Murakami Ryû à travers Bleu presque transparent & La guerre
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1. d tail trivial premi re vue Ils concernent les deux personnages sur la plage mais galement diff rents personnages clefs sur l le Cette alternance permet l auteur de prendre une certaine distance par rapport son histoire et ses personnages et de faire preuve d un cynisme souvent cruel Il prend galement ainsi le lecteur dans un tourbillon qui s acc l re au fil du texte les changements de focalisation op rant aux pages G34 G57 G65 G105 G119 G126 G130 G165 G180 G184 G186 G186 G191 G191 G192 G193 G193 et G194 Il oblige ainsi s interroger tout moment sur l origine de la perception de ce qui lui est racont comme pour prouver la relativit de l interpr tation et des jugements que l on peut faire Ces accumulations se placent tr s fr quemment dans des sch mas oppositifs et refl te en cela la position des protagonistes envers le reste de la soci t Une fois encore le deuxi me ouvrage chronologiques parlant est beaucoup pus affirm que le premier en la mati re et fait preuve d une maturit stylistique plus grande et plus consciente Ainsi le recours des chiasmes des oxymores et autres structures relatives l antinomie fait foison particuli rement dans les premi res dizaines de pages de l ouvrage A la surface les algues du fond se dessine en transparence G7 joue sur la profondeur et ram ne la surface les choses que l on pensait enfouies tels les sentiments les2. ses fluides et sa rigidit cadav rique tant d cris maintes reprises Ry porte une aile sa bouche avant d tablir une corr lation entre sa relation au papillon de nuit et celle qu il entretient avec le grand oiseau noir B197 Sa place interm diaire du mangeur qui pourrait son tour tre d vor vient nourrir son d lire psychotique et apporte paradoxalement une certaine lucidit au lecteur quant la relativit de la place de l tre humain Animal de compagnie Quelques animaux de compagnie son mentionn s dans les deux ouvrages mais leur destin est syst matiquement tragique Il l est d autant plus qu il y aune analogie entre les protagonistes et ces animaux comme le montre l analogie entre Reiko allong e par terre drogu e et un chien mort B153 Le premier animal mentionn est le lapin de Meg que Meil a mang alors que Ryu aurait t pr t l accueillir qui montre de m me que la trivialit des sujets qu il aborde en regard de la mort de son amie le peu d empathie et de sentiment qu prouve le jeune homme La mort est galement ce qui attend les canid s de ce r cit fussent ils domestiqu s ou non Le colonel s invente une vie ant rieure de chien qui finit par tre battu mort et avoir la monnaie de sa cruaut et de sa perversit Qu ils soient singularis s de leur vivant ou non tous ces animaux rejoindront les chiens sans noms copulant dans la d charge et finiront par grossir le tas info
3. tre une morte lors de son escapade en voiture B103 Unn peu plus tard c est Ry qui la per oit comme mourante et recouverte de l sions tels des exanth mes sur un cadavre putrescent ou tel le plasma de cellules canc reuses prolif rantes B182 alors qu il est lui m me envahi par un froid de mort B176 B178 B179 B184 B185 B188 B189 B190 B193 B195 Il se pense d ailleurs d j mort galement Le mort qui tait en moi s asseyait sur un banc la p leur m me puis finissait par se tourner vers le moi r el qui regardait cette hallucination projet e sur l cran de la nuit B187 8 Ici le d lire psychotique se pr cise le lecteur assiste une v ritable schizophr nie du protagoniste qui se d double en un moi vivant et un moi mort Cette mort peut tre d sir e et auto inflig e c est le cas de la tentative de suicide d Okinawa et de Van Gogh dans le programme qu il regarde B173 la conclusion qu Okinawa en tire est tragique La vache il a gagn lui dit tout bas Yoshiyama Elle peut galement tre volontaire mais exig e de quelqu un C est le cas de Lili lorsqu elle demande Ry de la tuer sur le tarmac de la base a rienne Tue moi Ry Vite vite B110 puis le cas de Ry dans son d lire final J aimerais que tu me tues B195 Tous ces th mes ne sont pas isol s ils se c toient et se chevauchent continuellement tout comme le chien que le colonel a
