indignation pourquoi l Homme aux chiens qu est ce qui justifie vraiment le r cit d Eric et celui de Sumako San et tous les autres D o vient l outrance de cette r alit Au nom de quoi devrions nous subir ce fatras d lucubrations Mais ce rationnel est vinc avant m me que de pouvoir se faire entendre et se trouve subreptice ment mis en demeure de se contenter des situations donn es et de se laisser happer par leurs dramaturgies internes leurs micro dramaturgies Tout coup nous nous surprenons craindre et souffrir l instar d ric de Sumako ou de l homme de la maison hant e Nous refusons l ineptie de nous reconna tre en eux Et pourtant nous sommes dans l appr hension de ce qui pourrait survenir Nous vivons les tensions et rel chements qu induisent tous ces r cits comme une glissade incontr l e sur des montagnes russes dont personne ne nous avait signal l existence Ce m canisme manipulatoire dont nous ne pouvons analyser le sch me qwa posteriori constitue larma ture principale de la mise en sc ne son squelette Il est par ailleurs enrichi d autres l ments qui la fois l occultent et le renforcent achevant de perturber nos sens Ces l ments sont comme la s
39. ivr de la contrainte de l adaptation Christophe Jankovic voque le second point de d part du projet Dans Loulou et autres loups nous avions travaill avec Richard McGuire sur un film d animation quasi abstrait o les personnages sont vus du dessus tandis que leurs ombres au sol permettent de comprendre l action En prolongeant cela dans nos discussions avec Richard nous nous sommes dits que ce serait passionnant d utiliser encore l animation abstraite mais pour faire peur cette fois deux indices d un ordre dif f rent Le premier essentiel annonce le point de vue commun tous styles confondus des r alisateurs de Peur s du noir principe de dis tanciation graphique sorte de point de vue z nithal qui nous plonge froidement dans l id e d un effroi mais nous en prot ge aussi vi tant toute identification directe aux protagonistes Le second l abs traction plus circonstanciel jouera dans la construction du r cit un r le de trait d union m tamorphique Blutch indication d animation Il y a encore dans cette gen se deux autres particularit s celle de faire intervenir des grands dessinateurs de bande dessin e qui nous sont proches dans la cr ation d un film d animation Christophe Jankovic et celle de constater que les auteurs qui taient tent s par la r alisation nous ont envoy leurs id es sous la forme de superbes crayon n s en noir et blanc Val rie Schermann
40. l une des singularit s de son exp rience le film instaure un rapport tr s contrast entre langage et image se situant dans un en dec et un au del du langage parfaitement adapt s la nature de son r cit voir D coupage et analyse L au del du langage Comme le faisait r cemment remarquer Michel Chion dans un texte consacr la prise de parole dans les films d animation Bref n 82 mai juin 2008 et ceci s applique Peur s du noir il y a dans nombre de films d animation qui mixent une image stylis e une voix r aliste connue La Proph tie des grenouilles Azur et Azmar Pers polis une franchise de la diction un surdimensionnement un hyperr alisme qui fait que les intonations de la voix peuvent tre plus appuy es articul es prof r es moins monocordes et naturelles que dans le film de prise de vues r elles Cette particularit qui donne aux r pliques une aura particuli re semble tr s pr sente dans Peur s du noir et d finir une ligne d horizon qui se situe au del du langage conf rant aux monologues ou aux dialogues des fonctions incantatoires ou transcendantales Alternativement mis en voix par Nicole Garcia Aure Atika Guillaume Depardieu ou Arthur H les exemples abondent Dans un registre insolent et l g rement snobi nard la voix de gorge off de Nicole Garcia en fait beaucoup par venant nous faire les complices amus s et tout la fois agac s de
41. l est parfois passionnant de diss quer dans tous les signes qui le constituent 13 14 ANALYSE DE SEQUENCE La mise mort de Carmen 00 30 05 00 31 45 l innommable se pr sente probablement dans cette s quence dessin e par Blutch de la Gitane viol e par l un des chiens du vieillard et que certains trouveront peut tre ambigu S quence de transition tr s cour te elle est par sa violence contenue la fois acm et quintessence du film Elle se situe exactement la c sure du r cit de Sumako San r cit sur un fantasme de possession diabolique que sa r alisatrice fait endosser une jeune coli re Dans son prolonge ment vient s ins rer cette nouvelle s quence o un avatar de Carmen est mis mort Mais l op ra lui m me ne nous entretenait il pas de cette funeste issue La s quence se pr sente litt ralement comme un chant du cygne o la beaut graphique de la belle Espagnole son port altier sa robe troublante sa danse l gante le tremblement sensuel de sa voix sont brutalement mis terre et remplac s par le seul grognement de la b te f roce et sans piti Version revue et s v rement et ironiquement corrig e de La Belle et la B te elle situe d embl e l pisode dans une instance mythologique et symbolique o ressur gissent en filigrane les figures du combat des vierges et du Minotaure de lange et du d mon de l inno cente et du loup et de celui de l hu
