Réflexions autour de la souffrance sociale
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1. Collection Soci t cultures et sant Collection dirig e par Francine Saillant Cette collection propose des ouvrages portant sur divers th mes associ s au large domaine de la sant en mettant en valeur les apports des sciences sociales en particulier de lianthropologie de la sociologie de lihistoire et des sciences politiques Lihistoire et la trans formation des syst mes de sant au Qu bec et en Occident et leurs enjeux les systemes de m decine traditionnelle les mouvements sociaux et des droits des usagers les professionnels les questions thiques et politiques les probl mes particuliers des pays du Tiers Monde sont autant de ques tions sur lesquelles cette collection siouvrira Notre souhait est de permettre la compr hension des exp riences individuelles et collectives li es la sant et la maladie les cadres de gestion offerts aux popula tions aussi bien que les mod les de soins et diaccompagnement qui rejoignent les individus tout cela dans leurs particularit s et leur diver sit Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale Sous la direction de Louise BLAIS Pour Erasme Equipe de recherche et action en sant mentale et culture Les Presses de l Universit Laval Les Presses de l Universit Laval re oivent chaque ann e du Conseil des Arts du Canada et de la Soci t d aide a2. Louise Blais 17 que constitue le fait d utiliser une terminologie psychiatrique psychologique pour caract riser les ph nom nes sociaux processus qui ne pouvait aboutir qu soumettre le sociologique au psychologique alors que la relation devrait tre inverse Il s agit plut t proposait Mauss de montrer la liaison directe chez l tre humain du physique du psychologique et du moral c est dire le social Devant des situations limites celles qui d stabilisent et d sorga nisent la conscience la personnalit voire la vie elle m me l o la nature sociale rejoint la nature biologique de l tre humain il ne suffit pas disait il encore de consid rer le psychique ou le psycho organique il faut consid rer le social sans quoi on ne fait de ces tats limites qu affaire d h pi taux et d un dispositif d intervention technique la gangue qui sape les solidarit s collectives Au cours des derni res d cennies divers auteurs ont sonn l alarme sur les enjeux sociaux culturels et politiques de ce glissement Foucault par exemple a montr le r le central de la biom decine dans le projet politique d un Occident qu il d finissait comme cette petite portion du monde dont le destin violent a t d imposer ses mani res de voir de penser de dire et de faire au monde tout entier Aussi les travaux r cents en anthropologie m dicale et de la sant
3. Pr sentation 11 R f rences Carnevale F 2005 La parrh sia le courage de la r volte et de la v rit dans Pascale Michon Philippe Hausser Fluvia Carnevale et Alain Brossat dir Foucault dans tous ses clats Paris L Harmattan p 141 210 Castel R 2003 Lins curit sociale Qu est ce qu tre prot g Paris Seuil coll La r pu blique des id es Farge Arlette 2004 Sans visages L impossible regard sur le pauvre sous la direction de Arlette Farge Jean Fran ois La Patrick Cingolani et Franck Magloire Paris Bayard p 11 Foucault M 1997 Cours du 7 janvier 1976 Il faut d fendre la soci t Cours au Coll ge de France 1976 Paris Gallimard et Seuil p 3 19 Gros F 2002 Foucault Le courage de la v rit Paris Presses Universitaires de France p 166 Ranciere J 1996 La m sentente Paris La D couverte Singleton M 1994 Du leurre de la douleur Autrement Souffrances Corps et me preuves partag es n 142 p 152 161 Premi re partie LA PAROLE LES MOTS ET LES MAUX Souffrance sociale parole publique espace politique Louise Blais Le langage n est pas l exp rience Il est un moyen d organiser l exp rience Se sentir priv du langage c est perdre son propre corps Quand les mots font d faut on se dissout en une image du n ant On dispara t R CITS GRANDS ET PETITS Les derni res d cennies ont vu l largissement du
4. humaine dans laquelle les individus et les groupes subissent et portent certains fardeaux troubles et blessures li s au corps et l esprit La souffrance sociale proposent ils est issue des cons quences de la guerre de la famine de la maladie de la torture et autres violences c est dire de tout un assemblage de probl mes 16 A Kleinman V Das et M Lock Social Suffering 17 P Ricoeur La souffrance n est pas la douleur 18 M Singleton Du leurre de la douleur p 152 161 19 D B Morris Illness and culture in the post modern age p 204 20 Premi re partie La parole les mots et les maux humains qui r sultent des effets du pouvoir politique conomique et institu tionnel sur les gens de m me que des r ponses humaines aux probl mes sociaux qui sont influenc s par ces formes de pouvoir Kleinman et autres 1997 Ric ur 1994 tablit une distinction entre douleur qui est d ordre objectif et physique log e dans un organe du corps et souffrance d ordre subjectif ren voyant des affects ouverts sur la r flexivit le langage le rapport soi autrui au sens Cette distinction para t moins importante pour d autres auteurs dont Morris 1998 et Singleton 1994 pour qui la souffrance au sens de Ric ur est toujours une douleur qui se loge aussi dans un corps pensant sentant parlant Plus important dans la pens e de Ric ur est qu en l absence de rep res nosograp
5. ont propos les outils conceptuels et m thodologiques permettant de recadrer la recherche et la pratique partir de l univers de sens des gens concern s par des situations limites Ils ont ainsi pu confronter aux discours dominants d autres mani res de voir de penser de dire et de faire que rec lent les savoirs dits ordinaires ceux qui se d ploient dans les gestes de tous les jours l o la vie se vit Limpasse du contrat social nous convie un retour l ordinaire tant celui du langage que celui des pratiques quotidiennes Une telle vision implique tudes des populations de plus en plus vastes et de l autre sur un syst me de classification diagnostique de plus en plus diff renci et raffin Ainsi le Diagnostic and Statistical Manual DSM de l American Psychiatric Association APA qui constitue la base de ces enqu tes a vu quadrupler le nombre de cat gories diagnos tiques depuis sa premiere publication en 1952 le DSM IV 1994 comprend autour de 400 diagnostics couvrant une symptomatologie extr mement vari e et de plus en plus l g re 8 C L vy Strauss Introduction l uvre de Marcel Mauss 9 M Mauss Sociologie et anthropologie p 312 10 Jbid p 329 11 M Foucault Le pouvoir une b te magnifique p 370 12 Illich en parlerait en termes de savoirs indig nes dont il a pu montrer comment op raient les processus de d possession par des savoirs experts e
6. aussi celle du silence du droit au secret dans la rencontre clinique comme dans celle de la recherche On est ainsi mis en garde contre le risque qui guette les chercheurs et praticiens d imposer aux personnes une grille d analyse f t elle alternative qui par exc s d interpr tation ferait vio lence cet espace priv et intime qui est celui de la pens e en mouvement Ici la m tamorphose de la souffrance sociale passe par une parole qui exige du temps pour qu elle puisse se re construire au moyen de l espace temps d une coute par d finition relationnel de l appel la reconnaissance et la recons truction d un lien en mettant en jeu une temporalit o l on accepte le rythme de l humain et donc du monde On est loin ici de l hyperrationalit qui carac t rise les soci t s contemporaines et qui p n tre les milieux d intervention et de recherche hautement bureaucratis s et techniques LA RESTRUCTURATION LE TEMPS ET L ESPACE La deuxi me partie de l ouvrage prolonge la premi re en clairant de mani re particuli rement saisissante l enjeu temporel et spatial que pose tant pour les chercheurs et chercheures que pour les intervenants et intervenantes la transmission d une parole sur la souffrance qui d coule de la violence orga nis e qu elle soit politique ou produite par une certaine organisation des pratiques et des savoirs experts Dans le texte de Marotte la souffrance sociale est ce