4. associ une certaine lucidit bien que celle ci ne se manifeste que sous l effet de la drogue Cette derni re sc ne fait office de paroxysme au d lire de Ry et Lili et contraste avec une juxtaposition de couleurs B107 aux dominantes de rouge et de blanc le blanc de l cume qui sort de la bouche de Lili le rouge de son sang et des traces de rouge l vres dont elle s est bariol e B109 ou encore la barre de fer chauff e blanc qui reprend ces deux couleurs B108 La guerre au del de la mer pousse le proc d plus loin encore Les couleurs vives vert rouge ivoire orange palette de maquillage et de peinture s accumulent G6 dans le paysage la palette de maquillage ou encore la palette de peintures Elles sont second es par un scintillement dont l accumulation exag r e en devient g nante visuellement pour le lecteur le forme stylistique venant renforcer le fond ou contenu explicite de l uvre argent brillent des gouttes sac en vinyle transparent cette plage clatante bracelet cercl d or poussi re scintillante bact ries phosphorescentes reflet du soleil ces milliards de points lumineux tincelante les grains de lumi re les toiles d un plan tarium la mer brille regorgeait de lumi re ruisselait de lumi re et ce pendant plusieurs pages G6 G10 Le lecteur est abasourdi par une telle accumulation a
5. Le soleil a cess de flirter avec la mer G196 au son des cloches de l glise dont les derniers sons r sonnent tel un glas pour la ville p 193 10 Bibliography Murakami Ry 1976 FR V 7 lt HILL 7 2 Bleu presque transparent Ed Picquier 1977 HDZ 5 CHAR E ES La guerre commence au del de la mer Ed Picquier 2000 Japan s lost generation
6. Murakami Ry travers Bleu presque transparent amp La guerre commence au del de la mer Introduction Bleu presque transparent et La guerre commence au del de la mer sont les deux premier romans du Murakami Ry nosuke dont le pr nom dans son usage a t raccourci sa premi re syllabe Ecrits respectivement en 1976 et 1977 ils s inscrivent dans la continuit l un de l autre partir d une sc ne clef o Ry et Lili les deux protagonistes partent en voiture drogu s Cependant si la th matique est r currente d un ouvrage l autre son traitement diff re quelque peu comme s il y avait eu une volution de la vision de l auteur et ou dans son style qui s exprime travers les diff rents narrateurs A la focalisation interne de Ry dans Bleu presque transparent fait suite une multiplicit de focalisations dans La guerre commence au del de la mer aspirant le lecteur dans un tourbillon de perceptions auquel contribue galement un style qui semble avoir volu depuis la premi re uvre Ainsi la deuxi me uvre fait davantage office d une compilation de sc nettes aux personnages h t roclites rarement r currents d une histoire l autre mais suffisamment pour maintenir une homog n it d ensemble Ces deux romans sont donc tr s proches mais paradoxalement absolument diff rents Ils suivent un gradient glauque avilissant pour l esp ce humaine et m me morbide dont le premier opus semble
7. avoir pour fonction de pr parer le lecteur et le second en serait l apoth ose I Une th matique commune Alors que Bleu presque transparent voque la jeunesse d cadente de Tokyo La guerre commence au del de la mer part d un couple sur une plage qui observe l horizon une le en pleine d ch ance ou s encha ne les focalisations sur les diff rents protagonistes cr ant de ce fait une mise en abime une histoire dans l histoire Point commun aux deux ouvrages une th matique assez noire est tiss e et entretenue tout au long des diff rentes histoires dont les personnages sont bien souvent victimes A Animaux Les animaux sont omnipr sents dans ces deux ouvrages de Murakami Si ce ne sont pas les m mes