42. le la maison du diable de Stuart Rosenberg 1979 fiction d pouvante sur le th me de la possession inspir e d un fait divers r el 1974 ou pour les deux la reconnaissance de l influence des films de la Eros Aventi soci t de production britannique de La Hammer c l bre dans les ann es 50 pour ses remakes saignants de Dracula de Dr Jekyll et Mister Hyde ou de Frankenstein ent rinent l incidence importante comme pour Tim Burton par exemple d un certain cin ma de s rie B Marie Caillou cite aussi les films de genre tels ceux fantastiques de John Carpenter ou c t japonais de Hideo Nakata Ring 1998 Dark Water 2003 dans lesquels comme dans La Maison du diable de Wise 1963 admir par le r alisateur japonais les enfants sont confront s au surnaturel Elle cite encore le film japonais de Masaki Kobayashi Kwaidan 1964 quatre r cits de fant mes inspir s du folk lore traditionnel Richard McGuire l inverse souligne que le fantastique n tait pas un sujet habituel pour lui en d pit de son admiration pour celui ci et lorsqu il a t question de r aliser un film d horreur se souvient Nous avions voqu le film Histoires extraordinaires dont Roger Vadim Federico Fellini et Louis Malle avaient r alis les diff rents sketches Et il explique avoir revu durant la pr paration du film certains films qui l avaient frapp comme R pulsion de
43. les r cents proc d s noir et blanc du cin ma de prise de vue r elle reposent tous sur un principe d quivalence des couleurs traduites par le cama eu des gris Or Peur s du noir plut t que d tre un film en noir et blanc joue bien plus de ce que l on nomme en dition noir au blanc ou blanc au noir qui alternativement cr e des rythmiques particuli res Il invente et d veloppe toute une com binatoire de contrastes qui selon l espace occup par les noirs ou par les blancs propagent une forme et une chor graphie visuelles Cette stylistique renoue avec certaines exp riences et interrogations du cin ma d animation de l entre deux guerres abstraits allemands Zechanovski en URSS Bartosch en France NFLUENCES Cr atures fantastiques D s qu il eut pass le pont Les fant mes vinrent sa rencontre Nosferatu eine Symphonie des Grauens 1922 Murnau S il est un cin ma qui a entretenu une peur du noir et des recoins c est par excellence le cin ma expressionniste allemand Et il n est pas indiff rent que l un des personnages par lesquels il transite durablement Nosferatu familier aussi la bande dessin e pensez l album de Philippe Druillet Nosferatu signifie dans son intitul allemand d origine non pas le vampire mais celui qui apporte la peste Pour paraphraser le c l bre carton du film de Murnau d s que nous passons le pont de Peur s du noir les fant mes du ci
44. m decin Des traces de sang au sol une ambulance l coli re se prom ne dans un paysage paisible Elle est la petite nouvelle de la classe Elle habite une vieille maison pr s du cimeti re dit elle ce qui semble r veiller la m chancet de la classe son encontre Le cri qu elle pousse la suite des tortures que lui font subir ses nouveaux camarades la ram ne sur son lit d h pital candidate pour une nouvelle piq re soumise l injonction du m decin d aller au bout de son r ve 9 00 30 05 Une Carmen ex cute une gracieuse espagnolade Sa danse est soudainement inter rompue par les aboiements des deux chiens du sinistre vieillard Un nouveau chien est l ch La malheureuse est violent e sous le regard sadique de l homme qui repart guilleret avec son der nier chien 10 00 31 46 Tandis que nous retrouvons Sumako San la sortie de l cole qui croise dans une for t sombre la t te du fant me du Samourai dont l avaient menac e ses camarades puis se r veille de nouveau sur le lit d h pital libre enfin de tous liens Libre Rien de moins s r Dans une salle adjacente sont rang s dans des bocaux des membres de personnes qu elle conna t Son propre cerveau flotte dans une solution liquide Son pouvante fait choir un bocal d o jaillit la t te du Samourai et une substance noire qui len vahit tout enti re La voici de retour chez elle et l un de ses points de d part
45. main et du bestial A l instar de toute une litt rature des XVIIIe aux XXe si cles qui va de Sade Bernard No l Le Ch teau de C ne la s quence inqui te associant la volupt enchanteresse de l Espagnole la bestialit du chien et la cruaut du vieillard esquissant par transpa rence le th me fantasmatique du d sir de viol N est ce pas en effet le chant de la belle Espagnole qui telle celui de la Sir ne attire irr sistiblement le vieillard et ses chiens Ne se pr sente t elle pas d s lors en victime aspirante et consentante la mani re dont se pr sentait galement l h roine de La B te de Walerian Borowczyk Et la terreur que la repr senta tion sugg r e d un chien cherchant sa proie sous la jupe entre les cuisses sans d fense d un sex symbol puisqu il ne faut jamais oublier que nous ne sommes que face une repr sentation dessin e ne sublime t elle pas la fois notre fascination sid r e et notre rejet horrifi Le hors champ qui s ensuit semble d ailleurs se justifier par cette libert d brid e qui est alors laiss e notre imaginaire les cris que nous entendons sont ils de plaisir ou de terreur La sc ne qui a lieu est elle zoophilique ou carnivore Ambiguit essentielle qui a toute chance de renouveler le pr texte de notre peur Mani re peut tre aussi d exorciser celle ci et de permettre au spectateur de se poser de vraies questions sur l tre humain
46. n le titre de la pr face de son sp cialiste Michel Le Bris Le diable n est pas encore mort et de Stevenson lui m me cet extrait de R miniscences E E Mat Lo ata O Fyt idit T L HA y pai T e Tre y visiti Pat LA i ma tene p nio s aE 1 da E aaa T re a k TA a A d DI i ia Ji fe al LA ee bra i dr iyt T Teet u T i i E LIE WE dA LT a pn a 2 Am VUS i Pr Hokusai La Grande Vague de dii n Sans doute suis je n avec cette impression de je ne sais quoi faite de deux l ments accoupl s une attraction et une horreur sans borne Il suffit de jouer de r sonances qui nous entra neront tr s loin penser Henry James grand admirateur de Stevenson qui lui m me crivit La Redevance du fan t me E T A Hoffmann qui auparavant signe ses lixirs du diable notamment comment s par Freud Lautr amont portraitur par F lix Vallotton en 1898 dans Le Livre des masques qui dans Les Chants de Maldoror crit une masse informe le poursuit avec acharnement sur ses traces au milieu de la poussi re et plus pr s de nous Fernando Pessoa et son Heure du diable A tant encore Le HILL M TITTI Le j Da a 2 N NN D j f aly Hi ee i la ali LAN EX Vallotton Le Mensonge 1898 LE MENSCNGE Francisco Goya Saturne d vorant un de ses fils circa 1822 Giotto La R surrec