7. de l application et de la mise en uvre des politiques de l tat en regard de groupes et d individus vuln rables psychia tris s assist es sociales monoparentales etc les intervenants sociaux soutient Morel disposent d une autorit d l gu e et d un pouvoir discr tionnaire r el En effet l ob issance aux prescriptions des travailleuses sociales des gestion naires de cas ou autres intervenants est requise de la part des prestataires de services ou de b n fices Leurs pratiques doivent donc tre examin es en soi 28 M Foucault Un syst me fini face une demande infinie p 367 383 29 Ibid p 370 30 S Morel Les logiques de la r ciprocit Les transformations de la relation d assistance aux Etats Unis et en France
8. de vue o le spectateur chercheur intervenant ala possibilit de voir sans tre vu et d autre part l exigence de la parole publique qui doit sa pertinence un espace public Singleton 1994 La question pos e par Boltanski est celle de savoir comment donner corps la souffrance sans descendre dans le d tail qui fait basculer la d monstration dans le local Boltanski 1993 28 Bourdieu 1993 dirait le d tail qui cloue au pilori celles et ceux envers qui on a par ailleurs de si aimables intentions Et Zola 1992 pour sa part dirait le d tail qui met en spectacle la souffrance travers des tres humili s et d pendants victimes toujours passives sans dignit tou jours en position de faiblesse et de demande d aide bref jamais acteurs producteurs de sens et d agir 21 D Fassin Lespace politique de la sant essai de g n alogie 22 P Bourdieu La mis re du monde p 13 22 Premi re partie La parole les mots et les maux Toutefois la relation entre la souffrance sociale et sa transformation aux fins d action collective n est pas sans ambigu t La notion de souffrance sociale permet d ouvrir sur le politique de deux fa ons La premi re part d une critique des modes de connaissance et de prise en charge dans le contexte des processus de bureaucratisation l uvre dans la soci t parall lement un appauvrisse ment de la d mocratie L importance accord e au diagnostic s
9. enrichi les s ances de travail Francine Saillant nous a ouvert les portes de la collection Soci t s cultures et sant qu elle dirige aux Presses de l Universit Laval Mich le Cl ment et ric Gagnon ont accept de lire l ensemble des textes 10 Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale qui constituent cet ouvrage et de signaler certaines des lignes qui les traversent Leurs commentaires permettent de red ployer la notion de souffrance sociale la lumi re de ce qu ils ont retenu et de ce qu ils en ont retiss partir des pers pectives qui leur sont propres Ellen Corin et Jocelyne Lamoureux ont form avec Louise Blais le comit de r daction interne Mais l empreinte des deux premi res sur cet ouvrage va bien au del de sa production mat rielle Ellen Corin a port et guid l quipe de recherche rasme d s ses d buts et pendant ses dix premi res ann es C est sous sa pouss e que s est impos e la n cessit d une m ta analyse de l ensemble des recherches men es par rasme Le th me de la souffrance sociale merge dans cette p riode au moyen d un travail conceptuel et analytique qu elle a suscit orient confront mis en d bat Jocelyne Lamoureux a profond ment marqu les nombreuses sessions de travail qu elle dirigeait sur les diverses versions des chapitres Son empreinte traverse parfois en creux l ensemble de l ouvrage et constitue la passerelle vers
10. et sant mentale couter ou r guler la souffrance 121 Lourdes Rodriguez del Barrio Nadine Perron et Jean Nicolas Ouellette viii Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale TROISIEME PARTIE _ L ACTION POUR UNE PENSEE METISSE Aux limites du mal souffrance sociale ou violence sociale 149 Marc Perreault Entre m pris et vie nue la souffrance sociale 185 Gilles Bibeau Paroles d rangeantes sc nes in dites subversion galitaire R flexions sur la subjectivation politique 213 Jocelyne Lamoureux COMMENTAIRES D un regard l autre La souffrance sociale entre compassion et impuissance 6 cece 243 Mich le Cl ment Une thique de la parole 247 Eric Gagnon 253 Pr sentation Louise Blais avec Ellen Corin et Jocelyne Lamoureux C est un des nombreux paradoxes de cette poque complexe que les in galit s et les injustices sociales soient la fois m ticuleusement document es et profond ment m connues Et c est sans doute d avoir consult au fil des der ni res d cennies quantit croissante de rapports de documents de statistiques et d articles scientifiques sur les d terminants sociaux de la sant et de la sant mentale et en r action au sentiment d impuissance face ce qui appara t comme un chec social qu est n e l id e de cet ouvrage collecti
11. inscrirait dans cette bureaucratisation de la soci t La seconde voie consiste ouvrir sur un langage plus cr ateur plus complexe vitant ainsi que soient rejet s dans les marges ceux qui ressentent ou subissent sans pouvoir dire Dufour 2002 L tre humain est un producteur de sens Il cherche faire sens de son exp rience afin de donner une coh rence relative ce qui l unit au monde La parole parl e crite signifi e nomme les choses elle est un acte constitutif du sujet aussi bien individuel que collectif Par parole autre nous entendons les mani res diff renci es dont les individus et groupes signifient les probl mes malaises situations ou tats limites mais aussi les gestes actions et r actions que ceux ci mobilisent dans l effort de reconstruction et qui trouvent peu d cho dans les grilles standardis es et les pratiques codifi es des milieux d interven tion D ou les d rives potentielles de certains programmes et politiques de sant et des services sociaux qui en viennent mettre en place des formes de gestion des individus et groupes les plus socialement vuln rables voire de gestion de l exclusion La l gitimation d une parole sur la souffrance signifie fondamentalement un espace temps permettant de la transcender de la m tamorphoser Il s agit d un effort pour transformer des donn es de recherche ou d intervention de mani re engager la collectivit les intervenants et
12. intervenantes compris par une mobilisation du groupe social qui op re travers une mise en communi cation du probl me et son ouverture sur l espace social et culturel Corin 1989 13 Il importe donc non seulement de voir la diffusion et au transfert de r sultats de recherche travers des rapports colloques s minaires de forma tion c est dire sur un plan discursif et argumentatif qui demeure bien s r essentiel mais il s agit aussi de jouer un r le de stimulation d une parole cr a trice une parole agissante qui s inscrit dans les possibilit s offertes par la culture et les met au travail tant dans la recherche la clinique l intervention l universit que dans les regroupements de type associatif La prise de parole a quelque chose de fondateur pour l instauration d un espace qui permette contestation et r sistance Vue de cette mani re la parole autre est en fait une condition d acc s la citoyennet une parole citoyenne Ainsi faire place une parole sur la souffrance sociale se r v le important de deux fa ons D abord en tant que contenu en laissant transpercer lunivers de sens des gens concern s par des situations limites la notion de souffrance sociale joue une fonction cr atrice sur le plan du langage et le rend plus acces sible comme outil pour se comprendre et d lib rer Elle est importante ensuite Souffrance sociale parole publique espace politique Louise Blais 2
13. lesquels des personnes psychiatris es circu lent librement Le texte montre que ces espaces pluriels de la parole analys s Paune de la notion de souffrance sociale permettent de d stabiliser l h g monie des savoirs experts mettant en jeu les relations de savoir et de pouvoir dont chercheurs et praticiens doivent tenir compte dans leurs pratiques et crits Ces espaces se r v lent aussi tre des lieux d change o les personnes qui y circulent peuvent par une parole qui se construit collectivement prendre une distance par rapport leur souffrance subjective sans pour autant l ignorer pour acc der progressivement des repr sentations des mani res de se dire des connaissances des argumentations qui permettent de se faire entendre sur la place publique et de r int grer l espace du vivre ensemble c est dire l espace de la citoyennet L am nagement d espaces pour une parole sur la souffrance incarne certes la force des rapports sociaux et le poids de la culture ambiante selon ses 6 Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale ouvertures et ses fermetures face des individus et groupes marginalis s Toute fois comme le d veloppe le chapitre de Corin Rodriguez et Guay ces exp riences limites v cues subjectivement il restera toujours un reste qui ne se dit pas ou se contredit se mi dit qui cherche une voie avant d tre une voix Et la voie est