d une histoire l autre ils ont pourtant un r le similaire il s agit principalement d une m taphore de l tre humain ou plus particuli rement des protagonistes Dans Bleu presque transparent d sormais abr g B et suivi de du chiffre correspondant la page de la r f rence suite l agression de la dame dans le m tro on peut lire Yoshiyama continue d insulter voix basse les voyageurs qui nous regardent de l autre wagon travers la vitre de la porte de communication comme s ils taient au zoo devant une cage B134 Quatre grandes cat gories se d gagent les insectes les poissons et autres animaux de la mer les oiseaux et les animaux domestiques Poisson et mollusque an
8. cit Murakami d voile lui m me sa strat gie narrative Ces d sordres bruits odeurs couleurs G153 autant d impressions qui collent la peau des personnages et du lecteur Ce dernier se retrouve contamin par le malaise ambiant pris au pi ge de cette ville en plein chaos dans laquelle on peut voir une Sodome Gomorrhe moderne vou e la souffrance et la destruction Vient alors le th me de la futilit et de l absurdit de l existence m me dans ces conditions comme ces soldats japonais aux plaies ouvertes suintant de sang et de pus qui se pr cipitent dans la mer aux yeux aveugles tourn s dans la direction du soleil levant tout en s inclinant pour une derni re salutation leur empereur B184 Tous ces fluides qui constituent et d finissent les tres humains retournent un fluide plus vaste la mer et m nent une situation absurde quoi sert de vivre si c est pour mourir au nom d un empereur pour un pays aveugle Ce sont l les bases de ce que Murakami appelle la g n ration perdue dans un essai intitul Japan s lost generation publi en 2000 reprenant ainsi le terme forg Paris par Gertrude Stein pour d signer la g n ration de l entre deux guerres La conclusion de ces deux opus est bien pessimiste tous les tes vivants seornt rattrap s par la masse il seront agglom r s comprim s et ne formeront plus qu un une seule masse G193 car le
9. court ou encore celle de la femme du jeune garde qui retourne chercher le b ton oubli par son fils Lorsque les personnages n ont pour une raison ou une autre plus la possibilit de s adonner de telles pratiques les fantasmes prennent le relai C est le cas de la m re du tailleur W136 comme s il fallait toute fin avoir une activit sexuelle r elle ou virtuelle pour se sentir vivant Les animaux copulent galement notamment les chiens de la d charge G27 au milieu des cadavres et ne se diff rencient de ces derniers que par cet acte de copulation qui est sens amener la vie C Maladie amp Mort En effet la vie et la mort sont des sujets centraux de ces deux ouvrages Outre l h catombe dans la ville au del de la mer trois amis des personnages principaux sont d c d s pr matur ment Le premier tait malade du foie B182 Meg la jeune fille de quinze ans a t br l e vive B123 et lami qui avait attrap une insolation G130 Tous sont d c d s dans d atroces souffrances et pourtant prenant exemple sur son ami Ry exprime une n cessit de souffrir pour trouver un sens la vie et l appr cier B189 tout particuli rement lorsqu il observe son bras ensanglant B199 A d faut de souffrir il arrive que les personnages se croient mort ou en train de mourir ou d faut qu ils projettent cette impression sur d autres personnages C est le cas de Lili J ai froid j ai l impression d