47. n ma viennent donc notre ren contre Et ils sont nombreux croisant la fois les territoires du cin ma d ani mation et ceux de prise de vue r elle qui tous deux au fil des interviews sont revendiqu s par les r alisateurs Quoiqu il existe une ind niable souche pri mitive dans les deux cin mas qui c t animation est celle qui va des m ta morphoses et des truquages burlesques de Blackton The Haunted Hotel 1907 et de Cohl L H tel du silence Le Cauchemar du Fantoche 1908 celle du cin ma hypnotique des abstraits allemands tels Richter Rythmus 21 1921 Ghosts Before Breakfast 1927 28 ou Fischinger Constructions spirituelles 1927 en passant par les silhouettes expressionnistes de Lotte Reiniger Les Aventures du prince Ahmed 1927 premier long m trage d animation et qui c t cin ma va de Fantomas M le Maudit les r alisateurs n en font pas mention Les r f rences qu ils citent plus volontiers appartiennent un cin ma moderne ou contemporain qui est parfois redevable cette souche initiale Bien enten du chaque r alisateur ayant une sensibilit et un parcours personnels nom breuses sont les voies par lesquelles le cin ma a chemin en eux ou les che mins de traverse que leurs imaginaires ont emprunt s Ainsi les univers de r f rence de Marie Caillou et Charles Burns semblent se recouper quand ils voquent les films d horreur qui les ont marqu s Pour Marie Caillou Amityvil
48. nes et qui joue sciem ment du croisement du dessin de bande dessin e ou d exp riences graphiques avec le dessin anim Sa capacit passer sans coup f rir d un registre figuratif un registre abstrait ou d un arch type euro p en Mattotti am ricain Burns un arch type japonais manga de Caillou est l une des figures de sa stylistique Ce faisant le film mobi lise presque son insu d autres fant mes que ses personnages r unissant dans un change nourrissant ce qui est l objet d une opposition historique ant rieure formalisme contre r alisme narra tif Faut il voir dans cette tentative de r conciliation ou du moins de dialogue des syst mes iconiques et iconoclastes une na vet ou l expression d une tendance tr s contemporaine Ne serait ce pas un signe de post modernit dont l une des caract ristiques est de tenter de dig rer des oppos s ant rieurs et dont l un des signes de reconnaissance est la mondialisation culturelle Mani re d engager une interrogation sur nos valeurs le film interroge aussi implicitement le spectateur sur son rapport symbolique la notion de noir ressuscitant dans l inventaire qu il dresse des peurs qui y sont li es nombre d arch types et activant d abord les pr ju g s Ce qui n a rien d tonnant Dans un court article de son Dictionnaire des couleurs de notre temps Michel Pastoureau propose un significatif tableau r
49. ni re distanc e et ironique entame un inventaire de nos petites et grandes peurs contemporaines 4 00 05 14 R cit en flash back et en 3D noir et blanc d ric trange homme alit qui revit son histoire de jeune garcon et sa rencontre un jour avec un curieux insecte aux formes humanoides Captur celui ci lui a chapp le laissant jusqu ce qu il fut jeune homme dans un curieux ma laise Jusqu au jour o Laura une jeune femme s duisante entre dans sa vie pour son malheur ric se rem more la m tamorphose trange qu a subie son amante jusqu ce qu il devienne son prisonnier et qu elle utilise son corps comme matrice reproductrice de l insecte rencontr jadis 5 00 22 23 Suite de l inventaire de nos peurs contemporaines peur de la mort peur de l ab sence de conscience politique 6 00 23 44 Retour la meute des chiens qui ne sont plus que trois et qui p n trent avec leur sinistre ma tre dans une ville ancienne Celui ci l che un nouveau chien sur un ouvrier Ses com pagnons pouvant s l abandonnent 7 00 25 05 Poursuite de l inventaire des peurs successivement sont interrog es celles de la m dio crit et de la puret 8 00 25 38 Premi re partie du r cit d pouvante de la jeune Sumako San sur un mode tr s manga pour enfants sages Sumako attach e sur un lit d h pital semble plong e dans un cauchemar la vue de la seringue du
50. nier crayon d coupage et outils informatiques Il avait fait sensa tion en juin 2000 pour sa proposition d habillage de la cha ne PBS Kids raflant cons cutivement sept prix durant le Festival TV Promax BDA de La Nouvelle Orl ans Il faudrait encore adjoindre ce collectif la colla boration des trois sc naristes que sont Jerry Kramsky plume de Mattotti Romain Slocombe crivain et dessinateur sp cialis sur le Japon et dont Marie Caillou dit qu elle s est inspir e de ses photos pour les sc nes de l h pital et Michel Pirus qui a paul Richard McGuire pour que le noyau cr ateur du film apparaisse en toute clart Jeu de piste Lun des int r ts de Peur s du noir est d offrir une grande palette d entr es qui peut tre sollicit e de diverses mani res Identifier et mieux conna tre le style de chaque dessinateur incitera op rer des rapprochements avec tel ou tel de ses travaux ant rieurs se renseigner sur les sources graphiques dont chacun se r clame et construire au final une g n alogie imaginaire de cet ensemble Dans cette construction virtuelle la consultation et la d couverte des ou vrages des r alisateurs notamment des derniers albums de Mattotti Chim re Blutch La Beaut di Sciullo Oui Burns Black Hole Permagel ouvrent un vaste champ o la cr ation graphique est l honneur voir Bibliographie Dans un autre registre celui de la th ma tiq