14. partir du manque au niveau du lien social et de la vuln rabilit en termes d inscriptions relationnelles et institutionnelles provenant d un contexte extr mement contraignant COMMENT REPR SENTER LA SOUFFRANCE SOCIALE Leffort pour l gitimer un discours sur la souffrance porte n anmoins le risque de l exhiber de sorte qu elle se trouve fig e dans des repr sentations n gatives Le d fi consiste alors d passer le cadre restrictif de la description d taill e des mis res du monde pour en arriver une formulation de l exp rience de la souffrance en tant que malaise social Le theme de la souffrance 20 L Boltanski La souffrance distance morale humanitaire m dias et politique Souffrance sociale parole publique espace politique Louise Blais 21 sociale se pr sente en fait comme une sorte de coffre outils permettant de donner acc s aux conditions de production des probl mes que l on doit distin guer de leur construction savante Il s agit non pas d taler les grandes mis res du petit monde mais de l gitimer une parole qui met en sc ne et permet que s affrontent des visions du monde diff rentes voire antagonistes Mais alors jusqu o convient il d aller dans la description de d tails mis rables Dans quel tat faut il montrer les personnes atteintes de maladies ou victimes de violences et d injustices afin de susciter l attention et ultimement l engagement s
15. 3 en tant que processus qui implique l am nagement des conditions et des espaces permettant l mergence et l expression d une parole autre La question est alors de savoir comment donner corps la souffrance sans descendre dans le d tail qui cloue au pilori celles et ceux envers qui on a par ailleurs de si aimables inten tions Bourdieu 1993 Zola 1992 pour sa part dirait le d tail qui met en spectacle la souffrance travers des tres humili s et d pendants victimes pas sives sans dignit toujours en position de faiblesse et de demande d aide bref jamais acteurs producteurs de sens et d agir La r gle implicite v ritable thique du rapport l autre consiste alors ne pas montrer les autres comme on ne voudrait pas tre montr soi m me Boltanski 1993 SOUFFRANCE SOCIALE OU VIOLENCES SOCIALES LE LANGAGE ORDINAIRE SUR LE MAL PEU ORDINAIRE C est l aune de ces consid rations que nous puiserons ici dans des recher ches men es aupr s de femmes et d hommes vivant une grande pr carit sociale la suite d un divorce d une perte d emploi ou d une maladie physique ou mentale Dans nos donn es chaque histoire est singuli re mais chacune t moigne d un enchev trement d exp riences limites qui se nouent comme un tau ayant progressivement resserr les existences Parmi les th mes les plus importants qui s imposent lors de l analyse la violence subie nomm e d crite R pandu
16. ance vraie On se rappelle cet effet le sort r serv aux mots comme pauvret in galit s ou exclusion dont l usage r pandu a fini par en vider le sens et le pouvoir vocateur et donc la force mobilisatrice Castel 2003 Le recours a la notion de souffrance sociale vise en fait mettre en relief la mani re dont le contexte social et culturel peut s incorporer la souffrance individuelle en impr gner la fois la dynamique et le sens attirant ainsi l attention sur les mani res dont une soci t peut par les dispositifs qu elle met en uvre venir invalider ceux qui sont porteurs d une diff rence et dont l alt rit est marqu e sur dans et par le corps Recourir la notion de souffrance sociale rappelle aussi que faute de tenir compte du contexte social culturel conomique politique dans lequel merge la souffrance de l individu on ne peut pr tendre gu rir le mal aise La souffrance individuelle est toujours fonction d un malaise social dira Sin gleton 1994 155 Il s agit plut t et c est l le but de cet ouvrage de rendre visible et de faire jouer le savoir que d veloppent les personnes et groupes contre la pens e unique des discours scientifiques totalisants levant ainsi pour citer encore Foucault 1997 10 11 la tyrannie des discours englobants et faisant clater ce que tout le monde sait d j mais qui ne se dit plus Gros 2002 166 Bref de laisser merge
17. ans pour autant les r duire des corps ce point meurtris et afflig s que nous d tournons le regard ou devenons tout simplement aveugles leur d tresse Boltanski 1993 soutient qu un tableau qui pousse trop loin la description r aliste de d tails horribles devient r ducteur en ce sens qu il qua lifie enti rement la personne par la souffrance qui l afflige et qu il soustrait cette souffrance l individu qui s en trouve affect pour l exhiber aux yeux des gens qui ne souffrent pas Boltanski ainsi que Kleinman Das et Lock lont montr la m diatisation de la souffrance ces images de la faim extr me ou de violences inou es que l on peut voir confortablement install devant le petit cran peuvent avoir l effet a la fois de nous donner bonne conscience voire nous d sensibiliser la mani re d un vaccin tenant ainsi a distance la souffrance de l autre plus ou moins proche On soutient que le fait de trop parler de la souffrance ne peut qu mousser sa nature tranchante Une telle emphase peut m me nous rendre sourds aux cris que suscitent souvent les discours sur la souffrance Les travaux de recherche sur la souffrance sociale comportent aussi ce risque de d sensibi lisation en montrant ce que les gens peuvent endurer et en laissant supposer qu ils peuvent m me finir par s y adapter Il existe une tension permanente entre d une part l interdit de la des cription sans perspective sans point
18. e dans des travaux th oriques sur le th me de la souffrance sociale pour en saisir la fois les cueils et la valeur heuristique quand il s agit d interpr ter des donn es de recherche Sensible aux d rapages potentiels que comporte l ta lage des mis res du monde son texte cherche mieux comprendre les conditions d existence d espaces pour la parole qui seraient susceptibles de favo riser on non la re conqu te d un statut de sujet individuel ou collectif Le th me de la souffrance sociale se pr sente ici comme outil permettant de mettre en relief dans ses donn es de recherche le r le qu y joue la violence celle des violences sociales subies par des individus dans la famille dans les institutions dans la culture ambiante qui en permet ou en interdit l expression Le v ritable d fi d une parole sur la souffrance sociale voire l enjeu de sa m tamorphose r side dans sa capacit la mettre en r sonance la faire reconna tre tant dans la recherche que dans la clinique mais progressivement aussi dans l espace public c est dire dans l espace qui se rapporte aux affaires de la cit et aux mani res dont les individus font lien Le texte de Vanthuyne examine les espaces de parole sp cifiquement am nag s par des ressources alternatives en sant mentale Il s agit d organismes aux approches plurielles caract ristiques du Regroupement des ressources alternatives du Qu bec et travers
19. e envahissante et insupportable elle traverse ces vies d abord en famille souvent mais pas toujours dans l enfance plus tard dans le couple enfin dans nos institutions d aide et que l on porte comme autant de marques in visibles sur le corps La violence traverse l en semble des donn es pour t moigner de son r le d cisif dans les trajectoires des individus une violence physique ou psychique qui ronge de l int rieur la dignit humaine l amour propre la confiance en soi et en autrui les rep res qui donnent sens l existence pour c der la place progressivement la honte au sentiment d chec une certaine int riorisation de sa place et de son r le de malade je suis malade en sant mentale disait une jeune femme en se pr sentant lors d une rencontre dans l ordre des choses du social et du cosmos C est dans ce terreau que se fabriquent l identit la vision int rieure que l on a de soi en relation avec le monde dans lequel on volue une vue de soi qui 23 Il s agit de femmes et d hommes suivis en psychiatrie que nous avons rencontr s Purgence psychiatrique d un h pital sp cialis Montr al Blais 1986 ou dans divers organismes communautaires de Montr al Blais et Guay 1991 et d Ottawa Blais et autres 1998 Blais 2004 Les entretiens semi dirig s portaient sur les trajectoires personnelles et sociales les ayant conduits la psychiatrie ainsi que les trajectoires de