10. et animal ne peut tre vu par les autres personnages de Bleu presque transparent Dans ce contexte de drogue quotidien et m me si Ry nen a pas consomm lorsqu il le voit il fait figure d hallucination psychotique Il est d ailleurs troitement li aux d lires de Ry quand celui ci l identifie comme L oiseau qui a d truit ma ville B196 C est donc un oiseau destructeur qui plane au dessus des jardins de l h pital B201 pr t se repa tre des mourants semble t il que Ry veut son tour d truire B197 Cet oiseau issu du subconscient de Ry est finalement autodestructeur puisqu il engendre sa c cit il repr sente cette partie de lui qui ne veut plus voir la r alit et semble compl tement le dominer Cet oiseau trouve cho dans La Guerre commence au del de la mer aupr s du colonel Alors qu il radote ses lucubrations s inventant des vies ant rieures et se complaisant dans cette mythomanie il regarde par la fen tre et dit Dans le temps les oiseaux m effrayaient ceux de la nuit G45 et pr cise sa pens e en voquant L oiseau invisible de la nuit G46 oiseau qui semble rattraper tous ceux qui s inventent une r alit alternative quand la v rit est trop lourde porter Papillon de nuit et autres insectes Murakami se sert des insectes scarab es B105 B201 ou autres B103 pour d crire les foules notamment celle du concert o Ry se rend avec ses amis J ai l impressio
11. ffirme avoir t dans une autre vie qui p n tre de son sexe les 5 entrailles de la poule jusqu ce qu elle en meurt les animaux le sexe la mort et leurs variantes semblent constituer les th mes de pr dilection pour Ry Murakami afin de nous livrer sa vision de la soci t japonaise du milieu du XXe si cle le tout dans une souffrance digne des plus p nibles herm neutiques II Divergences de fond et de forme un ouvrage plus pouss Parce que ces ouvrages constituent les deux premi res uvres de Ry Murakami La guerre commence au del de la mer a souvent t d crite comme une suite Bleu presque transparent Du fait de cette sc ne charni re de certains th mes r currents cette affirmation se v rifie Cependant ces uvres ne sont pas similaires loin s en faut tant stylistiquement que dans le d veloppement de leurs th mes A Couleurs Alors que Bleu presque transparent affiche une couleur d s son titre l explication de ce dernier figure dans les derni res pages du roman quand Ry d crit le bout de verre il tait d un bleu illimit presque transparent oui B202 Ce bleu rappelle galement celui des veilles de Lili B104 et fait cho la sc ne sur la piste de d collage Quelques secondes la lueur bleu p le de l clair tout devient translucide Le corps de Lili mes bras la base les montagnes le ciel et ses nuages tout est frapp de transparence B110 Il est
12. imaux de la mer Murakami aborde le th me des choses qui flottent B100 et compare Lili un poisson dans un zoomorphisme assez inattendu ses bras ouverts sont des nageoires son corps ondule comme un reflet les gouttes de pluie lui font des cailles luisantes B101 Il confirme en cela la m taphore voqu e Le poisson qui est un l ment central de La Guerre commence au del de la mer abr vi G selon les m mes modalit s que pr c demment rev t alors une signification toute particuli re Cet animal si exceptionnel de par sa taille et ses couleurs qu il est pris pour une baleine par Fuini G65 est sacrifi sur l autel de la f te communale Il est attendu r v r la fois l origine de toute la graisse et du sang qui envahissent la ville g n rateur d un orgasme collectif mesure qu il est p n tr des sabres qui le d coupent et l origine de l hyst rie collective et du carnage qui va suivre Le choix du poisson plut t que tout autre animal est li la position de la ville au del de la mer et le poisson est ce qui va et vient entre ce monde en guerre imaginaire ou r el et la r alit des deux protagonistes sur la plage Il est ce lien qui touche les deux espaces et qui les rapproche prouvant de ce fait que la situation si invraisemblable de l autre c t de la mer est plus proche que lon ne pourrait le croire La m duse avec laquelle Fuini joue G186 n est qu une preuve sup