51. nterpr tation Laura Le narrateur L instituteur Eric La femme Sumako Le docteur le samoura Blutch Charles Burns Marie Caillou Pierre di Sciullo Lorenzo Mattoti Richard McGuire tienne Robial Blutch Charles Burns Pierre di Sciullo Jerry Kramsky Richard McGuire Michel Pirus Romain Slocombe Ren Aubry Boris Gronemberger Laurent Perez Del Mar George Van Dam C line Puthier Jean Michel Ponzio Jean Christophe Lie Yves Fleury Collet Pieter Vanluffelen Livia Marchand Hoel Caouissin Xiaohua Zhou Lionel Kerjean Julien Dexant Tanguy Olivier Val rie Schermann Christophe Jankovic Denis Friedman Vincent Tavier Philippe Kauffmann Val rie Schermann Christophe Jankovic Diaphana 1h25 min 35 mm noir et blanc couleurs 1 1 85 13 f vrier 2008 Aure Atika Arthur H Fran ois Creton Guillaume Depardieu Nicole Garcia Louisa Pill Christian Hecq Comme son titre l annonce Peur s du noir revendique sa trame sc naristique plurielle D s louverture un l cher de chiens f roces et agressifs dont les aboiements terrifiants se perdent bient t derri re l horizon m l s aux cris de terreur de la victime donne le ton Sublimement crayonn s par Blutch ils inscrivent le r cit dans une traque absurde et impitoyable Nous sommes dans une vocation sensorielle plut t que dans un r cit clas sique et lanc s dans un jeu de piste dangereux fantasmago rique m tamorp
52. onne nouvelle 1997 Les codes sp cifiques du cin ma d animation Souvent la question revient tant du c t des professeurs que des l ves comment analyser un film d anima tion Que doit on retenir Le travers le plus commun et qui est souvent contre productif est de ne s int resser qu sa technique et donc de pr supposer que la sp cificit du film et l analyse qu on en fera reposent principalement sur cette technique C est videmment partir d un postulat que de nombreux films d animation ont d menti dans l histoire Ces der niers ont t appr ci s avant tout en tant qu oeuvres dot es de certaines sp cificit s dont les techniques taient au service du propos Pour cette raison tout film d anima tion peut tre appr hend comme tout film avec les outils d analyse que lon emploie habituellement sc nario th matique esth tique jeu des per sonnages et mise en sc ne Mais il ne faut jamais oublier lorsqu on aborde cette derni re que les plans du film ne reposent pas sur une captation directe ou indirecte du r el mais sur une cr a tion singuli re dessin d coupage volume effets 2D 3D etc et que ces cr ations tr s subjectives cr ent ou non un point de vue et g n rent ou pas une esth tique Il en d coule que la mise en sc ne de tout film d animation d pend de la singularit de son dessin et de son esth tique autant de signes li s aux arts pla
53. oudain entre les dessins finali s s et le corps ou du moins le visage du com dien Les mots du film Nous l avons soulign le film peut tre d stabilisant pour certains l ves parce qu il repose sur un usage contre emploi des codes habituels Dans cet espace incertain les notions de personnages et de com diens tr s famili res la jeu nesse peuvent devenir des points de rep re partir desquels on reconstituera le sens qui aura ventuellement chapp Tout un travail de d cryptage et d iden tification des situations des id es de la progression des r cits est possible par tir de plusieurs sources les croquis des personnages les story boards des r ali sateurs la recomposition des mono logues ou des dialogues en les reportant par crit partir d un revisionnement priv du DVD Par ailleurs les bonus du DVD offrent la possibilit de d couvrir plusieurs s quences in situ de ce travail sur les personnages avec les com diens notamment Une mani re d observer appropriation qui se produit lorsque les com diens disent les dialogues ou les textes off de comprendre leurs h sita tions les variations qu ils envisagent avant d opter avec le r alisateur pour telle ou telle solution Arthur H De haut en bas Aure Atika Guillaume Depardieu titre d exemple voici un d cryptage d un bout de dialogue entre Laura et ric dans la s quence trait e par Charles Burns q
54. prise qu il ait choisi de diriger le timbre sourd et t n breux d Arthur H pour travailler la d sagr gation du r cit Ce que j avais cru entrevoir tait ce lui mon ami ou tait ce le monstre A moins que les deux ne soient qu une seule et m me cr ature Ce que d montre tr s bien le bonus du DVD dans une courte s quence Avec Charles Burns et Marie Caillou les processus de mise en place sont plus classiques semblant emprunter la fois aux grands sch mas du cin ma d animation et de prise de vue r elle Pun et l autre sont partis de sc narios et de story boards ainsi que d une d finition focalis e sur leurs per sonnages tr s adapt s aux techniques d animation choisies Comme le dit Marie Caillou Ce qui m int resse dans le film c est cette petite fille qui va tre confront e au surnaturel C tait l id e premi re Et l un et l autre tr s logiquement apr s avoir construit leurs personnages et leurs sc narios bas s tous deux sur des dialogues ont d se confronter un travail de direction d acteur pour mettre en forme les intentions de leurs maquettes sonores Le bonus du DVD permet de d couvrir les sc nes de r p tition entre Aure Atika et Guillaume Depardieu notamment qu on a du mal au d part imaginer dans le r le falot d Fric Ses exercices autour de la timidit de la voix de son personnage sont un parfait exemple de la ren contre qui s op re s