20. e l ouvrage porte explicitement sur la n cessit de ce virage disciplinaire pour se d tourner d un savoir expert et technicis et trouver les outils conceptuels qui nous permettent de comprendre le monde dans lequel on vit et la violence souffrance sociale qu il produit Marqu par sa m fiance l endroit de la notion de souffrance sociale une m fiance qui a nourri la r flexion des membres d Erasme tout au long de la production de cet ouvrage le texte de Perreault montre bien les pi ges qu ouvre cette notion si l on se refuse consid rer la souffrance sociale comme l envers de la violence sociale Violence et souffrance apparaissent ainsi comme les deux faces du mal selon le point de vue que l on adopte Et mal il y a O Dans les groupes fortement marginalis s avec lesquels Perreault a travaill gangs de rue toxicomanes Dans les contextes conomiques sociaux familiaux qui les ont engendr s Dans les processus sociaux et les m canismes institutionnels qui maintiennent de plus en plus de gens dans la marge et Pexclusion Parler de la souffrance sociale c est du m me coup pour Perreault voquer la violence sociale la m moire de la souffrance permettant de nommer les lieux de l injus tice sans quoi on risque de sombrer dans une psychologie du social alors que Penjeu est ailleurs 8 Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale Bibeau pour sa part et dans cette lign e s ri
21. ent d s lors qu il s agit de la notion de souffrance sociale Comme le montre le texte de Rodriguez Perron et Ouellette l h g monie en Occident du langage psychopathologique pour rendre compte d exp riences limites a pour effet de les individualiser et ainsi de les neutraliser face la collectivit aux institutions aussi bien que dans la culture Ici les psy chotropes constituent le traitement de choix avec leur charge symbolique leurs effets secondaires et leur r le central dans l organisation du travail des interve nants et intervenantes dont le rapport aux personnes se r sume trop souvent a la surveillance de la prise des m dicaments Dans ce contexte l am nagement d espaces pour la parole permet de faire ressortir l impact de ces m dicaments tant sur les gens qui les consomment que sur leurs relations a autrui il permet aussi d laborer de nouveaux discours et de nouvelles pratiques pouvant int grer des points de vue tenus la marge L ACTION POUR UNE PENS E METISSE Lues travers la lorgnette de la souffrance sociale les donn es de recherche des chapitres pr c dents r v lent en creux la violence organis e et institutionnalis e qui a travers la vie des personnes les fragilisant sur les plans la fois personnel et social L analyse faite de ces r cits et le d codage qui en est propos repose sur les perspectives venant des sciences sociales et humaines La troisi me partie d
22. ention sociale Cela suppose une coute qui porte attention non seule ment ce qui est entendu mais surtout ce qui est dit La capacit d adopter la perspective de l autre de tol rer l ambiguite et de reconna tre les significations multiples et souvent contradictoires des v nements permet une compr hension plus juste de l exp rience Enfin le retour l ordinaire exige que l on se d tache de la science m gawatt pour emprunter le terme de Morris qui sert justifier le recours l intervention lourde Celui ci propose plut t que l on se concentre collectivement sur l irr ductible caract re ordinaire et quoti dien de toute vie humaine Sa philosophie du langage ordinaire fait donc appel la reconstruction du quotidien l engagement dans la vie de tous les jours que le savoir expert tend banaliser LA SOUFFRANCE EST TOUJOURS SOCIALE Le th me de la souffrance sociale servira dans ce texte de perspective d analyse qui se veut alternative un outil de travail pour explorer le sens social au sens de Mauss de r alit s d figur es par exc s d objectivite et par l cach es Il permet d ouvrir sur un contenu qui rend visible et audible un savoir autre sur une r alit donn e afin de d mocratiser non de supplanter le savoir expert de le rendre plus accessible comme outil pour se comprendre se recon na tre se repr senter et d lib rer Dans nos soci t s hy
23. es modes bureaucratiques de repr sentation et de marquage les mots pour le dire pour se dire se pr sentent comme un des rouages de la crise de la repr sentation politique et du d ficit d mocratique plus large Ils contribueraient de ce fait l appauvrissement g n ralis de l espace public o des discours autres pour raient s laborer dans la construction de ce que Taylor appelle un horizon de sens partag Aujourd hui le raffinement des cat gories nosologiques et des mesures statistiques doit tre conjugu avec l avancement des recherches en neurobio logie et en g nie g n tique qui servent de paradigme dominant dans l tude d un ensemble de plus en plus tendu d attitudes d affects et de comporte ments Marcel Mauss avait pourtant signal il y a d j longtemps l imprudence D B Morris Illness and culture in the post modern age I Illich Un facteur pathog ne pr dominant l obsession de la sant parfaite p 8 5 A Farge Les lumi res et ses pauvres dans Sans visages Limpossible regard sur le pauvre p 35 C Taylor Le malaise de la modernit Depuis une trentaine d ann es on assiste une standardisation accrue des grilles d enqu te et d analyse dans le champ de la sant mentale Elles s appuient d une part sur un dispositif m thodologique et technologique capable d tendre les pS Te Souffrance sociale parole publique espace politique
24. et de la sant une s rie de contradictions entre 2 Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale d une part des textes officiels qui insistent sur la n cessit d articuler les poli tiques et programmes aux milieux de vie en partenariat avec les acteurs du milieu et de l autre l emprise croissante de logiques technocratiques qui d fi nissent des programmes et des mod les d intervention fond s sur la valorisation de savoirs experts laissant peu de place d autres perspectives et d autres acteurs D un c t donc inflation du discours expert sur les risques les besoins les probl mes de l autre d ficit de sens et de prise sur le monde D un c t parcellisation des connaissances sp cialisation des pratiques professionnalisa tion des disciplines de l autre beaucoup de communication et d informations mais peu de d bats Intimit publique peuple muet Pourtant partout dans les interstices de la soci t il y a de la vie On la cr e on la recr e on s y accroche travers des gestes des pratiques des rituels des savoirs des subversions qui ne rel vent pas de ce que l on appelle aujourd hui les savoirs experts scientifiques Comment alors faire parler autrement les exp riences humaines limites de mani re interpeller les politiques les institutions les intervenantes et intervenants trop souvent prisonniers de pratiques codifi es rigides et hautement administ
25. eurs des chapitres qui le composent ce livre doit son exis tence plusieurs personnes dont il importe de reconna tre les contributions plus sp cifiques Pendant les ann es de pr paration du volume le th me de la souffrance sociale fut l objet d un travail th orique et empirique de l ensemble de l quipe rasme chacun des chapitres dans leurs diverses moutures y tant soumis pour discussion valuation et d bat ce travail ont contribu des membres du Regroupement des ressources alternatives en sant mentale du Qu bec RRASMQ dont Marie Drolet et Marie Laurence Poirel de la Table de concer tation des organismes au service des personnes r fugi es et immigrantes TCRI en particulier St phane Reichold et Marie Claire Rufagari ainsi que du Parc Extension Youth Organisation PEYO dont Cynthia Martiny profes seure en carri rologie l UQAM C est dans ce travail sous forme de s minaires que nous prenions conscience des forces et des limites du th me de la souf france sociale comme perspective d analyse En cours de route Mich le Cl ment et ric Gagnon chercheurs au Centre de sant et de services sociaux de la Vieille Capitale et professeurs associ s au D partement d anthropologie de l Universit Laval ainsi que Francine Saillant professeure titulaire au D partement d anthropologie de l Universit Laval se sont joints rasme leurs r flexions g n reuses et leurs interrogations ont