13. ise Ce microcosme est repr sentatif d une soci t d cadente pour l auteur l homme en b quilles et celui avec le cou trop raide semble souffrir d une trop grande rigidit t moignant d une psychorigidit qui se mat rialise physiquement B169 l instar de la soci t dans laquelle Ry n arrive pas s ins rer M me les femmes enceintes arrivent l h pital la queue leu leu bien rang e en descendant du bus semblant formater leurs futurs enfants avant m me les premiers stades de la vie B169 Ce lieu de soin ne semble m me plus en mesure de sauver les gens puisque la grand m re de Ry qui est entr e l h pital pour un cancer y a d velopp une allergie aux analg siques se couvrant d ecz ma et de croutes tout comme la m re du tailleur G130 Cet ersatz de la soci t petit chelle fait donc pire que mieux fasse aux patients dans le besoin cr ant de nouveaux probl mes et incapable de g rer les probl mes existants Les gens y sont alt r s d figur s et le seul personnage que l on voit en sortir Okiyama le fait avec le mode d emploi du parfait suicide pour sa prochaine tentative L cole participe au m me formatage Les salles de classe qu on voit travers les fen tres semblent pr tes nous d vorer Les tables les chaises rang es en bon ordre me font penser des fosses communes creus es pour recevoir les cadavres en vrac de soldats inconnus B103 L ordre tabli par la
14. l ne le fait jamais Il veut rentrer dans le moule B145 B150 il veut acheter une maison une voiture un chat se ranger trouver une place autant d l ments tr s st r otyp s que Kei d crit cela comme des conneries La sc ne est path tique avec des pleurs altern s et beaucoup de m pris entre Kei Yoshiyama et Kazuo et terminera dans une violence extr me d faut de compr hension C est l ce qui caract rise Bleu presque transparent beaucoup de violence qu elle soit verbale sexuelle physique en g n rale d faut de compr hension Cette incompr hension est li e un manque de rep re et m me parfois une inversion de ceux ci Le bien et le mal ne sont plus aussi clairement d finis comme le prouve le colonel en parlant de la mort de son ma tre lors de sa vie ant rieure La mort de cet homme bon m a rempli de tristesse Cet homme zoophile qui attouchait son chien lui aspergeait le sexe d alcool fort et sacrifiait une poule aux d sirs de ce dernier est devenu un homme bon tout est question de point 9 de vue Mieux vaut alt rer la r alit ou d faut ne pas la voir en brisant notamment les miroir qui pourrait donner voir une r alit insurmontable G153 C est dans cette logique que le r ve reste uen chappatoire comme la ville que Ry a invent mais peut aussi devenir un v ritable pi ge me donnant l impression de m ab mer dans un r ve profond d o je ne pourrais remon
15. n d tre en t un matin dans une for t pleine de cigales chantant l unisson B119 C est comme cela qu il voit les spectateurs les gens qui l entourent qu ils soient en marge de la soci t ou non Ces insectes sont souvent associ s avec la mort et de l indiff rence celle ci Il s agit de la mort de Ry B108 qui se voit mourir pendant que les insectes dorment paisiblement refl tant l indiff rence de la soci t l gard de ceux qui ne rentrent pas dans le moule ou mort de l insecte lui m me B185 tu sans h sitation par Lili et r duit un point noir insignifiant qui finit dans un cendrier prouvant de ce fait qu elle n est pas si diff rente des premiers insectes qui laissent dispara tre leurs cong n res sans sourciller Dans La guerre commence au del de la mer ces insectes sont plus pervertis et pervertissent leur tour ils pondent leurs ufs dans d autres insectes dont les larves se nourriront G19 et sont m me putr phages W19 Bleu presque transparent agit en cela comme un pr ambule cet ouvrage il pose l analogie entre ces insectes et la soci t pour que Murakami puisse d autant mieux d crire leur bestialit Le seul insecte tre singularis est le paillon de nuit qui appara t dans les derni res pages de Bleu presque transparent Ry l crase B175 avec le dos d un recueil de Mallarm seule r f rence litt raire cit e Il r apparait B180 B189 B191 B197