55. r de Black Hole roman graphique r cemment achev qui constitue son uvre ma tresse est v n r par les plus de 40 ans comme par les moins de 20 ans attir s par la noirceur de son univers le souffle de sa narration son talent prot iforme Si le point de gravit de son uvre reste la bande dessin e Burns prouve par fois le besoin d chapper cette dure discipline de coureur de fond Au gr des vents Un jour je re ois un appel Pourriez vous nous envoyer votre portfolio Nous sommes int ress s par votre travail pour une pochette d album Dans le pass je n avais jamais d croch un travail en envoyant un portfolio donc je r ponds Non je n envoie pas de portfolio Et le type me lance Mais c est pour Iggy Pop Wow OK Donnez moi votre adresse Inutile de pr ciser que la pochette de l album Brick by Brick reste l une des plus percutantes de la discographie de l Iguane Sa participation au projet cin matographique Peur s du noir participe de cette activit cr atrice irrigu e par le hasard et le d sir Je connais Lorenzo Mattotti depuis vingt ans Richard McGuire depuis longtemps aussi J admire Blutch J avais envie de travailler avec tous ces artistes Mes motivations taient la fois d essayer quelque chose de nouveau et de travailler un projet plusieurs mains Une oppor tunit rare dans le monde de laudiovisuel Les producteurs voulaient
56. rm e dans son sujet Carmen l es pagnolade de Manuel de Falla et la chaussure Fe bE t y amp LE Mi i E A k SELECTION VIDEO amp BIBLIOGRAPHIE S lection bibliographique Articles sur Peur s du noir Michela Greco Le festival a peur du noir Cinecitta 11 octobre 2007 Val rio Cappelli Film surprise un dessin anim sur la peur Corriere Della Sera 11 octobre 2007 Fernand Denis Anima m me pas peur entretien avec Etienne Robial La Libre Belgique 1er f v 2008 Eithne O Neill Illustres terreurs Positif n 564 5 f vrier 2008 St phane Delorme Peur s du noir Cahiers du cin ma n 631 6 f vrier 2008 Jos Louis Bocquet Laetitia Lacour Le grand Charles portrait de Charles Burns Le Figaro Magazine n 63 9 f vrier 2008 Joseph Ghosn Peur s du noir de Charles Burns Blutch Les Inrockuptibles 12 f vrier 2008 C cile Mury Jean Claude Loiseau Traits tr s angoissants Graphistes en tous genres T l rama 13 f vrier 2008 Thomas Sotinel Six dessinateurs par la peur ani m s Le Monde n 19613 13 f vrier 2008 ric Loret et Philippe Azoury Noirs dessins Lib ration n 8327 13 f vrier 2008 Autres articles Jos Lenzini Boris Cyrulnik l observation des animaux m a aid pour celle des humains Magazine litt raire n 428 f vrier 2004 Juliette Cerf Serge Tisseron comment les
57. s que s achevait le pr d veloppement du film En 2004 chacun s est donc attel son r cit qui tel Mattotti plan chant partir dune bande dessin e r alis e ant rieurement avec Jerry Kramsky Il Santo Coccodrillo qui tel McGuire abandonnant un premier r cit macabre La Main pour construire avec Michel Pirus l histoire de sa maison hant e qui tel Burns r explorant la th matique d une de ses premi res bandes dessin es Je reproduirai qui telle Marie Caillou envisageant deux pistes de genre s rie B am ricaine ou films d pouvante japonais avant de s engager dans un sc nario original qui tel di Sciullo cr ant par son graphisme abstrait un personnage off qui soliloquerait en voquant ses petites et ses grandes peurs qui enfin tel Blutch au d but tournait d j autour d une espagnolade Le travail d criture tant achev les premiers story boards et les premi res approches de personnages r alis s le CNBDI d Angoul me durant le Festival de la bande dessin e en janvier 2006 accueillait une exposition du work in progress Suivaient pr s de vingt mois de pr production et de production avant que le film ne soit pr sent en avant premi re au Festival du cin ma de Rome fin 2007 puis au Festival de bande dessin e d Angoul me avant sa sortie officielle en France et au Benelux en f vrier 2008 S lectionn ce jour dans plus de 40 festivals internationaux Rotter
58. sol Editions 2006 La Beaut Futuropolis Gallisol ditions 2008 Charles Burns El Borbah Humanoides associ s 1985 Big Baby Editions Corn lius 2003 Black Hole T 1 6 broch Delcourt 2006 Lorenzo Mattotti Il padiglione sulle dune d apr s Stevenson Nuages et Vertige graphic 1992 Docteur Jekyll amp Mister Hyde sc nario de Jerry Kramsky Casterman 2002 Chim re Coconino Press 2006 Richard McGuire The Orange Book Editions Rizzoli 1992 Le Livre fou avec des trous Le Seuil 1999 Pierre di Sciullo Qui Pyramid 2006 Ainsi que les albums d Alberto Breccia Philippe Druillet Winsor McCay Jos Mu oz Hugo Pratt Rodolphe T pffer Essais th oriques ouvrages d art Sigmund Freud l Inqui tante Etranget et autres essais Gallimard 1988 Le Malaise dans la culture PUF 2004 Inhibition sympt me et angoisse PUF 2005 Serge Tisseron Psychanalyse de la bande dessin e PUF 1987 Psychanalyse de l image des premiers traits au virtuel Dunod 1995 Comment Hitchcock m a gu ri Albin Michel 2003 Tintouin chez le psychanalyste dessins de l auteur Calmann L vy 2004 Michel Pastoureau Dictionnaire des couleurs de notre temps symbolique et soci t Christine Bonneton 2007 Le Noir histoire d une couleur Le Seuil 2008 Serge Fauchereau Expressionnisme Dada surr a lisme et autres ismes Deno l 2001 Jocelyn Bouquillard Christophe Marquet Hokusa Manga