26. f Car comment nommer autrement les bouleversements des derni res d cennies qui ont creus les carts sociaux et transform le visage des soci t s dites avanc es mena ant ainsi les principes fondateurs de la d mocratie Comme si les savoirs officiels et institutionnalis s de plus en plus raffin s et globalisants ne parviennent pas rendre compte de mani re reconnaissable saisissable palpable des r alit s humaines des exp riences limites et des dynamiques de r sistances qui se vivent au jour le jour dans des vies bien concr tes En effet on a l impression qu en se concentrant davantage sur les pro bl mes m thodologiques li s la n cessit que posent l valuation et la quantification des diagnostics et rep rages au sein de la population g n rale les perspectives sous tendant les d veloppements technologiques et m thodolo giques de ce dernier demi si cle ont compromis les efforts pour comprendre comment op rent les dynamiques sociales et culturelles dans la gen se et l vo lution des probl mes psychologiques Au sortir de la machine broyer des donn es sensibles c est un portrait sanitaris qui merge pour plut t marquer un ensemble toujours plus tendu de manques de risques et de probl mes tou jours plus individualis s voire biologis s et auxquels doivent r pondre tel programme telle intervention telle politique Autre paradoxe on observe sur le plan des politiques sociales
27. foss entre savoirs experts et savoirs ordinaires et la rel gation de ces derniers un statut d insi gnifiance aux sens propre et statistique La r duction de probl mes complexes un sch ma nosologique de plus en plus tendu dans ses diff renciations internes et ses applications externes voire globalisantes tend aseptiser ce en quoi sont faits les probl mes ou malaises contribuant ainsi liminer d autres sens qu ils pourraient prendre dans la collectivit On a d s lors l impression d assister un processus d usurpation de la parole et d un langage capable de nommer les choses et le r el Les probl mes semblent se multiplier l infini et de fa on exponentielle clats de malaises rig s en diagnostics de plus en plus diff renci s qui alimentent dans l air du temps l ins curit et le sentiment 1 P Auster Constat d accident et autres textes p 13 30 2 M Singleton Du leurre de la douleur p 152 161 E Corin L Rodriguez del Barrio et L Guay Les figures de l ali nation un regard alternatif sur l appropria tion du pouvoir p 45 67 16 Premi re partie La parole les mots et les maux d impuissance individuelle et collective Qui alimentent aussi les pr jug s les peurs et l ins curit dans la collectivit terreau de toute logique d enferme ment et d exclusion sociale Qui alimentent enfin un dispositif d intervention qui malgr le discours dom
28. ge contre le mythe de la sant parfaite pour penser la souffrance la douleur le mal contre le tout positif pour imaginer faire un espace social au n gatif faute de quoi le n gatif risque de resurgir sous forme de violence autodestruction terrorisme indiff rence bureaucratique Si l pid miologie sociale montre avec force le rapport entre l tat de sant mentale ou physique et les in galit s sociales c est dans les crits des sciences humaines et sociales que l on peut le mieux comprendre les enjeux du n olib ralisme de sa violence et les formes contemporaines de souf frances d origine sociale mais v cues subjectivement Lisant par dessus les paules des Agamben Honneth Renaut Foucault Hardt et Negri entre autres penseurs contemporains Bibeau nous invite poser la question de la violence des soci t n olib rales Depuis trois ou quatre d cennies soutient il nous avons chang de civilisation pour nous trouver dans une contre civilisation qui a transform les programmes de protection sociale en gestion disciplinaire de la vie des pauvres et des exclus Ce faisant on enferme les sujets toujours plus nombreux dans le m pris social et la vie nue la notion de souffrance psy chique qui risque de r duire les injustices sociales des blessures de l me de sanitariser le social Bibeau oppose l id e de la reconnaissance comme valeur qui permet de rattacher la souffrance subjecti
29. hiques la question est de savoir comment viter de se trouver devant une litanie interminable de maux Il propose ainsi d explorer la souffrance sur deux axes D une part celui du rapport soi autrui o l on s int resse la fa on dont la souffrance vient alt rer la fois le rapport soi et autrui c est dire le lien social de l autre celui de l agir p tir indiquant une diminution de la puissance d agir et la mesure par laquelle les personnes par ailleurs fort diff rentes sont affect es par des situations qui chappent leur contr le et qui ont sur elles ou sur leur groupe de r f rence un effet n gatif Dans cette perspective Ric ur 1990 368 introduira l id e de la passivit comme venant attester non pas tant un sympt me de probl me personnel mais plut t un principe d alt rit traduisant la vari t des exp riences de pas sivit entrem l es de fa ons multiples l agir humain Zola 1992 pour sa part parlera de la souffrance comme tant sociale ment construite en ce sens qu au dela de ses manifestations individuelles elle est inflig e par une soci t discriminante envers des gens ayant une diff rence quelconque l endroit desquels elle taille une place vuln rable fragile quand ce nest pas marginale Ce n est pas qu il y ait n gation des dimensions indivi duelles de la souffrance mais Zola cherche faire porter la r flexion sur la souffrance
30. hites aux tats Unis pour qui les Afro Am ricains servent d exutoire leur propre oppression En ce sens on peut se demander si la violence que subissent les femmes en soi instrument d une oppression qui doit interpeller les collectivit s ne constitue pas un barom tre de l tendue et de la profondeur d une violence sociale plus g n ralis e de classe d ethnie de croyances de conditions de sant physique ou mentale Les r cits r v lent aussi en creux des familles d origine dont le rapport au champ socioculturel plus large a souvent lui m me t marqu par une vio lence sociale ordinaire ch mage pauvret abandon marginalisation I come from a poor family a tough neighbourhood I ve seen a lot of bad stuff you know people getting wasted that kind of made me tough but I realized then a 18 ans that I was kind of withdrawn a bit depressed I ve all given up my dreams now I ve been up and down so many times I fought my way to the top and then I end up at the bottom and then I fought all the way to the top in school a job my wife So I accepted my lot in life On se rappelle ici les r flexions de Castoriadis Aulagnier propos des contrats sociaux vici s d avance qui ont t impos s des familles de psycho tiques D ou l importance proposait elle de donner un poids gal autant aux v nements qui touchent le corps des individus qu a la po
31. ick easy fixes they say your problem is too many problems and we don t deal with that that s too much We can t help you with that It s almost like they say there s no hope I found since all the times I ve went to psychiatry the biggest cure that they have for anybody is to give them a big enough pill to make them dopy enough so they won t bother anybody et comme un en trop The minute I walked into that man s psychiatrist office my life was changed In less time than it takes to bat an eyelash 50 minutes he dia gnosed me as manic depressive declared I could never marry never have children never lead a normal life That was a pretty oppressive diagnosis It totally submerged me the me that existed before I met him went into a shell a hole and kind of died a psychiatric diagnosis reduced my life experiences it limited my life it kept me from achieving my full potential I removed myself because of feelings of inferiority and nothing to contribute The problem with diagnoses they tend to become limiting classificatory and eventually you become treated as an illness rather than a person Cette citation comme bien d autres prend tout son sens quand on consi dere l observation de Corin et de ses coll gues selon laquelle lorsque le diagnostic s accompagne d un pronostic relativement n gatif les gens peuvent se sentir coinc s dans une