16. paraison par Lili entre Ry et le livre qu elle lit il organise des partouzes pour riches avec ces femmes tout comme toi non B181 La jeune femme se livre aux fantasmes du colonel Les partenaires sont multiples de toutes origines am ricain japonais de tous genres et les pratiques aussi vari es co ts buccaux vaginaux anaux recours des objets comme le militaire avec sa japonaise venue dans le souvenir de Ry B193 4 Beaucoup des sc nes assez crument d crites B184 rel vent clairement du sadomasochisme et l acte sexuel est g n rateur de souffrance que ce soit pour Reiko qui bl mit et se griffe la poitrine de douleur B56 la japonaise poilue qui semble en vouloir Ry pour la situation dans laquelle elle se retrouve B193 ou encore Ry lui m me qui devient pur objet sexuel et qui prouve une aversion pour l odeur du sperme de Jackson qu il pense sentir bien des jours apr s La nuit o Jackson and Ludiana m avaient chevauch et o j avais vraiment eu l impression d tre une poup e jaune B183 Le sexe est alors avilissant mais ce n est pas pour autant que les protagonistes d sirent mettre fin ces pratiques comme l explique Moko dont la douleur r siduelle lanus ne l emp che pas de trouver Jackson quand m me gentil car il lui a offert une charpe de marque Le rapport sexuel n est d ailleurs pas toujours consenti comme l agression de la femme dans le m tro qui tourne
17. pl mentaire de cette proximit entre les deux mondes et les deux situations Oiseaux de jour oiseau de nuit Si le r gne des poissons joue un r le majeur dans La Guerre commence au del de la mer et plus secondaire dans Bleu presque transparent celui des oiseaux son inverse en un sens une r partition oppos e Ils apparaissent en groupe lorsque ce sont des animaux diurnes et sont d finis comme les petits oiseaux gris B202 Ils sont assez proches des humains Ces derniers les nourrissent plus ou moins bien aux miettes de pain jet es par les voisins am ricains de Ry B135 B169 s oppose l ananas rance que ce dernier leur laisse au pied de l arbre B12 B136 B196 B202 et dont ils ne veulent gu re Ce concentr d aigreur provenant des humains demeure mais il a raison des oiseaux qui finissent par dispara tre Pas un oiseau en vue B169 Alors que dans la sc ne finale Ry est accroupi dans l herbe pour attendre les oiseaux B202 il envisage des les recouvrir ainsi que l ananas de son ombre qui s allongera B202 Il se place ainsi en position dominante par rapport ces oiseaux ce qui n est pas le cas pour le grand oiseau noir Ce dernier est d crit comme g ant gigantesque immense B196 c est lui qui semble recouvrir Ry de son ombre et qui est en position de force Le lecteur ne peut savoir s il y a une part de r alit dans les propos du narrateur cependant c
18. plus vils et les doigts d licats d une femme qui crase dans sa main une cervelle humaine G19 associe l image gracile et fragile l un des premiers actes de barbarie de l ouvrage Le lecteur tombe d autant plus haut que l amorce de la phrase tait positive renfor ant le mal tre ambiant d gag par l ouvrage Tout semble mener une mort in luctable des plus douloureuses Chaque r pit que l auteur offre n est que pr texte aller plus loin dans la cruaut et chaque fois que le lecteur pense en avoir touch le fond l auteur lui prouve qu il n en est rien IHI Peinture ou satire sociale Le malaise ressenti par le lecteur est un miroir celui que semblent ressentir les diff rents narrateurs et Ry Murakami manie avec maestria fond et forme afin de positionner ses lecteurs dans les m mes conditions d opposition au monde que ses protagonistes Si Bleu presque transparent a franchi le million d exemplaire vendu en six mois et s il a valu le prix Akutagawa Murakami en 1976 c est que ses lecteurs ont trouv dans ce livre une r alit qui les touchait Nul doute que beaucoup se seront reconnu dans la jeunesse d s uvr e de T ky que Murakami y d crit et dans ses diff rentes attaques de la soci t japonaise de l poque Le plus flagrant outre les protagonistes r side certainement dans son traitement des lieux Certains lieux publics comme l h pital sont des caricatures de la soci t japona