59. stiques et qui m ritent d cryptage 10 PERSONNAGES COMEDIENO Du trait la voix Bien que Peur s du noir soit un film qui privil gie un encha nement de r cits fant mes les person nages qui le traversent m me lorsqu ils ont toutes les caract ristiques du zombie n en sont pas moins complexes Chacun d entre eux a une his toire un background g n alogique et est pass par une longue phase d laboration au cours de laquelle les r alisateurs ont entretenu avec eux des rapports tr s tenus avant de s impliquer aupr s des com diens qui en incarnent les voix dans une v ritable direction d acteur Aucun des personnages n assume dans le film le r le de personnage r f rentiel de h ros Mais cependant chacun d eux est susceptible de sollici ter notre imaginaire et de provoquer certaines identifications l une des sp cificit s de cette incarnation est de d pendre de six approches diff rentes Si person nage central il y a ou du moins fil conducteur il faut se tourner du c t des exp riences de Pierre di Sciullo ou de Blutch puisque la voix de la narra trice et le personnage de l Homme aux chiens sont les deux seuls personnages r currents du film La difficult laquelle se heurte di Sciullo est pro bablement la plus forte il s agit de construire un personnage c est dire de faire croire sa r alit de narrateur qu on ne verra jamais partir d un poin
60. suel de la R gion Poitou Charentes 15 rue de l Ancienne Com die 86021 Poitiers cedex T l 05 49 55 77 00 www cinema poitou charentes fr Adaptation de l dition Poitou Charentes juin 2010 Centre Images p le d ducation artistique et de formation au cin ma et l audiovisuel de la R gion Centre 24 rue Renan 37110 Chateau Renault T l 02 47 56 08 08 www centreimages fr Achev d imprimer septembre 2010 SOMMARE Synopsis et fiche technique R alisateurs 7 auteurs animer Jeu de piste Portrait Le grand Charles Gen se Un pari de producteurs D coupage s quentiel Analyse du r cit Le r cit dispers Parall lisme Mise en sc ne Chor graphie de la peur Les codes sp cifiques de l animation Personnages et com diens Du trait la voix Les mots du film Parti pris Au del en dec du langage Analyses de s quences G n rique Des g n riques La mise mort de Carmen Le double et son spectre Figure Noir et blanc Influences Cr atures fantastiques Filiations Traces et gribouillis Atelier Projection Document S lection vid o et bibliographie 10 12 13 14 15 16 17 18 20 Peur s du noir France 2008 R alisation Direction artistique Sc nario Musique D cors Animation Direction de production Production ex cutive Production d l gu e Distribution Dur e Format Sortie fran aise I
61. sumant les diff rentes fonctions et significations de la couleur noire dans la culture occidentale qui com porte les t tes de chapitre suivant 1 Couleur de la mort Enfer diable t n bres Deuil rituels fun raires Couleur du malheur 2 Couleur de la faute du p ch de la malhonn tet Contraire de la puret sale souill Couleur de la haine anarchie nihilisme fascisme totalitarisme Punition prison 3 Couleur de la tris tesse de la solitude de la m lancolie Pens es noires Mode ves timentaire Couleur de la vieillesse Couleur de la peur film roman atmosph re noirs 4 Couleur de l aust rit du renonce ment de la religion Eccl siastiques Puritanisme Bigotterie 5 Couleur de l l gance et de la modernit Costumes noirs Tenue de c r monie Design 6 Couleur de l autorit Arbitres juges surveillants Autrefois militaires pompiers policiers On com prend que ces associations automatiques puissent ventuellement nuire au film Mais sa force est pr cis ment de faire de ces peurs du noir un tendard qui en r habilitant la couleur d cri e nous clai rerait peut tre aussi sur nous m mes C est l autre facette de sa sty listique qui revendique le noir et blanc en tant que signe de moder nit en soi et qui d une certaine mani re rejoint la belle conviction de Bernard No l cit e en exergue Quelles portes cela pourrait il nous ouvrir
62. t de d part qui est plut t schizoide Rapide ment j ai pens mettre le spectateur face l ind cision d un personnage qui soliloque en num rant ses petites et grandes peurs Le personnage central est donc ind cis et soliloque et cette expression off s in carnera par la cristallisation de ses images mentales ou des images que ces mots nous sugg rent Chez di Sciullo on comprend que cette laboration du per sonnage soit pass e par un jeu d aller retour serr entre criture du texte et vocabulaire graphique attentif son ton et sa rythmique A un moment donn dans le bonus du DVD voir Bibliographie di Sciullo significativement laisse entendre sa maquette de voix off sa propre voix sur le texte d ouverture de la narration l cart entre son timbre de voix assez touff sa diction ses intonations et ceux de Nicole Garcia choisie au final est saisis sant l id e essentielle de passer d un narrateur une narratrice devient r trospectivement fon datrice de toute une partie de l ambiance du film et donne au final raison di Sciullo qui affirme que ce processus particulier n emp che pas de siden tifier au personnage de suivre ses pens es et ajoute que le noir et blanc contrast sans gris convient ce contexte Avec Blutch et son Homme aux chiens il y a une gen se qui repose plut t sur une intuition de la nature du dessin et de son futur mouvement
63. teurs aux parcours d j riches d une filmographie et sur des r alisa teurs dont c est la premi re exp rience de dessin anim Le point commun ce collectif dont l ori gine est multiculturelle est de provenir principa lement de la bande dessin e ou de se situer dans le champ des arts graphiques Il est aussi de se reconna tre dans des pratiques artistiques polyva lentes o les technologies de l informatique et le rapport aux nouveaux m dias tiennent une place importante Parmi tous ces auteurs le directeur artistique tienne Robial est le plus repr sentatif de ce mel ting pot symbolisant parfaitement l esprit dans lequel le film a t r alis Son parcours le pr dis pose l atypisme originaire de Rouen 1945 il a eu une formation artistique la fois en France Beaux Arts et en Suisse cole des arts et m tiers de Vevey Directeur artistique en 1970 pour les Disques Barclays il s est ensuite fait conna tre comme cofondateur en 1972 de Futuropolis la c l bre maison d dition de livres d images et de bandes dessin es qu il a dirig e jusqu en 1994 Cofondateur en 1984 de ON OFE soci t de pro duction sp cialis e dans la conception d identit de cha ne et d habillage d antenne il est devenu simul tan ment directeur artistique de Canal Les deux producteurs Val rie Schermann et Christophe Jankovic ont eu l intuition que ce savoir faire pouvait les aider pr senter la