32. identit de patient qui fait obstacle la possibilit d int grer positivement une exp rience toujours douloureuse et de l laborer de mani re significative 25 P Ricoeur La souffrance n est pas la douleur 26 P Aulagnier Le droit au secret condition pour pouvoir penser p 219 239 27 E Corin L Rodriguez del Barrio et L Guay Les figures de l ali nation un regard alternatif sur l appropriation du pouvoir p 45 67 26 Premi re partie La parole les mots et les maux Voie royale vers la grande pauvret et l assistance sociale le diagnostic psychiatrique se pr sente travers ces r cits comme un statut social qui a t impos par tout un dispositif de soin et d assistance Une r ponse qui d passe la demande initiale sorte de take over institutionnel qui d poss de les gens de leurs capacit s autonomes ou de ce qui leur en reste et les inscrits dans des rap ports de d pendance d inf riorit et de surveillance I m totally dependent on these guys and they ve taken any initiative away I could to develop myself to get away from this dependency Apr s un certain temps pass l h pital tu perds la r alit Tu te retrouves plus dans le monde dans la soci t normale C est fini C est juste du pass Moi dans le temps pass j tais normal Mais depuis que je suis sorti de l h pital je ne suis plus le m me C est pas normal ce qui nous entoure ce qu
33. inant en ces temps de coupures est moins en r tr cissement qu en r organisation profonde la r ing nierie sorte d ag giornamento des anciennes formes de protection collective dont s tait dot l tat social travers ses services publics D un c t donc inflation du discours sur les risques les probl mes les besoins de l autre d ficit de sens et de prise sur le monde La psychobiolo gisation du langage contemporain pour d signer ce qui ne va pas dans la collectivit et le diagnostic qui sera pos en sont venus ne plus rien signifier have become meaningless sinon comme disait Illich un enchev tre ment de courbes de probabilit s organis es en profil qui servent de crit res objectifs pour d terminer les besoins en fonction d un nombre croissant de param tres financiers et administratifs pourrait on ajouter La pr gnance du paradigme psychobiologique s est accompagn e d un recul des sciences humaines et sociales dans les mani res de d signer de symbo liser de repr senter voire de penserles malaises dans la collectivit Transform es en pathologie individuelle et en probl me m dical policier institutionnel ou professionnel des r alit s sociales familiales culturelles conomiques et poli tiques sont sanitaris es pour ainsi dire Figurer et masquer masquer donc d figurer dirait Arlette Farge On peut postuler que pos s ainsi l
34. les nouveaux travaux amorc s par les membres d Erasme et dont Lourdes Rodri guez del Barrio Service social Universit de Montr al assume d sormais la direction Notre reconnaissance va galement aux organismes subventionnaires des diverses recherches sur lesquelles s appuie cet ouvrage plus particuli rement le Fonds qu b cois de la recherche sociale et communautaire FQRSC et pr c demment le Conseil qu b cois de la recherche sociale CQRS dont rasme d tient des subventions pour des quipes universitaires et communautaires depuis 1992 Enfin nous tenons remercier nos universit s et organismes d apparte nance respectifs pour les diverses formes d appui subventions internes assistanats d tudiants et tudiantes etc qu ils ont offertes la production de ce volume l Universit de Montr al le D partement d anthropologie et l cole de service social l Universit McGill le Departement de psychiatrie culturelle l UQAM le D partement de sociologie l Universit d Ottawa l cole de service social le Regroupement des ressources alternatives en sant mentale du Qu bec RRASMQ la Table de concertation des r fugi s et immigrants TCRI le Parc Extension Youth Organisation PEYO Notre reconnaissance va aussi velyne Cr peau et Manon Ouellette tudiantes de deuxi me cycle en service social de l Universit d Ottawa pour leur travail dans la pr paration de ce manuscrit
35. lle du temps suspendu de lexil de la fuite devant des violences d un autre temps d un autre lieu le temps suspendu au pr sent o la projection dans l avenir est tributaire du droit et de la loi du pays dit d accueil On est ici devant un tat de d pendance complet avec ses implications quant l estime de soi au d couragement au suicide Est ce la encore une des figures de la vie nue du m pris social dont nous parlent Agamben et d autres voir Bibeau dans ce volume qui marquent les soci t s contemporaines Rousseau et Mekki Berrada pour leur part montrent comment la recherche aupr s de r fugi s survivants d une violence organis e qui frappe le lien social ouvre un espace pour la parole et permet de briser le silence En tant que lieu de transmission du trauma la recherche peut jouer un r le de transfor mation de l exp rience tre source de reconstruction du lien social Mais elle peut aussi s av rer force de d structuration lorsque la mise en parole et le d voi lement de traumatismes donnent lieu la r p tition inutile de la douleur La recherche peut encore tre source de d structuration quand elle se voit fa onn e contr l e masqu e par des pouvoirs externes dont celui du savoir Pr sentation 7 expert travers l analyse de diverses recherches qu ont men es ces auteurs ce sont les enjeux thiques de la recherche de la pratique clinique ou de l action humanitaire qui se point
36. mine la mani re dont les politiques et programmes r pondent a ces d fis et tiennent compte de la pluralit des pratiques savoirs et expertises d velopp s par l ensemble des acteurs Ce partenariat a permis la r ali sation d une s rie de recherches qui ont donn aux partenaires des outils pour repenser les interventions et les m thodes de recherche pour agir sur le plan politique et fonder de nouvelles pratiques L quipe a galement labor des strat gies rigoureuses et exigeantes de travail en quipe Ainsi nous avons mis en place un espace permettant d int grer les diff rentes cultures communautaires et Pr sentation 3 laiss e ces derni res ann es par les travaux autour du th me de la souf france sociale notamment dans les sciences humaines et sociales nous a paru ouvrir une voie permettant de rendre compte d clairer de r interpr ter travers une m ta analyse des recherches men es depuis plus de quinze ans aupr s d individus et de groupes dont la caract ristique commune est de vivre dans la marge et la pr carit certes mais plus encore comme le dirait Arlette Farge Farge et autres 2004 11 dans la non repr sentation sociale sans visages et sans parole Pourquoi la souffrance sociale Quelle peut tre la valeur de cette notion comme cat gorie d analyse Quelle en est la valeur heuristique Qu est ce que l on entend par parole autre V re de la communicatio
37. n et de l informa tion en surabondance on est en droit de se demander si c est bien une autre parole f t elle Autre qu il nous faut Il y a l encore un paradoxe d une part la coexistence de savoirs experts de plus en plus englobants globalisants pris dans une qu te d objectivit scientifique qui aboutit un appauvrissement du sens et de l autre une intimit publique caract ristique d une culture du tout dire qui peut tre tout aussi d formante des r alit s des personnes et des collectivit s en les enfermant dans des repr sentations marqu es au sceau du n gatif ou du pathologique Le fait de parler dans ce contexte de la notion de souffrance sociale n est pas sans poser certaines difficult s et les contributions ce volume en t moi gnent La parole dont nous traitons dans nos recherches est une parole priv e cueillie travers des entretiens priv s Au moyen de rapports d articles et d autres formes de transfert des connaissances la recherche la convertit en parole publique Un tel discours qui juxtapose le caract re n cessairement intime et priv de la souffrance et l id e du social pourrait sans qu on le veuille en arriver banaliser des situations par ailleurs insoutenables Comment viter l cueil de psychologiser encore plus le social alors qu il s agit pr cis ment de ce que nous r cusions au d part Cette approche pourrait aussi ce qui est galement grave t