19. rme des animaux humains compris morts en putr faction G18 19 G193 B Sexe drogue amp rock n roll Sexe drogue et rock n roll semble tre la devise de la jeunesse d s uvr e de Bleu presque transparent La drogue peut appara tre sous diff rentes formes les drogues douces telles que l alcool la cigarette la marijuana la colle B6 l acide la coca ne G61 les m dicaments d tourn s B7 la mescaline B194 cachets divers et vari s tout semble bon prendre pour s vader de la r alit Les forces de l ordre semblent impuissantes et sans bonne volont remettre de l ordre dans tout cela La drogue fait partie du quotidien et aucun des personnages ne semble envisager la possibilit de l exclure de sa vie l exception de Meil mais tout relativement Mais plus jamais je me d foncerai Pas ce truc qu on avait pris ce jour l en tous cas B124 C est sur fond des Bars B146 des Doors B154 ou encore en voquant le film Woodstock B144 avec les id es plus ou moins embrum es par la drogue que les protagonistes des deux ouvrages se livrent au sexe dans tout ses tats La prostitution est pr sente dans les deux ouvrages les amies de Ry se vendent pour de la drogue Reiko je vais michetonner pour m acheter du cheval B171 2 des cadeaux ou divers autres avantages qu elles obtiennent aupr s des militaires am ricains d sign s comme Les noirs B56 d o la com
20. soci t y est touffant ce manque d identit de l individu est l tal d autant plus pour ceux qui n y trouvent pas leur place comme Ry Ry se compare un soldat un d serteur de l arm e B104 et il est conscient qu il faudra bien qu il se range t t ou tard qu il trouve sa place au sein de cette soci t qui ce que ce soit dans une fosse commune Ce d sire de changer de vie de passer autre chose m me si on ne sait pas toujours pourquoi se retrouve chez d autres personnages comme Meil qui au moment o il exprime ce d sire voit passer une classe de jeune filles bien rang es v tues de noir en toute aust rit La seule qui rompt les rangs et s attarde pour observer Ry et Meil est tr s vite rattrap e par la maitresse et r int gre le bon ordre sans tarder B125 Une fois encore les institutions ont eu raison d un individualisme naissant Moko voque galement les causes de sa d viance selon elle c est la pression familiale et plus particuli rement de son fr re trop s rieux qui a t trop lourde porter C est cause de lui si j ai tourn comme a B143 Excuse d adolescent ou v ritable ph nom ne soci tal l auteur semble avoir tranch Finalement cette jeunesse d s uvr e sait bien qu il faudra qu elle se range commence par trouver du travail comme le montre le leitmotiv de Yoshiyama qui affirme qu il trouvera du travail comme docker Yokohama alors qu i
21. t d autant plus flagrante lorsqu il s agit de la description de la d charge G18 9 animaux putr fi s d composition cadavre suintant fondre ramolli mi liquide mi solide liqu fie jus scarab e puant putridit d composition moisissure ordures humides Le paysage d crit est apocalyptique rappelant les montres molles de Dali dans une image tr s vivace et angoissante le lecteur a l impression de se faire ensevelir sous ce liquide voire de se liqu fier lui m me Tout ceci pr figure l accumulation de fluides qui va ponctuer tout le roman et qui tait d j pr sente dans Bleu presque transparent Ce sont des fluides principalement animaux humains inclus qui font cho la mer qui s pare le narrateur principal de la ville Ces fluides sont rarement isol s et s accumulent en des quantit s largement exag r es Dans Bleu presque transparent un exemple typique r side dans l agression du vigile qui a bless Kazuo lors du concert B130 Il est pass tabac dans les toilettes dont le sol est gluant d urine B131 se vomit dessus de douleur et son sang frais clabousse Cette sc ne se retrouve avec quelques modifications dans La guerre commence au del de la mer lorsque le jeune tailleur est infest de chenilles dont il tente de se d barrasser et prend refuge dans les toilettes publiques G165 Si l agression est animale ce