64. tion de Lazare 1304 1306 19 20 ATELIER Projection Film actif Peur s du noir est compos de multiples projections dont nous entrevoyons les propagations fragmentaires dans les r cits qui le tissent dont la trame est faite elle m me de l aveu des r alisateurs de maintes peurs v cues de phobies r currentes Marie Caillou voque la perturbation que provoqua chez elle pendant des ann es la d couverte lorsqu elle tait petite d Amityville la maison du diable au point de l emp cher pendant longtemps de fermer ses volets La nuit j tais somnambule je ramenais des objets dans mon lit que je d couvrais au matin cela me troublait norm ment et contribuait au sentiment d tranget Richard McGuire explique sa phobie des lieux exigus par un accident arriv l ge de neuf ans J tais seul sur la plage et j ai march le long d une jet e faite de grands rochers J ai vu quelque chose d tincelant entre les grandes pierres et je me suis faufil pour examiner cela de plus pr s mais je me suis retrouv coinc J ai commenc paniquer Personne ne pouvait m entendre Terrifi j imaginais ce qui allait se passer la mar e montante Et Charles Burns fait part d un souvenir angoissant J avais une vingtaine d ann es je sortais avec une fille dont l ex petit ami n acceptait pas qu elle le quitte sans se battre Nous avons v cu plusieurs incidents violents
65. trospec tif Comment permettre aux l ves de s approprier et de comprendre com pl tement ce mode narratif Peut tre en revenant sur les origines du projet des producteurs notamment en allant voir du c t des nouvelles d Edgar Allan Poe et de Robert Louis Stevenson pour mettre en vidence leurs ambivalences Un autre angle d approche qui serait probablement plus familier pour les l ves consiste tablir un double parall lisme entre le film et quelques bandes dessin es con ues par cer tains des r alisateurs du film autour de cette m me probl matique du r cit ambivalent Le parall lisme se jouera alors la fois autour du mode r citatif des th matiques abord es et de l in carnation graphique Lorenzo Mattotti par exemple a notamment publi deux bandes dessin es Le Pavillon sur les dunes 1992 et Docteur Jekyll et Mister Hyde 2003 pour cette derni re co crite avec son sc nariste Kramsky toutes deux adapt es de Stevenson EMMA VISE EN SCENE Chor graphie de la peur Dans Peur s du noir macro et micro dramaturgie se chevauchent et se r pon dent Etienne Robial le directeur artistique en jouant un r le d interface entre les r alisateurs et les producteurs en tablissant le choix de la succession des segments puis diff rentes fa ons de les m langer mettant en valeur l ensemble se situe de fait comme metteur en sc ne ou du moins comme le
66. u enfant il ne s int ressait qu aux fourmis aux papillons et aux insectes les adultes tant tous dangereux ou glac s et qui ajoute que d s l enfance je crois avoir compris que tout parle Pas seulement les mots Les gestes parlent Les mimiques les v tements parlent Les mots sont souvent des pi ges de la pens e C est aussi celui de Serge Tisseron qui a largement d montr dans ses multiples publications comment l image qu elle soit de bande dessin e ou cin matogra phique joue moins comme repr sentation que comme relation moins comme contenu que comme processus d assimilation psychique structurant ou destructurant Loin d tre une source d ali nation comme le pensait encore il n y a pas si longtemps la majorit de mes confr res professeurs les images environ nantes sont un support pour la construction de notre identit et la mise en forme de notre monde int rieur 2 1 Lobservation des animaux m a aid pour celle des humains propos recueillis par Jos Lenzini Magazine litt raire n 428 f vrier 2004 2 Serge Tisseron comment les images nous gu rissent Juliette Cerf Magazine litt raire n 428 f vrier 2004 Document Ce document est typique la fois des t tonnements sc naristiques du d but ici Blutch et de l intuition initiale que l on retrouve plus tard lagu e de ses scories l homme qui crie Taxi et affi
67. ue de la peur il pourrait tre passion nant d obtenir des r actions chaud Quelles peurs voque le film Elles sont de nature si diff rentes animalit sauva gerie pr dation douleur d voration maladie accident manipulation attente cauchemar folie viol sang pulsion sexuelle contrainte perversion enferme ment nature surprise impromptu reve nants monstruosit des choses et des objets nuit gouffre d robade de l es pace d litement effacement oubli soli tude noir inconnu tranger perte mort vide soi m me que leur catalogage peut nourrir de nombreuses r flexions Enfin Peur s du noir est aussi un jeu de r sonances stylistiques avec l histoire du cin ma d animation D couvrir par exemple la d marche et certaines ceuvres d abstraits allemands tels Hans Richter ou Oskar Fischinger ou celle d un auteur contemporain qui lui aussi sollicite les imaginaires du spectateur pour les faire participer activement l interpr tation des images en mouvement tel Paul Driessen serait une autre mani re d enri chir les regards voir Bibliographie PORTRAIT Le grand Charles Dans les bureaux parisiens de la jeune maison de production Prima Linea Charles Burns dessine en coutant du rock sur son iPod Flipper un groupe post punk de San Francisco Ne pas oublier que ce dessinateur a grandi au rythme des Stooges le groupe s min