38. n politique dans divers mouvements sociaux anti pauvret f mi niste Elle nous am ne ainsi penser le politique et la d mocratie comme processus qui rend visibles et audibles celles et ceux qui sont exclus du regard de la pens e de la parole Pr sentation 9 Les forces d ploy es par les soci t s n olib rales conspirent certes faire des femmes hommes et enfants des sujets assujettis et les t moignages recueillis par nos recherches exposent le r le central de la violence institutionnelle familiale sociale conomique ou politique dans l expression d une souffrance subjective Par ailleurs ces m mes forces masquent aussi le fait qu il s agit de sujets agissants des sujets parlants capables d une parole d une implacable luci dit et d un irr pressible espoir Du coup on est amen se d placer se distancier du registre du besoin vers celui du d sir On ne se repr sente pas de la m me fa on l tre du besoin et l tre anim par le d sir de vivre Lun est de l ordre de la passivit et de la prise en charge l autre de l ordre de la capacit d laborer sa propre subjectivit Le sujet agissant parlant est celui qui prend position dans le d bat condition bien s r qu il existe des espaces de d bat ou plut t et l instar d Hannah Arendt des espaces de dissension pour pouvoir d battre C est cet exercice que veut contribuer cet ouvrage Au del des aut
39. on vit On per oit bien dans ces t moignages ce que Foucault appelle la mise en d pendance qui constitue le noyau dur des programmes d int gration l envers ombrageux de la s curit sociale et un ph nom ne culturel politique et social extr mement important Pourtant la d pendance n est pas en soi un mal elle est m me n cessaire voire parfois incontournable l enfance la maladie De quelle d pendance s agirait il donc qui justifie d en parler comme effet pervers Recourons encore Foucault la mise en d pendance par l int gration et la mise en d pendance par marginalisation ou par exclusion par opposition un syst me de couverture sociale qui prend en compte la demande d autonomie face des dangers et des situations qui seraient de nature inf rioriser ou assujettir l individu en tant que sujet Dans ce sens aussi Morel montre comment les politiques d int gration se fondent sur des pratiques de r ciprocit qui se mat rialisent travers le contrat Toutefois entre les deux parties b n ficiaire ou prestataire et l tat et son d l gu il y a une relation juridiquement in galitaire En l absence d un contre pouvoir organis sugg re l auteure toute vell it d instaurer des pra tiques et politiques contractuelles est en fait un simulacre La relation assistancielle est d termin e unilat ralement en l occurrence par l tat et son d l gu En tant qu agents charg s
40. perrationnelles la souffrance est une affaire priv e personnelle Trop subjective trop empreinte de trop d motions 14 D B Morris Illness and culture in the post modern age 15 On ne peut s y soustraire compl tement on ne peut jamais tre enti rement hors du savoir expert Souffrance sociale parole publique espace politique Louise Blais 19 une parole de la souffrance est engloutie par la rationalit technocratique qui s est impos e comme mode de connaissance et d organisation des soci t s modernes On ne saurait en effet que faire d un concept aussi flou pour ne pas dire pass iste qui viendrait contaminer les cat gories objectives et scientifiques sur lesquelles prennent appui les politiques et les pratiques bureaucratiques Seuls importent les sympt mes individuels perceptibles et dont l individu est responsable En r sistant l exp rience de la souffrance le langage scientifique et professionnel transforme non seulement notre fa on d y r pondre mais entra ne galement des r percussions sur l exp rience m me Les gens appren nent marginaliser la souffrance ou la taire r duisant ainsi ses significations morales culturelles politiques et sociales La souffrance n est pas par essence priv e l o la rationalit technocra tique l a rel gu e V cue et ressentie dans l intimit d un corps esprit individuel Pexp rience de la souffrance se traduit par une alt ration du
41. puis incluant celles emprunt es ou cr es pour se mouvoir dans la cit et se tailler un espace vital dans des conditions de grandes contraintes 24 Premi re partie La parole les mots et les maux se forge dans le regard d autrui en relation avec les autres dans la famille et dans les lieux publics dont les institutions L identit n est jamais une donn e fig e elle sera au contraire toujours travaill e par les contingences de la vie et les v nements sur lesquels les individus ont peu ou pas de contr le mais qui seront pour le meilleur pour le pire d terminants dans les r cits qu ils feront de leur histoire singuli re La violence subie par les femmes comme fillette ou comme pouse et de mani re soutenue sur une longue p riode jette une lumi re particuli rement crue sur la nature sexu e d une violence sociale qui se d ploie dans l intimit familiale dans la maison c tait la prison une prison sans barreaux mais une prison quand m me dira l une d elles en cho bien d autres Les crits f ministes ont largement document ce probl me depuis vingt ans il convient n anmoins de souligner ici la place que prend la violence dans les r cits que l on fait de sa trajectoire psychiatrique On peut se demander si cette violence envers les femmes et en famille nest pas la pointe de l iceberg d une violence plus large qui frappe aussi les hommes un peu la mani re des poor w
42. r es La t che n est pas simple tant on doit com poser avec l emprise du savoir officiel et institutionnalis dans la d signation de la connaissance vraie sur le monde Une telle t che est pourtant essentielle si l instar de Foucault 1997 3 19 on se rappelle que ceux qui ont t vaincus sont ceux qui par d finition on a retir la parole Non pas qu ils soient muets mais plut t qu on leur a impos une langue trang re c est dire la langue du pouvoir Carnevale 2005 Le sujet assujetti est celui dont on parle beaucoup mais que l on n entend pas Ranci re 1996 C est sur cet horizon qu est n le pr sent ouvrage propos par les membres d Erasme Equipe de recherche et action en sant mentale et culture La trace 1 Constitu e de membres actifs d organismes communautaires uvrant aupr s d immigrants de r fugi s et de personnes psychiatris es ainsi que de chercheurs universitaires de diverses disciplines anthropologie sociologie psychiatrie travail social psychanalyse science politique l quipe Erasme poursuit depuis 1992 trois objectifs g n raux Un premier consiste a relever les d fis que les multiples sources de diversit et d exclusion imposent aux services publics et aux groupes communautaires Un second veut proposer et tester des modalit s de n gociation et de partenariat entre institutions groupes sociaux communaut s et usagers des services Un troisi me exa
43. r ce que l on savait d j mais qu on ne savait plus que l on savait xX ok LA PAROLE LES MOTS ET LES MAUX Les contributions cet ouvrage ont t regroup es en trois parties La premi re porte sur le statut de la parole en l occurrence celle de femmes et d hommes dont le statut social est marqu au sceau d un diagnostic psychia trique On soutient ici que la r alit existentielle que recouvre ce dernier et qui se condense dans le malaise profond que vient engloutir le diagnostic trouve de moins en moins de r sonance dans les grilles du savoir expert En revanche il ne s agit pas de les remplacer bien au contraire par une litanie de maux qui Pr sentation 5 viendrait en banaliser leur tour voire invalider le caract re tranchant de ces exp riences Il s agit plut t partir de donn es de recherches de regarder les espaces o une parole sur la souffrance sociale puisse s exprimer sans que les acteurs la nomment comme telle On ne cherche ici ni d finir ces espaces ni offrir un mode d emploi pour pratiques exemplaires Les trois chapitres qui constituent cette premi re partie montrent au contraire quel point l am na gement d espaces pour la parole qu elle soit individuelle ou collective est un enjeu important dans la m tamorphose d exp riences souffrantes la fois per sonnelles et sociales Le texte de Blais reprend les questions la base de cet ouvrage et puis