22. ter malgr tous mes efforts B184 5 Finalement plus rien n est s r qu est ce qui est r alit qu est ce qui fait partie de l imaginaire Tu crois que c est un r ve cette ville demande le narrateur Fuini de lui r pondre Puisqu elle se refl te dans tes yeux c est que tu la vois pour de bon et si tu la vois c est qu elle existe r ellement gt G194 L appareil photo de Kazuo aurait pu aider fixer cette r alit mais la perte de son flash B118 B140 l emp che de le faire Il ne peut voir comprendre et transmettre ce qui l entoure sans cet clairage particulier Plut t que la photographie c est donc un film qui mettra en images la r alit de l auteur et de son protagoniste conform ment au souhait de Ry Dans mon id e a devrait tre un film pareil un miroir g ant o se refl teraient tous les gens qui le regarderaient B96 Murakami produira personnellement un film tir de Bleu presque transparent en 1979 IV CCL Si les th mes de Bleu presque transparent et La guerre comment au del de la mer se recoupent leur traitement diverge lui Il semble que le premier ouvrage soit un avant go t bas sur exp rience autobiographique homonymie du personnage principal Le deuxi me ouvrage semble plus pouss tant dans l exploitation des th mes que dans la conscience de sa propre criture et dans le recours des proc d s litt raires donnant une certaine paisseur au r
23. tte fois le lecteur comprend par les multiples comparaisons ant rieures de la populace une nu e d insectes G19 que la sc ne est m taphorique Dans les toilettes sa chemise est macul e des fluides des chenilles qu il a cras es il est en sang et l urine li e au lieu s ajoute une train e de sperme m l e aux odeurs d alcool sur le mur D o des envies de meurtre et de guerre qui auront t t fait d tre exauc s S il on peut noter une augmentation de ces fluides tant en qualit vari t qu en quantit d un ouvrage l autre l apoth ose se produit la d coupe du poisson dont le sang et la graisse se d versent en flots dans la ville depuis le port et semblent tout recouvrir G119 C La focalisation Murakami va galement plus loin dans l utilisation de la forme au service du fond Il joue sur les focalisations internes de mani re assez d routante pour le lecteur Si l histoire de base se passe sur la plage entre un narrateur sans nom et la jeune femme Fuini avec qui il fait connaissance Murakami op re une mise en ab me et une deuxi me histoire observ e par les protagonistes prend place de l autre c t de la mer La situation est d j complexe mais l auteur ne s arr te pas l Plut t que d avoir recours un narrateur omniscient externe Murakami use et abuse de la focalisation interne alternant sans le moindre indice pour le lecteur les centres de focalisation au d tour d un
24. u m me titre que le personnage est aveugl par tant de lumi re et c est dans ce contexte qu appara t l le remettant en question la r alit et l objectivit des descriptions qui pourront en tre faites tant t noire tant t claire et brillante G11 puis le c t obscur semble l emporter suie sombre corbeaux charbon G15 Comme pour rendre cette description plus vivace encore et ajouter au tournis de l accumulation pr c demment cit e Murakami joint habilement l olfactif au visuel d un jaune naus abond G25 et ajoute au sentiment d inconfort de son lecteur B Ph nom ne d accumulation Cette technique d accumulation est r currente travers La guerre commence au del de la mer Ainsi lorsqu il d crit la foule qui descend dans les rues il voque les individus dans un crescendo du mus e des horreurs un homme ivre une fillette b quilles des aveugles un homme avec une jambe atrophi e un homme dont les jambes tordues forment un n ud rampe un albinos avec une grosse t te enfl e et molle une bossue G169 A des tats passagers ou provisoires Murakami adjoint des mutilations irr versibles ou cong nitales Quels que soient les champs s mantiques en jeu ces accumulations savamment distill es cr ent un r el malaise chez le lecteur qui se sent submerg touff mesure qu il lit Cette impression es
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