68. ui pourrait servir tant des travaux de r flexion et d analyse qu des jeux de r interpr tation Laura J voudrais pas t d ranger mais tu suis le cours de biologie de Schermann non ric h sitant Oui je je Laura nergique Ouais paceque j ai vu l bas tas tou jours l air tellement s rieux t as toujours le nez dans tes cahiers prendre des mil liers de notes elle rit exag r ment Comme j ai loup le dernier cours j me demandais si j pourrais pas t emprunter tes notes ric Bien s r Tiens J les ai justement l Laura enthousiaste Oh Merci C est super sympa J te les rends tr s vite ok Au fait moi jm ap pelle Laura 11 12 PARTI PRIS Au del en deca du langage Il y a plusieurs mani res d appr hender le film selon que l on se situe du c t d une convention cin philique simplifi e et dogma tique qui donne implicitement le primat au r alisme ou de celui d une interrogation sur l interpr tation des genres et des techniques rapport e tout le champ cin matographique le parti pris qui en r sultera ne sera pas le m me Le second terme para t plus produc tif et en accord au moins avec les diff rentes d clarations d intention des r alisateurs Bien que Peur s du noir soit un film d animation il ne fonctionne ni selon les sch mas habituels celui ci ni selon les plus usit s du cin ma Ce constat renvoie
69. ui s y superpose Souvenez vous de sa Manga tr s prolixe o les seuls visages qu il repr sente gros plan ont lair de lata UE rer a ig E Sti droit gite an pleut beam Cu qui Cuba di Aragno dem nul ds da galope M Vieux Bois zombies parce qu ils sont aveugles Dans la cohorte contemporaine les noms se pressent Dans une interview donn e au magazine t l visuel Comix de la cha ne Arte 2004 Mattotti cite quelques uns des dessinateurs qui l ont influenc Hugo Pratt et l cole sud am ricaine avec Alberto Breccia et Jos Mu oz Noir Le noir ou plut t les noirs qui entaillent et structurent certaines images du film les z brures qui d finissent certaines zones les effets de model et de volum trie qui en naissent n ont ils pas une lointaine relation avec les litho graphies et les xylographies des expressionnistes Di Sciullo conna t il les constructions et imbrications de Chillida ses oppositions si tranch es noir contre blanc Dans un documentaire qui est consacr l artiste espagnol 1981 celui ci r pond un moment donn commentant lune de ses uvres Je l appellerai peut tre la Maison de Hokusai Elle m a rappel ces maisons de Hokusa ces vagues travers lesquelles on voit le Fujiyama Une radicelle de l imaginaire effleure fugacement les monochromes noirs et stri s l outre noir de Pierre Soulages Et quelques uns de ses mots flottent un
70. une interview de lui dans le bonus DVD video 2004 La B te Walerian Borowczyk Arte video 2005 Le Festin nu David Cronenberg GCTHV 2003 Shining Stanley Kubrick Warner 2005 Mulholland Drive David Lynch StudioCanal 2006 S lection sites internet www peursdunoir lefilm com www PrimaLinea com Caillou ou Mattotti ou McGuire ou Slocombe ou Pirus ou Blutch ou DiSciullo www myspace com peursdunoir le blog du film S lection sites internet d autres sources et de cer tains auteurs www cinedoc org cin ma abstrait allemand www lightcone org cin ma abstrait allemand www lambiek net fr blutch html www mariecaillou fr www mattotti com Cin ma hant Long m trage d animation atypique Peur s du noir a simultan ment suscit lors de sa sortie en France admiration et r ticence quoi cela est il d son c t film sketches qui le rendrait sc naristiquement fragile sa mani re frontale d annoncer th matiquement sans fiori tures une couleur qui s inscrit d embl e dans un spectre r pulsif pour certains ou son audace conceptuelle qui entre BD et cin ma le situerait au del des formes majoritairement admises Les trois argu ments demandent examen Ce parti pris enfante un inqui tant r cit continuum reposant sur la diversit et les m tamorphoses de dessins satiriques o pointent des arch types pulsionnels sorte de train fan t me o le surgissement de l improbabl
71. y regarder de plus pr s le film est il tout noir ou tout blanc Comme le souligne tienne Robial Jai voulu tablir une relation troite avec chaque auteur en apportant lors de l talonnage les pigmentations chromatiques qui lui taient n cessaires Par exemple l univers japonisant de Marie Caillou utilise un noir qui tire plut t vers le vert alors que le segment avec le marquis et les chiens f roces de Blutch est restitu avec des noirs un peu roses tirant vers le brun Il est donc av r et cela peut tre consid r comme une stylistique corollaire que ce noir et blanc ne l est pas compl tement puisqu il est en quelque sorte teint par un pigment dominant selon la nature des dessins et des r cits renouant ainsi avec l un des principaux proc d s chromatiques formalistes du d but de l histoire du cin ma Dans Peur s du noir la pigmentation est sciemment utilis e comme scan sion visuelle dramaturgique En outre avons nous vraiment affaire comme cela a t crit et dit maintes reprises depuis la sortie du film un film en noir et blanc Pour la raison nonc e pr c demment et pour la seconde qui va suivre certainement pas Quont de commun en effet le film avec les films noir et blanc d antan comme La R gle du jeu de Jean Renoir ou m me avec ceux d aujourd hui comme Dead Man de Jim Jarmusch Absolument rien pour la raison tr s simple que les anciens ou

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