44. rapport soi on n est plus soi m me ni avec soi ni par cons quent avec les autres La souf france est sociale dans la mesure o elle affecte temporairement ou de mani re durable le lien qui nous unit au monde et autrui Elle est sociale ensuite dans la mani re dont on parle de la souffrance ce qu il est permis ou non de dire ce qui est recevable pour une collectivit donn e une poque donn e Elle est en quelque sorte prisonni re d un milieu d une communaut des codes dominants La souffrance n existe que par les mani res de la d signer et de la faire reconna tre et entendre La souffrance est toujours sociale en ce que c est la o elle peut prendre son sens avoir une r sonance Elle est sociale dans la mani re dont les modes collectifs de l exp rience fa onnent l gitiment ou invalident les perceptions et les expressions de la souffrance On peut penser ici titre d exemple la probl matique de la violence faite aux femmes dont l expression de la souffrance qu elle engendre nest pas toujours ni partout l gitim e La souffrance porte par cons quent et in luctablement la trace de l autre qu il s agisse des mots pour le dire de mani re reconnaissable ou encore des lieux de la parole qui en permettent l expression Kleinman et ses coll gues 1997 d finissent la souffrance sociale comme une indication historique et culturelle d un aspect universel de l exp rience
45. re r cup r e comme un outil de manipulation des fins politiques institutionnelles religieuses ou autres Au del des exigences des universitaires travers des r unions mensuelles Cette double dynamique de travail alliant les projets particuliers des partenaires communautaires et leur int gration dans une probl matique commune a permis la coh rence de l ensemble des travaux d ERASME et a amen un travail commun de m ta analyse partir des donn es recueillies dans les divers projets de recherche dont les sujets et les m thodes ainsi que les modes de transfert des connaissances se conjuguent Paune de la diversit 4 Vivre la marge R flexions autour de la souffrance sociale comit s de d ontologie visant la protection des sujets humains dans les recher ches il y a aussi sinon surtout le positionnement thique des chercheurs face leurs sujets c est la qualit de la relation tablie au c ur du processus de recherche qui sera en bout de ligne garante des m canismes de sauvegarde La notion de souffrance sociale ne se pr te pas une d finition tanche et claire La souffrance s inscrit dans et est reprise par une diversit de philoso phies et de pratiques selon les cultures Singleton 1994 et les poques Il ne s agit donc pas de proposer ici un concept valise qui serait pour un temps a la mode le temps de se voir recod hi rarchis ordonn au nom d une connais s
46. sition d exclu d exploite et de victime que la soci t aurait pu imposer la famille Sans n cessairement tre nomm e comme telle par les acteurs la souf france s exprime de mani res diverses et int gre des l ments du pr sent et du 24 P Castoriadis Aulagnier La violence de l interpr tation Du pictogramme l nonc p 191 192 Souffrance sociale parole publique espace politique Louise Blais 25 pass o l on voit merger un processus qui op re sur les deux axes propos s par Ricoeur celui d une modification progressive du rapport soi autrui j tais heureuse avant j tais normal avant et celui de l agir p tir auquel conduit le premier Jusqu au moment de cassure le point culminant la goutte en trop la vie sur une corde raide qui finit par c der tentative de suicide d lit rupture psychotique d pression L exp rience d terminante parmi toutes celle qui d marque un avant et un apr s dans les r cits des trajectoires est sans aucun doute celle de Pen tr e dans l univers psychiatrique auquel la collectivit confie les blessures dont elle est en premier lieu responsable Alors que la demande initiale cherchait r soudre une situation imm diate de crise a crisis is 5 or 6 things going on all at once or one thing with a lot of implications la r ponse institutionnelle appara t la fois comme un en moins The health system likes qu
47. t des d pendances qui en d coulent Illich 1999 Le savoir des gens est pour Foucault 1997 9 un savoir local et disqualifi 15 A Farge Les lumi res et ses pauvres dans Sans visages Limpossible regard sur le pauvre p 16 18 Premi re partie La parole les mots et les maux argue Morris une ouverture sur les histoires des gens car ce sont des histoires qui permettent de contextualiser des variables par ailleurs difficilement saisissa bles C est avec des histoires que l on pense et que l on panse Les croyances personnelles les motions et les contextes culturels font ainsi de toute situation limite une exp rience la fois individuelle et sociale Mettre en mots son exp rience est une action travers laquelle la personne n gocie le remodelage ou la reconstruction de sa vie De l l importance d une thique de la narration qui toujours selon Morris s appuie sur trois concepts trangers la litt rature scien tifique l motion le dialogue et la vie quotidienne L motion est li e l interpretation que l on fait des v nements il est donc important de surmonter les pr jug s scientifiques et professionnels son endroit Le dialogue pour sa part est une affaire de tous les jours et implique la trace de l autre d o l importance d tre attentif la dimension sociale du langage contenue dans le dialogue celui de la recherche de la clinique de l interv
48. u d veloppement des entreprises culturelles du Qu bec une aide financi re pour l ensemble de leur programme de publication Nous reconnaissons l aide financi re du gouvernement du Canada par l entre mise de son Programme d aide au d veloppement de l industrie de l dition PADIE pour nos activit s d dition Mise en pages Diane Trottier Maquette de couverture H l ne Saillant ISBN 978 2 7637 8590 5 Les Presses de l Universit Laval 2008 Tous droits r serv s Imprim au Canada D p t l gal 1 trimestre 2008 Les Presses de l Universit Laval Pavillon Maurice Pollack 2305 de l Universit bureau 3103 Qu bec Qu bec GIV 0A6 Canada www pulaval com Table des mati res Pr sentations ti daria meet 1 Louise Blais avec Ellen Corin et Jocelyne Lamoureux PREMI RE PARTIE LA PAROLE LES MOTS ET LES MAUX Souffrance sociale parole publique espace politique nnene 15 Louise Blais Souffrance sociale en paroles n 37 Karine Vanthuyne Entre les mots Plis et d fauts du sens dans la psychose ononnicinnoninoninonioo 53 Ellen Corin Lourdes Rodriguez del Barrio et Lorraine Guay DEUXIEME PARTIE LA RESTRUCTURATION LE TEMPS ET LESPACE Moi les autres nous La souffrance sociale et son rapport au temps 87 C cile Marotte La transmission traumatique au cceur des processus de reconstruction 105 C cile Rousseau et Abdelwahed Mekki Berrada Psychotropes
49. ve au d sir d tre reconnu dans sa dignit individuelle ou collective Le d ni de reconnaissance et le m pris social autour desquels se noue la souffrance constituent soutient il encore le pro bl me politique des soci t s n olib rales Lamoureux conclut cet ouvrage dans un chapitre qui se d ploie en deux temps Dans un premier elle interroge les ma tres mots comme pauvret exclu sion souffrance sociale chacun ayant son histoire propre et son paradigme pour rendre compte des probl mes sociaux contemporains et le regard qu une soci t porte sur elle m me Cette mise en perspective conceptuelle et pratique montre bien les limites des mots d s lors qu ils s erigent en ma tres le terme est juste pour penser et dire la complexit des processus sociaux La notion de souffrance sociale n est pas l abri des d rives loin s en faut dans la mesure o ses origines dans la psychosociologie et ses intentions comme critique politique signalent le danger de connivence entre la m decine et le politique poussant encore plus les processus de sanitarisation du social La question que pose alors Lamoureux dans le deuxi me temps de son texte est celle de savoir comment envisager l espace et le processus de subjectivation politique dans une soci t de pauvres d exclus de souffrants S inspirant des travaux de Ranci re notam ment elle pr sente des recherches qu elle a men es sur les processus de subjectivatio
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